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II. Présentation générale de l’expérience de Florence Montreynaud dans sa
lutte contre les publicités sexistes et l’industrie de la pub en général
Florence Montreynaud, historienne et féministe française née en 1948, a lancé en 1999 le
Manifeste des Chiennes de garde et a été la cheffedemeute du mouvement durant de
nombreuses années. Elle a également créé, en 2000, le réseau féministe mixte et
international « La Meute contre la publicité sexiste » ainsi que le réseau mixte et
international « Encore féministes ! » en 2001. Elle est aussi, en 2011, à l’initiative du
« Mouvement masculin international Zéromacho ».
Pour débuter sa présentation, Florence Montreynaud précise que la publicité représente
généralement un point d’entrée à l’engagement féministe car il s’agit d’un espace où les
femmes mais aussi les hommes sont confrontés de manière violente à toutes sortes
d’inégalités à partir desquelles, il est possible, au fur et à mesure, d’en tirer une certaine
forme de pédagogie. Elle rappelle aussi que le rapport de force entre une industrie qui
emploie des milliers de personnes et quelques poignées de militantes est forcément
disproportionné. C’est pourquoi, elle préconise d’être efficace dans les actions à mener
contre les publicités sexistes et souligne l’importance d’un apprentissage du décryptage
des images. Elle évoque également la force de persuasion des images alors même que la
science psychologique ne parvient toujours pas à expliquer les raisons du pourquoi ça
fonctionne. Or, « le fait est que la publicité marche », souligne-t-elle.
En outre, elle décontruit l’argumentaire utilisé la plupart du temps par les publicitaires
pour décrédibiliser la lutte féministe contre les publicités sexistes, à savoir : « Vous
n’avez pas d’humour, c’est du second dégré ». Or, elle rappelle que le second degré
renvoit à un « entre-soi » impliquant d’office une certaine connivence entre personnes
qui partagent une même culture (on rit de quelque chose ou de quelqu’un « entre
nous »), contrairement à la publicité qui s’adresse à tout le monde, et reste donc
nécessairement au 1er degré. L’argument du second degré n’est donc pas valable dans le
cas d’une publicité qui contient des propos/images sexistes.
En termes de bonnes pratiques, elle évoque l’exemple de la Norvège et de la Suède où
l’on ne trouve quasiment aucune publicité sur les bords de routes, compte-tenu du code
urbanistique existant dans ces deux pays et d’une législation plus stricte en la matière
(cf. Loi 2007 « Paix et Femmes »). Or, ces deux pays se portent bien économiquement.
Le lien entre pub et économie n’est donc pas forcément obligatoire.
En même temps, elle rappelle l’existence relativement naissante de la publicité qui,
apparue au 19ème siècle, prendra des générations, voire des siècles, avant que les clichés
sexistes, stéréotypés et stigmatisant contenus dans la pub, puissent être « éradiqués »,
au même titre que la lutte contre le tabagisme. C’est par des actions symboliques, et non
des sanctions, que l’on pourra faire évoluer les mentalités, précise l’experte.
Elle évoque aussi son ambiguïté par rapport à l’exemple du Québec où un Conseil du
Statut des Femmes avait été mis en place pour proposer des Avis et Recommandations
aux Ministres, avec des lignes directrices relativement poussées en matière de lutte
contre le sexisme. Néanmoins, ces initiatives, perçues comme positives au départ, se
sont révélées de moins en moins efficaces au fil du temps. Parmi les initiatives proposées
par ce Conseil, il y avait l’instauration, dans les années 1980, des « Prix d’honneur » et
des « Prix de déshonneur » adressés directement aux marques. Ceci avait notamment
permis de diminuer la présence de publicités sexistes au sein de l’espace public, du fait
de la création de listes noire et blanche auxquels les publicitaires étaient devenus
sensibles au bout d’une dizaine d’années. Deux-trois ans après la disparition de ces prix,
l’experte estime que la situation au Québec a régressé. Quand elle a voulu instaurer un
système similaire en France avec l’instauration des « Prix Bravo » et « Prix Maccho »,
l’initiative n’a pas du tout fonctionné au sens où le résultat final s’est complètement
retourné contre l’idée de départ, à savoir : les publicitaires se félicitaient de recevoir le