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Université populaire de Caen Contre-histoire de la philosophie par Michel Onfray n° 187
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Séminaire du lundi 11 avril 2011 9ème année #17
L'EMPIRIQUE ET LE TRANSCENDANTAL
SYNOPSIS :
1/. DECONSTRUCTIONS
1. Déconstruction de Freud
2. Déconstruction du rituel de la cure
3. Critique de la finalité de la cure
4. Mise en cause doctrinale des concepts majeurs du freudisme
a) Nie l’universalité du complexe d’Œdipe
b) Récuse la nature métapsychologique de l’inconscient
c) Met en cause la théorie des instincts
d) Idem avec la théorie de la sexualité
des traumatismes
des perversions
e) Refuse le caractère biologique de la pulsion de mort
f) Contre les thèses phallocrates :
Envie du pénis chez les filles
Complexe de castration
g) Refuse le pessimisme ontologique
5. Souligne le caractère autobiographique et littéraire de la psychanalyse :
Freud universalise ses désirs
2./ LE CONTEXTE D’ŒDIPE
a. Freud : Totem et tabou : une transmission phylogénétique
Abrégé de psychanalyse : « (sur) l’héritage archaïque, résultat de l’expérience des
aïeux que l’enfant apporte en naissant, avant toute expérience personnelle » (30-31).
b. Fromm : Revoir Freud : Un héritage ontogénétique.
« Le petit garçon, poussé par sa sexualité bourgeonnante, désire sa mère parce qu’elle
est la seule, ou la plus accessible parmi les femmes de l’entourage » (45)
L’enfant aime sa mère car il lui doit :
La vie et la subsistance
L’affection, la tendresse, les nourritures spirituelles
Elle calme ses angoisses, ses peurs, ses craintes
Elle apaise, protège de la violence du monde
L’attachement, le refus de la quitter en procèdent.
Dans une configuration patriarcale
L’enfant retarde le plus possible l’entrée dans la vie sans aide.
3./ L’INCONSCIENT EST SOCIAL
A) CHEZ FREUD :
a) Il se définit négativement :
1. Pas matériel, pas localisable, pas neuronal, pas physique, pas visible
2. Donc : immatériel, incorporel, invisible, imperceptible
3. Défini dans Métapsychologie (XIII.190) comme le refoulé
4. Mais le propre du refoulé est de l’être
5. Donc d’être impossible à voir…
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b) Saisissable de biais par la psychopathologie :
1. Lapsus, actes manqués, rêves, oublis, erreurs…
2. Le Créateur est invisible, mais ses créatures le sont
3. Quel que soit le parcours du patient, on débouche toujours sur Œdipe, la horde, etc
4. Et nous refoulons ceci : horde, meurtre, banquet, etc
B) CHEZ FROMM, dans Grandeur et limites de la pensée freudienne :
Ne récuse pas le mot inconscient mais la chose freudienne
L’inconscient freudien, c’est l’inconscient de Freud.
L’inconscient n’est pas inné, mais acquis
Il est le produit d’un filtrage social dans lequel :
Langage, mœurs, coutumes, interdits sociaux jouent un rôle
L’inconscient s’inscrit dans une histoire individuelle et générale
Si l’inconscient nomme le refoulé
Et que le refoulé est un effet de la société
On doit conclure à une origine sociologique de l’inconscient.
C) L’EMPIRIQUE CONTRE LE TRANSCENDANTAL
a) Chez Freud le transcendantal :
1. La clinique importe peu, seule compte la théorie
2. Utilise les patients comme du matériel utile pour échafauder la théorie
Demande aux patients de confirmer ses thèses qui sont extrapolations
Prétend chercher dans l’empirique ce qu’il trouve de façon transcendantale.
3. Postule de façon performative
Puise dans la littérature, le folklore, la tragédie, la mythologie.
Dans Sophocle, Shakespeare, Michel-Ange, Jensen, le Livre des Morts, etc
4. Les deux topiques relèvent de l’exercice intellectuel, spéculatif, hypothétique,
philosophique
Freud exécrait les philosophes, mais était l’un d’entre eux
Récusait les faiseurs de visions du monde mais a présenté la sienne
Moquait leur mépris du réel, leur goût pour l’idée pure
Leur reprochait l’absence de clinique
Mais Freud a surclassé tous les philosophes dans ces vices…
b) Chez Fromm l’empirique :
1. A propos du matériel conceptuel freudien :
(Topique de l’inconscient, rôle agressif du Surmoi, sa liaison avec la pulsion de
mort, le rôle du Moi dans le processus répressif, etc)
2. Fromm écrit :
« Ces hypothèses ne semblent pas clarifier les phénomènes observables en
clinique. Il s’agit plutôt d’exercices théoriques abstraits qui au mieux affinent
les formulations théoriques et au pire gauchissent l’examen des données
observables qui doivent être nécessairement beaucoup plus nombreuses avant
que cette sorte de théorisation puisse être fructueuse » (59).
D) CONTRE LA LIBIDO TRANSCENDANTALE
a) Fromm critique la théorie freudienne de la libido et des instincts :
1. Elle est inscrite dans un schéma mécaniste prisonnier de son temps
À l’époque, on ignore le pouvoir des hormones et tout de la neurophysiologie
2. Freud est marqué par le modèle thermodynamique :
Accumulation d’une tension,
Production de celle-ci par un déterminisme chimique
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Et décharge accompagnée de plaisir.
3. De même, dans Au-delà du principe de plaisir, la théorie des pulsions de vie/mort
Prégnance du schéma biologique
b) Fromm convoque l’évolutionnisme, les sciences naturelles, la neurobiologie, la
médecine
1. Chez Freud : les traits de caractère relèvent de la libido pré-génitale
Chez Fromm : d’une vaste interaction d’interférences extérieures à l’homme
Qui reste un animal social et non un pur animal libidinal.
2. A la libido biologique freudienne,
Il oppose une énergie sociobiologique :
Un « désir de survivre » (Revoir Freud, 22).
Fromm critique la lecture schématique et abstraite du trajet libidinal :
a) Freud, Trois essais sur la théorie de la sexualité :
1. Une dialectique des stades :
Oral, anal, sadique-anal, génital, phallique
2. Avec fixation sur une zone érogène :
Bouche, anus, sexe
3. Et traits de caractères adéquats :
Cannibalisme, jeu de sphincter, onanisme
4. Et des pathologies associées :
Anorexie/boulimie, avarice, homosexualité, sadisme ; autoérotisme,
narcissisme.
b) Fromm : allégorie littéraire, cartographie spéculative
Y oppose « les aspects très concrets et spécifiques du
comportement sexuel » (68).
Freud et les siens, par pruderie, ont récusé cette sexualité concrète
telle qu’elle apparaît chez Kinsey.
E) REPENSER LES PERVERSIONS
a) Freud, Trois essais sur la théorie de la sexualité (1905) :
1. « Est considéré comme but sexuel normal l’union des organes génitaux dans l’acte
désigné comme accouplement, qui conduit à la résolution de la tension sexuelle et
à l’extinction temporaire de la pulsion sexuelle » (82) .
Schéma thermodynamique et pruderie de son temps
2. Tout ce qui n’est pas « normal » est perversion :
Freud de préciser :
Homosexualité & pédophilie, bisexualité & zoophilie, fellation & nécrophilie,
cunnilingus & sadisme, fétichisme & masochisme, sodomisation &
exhibitionnisme, masturbation & voyeurisme
3. Donc : sexualité entre adultes consentants & pratiques imposées aux enfants, aux
animaux ou aux morts
b) Fromm ne souscrit pas à cette version puritaine, conjugale et bourgeoise de la
sexualité
Dans La passion de détruire, il réduit considérablement l’usage du terme :
« Certains actes sexuels sont caractérisés par le fait que l’un des partenaires
devient l’objet du mépris de l’autre, de son désir de faire souffrir et de
contrôler ; ces actes sexuels sont les seules perversions sexuelles
authentiques ; non pas parce qu’elles ne servent pas à la procréation, mais
parce qu’elles pervertissent une pulsion qui est au service de la vie en faisant
d’elle une pulsion qui étouffe la vie » (295).
La perversion ? Quand Thanatos mène le bal.
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F) UNE PULSION DE MORT CULTURELLE
a) Contre la pulsion de mort freudienne : une cause biologique de la négativité
Fromm : cette pulsion est un effet et non une cause :
Une sécrétion sociale, un produit culturel, une conséquence politique
b) La mort n’habite pas au centre de la vie :
La vie est plus forte que la mort
L’énergie de survie fait naturellement la loi
La force vitale conduit le réel de façon naturelle
c) La pulsion de vie est première
La pulsion de mort secondaire
Elle est « le résultat d’une défaillance dans l’art de vivre, d’une vie qui n’a pas
trouvé son authenticité » (Aimer la vie, 39).
d) On ne naît pas affligé d’une pulsion fatale
On le devient avec le temps, un enchaînement de circonstances, des conditions
particulières
Contre lesquelles on peut lutter
e) Nous sommes naturellement doués d’une pulsion de vie
Et culturellement affligés d’une pulsion de mort.
f) La biologie veut la vie
La sociologie produit la mort
g) « L’individu qui n’a pas la possibilité d’être libre et de s’épanouir, qui mène une
existence rétrécie, qui vit dans une classe ou une société où tout est mécanique,
dépourvu de vie… cet individu perd les facultés de jaillissement » (39).
h) Capitalisme, misère, chômage, pauvreté, régression sociale, familles pathogènes,
parents toxiques, sociétés malades :
Voilà ce qui explique le surgissement de la passion nécrophile.
i) Car « qui n’éprouve pas le bonheur d’être vivant cherche à se venger et préfère
détruire la vie plutôt que de sentir qu’il n'a pas réussi à donner un sens à la sienne. Il
vit certes physiologiquement ; pour ce qui est de l’âme, il est mort » (40).
La passion de détruire devient compulsive
On naît biophile ; on devient nécrophile.
G) PHALLOCRATIE FREUDIENNE & FÉMINISME DE FROMM
a) Phallocratie, misogynie procèdent de la thanatophilie
Thèses de Freud sur « l’envie du pénis » :
Quelques conséquences psychologiques de la différence anatomique entre les
sexes (1925)
« Elle remarque le pénis, visible de manière frappante (sic) et bien
dimensionné (sic), d’un frère ou d’un compagnon de jeu, le reconnaît aussitôt
comme la contrepartie supérieure (sic) de son propre organe, petit et caché, et
elle a dès lors (sic) succombé à l’envie du pénis » (XVII.195)
Puis : « Dans l’instant, son jugement et sa décision sont arrêtés. Elle l’a vu,
sait qu’elle ne l’a pas et veut l’avoir » (XVII.196)…
Sentiment d’infériorité dont elle ne se défera jamais
b) Fromm inverse la perspective
Il défend les thèses de Bachofen sur le matriarcat
Les hommes refoulent leur infériorité qu’est l’incapacité à faire des enfants
Ils compensent en affirmant leur pouvoir et en soumettant les femmes.
H) « LE BESOIN D’IDOLE »
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a) Freud, Psychologie des masses et analyse du moi : « L’homme est un animal de horde,
un être individuel mené par un chef suprême » (60).
Chef de la Horde, Père et Dictateur relèvent d’une même structure psychique
b) Fromm souligne « un besoin d’idole » qui procède du fait que « la plupart des hommes
vivent inconsciemment comme des enfants et désirent s’attacher à une figure puissante
à laquelle ils puissent faire confiance et se vouer corps et âme » (56).
Les hommes connaissent l’angoisse existentielle, la peur de la solitude, la
crainte de la liberté
Ils préfèrent se soumettre à un chef qui les apaise
Rien à voir avec Œdipe…
c) Le sadisme est la religion des ratés
Le besoin de croire touche prioritairement ceux qui accumulent les ratages
Ceux qui réussissent ont moins besoin d’idoles
Les idoles ne manquent pas :
Elles dispensent toutes de penser, de réfléchir, de prendre parti
Idole bureaucratique
Idole du Parti
Idole de l’Église
Idole de l’État
Idole communiste
Idole religieuse
I) LUTTER CONTRE LA THANATOPHILIE
a) Ce que sont les symptômes :
Les mauvais traitements aux enfants,
L’existence de tyrans et de dictateurs,
Le sadisme généralisé,
La folie consumériste,
La passion de la vitesse,
La religion du gadget,
Le culte de la machine,
La passion pour la pornographie,
La destruction de la planète,
L’arme nucléaire,
La prolifération des guerres,
L’accroissement de la pollution,
La banalisation de la drogue,
Le mépris des valeurs éthiques,
La décadence culturelle,
Le nihilisme spirituel,
La schizophrénie exemplifiée,
L’approche purement cérébrale du monde,
L’intersubjectivité autiste,
La dépression chronique,
Le pouvoir terrifiant des medias,
etc.
b) Comment on peut lutter :
Souscrire et soutenir les jeunes et leurs valeurs hippies
Leurs valeurs sont biophiles et positives
Cette jeunesse s’oppose à l’autorité
Et à des millénaires de culpabilité ?
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