Version 1 décembre 2013 LE DEVELOPPEMENT DURABLE DANS LES MARCHES PUBLICS L’INSERTION DE CRITERES SOCIAUX Astride MIANKENDA Cellule Conseil et Politique d’Achats 1er décembre 2013 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION .................................................................................................. 6 I. ACHETER SOCIAL: PRINCIPAUX ENJEUX ..................................................... 7 1. 2. 3. 4. II. Les appels d’offres publics avec clauses de responsabilité sociale: définition ...... 7 Avantages potentiels des marchés publics "sociaux" ....................................... 8 Marchés publics "sociaux" et modèle européen .............................................. 9 Approche légale et politique des marchés publics avec clause de responsabilité sociale dans l’UE ........................................................................................ 9 STRATEGIE D’ORGANISATION POUR ACHETER SOCIAL ............................ 12 1. Définir les objectifs des marchés publics "sociaux" ........................................12 2. Engagement politique de haut niveau et leadership en matière de marchés publics "sociaux" ......................................................................................12 3. Mesure des risques et établissement de priorités dans les dépenses pour améliorer les résultats sociaux ...................................................................12 4. Augmenter la sensibilisation aux marchés publics "sociaux" et impliquer les principaux acteurs ....................................................................................13 5. Mettre en œuvre une stratégie de marchés publics sociaux" ...........................14 6. Mesurer la mise en œuvre effective .............................................................15 7. Processus de passation des marchés ...........................................................15 8. Approche des marchés publics "sociaux" ......................................................16 III. IDENTIFICATION DES BESOINS ET PLANIFICATION DES MARCHES ......... 18 1. Importance de l’évaluation des besoins réels ................................................18 2. Définir l’objet ...........................................................................................18 3. Améliorer l’accès aux marchés publics .........................................................19 IV. LE MARCHE ............................................................................................... 21 A. Définition des exigences du marché ..................................................... 21 1. 2. 3. 4. 5. Etablir les spécifications techniques.............................................................21 Spécifications fondées sur les performances ou spécifications fonctionnelles .....22 Utilisation des variantes.............................................................................22 Labels sociaux et incidences sur le commerce équitable .................................23 Prise en compte de préoccupations sociales dans les méthodes de production et de traitement ...........................................................................................23 6. Handicaps et spécifications techniques ........................................................24 B. Sélection des fournisseurs et des prestataires de services ................... 25 1. Critères d’exclusion ...................................................................................25 2. Capacité technique ...................................................................................27 C. Attribution du marché........................................................................... 28 1. Règles générales d’élaboration des critères d’attribution et d’attribution du marché ....................................................................................................28 2. Gestion des offres anormalement basses .....................................................32 3. Information aux soumissionnaires écartés ...................................................32 2 D. Exécution du marché ............................................................................ 33 1. 2. 3. 4. 5. Règles pour l’exécution du marché ..............................................................33 Exemples issus du considérant 33 de la Directive 2004/18/CE ........................34 Conformité au droit national du travail ........................................................35 Gestion de la chaîne d’approvisionnement ....................................................36 Gestion des marchés et contrôle de la conformité .........................................36 E. Un exemple concret .............................................................................. 37 CONCLUSION ............................................................................................ 48 3 Avertissement Le premier volet était consacré aux marchés publics intégrant des critères écologiques, le deuxième volet sera consacré aux marchés publics intégrant des clauses sociales. Les aspects "clauses éthiques, commerce équitable, accessibilité pour tous et marchés réservés" seront plus amplement développés dans le troisième volet du manuel. Il y a lieu de nuancer les termes "aspects sociaux": en général ces mots recouvrent des notions variées sans trop opérer de distinction entre ce que l’on pourrait qualifier d’aspects socio-économiques, à savoir le fait de permettre via les marchés publics de réinsérer dans le monde du travail des catégories de personnes défavorisées au niveau économique (chômeurs de longue durée, chômeurs âgés, jeunes chômeurs, chômeurs peu qualifiés, …) et d’autres aspects qui touchent à la morale et à l’éthique (intégration des personnes handicapées dans le monde du travail, égalité hommes/femmes, interdiction de la discrimination sur base de la race et de la religion ou des préférences sexuelles, accessibilité à tous, …). Le présent texte ne s’attache qu’aux aspects purement socio-économiques qui doivent, semble-t-il comprendre un aspect supplémentaire, également socio-économique par rapport à ce qui est repris ci-dessus, à savoir l’implication des petites et moyennes entreprises dans le processus des marchés publics. Cette préoccupation est plus récente et sera évoquée plus loin. Il faut également souligner que le "niveau social", à savoir la protection des droits sociaux des travailleurs n’est vraisemblablement pas identique dans les différents pays de l’actuelle Union européenne. Le but n’est pas ici de comparer les niveaux de protection sociale existant dans les divers Etats membres. Il est toutefois intéressant de rappeler que la réglementation belge relative aux marchés publics inclut des dispositions en matière de protection sociale. Il s’agit des articles 43bis (fournitures) et 69bis (services) de l’arrêté royal du 8 janvier 1996. Le texte est rédigé comme suit: "Le fournisseur(ou le prestataire de services) belge employant du personnel assujetti à la loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs doit joindre à sa demande de participation en procédure restreinte ou négociée ou à son offre en procédure ouverte, ou produire au pouvoir adjudicateur, avant la date limite de réception des demandes de participation ou avant la date limite de réception des offres, selon le cas, une attestation de l’Office national de Sécurité sociale dont il résulte qu’il est en règle en matière de cotisations de sécurité sociale". En ce qui concerne la sécurité sur les chantiers, l’article 30 du Cahier général des charges, annexe à l’arrêté royal du 26 septembre 1996 stipule ce qui suit: "§ 1er – L’entrepreneur est tenu d’assurer la police du chantier pendant la durée des travaux et de prendre, dans l’intérêt tant de ses préposés que des agents du pouvoir adjudicateur et des tiers, toutes les mesures requises en vue de garantir leur sécurité. 4 Il se conforme aux dispositions légales et réglementaires régissant notamment la bâtisse, la voirie, l’hygiène, la protection du travail, ainsi qu’aux dispositions des conventions collectives, nationales, régionales, locales ou d’entreprises". Cette première partie du deuxième volet est une synthèse commentée du "Guide sur les appels d’offres publics avec clauses de responsabilité sociale" publié début 2011 par la Commission européenne (Luxembourg, Office des publications de l’Union européenne) ou du moins des parties du guide traitant des aspects sociaux (économiques) dans les marchés publics. ACHETER SOCIAL: UN GUIDE SUR LES APPELS D’OFFRES AVEC CLAUSES DE RESPONSABILITE SOCIALE La présente version présente également un exemple concret de promotion de l'insertion de clauses sociales dans les marchés (voir IV. Le marché, point E). 5 INTRODUCTION La finalité des marchés publics comprenant des clauses de responsabilité sociale est de faire évoluer les pratiques du marché en incitant les entreprises à pratiquer une gestion socialement responsable. Les domaines visés sont les suivants: les possibilités d’emploi, un travail décent, l’inclusion sociale, l’accessibilité, la conception pour tous, le commerce équitable et un meilleur respect des normes sociales. L’importance de l’impact dépend de la part de marché économique représentée par les travaux, les fournitures ou les services en question. Ceci implique donc également un impact sur le développement durable. Au niveau des marchés publics, la base juridique se trouve dans la Directive 2004/18/CE (pour les secteurs classiques). Celle-ci prévoit que les aspects sociaux peuvent être pris en compte dans les marchés publics dans la mesure où ils sont liés à l’objet du marché, proportionnés à ses exigences, que le principe de l’offre la plus avantageuse soit respecté ainsi que l’égalité d’accès pour tous les opérateurs de l’Union Européenne. Les sources, quant à elles, se trouvent dans la jurisprudence de la Cour de Justice de l’union européenne, dans une Communication interprétative de l’Union européenne de 2001 et dans une Etude de la Commission européenne de 2003. 6 I. ACHETER SOCIAL: PRINCIPAUX ENJEUX 1. Les appels d’offres publics avec clauses de responsabilité sociale: définition 1.1. Il s’agit de marchés publics qui prennent en compte un ou plusieurs aspects sociaux suivants: les possibilités d’emploi, un travail décent, le respect des droits sociaux et du travail, l’inclusion sociale (notamment des personnes handicapées), égalité des chances, accessibilité, conception pour tous, prise en compte des critères de durabilité notamment des questions de commerce équitable, plus grand respect volontaire de la responsabilité sociale des entreprises, le tout dans le respect des directives marchés publics et des principes du Traité. Pour une approche intégrée des marchés, il est possible d’associer aspects sociaux et environnementaux. 1.2. Ci-dessous figure une liste non exhaustive d’aspects sociaux qui peuvent être pris en compte, mais pour certains, cela ne pourra se faire qu’à certaines étapes bien précises d’un marché (par exemple: les conditions de travail dans les clauses d’exécution, les questions d’accessibilité dans les spécifications techniques) ce qui signifie qu’il faudra décider au cas par cas en fonction de l’objet du marché et des buts poursuivis. Les différents aspects repris dans la liste sont suivis de quelques exemples: - Possibilités d’emploi: promotion de l’emploi des jeunes, représentation équilibrée hommes/femmes dans les deux sens (et aussi équilibre vie privée/vie professionnelle), promotion de l’emploi pour les chômeurs de longue durée et pour les travailleurs âgés, promotion de la diversité et promotion de l’emploi pour des catégories moins favorisées (migrants, minorités ethniques et religieuses, personnes à faible niveau d’études, …), promotion de l’emploi pour les personnes handicapées (environnement de travail). - Travail décent: ce concept universel signifie que toutes les personnes ont le droit d’avoir un emploi productif dans la liberté, l’égalité, la sécurité et le respect de la dignité humaine. Ce programme se base sur quatre piliers: droit à un travail productif librement choisi, principes et droits fondamentaux au travail, emploi assurant un revenu décent, protection sociale et dialogue social (égalité hommes/femmes et non-discrimination sont ici des questions transversales). Les aspects importants en ce qui concerne les marchés publics sont: le respect des normes fondamentales du travail (les huit conventions de l’OIT), un salaire décent, la santé et la sécurité au travail, le dialogue social, l’accès à la formation, l’égalité hommes/femmes et la non-discrimination, une protection sociale minimale (cf. ce qui est dit plus haut relativement au respect des obligations en matière de sécurité sociale). 7 - Respect des droits sociaux et du travail, notamment la législation nationale et les conventions collectives conformes au droit communautaire, l’égalité de travail hommes/femmes (y compris l’égalité de salaire à travail égal et la promotion de l’égalité hommes/femmes), la législation sur la santé et la sécurité au travail, la lutte contre les autres discriminations (âge, handicap, origine raciale, religion ou convictions, orientation sexuelle, …) et la promotion de l’égalité des chances. - Inclusion sociale et promotion des organisations sociales, notamment l’égalité d’accès aux marchés publics pour les entreprises dont les propriétaires ou les employés appartiennent à des minorités ethniques ou autres (coopératives, entreprises sociales, ASBL, …), l’emploi des personnes handicapées, également sur le marché du travail ouvert. - Accessibilité et conception pour tous: rendre obligatoire des spécifications techniques qui assurent l’accès à tous, par exemple les personnes handicapées dans différents domaines (services publics, édifices publics, transports publics, information et communication publiques y compris le Web). - Engagement volontaire pour la responsabilité sociale des entreprises, ceci signifie que les entreprises vont volontairement plus loin que ce qui est exigé par la réglementation en ce qui concerne l’environnement et le social dans leurs activités quotidiennes: encourager les contractants dans le sens de la responsabilité sociale des entreprises. - Respect des droits de l’homme et protection contre les violations - Promotion des PME dans la mesure où elles sont concernées par ce qui précède: favoriser l’accès des PME aux marchés publics en réduisant le coût et/ou la charge des marchés publics "sociaux", par exemple, donner suffisamment de temps pour l’offre s’il s’agit d’un marché de grande taille, effectuer les paiements à temps, prévoir des exigences économique et de qualification proportionnées. Remarque: les objectifs de politique sociale ne sont pas du même ordre au sein de l’Union et au sein des différents Etats membres. 2. Avantages potentiels des marchés publics "sociaux" 2.1. Incitant au respect des engagements nationaux et internationaux pour le développement social, renforcer mutuellement les aspects économiques et sociaux. 2.2. Stimulant à la responsabilité sociale des marchés: étendre les marchés existants ou en créer de nouveaux (modèles pour les autres consommateurs), économies d’échelle, stimulation de l’innovation et de 8 la concurrence avec pour résultat une amélioration de la qualité et une diminution des prix (par exemple: produits adaptés aux différents handicaps). 2.3. Gouvernance de la responsabilité sociale: les marchés publics "sociaux" relèvent d’une telle gouvernance (impact de l’opinion publique). Ceci dépasse bien entendu les responsabilités de l’acheteur dans le cadre de sa mission. 2.4. Stimulation de l’intégration: importance de l’intervention publique. 2.5. Rationalisation des dépenses publiques. 3. Marchés publics "sociaux" et modèle européen 3.1. • Avantage: diffusion du modèle européen qui implique d’associer la croissance économique durable à l’amélioration des conditions de vie et de travail. • But: une économie prospère qui intègre des normes sociales spécifiques (emplois de qualité, égalité des chances, nondiscrimination, protection sociale pour tous, inclusion sociale, dialogue social, relations industrielles de qualité et implication de tous ceux qui sont concernés dans les décisions). • Promotion du meilleur rapport qualité/prix et de l’innovation. 3.2. Progrès économique et cohésion sociale sont les piliers complémentaires du développement durable. 3.3. Intérêt croissant de l’UE pour les droits sociaux et l’égalité (surtout sur le lieu du travail): le développement durable a dépassé l’aspect environnemental et inclut l’aspect social. 4. Approche légale et politique des marchés publics avec clause de responsabilité sociale dans l’UE 4.1. Développement de la dimension sociale des politiques et législations communautaires Au cours des vingt dernières années, l’UE a fortement développé sa politique sociale. Les marchés publics "sociaux" constituent un instrument de diffusion de cette politique à côté des mesures proprement dites qui sont prises en la matière. Des guides sectoriels (restauration collective, nettoyage, sécurité privée et secteur textile) existent, mais d’une part, ils sont l’œuvre de partenaires sociaux, et d’autre part, ils ne sont plus conformes au cadre juridique communautaire actuel. 9 4.2. Approche légale et juridique des marchés publics "sociaux" dans l’UE Evolution: - Communication interprétative de la Commission européenne du 15 octobre 2001. - Arrêts Concordia Bus (CJUE 17 septembre 2002) et Wienstrom (CJUE 4 décembre 2003). - Directives 2004/17/CE (secteurs spéciaux) et 2004/18/CE (secteurs classiques) qui déterminent la façon de prendre en compte des considérations sociales dans les marchés publics (spécifications techniques, critères de sélection, critères d’attribution et clauses d’exclusion). Une disposition particulière relative aux ateliers protégés y figure également. Certains pouvoirs adjudicateurs ont mis sur pied une politique de marchés publics "sociaux" qui s’applique aux marchés non couverts par la directive (marchés sous les seuils européens et marchés de l’annexe IIB). Ceci pourrait constituer une piste intéressante, mais même si les "petits" marchés sont nombreux et représentent un important volume financier, force est de constater que les "gros" marchés, échappent à cette politique, je pense à de gros travaux d’infrastructure, par exemple, qui constitueraient une occasion idéale pour intégrer des travailleurs sans emploi, peu qualifiés, … Il serait toutefois souhaitable de promouvoir cette possibilité au niveau de la politique d’achats. Ces marchés, même s’ils ne sont pas soumis aux directives, doivent néanmoins respecter les règles du Traité (égalité de traitement, transparence, libre circulation des marchandises et libre prestation des services et liberté d’établissement). Ceci a été confirmé par la jurisprudence de la Cour de Justice (arrêt Teleaustria CJUE 7 décembre 2000). Il va sans dire que, pour de tels marchés, les pouvoirs adjudicateurs sont libres de leur appliquer les règles édictées par les directives. Le Guide "Acheter social" ne s’attache qu’aux marchés qui entrent entièrement dans le champ d’application des directives. 4.3. Services sociaux d’intérêt économique national: ces services ne sont pas spécifiquement abordés dans le Guide "Acheter social". 4.4. Les petites et moyennes entreprises (à but lucratif et non lucratif) La charge administrative représentée par les marchés publics est fort lourde pour les PME, ceci est également le cas en matière de clauses sociales, que ces PME soumissionnent directement ou qu’elles 10 interviennent en tant que sous-traitants, à qui l’adjudicataire a transféré ses obligations en matière de clauses sociales. Les pouvoirs adjudicateurs doivent être conscients de cet état de choses et aussi du fait que certaines PME se positionneront mieux que d’autres dans ce domaine. 11 II. STRATEGIE D’ORGANISATION POUR ACHETER SOCIAL 1. Définir les objectifs des marchés publics "sociaux" Ces objectifs peuvent refléter des priorités sociales nationales, régionales ou locales, en veillant toutefois à ne pas favoriser les produits nationaux, régionaux ou locaux (le Guide ne donne pas de pistes pour réaliser cet objectif sans faire de discrimination). Exemples: - La France met l’accent au niveau du développement durable sur le rôle d’exemple de l’Etat. - En Grande-Bretagne, l’obligation d’égalité entre les hommes et les femmes est entrée en vigueur en avril 2007. Des lignes directrices ont été élaborées pour encourager le secteur public à promouvoir les bonnes pratiques en matière de diversité et d’égalité des rémunérations chez les contractants du dit secteur. 2. Engagement politique de haut niveau et leadership en matière de marchés publics "sociaux" A nouveau ici, on se trouve à un niveau qui échappe complètement à la sphère de compétence de ceux qui sont chargés de réaliser les marchés publics. 3. Mesure des risques et établissement de priorités dans les dépenses pour améliorer les résultats sociaux Suggestions: - Approche progressive en optant pour débuter pour une gamme réduite de produits et de services qui ont un impact social clair, qui sont aisément accessibles et pas plus onéreux (marchés qui peuvent être exécutés par des travailleurs plus vulnérables). A cet effet, on peut, comme en Suède, intégrer l’impact social dans l’étude de marché. - Vérifier que les spécifications du marché n’ont pas un impact social négatif ou réserver des marchés adaptés, par exemple aux ateliers protégés. - Disponibilité et coût des solutions sociales et conformités aux règles des marchés publics (manières plus sociales d’atteindre les objectifs du pouvoir adjudicateur, conformité aux exigences du pouvoir adjudicateur, moyens pour les mettre en œuvre, coûts supplémentaires éventuels, effets restrictifs potentiels sur la concurrence). - Disponibilité des données, difficultés pour l’aspect technique et la formulation dans le cahier spécial des charges. 12 - Capacité du pouvoir adjudicateur à mettre en œuvre un tel programme fonctionnel et efficace. - Autres solutions que les marchés publics pour appliquer une politique sociale: ceci sort bien évidemment du cadre des marchés publics. - Visibilité pour le public et le personnel (exemple: opter pour du café équitable dans les cafétérias). - Choisir des services nouveaux plutôt que de chercher à modifier le cadre de secteurs plus traditionnels. Il peut être utile pour guider les pouvoirs adjudicateurs de créer un point de contact spécialisé (comme à Angers en France) ou de créer des outils d’aide (comme au Royaume-Uni). Commentaires à propos des suggestions qui précèdent: elles sont certainement judicieuses mais outre le fait qu’elles couvrent un large éventail de clauses dites "sociales" sans bien opérer de distinctions, elles présentent l’inconvénient de ne pas donner une ligne directrice claire directement utilisable par les acheteurs sur le terrain. Certaines sortent même du champ d’action de ces acheteurs. 4. Augmenter la sensibilisation aux marchés publics "sociaux" et impliquer les principaux acteurs Les acteurs dont il faut organiser la sensibilisation sont les gouvernements centraux, régionaux ou locaux, les fournisseurs ou prestataires de services potentiels, les organisations d’employeurs et les syndicats. Il faut également communiquer valablement à propos des avantages, des bonnes pratiques et des exemples de réussite, en ce sens, un partenariat est souhaitable. Ici, également il est difficile de distinguer ce qui relève d’une politique "sociale" voulue au niveau supérieur ou de la compétence des services d’achats. Par contre, les exemples qui suivent entrent parfaitement dans les possibilités d’actions de services d’achats organisés. Il s’agit par exemple de centrales d’achats ou de services d’achats dont le volume de marchés est important. Ce type de services acheteurs est à même de développer une "politique d’achats" organisée. Il faut également souligner que, parmi les exemples cités, certains sont déjà mis en pratique au niveau belge: division des marchés en lots sur une base géographique (pratiqué par la cellule CMS pour certains marchés, à l’exemple de ce qui se faisait antérieurement au BFA), travail en réseau au niveau des acheteurs (politique d’achats fédérale à l’instigation des cellules CMS et CPA). 13 Exemples: - Information des soumissionnaires potentiels avant le lancement du marché (Suède). - Consultation en ligne au sujet de la participation des PME aux marchés publics, formation des fournisseurs et simplification maximale des cahiers spéciaux des charges à l’intention des PME et division des marchés en lots éventuellement sur une base géographique (Danemark). - Travail en réseau au niveau des acheteurs. 5. Mettre en œuvre une stratégie de marchés publics sociaux" Il s’agit de l’approche et des mesures à prendre, et dans ce cadre, certains facteurs sont essentiels: le cadre juridique et réglementaire, le cadre institutionnel, la structure de direction, la disponibilité des capacités professionnelles et des ressources, une approche adaptée aux particularités de chaque secteur et une implication des acteurs concernés. Ceci appelle une remarque: le cadre juridique et réglementaire de nos marchés publics étant strictement dépendant du cadre juridique et réglementaire imposé par les Directives européennes en la matière, c’est bien évidemment à ce niveau que les modifications permettant d’intégrer des clauses sociales devraient être implémentées, tout comme cela a été le cas pour les clauses écologiques. Cette mise en œuvre implique de: - Détailler les responsabilités et les buts visés avec un calendrier réaliste, la structure de gestion, les ressources professionnelles et financières et les indicateurs de suivi. - Créer un groupe de travail, élaborer un plan d’action, implications au niveau politique et budgétaire. - Elaborer des programmes de formation, procéder à un partage des bonnes pratiques, assurer une mise à disposition des compétences (à spécifier par exemple dans les critères de sélection des candidats) et une mise à disposition des informations sur ce qui existe au niveau national et communautaire. - Prévoir une formation du personnel: juridique, financière et sociale pour qu’il soit en mesure de décider quand et dans quelle mesure introduire des clauses sociales, si elles sont adaptées aux priorités du pouvoir adjudicateur en la matière et si elles sont définies de façon telle à obtenir le meilleur rapport qualité/prix. 14 Une question se pose ici: où trouver les compétences nécessaires pour assurer ces formations, sans parler des moyens matériels et financiers? 6. Mesurer la mise en œuvre effective Cette mesure permettra d’évaluer les résultats par rapports aux buts qui ont été déterminés et aux normes qui ont été fixées pour l’exécution. Cette mesure nécessite des moyens de contrôle interne (rapports spécifiques, audits internes et sanctions éventuelles) et des moyens de contrôle externes (audit indépendant, études comparatives par rapport à des résultats antérieurs ou par rapport aux résultats d’autres entités). Il y aura lieu d’assurer une publication des résultats et une utilisation de ceuxci en vue d’améliorer la situation au niveau des objectifs et des procédures. En ce qui concerne le monitoring, il est clair que prendre des mesures dans n’importe quel domaine implique de pouvoir mesurer leur impact, faute de quoi il se pourrait bien qu’on réalise une dépense en temps, en travail et en argent inutile. La question du monitoring a toujours été délicate. Il faut en effet être sûr de disposer de données significatives. Le projet de circulaire PO/DD/2 qui devra remplacer la circulaire PO/DD/1 envisage un monitoring. Ce projet devra toutefois recevoir l’approbation du Budget et du Conseil des Ministres avant de pouvoir être publié. 7. Processus de passation des marchés Deux principes importants doivent être respectés: - Arriver au meilleur rapport qualité/prix: le pouvoir adjudicateur ne doit donc pas choisir l’offre la moins chère, mais bien la meilleure offre en fonction des critères qu’il a déterminés: qualité, coût du cycle de vie, … Cette notion peut aussi intégrer des aspects sociaux. Commentaire: ceci n’est évidemment pas valable pour les marchés passés par adjudication publique ou restreinte, mais, dans ce cas, ce sera au pouvoir adjudicateur d’intégrer ses exigences en matière de développement durable dans les spécifications techniques et dans les conditions d’exécution (ce dernier endroit étant indiqué pour l’intégration de clauses sociales). - Assurer un traitement équitable: en respectant les principes du marché intérieur dont, très important, l’égalité de traitement (tous les opérateurs économiques doivent avoir les mêmes chances d’accès au marché, donc également les PME, les entreprises d’économie sociale par exemple). L’application de ce principe entraîne également le respect du principe de transparence. 15 Il faut souligner que la difficulté pourrait résider ici dans le fait que les entreprises d’économie sociale et, sans doute dans une moindre mesure, les PME, manquent de visibilité sur le marché. Cela entraînera donc pour les pouvoirs adjudicateurs une étude de marché plus lourde à réaliser. - Exemples dans les directives: a) Égalité de traitement: délais d’introduction des offres et des candidatures, spécifications, interdiction de la discrimination à l’égard des opérateurs économiques issus des autres Etats membres. b) Transparence: publication des avis, devoir d’information à l’égard des soumissionnaires non retenus. 7.1. Importance d’un avis juridique afin de déterminer, dès le début d’un plan d’action en matière de "marchés publics sociaux", où et comment dans le cahier spécial des charges, prendre la durabilité et les considérations sociales en compte. 7.2. Préparation de la procédure: avant de lancer la procédure, le pouvoir adjudicateur doit définir l’objet du marché et les moyens qu’il va utiliser pour atteindre le but qu’il s’est fixé. C’est le moment adéquat pour voir quels sont les aspects sociaux pertinents qu’il pourra prendre en compte. 8. Approche des marchés publics "sociaux" Quatre approches de base peuvent être distinguées: 1. Décider d’intégrer des critères sociaux dans l’objet du marché et/ou dans les spécifications techniques (par exemple accessibilité d’un équipement informatique). A remarquer que ceci ne concerne pas les clauses que je qualifie de "socio-économiques". Il semble bien, en effet, que, pour cellesci, la seule possibilité d’insertion dans les cahiers spéciaux des charges réside dans les conditions d’exécution. 2. Exclure certains soumissionnaires des marchés lorsqu’ils ont été reconnus coupables d’actions fautives dans le passé. 3. Pousser les soumissionnaires à respecter certaines normes sociales et en tenir compte pour l’attribution du marché (par exemple en mettant des critères sociaux dans les critères d’attribution). En phase d’exécution du marché, les conditions d’exécution peuvent inclure des aspects sociaux, les soumissionnaires ne sont pas évalués sur ce point, mais s’engagent à respecter les conditions. En ce qui concerne la prise en compte d’aspects sociaux dans les critères d’attribution, voir ce qui est dit ci-dessus. De plus, la question se posera toujours du lien indispensable avec l’objet du marché. 16 4. Ces quatre approches peuvent être combinées. 5. Exemple: Gouvernement du pays basque. Ce gouvernement a rédigé une instruction afin que les administrations et entités publiques tiennent compte, dans leurs marchés publics, d’aspects environnementaux et sociaux. Cette instruction prévoit: - Une évaluation et un suivi sur la rédaction des spécifications et sur leur mode d’application lors de l’attribution et de l’exécution du marché. - Des spécifications techniques: exigences d’accessibilité et de conception pour tous. - Des critères d’attribution: dans les procédures multicritères, obligation de fournir des produits et des services adaptés aux personnes handicapées (si on va plus loin que ce qui est exigé par la réglementation). Pour les marchés dont l’objet porte sur des services destinés à des groupes défavorisés, leurs besoins sociaux doivent figurer dans les critères d’attribution. Ceci illustre bien une remarque déjà faite plus haut, à savoir que les recommandations de la Commission européenne reprises dans ce guide constituent bien souvent des recommandations au niveau des décisions politiques plus que des outils au service des acheteurs. - Clauses d’exécution: promotion de l’emploi pour les groupes défavorisés, égalité des sexes sur le marché du travail, lutte contre le chômage. Par exemple, le personnel qui exécute le marché doit comprendre un pourcentage déterminé de personnes défavorisées (chômeurs, personnes handicapées, jeunes chômeurs, …), une garantie au cours de l’exécution du marché du respect des normes fondamentales de l’OIT tout au long de la chaîne d’approvisionnement, l’assurance de santé et sécurité lors de l’exécution des marchés pour les travaux et les services. 17 III. IDENTIFICATION DES BESOINS ET PLANIFICATION DES MARCHES 1. Importance de l’évaluation des besoins réels Un exemple: un pouvoir adjudicateur doit lancer un marché pour communiquer des informations au public, il y aurait dès lors lieu de choisir une solution qui soit accessible à tous. C’est donc à ce moment que le pouvoir adjudicateur peut voir quelles sont les considérations sociales qui peuvent figurer dans le marché. Les conditions à respecter, qui sont valables tant pour les décideurs que pour les praticiens: - Chercher à promouvoir les considérations sociales. - Vérifier que ces conditions sociales soient bien liées à l’objet du marché. - Se centrer sur les résultats recherchés. - Assurer la flexibilité afin de permettre l’adaptation des exigences pendant la réalisation du projet (prévoir les modifications dans le cahier spécial des charges en respectant la Directive et la réglementation nationale). - Bien identifier les besoins de toutes les catégories d’utilisateurs. Ce qui précède induit bien évidemment que, dans le cas où l’on souhaite intégrer une dimension sociale dans un marché public, il faut le faire dès l’étude de marché. 2. Définir l’objet "L’objet d’un marché désigne le produit, le service ou les travaux que le pouvoir adjudicateur souhaite acquérir". Les pouvoirs adjudicateurs sont libres de choisir l’objet du marché par exemple des produits ou des services respectant des considérations sociales si celles-ci sont liées à l’objet du marché (qui est constitué par les produits ou les services en question). Commentaire: comment peut-on, par exemple, dans un marché de nettoyage de locaux (type de marché de services particulièrement bien adapté à l’insertion de clauses "socio-économiques"), décider que l’objet du marché est "social", est-il suffisant de citer cette considération dans la définition de l’objet du marché? Aucune réponse claire n’est donnée à ce sujet. Il existe cependant une limite qui est de ne pas entraver la libre concurrence, la libre circulation des biens et la libre prestation des services. Ceci s’applique également aux marchés n’atteignant pas les seuils européens et aux marchés non couverts par la directive. 18 Une autre limite (voir chapitre suivant) est que les spécifications techniques ne peuvent pas être discriminatoires et doivent être liées à l’objet du marché. Il faut être conscient que toutes ces limites risquent d’effrayer les acheteurs qui, par crainte de commettre des erreurs, pourraient préférer ne pas insérer de clauses sociales. Enfin les législations communautaire et nationale (pour celle-ci, elle doit être conforme au droit communautaire également dans le domaine social) doivent également être respectées. 3. Améliorer l’accès aux marchés publics 3.1. Améliorer l’accès aux marchés publics Certaines catégories d’opérateurs économiques ont plus de problèmes pour accéder aux marchés publics (par exemple les PME). Les pouvoirs adjudicateurs peuvent tenter d’améliorer les choses, mais la discrimination positive est interdite (sauf l’exception des marchés réservés autorisée par la directive). On rencontre ici une autre préoccupation socio-économique, à savoir l’accès aux marchés publics de petites entreprises (non seulement les entreprises d’insertion sociale ou les ateliers protégés, mais les PME en général). Comme dit plus haut, une judicieuse division en lots pourrait, pour certains marchés, constituer une solution adéquate: - cette division peut être envisagée au niveau géographique: des lots plus petits ou plus accessibles géographiquement peuvent intéresser de plus petites entreprises - elle peut également être envisagée en "spécialisant" les lots, par exemple, pour la fourniture de divers matériels, constituer des lots par type de matériel demandé pourrait permettre à des entreprises spécialisées de plus petite taille d’avoir une possibilité d’accéder au marché. Il faut donc assurer les mêmes chances à tous. Autorisé: - Encourager la diversité et l’égalité dans la sous-traitance (attention, ici également, pas de discrimination positive et ne pas, par exemple, exiger un certain pourcentage de PME dans les soustraitants). La nuance est importante, mais se pose la question de savoir comment encourager les adjudicataires à travailler en soustraitance de préférence avec des PME? 19 - Publier des plans à long terme pour les marchés volumineux. - Organiser des rencontres ouvertes à tous pour expliquer les besoins et la politique et donc favoriser la transparence et l’accessibilité. - Aider les entreprises et donner des indications sur les processus de passation des marchés. - Diviser les marchés en lots (attention pas dans le but d’échapper au champ d’application des directives) d’un point de vue quantitatif ET qualitatif (voir le commentaire plus haut à ce sujet). Non autorisé: - Réserver le marché à une catégorie particulière d’entreprises (sauf les "marchés réservés" ou des cas prévus par la législation nationale si elle est compatible avec le droit communautaire). - Limiter la concurrence au niveau géographique, mais il est par contre permis d’exiger de l’adjudicataire qu’il établisse un bureau dans une certaine zone si cela joue sur la bonne exécution du marché. Exemples: - Royaume-Uni: la Greater London Authority a opté pour un programme qui comprend entre autres la révision des procédures de passation des marchés pour faciliter l’accès et un soutien aux entreprises. - Irlande: le programme "Go-Tender" d’InterTrade Ireland encourage la participation aux marchés transfrontaliers dans l’île en organisant des ateliers pour faire connaître aux PME le marché du secteur public, leur fournir les compétences nécessaires et leur assurer un soutien. - France: la règle générale est la division en lots. Les exceptions sont les suivantes: limitation de la concurrence, augmentation des difficultés techniques, augmentation des coûts d’exécution du marché, impossibilité pour le pouvoir adjudicateur de coordonner l’exécution du marché. Une fois de plus, les exemples fournis sont des exemples de mesures "venant d’en haut". 3.2. Cas particuliers: les ateliers protégés Pour mémoire: le sujet sera traité dans le troisième volet du manuel. 20 IV. LE MARCHE A. Définition des exigences du marché 1. Etablir les spécifications techniques Après avoir défini l’objet du marché, il y a lieu d’en établir les spécifications techniques. Celles-ci doivent être mesurables, détaillées et pouvoir être utilisées dans une procédure de marchés publics. Les fonctions des spécifications techniques sont les suivantes: - Décrire les exigences du pouvoir adjudicateur afin de permettre aux soumissionnaires potentiels de vérifier si le marché les intéresse. - Fournir des exigences mesurables qui seront utilisées pour la comparaison des offres. - Etablir des critères de conformité minimaux: les spécifications techniques doivent donc être claires et correctes. Elles doivent être formulées dès le départ de manière précise. Les spécifications techniques doivent être liées à l’objet du marché. Ceci signifie qu’elles ne peuvent contenir des exigences qui n’ont pas de rapport avec la fourniture ou le service visé par le marché (exemples: utilisation de personnel issu de certains groupes "défavorisés", considération liée à la capacité sociale d’une activité). Elles ne peuvent restreindre la concurrence. Elles doivent être transparentes et ne pas être discriminatoires à l’égard des opérateurs économiques issus d’autres Etats membres. Autorisé: - Marchés de travaux: exiger des mesures préventives des accidents de travail, des conditions spéciales pour le stockage de produits dangereux. - Marchés de fournitures: exiger des caractéristiques ergonomiques afin de garantir l’accessibilité à tous (personnes handicapées). Non autorisé: - Exiger qu’un call center externalisé (services par téléphone ou en ligne) soit situé dans une ville précise. 21 2. Spécifications fondées sur les performances ou spécifications fonctionnelles Les spécifications fonctionnelles présentent l’avantage d’éviter au pouvoir adjudicateur de devoir élaborer des spécifications détaillées au niveau technique. Elles permettent aussi de promouvoir des solutions innovantes puisque les soumissionnaires potentiels auront un espace de créativité plus grand quant aux solutions qu’ils présenteront. Dans le cas de spécifications fonctionnelles, il faut cependant être prudent et suffisamment clair, faute de quoi on ne pourra évaluer correctement ni justifier cette évaluation. Il faut noter qu’il sera plus aisé de prendre des considérations sociales en compte lorsqu’il s’agit d’un projet vaste et complexe que dans un petit marché à portée restreinte. Quoi qu’il en soit les impératifs suivants doivent être respectés: - Spécificité quant aux résultats et aux produits exigés en encourageant les soumissionnaires à imaginer des solutions sur base de leur compétences et de leur expérience. - Il faut laisser de l’espace aux soumissionnaires mais pas en excès, en effet, dans ce cas les risques qu’ils prendraient deviendraient difficiles à évaluer ce qui les amènera à gonfler leurs prix. - Lien avec l’objet du marché tout en tenant compte d’autres considérations (stratégies transversales, obligations légales, choix proposé par le marché, étude de marché). Conclusion pour les spécifications techniques: on voit mal comment, dans les conditions édictées supra, intégrer dans un marché d’entretien de parcs et jardins, par exemple, l’exigence d’utiliser pour les services à prester certaines catégories de chômeurs. 3. Utilisation des variantes Pour pouvoir rédiger des spécifications techniques valables, il peut être utile de dialoguer avec les soumissionnaires potentiels. De même, ce dialogue peut informer sur ce qu’il est possible de faire en faveur des aspects durables et de l’égalité des chances. La viabilité commerciale des solutions peut aussi être examinée mais il faut bien veiller à ne pas avantager l’un ou l’autre soumissionnaire potentiel. Ce qui précède relève de l’étude de marché, il peut cependant arriver qu’au terme de celle-ci le pouvoir adjudicateur ne soit toujours pas en mesure de déterminer comment au mieux intégrer des considérations sociales dans ses spécifications techniques. 22 Il pourra alors travailler avec des variantes, ce qui signifie: - Etablir une liste de spécifications techniques minimales qui s’appliqueront tant aux offres de base qu’aux variantes. - Ajouter une dimension sociale pour les variantes socialement responsables. Ces dernières devront bien entendu respecter toutes les règles en matière de spécifications techniques et être liées à l’objet du marché. - La comparaison des offres sur base des critères d’attribution (qui comprendront une valorisation de la prise en compte des aspects sociaux) se fera de façon unique et les soumissionnaires seront libres de faire offre pour la solution de base ou pour la variante sauf indication contraire du pouvoir adjudicateur. Même remarque que précédemment, à propos des spécifications techniques, sachant que les critères d’attribution doivent obligatoirement être liés à l’objet du marché. L’utilisation de variantes implique que le cahier spécial des charges indique: - Que les variantes sont admises. - Les spécifications techniques minimales à respecter. - Les exigences particulières (obligation ou non de présenter une offre de base, enveloppe séparée pour la variante). Exemple: dans un marché de services pour la restauration dans une administration, il est possible de demander des variantes incluant la préparation de repas à basses calories, sans sel ou respectant les convictions religieuses. 4. Labels sociaux et incidences sur le commerce équitable Pour mémoire: le sujet sera traité dans le troisième volet du manuel. 5. Prise en compte de préoccupations sociales dans les méthodes de production et de traitement La directive prévoit expressément la prise en compte des méthodes de production dans les spécifications techniques. Exemple: prestation de services de restauration pour un hôpital, prévoir des plats préparés conformément aux besoins médicaux et alimentaires des différents patients, en n’utilisant que les exigences liées à l’objet du marché. 23 Ceci ne porte pas sur les critères socio-économiques. 6. Handicaps et spécifications techniques "Chaque fois que possible, ces spécifications techniques devraient être établies de manière à prendre en considération les critères d'accessibilité pour les personnes handicapées ou la conception pour tous les utilisateurs". Directive 2004/18/CE, article 23. Ces impératifs seraient au mieux repris dans l’objet du marché. Exemple: l’Italie où une loi rend obligatoire l’accessibilité de tous les sites Internet publics. Cette loi fixe une série d’exigences et les marchés ICT de grande envergure sont vérifiés sur ce point au niveau national. En raison de l’impossibilité pour les pouvoirs adjudicateurs de détenir une expertise dans tous les domaines, il peut être intéressant de voir ce qui se fait à l’étranger, en-dehors de l’UE: - Aux Etats-Unis, une loi sur la réinsertion impose aux pouvoirs adjudicateurs fédéraux de reprendre les normes d’accessibilité dans leurs marchés publics. Ceci a eu des répercussions sur le plan international: deux mandats de normalisation en la matière ont été émis par la Commission européenne, dans le domaine ICT et dans le domaine de l’environnement bâti. Des normes ont été élaborées dans le domaine ICT (CEN/BT WG 185 et CLC/BT WG 101-5). Ceci ne porte pas sur les critères socio-économiques et sera abordé dans le troisième volet. Synthèse pour les spécifications techniques: - Claires, précises, liées à l’objet du marché, pertinentes, transparentes et non discriminatoires. - Utiliser les best practices et travailler en réseau. - Spécifications fonctionnelles ou basées sur les performances pour susciter les innovations, penser aux méthodes de production et de traitement. - Utiliser les variantes quand il y a des incertitudes quant à l’existence, au coût ou à la qualité. - Eventuellement utiliser les marchés réservés ou les programmes d’emplois protégés. - Vérifier que tous les résultats visés ont été prévus (il ne sera pas possible d’en ajouter par la suite). 24 B. Sélection des fournisseurs et des prestataires de services Il s’agit ici de l’évaluation de la capacité des entreprises à réaliser le marché. 1. Critères d’exclusion La directive contient une liste limitative de critères pour lesquels une exclusion du marché est possible (dans certains cas graves, l’exclusion peut être rendue obligatoire). Exclusions de nature sociale: - Défaut de paiement des contributions sociales - Jugement ayant autorité de chose jugée qui constate un délit qui affecte la moralité professionnelle ou - Faute grave en matière professionnelle, constatée par tous moyens dont les pouvoirs adjudicateurs pourront justifier (au sens national, car une telle notion n’est pas définie dans le droit européen). Exemples: - Autorisé: exclure un soumissionnaire condamné par un jugement ayant force de chose jugée pour avoir enfreint une loi nationale "sociale" (sécurité au travail, discrimination, …) ou un soumissionnaire n’ayant pas respecté une politique sociale (égalité des chances) si ce non-respect est considéré comme une faute professionnelle grave. Comme déjà dit plus haut, cette possibilité a une portée moindre dans des Etats tels que la Belgique où la protection sociale est importante. - Non autorisé: exclure un soumissionnaire pour des convictions politiques ou personnelles sans rapport avec sa profession. Pour rappel: au niveau belge les critères d’exclusion sont repris dans les articles 43 (fournitures) et 69 (services) de l’arrêté royal du 8 janvier 1996 et sont les suivants: L’exclusion est obligatoire dans les cas suivants: - Participation à une organisation criminelle telle que définie à l’article 324bis du Code pénal. - Corruption telle que définie à l’article 246 du Code pénal. 25 - Fraude au sens de l’article 1er de la convention relative à la protection des intérêts financiers des communautés européennes, approuvée par la loi du 17 février 2002. - Blanchiment de capitaux tel que défini à l’article 3 de la loi du 11 janvier 1993 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. L’exclusion est facultative dans les cas suivants: - Lorsque le fournisseur ou le prestataire de services est en état de faillite, de liquidation, de cessation d’activités, de concordat judiciaire, ou se trouve dans toute situation analogue résultant d’une procédure de même nature existant dans les législations ou réglementations nationales. - Qui a fait l’aveu de sa faillite ou fait l’objet d’une procédure de liquidation, de concordat judiciaire ou de toute autre procédure de même nature existant dans les législations ou réglementations nationales. - Qui a fait l’objet d’une condamnation prononcée par un jugement ayant force de chose jugée pour tout délit affectant sa moralité professionnelle. - Qui, en matière professionnelle, a commis une faute grave dûment constatée par tout moyen dont les pouvoirs adjudicateurs pourront justifier. - Qui n’est pas en règle avec ses obligations relatives au paiement des cotisations de sécurité sociale conformément aux dispositions des articles 43bis et 69bis. - Qui n’a pas satisfait à ses obligations relatives au paiement de ses impôts et taxes selon la législation belge ou celle du pays dans lequel il est établi. - Qui s’est rendu gravement coupable de fausses déclarations en fournissant des renseignements exigibles en application du présent chapitre. Il y a lieu de signaler qu’en matière de sécurité sociale, le pouvoir adjudicateur peut, à quelque stade que ce soit de la procédure, s’informer, par tous moyens qu’il juge utiles, de la situation en matière de paiement des cotisations de sécurité sociale de tout candidat ou soumissionnaire. 26 2. Capacité technique Il faut tout d’abord souligner que la liste des critères prévus dans la Directive est exhaustive. Il faut également tenir compte de la jurisprudence en la matière : arrêt Beentjes (CJUE 20.09.88 – 31/87): l’emploi de chômeurs de longue durée n’a pas de rapport avec l’aptitude des soumissionnaires. Les critères de sélection doivent être non-discriminatoires, proportionnés et liés à l’objet du marché. Pour que ce dernier point soit justifié, il faut expressément que l’exécution du marché exige un savoir-faire particulier dans le domaine social. C’est seulement dans ce cas qu’il sera permis de prendre des considérations techniques en compte au niveau de l’examen de la capacité technique et ce, de la façon suivante: - Vérifier la disponibilité du personnel disposant des connaissances et de l’expérience nécessaires (crèche: personnel qualifié et encadrement, accessibilité d’un bâtiment: ingénieurs et architectes qualifiés). - Vérifier l’existence de l’équipement technique nécessaire (maison de retraite: équipement adapté). - Vérifier l’existence de structures techniques spécialisées (matériel informatique accessible aux personnes handicapées). Moyens de justification: - Contrats antérieurs avec mention des techniciens ou organismes techniques ayant participé. - Description des équipements techniques et des mesures utilisées. - Titres d’études et professionnels du personnel (surtout si l’accomplissement des objectifs sociaux dépend du personnel). - Effectifs et importance de l’encadrement. - Part du marché pouvant être sous-traitée. Comme toujours, le pouvoir adjudicateur devra veiller que ses exigences respectent bien le principe de proportionnalité. 27 Synthèse pour les critères de sélection: - Capacité des soumissionnaires sur base de la liste exhaustive. - Capacités sociales nécessaires (en fonction de l’objet du marché). - Capacité technique à exécuter le marché. - Marchés similaires. - Conditions d’exclusion. On constate qu’au niveau des critères de sélection et hormis ce qui est légalement exigé, l’insertion de considérations socio-économiques dans les critères de sélection pourrait théoriquement être possible, mais reste restreinte. C. Attribution du marché 1. Règles générales d’élaboration des critères d’attribution et d’attribution du marché Certaines conditions doivent être respectées pour prendre en considération des critères d’attribution sociaux: - Ils doivent être liés à l’objet du marché. - Ils ne peuvent pas donner au pouvoir adjudicateur une liberté illimitée de choix. - Ils doivent être mentionnés expressément dans l’avis de marché et dans le cahier spécial des charges. - Ils doivent être conformes aux principes fondamentaux du droit européen. L’attribution du marché se fait soit sur base du seul prix (auquel cas, bien évidemment des considérations sociales ne pourront intervenir au niveau de l’attribution, mais uniquement dans les spécifications techniques et les conditions d’exécution, si cela est justifié) soit sur base de plusieurs critères d’attribution (offre économiquement la plus avantageuse – meilleur rapport qualité/prix). Remarque: contrairement à ce qui est dit dans le document de la Commission, les critères sociaux ne sont pas repris dans l’article 53 de la Directive (il est vrai que la liste n’est pas limitative), mais il y est fait allusion dans le Considérant 46: "… C’est dans ces mêmes conditions qu’un pouvoir adjudicateur peut utiliser des critères visant à la satisfaction d’exigences sociales répondant notamment aux besoins – 28 définis dans les spécifications du marché – propres à des catégories de population particulièrement défavorisées auxquelles appartiennent les bénéficiaires/utilisateurs des travaux, fournitures, services faisant l’objet du marché". Différentes méthodes de comparaison et de pondération existent: elles doivent être annoncées suffisamment à temps pour que les soumissionnaires aient le temps de bien préparer leur offre (comprendre: dans l’avis de marché ou au plus tard dans le cahier spécial des charges). Règles à respecter: - Les critères doivent être liés à l’objet du marché (cf. spécifications techniques.) On peut dès lors accorder des points supplémentaires lorsque l’offre répond à des critères supérieurs à ce qui est exigé dans les spécifications techniques. Exemple espagnol: norme d’accessibilité à Internet UNE 139803 "Requisitos de accesibilidad para contenidos Web" qui comprend les niveaux A, AA et AAA. - Les critères doivent permettre l’évaluation pour l’ensemble des critères de qualité et économiques. Ce qui signifie que chaque critère pris isolément ne doit pas présenter un avantage économique, c’est l’ensemble qui est pris en compte. Autorisé: - Prestations de soins à des personnes handicapées: critères portant sur les exigences particulières par rapport à chaque catégorie d’utilisateurs (personnes âgées, …). - Prestation de services pour des tests de recrutement pour le service public: garantir l’égalité des chances (âge, sexe, religion, …). - Logiciels et matériel informatique: accessibilité (handicap, cécité, surdité, …). Non autorisé: - Construction d’un hôpital: exiger que les soumissionnaires achètent leur équipement auprès de firmes locales, ce critère n’est pas lié à l’objet du marché et entraîne une inégalité de traitement à l’égard des soumissionnaires qui se fournissent ailleurs. - Critères d’attribution ne figurant pas dans le cahier spécial des charges (non propre aux critères sociaux). 29 - Critères d’attribution arbitraires: pour du matériel informatique, accorder des points supplémentaires par niveau d’accessibilité sans indiquer les paramètres de calcul (idem). 1.1. Conditions applicables aux critères d’attribution lors de l’évaluation des offres Les règles de base pour les critères d’attribution figurent dans le considérant 46 de la Directive ainsi que dans les arrêts Concordia Bus et Wienstrom (ceux-ci portent sur les aspects environnementaux, mais les principes sont les mêmes). (a) Des critères liés à l’objet du marché Principe essentiel qui garantit que les critères se rapportent aux besoins du pouvoir adjudicateur tels qu’ils sont définis dans l’objet du marché. - Arrêt Wienstrom: dans un appel d’offres pour la fourniture d’énergie, la Cour de Justice a estimé qu’un critère qui se référait uniquement à la quantité d’électricité fournie à partir de sources d’énergie renouvelables ne pouvait être lié à l’objet du marché en ce qu’il portait sur une quantité dépassant la consommation du pouvoir adjudicateur. Cet arrêt portait sur l’insertion de considérations environnementales dans les critères d’attribution. Il est évident que les principes restent valables. - Marché de travaux pour la construction d’une école: un critère basé sur les sommes d’argent versées par l’adjudicataire à la communauté locale n’est pas lié à l’objet du marché. (b) Des ccritères spécifiques et objectivement quantifiables Ils ne peuvent en effet pas donner une liberté de choix illimitée au pouvoir adjudicateur. - Arrêt Wienstrom: la Cour a précisé que les critères devaient être clairs et susceptibles d’être interprétés de la même manière par tous les soumissionnaires et que de plus, le pouvoir adjudicateur devait se limiter à fixer des critères pour lesquels les informations fournies par les soumissionnaires seraient effectivement vérifiables. En l’occurrence, il n’avait pas déterminé la période pendant laquelle les soumissionnaires devaient préciser la quantité qu’ils seraient en mesure de fournir. 30 - Arrêt Concordia Bus: le système d’attribution de points supplémentaires a été considéré comme adéquat: des points supplémentaires étaient accordés pour des bus dont l’émission d’azote était inférieure à 4 g/Kwh (2,5 points par bus), à 2 g/Kwh (3,5 points par bus) et dont le niveau sonore était inférieur à 77 dB (1 point par bus). (c) Des critères préalablement publiés L’avis de marché doit indiquer s’il s’agit du prix le plus bas ou de l’offre économiquement la plus avantageuse. Les critères utilisés doivent figurer dans l’avis de marché ou au moins dans le cahier spécial des charges. (d) Des critères conformes au droit communautaire, en ce compris les principes fondamentaux du Traité La Cour de Justice de l’Union européenne a mis l’accent sur l’importance du principe de non-discrimination (base de la liberté d’établissement et de la liberté de prestation des services). Arrêt Concordia Bus: un des arguments de cette société était que les critères fixés étaient discriminatoires en ce que seule la société adjudicataire du marché possédait des autobus satisfaisant à ces critères. La Cour a réfuté cet argument en déclarant qu’un critère spécifique n’était pas forcément discriminatoire au motif que seul un petit nombre de soumissionnaires potentiels était à même d’y satisfaire. En effet, la société Concordia Bus s’était vu attribuer un autre lot du même marché, lot auquel s’appliquaient les mêmes exigences. On peut constater que la frontière est mince entre ce qui est discriminatoire et ce qui est admis. 1.2. Le critère additionnel Arrêt C-225/98: la CJUE a décidé qu’un marché pouvait être attribué sur une condition visant à lutter contre le chômage (dans le respect des principes du droit communautaire) s’il s’agit de départager des offres économiquement équivalentes, à condition que ce soit mentionné dans l’avis de marché et qu’il n’y ait pas d’incidence sur les soumissionnaires issus d’autres Etats membres. Tous les autres critères doivent être liés à l’objet du marché. 31 Ceci est évidemment intéressant mais d’utilisation très limitée puisque restreint aux seuls cas d’offres équivalentes, ce qui n’est pas fréquent. 2. Gestion des offres anormalement basses La Directive impose aux pouvoirs adjudicateurs, dans le cas d’offres anormalement basses, de demander des éclaircissements aux soumissionnaires avant un rejet éventuel. Ces explications doivent notamment avoir trait au respect des "dispositions concernant la protection et les conditions de travail en vigueur au lieu où la prestation est à réaliser". Elle établit donc un lien entre les deux et prévient des situations de concurrence déloyale. La procédure à suivre est définie par la Directive de façon à agir de manière non-discriminatoire. Exemples de domaines concernés: protection des travailleurs, paiement des contributions sociales, nombre d’heures de travail, sécurité au travail, travail clandestin. Il est par contre interdit à un pouvoir adjudicateur de fixer un seuil endessous duquel une offre sera considérée comme anormalement basse. Les informations à demander dans ces domaines peuvent l’être au soumissionnaire concerné, mais aussi, par exemple, aux syndicats, le pouvoir adjudicateur doit alors vérifier auprès du soumissionnaire. Les règles à suivre se trouvent dans les réglementations nationales et doivent toujours prévoir que le soumissionnaire puisse présenter son point de vue. L’obligation de rejeter ou non une offre réellement anormalement basse dépend de la réglementation de chaque Etat membre. Ceci constitue certainement un aspect important au niveau des considérations socio-économiques et sera, je pense utilisable dans certains secteurs bien précis dans lesquels le travail au noir est parfois utilisé. Je pense aux secteurs de la construction (travaux), confection (fournitures – ateliers clandestins) et nettoyage (services). Il est clair cependant que dans les Etats membres qui bénéficient d’une forte protection sociale tels que la Belgique, l’impact d’une telle vérification sera moindre que dans d’autres pays. 3. Information aux soumissionnaires écartés Peut-être le moment adéquat pour informer les soumissionnaires écartés sur la politique sociale du pouvoir adjudicateur, surtout si le soumissionnaire a été écarté pour insuffisance dans le domaine social. 32 Synthèse pour les critères d’attribution - Liés à l’objet du marché. - Ne pas conférer une liberté illimitée de choix au pouvoir adjudicateur. - Etre expressément mentionnés dans l’avis de marché et dans le cahier spécial des charges. - Etre conformes au droit communautaire (y compris aux principes fondamentaux du Traité). - Permettre de désigner l’offre qui a le meilleur rapport qualité/prix. - Respecter les règles applicables des directives sur les marchés publics. - Suivre les règles en matière d’analyse des offres anormalement basses (en particulier, vérifier si le faible montant de l’offre provient du fait que le soumissionnaire ne respecte pas les normes sociales). Hormis les quelques considérations ci-dessus, force est de constater que les critères d’attribution ne constituent pas la meilleure cible pour prendre en compte des considérations sociales au sens restreint du terme. D. Exécution du marché Tout marché public doit être exécuté en conformité avec les règlements sanitaires et sociaux. De plus, si le pouvoir adjudicateur veut ajouter une dimension sociale supplémentaire (qui n’entre ni dans la sélection, ni dans les spécifications techniques, ni dans les critères d’attribution), il doit le faire au niveau des conditions d’exécution du marché. 1. Règles pour l’exécution du marché Il s’agit d’obligations que tous les soumissionnaires sont tenus d’accepter, ce à quoi ils s’engagent par le dépôt de leur offre. Au cas où celle-ci contiendrait des conditions en sens contraire, elle devrait être rejetée. Cependant, les conditions d’exécution ne doivent pas encore être remplies au moment de l’introduction de l’offre. Ce sont, en fait, des conditions supplémentaires au contrat (arrêt Beentjes). Elles peuvent être de nature environnementale ou sociale. Ces conditions n’ont donc un lien qu’avec l’exécution du marché. Aucune preuve de conformité à ces conditions ne doit donc être demandée au cours de la procédure. Les conditions à respecter pour les conditions d’exécution sont les suivantes: 33 - Etre liées à l’exécution du marché, donc liées à des tâches nécessaires à la production des produits ou à la prestation des services. Exemple contraire: obligation d’embaucher une proportion de travailleurs handicapés sur un autre marché, exiger de l’adjudicataire une contribution pour la construction d’un centre pour personnes défavorisées, obligation pour l’adjudicataire d’un marché de travaux d’organiser une garderie pour les enfants du personnel. - Figurer dans le cahier spécial des charges, ce qui permet aux soumissionnaires d’élaborer leurs prix en toute connaissance de cause (Directive, article 26). - Se conformer au droit communautaire (y compris les principes du Traité). 2. Exemples issus du considérant 33 de la Directive 2004/18/CE "Elles peuvent, notamment, avoir pour objet de favoriser la formation professionnelle sur chantier, l'emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d'insertion, de lutter contre le chômage ou de protéger l'environnement. À titre d'exemple, on peut citer, entre autres, les obligations — applicables à l'exécution du marché — de recruter des chômeurs de longue durée ou de mettre en oeuvre des actions de formation pour les chômeurs ou les jeunes, de respecter en substance les dispositions des conventions fondamentales de l'Organisation internationale du travail (OIT) dans l'hypothèse où celles-ci n'auraient pas été mises en oeuvre dans le droit national, de recruter un nombre de personnes handicapées qui irait au-delà de ce qui est exigé par la législation nationale". D’autres exemples ont étés cités dans la Communication interprétative de la Commission (2001): - Obligation de recruter des demandeurs d’emploi ou de prévoir des actions de formation. - Obligation de prévoir des mesures pour l’égalité des chances (sexe, race, …) ou l’accès aux personnes handicapées. - Obligation de respecter les conventions fondamentales de l’OIT. - Obligation de recruter des personnes handicapées allant plus loin que ce que prévoit le droit national. Les marchés de travaux et de services sont les plus adéquats dans ce domaine. En effet, pour les marché de fournitures, il pourrait être discriminatoire d’imposer ces mesures impliquant une modification de 34 l’organisation d’entreprises situées sur le territoire d’un autre Etat membre. La remarque est adéquate. En effet, les marchés de travaux tout comme les marchés de services impliquent, dans la plupart des cas, une exécution entière sur place, c’est-à-dire sur le territoire de l’Etat membre dont relève le pouvoir adjudicateur. A contrario, pour les marchés de fournitures, la fabrication peut avoir lieu sur le territoire d’un autre Etat, seule la livraison se fera sur le territoire de l’Etat concerné. D’autres exemples: - Suède: les marchés de construction nationaux contiennent une clause obligeant au respect des conventions fondamentales de l’OIT. Les marchandises et produits utilisés doivent avoir été fabriqués dans un environnement sûr et conforme à ces conventions, à défaut de quoi elles devront être remplacées aux frais du contractant qui est tenu de faire respecter ces obligations par ses sous-traitants, des pénalités sont prévues. En ce qui concerne cet exemple on peut se poser la question de savoir s’il est bien conforme à ce qui est dit juste avant? - Royaume-Uni: le programme "Transport for London" (constructions et extension du métro) prévoit l’égalité et l’inclusion comme concepts clés: régénération des quartiers défavorisés, minimisation de l’impact des travaux, environnement propice au bon fonctionnement de la ligne. Exigences pour l’exécution du marché: stratégie d’égalité durant tout le projet, formation à la diversité pour le personnel, diversité des fournisseurs. L’intégration de telles exigences implique des moyens de gestion du marché et de contrôle du respect des obligations, on ne peut donc imposer des obligations qui ne pourraient pas être contrôlées de manière efficace. 3. Conformité au droit national du travail Le droit national (réglementation, conventions collectives), pour autant qu’il soit conforme au droit communautaire et le droit communautaire est d’application durant l’exécution du marché. L’article 27 de la Directive 2004/18/CE prévoit ce qui suit: "Le pouvoir adjudicateur peut indiquer ou peut être obligé par un État membre d'indiquer, dans le cahier des charges, l'organisme ou les organismes auprès desquelles les candidats ou soumissionnaires peuvent obtenir les informations pertinentes sur les obligations relatives à la fiscalité, à la protection de l'environnement, aux dispositions de 35 protection et aux conditions de travail qui sont en vigueur dans l'État membre, la région ou la localité dans lesquels les prestations sont à réaliser et qui seront applicables aux travaux effectués sur le chantier ou aux services fournis durant l'exécution du marché. Le pouvoir adjudicateur qui fournit les informations visées au paragraphe 1 demande aux soumissionnaires ou aux candidats à une procédure de passation de marchés d'indiquer qu'ils ont tenu compte, lors de l'établissement de leur offre, des obligations relatives aux dispositions concernant la protection et les conditions de travail en vigueur au lieu où la prestation est à réaliser. Le premier alinéa ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article 55 relatives à la vérification des offres anormalement basses". Ces dispositions ont évidemment comme but d’empêcher que des soumissionnaires introduisent des offres dont le prix serait inférieur aux autres du fait d’avoir diminué la protection des travailleurs. Ceci est lié aux protections sociales prévues par la réglementation en vigueur dans l’Etat membre concerné. 4. Gestion de la chaîne d’approvisionnement Pour mémoire: le sujet sera traité dans le troisième volet du manuel. 5. Gestion des marchés et contrôle de la conformité Pour pouvoir gérer au mieux l’exécution du marché et en contrôler la conformité aux conditions d’exécution prévues dans le cahier spécial des charges, il est nécessaire de disposer des outils et conditions qui suivent: - Système de gestion des performances: définir les méthodes utilisées et entreprendre les actions nécessaires. Des récompenses peuvent être accordées, on peut résoudre les problèmes d’insuffisance et collaborer avec l’adjudicataire pour améliorer l’exécution. - Indicateurs de performances clés. - Dispositifs de surveillance: récolte des données adéquates et analyse efficace. - Conditions de paiement (spécifiées dans le cahier spécial des charges): elles sont une garantie de la bonne exécution, avec éventuellement des sanctions pour les manquements et des récompenses en cas de dépassement de ce qui est exigé. 36 - Possibilité d’invoquer un manquement aux conditions d’exécution, mais de façon mesurée. - Culture de partenariat indispensable. Commentaire: ceci nécessite un certain nombre de moyens et dépend donc de la politique d’achat appliquée. Exemples: - Royaume-Uni: services de restauration hospitalière: enquête de satisfaction annuelle auprès des patients (par âge, origine, …), analyse des résultats, évaluation des services ont donné lieu à des modifications contractuelles pour améliorer les services. - France: le rôle des institutions publiques d’inclusion sociale est important: aides aux soumissionnaires, subventions, appel à du personnel juridique spécialisé en la matière. Synthèse pour les conditions d’exécution: Conditions d’exécution: elles sont le meilleur instrument pour l’insertion de clauses sociales. Les conditions d’exécution doivent être: - Liées à l’exécution du marché Cohérentes avec le meilleur rapport qualité/prix Mentionnées dans le cahier spécial des charges Conformes au droit communautaire et aux principes fondamentaux du Traité. Vérifier qu’un contrôle correct est possible. Travailler en partenariat. Conserver des traces des performances. Utiliser des clauses de variation qui permettront l’évolution du marché (conformes à la Directive et au principe de transparence). Collaborer avec le secteur (sur base de volontariat) et se tenir à jour des développements. E. Un exemple concret Le texte qui suit n’est pas basé sur le Guide. Il constitue une synthèse d’une circulaire de la Région de Bruxelles-Capitale du 4 octobre 2012 (Moniteur 37 belge du 5 décembre 2012) relative à l’insertion de clauses sociales dans les marchés publics. Il est intéressant d’examiner, à titre d’exemple, comment une autorité publique belge responsable d’un grand nombre de pouvoirs adjudicateurs (voir chapitre 3) met en œuvre la promotion de l’insertion de clauses sociales dans les marchés. Les conséquences effectives de l’application de cette circulaire ne peuvent pas encore être analysées, étant donné sa récente entrée en vigueur. CIRCULAIRE CLAUSES SOCIALES BRUXELLES-CAPITALE Chapitre 1 - Dispositions générales Les autorités publiques, ici en l’occurrence les autorités de la Région de Bruxelles-Capitale, doivent montrer l’exemple et favoriser un haut taux d’emploi. Les objectifs de la circulaire sont les suivants: Préciser quels sont les opérateurs et les marchés concernés Donner une stratégie, tant globale que par opérateur Préciser quelles sont les considérations essentielles à analyser Préciser quel est le cadre légal pour l’intégration de clauses sociales dans les marchés publics Donner les ressources qui sont disponibles pour aider les opérateurs. Chapitre 2 - Définition des clauses sociales "Les clauses sociales visent - à travers la réalisation d'un marché - à demander à l'entreprise de participer à une dynamique d'insertion socioprofessionnelle. Dès lors que les objectifs sociaux poursuivis sont l'emploi, la formation ou l'insertion par le travail, l'utilisation des marchés publics comme instrument de politique sociale peut se concevoir de deux façons différentes: - soit la mesure vise à favoriser des entreprises qui mènent des actions particulières en faveur de l'emploi; - soit la mesure bénéficie directement à un public cible défini qui est plus ou moins fragilisé sur le marché de l'emploi. L'objet d'une clause sociale sera généralement: - soit de prévoir l'embauche de demandeurs d'emploi par l'entreprise adjudicataire: l'objectif visé est alors d'offrir une expérience professionnelle assurant un meilleur ancrage sur le marché du travail (voir chapitre IV, 2., 2.1. et 2.2.); - soit de réserver le marché à une entreprise d'économie sociale dont l'objet social est la réinsertion socioprofessionnelle (voir chapitre IV, 2., 2.3.); 38 - soit de sous- traiter une partie d'un marché à une entreprise d'économie sociale dont l'objet social est la réinsertion socioprofessionnelle (voir chapitre IV, 2., 2.4.); - soit de prévoir une formation pour les demandeurs d'emploi, l'entreprise adjudicataire devenant ainsi un opérateur dans leur insertion professionnelle (voir chapitre IV, 2., 2.5.)". Chapitre 3 – Champ d’application de la circulaire 1. Le champ d’application s’étend à toutes les administrations qui dépendent de façon fonctionnelle du Gouvernement de la Région de BruxellesCapitale, donc non seulement le Ministère de la Région de BruxellesCapitale, mais par exemple également, Bruxelles-Propreté, l’IBGE, Actiris, la Société du Logement, le Service d’Incendie et d’Aide médicale urgente, la Société bruxelloise de Gestion de l’Eau, la STIB,le Port de Bruxelles,… En ce qui concerne les communes, CPAS, intercommunales et structures mixtes, l’application de la circulaire constitue une recommandation dans le but d’amplifier les synergies. 2. Les personnes concernées: - Le personnel dirigeant Les responsables des achats et de la maintenance. Il est recommandé aux différentes administrations de désigner, dans les trois mois de la publication de la circulaire, une personne ressource qui aura pour mission d’assurer la mise en place du contenu de celle-ci. 3. Les marchés concernés: 3.1. Marchés de services et concessions de services pertinents dont le montant est supérieur à 125.000 € hors TVA: - Création et entretien d’espaces verts - Catering événementiel ou régulier, repas scolaires restaurants d’entreprises - Collecte, gestion, traitement des déchets - Nettoyage (bureaux, vitres, chantiers, nettoyage urbain et détachage, …) - Imprimerie - Publipostage et routage - Archivage électronique - Marchés nécessitant des services de secrétariat (consultance, conseil, assistance,…) - Maintenance technique, chauffage/ventilation/climatisation (HVAC), … Remarque: certains secteurs sont soumis à des conventions collectives de travail qui prévoient, comme dans le secteur du nettoyage que, au terme 39 d’un marché, le nouvel adjudicataire devra reprendre le personnel affecté au marché précédent et le garder pendant six mois. Ceci entraînera, soit l’adaptation de la clause sociale, soit un report de son effectivité après le délai de six mois précité. 3.2. Marchés de fournitures dont le montant est supérieur à 22.000 € hors TVA. 3.3. Marchés de travaux et concessions de travaux pertinents dont le montant est supérieur à 125.000 € hors TVA: - Construction de bâtiments Rénovation de bâtiments Génie civil Travaux et rénovation d’égouttage Travaux de voirie, de rénovation des impétrants, d’ouvrages d’art, de pavage - Déconstruction de bâtiments. Remarque: il y a lieu d’éviter de prévoir des clauses sociales dans des marchés dont le délai d’exécution est trop court (estimation: moins de vingt jours ouvrables) et dans des marchés trop techniques (exemple: les lots ‘ascenseurs’). 3.4. Marchés par procédure négociée sans publicité La circulaire demande aux pouvoirs adjudicateurs de consulter les entreprises d’économie sociale. Chapitre 4 – Le cadre légal de l’intégration des clauses sociales dans les marchés publics 1. Où les insérer? La circulaire ne porte que sur les clauses sociales d’insertion et de formation, dont le but est de favoriser l’insertion socioprofessionnelle. Les autres formes de clauses sociales (par exemple, respect de la dimension du genre, respect des normes de l’OIT, …) ne font pas l’objet de la circulaire. Chaque type de clause sociale sera traitée séparément en tenant compte de la base légale et de la manière de procéder. 2. Les différents types de clauses 2.1. Clause sociale d’insertion pour les marchés de travaux de 750.000 € et plus Un arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 22 avril 1999 impose pour de tels marchés dont la durée prévue des travaux est d’au moins soixante jours, l’insertion d’une clause qui 40 oblige les soumissionnaires à prévoir l’engagement de demandeurs d’emploi inscrits auprès de l’Office régional bruxellois pour l’Emploi. La base légale est l’article 18bis, § 1er de la loi du 24 décembre 1993. Comment procéder? - Au début de la rédaction du cahier spécial des charges et au plus tard lors de l’approbation de celui-ci par l’organe compétent, informer Actiris afin de rédiger au mieux la clause. - A la réception provisoire: faire compléter le formulaire d’évaluation du dispositif "clauses sociales" par l’adjudicataire et le transmettre à Actiris. 2.2. Clause sociale d’insertion pour les marchés de travaux ou de services compris entre 125.000 € et 750.000 € Comment procéder? - Au début de la rédaction du cahier spécial des charges et au plus tard lors de l’approbation de celui-ci par l’organe compétent, il est recommandé d’informer Actiris afin de rédiger au mieux la clause. - A la réception provisoire: faire compléter le formulaire d’évaluation du dispositif "clauses sociales" par l’adjudicataire et le transmettre à Actiris. 2.3. Réservation de marchés ou marchés à lots à l’économie sociale d’insertion Cette réservation est autorisée par la réglementation des marchés publics pour les marchés dont le montant estimé est inférieur aux seuils européens. La circulaire précise qu’il s’agit d’un critère de sélection qualitative. Remarque: j’estime personnellement qu’il s’agit plutôt d’une question de droit d’accès au marché, puisque ce droit trouve son fondement dans la loi. Pour les entreprises de travail adapté (« ateliers protégés »), la réservation est légalement possible au-delà des seuils européens ; la faisabilité doit être vérifiée, ainsi que l’existence d’une concurrence effective. Les mêmes possibilités existent pour les marchés à lots dont un ou plusieurs lots peuvent être réservés sous les mêmes conditions, chaque lot étant inférieur au seuil européen. Comment procéder? 41 - Insertion dans l’avis de marché et dans le cahier spécial des charges de la clause suivante: "conformément à l'article 18bis, § 2 de la loi du 24 décembre 1993 relative aux marchés publics, la participation à la procédure de passation du marché public est réservée aux entreprises d'économie sociale d'insertion telles que définies à l'article 59 de la loi du 26 mars 1999". - Insertion dans le cahier spécial des charges de la clause suivante: "Echantillons, documents et attestations à joindre à l'offre: les documents attestant de la reconnaissance comme entreprise de travail adapté ou comme initiative d'économie sociale d'insertion au sens de l'article 59 de la loi du 26 mars 1999 relative au plan d'action belge pour l'emploi 1998 et portant des dispositions diverses. Dans le cas d'une offre remise par une entreprise issue d'un autre état membre, celle-ci doit apporter la preuve qu'elle remplit des conditions équivalentes dans son pays d'origine". Les règles relatives à l’agréation des entreprises doivent évidemment être également respectées. - Même en cas de réservation de marchés, la réglementation impose la consultation de plusieurs entreprises et ce, également en cas de procédure négociée sans publicité. La pratique impose la même règle pour les marchés sur bon de commande. - Il y aura lieu d’étendre quelque peu les délais de réalisation afin de permettre la mise en place des processus d’insertion et de formation. - Au moment du lancement des marchés réservés, il y aura lieu d’informer Actiris par l’envoi d’une copie du cahier spécial des charges. 2.4. Clause sociale permettant la sous-traitance à l’économie sociale d’insertion comme alternative à la clause sociale d’insertion. Il s’agit ici d’une condition d’exécution qui prévoit soit l’engagement de demandeurs d’emploi, soit la sous-traitance d’une partie du marché à une entreprise d’économie sociale d’insertion. Ceci permet à des entreprises de taille plus modeste d’accéder à des marchés de plus grande ampleur. Les acheteurs publics sont tenus de consulter au moins trois entreprises; les entreprises adjudicataires ne sont pas soumises à cette obligation. Comment procéder? 42 - Insertion de la clause suivante dans l’avis de marché et dans le cahier spécial des charges: "Conformément à la loi sur les marchés publics, l'entreprise adjudicataire doit, au cours de l'exécution du présent marché, mettre en oeuvre des actions de formation et d'insertion socioprofessionnelle pour des demandeurs d'emplois selon les précisions décrites ci-dessous: - soit en assurant durant le marché l'engagement de X demandeurs d'emplois, englobant X heures d'insertion sous contrat de travail en entreprise au métier de .... via le dispositif Actiris. Les demandeurs d'emplois: . . . doivent être chômeurs complets indemnisés, bénéficiaires du revenu d'intégration sociale ou demandeurs d'emploi libres; doivent être âgés d'au moins 18 ans; ne doivent pas disposer d'une expérience professionnelle comptabilisant plus de 150 heures de travail dans les 12 derniers mois; - soit en sous-traitant x % du montant total hors T.V.A. du marché à des entreprises d'économie sociale d'insertion. Un engagement ferme d'une (ou plusieurs) entreprise(s) d'économie sociale d'insertion (contrat de sous-traitance ou lettre d'engagement irrévocable en cas de notification, etc) par lequel cette dernière s'engage à exécuter en sous-traitance pour le compte du soumissionnaire x % du montant total hors T.V.A. du présent marché doit alors être joint à l'offre. Le soumissionnaire précise dans son offre la manière dont il entend satisfaire à ses obligations dans une note distincte ayant spécifiquement pour objet les modalités de la clause sociale qu'il s'engage à exécuter dans le cadre du marché. Les documents démontrant qu'il satisfait à cette condition sont produits dans les trente jours qui suivent la notification de la décision d'attribution". - Au moment du lancement des marchés de sous-traitance, il y aura lieu d’informer Actiris par l’envoi d’une copie du cahier spécial des charges. 2.5. Clauses sociales de formation en entreprise Ce type de clause est autorisé par la réglementation en tant que condition d’exécution. Comment procéder? 43 - Insertion de la clause suivante dans l’avis de marché et dans le cahier spécial des charges: "Conformément à la loi sur les marchés publics, l'entreprise adjudicataire doit, au cours de l'exécution du présent marché, mettre en oeuvre des actions de formation et d'insertion socioprofessionnelle pour les demandeurs d'emploi selon les précisions suivantes: - soit en assurant la formation en entreprise sous la forme d'une formation individuelle d'une durée de xx heures, pour xxx demandeurs d'emploi, au métier de xxx; - soit en assurant la formation en entreprise sous la forme d'une formation collective d'une durée de xx heures pour xxx demandeurs d'emploi au métier xxx dont le programme est convenu entre l'entreprise et l'opérateur public de formation compétent sur le territoire de la Région". - Détermination du volume horaire de la formation: calculer la part de main-d’œuvre dans le marché et demander entre 2 et 8 % de cette part pour la formation. - Le soumissionnaire est tenu de préciser dans son offre et ce, au moyen d’une note distincte et spécifique, comment il prévoit de remplir ses obligations relativement à cette clause sociale qu’il s’est engagé à exécuter. 2.6. Intégration de considérations socioprofessionnelles dans l’objet du marché Cet aspect ne concerne que les procédures négociées et les appels d’offres et non les adjudications, puisqu’il s’agira d’un critère d’attribution. Quand l’utiliser? Lorsque le pouvoir adjudicateur demande un effort d’insertion socioprofessionnelle, mais qu’il souhaite laisser un choix aux opérateurs économiques. Ce choix portera sur la formule d’insertion elle-même (sous-traitance, engagement de demandeurs d’emploi, …) mais également sur l’ampleur de l’effort d’insertion évalué au moyen d’un critère d’attribution. La base juridique de ceci se trouve dans l’article 16 de la loi du 24 décembre 1993, dans le considérant 46 de la Directive 2004/18/CE et dans la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne. Comment procéder? Une série d’étapes est proposée à titre d’exemple: 44 1. Elargir l’objet du marché en un double objet (l’objet initial et la formation) de manière à ce qu’il y ait un lien entre le critère d’attribution et l’objet du marché. 2. Le critère doit être formulé de façon précise et objectivable. Un exemple de formulation est fourni: "Critère n° X. les performances en matière d'insertion socioprofessionnelle des publics en difficulté: pondération X % Ces performances seront analysées au regard du nombre d'heures de formation et/ou d'insertion professionnelle des publics en difficulté prévues annuellement pour ce présent marché, et le taux d'encadrement des publics cibles. L'offre qui présentera le nombre d'heures le plus important et le taux d'encadrement le plus élevé recevra X points. Les autres offres obtiendront un nombre de points qui correspondra au ratio par rapport à la meilleure offre. Moins il y aura d'heures et plus faible sera l'encadrement et moins l'offre recevra de points. Par exemple, cette valeur peut être déterminée comme suit: - Valeur A = nombre d'heures annuelles de formation et/ou d'insertion (le nombre d'heures d'insertion via engagement est multiplié par 3 par le PA par rapport aux heures de formation). - Valeur B = nombre de personnes encadrées/nombre personnes encadrantes. - Valeur C = valeur A/valeur B. - Valeur D = Valeur A + Valeur C. Exemple: Formation de 5 personnes à raison de 200 h par an et par personne. Taux d'encadrement = 5 personnes pour 1 encadrant. Valeur A = 1000 heures. Valeur B = 5. Valeur C = 200 h (correspond à 1 encadrant pour les 5 personnes, soit 200 h). Valeur D = 1000 + 200 = 1200 heures totales". Le critère devra être analysé par rapport aux exigences de la clause sociale figurant dans le cahier spécial des charges. Une note de présentation de cette clause devra être rédigée. 45 Un vade-mecum est prévu dans lequel figureront des compléments d’information. 3. Le critère devra figurer dans l’avis de marché et dans le cahier spécial des charges. 4. Une clause d’exécution sera également prévue dans le cahier spécial des charges ; cette clause prévoira ce qui suit: "Conformément à la loi sur les marchés publics, l'entreprise adjudicataire doit, au cours de l'exécution du présent marché, mettre en oeuvre des actions de formation et/ou d'insertion socioprofessionnelle pour les demandeurs d'emplois". Trois solutions sont possibles pour le soumissionnaire: • Soit il assurera sur le chantier la formation à un métier précis de demandeurs d’emploi. On entend par demandeurs d’emploi des chômeurs complets indemnisés, des bénéficiaires du revenu d’intégration sociale ou des demandeurs d’emploi libres, âgés d’au moins 18 ans et ne disposant pas d’une expérience professionnelle de plus de 150 heures de travail au cours des 12 derniers mois. • Soit il sous-traitera un pourcentage du montant total (hors TVA) du marché à une ou plusieurs entreprises d’économie sociale d’insertion; l’offre devra donner le détail du volume horaire d’insertion prévu et être accompagnée de l’engagement de la ou les firme(s). • Soit il est lui-même une entreprise d’économie sociale d’insertion (cf article 59 de la loi du 26 mars 1999) et il en fournira la preuve. Les soumissionnaires étrangers sont également admis à condition de fournir, dans les trente jours de la décision d’attribution, la preuve qu’ils remplissent des conditions équivalentes dans leur pays d’origine. L’ampleur de cette clause sociale sera cotée par le biais du critère d’attribution correspondant. Le soumissionnaire est tenu de joindre à son offre une note spécifique relative aux considérations socioprofessionnelles figurant dans l’objet du marché. Remarque: quoique cela ne ressorte pas clairement du texte de la circulaire, il est à supposer que les deux dernières stipulations valent pour les trois solutions énumérées ci-dessus. 46 Chapitre 5 – Faculté de renforcer le respect d’exécution des clauses sociales Le pouvoir adjudicateur qui le souhaite, peut prévoir, dans le cahier spécial des charges, des sanctions visant à renforcer le respect des clauses sociales. Le non-respect des clauses doit être constaté conformément à l’article 20 du Cahier général des charges annexe à l’arrêté royal du 26 septembre 1996. Les sanctions qui peuvent être prévues sont une pénalité de 2% du montant initial du marché et éventuellement, la différence entre le montant du subside régional auquel le pouvoir adjudicateur aurait eu droit si la clause sociale avait été respectée et le montant du subside réellement perçu. Les mesures d’office prévues au Cahier général des charges précité sont également applicables. 47 CONCLUSION Le présent texte ne s’attache comme dit plus haut qu’aux critères sociaux, stricto sensu, c’est-à-dire ceux que l’on peut qualifier de socio-économiques. Ceux qui sont relatifs à l’insertion ou à la réinsertion dans le marché du travail de catégories de personnes défavorisées sur ce point: il peut s’agir de chômeurs âgés, peu qualifiés, de jeunes sans emploi, … et ceux qui sont relatifs à l’accès des petites et moyennes entreprises aux marchés publics d’une certaine taille. Dans l’état actuel de la réglementation et dans les limites imposées par l’Union européenne, si on envisage les différents stades auxquels on pourrait envisager d’insérer ces clauses sociales, force est de constater que les possibilités ne sont pas nombreuses: A. Pour les clauses relatives à la réinsertion de travailleurs - Critères de sélection: 1) 2) Critères d’exclusion voir arrêté royal du 8 janvier 1996 Critères de sélection proprement dits, mais ils doivent obligatoirement être liés à l’objet du marché ce qui restreint fortement les possibilités car cela signifie que l’objet du marché doit, au moins en partie, porter sur un aspect social. - Spécifications techniques: elles doivent également être liées à l’objet du marché. La remarque ci-dessus est donc pertinente ici également. - Critères d’attribution: le même lien direct avec l’objet du marché est exigé, la même constatation doit donc être faite. - Conditions d’exécution: le lien qui est exigé ici est celui avec l’exécution du marché, ce qui élargit les possibilités. Il faut rappeler que les conditions d’exécution doivent en toute transparence figurer dans les documents du marché et ne peuvent être discriminatoires. Il est bon de rappeler que ces conditions n’interviennent pas dans l’évaluation des offres. Elles sont imposées par le pouvoir adjudicateur et le soumissionnaire s’engage à les respecter par la signature de son offre. Il faudra donc veiller à ne pas imposer de conditions trop exigeantes qui risqueraient de décourager les soumissionnaires potentiels. B. Pour l’accès des petites et moyennes entreprises aux marchés publics, une division judicieuse en lots paraît être une méthode utilisable, de même qu’une transparence et une attitude ouverte à l’égard de ce type de soumissionnaires. In fine, la balle est dans le camp des décideurs (européens au premier chef), il leur appartient, comme cela a déjà été le cas pour les critères environnementaux de vouloir permettre d’intégrer une dimension sociale dans les marchés publics. Ceci ne pourra se faire que par le biais d’une modification de la réglementation dans le sens d’un assouplissement. Pour cela il faut qu’une volonté politique allant dans ce sens existe. 48