Chapitre 8
savoir s’il existe également, dans la sphère monétaire, un processus implicite d’intégration,
comme dans la sphère économique en Asie orientale
. Afin de mieux répondre à cette
question, il est indispensable de mesurer d’emblée l’ampleur de la cohésion asiatique résultant
de ce processus implicite de régionalisation. Il est toutefois important de souligner que, dans
ce chapitre, nous nous contentons de porter notre attention essentiellement sur l’aspect
commercial de cette cohésion économique régionale en Asie orientale, pour deux raisons.
D’une part, contrairement aux échanges commerciaux, les investissements directs à l’étranger
représentent, pour les entreprises en question, une stratégie alternative en partie fondée sur
une logique de couverture du risque de change dans une optique de long terme. Aussi est-il
plus pertinent d’examiner la dynamique du commerce extérieur entre pays asiatiques, et non
pas celle des investissements croisés au sein de cette région, si notre objectif consiste à
apprécier le lien de la régionalisation économique en Asie orientale, avec un éventuel
processus implicite d’intégration monétaire au sein de cette zone économique. D’autre part, la
qualité des statistiques disponibles concernant ces investissements directs « intra-asiatiques »
demeure encore peu satisfaisante, d’autant que ces statistiques sont souvent peu compatibles
entre elles.
C’est dans cet esprit que nous organiserons ce chapitre de la manière suivante. Dans la
première section, nous analyserons l’évolution de la cohésion commerciale entre pays
asiatiques sous un angle global, et étudierons ensuite, dans la seconde section, l’évolution du
rôle spécifique que joue chaque pays d’Asie orientale vis-à-vis de ses voisins, dans le domaine
du commerce extérieur. Ces analyses nous permettront de mieux percevoir, d’un côté, à quel
stade est arrivé ce processus de régionalisation asiatique aujourd’hui, et de l’autre, quelles
sont les relations commerciales privilégiées par chaque pays asiatique pour des raisons
différentes. Avant de transposer le résultat de ces analyses concernant l’aspect commercial de
la régionalisation asiatique, à la sphère monétaire, nous examinerons, dans la troisième
section, les études connexes dans la littérature économique, et analyserons enfin, dans la
Il existe, certes, des dialogues régionaux en matière de coopération monétaire au niveau des institutions,
entre autres, l’EMEAP (Executive Meeting of East Asia and Pacificic Central Banks) qui englobe l’Australie, la
Chine, Hong Kong, l’Indonésie, le Japon, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, les Philippines, Singapour, la Corée
du Sud, et la Thaïlande. Le Japon a même proposé en 1997 la mise en place d’un certain « Fonds monétaire
asiatique » visant à protéger les devises asiatiques contre des crises de change. Cette proposition fut pourtant
rejetée par les Etats-Unis et la Chine, et s’avère à l’heure actuelle encore loin d’être réalisable. Un processus
d’intégration monétaire asiatique, s’il est présent, ne peut donc être conduit que par les forces du marché, et non
pas les institutions asiatiques.