Des tendances inquiétantes, mais des opportunités en nombre
« Le développement agricole est très inégal à travers le continent », affirme Thomas S.
Jayne, professeur d’économie spécialisé dans l’agriculture, l’alimentation et les ressources à
l’université de l’État du Michigan et coauteur du rapport. « Là où il y a une bonne
combinaison d’interventions, il procure des opportunités économiques considérables et
permet des progrès vers des étapes fondamentales de développement telles que
l’amélioration de la nutrition. Mais là où il est négligé, l’agriculture continue de faire obstacle
à la création d’une croissance économique plus durable et équitable en Afrique
subsaharienne. »
Dans l’ensemble, le RSAA 2016 détaille un large éventail de tendances touchant
l’agriculture africaine, certaines inquiétantes et d’autres révélant des opportunités pour
transformer un secteur, dont les faibles réussites demeurent éloignées de son fort potentiel.
Parmi les conclusions clés du rapport :
Si les investissements publics dans l’agriculture ont augmenté, le financement
public devrait tout de même être quatre fois supérieur à ce qu’il est
actuellement. Les investissements publics annuels dans l’agriculture ont augmenté
sensiblement à travers l’Afrique, passant d’une moyenne de 186,4 millions USD par
pays entre 1995 et 2003, à 219,6 millions USD entre 2008 et 2014. Pourtant,
seulement 13 pays africains ont atteint ou dépassé leur engagement à investir au
moins 10 % des fonds publics dans l’agriculture. Si tous ceux qui s’y étaient engagés
pouvaient tenir leur promesse – ce que les demandes concurrentes et les contraintes
budgétaires rendent difficile –, le financement public de l’agriculture en Afrique
passerait de 12 milliards USD (le montant alloué en 2014) à 40 milliards USD.
Une croissance agricole diversifiée va générer de l’emploi et de la richesse à
long terme ; l’industrie agricole doit se développer au-delà des champs.
L’agriculture, qui constitue une source clé de revenus pour 60 à 65 % de la
population active subsaharienne, va demeurer une source majeure d’emplois dans la
plupart des pays pendant au moins une décennie, en particulier pour les plus
pauvres du continent. C’est pourquoi la croissance agricole est beaucoup plus
efficace que celle d’autres secteurs en matière de réduction de la pauvreté. Le
rapport relève cependant que, pour obtenir une poussée économique sur le long
terme, la croissance agricole doit déclencher une hausse des emplois industriels.
Cela a été le cas en Asie du Sud-Est, mais pas encore en Afrique. L’industrie
représente seulement environ 10 % des emplois de la région, moins que partout
ailleurs dans le monde, à l’exception des États arabes.
Exploiter le potentiel de l’agriculture africaine aura un coût. Cela pourrait
nécessiter 315 à 400 milliards USD d’investissements publics et privés au cours des
dix prochaines années, à destination de tous les aspects de la production et de la
transformation alimentaire, du marketing et du transport.
L’agriculture africaine doit réduire l’écart entre les rendements actuellement
obtenus et la quantité pouvant être effectivement récoltée. Dans près de 65 %
des terres arables de l’Afrique, le sol ne dispose pas des nutriments nécessaires. De
plus, de nombreux agriculteurs n’ont pas les moyens de production et le savoir
technique pour leur redonner vie. Ces pertes de po revenus potentiels s’élèvent à 68
millions USD pour les agriculteurs africains. À titre d’exemple, les agriculteurs
africains cultivant des variétés nouvelles et améliorées de maïs et autres cultures
améliorent leurs rendements de 28 % en moyenne, contre 88 % en Asie.