Av. Conselheiro Fernando de Sousa, 21-A 1070-072 Lisboa • Tel | +351 21 324 19 30 • Fax | +351 21 324 19 44 • e-mail | info@gpeari.pt • www.gpeari.pt
Étude sur les modèles de financement de la culture
Modèles de financement de la culture
On a lancé une étude sur les modèles de financement de la culture dans le but d'établir un lien
entre la culture et les arts d'une part et les sources de financement de ces activités d'autre part.
On a envoyé un questionnaire à 27 pays, et 10 d'entre eux ont répondu: France, Grèce,
Canada, Lettonie, Norvège, Russie, Sénégal, Slovénie, Suède et, bien sûr, Croatie. Les
réponses fournies ont servi à la préparation de ce rapport. Cependant, nous avons utilisé aussi
des documents du Conseil de l'Europe, de l'UNESCO, de l'Union européenne, de
l'Observatoire de Budapest et du CIRCLE Network, ainsi que des ouvrages spécialisés traitant
du financement de la culture, de la politique culturelle et du rapport entre la culture et
l'économie. L'un des principaux problèmes que nous avons rencontrés est le manque de
données sur le financement du secteur civil sans but lucratif, la pauvreté des données sur le
rôle des fondations privées dans le financement de la culture, et l'impossibilité de comparer
différents indicateurs du rapport entre le secteur privé et les activités culturelles, parce que les
définitions sont trop disparates et qu'on ne peut recouper les données recueillies. Ces
difficultés témoignent de la nécessité d'unir nos efforts pour établir des statistiques culturelles
de qualité qui embrassent tous les segments des activités culturelles, et non seulement la
culture institutionnelle et les finances publiques, au sujet desquelles il existe des données
statistiques détaillées et de qualité dans la plupart des pays.
Les modèles de financement de la culture découlent des modèles de politique culturelle et ils
sont des instruments essentiels pour la mise en oeuvre de politiques culturelles particulières.
On distingue plusieurs modèles fondamentaux de politique culturelle, selon le type de
gouvernement et le rôle que joue ce gouvernement dans la mise en application des modèles.
Ce sont le modèle libéral, le modèle de gestion étatique, le modèle de décentralisation et le
modèle para-étatique, ou modèle d'autonomie. Le modèle libéral insiste sur l'initiative privée
dans le domaine des arts et de la culture, le marché étant le seul régulateur des rapports dans
ce domaine. Selon ce modèle, l'industrie culturelle joue un rôle central, puisqu'elle met au
point des produits culturels normalisés destinés à la consommation de masse. Le modèle de
gestion étatique est caractérisé par l'omniprésence de l'État dans la vie culturelle. L'État
finance le développement de la production culturelle et il va parfois jusqu'à définir les
principes qui doivent guider le développement à long terme des arts et de la culture. Selon ce
modèle, les institutions culturelles, dirigées par l'État et initiatrices de programmes élitistes,
jouent le plus grand rôle. Le modèle de décentralisation est caractérisé par la coexistence de
plusieurs politiques culturelles locales, du fait que la culture relève de la compétence des
municipalités et des régions. Selon ce modèle, ce sont les municipalités et les institutions
culturelles urbaines qui jouent un rôle prédominant. Le modèle d'autonomie se distingue
principalement par le rôle majeur que jouent les organisations professionnelles qui sont
investies d'un pouvoir par l'État, même si celui-ci n'a généralement pas une influence directe
sur elles. Bien que ce modèle soit élitiste par définition, il favorise l'élitisme dans les projets
plutôt que dans les institutions, de sorte que ce sont les projets culturels et artistiques qui
jouent un rôle prédominant selon ce modèle. Certes, aucun de ces modèles n'existe dans sa
Av. Conselheiro Fernando de Sousa, 21-A 1070-072 Lisboa • Tel | +351 21 324 19 30 • Fax | +351 21 324 19 44 • e-mail | info@gpeari.pt • www.gpeari.pt
forme la plus pure, en sorte que toutes les politiques culturelles nationales sont imprégnées
des caractéristiques propres à chacun d'eux.
Les modèles de financement de la culture sont alignés sur les modèles de politique culturelle,
de sorte que selon le modèle libéral, le marché est la source de revenus fondamentale; selon le
modèle de gestion étatique, l'État est la source de revenus principale; selon le modèle de
décentralisation, ce sont les municipalités qui sont les bailleurs de fonds; et selon le modèle
d'autonomie, c'est encore l'État qui est le bailleur de fonds, mais par l'intermédiaire de
diverses fondations. De toute évidence, on parle ici de la majorité du financement, et non de
tout le financement, de sorte que dans chacun de ces modèles, on peut trouver des exemples
de financement des arts et de la culture par l'État, les municipalités, divers fonds ou
fondations publics, privés ou mixtes, le parrainage et les activités du marché. Il faut aussi
prendre en compte les dons des particuliers, des organismes et des sociétés, qui ont joué
pendant longtemps un rôle considérable dans le financement de la culture et des arts, de la
Renaissance à l'Avant-garde. Néanmoins, dans une majorité de pays on peut classer la plupart
des revenus dans deux catégories : contributions de l'État et contributions des parrains. Les
revenus provenant de la vente d'oeuvres d'art sont négligeables. Les industries culturelles
forment une catégorie à part et on ne peut les assimiler aux autres produits culturels, pas plus
qu'aux biens ordinaires. Outre les fonds provenant de l'État et du secteur privé, les industries
culturelles bénéficient du généreux apport des fondations. Celles-ci peuvent être publiques ou
privées, mais elles jouissent d'une autonomie dans le choix des projets à financer, suivant leur
raison d'être. Les fondations qui appartiennent au secteur non gouvernemental sans but
lucratif et qui assument un rôle de plus en plus important dans la production culturelle
constituent un segment extrêmement intéressant et font le lien entre le secteur privé et le
secteur public. Par conséquent, nous avons décidé d'organiser ce rapport selon différents
thèmes : la régulation du secteur de la culture, le financement public de la culture, le secteur
privé et son rôle dans le financement de la culture, le secteur civil sans but lucratif
(notamment le financement de la culture par les fondations), et les industries culturelles
comme la meilleure illustration des rapports qui existent aujourd'hui entre la culture et
l'économie.
Régulation des activités culturelles
Dans la plupart des systèmes sociaux, la gestion des rapports entre les différents segments de
la société et à l'intérieur de ces segments repose sur une certaine forme de régulation. De nos
jours, le système économique, vu comme l'un des systèmes sociaux fondamentaux, est régulé
normalement par le marché et l'État. Peut-être serait-il plus juste de dire que dans les systèmes
sociaux, la régulation du système économique s'opère à la fois par les mécanismes du marché
et l'action gouvernementale. Depuis une vingtaine d'années, sous l'influence de l'idéologie
néo-libérale on insiste beaucoup sur la régulation par les mécanismes du marché. Ainsi, l'État
délaisse graduellement le système de réglementation pour faire place aux forces du marché -
ou à l'auto-régulation (quoique l'on puisse se demander s'il s'agit vraiment d'auto-régulation) -
Av. Conselheiro Fernando de Sousa, 21-A 1070-072 Lisboa • Tel | +351 21 324 19 30 • Fax | +351 21 324 19 44 • e-mail | info@gpeari.pt • www.gpeari.pt
lequel marché se substitue à l'État pour réguler le système économique selon ses propres
règles.
La régulation des marchés existe en économie depuis que les collectivités humaines ont appris
à s'organiser; ce n'est donc pas quelque chose de nouveau. Toutefois, la nouveauté réside dans
le fait que, aujourd'hui, la dimension économique - pour la plupart des pays à tout le moins -
imprègne presque toutes les autres dimensions de la vie humaine, en sorte que les valeurs du
système économique sont transposées dans d'autres systèmes : religion, culture, science,
technologie, etc. Les valeurs propres à ces systèmes ne sont pas disparues, mais elles n'ont
plus l'importance qu'elles avaient. Des processus semblables ont déjà été observés dans le
passé, par exemple il y a eu des périodes dans l'histoire où les valeurs religieuses étaient
prédominantes et imprégnaient toutes les relations sociales - il existe encore de telles sociétés
aujourd'hui. Donc, un système de valeurs propre à un segment des relations sociales est
imposé à l'ensemble de la société et en détermine tout le fonctionnement. Les théoriciens
emploient divers termes pour décrire ce processus - des idéologies aux paradigmes - mais ce
qui est commun à tous, c'est l'appréciation selon laquelle l'évaluation même du processus est
dictée par celui-ci. Par conséquent, les sociétés dominées par les valeurs religieuses ou celles
dominées par les valeurs qui découlent de l'économie de marché sont convaincues de leur
supériorité morale et cognitive sur la base même de ces valeurs. Il est donc clair que ces
valeurs ont de fortes chances d'imprégner toutes les dimensions de la vie sociale.
Lorsque nous parlons des arts et de la culture dans ce contexte, deux questions fondamentales
surgissent : la première a trait au contenu et à la forme des arts et de la culture, c'est-à-dire les
valeurs qu'ils expriment et qu'ils véhiculent, les composantes esthétiques qu'ils renferment, et
ainsi de suite, et la seconde a rapport aux modèles organisationnels à l'intérieur desquels ce
contenu est créé. Lorsqu'il est question du contenu de la culture, on sait qu'il est déterminé lui
aussi par les valeurs dominantes dans la société. Dans son sens le plus large, la culture est un
système où l'information circule, de sorte que les valeurs sont transmises ou déniées
principalement par les pratiques culturelles. Le contenu et la forme de la culture sont donc
indissociables des valeurs dominantes dans la société. Cependant, la nature de ce lien peut
être très variée : de l'absence d'une influence directe sur le contenu à la censure flagrante. En
outre, les modèles organisationnels sont eux aussi déterminés par les valeurs dominantes dans
la société, quoique indirectement, parce qu'ils dépendent des formes et du contenu de la
culture, mais aussi directement, par l'influence du système des valeurs sur les formes
organisationnelles.
De nos jours, lorsque le marché devient le mode normatif de régulation des systèmes qui sont
hors de la sphère économique et lorsque les valeurs découlant des relations axées sur le
marché sont elles aussi transposées dans d'autres systèmes de relations, la culture et les
rapports intraculturels sont eux aussi déterminés essentiellement par ces facteurs. On peut
l'observer facilement par le langage qui est utilisé aujourd'hui dans le domaine culturel, un
langage propre au marché : produits culturels, biens culturels, services en culture, gestion
culturelle, marketing culturel, et ainsi de suite. Cela illustre non seulement le paradigme
dominant dans nos sociétés, mais encore - et surtout ici - la place de la culture dans la société.
Av. Conselheiro Fernando de Sousa, 21-A 1070-072 Lisboa • Tel | +351 21 324 19 30 • Fax | +351 21 324 19 44 • e-mail | info@gpeari.pt • www.gpeari.pt
La culture et l'économie étaient liées dans le passé, mais aujourd'hui il semble qu'elles soient
inextricablement liées, de sorte que certains auteurs pensent que la culture et l'économie ne
peuvent être considérées comme des systèmes indépendants l'un de l'autre et que les frontières
qui les distinguent traditionnellement ont été gommées. Peut-être dira-t-on la même chose des
autres systèmes, mais ce n'est pas l'objet de notre propos dans ce rapport. Ce lien entre la
culture et l'économie se reflète dans deux processus connexes : l'" acculturation " de
l'économie et l'économisation du culturel.
La culture a toujours joué un rôle majeur dans l'économie, en définissant l'orientation et les
dimensions du développement économique. Les types d'organisation, le rapport au travail, les
modèles de distribution, la production et le transfert des connaissances, et d'autres facteurs
économiques essentiels sont indissociables de la culture. Pourtant, lorsque nous disons que
l'économie est " acculturée ", nous ne soulignons pas le rôle de la culture, mais le fait que
celle-ci a été le moteur de l'économie dans la seconde moitié du XXe siècle, tout comme le fut
l'automobile dans la première moitié. Et de fait, la croissance de ce secteur de l'économie que
nous appelons l'industrie culturelle a été formidable, et cette industrie demeure la composante
la plus prospère des économies européennes, son taux de croissance annuelle pouvant
atteindre 8 %. Nul besoin de statistiques pour vérifier cette assertion : le cinéma,
l'enregistrement sur disque ou sur bande, les médias imprimés et électroniques et l'édition,
pour ne nommer que ceux-là, sont devenus ces dernières années les facteurs économiques les
plus importants. C'est le segment le plus visible de l'économie culturelle, mais il est
intéressant de mentionner cet autre segment, non moins important, qui fait de plus en plus de
place au design et au marketing dans la vente des produits. La transformation esthétique du
produit le plus banal et le rapprochement du marketing avec les habitudes de vie et les
ensembles de définitions forment aujourd'hui une composante majeure du processus
économique. À titre d'exemple, on se bornera à dire que dans beaucoup de cas, les entreprises
qui sont considérées comme des producteurs ne produisent en réalité que des images (au sens
originel du terme), ce qui est fondamentalement un processus culturel.
Or, qu'arrive-t-il à la culture dans ces circonstances, c.-à-d. lorsqu'elle devient un facteur
économique de plus en plus important? C'est la question qui nous intéresse ici. Par-dessus
tout, les mesures et les critères qui régissent le système économique deviennent de plus en
plus importants dans le domaine culturel. Les recettes des salles de cinéma, les recettes des
ventes et la fréquentation sont les mesures fondamentales du succès dans les industries
culturelles. Les termes utilisés dans les discussions sur la culture sont des termes
économiques, p. ex. ressources, viabilité, développement, faisabilité, etc. Cet usage a
naturellement un impact sur la démarche créatrice dans la culture et sur les critères appliqués
dans ce domaine. Par exemple, les artistes, les érudits, les chercheurs, les écrivains et les
philosophes se livrent de nos jours à des activités de création en étant pleinement conscients
de l'effet commercial que peuvent avoir leurs oeuvres. Avant même que ne débute la
démarche créatrice, on définit les groupes cibles auxquels sont destinés les oeuvres ou les
ouvrages, on fait des analyses coûts-avantages, on met sur pied des groupes de discussion et
on emploie tous les mécanismes disponibles dans l'économie. Cette façon de faire découle de
la logique du marché, à laquelle obéit également le domaine de la culture. Donc, dans une
perspective de paradigme, le cadre de notre analyse est défini ici par l'acculturation de
Av. Conselheiro Fernando de Sousa, 21-A 1070-072 Lisboa • Tel | +351 21 324 19 30 • Fax | +351 21 324 19 44 • e-mail | info@gpeari.pt • www.gpeari.pt
l'économie et l'économisation du culturel, ce qui soulève de nombreuses questions
relativement à la culture pour l'avenir : utilisation de l'espace public, formes publiques de
communication, expression critique dans les arts, etc.
Néanmoins, malgré que ces processus dictent l'orientation du développement culturel, la
culture n'est pas sous l'influence exclusive de l'économie et des forces du marché, en sorte que
beaucoup de pays utilisent depuis un certain temps - tandis que d'autres en sont à leurs débuts
- des instruments de politique culturelle au moyen desquels ils entendent préserver
l'autonomie de la culture. Dans les ex-pays socialistes, on insistait pour préserver
l'indépendance de la culture face à la politique, qui a déterminé pendant une cinquantaine
d'années le paradigme absolu des valeurs dans la société. Aujourd'hui, le paradigme n'est plus
le même, la situation de la culture non plus, de sorte qu'une nouvelle conjoncture suppose de
nouveaux risques. Mais nous aurions tort de conclure que le seul objet des politiques
culturelles est de préserver l'autonomie de la culture. Ces politiques ont d'autres motifs, à
savoir une diffusion plus large et plus équitable de la culture (démocratisation de la culture),
la protection de cultures nationales particulières (ici, il est intéressant de noter que cette
protection a un double motif : l'un est économique et vise à protéger l'industrie culturelle
nationale, tandis que l'autre est politique et vise à préserver l'identité nationale en tant que
mécanisme de gestion politique), l'établissement ou le maintien de liens avec les autres
cultures, etc.
Il existe plusieurs modèles fondamentaux de politique culturelle, mais ils proposent tous des
instruments de politique culturelle, que les responsables de l'application des politiques
utilisent de diverses manières. Il s'agit donc d'instruments financiers, juridico-politiques et
organisationnels et d'instruments porteurs de valeurs. Dans cette étude, nous avons concentré
notre attention sur les instruments financiers de la politique culturelle, qui comprennent les
subventions, ainsi que la politique de taux d'intérêt et la politique fiscale. Les instruments
financiers de la politique culturelle servent à protéger la créativité culturelle et artistique
contre l'influence du marché et de l'économie, car de nombreuses formes d'art ne pourraient
subsister sans les subventions. Or, subventionner la culture et les arts au nom du principe
d'autonomie pose problème, parce que dans ce cas la culture est isolée du contexte social.
Malheureusement, les politiques de subvention entraînent une diminution de la fréquentation
plutôt qu'une hausse. Il existe toute une série d'indicateurs qui révèlent le manque d'intérêt du
public pour des événements du domaine de l'art contemporain ou des événements culturels
qui ne sont pas de l'ordre du spectacle, etc. Le culturel qui est isolé et protégé, qui prend son
essor en vase clos n'est tout simplement pas intéressant pour le public, et sans un public - ou
des consommateurs, pour parler comme les économistes - la culture n'existe pas. Il faut donc
élargir le champ des politiques de subvention de manière à ce qu'elles aient une incidence
directe sur le public consommateur de culture et qu'elles favorisent divers projets à caractère
social et éducatif qui, en bout de ligne, éveilleront l'intérêt du public pour des événements
culturels autres que les spectacles. Une autre option consiste à favoriser le développement des
activités culturelles et des arts dans le cadre de paradigmes généraux qui représentent et
déterminent les conditions de création. Il est vrai que le marché a ses propres mécanismes
d'évaluation des produits, qui diffèrent de ceux appliqués dans le domaine culturel; cependant,
la culture aura un rapport particulier avec ces évaluations. Ce rapport prend forme au moyen
1 / 16 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !