Alexandre Farnèse, évêque de Parme en 1509 puis élu pape (Paul III, 1534) avec un plan adapté à l’époque : paix, lutte contre les infidèles,
restauration morale du clergé. Usant du népotisme, il entend par ailleurs transmettre à sa famille des charges politiques importantes visant à
substituer à la famille Médicis, la famille Farnèse. Il confie dans un premier temps le duché de Parme et Plaisance à son fils, Pier Luigi, lequel, ne
parvint pas à faire accepter son pouvoir par les édiles locaux et sera assassiné à Piacenza en 1547, son fils Ottavio, prend le pouvoir.
Titien, Alessandro Farnèse et ses petits fils, Ottavio et Alessandro, v. 1545, / Pier Luigi Farnèse, Premier duc de Parme, 1545-1547
La réussite de Parme et du duché est à porter au crédit de l’audace politique d’Ottavio, de la grande personnalité de stratège et condottiere des
Flandres d’Alessandro et de la volonté édificatrice et réformatrice de Ranuccio, conjuguées à l’activité diplomatique des papes et cardinaux Farnèse,
qui, depuis Rome, réalisent une perpétuelle médiation entre la France, les Habsbourg et l’église, ainsi que la politique matrimoniale. En 1545, Ottavio
prend le pouvoir à la suite de son père. Il créera une cour concurrente de cette de Mantoue ou de Ferrare.
Dans la villa suburbaine Palazzo del Giardino Jacopo Bertoia : crée un décor de petites scènes des amours des Dieux. Traitement des fonds sur
un mode imaginaire. Pas de volonté de réalisme. 1er étage : 2 salles qui rendent compte du caractère raffiné et de l’érudition de sa cour. Manifestation
des plaisirs, de l’idéal chevaleresque, les aventures fantastiques, l’amour, le plaisir. Sujets tirés du Roland Furieux (chants VI et VII). Exécutées vers
1568-70 par le peintre bolonais Girolamo Mirola. De la salle du Roland Furieux, on accède à celle du Roland amoureux de Matteo Maria Boiardo (livre
II, chant VII). Dilatation de l’architecture pour créer espace où les figures plastiques se meuvent de manière sinueuse.
Jacopo Bertoia, Figures à cheval, v. 1566-1568, Parma, Galleria Nazionale, Mars et Vénus, 1566-1568, Parme, Galleria Nazionale/ Girolamo Mirola,
Roland Furieux (détail), v. 1568-1570, Parme, Palazzo del Giardino / Girolamo Mirola et Jacopo Bertoia, Salle du baiser, Parme, Palazzo del Giardino
D’autres œuvres ornaient le palais del Giardino, comme les 11 tableaux du flamand Soens, caractéristiques d’un mélange italiano-flamand au contenu
hautement érotique. Jean Soens, Jupiter et Antiope, v. 1570, et Pan et Sélène, v. 1570, Naples, Capodimonte.
L’inventaire de la collection Farnèse de 1587 : mentionne des peintures, mais aussi de nombreux objets d’orfèvrerie. Hyperbole, similitude, métaphore
sont utilisées pour célébrer le pouvoir naissant et en amplifier le consenso.
Joachim Beuckelaer, Le marché de campagne, Le marché aux poissons, v. 1570-1580, Naples, Capodimonte.
Le vocabulaire encomiastique n’existe pas chez ces princes mais est pris en charge par des nobles de la cité comme au Palazzo Lalatta où
Lattanzio Gambara, v. 1572-73 peint des représentations allégoriques de la bataille de Lépante, 1571, dans la salle des géants.
Lattanzio Gambara, Don Antonio Lalatta, 1572-1573 Et Télamons, Salon des géants, 1572-1573, Parme, Palazzo Lalatta.
Commandes religieuses : Vocabulaire et style sont différents dans le domaine religieux, bien que les Farnèse aient joué un rôle dans la commande.
Michelangelo Anselmi, Couronnement de la Vierge, 1540-1548, Santa Maria della Steccata.
Santa Maria Assunta, extension des décors Girolamo Mazzola Bedoli qui était profondément marqué par le style de Parmesan, reçoit la commande
de la fresque de l’arc oriental de la coupole, la voute du chœur et le catino de l’abside. Réalisés en 1544. Entre 1555 et 1557, le même artiste réalise
les peintures de la voûte de la nef centrale avec un sens exubérant du décoratif. Décor des parois latérales de la nef centrale par Lattanzio Gambara :
la vie du Christ avec vision globale réunissant les grands thèmes de l’orthodoxie catholique. 13 travées décorées sur le même mode : Prophètes ou
personnages contemporains avec textes vetero testamentaires liés à la scène principale. Sur le revers de la façade, modification du schéma de
composition avec Ascension du Christ inscrite dans une vue unitaire et vertigineuse et architecture en trompe-l’œil. Décor à fresque de la voûte et des
catini absidali entre 1571 et 1577 du transept nord : c’est le bolonais Orazio Samacchini qui le réalise : image tosco-romaine (Michel Ange).
Girolamo Mazzola Bedoli, Christ en gloire avec la Vierge et les Saints Jean Baptiste et Jean l’Evangéliste, Pierre, Paul, des saints et des anges
musiciens, 1538-1544, Santa Maria Assunta, cul-de-four de l’abside. Décor de grottesques, 1555-1557, Santa Maria Assunta, voûte de la nef centrale.
Gambara, Scènes de la Vie du Christ, (détail), et Ascension du Christ, 1567-1573, Parme, Santa Maria Assunta, revers de la façade occidentale.
Orazio Samacchini, Moïse et le serpent d’airain, 1576-1577, Parme, Santa Maria Assunta, transept Nord.
Jan Soens, La Fuite en Egypte, 1580, Panneaux de l’orgue, Parme, Santa Maria della Steccata.
Reconstruction de l’église de la Santissima Annunziata La forte articulation externe correspond à l’articulation des espaces internes mais moins
visibles. Autel majeur, œuvre provenant de l’église antérieure : Zaganelli, Madonne trônant entourée des saints Jean-Baptiste, Jean l’évangéliste,
François et Bernard abbé, 1518 (daté signé). Le peintre, avec Cima da Conegliano a été l’un des référents des artistes du début du Cinquecento.
Santa Maria degli Angeli. Edifié vers 1569 pour abriter une image de la Vierge protectrice pour les murailles de la ville. La compagnia della Madonna
degli Angeli confie le projet à l’architecte Giovanni Francesco Testa. Entre 1588 et 1592 : réalisation des fresques de cette coupole et de ses
pendentifs par Giovanni Battista Tinti qui représente un Paradis surpeuplé dominé par les images de l’Esprit, de la Vierge de l’Assomption, de Dieu le
Père, et des prophètes. Au XVIIe, nef de gauche est peinte à fresque avec des épisodes de la vie de la Vierge (nef de droite) et de la vie du Christ (à
gauche). En totale correspondance avec les préceptes de la contre-réforme, mais en même temps, on conserve le souvenir de Parmesan et Corrège,
mais aussi de Pordenone et enrichissement de la manière bolonaise qui avait apporté à Parme un air d’académisme michelangelesque.
Tinti, Le Paradis, 1588-1592 Coupole. Et Bernabei, La Vie de la Vierge et du Christ, Voûte, 1617-20, Parme, Santa Maria degli Angeli.
Ranuccio I (duc de 1592 à 1622), développe une structure urbaine inédite avec reconstruction de nouvelles églises et impulsion définitive pour
l’édification de la Pilotta avec l’escalier monumental et le théâtre.
Girolamo Mazzola Bedoli, Parme embrassant Alexandre Farnèse, v. 1556, Parme, Galleria Nazionale / Antonis Mor, Portrait d’Alexandre Farnèse en
jeune homme, 1557, Parme, Galleria Nazionale. /Jean Baptiste de Saive, Portrait d’Alexandre Farnèse, v.1585, Parme, Galleria Nazionale/ Artiste
flamand inconnu, Portrait de Marguerite Aldobrandini et Ranuccio Ier, v. 1625, Parme, Fondation Casa di Risparmio/
Peut-être commande de Marguerite d’Autriche, mère d’Alexandre, vers 11-12 ans avec armure de parade qui contraste avec les jambes longues
prises dans des collants rouges. A l’époque on prévoyait pour le jeune prince une destinée impériale comme pour son grand père Charles V ou son
oncle Filipe II qui ont veillé à son éducation (aura des répercutions, notamment sur sa religiosité). Parme exhibe le blason de la cité sur son bouclier
brillant ; La religiosité du duc est souvent vue comme simple superstition et pratique vide de sens (voire absence de pratique ?). Ranuccio tente de
s’inspirer des figures de la réforme catholique. Le Christ comme modèle idéal mais plus encore, comme objectif de perfection morale à imiter dans
ses actions quotidiennes, conciliant vie active et vie contemplative. Agostino Carrache, Amours, 1600-1602, Parme, Palazzo del Giardino / Giovanni
Battista Trotti dit Il Malosso, L’élection de l’Immaculée, 1594-1595, revers de la façade, Parme, Santa Maria della Steccata/ Bartolomeo Schedoni, La
Charité, v. 1611, Naples, Capodimonte/ Jacques de Backer, Avarice, Luxure, Colère, Mélancolie, 1555-1585, Naples, Capodimonte.
Un épisode un peu sombre se déroule avec la conjuration de 1611, les conjurés sont exécutés le 19 mai 1612, tous les biens sont de plus confisqués
et en particulier les œuvres. Portrait de Léon X de Raphaël, Madone à la chatte de Giulio Romano, Corrège, Le mariage mystique de sainte
Catherine, v. 1518, Naples, Capodimonte.
Ottavio et ses successeurs étaient à la tête d’un duché avec peu de ressources et peu respecté par ses voisins. Plutôt que de faire réaliser des
œuvres qui symbolisaient le pouvoir, les Farnèse préfèreront se faire représenter eux-mêmes comme de grands mécènes, plus grands que les Este
ou les Gonzague qui les considéraient comme des parvenus.