A RENÉ, DANIÈLE, PHILIPPE, MARIE-LAURE, CLAUDE, EDITH(+), DANIEL, ODETTE,
BRIGITTE et TIANOU, et leurs familles........
VOS ANCÊTRES CHEVALIER, NOTABLES DE COLMAR AU XIXè SIÈCLE
AVANT-PROPOS
Dans une précédente chronique j’ai brossé l’histoire de vos ancêtres Chevalier, des
fabricants-drapiers, dans le Sedan calviniste (“la petite Genève”) du XVIIe siècle, et conté les
déboires qu’ils eurent à subir lorsque Louis XIV révoqua l’Edit de Nantes.
Le 9 thermidor de l'An II, sous la Terreur, le jeune Michel Simon Chevalier
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, âgé de 35 ans
et tout récemment arrivé à Colmar, épouse Anne Catherine Sitter, la fille d’un marchand
boutonnier de la ville. Michel Simon a déjà acquis des biens : il apporte en mariage une maison
avec dépendances sise 23-27, rue des Marchands (celle que la famille conservera tout au long du
XIXè siècle)
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, plus un montant de vingt mille livres en argent comptant. Jusqu’en 1870, trois
générations de Chevalier (Michel Simon, Edouard père et Edouard fils) exerceront dans cette
belle maison la profession de marchand drapier.
On se rappelle qu’Edouard Chevalier (fils) était le père de Mélanie Henriette Léonie
Chevalier (née en 1862) et d’Emma Anna Marguerite Chevalier (née en 1865), destinées à
devenir, toutes deux et successivement, les épouses de Georges Théodore Weiss, votre arrière-
grand'père.
Nous ne connaissons pas pour l'instant les circonstances précises qui amenèrent Michel Simon
Chevalier à quitter Sedan pour Colmar à l’aube de la Révolution française, mais il y a fort à parier
que ce déplacement ait été lié aux opportunités commerciales favorables qui s'y présentaient en
cette deuxième moitié du XVIIIe siècle : à l'intérieur de la cité de Colmar, où elle avait été
florissante dans le passé, la draperie connaissait en effet un regain de vitalité ; en
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il s’agît du fils de Samuel Chevalier , négociant drapier à Sedan, et de Marie Anne Saubert.
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C'est en 1792 que Michel Simon Chevalier avait acheté, pour 40 000 frs, cette propriété, dite “zum Oesterreich", de la
rue des Marchands (Schädelgasse - rue des Crânes - devenu Kaufmannsgasse en 1783), dans la vieille ville. Auparavant, la
maison avait appartenu au drapier Mathäus Metzger (on reste entre collègues!). La fille de ce dernier avait épousé le
commerçant et administrateur de la paroisse protestante Johann Hoffmann, qui avait habité la maison de 1762 jusqu'à sa
mort le 25 mars 1771. Sa veuve, qui avait plus tard vendu la maison à Chevalier, avait dû avoir quelque démêlé avec ce
dernier, car “pour rectifier l'opinion publique et parce que l'honneur l'exigeait, (elle) fit publier des informations et des
remarques contre Chevalier”.
Cette maison Chevalier, très grande et très bien située pour le commerce, était connue dans toute la région de Colmar.
L'enseigne commerciale au nom de :
"CHEVALIER FRÈRES,DRAPERIES, NOUVEAUTÉS"
y figurait encore à la fin du 19è siècle. La maison est ornée de l'Aechterstein (la pierre des bannis), rappelant qu’en 1358,
le lundi suivant la Ste Agnès, le duc Rodolpe d'Autriche, administrateur de l'Empire, avait fait démolir la maison qui était
située à cet endroit et bannir les occupants. La pierre commémore cet acte et explique la désignation "zum Oesterreich"
attribuée à la maison.
1740, si ce secteur restait essentiellement artisanal et menacé par "le roi coton", il était
néanmoins contrôlé par le riche marchand-drapier Jean Frédéric Sandherr, frère cadet d’un des
Stettmeister
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de Colmar, dont l'ampleur des affaires attirait auprès de lui de jeunes fils d'artisans
ou de manufacturiers en apprentissage. Il n'est pas impossible que Michel Simon Chevalier ait
été l'un d'eux, comme il est tout aussi possible qu'il ait fait partie de ces "voyageurs intelligents"
chargés d'assurer à l'extérieur le développement commercial des firmes drapières sedanaises.
Le jeune sedanais, de religion calviniste, n’entrait pas à Colmar par la petite porte : dès son
arrivée, et jusqu’à la guerre de 1870, c’est presqu’exclusivement avec des familles de notables
luthériens - fabricants, marchands, négociants, magistrats ou pasteurs (voire militaires à
l’occasion) - figurant sur les almanachs de la ville (le Who’s who local de l’époque), que Michel
Simon et ses descendants contracteront des alliances.
Avant de faire plus amplement connaissance avec quelques-unes d’entre elles, nous
évoquerons en guise
d’introduction les Sandherr,
cette vieille famille
luthérienne de Colmar, dont
la présence séculaire parmi
les notables de cette ville
nous permettra de faire la
lumière sur quelques
moments spécifiques de son
histoire. Michel Simon
Chevalier pourrait d’ailleurs
bien leur avoir son
introduction dans la bonne
société : sa petite-fille, nous
le verrons, épousera un
Sandherr . Qui donc sont-
ils?
LA FAMILLE SANDHERR JALONNE L’HISTOIRE DE COLMAR
On connaît des Sandherr à Colmar depuis le XVIe siècle : venant de Souabe, Andreas
Sandherr s’était établi tonnelier et aubergiste à Colmar (“Au Lièvre”, Grande Rue) ; il avait été
admis comme bourgeois de la ville vers 1535.
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Un comité appelé magistrat assurait l'administration de la ville : à sa tète se trouvait l'Obristmeister, élu pour un an par
les tribus, ou corporations, (comme l'Ammeister à Strasbourg, ou l'Oberstzünftmeister à Zürich); sous l'Obristmeister
siègeaient plusieurs Stettmeister (sorte d'adjoint au maire), également élus, un prévôt qui rendait la justice, et un
Stadtschreiber, ou greffier-syndic.
Un conseil restreint de vingt-quatre membres, réglait et partageait leur pouvoir, et cent quarante-quatre élus des tribus
formaient un grand conseil, que l'on ne convoquait que dans les circonstances extraordinaires. Le Stettmeister mention
dans le texte est Jean Mathias Sandherr (1708-1766) - voir plus loin,
Son fils, un autre Andreas, qui avait étudié le droit à Tübingen et occupait en 1576 la
fonction greffier-syndic de Colmar en 1576, contribuera activement à y introduire la Réforme ;
voici comment :
Malgré une pratique défaillante de la religion traditionnelle, et l’intérêt manifesté par une
tranche importante de la population pour les idées nouvelles, Colmar était restée jusqu’alors l’un
des derniers bastions de la religion romaine en Alsace. L’empereur Charles-Quint ayant menacé les
habitants d’une punition sévère s’il adoptaient les doctrines de Luther, le magistrat (le conseil qui
administrait la ville) demeurait prudent. Aussi les Colmariens couraient-ils en foule entendre les
prédicateurs dans les villes voisines de Horbourg et de Riquewihr, le duc de Wurtemberg avait,
dès 1535, imposé la Réformation.
L’arrivée à Colmar, au sein du magistrat, de personnalités expulsées de Sélestat a cause de
leur foi, va s’avérer determinante : en 1560, à leur instigation et prétextant de travaux
d’entretien, on procède à la démolition de sept autels latéraux dans la collégiale Saint-Martin, sans
le consentement de l’évêque. Dix ans plus tard, le dimanche de l’Epiphanie 1571, Jean Schuler,
qu’Andreas Sandherr avait contribà faire nommer curé de la collégiale Saint-Martin, fait, à la
grande indignation du chapître, un pas décisif en stigmatisant du haut de la chaire les mœurs
reprochés au clergé de son temps. Aussi, devant l’accroissement indéniable des adhérents au
protestantisme, et estimant que les dispositions de la Paix d’Augsbourg de 1555 accordait à la ville
libre de Colmar le droit d’avoir la religion de son choix, le magistrat, sur la proposition de
l’Obristmeister Michael Buob, prend la décision d’autoriser le libre exercice du culte
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: le
dimanche 15 mai 1575, cette décision est formellement signifiée à chacune des corporations (le
greffier Andreas Sandherr leur en ayant fait la lecture dès cinq heures du matin!
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), et, trois
heures plus tard seulement, est célébré, dans l´église des Franciscains, vide depuis plus de trente
ans, et devant une assemblée de plus de trois mille personnes, le premier culte évangélique de
Colmar, présidé par le pasteur Jean Keller, de Jebsheim. La foule émue et enthousiaste y chante
pour la première fois, en allemand, les paroles d’un choral luthérien : Es ist das Heil uns kommen
her von Gnad und lauter Güte.”
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A la suite d’un incendie à la collégiale Saint-Martin en 1572, il avait fallu fondre de nouvelles cloches. Un membre du
magistrat avait alors commenté : “ Man musse zu den neuen Glocken auch neue Predicanten aufstellen” = “Aux nouvelles
cloches, il faut de nouveaux prédicateurs.”
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le texte comportait la convocation suivante : “"N'ayant pu trouver des prédicateurs capables, il a été décidé, your
satisfaire ceux qui se rendent les dimanches au service religieux dans des églises extérieures à la ville, de nommer un
homme pieux et honorable, acquis a la confession d'Augsbourg, pour prêcher dans 1'andenne église des Franciscains.
Comme il est impossible de trouver séance tenante une telle personne, Jean Cellarius, pasteur à Jebsheim, fera de ce fait la
première prédication dans cette église à huit heures. Libre à chacun de venir y assister. L'honorable conseil n'entend
absolument pas forcer qui que ce soit à embrasser contre son gré I'une ou I'autre religion. Chacun doit au contraire
conserver sa pleine et entière liberté."
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“Le Salut nous est venu par grâce et pure miséricorde.”
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