1 APPARTENANCES ET ETHNICITE Histoire et analyse du sentiment national (compléments). 3) Le XIXe siècle ou le triomphe de l’idée nationale A) la formation de nouveaux Etats-nations a) La réalisation de l'unité italienne (1850-1870) 1) Les préparatifs (1850-1859) - L’Italie est divisée en 7 Etats dont 4 sont dominés par les Habsbourg royaume lombardo-vénitien, grand-duché de Toscane, duchés de Parme et Modène les 3 autres : le Pape dans les Etats pontificaux, le roi d’Espagne dans le royaume des DeuxSiciles (dans les deux cas des monarchies absolues) ; seul le royaume de Piémont Sardaigne est une monarchie libérale et constitutionnelle (partie autour de Chambéry, Turin, Nice + la Sardaigne) = Le Piémont Sardaigne est, avec le roi Victor-Emmanuel II et Cavour, président du Conseil de 1852 à 1859 (puis de 1860 à 1861) un lieu d’accueil pour les patriotes italiens, chassés de tous les autres Etats, pourchassés plutôt : le roi de Piémont-Sardaigne est populaire dans toute la péninsule = déjà son père Charles-Albert (roi 1831-1849), avait pris la tête du mouvement anti-autrichien en Italie, mais, vaincu à Custozza (1848) et à Novare (1849), avait abdiqué en faveur de son fils Victor-Emmanuel II. le mouvement républicain d’indépendance s’était développé au point de mettre en place brièvement dans les Etats pontificaux, dont le pape est chassé, une République proclamée par MAZZINI en février 1849 (mais Louis Napoléon Bonaparte, président de la République française, refuse cette attitude vis-à-vis du pape, entre autre, et envoie armée écraser la république romaine en juillet 1849) défaite des patriotes et en particulier des républicains depuis, les Républicains se rallient à Victor Emmanuel (ex : Garibaldi, et même Mazzini qui espère une république pour l’Italie) le Risorgimento, c'est-à-dire le mouvement nationaliste italien qui de la fin du XVIIIe siècle à 1860 (qui donne son nom à un journal dirigé par le comte de Cavour à partir de 1847, qui soutient les aspirations libérales et nationales), se bat pour unification de la péninsule, prend alors toute son ampleur, avec des gens comme le Républicain Giuseppe MAZZINI, comme le prince GARIBALDI… Mazzini (Giuseppe) (1805­1872). Fondateur d’une société secrète (la Jeune-Italie) qui veut établir une République unitaire, il conspire, à l’étranger, contre l’Autriche, pour préparer la libération de la péninsule. En 1848, il fit partie du triumvirat qui devait proclamer la république à Rome (1849). Auteur de: Foi et Avenir (1835), les Devoirs de l’homme (1837), le Manifeste de l’Alliance républicaine (1866). et aussi République et royauté en Italie (1850) où il écrit : « L’Italie veut être une nation d’hommes égaux et libres, une nation de frères associés à l’œuvre du progrès commun. (…) Pour que le peuple soit, il faut qu’il conquière par l’action et le sacrifice la conscience de ses devoirs et de ses droits. L’indépendance, c'est-à-dire la destruction des obstacles intérieurs et extérieurs qui s’opposent à la constitution de la vie nationale, doit donc s’obtenir non seulement pour le peuple, mais par le peuple. La guerre par tous, la victoire pour tous ». Garibaldi (Giuseppe) (1807-1882), révolutionnaire italien. Il participe activement aux insurrections de 1848 puis émigre en Amérique du Sud pendant quelques temps. Il combat contre l’Autriche (1859), puis contre le royaume de Naples (expédition des Mille ou des Chemises rouges en 1860). Il rêve de faire de Rome la capitale d’une Italie républicaine (d’où son opposition à Cavour, qui parvint cependant à endiguer ses 2 actions). Battu à Aspromonte (Calabre) en 1862 par armée royale piémontaise après avoir tenté de prendre Rome, il est fait prisonnier puis amnistié. Il sert la France en 1870-1871. Pour les Italiens, = héros mythique de la nation unifiée: a fait passer l’intérêt de la nation italienne avant ses propres convictions républicaines; il incarne la veine populaire et démocratique du Risorgimento. Conséquence de cet essai manqué de 1848-49 : => à la suite de cet échec, deux solutions sont désormais exclues : = solution fédéraliste = création d'un Etat fédéral italien grâce à un accord des princes (il ne s’entendent pas !) = solution démocratique et républicaine = unification italienne à la suite d'une insurrection révolutionnaire, semble difficile ; il manque un grand mouvement de masses = à la suite de cet échec, également le roi de Piémont-Sardaigne et Cavour modernisent l’armée, l’agriculture, développent industrialisation, les chemins de fer… => création d'un excellent réseau ferroviaire et d'une armée efficace + ils s’attachent le soutien de milieux d’affaires de Gênes et de Turin - mais le Piémont reste trop faible pour agir seul -> il s'allie donc avec Napoléon III en 1858, à la suite d’une entrevue dans les Vosges (à Plombières) car Napoléon III souhaite une Europe plus conforme aux nationalités et lui-même s’est lié dans sa jeunesse aux Carbonari (membres de sociétés secrètes italiennes, qui au XIXe siècle, luttaient pour libération et unité nationale), et donc entend aider les Italiens à réaliser leur unité En échange de cette aide, la France recevra le duché de Savoie et la province de Nice MAIS attention, position extrêmement complexe : il veut bien aider le Piémont, mais à condition que l’unité italienne ne porte pas atteinte à la souveraineté du pape dans les Etats pontificaux (la condition figure dans la convention secrète signée entre Victor Emmanuel II et Napoléon III ; Cavour fait mine d’accepter les conditions françaises, tout en n’en pensant pas moins…), ce qui posera évidemment problème 2) La marche vers l'unité (1859-1870) - en 1859, commence la guerre d’indépendance : France et Piémont attaquent l'Autriche; les victoires de Magenta (4 juin 1859, Mac-Mahon) et de Solferino (24 juin 1859, troupes dirigées par Napoléon III) obligent l'Autriche à céder la Lombardie au Piémont ; Napoléon III met fin au conflit en juillet, sans l’avis de Cavour, par armistice de Villafranca : en fait Napoléon III craint que les soulèvements qui se sont déclenchés dans la péninsule se fassent au détriment du pape et d’autre part deviennent incontrôlables. Cavour est furieux et décide de passer outre et de continuer le combat, notamment pour obtenir la Vénétie, restée sous domination autrichienne - en mars 1860, le Piémont annexe les duchés du centre de la péninsule (Parme, Modène, Toscane) dont les habitants se soulèvent contre leurs princes, encouragés par Cavour et souhaitant se voir effectivement rattachés au Piémont - en mai, Cavour aide GARIBALDI à organiser expédition des MILLE, c'est-à-dire des patriotes italiens dits aussi « Chemises rouges », réunis par Garibaldi. Au départ, un corps expéditionnaire de 1000 soldats venus de toute la péninsule. De Gênes (6 mai 1860), ils atteignent Marsala, port de Sicile (11 mai) et prennent la Sicile aux Napolitains (vaincus le 15). Le 7 septembre ils prennent Naples où, le 7 novembre, Garibaldi reçoit Victor-Emmanuel II (qui arrive avec son armée : il faut éviter que Garibaldi ne marche sur Rome) lui affirme son allégeance et se retire. (sur les combats entre Chemises rouges et soldats napolitains, voir Le Guépard, 1963, Visconti) 3 en revanche Nice et Savoie sont cédées à la France qui soutient désormais le pape mais laisse faire Cavour, car Napoléon est tout content d’avoir récupéré Savoie et Nice => création en mars 1861 du royaume d'Italie, composé du Royaume des Deux-Siciles, de la Partie orientale des Etats pontificaux et évidemment du Piémont-Sardaigne, dirigé par Victor-Emmanuel II, ancien roi du Piémont. Manquent encore : Vénétie et région de Rome - Italie s'allie en 1866 avec la Prusse contre l'Autriche et, malgré ses défaites de Custozza (près de Vérone) et de Lissa (île croate), obtient la Vénétie à l'issue de la guerre - dans les Etats du pape, Napoléon III continue de protéger le pouvoir temporal du pape et lorsque Garibaldi tente de conquérir Rome en 1867, la France lui impose une défaite à Mentana (proximité de Rome) Italie doit attendre le départ des troupes françaises de Rome, en septembre 1870 après défaite de Sedan face à la Prusse, pour prendre la ville aux troupes pontificales et en faire sa capitale le pape ne reconnaît pas cet état de fait et estime qu’il est prisonnier au Vatican b) La réalisation de l'unité allemande (1850-1871) 1) Les préparatifs (1850-1865) : - échec de la révolution bourgeoise allemande en 1848-1849 : le roi de Prusse (Frédéric Guillaume IV ; ensuite, c’est Guillaume 1e de 1858 à 1888) refuse de porter la couronne que les députés réunis Francfort, au sein d’une assemblée née de la révolution de 1848 , lui offrent car il ne veut pas d’une Allemagne unie par une révolution - cet échec laisse la place libre au jeu des familles princières; or deux familles peuvent prétendre à la direction de l'Allemagne Habsbourg qui dirigent l'empire autrichien et la Confédération germanique rétablie en 1850 sans réunification de l’Allemagne Hohenzollern qui règnent sur le royaume de Prusse qui possède depuis 1815 une partie occidentale et exercent la vice-présidence de la Confédération germanique - on peut rappeler la création en 1834 par la Prusse d'une union douanière des Etats allemands (Zollverein) excluant l'Autriche cette création lui donne un premier atout De plus, à la tête du Zollverein, la Prusse connaît un remarquable développement économique (réseau ferroviaire, industries…). Banquiers et industriels sont favorables à l’unification - un second atout à partir de 1862 : Bismarck devient chancelier de Prusse; obsédé par sa grandeur et celle des Hohenzollern, il renforce et modernise l'armée prussienne, qui est pour lui l’instrument privilégié de l’unification allemande Voici sa vision de la nation : « Jamais (…) je n’ai douté que la clef de la politique allemande se trouvât chez les souverains et dans les dynasties et non pas chez les publicistes du Parlement et de la presse ou sur les barricades […] . Les dynasties les plus faibles cherchaient un soutien en s’appuyant sur la cause nationale, les souverains et les maisons qui se sentaient plus capables de résister se méfiaient du mouvement parce que le développement de l’unité allemande eût entraîné forcément une diminution de leur indépendance au profit du pouvoir central et de la représentation populaire. La dynastie prussienne pouvait prévoir que dans le futur Empire allemand l’hégémonie lui reviendrait finalement avec un accroissement de crédit et de puissance ». (Pensées et souvenirs, 1899) Par ailleurs deux visions s’opposent : les tenants d’une Petite Allemagne, autour de la Prusse et sans l’Autriche : on trouve parmi eux bien sûr Bismarck, et un bon nombre d’Allemands protestants, hostiles au catholicisme des Etats allemands du Sud ainsi que de l’Autriche 4 les défenseurs d’une Grande Allemagne, dont le morceau de choix serait l’Autriche. Ceux-là sont hostiles à la Prusse : ils sont nombreux chez les nationalistes dans les petits Etats allemands du Nord. et également chez les Allemands catholiques de l’Allemagne du Sud (Bavière notamment). 2) La marche vers l'unité (1866-1871) - pour fonder l’empire, il faut dans un premier temps éliminer l’Autriche et notamment éliminer son emprise sur les pays germaniques, par conséquent : - accusant l'Autriche de mal administrer le duché de Holstein, la Prusse lui déclare la guerre en 1866 et l'écrase à Sadowa (3 juillet 1866) (Les duchés de Holstein et du Schleswig ont été partagés entre Prusse et Autriche alliées de circonstance contre le Danemark en 1864, car peuplés d’Allemands) (Noter désir de revanche Prusse depuis Olmutz, 1850 : en 1850, le roi de Prusse renonça, sous la pression autrichienne, à y établir son pouvoir sur l’Allemagne du N. (reculade d’Olmütz). ) dissolution de la Confédération germanique acquisition par la Prusse des Etats du Centre de l'Allemagne, qui lui permettent de se réunifier : le Hanovre, le Holstein, Francfort… création en 1867 de la Confédération de l'Allemagne du Nord, présidée par la Prusse toute idée d’unité des peuples allemands autour de l’Autriche est définitivement écartée. Ainsi, c’est le principe de la Petite Allemagne, chère à Bismarck, qui l’emporte (Autre conséquence importante empereur Français-Joseph procède à un remaniement de l’organisation interne du pays, avec le compromis historique de 1867 : Hongrois associés aux Autrichiens dans direction de l’empire qui devient Autriche-Hongrie) - la dernière manche allemande : elle se joue contre la France : pour Bismarck, en effet, l’unité et la cohésion nationale se forgent dans l’adversité ; quoi de mieux que d’unir les princes et les peuples allemands contre un ennemi commun : => dans ses mémoires (Pensées et souvenirs, 1899, encore !), Bismarck écrit : « J’étais convaincu que l’abîme creusé au cours de l’histoire entre le Nord et le Sud de la patrie ne pouvait pas être plus heureusement comblé que par une guerre nationale contre le peuple voisin qui était notre séculaire agresseur ». Bismarck remonte les princes contre Napoléon III trouver un prétexte : ce sera la candidature d’un Hohenzollern au trône d’Espagne candidature très mal acceptée par France + affaire de la dépêche d’Ems France déclare guerre à Prusse en juillet 1870 * épisode de la Dépêche d’Ems : ville d’Allemagne ; télégramme envoyé, le 13 juillet 1870, à Bismarck par Guillaume Ier, qui relatait son entrevue (concernant la candidature d’un prince prussien au trône d’Espagne) avec l’ambassadeur de France et le refus du roi de poursuivre les entretiens. Le texte fut tronqué et diffusé par Bismarck, qui voulait blesser la France => indignation qui détermina Napoléon III à déclarer la guerre à l’Allemagne. - la victoire prussienne contre la France (juillet 1870-janvier 1871) permet aux princes allemands réunis dans la Galerie des Glaces du château de Versailles de proclamer la création de l'empire allemand (18 janvier 1871), incluant l'Alsace-Lorraine : le Deuxième Reich. Berlin est la capitale du nouvel empire - tous les Etats d’Allemagne du Sud ont adhéré à la Confédération d’Allemagne du Nord - empire allemand hérite du drapeau et du roi prussiens, devenu empereur sous le nom de Guillaume Ier; c'est un empire fédéral et constitutionnel