INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – LESMARS
Chapitre V
Les unités allemande et
italienne
Question essentielle jusqu’en 1914 est la question des nationalités. Dans un premier
temps, elle concerne trois Nations essentiellement : l’Italie, l’Allemagne et la France, qui s’appuie
sur la question des nationalités pour détruire ce qui reste de l’Europe du Congrès de Vienne et du
Concert des Nations.
I. LA DIPLOMATIE DE NAPOLEON III
Louis-Napoléon Bonaparte est élu au suffrage universel masculin en 1848 comme
président de la IIe République. Il mène un coup d’État le 2 décembre 1851 pour devenir
Empereur des Français et fonder le Second Empire. Il devient Napoléon III (Napoléon II est le
fils de Napoléon Ier, n’a pas régné). Fils de Louis Bonaparte, roi de Hollande, frère de Napoléon
Ier.
A. Napoléon III et les nationalités
« Principe des nationalités » devient le levier du rétablissement de la prépondérance
française en Europe, ruiner l’Europe du Congrès de Vienne. Ce but est approuvé par la majorité
des Français.
Napoléon III : a vécu en exil, en Allemagne (années 1820). Italie : s’est impliqué dans les
mouvements révolutionnaires (Charbonnerie) et participe à la révolte en Romagne contre le Pape
en 1830-1831.
Cependant, il ne compte pas, une fois au pouvoir, prendre la tête d’une « croisade de la
liberté » ni reconstituer l’Empire. Il n’est pas un conquérant, mais veut bouleverser la Sainte-
Alliance, rendre à la France des « frontières naturelles », compenser par des satisfactions de
prestige l’inexistence de la vie politique. Dans les premières années de son règne, mène ainsi un
certain nombre d’interventions militaires. Recherche un équilibre européen, assuré par un
système de congrès pour résoudre pacifiquement les problèmes internationaux. En termes
territoriaux, ne recherche que Nice et la Savoie.
En face de Napoléon III, il y a en Italie, Cavour, et en Allemagne, Bismarck, de froids
réalistes dont le but est la réalisation de leurs desseins unificateurs et l’intérêt de leurs souverains
et de leurs peuples. Se servent de Napoléon si utile, l’abandonne ou se retournent contre lui si
leur Realpolitik le nécessite. Finit par mener la France au désastre.
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Cependant, les premières années du régime permettent à la France d’engranger quelques
succès spectaculaires, contre la Russie et l’Autriche.
B. Napoléon III et la question d’Orient
Décadence de l’Empire ottoman, opposition radicale entre RU et Russie. Cette dernière
vise les territoires balkaniques (Slaves) et les Détroits (débouché sur la Méditerranée). La route
des Indes, point de vue britannique, doit être sauvegardée par le maintien de l’Empire ottoman.
1853 : Russie adresse à Constantinople un ultimatum lui enjoignant d’accepter le
protectorat russe. Sultan refuse, la Russie envahit les provinces roumaines dépendant de l’Empire
ottoman. Angleterre veut réagir, se tourne vers la France : gloire militaire, briser isolement
diplomatique depuis proclamation de l’Empire (souvenir du Ier Empire), affaiblir l’une des
puissances garante du Congrès de Vienne. France et RU déclarent la guerre à la Russie : le début
de la guerre de Crimée. Le royaume de Piémont-Sardaigne dont le président du Conseil est
Cavour s’unit à cette initiative l’année suivante (pour favoriser l’unité).
Essentiel des opérations en Crimée. Guerre violente, lourdes pertes (100 000 pour la
France et la Russie chacune par exemple). Russie finit par se retrouver en position délicate.
Congrès à Paris, avec les belligérants, ainsi que l’Autriche et la Prusse au début de 1856.
France est le centre de l’ordre diplomatique qui semble se dessiner alors à Paris,
mais son intervention mène d’abord à des acquis moraux (protection des
chrétiens de l’Empire ottoman) et diplomatiques,
Angleterre obtient la garantie de l’intégrité de l’Empire ottoman,
Autriche obtient la liberté de naviguer sur le Danube,
Russie est lâchée par l’Autriche et se rapproche de la France, elle obtient
cependant l’autonomie de deux principautés roumaines (très influencées par la
France),
Le Piémont évoque le problème de la domination autrichienne en Italie : la
question des nationalités est ainsi abordée.
Double tournant : émergence question des minorités en termes diplomatiques, centralité
de la France.
II. LA QUESTION DES NATIONALITES
A. Naissance du royaume d’Italie
Échec de 1848 : il faut un pouvoir italien fort pour mener à bien l’unité italien. Ce
pouvoir est incarné par le roi de Piémont, Victor-Emmanuel II. Régime relativement libéral, est le
champion des partisans de l’unité. Solution républicaine de Mazzini disparaît donc au profit d’une
solution centrée sur la monarchie piémontaise.
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Est soutenu par le comte de Cavour : journaliste (Il Risorgimento), propriétaire terrien,
libéral, Premier Ministre en 1852, appuyé par le centre-gauche (anticlérical modéré). Prépare la
revanche contre l’Autriche.
Politique économique : agriculture, industrie, réseau ferroviaire, modernisation du port de
Gênes, traité de commerce de libre-échange avec France, Belgique, Suisse, RU et Zollverein.
Fortifie largement la puissance militaire du royaume. Pour obtenir soutien de la bourgeoisie,
mène politique de lutte contre l’influence de l’Église. Turin devient centre de l’immigration
politique des autres États de la péninsule. Mise en place de réseaux semi-clandestins dans le reste
de la péninsule, centrés sur Turin.
Diplomatie : s’efforce de placer la question italienne au cœur des relations internationales
en Europe. Veut s’appuyer sur deux puissances : l’Angleterre et la France de Napoléon III. D’où
participation à la guerre de Crimée.
Napoléon III hésite : certes champion des nationalités, mais catholiques français le
soutiennent et se méfient de l’unité italienne qui remettrait en cause les États pontificaux.
Attentat d’Orsini en 1858 contre Napoléon III : le touche au vif, engage des négociations avec
Cavour : réunion de Plombières dans les Vosges en juillet 1858. Accord est signé : Nice et Savoie
pour la France, Italie passe de 7 à 4 États, dont le Piémont qui occuperait l’ensemble de l’Italie du
Nord. Entente secrète. Alliance signée en janvier 1859.
1859 : Piémont tente de provoquer l’Autriche, guerre est déclenchée. Napoléon III est
paniqué, n’avait pas vu les risques de guerre européenne. Mais respect son accord et par en
guerre. Deux grandes batailles en juin 1859 : Magenta et de Solferino. Victoire pour la première,
immense boucherie pour la seconde (Dunant). À la demande de Napoléon III, négociations de
paix sont engagées (coût en hommes, États pontificaux sont ébranlés par des révoltes, Prusse
veut profiter des difficultés de l’Autriche pour étendre son influence en Allemagne).
D’où paix de Zurich : Venise reste autrichienne, Lombardie devient piémontaise, Pape est
restauré ainsi que les autres princes d’Italie, on prévoit un congrès pour le sort futur de l’Italie).
Piémont furieux, Cavour démissionne.
Cavour démissionnaire encourage des soulèvement en Italie centrale, et des assemblées
demandent le rattachement au Piémont. Au sud (Naples), Cavour instrumentalise un autre héros
de l’unité italienne, Garibaldi, qui prend Naples an 1860. Une partie des États pontificaux est
également envahie. Napoléon III finit par accepter le fait accompli, tout en protégeant ce qui
reste des États pontificaux (Rome et le Latium). En janvier 1861, il reste Rome (protégée par
Napoléon III pour que les catholiques français le soutiennent) et Venise (Autriche). Le
gouvernement désormais italien bloque, en attendant, toute tentative de conquête de Rome.
En 1866, la victoire prussienne sur l’Autriche à Sadowa, permet à la France de faire
pression sur Bismarck et l’Autriche pour que Venise soit rattachée à l’Italie. Il reste les États
pontificaux, protégés par Napoléon III. En 1867, il réprime une rébellion dirigée par Garibaldi.
Relations franco-italiennes sont ainsi mauvaises jusqu’en 1870 : la guerre Franco-prussienne
permet à l’Italie de s’emparer de Rome.
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B. L’unité allemande
En Allemagne, avec l’échec de la rébellion de 1848 et l’humiliation d’Olmütz, seule la
Prusse conservatrice peut faire l’unité et contre l’Autriche.
Essor économique à partir de 1850,
Le Zollverein est renouvelé et consolidé,
Sarre et Ruhr : second producteur de charbon au monde,
Premières grandes firmes émergent : Krupp.
Mais aussi difficultés politiques de la Prusse : opposition entre le pouvoir
monarchique et un très fort parti libéral qui veut contrôler la monarchie.
Mène au conflit : Guillaume Ier appelle Bismarck à la chancellerie au pouvoir en
1862 pour briser cette résistance libérale par des procédés dictatoriaux.
L’arrivée de Bismarck résout ces problèmes politiques. En conséquence, but du
chancelier : éliminer l’influence de l’Autriche en Allemagne pour en réaliser l’unité. Les autres
puissances doivent rester neutres. Il s’attache la bienveillance russe en aidant la Russie à réprimer
une insurrection en Pologne, il soutient un projet de Napoléon d’un congrès européen pour
réformer les traités de 1815.
Arrive alors la « question des duchés » :
Trois duchés allemands : Slesvig, Holstein et Lauenbourg,
Sont rattachés au roi de Danemark mais non au Danemark (Union personnelle),
Peuples d’Allemands et de Danois,
À la mort du roi de Danemark, la population des trois duchés s’oppose au
nouveau roi du Danemark, demande un autre souverain,
D’où convention entre Berlin et Vienne pour se partager les trois duchés.
Vienne fait une erreur : demande le Holstein, éloigné de ses frontières,
indéfendable. La Prusse prend le reste, qui la renforce (débouché maritime :
port de Kiel).
Birsmarck s’attache la neutralité de la France : promet à Biarritz de soutenir le
raccrochement de Venise à l’Italie et cède quelques compensations en Rhénanie
contre la neutralité (1865).
L’armée prussienne est alors particulièrement moderne : nouveau fusil, peut utiliser un
réseau de télégraphe et de chemins de fer bien développé, réorganisée par von Moltke.
La Prusse provoque ensuite l’Autriche, guerre en 1866 : Prusse envahit le Hosltein,
Autriche déclare la guerre, soutenue d’ailleurs par la plupart des autres États allemands. Victoire
décisive se déroule à Sadowa (3 juillet 1866), désastre autrichien. Pour ne pas déclencher tout de
suite une guerre contre la France, Bismarck accepte de laisser leur indépendance aux pays
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d’Allemagne du Sud et se contente d’éliminer l’influence de l’Autriche en Allemagne, sans tenter
de la démenbrer : la paix de Prague.
Autriche cède le Holstein et Venise,
Création d’une Confédération d’Allemagne du Nord (premier pas vers l’unité),
largement dominée par la Prusse. Accords militaires avec les États du Sud.
Mais après paix de Prague, France s’inquiète de la puissance prussienne : Napoléon veut
des compensations (notamment en Belgique) : la « politique des pourboires ». En fait, seule une
guerre contre la France peut permettre l’unité allemande. En France, un petit groupe autour
d’Eugénie et d’autoritaristes veulent une épreuve de force également. Napoléon III finit par
pencher pour la guerre pour compenser la catastrophe mexicaine (1867) et les difficultés
intérieures.
Prétexte : vacance du trône d’Espagne. Un prince prussien, cousin de Guillaume Ier, est
candidat : opposition de la France, qui obtient de Guillaume Ier le retrait de cette candidature.
Mais la France demande plus : la demande qu’une telle candidature ne se renouvelle pas :
Guillaume Ier refuse et Bismarck publie un résumé d’une entrevue entre Guillaume et
l’ambassadeur de France injurieux pour la France. Napoléon III, poussé par l’impératrice et une
opinion publique très hostile à la Prusse, déclare la guerre le 19 juillet 1870.
Armée prussienne est plus nombreuse, mieux armée, mieux instruite, mieux commandée.
Supérieure dans l’artillerie (Krupp) et pour la logistique. Réseau ferré dense permettant une
mobilisation rapide.
Guerre est vite perdue sur les frontières, une partie de l’armée est enfermée dans Metz,
pour la libérer Napoléon III et le général Mac Mahon se laissent encercler dans la cuvette de
Sedan et capitulent le 1er septembre 1870. À l’annonce de cette défaite, se déclenche à Paris la
Commune, dernière révolution du XIXe siècle, qui consacre la fin du Second Empire. Le 4
septembre est proclamée la République à l’Hôtel de Ville, un gouvernement de Défense nationale
est constitué. Gambetta s’enfuit de la capitale en ballon pour aller à Tours et lever des troupes.
Peu expérimentée, ces troupes ne peuvent débloquer Paris. Le 28 janvier 1871, le gouvernement
demande l’armistice. Une Assemblée nationale élue en février demande la paix.
Avec cette victoire, les États du Sud de l’Allemagne se joignent à la Confédération de
l’Allemagne du Nord, même la Bavière catholique de Louis II (sous pression). Le 18 janvier 1871,
dans la Galerie des Glaces au château de Versailles, l’Empire allemand est proclamé. La paix
signée à Francfort le 10 mai 1871 : paix draconienne, avec perte de l’Alsace et de la Moselle et des
conditions économiques dures. Bref, idée de la Nation devient une idée autoritaire, passant de
l’adhésion des peuples à l’unité réalisée par la force. Nationalisme sous la Révolution de 1789,
devient désormais exclusif, conquérant et agressif.
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