Cours M2-ICE 2007 Roy-Barman : productiob biologique 7
Figure 6 : Représentation schématique des flux d’azote à travers
l’écosystème marin. NOD : Azote organique dissous ; NOD :
Azote organique particulaire. Les labels PN, PR, PP et PE
indiquent les flux correspondant à la production nouvelle, la
production régénérée, la production primaire et la production
exportée.
L’ensemble de la matière organique photosynthétisée constitue la
production primaire (PP). Au cours de l’année, l’origine de l’azote assimilée par le
phytoplancton évolue. Si la matière organique est photosynthétisée avec NO3- (et N2
le cas échéant) comme source d’azote, on parle de production nouvelle (PN) de
matière organique. Si au contraire la matière organique est formée à partir de NH4+,
on parle de production régénérée (PP). On a donc
PP = PN + PR (7.1)
La distinction entre production nouvelle et production régénérée est
importante. A l’échelle de l’année, la quantité d’azote organique exportée vers les
eaux profondes ne peut pas excéder la quantité de nitrates venant des eaux profondes.
Comme en règle générale la totalité des nitrates disponible est consommée, il devrait
donc y avoir, en moyenne sur l’année, une égalité entre la production nouvelle et la
production exportée (PE) hors de la zone photique. A un instant donné par contre, ces
2 flux peuvent être différents en fonction des variations du stock de biomasse. La
production exportée représente pour l’écosystème une perte sèche d’azote assimilable.
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Il est donc de l’intérêt de l’écosystème de recycler la matière organique. Quand le
milieu est pauvre en nitrate (pas de PN), il y a un circuit fermé entre la production
régénérée et la reminéralisation dans l’eau de surface. Si cette boucle « fuit » car la
reminéralisation est inefficace, les eaux de surface s’appauvrissent en azote
assimilable et à terme c’est l’écosystème entier qui est condamné.
La notion de production nouvelle et régénérée complètement contrôlée par
l’azote minéral a évoluée avec la découverte de l’importance des formes organiques
dissoutes de l’azote, du carbone et des phosphates comme source de nutritifs pour la
synthèse de la matière organique en surface. Le rôle des bactéries dans les cycles de
surface devient alors essentiel. Plus récemment, le schéma est encore venu se
compliquer. Dans les zones très oligotrophes, la fixation de l’azote moléculaire N2 par
certains types d’algues et de bactéries (comme Trichodesmium) peut fournir une
quantité substantielle de l’azote nécessaire à l’écosystème. L’importance de la fixation
de N2 dans l’océan n’a été réellement comprise que depuis le milieu des années 90
devant l’impossibilité de boucler les bilans d’azote et d’expliquer les déviations au
rapport de Redfield d’une part et grâce aux contraintes apportées par la signature
isotopique de l’azote organique dans les zones oligothrophes (voir exo) d’autre part.
Quand la fixation de N2 est suffisante, l’azote n’est plus limitant et ce sont les
phosphates qui arrivent alors à épuisement, limitant la production biologique.
On caractérise le comportement de l’écosystème à partir du rapport entre la
production nouvelle et la production primaire. On note ce rapport f (f-ratio en
anglais) :
f = PN/PP
La production nouvelle constitue jusqu’à 50% de la production primaire au
printemps quand les nitrates sont abondants (on parle de conditions eutrophes), mais
elle peut être inférieure à 5% en été quand les eaux de surface sont à court d’éléments
nutritifs (on parle de conditions oligotrophes). Le passage des conditions euthrophes
aux conditions oligotrophes entraîne une évolution importante de l’écosystème
marin : le phytoplancton par exemple est dominé au printemps par des espèces de
grandes tailles comme les diatomées qui forment des agrégats quittant rapidement la
surface par sédimentation alors qu’en été on trouve essentiellement nano et du
picoplancton qui est facilement mangé et reminéralisé par les bactéries et le petit
zooplancton. Le séquençage de l’ADN du phytoplancton permet de comprendre
l’adaptation des différents types d’algues aux conditions environnementales. Par
exemple, Prochlorococus, qui est le plus petit des êtres photosynthétiques, ne peut
fixer que NH3 à partir de son patrimoine génétique réduit. En revanche, le même
patrimoine génétique lui permet d’être insensible aux variations d’abondance en
éléments nutritifs grâce à un système récepteur de lumière économe en azote et Fer.
Sa petite taille lui donne un avantage décisif pour absorber des éléments nutritifs à
travers sa membrane grâce à son très fort rapport surface/volume par rapport aux
algues de plus grande taille. Ainsi, Prochlorococcus est très abondante dans les
régions oligotrophes. Etant de petite taille et n’ayant pas de test minéral, elle ne quitte