Fasken Martineau DuMoulin S.E.N.C.R.L., s.r.l. ENVIRONNEMENT 2
« 19.2. Un juge de la Cour supérieure peut accorder une injonction pour empêcher tout acte
ou toute opération qui porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte à l'exercice d'un droit
conféré par l'article 19.1. »
Concrètement, l’inclusion d’un droit à la qualité à l’environnement dans la Charte québécoise ouvrira la
porte à des dommages-intérêts punitifs (autrefois appelés « exemplaires ») pour toute violation illicite et
intentionnelle de ce droit. En effet, l’article 49 de la Charte québécoise se lit de la manière suivante :
« 49. Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnue par la présente Charte confère à
la victime le droit d'obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou
matériel qui en résulte.
En cas d'atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des
dommages-intérêts punitifs. »
Une atteinte est considérée « illicite » lorsqu’un comportement fautif viole un droit. Une atteinte est
considérée « intentionnelle » lorsque le contrevenant a le désir ou la volonté de causer les conséquences
qu’aura sa conduite fautive ou encore s’il pose des gestes en pleine connaissance des conséquences
immédiates, naturelles ou extrêmement probables que cette conduite sera susceptible d’engendrer. Ce critère
est plus souple que l’intention particulière, mais dépasse néanmoins la simple négligence.
En principe, les dommages-intérêts punitifs sont accordés lorsque la mauvaise conduite du défendeur est si
malveillante et abusive qu'elle choque le sens de la dignité. Ce type de dommages n’a aucun lien avec ce que
le demandeur pourrait être fondé à recevoir au titre d'une compensation fondée sur l’article 1457 du Code
civil du Québec (« C.c.Q. »), disposition à la base des règles de la responsabilité civile. Ces dommages visent
non pas à compenser le demandeur, mais à punir le défendeur. Par ailleurs, l’article 1621 C.c.Q. prévoit que
les dommages-intérêts punitifs s'apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, dont la
gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l'étendue de la réparation à laquelle il est
déjà tenu envers le créancier.
Par ailleurs, le fait que le législateur ait employé l'expression « en outre » indique qu’un recours en
dommages-intérêts punitifs doit être l'accessoire, soit d'un recours principal visant à obtenir condamnation du
préjudice moral ou matériel, soit d’un recours en injonction. Une personne qui se considère lésée par une
violation de l’article 46.1 de la Charte québécoise pourra également intenter un recours en jugement
déclaratoire.
La personne lésée fera son choix sur la base de différents facteurs dont les délais pour intenter les différents
recours qui peuvent varier d’un recours à l’autre : dans un « délai raisonnable » pour une action en jugement
déclaratoire et dans les délais prescrits par le droit commun pour un recours en dommages-intérêts.
Notons également que, bien que la théorie des dommages punitifs en droit canadien s’apparente à celle en
droit américain, leurs applications pratiques diffèrent considérablement, les dommages punitifs accordés en
droit canadien étant habituellement plus prévisibles et plus modestes que ceux accordés aux États-Unis.
Toutefois, telle que rédigée, la loi n’a pas l’effet d’insérer ce « droit à la qualité de l’environnement » dans
une division de la Charte québécoise qui le mettrait au rang de « droit quasi-constitutionnel ». En effet, la
Charte québécoise, conformément à son article 52, confère un statut supérieur et même quasi-constitutionnel
aux articles 1 à 38, alors que le droit à la qualité de l’environnement est prévu à l’article 46.1. Seules les
dispositions mentionnées à l’article 52 ont préséance sur les autres lois, ce qui crée une certaine hiérarchie
entre les différents droits prévus dans la Charte québécoise. Ainsi, des conflits risquent de surgir en rapport