
1. Introduction
Les ruptures du tendon distal du biceps brachii sont rares,
elles ne représentent que 3 % des ruptures tendineuses au
niveau du biceps pour une incidence de 1,2 cas pour 100 000
annuelle [1]. Elles surviennent principalement sur le membre
dominant chez les hommes dans la quatrième décade, les
facteurs de risque reconnus sont le tabagisme et la pratique de
sports ou d’activités de force sollicitant les membres supérieurs
[2].
Les résultats du traitement conservateur sont peu satisfai-
sants sur la fonction du coude et sont à l’origine d’une
diminution de la force en supination et en flexion [3,4]. Il est
donc admis qu’une prise en charge chirurgicale précoce doit
être systématiquement envisagée. Différentes techniques sont
possibles, la plus ancienne étant une ténodèse non anatomique
du tendon bicipital distal sur le tendon du muscle brachial
antérieur. Plus récemment introduites, les techniques de
réinsertion anatomique du tendon bicipital sur la tubérosité
bicipitale du radius offrent de meilleurs résultats sur la force et
l’endurance. De multiples techniques à ciel ouvert ont été
décrites. Deux éléments sont variables selon les techniques : les
voies d’abord et le mode de fixation, sans qu’il n’y ait de
supériorité démontrée entre chacune des techniques, mais avec
des taux de complications per- et postopératoires non
négligeables [3–6].
Afin de limiter ce risque de complications, Sharma et
MacKay [7] ont décrit pour la première fois dans la littérature,
une technique endoscopique de réparation du tendon distal du
biceps brachii utilisant une fixation par endobouton sur deux
cas.
Nous présentons une nouvelle technique endoscopique
originale utilisant une fixation anatomique du tendon par ancre.
Nous décrirons successivement la technique opératoire et ses
avantages spécifiques, ainsi que les résultats sur notre série
rétrospective sur 23 patients opérés consécutivement dont deux
cas bilatéraux et dont dix sont des sportifs professionnels ou de
haut niveau.
2. Matériel et méthodes
2.1. Patients
Nous avons réalisé une série continue, rétrospective, non
contrôlée, mono-opératrice, incluant tous les patients opérés
d’une rupture complète du tendon distal du muscle biceps
brachii récente datant de moins de trois semaines dans notre
centre par cette nouvelle technique.
De septembre 2000 à décembre 2005, 23 patients consé-
cutifs (25 réparations) ont subi une réparation chirurgicale du
tendon distal du biceps, tous étaient des hommes, l’âge moyen
était de 45 ans (30–58). Quatorze patients (61 %) présentaient
une atteinte du membre supérieur dominant, sept (30,5 %) du
membre non dominant et deux ont présenté une atteinte
bilatérale. Trois patients (quatre cas de réparations) étaient des
joueurs internationaux de rugby, six patients pratiquaient un
entraînement de lever de poids à haut niveau et un était guide de
haute montagne. Le délai moyen entre le traumatisme et la
chirurgie était de 14 jours (5–21).
Le mécanisme du traumatisme était la pratique du sport dans
sept cas (28 %), un effort de traction dans 11 cas (44 %), un
effort de soulèvement dans deux cas (8 %) et dans cinq cas les
causes sont manquantes.
2.2. Technique opératoire
L’intervention a été réalisée en ambulatoire, sous anesthésie
locorégionale. Le patient était installé en décubitus dorsal,
membre supérieur sur table à bras, coude en extension, avant-
bras en supination. Un garrot pneumatique était installé à la
racine du membre opéré. L’opérateur était installé du côté
médial (ulnaire) du membre opéré et la colonne d’arthroscopie
face à lui.
Une incision de deux centimètres a été réalisée au pli du
coude au niveau de la « zone de sécurité » (Fig. 1A, B) qui se
situe à la partie proximale de la convergence des tendons
distaux du biceps brachial. Cette zone est à distance des
structures neurovasculaires avoisinantes (nerf cutané latéral de
l’avant-bras, nerf médian, nerf radial, artère ulnaire). La gaine
tendineuse a été repérée et incisée. Celle-ci était le siège d’un
hématome qui a été évacué, puis la gaine était rincée au sérum
afin d’éviter la survenue de calcifications postopératoires. Le
nerf cutané latéral de l’avant-bras a été alors repéré et récliné à
ce niveau où il peut être en contact avec la gaine bicipitale [8].
L’extrémité du tendon rétracté en proximal a été attrapée à
l’intérieur de sa gaine à l’aide d’une pince préhensive type
Köcher puis extériorisée (Fig. 2A). Le moignon du tendon a été
régularisé. Une canule arthroscopique a été ensuite introduite
dans la gaine du tendon de proximal en distal jusqu’à la
tubérosité bicipitale du radius afin de protéger les structures
périphériques. Un arthroscope standard, de diamètre 4,5 mm
angulé à 308sans irrigation, a été alors inséré au travers de cette
canule après avoir placé l’avant-bras en supination et flexion de
20 à 308(Fig. 2B). On a contrôlé par vision directe l’absence
d’interposition de tissu et la bonne position de la zone de
réinsertion sur la tubérosité radiale (Fig. 3A). Une ancre de type
Mitek
1
RC Anchor
*
métallique a été insérée dans la tubérosité
(Fig. 3B) permettant de suturer et d’appliquer le tendon
bicipital distal directement contre l’os (Fig. 3C). L’avant-bras a
été alors mis en supination maximale au moment du serrage des
nœuds. En cas de dilacération ou de fragilité importante du
tendon, une deuxième ancre était ajoutée afin de renforcer la
suture. Le site opératoire a été finalement refermé par deux
plans de fils résorbables avec un drainage aspiratif qui a été
retiré quelques heures après l’intervention.
Dans les suites opératoires, une attelle brachio-antibrachio-
palmaire était réalisée, permettant d’immobiliser le coude à 908
de flexion et en supination de l’avant-bras. Une radiographie
standard de coude face et profil a été réalisée en postopératoire
immédiat afin de contrôler la bonne position de l’ancre sur la
tubérosité radiale (Fig. 4C et D). Un traitement anti-
inflammatoire non stéroïdien de cinq jours était associé. Une
rééducation douce et indolore était progressivement débutée à
partir de la troisième semaine postopératoire afin de récupérer
P. Duffiet, D. Fontès / Chirurgie de la main 28 (2009) 146–152 147