« voie antérieure » - Docteur SORRIAUX Grégory

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Tornier
médical
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MEMBRE INFERIEUR
Pour les chirurgiens, par les chirurgiens
p. HANCHE
Dossier spécial :
« voie antérieure »
T. JUDET, E. DE WITTE
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Tornier Medical #5 - Juillet 2014 - Membre inférieur
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1
édito
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sommaire
Article : Voie d’abord antérieure et prothèse de hanche de
première intention
t Résumé
p. 4
t Introduction et historique
p. 4
t Concept et bases anatomiques
p. 4
t Description
p. 5
t Avantages, inconvénients,
dangers et complications
t Conclusion
Technique opératoire - instrumentation
t
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t
Incision cutanée : repères
Incision de l’aponévrose
Ecartement du tenseur
Incision de l’aponévrose innominée
Exposition de la capsule
Exposition du col fémoral
Coupe du col fémoral
Exposition du cotyle
Travail du cotyle
Exposition du fémur
Travail du fémur
Conclusion
p. 12
p. 13
p. 14
p. 15
p. 16
p. 17
p. 18
p. 19
p. 19
p. 20
p. 21
p. 22
p. 22
p. 23
Article : fracture de rotule sur prothèse totale
de genou
p. 24
Article : la rotation fémorale
p. 31
Tornier Medical #5 - Mai 2014 - Voie d’abord antérieure
3
article
Hanche
Voie d’abord antérieure et prothèse
de hanche de première intention
T. JUDET, M. SIGUIER, B. BRUMPT, T. SIGUIER, P. PIRIOU
Résumé
Les voies d’abord antérieures pures de hanche dérivées de la voie de Hueter sont utilisées dans l’implantation
des prothèses depuis 1947. Elles reposent sur le concept d’abord antérieur, c’est-à-dire là où la hanche est la
plus superficielle et passent entre les territoires d’innervation du nerf fémoral et du nerf glutéal. Elles sont facilitées par l’usage d’une table orthopédique. Elles permettent l’implantation en première intention de tout type
de prothèse totale de hanche sans instrumentation particulière et peuvent se pratiquer sans aucune section
tendineuse ni musculaire à condition de respecter les principes anatomiques et les gestes successifs qui font
l’objet de cet article. Ce concept de respect total des structures périarticulaires en fait la voie mini invasive par
excellence et limite le risque d’instabilité postopératoire immédiat. À l’opposé, elles peuvent être étendues, soit
de façon programmée, soit à la demande en cas de difficultés opératoires imprévues. Cette extension se fait
aisément sur le versant haut cotyloïdien et de façon plus délicate vers la diaphyse fémorale. Les limites d’indication en sont en effet les cas où est programmé un geste fémoral prédominant (ostéotomie par exemple). Les
risques sont représentés principalement par les syndromes irritatifs du nerf cutané latéral de la cuisse et, à un
moindre degré, du nerf fémoral : des précautions simples mettent l’un et l’autre à l’abri.
Introduction et historique
Voie très anciennement connue et initialement utilisée pour des gestes limités articulaires (drainage) ou extra-articulaires (butée ostéoplastique), l’abord antérieur de hanche a été, [2,3] depuis l’avènement de l’ère des
prothèses en 1947, adapté à l’implantation de ces dernières.
Voie d’abord « passionnelle » elle a été pendant plus d’un demi-siècle le fait d’une école qui l’a utilisée pour tous
les types de prothèse, de l’historique prothèse acrylique en 1947 aux prothèses cervicocéphaliques, puis totales
cimentées, sans ciment [4] et de tout type [1].
Ses caractéristiques en font un abord d’une part extensif à la demande, d’autre part mini invasif et adapté à
l’actuelle évolution des voies d’abord de hanche.
Concept et bases anatomiques
Articulation de la hanche en situation antérieure
Non seulement la hanche est couverte en arrière par de volumineuses masses musculaires mais, de surcroît,
l’acétabulum comme le fémur présentent une antéversion les orientant vers l’avant. Enfin, en cas d’excès pondéral, la couche de graisse superficielle est toujours plus développée du côté de la fesse qu’à la partie antérieure
de la hanche (figure 1).
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Hanche
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Figure 1. Coupe scanner de la hanche et tracé de l’abord antérieur.
Territoires neurovasculaires
L’abord antérieur passe à la frontière entre deux territoires d’innervation, nerf fémoral en avant et en dedans et
nerf glutéal supérieur en arrière et en dehors [6].
De même, au plan vasculaire,il n’est traversé que par la partie terminale du paquet circonflexe latéral. Cette
situation à la jonction de deux territoires explique son caractère non invasif d’une part et d’autre part ses possibilités d’extension (figure 2).
Figure 2. L’abord antérieur passe entre les territoires du nerf fémoral en avant du nerf glutéal supérieur en arrière
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article
Hanche
Description de la voie d’abord antérieure standard
ou voie de Hueter
Installation
Sur table orthopédique, bassin bien horizontal stabilisé par la colonne du pelvisupport et un contre appui
sur l’aile iliaque ou le trochanter controlatéral. Le membre supérieur homolatéral repose sur un appui devant
le thorax de l’opéré. L’opérateur est en face de la hanche, de préférence assis, son aide à son côté vers la tête
de l’opéré. Un éventuel deuxième aide installé de l’autre côté du patient pourra être remplacé par un écarteur
autostatique on une valve contre-coudée à poids. La panseuse circulante est chargée de la manipulation de la
table orthopédique (figure 3).
Figure 3. Table orthopédique
Champ opératoire et tracé de l’incision
Il est rectangulaire. L’épine iliaque est le repère à partir duquel est délimité le champ. Les limites par rapport à
ce point sont à 4 cm en dedans, 6 cm en dehors, 6 cm vers la tête et 12 cm en direction distale. L’épine iliaque
controlatérale et le pubis peuvent être palpés au travers des champs. Les repères d’incision cutanée sont l’EIAS
et la tête du péroné. L’incision de 8 à I2 cm de Iong, part un travers de doigt en dehors de l’EIAS et se dirige vers
le bas dans une direction un peu en arrière de la tête du péroné (figure 4).
Figure 4a. Repérage de la voie antérieure : un doig
sous l’épine iliaque antéro-supérieure et deux doigts
représentant le tracé les limites de l’incision.
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Figure 4b. Limites du champ par rapport aux repères
de l’incision.
article
Hanche
Plans successifs et leurs caractéristiques
PLAN 1
Le tissu cellulaire sous cutané est fréquemment, mais non toujours traversé de veines se drainant de la fesse
vers, l’avant, surtout au voisinage de l’EIAS.
PLAN 2
La gaine du tenseur du fascia lata est incisée de façon rectiligne à 10 mm en dehors du bord antéromédial du,
muscle que l’on voit par transparence. Après l’ouverture de cette gaine relativement épaisse, il faut inciser le
périmysium fin gainant le muscle. C’est sous ce périmysium que se fait le plan de dissection.
PLAN 3
Le corps du tenseur est contourné par l’avant, en passant dans le plan avasculaire d’adhérences très lâches qui
le sépare de son enveloppe. Ce décollement est débuté à la partie moyenne de l’incision, il est complété en bas
vers le tendon du tenseur et en haut jusqu’au bord antérieur de l’os iliaque. Dans les 2 cm supérieurs, le corps
musculaire fait place à un tendon blanc qui intéresse les deux tiers superficiels du muscle ; l’insertion du tiers
profond, juste au-dessus de l’épine iliaque antéro inférieure (EIAI) se fait directement par des fibres musculaires.
Deux écarteurs à lame large (américains ou écarteurs de Fara beuf larges) exposent le plan de l’aponévrose du
muscle droit de la cuisse (figure 5).
Figure 5a. Incision de l’aponévrose du tenseur du fascia lata.
Figure 5b. Décollement du tenseur de sa gaine.
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article
Hanche
Muscle droit de la cuisse et paquet circonflexe latéral
Le feuillet intérieur de la gaine du droit de la cuisse est incisé au bord latéral du muscle qui est chargé sous
l’écarteur interne. Le paquet circonflexe latéral se voit par transparence sous le feuillet postérieur de la gaine.
L’incision prudente de ce feuillet, de la pointe du bistouri, le met à nu et permet d’en faire l’hémostase avant
section (figure 6) .Vers le bas, cette incision va jusqu’au corps musculaire du vaste latéral. Vers le haut, elle met le
tendon réfléchi du droit de la cuisse, parfois isolé et parfois attenant à la capsule, toujours mieux vu en réclinant
en dehors à la compresse le tissu cellulograisseux présent à ce niveau. Ce tendon réfléchi du droit antérieur
est un bon élément de repérage anatomique. Sa section, classiquement pratiquée, n’est pas nécessaire dans
l’implantation des prothèses de hanche de première intention.
Figure 6. Visualisation du paquet circonflexe avant coagulation ou ligature.
Ouverture de la gaine du muscle iliopsoas et abord de la capsule antérieure
et inférieure
La face latérale de la gaine de l’iliopsoas (prolongement bas du fascia illaca) s’insère sur la face antérieure de la
capsule. L’ouverture de cette insertion de la pointe du bistouri ouvre la loge musculaire et permet de libérer les
insertions musculaires que l’illopsoas contracte sur la capsule. Cette désinsertion débutée à la pointe du bistouri est poursuivie à la rugine de Lambotte étroite sur toute la surface de la capsule antérieure et en « enroulant»
la rugine en avant puis au-dessous du manchon capsulaire pour y insérer un écarteur mousse contre-coudé.
Cet écarteur peut être appuyé sous le bord inférieur du col ou poussé en dedans jus qu’au trou obturateur sous
le U radiologique sous lequel il s’accroche (figure 7).
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Hanche
Figure 7. Exposition de la capsule antérieure.
Abord de la capsule supérieure
Il se fait à partir de la face supérieure du tendon réfléchi du droit de la cuisse. La rugine, partant de là, glisse en
dehors vers le grand trochanter entre l’expansion aponévrotique du petit fessier. Un écarteur contre-coudé est
insinué dans cet interstice et récline en masse petit fessier, moyen fessier et tenseur du fascia lata.
Exposition de l’insertion capsulaire proximale et de la paroi antérieure
du cotyle
La rugine de Lambotte étroite s’insinue sous le tendon direct du droit de la cuisse vers la gouttière de l’iliopsoas.
Il est impératif de prendre le contact osseux et de le garder pour glisser un petit contre-coudé appuyé sur le
détroit supérieur sous le niveau de l’EIAI (le nerf fémoral n’est pas loin devant!).
Exposition de l’insertion distale de la capsule sur la ligne intertrochantérienne antérieure
Cette insertion est toujours doublée d’un tissu cellulograisseux lâche dont l’excision met à nu la capsule et
l’origine du vaste externe.
Manœuvres d’exposition et d’implantation de prothèses
CAPSULE
Elle peut ne faire l’objet que d’une capsulotomie. En règle, elle est réséquée d’une part, du fait de son caractère
pathologique et épaissi susceptible de gêner les temps ultérieurs, d’autre part et surtout, du fait que sa conservation n’est pas nécessaire a la stabilité de la hanche dans les suites opératoires. Cette résection faite au bistouri
électrique est limitée en haut au limbus sous le tendon réfléchi, en dedans sous le corps de l’iliopsoas, en de-
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Hanche
hors à la racine du col au niveau de l’insertion du vaste externe en remontant en haut à l’angle antérosupérieur
de la face interne du grand trochanter. La limite supéro-externe est au bord supérieur du col.
Luxation ou section première du col
En cas de luxation première, la traction axiale par la table orthopédique permet d’introduire une cuillère de
lambotte dans l’interligne articulaire ; la traction est alors relâchée et un effet de levier est appliqué sur cette
cuillère qui s’appuie sur la partie antérieure du toit de l’acétabulum. Ce geste, accompagné d’une mise en rotation externe de l’ensemble du membre inférieur par manœuvre de la table orthopédique, permet la luxation
antérieur de la hanche. La section du col est faite sur une hanche Iuxée, en rotation externe de 90 ; contrôlée au
palper du genou et maintenue par la table orthopédique. L’orientation en rotation de cette coupe est facilitée
par le contrôle inégalable de antéversion que permet la vue directe sur toute la face inférieure du col alors que
le choix de son niveau repose sur les repères de programmation radiologique préopératoire. En cas de section
première, le niveau en est repéré par rapport au niveau de la fonction entre le bord supérieur du col et la face
interne du trochanter mise à nue par la capsulectomie. L’extraction de la tête est aidée par l’implantation d’un
tire-fond dans le moignon cervicocéphalique et se fait par manœuvres associées de la cuillère de Lambotte
dans l’interligne et de traction rotation externe de la table orthopédique.
Exposition du cotyle
Elle est obtenue en effaçant le fémur en arrière par un contre-coudé fin appuyé sur la paroi postérieure en rotation libre et élévation du membre de quelques degrés pour détendre l’iliopsoas.
Le cotyle est ainsi exposé entre trois écarteurs contre-coudés (figure 8), le postérieur et l’antérieur positionnés
comme susdécrit, l’inférieur repositionné en intra-articulaire, entre les cornes de l’acétabulum au contact direct
du U soit d’emblée, soit après résection d’un éventuel ostéophyte inférieur. La graisse de la fosse acétabulaire et
le moignon de ligament de la tête fémorale sont excisés, ce qui peut nécessiter une hémostase aisée car sous
contrôle de la vue.
La préparation et la position d’implantation prothétique sont guidées par le palper des deux épines iliaques
antérosupérieure et du pubis.
Figure 8. Exposition du cotyle.
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Hanche
Exposition du fémur
Elle consiste à extérioriser la tranche de col et le massif trochantérien par une remise en rotation externe à 90
associée à une adduction de 10 à 20 ; et à une hyperextension de 20 à 30° (« jambe au sol»).
L’exposition est complétée par deux écarteurs contre-coudés, l’un puissant appuyé à la face postérieure du
massif trochantérien, l’autre fin appuyé sur le sommet du trochanter récline le petit fessier et le tenseur du fascia
lata.
L’extériorisation du fémur est obtenue par poussée axiale sur le membre inférieur par action de la table orthopédique, en veillant à ce que cette poussée soit effectuée genou étendu pour que le fémur lui-même reste en
adduction et hyperextension. Simultanément, la capsule est désinsérée au bistouri de la face interne du grand
trochanter. Cette désinsertion est menée jusqu’à l’angle postérosupérieur du grand trochanter, ce qui expose le
tendon du muscle piriforme dans la fossette digitale où il est respecté. Ce n’est qu’à ce moment que la position
de la cuisse et la poussée axiale de la table orthopédique font , « ressortir », de la plaie opératoire la métaphyse
fémorale exposée entre ses deux écarteurs contre-coudés (figure 9).
Figure 9. Exposition du fémur.
Ce n’est qu’en cas d’extériorisation insuffisante, certaines coxa vara, aile iliaque extrêmement évasée, hanche
raide et postérieure, qu’une libération complémentaire par section du tendon du piriforme et désinsertion de
la capsule postérieure sur la ligne inter-trochantérienne postérieure peut être effectuée.
La préparation fémorale et l’implantation prothétique sont facilitées par l’usage de l’ancillaire porte-râpe et
porte-prothèse comportant une angulation à 20° par rapport à la diaphyse. Le réglage de longueur se fait selon
les critères de programmation correspondant à la prothèse utilisée, que cette programmation soit indexée sur
le grand ou le petit trochanter, ou sur la longueur du fragment cervicocéphalique réséqué.
Réduction, contrôle, fermeture, suites opératoires
La réduction se fait par manœuvre de la table orthopédique sur les ordres et sous contrôle de l’opérateur. Sont
successivement effectuées une remise en rectitude et une traction axiale accompagnée d’une remise en rotation neutre, le chirurgien ne faisant qu’accompagner la tête dans sa réintégration dans le cotyIe.
Le contrôle de stabilité se fait en lâchant toute traction, en libérant les rotations et si nécessaire en faisant décrocher par la panseuse le bottillon de la table orthopédique pour tester la stabilité en flexion.
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Hanche
Après un contrôle final d’hémostase, la fermeture se fait par un surjet résorbable fin sur l’aponévrose du tenseur.
Il est important d’éviter les prises larges sur sa berge interne car c’est là que le fémorocutané est menacé. Un ou
deux redons drainent la loge prothétique.
La mobilisation et le lever postopératoires se font de façon précoce, sans précaution particulière en rapport
avec l’abord.
Avantages, inconvénients, dangers et complications
Table orthopédique
La voie antérieure sous-entend, pour ses promoteurs, une table orthopédique autorisant à la fois une traction
modulée, une liberté totale en flexion, abduction-adduction et surtout hyperextension, et une rotation non
limitée. Son premier avantage est de libérer l’opérateur et ses aides habillés des contraintes de manipulation et
de stabilisation du membre opéré, en confiant ce rôle à la panseuse circulante. Le positionnement du patient
sur «l’établi » (Judet), d’une part, donne une stabilité parfaite au bassin et, d’autre part, facilite l’exposition fémorale. Il convient d’insister sur le fait que dans toutes les manœuvres de luxation et d’exposition, la table orthopédique ne fait qu’accompagner les gestes de l’opérateur : les manœuvres de force, en particulier en rotation,
sont proscrites car susceptibles de se compliquer de fractures (spiroïde du quart inférieur du tibia). La pratique
de la voie antérieure sur table ordinaire est possible [5], mais nécessite des artifices d’exposition du cotyle et
plus encore du fémur, que ce soit en installant les deux membres dans le champ opératoire ou en réalisant une
hyperextension en bord de table.
Le risque de malposition, de fausse route ou de fracture, trochantérienne en particulier, paraît plus important,
l’exposition moins confortable, pour un avantage théorique et discutable d’une plus grande liberté de manipulation du membre inférieur par l’opérateur.
Risques vasculonerveux
NERF FÉMORAL
Il n’est menacé que par !’écarteur contre-coudé antérosupérieur dont la mise en place sous le tendon direct
du droit de la cuisse se fait, en respectant les règles précises susdécrites. La prudence fait préférer par certains
I’usage d’un écarteur simple appuyé sur la colonne antérieure. Il faut en outre rappeler qu’il est indispensable
d’effectuer les manœuvres d’hyperextension sans traction.
NERF CUTANÉ LATÉRAL DE LA CUISSE
Sa préservation justifie l’incision décalée sur la gaine du tenseur. C’est à la fermeture qu’il est menacé.
NERF SCIATIQUE
De par sa situation à distance de la voie d’abord et au-delà du site opératoire, sa protection ne nécessite aucune
précaution particulière.
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Hanche
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AVANTAGES
t
Absence totale de section musculaire et limitation des voies d’abord cutanées qui en font l’abord mini-invasif par excellence.
t
Réduction du taux de luxation [7].
t
Précision du positionnement : au niveau cotyloïdien, le contrôle visuel et palpatoire du pubis et des deux
épines iliaques apporte une sécurité majeure à l’implantation cotyloïdienne. Au niveau fémoral, le contrôle
de longueur impose une planification pré-opératoire indexée soit sur le trochanter, soit sur le fragment
cervicocéphalique réséqué. Le contrôle des rotations se fait par l’intermédiaire de la rotule palpée au travers
des champs et peut être considéré comme moins précis que sur un membre inférieur totalement dans le
champ opératoire, mais cela est contrebalancé par la parfaite appréciation de l’orientation du col du fémur
dans l’abord antérieur.
ADAPTATION AUX DIVERS MORPHOTYPES DE HANCHE
La voie d’abord antérieure est utilisée de façon systématique dans toutes les indications d’implantation de prothèses de première intention sur hanche mobile ou en ankylose.
L’abord et l’implantation prothétique sont d’autant plus facile qu’il s’agit d’une hanche dysplasique et antéversée. Les hanches profondes types coxa retorsa sont d’exposition plus difficile.
Les limites d’indication sur la morphologie de la hanche sont représentées par les hanches nécessitant un geste
fémoral spécifique de raccourcissement, type luxation haute dont on n’envisage pas un abaissement complet,
ou parfois grande coxa vara à col long où un abaissement trochantérien de stabilisation est discuté.
Conclusion
En conclusion, la voie d’abord antérieure de la hanche pour prothèse est la seule vole strictement non invasive
car respectueuse autant des territoires vasculonerveux que de l’anatomie musculotendineuse. Voie d’abord
élective de la hanche, elle permet tous les gestes d’implantation prothétique de première intention, en dehors
des cas où un geste fémoral spécifique est nécessaire. Parfaitement adaptée aux concepts modernes de chirurgie mini-invasive, elle permet même, dans ses versions « courtes », l’implantation de tous les types de prothèse
sans nécessité d’instrumentation spéciale ni de modification de technique de pose ou de fixation.
Références
[1] Judet J, Judet H. Voie d’abord antérieure dans l’arthroplastie totale de hanche. Presse Med 14 : 1031-3.
[2] Judet J, Judet R. The use of an artificial femoral head for arthroplasty of the hip joint. J Bone Joint Surg Br. 1950; 32-B(2) : 166-73
[3] Judet R, Judet J. Technique and results with the acrylic femoral head prosthesis. J Bone Joint Surg Br. 1952; 34-B(2) : 173-80.
[4] Judet R, Siguier M, Brumpt B, Judet T. A noncemented total hip prosthesis. Clin Orthop Relat Res. 1978 : 137 : 76-84.
[5] Light TR, Keggi KJ. Anterior approach to hip arthroplasty. Clin Orthop Relat Res. 1980;152:255-60.
[6] Lowell JD, Aufranc OE. The anterior approach to the hip joint. Clin Orthop Relat Res.1968;61 : 193-8.
[7] Siguier T, Siguier M, Brumpt B. Mini-incision anterior approach does not increase dislocation rate: a study of 1037 total hip replacements. Clin Orthop
Relat Res. 2004;426 : 164-73.
[8] Siguier T, Siguier M, Judet T, Charnley G, Brumpt B. Partial resurfacing arthroplasty of the femoral head in avascular necrosis. Methods, indications, and
results. Clin Orthop Relat Res. 200;386 : 85-92.
[9] Smith-Petersen MN. A new supra-articular subperiostal approach to the hip joint. Am J Orthop Surg 1917; 15 : 592
[10] Smith-Petersen MN. Approach to the exposure of the hip joint for mold arthroplasty.J Bone Joint Surg 1949; 31A : 40
[11] Thompson JE. The ?????? surgical approach to the problem of congenital dislocation. Clin Orthop Relat Res. 1956;2(8) : 237-43. Prothèse totale de
hanche les choix.
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trucs & astuces
Hanche
Voie d’abord antérieure
Technique opératoire - instrumentation
Grégory Sorriaux
Incision cutanée : repères
Hueter modifiée :
Repères osseux :
t
t
2 cm en bas en dehors de l’Epine Iliaque Antéro-Supérieure > tête du péroné
Grand trochanter : 2/3 au-dessus / 1/3 au-dessous
Repères musculaires :
t
Incision rectiligne en avant du tenseur du fascia lata qui est palpable,
en dehors de la dépression entre tenseur et couturier.
t
ASTUCE : la voie de Hueter modifiée est décalée en externe et plus oblique que la voie de Hueter classique
qui partait de l’Epine Iliaque Antéro-Supérieure en direction du bord externe de la rotule, Cela diminue le risque
d’atteinte du nerf fémoro-cutané qui chemine entre l’aponévrose du tenseur et celle du couturier.
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Hanche
Voie d’abord antérieure
trucs & astuces
Incision de l’aponévrose du Tenseur du Fascia Lata.
L’aponévrose du tenseur est constitué de plusieurs feuillets. Les fibres du tenseur du fascia lata ont la même
direction que l’incision.
Si trop interne : les fibres du couturier sont obliques en dedans (voie ilio-fémorale)
Si trop externe : les fibres du petit fessier sont obliques vers le bas et difficilement individualisables de l’aponévrose (Voie de Röttinger)
ASTUCE : ouvrir l’aponévrose en boutonnière pour vérifier les sens des fibres, puis l’ouvrir sur toute sa
longueur.
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trucs & astuces
Hanche
Voie d’abord antérieure
Ecartement du Tenseur du Fascia Lata en dehors
Le TFL est écarté en dehors et dégagé à la rugine de sa gaine d’aponévrose le long et son bord interne.
On charge le TFL en dehors avec un écarteur « Richardson ».
On charge le Couturier en dedans avec un autre écarteur « Richardson ».
Un écartement bien dosé permet d’exposer le 2ième plan
Une libération insuffisante des adhérences du tenseur du fascia lata bride la voie d’abord, particulièrement lors de l’exposition fémorale, avec un risque d’abimer les fibres musculaires du tenseur avec les écarteurs ou les râpes fémorales.
Astuce : Libérer l’ensemble des adhérences du tenseur du fascia lata, en haut jusqu’à la crête iliaque, en
bas au maximum. Ce plan est avasculaire. Une bonne libération du tenseur lui permettra de mieux s’effacer sous
les écarteurs.
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Hanche
Voie d’abord antérieure
trucs & astuces
Incision de l’aponévrose innominée
Le muscle droit antérieur apparaît dans le fond, en dedans de l’interstice.
Ouverture de l’aponévrose innominée, incision longitudinale le long de son bord externe avant de la récliner
en dedans.
Coagulation et section du pédicule provenant de la circonflexe antérieure avec une « Bengoléa courbe sans
griffe »
Le pédicule vasculaire est souvent précédé de veinules sentinelles à la face sur la superficielle de l’aponévrose innominée. Celles-ci ne doivent pas être confondues avec le pédicule qui est plus en profondeur.
Astuce : Ruginer le pédicule en dedans et en dehors afin de le libérer de ses adhérences avec l’aponévrose.
Cela facilite sa suture ou sa coagulation.
Astuce : Le tendon réfléchi peut être sectionné pour améliorer l’expositionlorsque le droit antérieur est
difficilement réclinable en dedans. On réalise alors une section complète de celui-ci au niveau du pourtour
cotyloïdien.
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trucs & astuces
Hanche
Voie d’abord antérieure
Exposition de la capsule
Un espace graisseux précède le plan capsulaire.
On rugine la face antérieure de la capsule avec une rugine de Lambotte pour libérer les adhérences de l’aponévrose du psoas de la face antérieure de la capsule.
Un premier écarteur (1), Ecarteur de hohman modifié, est glissé le long du bord interne de la capsule et permet
de récliner le psoas.
Un deuxième écarteur (2) , Ecarteur courbe à dent unique, est glissé sur le bord supérieur de la capsule et permet de protéger le petit fessier et le tenseur du fascia lata.
Un troisième écarteur (3), facultatif, Ecarteur acétabulaire, est glissé au niveau de la paroi antérieure du cotyle,
sous l’épine iliaque antéro-inférieure.
3
2
1
L’aponévrose du psoas peut présenter de nombreuses adhérences sur la partie antérieure de la capsule.
Astuce : On incise alors l’aponévrose du psoas afin de glisser la rugine entre l’aponévrose du psoas et son
corps musculaire, espace beaucoup moins adhérent.
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Tornier Medical #5 - Juillet 2014 - Membre inférieur
Hanche
Voie d’abord antérieure
trucs & astuces
Exposition du col fémoral
La capsule peut faire l’objet d’une incision (capsulotomie) ou d’une excision (capsulectomie) selon les habitudes du chirurgien ou l’état de la synoviale.
La capsulotomie a l’avantage de permettre une protection optimale des muscles péri-articulaires tels que le
psoas et le petit fessier. Elle est préférée surtout lorsque l’on utilise un cadre de charnley comme écarteur. On
réalise un H ou un U avec lambeau venant protéger le psoas.
La capsulectomie a l’avantage d’apporter une meilleure exposition du cotyle et du fémur car libère les zones
d’insertion capsulaire qui brident l’accès à l’articulation. Elle est préférée lorsqu’elle a un caractère pathologique
ou lorsque l’exposition s’avère difficile.
Coupe du col fémoral
La coupe du col fémoral peut être réalisée en place ou après luxation .
La coupe du col en place nécessite d’avoir de bons repères osseux, on part de la jonction entre le col et le grand
trochanter, on évalue l’obliquité du trait et la distance de coupe du col. La palpation du petit trochanter peut
aider au repérage. La tête fémorale est extraite à l’aide d’une tire fond.
La difficulté de couper en place est le manque de repères précis, avec un risque de couper trop court voire de finir dans
le petit trochanter ou de léser le tendon du psoas.
Astuce : On peut procéder à une coupe en deux temps, une courte, aléatoire et l’autre ajustée après mesure au pied à coulisse de la tête coupée ou par rapport au petit trochanter en mettant de la rotation externe.
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trucs & astuces
Hanche
Voie d’abord antérieure
La coupe du col après luxation de la tête nécessite des manipulations avec une cuillère de Lambotte et la table
orthopédique. Une fois luxée, le repérage de la coupe par rapport au petit trochanter ou en mesurant avec un
pied à coulisse à partir du sommet de la tête apporte plus de précision que la précédente technique.
Le risque de couper après luxation est de finir la coupe dans le sommet du grand trochanter.
Astuce : On peut faire une contre-coupe de la jonction sommet grand trochanter et col avant de luxer la tête.
Exposition du cotyle
Après extraction de la tête fémorale, la rotation est débloquée, sans traction.
L’écarteur 3, écarteur acétabulaire, est resté en place.
L’écarteur 2 est placé sous la paroi postérieure et efface le moignon du col et le TFL.
Possibilité de mettre l’écarteur 1 au niveau du U.
3
2
1
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Hanche
Voie d’abord antérieure
trucs & astuces
Le moignon du col peut gêner l’exposition du cotyle si la coupe est trop longue. S’attacher à faire la coupe définitive du
col avant d’exposer le cotyle.
Astuce : On peut mettre de l’adduction pour libérer la partie inférieure du cotyle et supprimer
l’écarteur 1. Une libération de la capsule postérieure peut être réalisée en cas de raideur ou de capsule.
Travail du cotyle
Le positionnement de la pièce cotyloïdienne se fait grâce aux repères osseux : les parois antérieures et postérieures, le toit et le U.
La principale erreur du positionnement du cotyle mis en place par voie antérieure est l’hyper-antéversion et la verticalisation.
Astuce : On vérifie la bonne orientation de la pièce cotyloïdienne définitive dans l’espace en plus des re-
pères osseux, dans le plan frontal, en vérifiant l’inclinaison de 40 à 45° par rapport à la ligne reliant les deux EIAS,
dans le plan horizontal, en vérifiant l’antéversion de 10 à 15° par rapport au sol ou au plan du bassin.
Tornier Medical #5 - Juillet 2014 - Membre inférieur
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trucs & astuces
Hanche
Voie d’abord antérieure
Exposition du fémur
L’exposition correcte du fémur est le point clé de la voie antérieure. La mise en place des pièces définitives du
cotyle ne gène pas l’exposition du fémur.
L’ écarteur 1 est placé au ras de la face postérieure du col fémoral : il latéralise le fémur.
L’ écarteur 2 est placé sur le sommet du grand trochanter : il extériorise le fémur.
Le membre est alors descendu au sol (extension de hanche) avec une rotation externe maximale, sans traction
et adduction.
Le risque principal de ce temps opératoire est la fracture du sommet du grand trochanter si celui-ci n’est pas assez
libéré, avec trop de contraintes sur les écarteurs.
Astuce : Accompagner progressivement le grand trochanter lors de la descente du fémur après
avoir bien libéré la capsule supérieure jusqu’à l’angle postéro-interne du grand trochanter qui a tendance à s’accrocher derrière le cotyle. Ne pas descendre le fémur tant que le grand trochanter reste
accroché.
Travail du fémur
Une fois exposé, le fémur peut être travaillé avec des porte-râpes adaptés. La voie antérieure expose
suffisamment de repères osseux pour pouvoir respecter la planification opératoire : petit trochanter,
sommet du grand trochanter, épaulement du grand trochanter.
Le risque principal de ce temps opératoire est la varisation
de la tige fémorale voire un refend ou une fracture du Merckel, si le fémur n’est pas suffisamment ressorti.
Astuce : Le chirurgien cale bien le membre en
adduction pour faire ressortir le fémur en latéral. Le
spongieux du trochanter doit être travaillé à la curette avant la mise en place des râpes , de même
que l’éperon du Merckel qui doit être travaillé à la
râpe courbe. On gouge le moignon de col supérieur avant le passage des râpes.
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Hanche
Voie d’abord antérieure
trucs & astuces
Conclusion
Il faut respecter chaque temps opératoire et optimiser chacune des libérations. Ne pas hésiter à passer du
temps sur l’exposition, une fois celle-ci réalisée, le travail de mise en place des implants s’en trouve facilité
et rapide.
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article
Genou
Fracture de rotule sur PTG
E. SERVIEN
Références :
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t
t
t
t
Meding JB, Fish MD, Berend ME, Ritter MA, Keating EM., Predicting patellar failure after total knee arthroplasty. Clin Orthop Relat
Res. 2008 Nov;466(11):2769-74.
Goldberg VM, Figgie HE 3rd, Inglis AE, Figgie MP, Sobel M, Kelly M, Kraay M., Patellar fracture type and prognosis in condylar
total knee arthroplasty. Clin Orthop Relat Res. 1988 Nov;(236):115-22
Chalidis BE, Tsiridis E, Tragas AA, Stavrou Z, Giannoudis PV.,Management of periprosthetic patellar fractures. A systematic review
of literature. Injury. 2007 Jun;38(6):714-24
Parvizi J, Kim KI, Oliashirazi A, Ong A, Sharkey PF.,Periprosthetic patellar fractures. Clin Orthop Relat Res. 2006 May;446:161-6
Chang MA, Rand JA, Trousdale RT., Patellectomy after total knee arthroplasty. Clin Orthop Relat Res. 2005 Nov;440:175-7
Browne JA, Hanssen AD., Reconstruction of patellar tendon disruption after total knee arthroplasty: results of a new technique
utilizing synthetic mesh. J Bone Joint Surg Am. 2011 Jun 15;93(12):1137-43
Introduction
Les fractures de rotule après prothèse totale du genou sont une complication rare et dont la prise en charge
ne fait l’objet d’aucun consensus. Néanmoins, si il s’agit certes d’une complication rare après PTG, la fracture de
rotule est la plus fréquente des fractures périprothètiques après arthroplastie de genou.
Peu de séries rapportent leur prise en charge thérapeutique. Leur prévalence a été cependant établie : le taux
de fractures periprothétiques de la rotule survient dans environ 1,2 % des cas après prothèses totales du genou
(de 0,3% à 6,3% selon les auteurs). La variabilité rapportée des fractures de la rotule selon les séries provient
sans doute du fait que beaucoup d’entre elles sont asymptomatiques et ne sont révélées que si les patients
bénéficient d’un suivi prospectif régulier lors d’une radiographie systématique.
Etiologie
Le plus souvent, la fracture de rotule n’est pas liée à un traumatisme et elle est de découverte fortuite lors du
suivi habituel en général dans les deux premières années suivant la mise en place de la prothèse. Bien évidemment une corrélation a été mise en évidence de facto avec le resurfaçage de la rotule, nous ne traitons ici que
des fractures de rotule avec resurfaçage.
En 2008, Meding et al. rapportent 444 fractures (5,2%) sur une série de 8530 PTGs opérées entre 1983 et 2003.
Néanmoins parmi ces 444 fractures, seules 25 ont été opérées soit moins de 0,3% de reprise chirurgicale. Le
même auteur a mis en évidence des facteurs de risque que sont un BMI (Body Mass Index) supérieur à 30 kg/
m2, le sexe masculin, un varus préopératoire supérieur à 5° et la pose d’un implant rotulien de grande taille.
Mais beaucoup d’autres facteurs de risque ont été mis en avant par d’autres auteurs : certains facteurs seraient
associés aux patients tels que l’ostéoporose, la polyarthrite rhumatoïde, une hyperactivité, des amplitudes articulaires excessives précoces. D’autres facteurs de risque seraient liés au type d’implant : implant à plot central,
bouton sans ciment... Enfin des causes techniques ont été identifiées telles qu’une coupe osseuse rotulienne
excessive ou asymétrique, reprise chirurgicale, la section de l’aileron externe, une course rotulienne anormale
avec défaut de positionnement des implants.
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Tornier Medical #5 - Juillet 2014 - Membre inférieur
article
Genou
Démembrement des fractures de rotule périprothétiques
A notre connaissance, il n’existe à ce jour qu’une classification des fractures de rotule périprothétiques. En 1988,
Goldberg et al. a décrit une classification du type de fracture après arthroplastie développée à partir de 36 cas.
Il a ainsi décrit 4 types (en fait cinq car le type 3 est divisé en A et B).
t
t
t
t
t
Type I : fractures “marginales” du pôle supérieur ou de la partie médiane de la rotule mais n’intéressant pas
l’implant, le ciment ou la continuité de l’appareil extenseur
Type II : fractures en plein corps avec rupture de la continuité de l’appareil extenseur et/ou intéressant le
bouton rotulien et le ciment
Type IIIa : fracture du pôle inférieur avec rupture de la continuité du tendon rotulien
Type IIIb: fracture non déplacée du pôle inférieur de la rotule
Type IV : fracture – luxation de la rotule
Cette classification reste peu ou pas utilisée en France. Comme l’a écrit Insall, la classification selon la configuration
de la fracture est souvent la plus simple bien qu’il s’agisse plus d’une description que d’une classification : fracture
horizontale, verticale et comminutive. C’est cette description/classification qui est la plus populaire chez nous,
car souvent la description du trait de fracture laisse présager de la rupture ou non de l’appareil extension et du
scellement de l’implant. En effet, en cas de fracture de la rotule périprothétique, deux facteurs essentiels vont
dicter l’acte chirurgical : un appareil extenseur compétent et le scellement du bouton rotulien.
Prise en charge thérapeutique
Le traitement des fractures de rotule après prothèse totale du genou revêt divers choix thérapeutiques : l’abstention (par exemple pour une fracture verticale et si il n’y a pas de flexum actif ), une ostéosynthèse, une patellectomie partielle voire totale ou encore une allogreffe de l’appareil extenseur.
Abstention thérapeutique
L’abstention thérapeutique semble donner des résultats fonctionnels tout à fait acceptables, avec une indolence fréquente, notamment pour les cas de fracture peu ou pas déplacée et avec un bouton rotulien stable.
Cependant avant d’opter pour un traitement non chirurgical lors de la découverte de la fracture sur la radiographie, la recherche d’un flexum actif doit être systématique. En effet, un appareil extenseur non compétent
relève d’une réparation chirurgicale sous peine de résultats médiocres grevés de douleur et d’instabilité.
En cas de décision pour une prise en charge chirurgicale, le traitement accepté a longtemps été l’association
de l’ablation du bouton rotulien et patelloplastie ou patellectomie. Dans plus de la moitié des cas, la fracture
de la rotule est associée à un descellement du bouton rotulien. Il est généralement admis qu’une simple ostéosynthèse (haubannage, cerclage) ne devrait pas être le premier choix de traitement en raison d’un taux élevé
d’échec et de pseudarthrose.
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article
Genou
Ostéosynthèse
En cas de fracture déplacée, nécessitant de facto un traitement chirurgical, l’analyse radiologique est essentielle.
En effet c’est le descellement ou non de l’implant rotulien qui dicte la stratégie chirurgicale. Le plus souvent la
viabilité du bouton rotulien est compromise et son ablation est nécessaire. Néanmoins en fonction du positionnement du bouton rotulien (de proximal en distal) et de sa taille, celui-ci peut être parfaitement scellé bien que
le trait de fracture apparaisse médian (figure 1). Dans ce cas (figure 1), c’est lors de la chirurgie que la conservation du bouton a pu être décidée (car bien scellé) et donc une ostéosynthèse « classique » a pu être réalisée. Il
faut cependant prendre soin de contrôler l’introduction des broches qui ne doivent pas être trop profondes et
doivent être dans l’épaisseur restante de rotule, la partie non resurfacée étant d’une épaisseur moyenne de 15
mm. Les suites postopératoires sont identiques à celles d’une fracture de rotule isolée : notre protocole consiste
au port de deux attelles, une attelle en extension pour la marche et une attelle de repos en flexion.
Enfin, il faut retenir que l’ostéosynthèse de rotule avec implant rotulien en place est une solution séduisante;
cependant la plupart des auteurs rapportent un taux élevé d’échec de de pseudarthrose et pour cette raison
cela ne doit pas être le premier traitement de choix.
(Figures 1)
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article
Genou
Patellectomie partielle
C’est sans aucun doute l’option chirurgicale la plus fréquente en cas de fracture périprothétique de la rotule.
La figure 2 montre un cas de fracture de la pointe (pôle inférieur) de la rotule. Dans ces cas, la fracture menace
rarement le bouton rotulien avec un trait de fracture souvent distal par rapport à l’implant qui n’est donc pas
descellé. C’est uniquement en cas de bouton rotulien de grande (trop grande) taille que son scellement est menacé par le trait de fracture . Pour ces fractures de la pointe, l’option la plus « simple » est de réaliser une résection de la pointe de la rotule. Une arthrotomie est systématique afin de vérifier le scellement de l’insert rotulien.
La résection de la pointe est effectuée par une incision verticale centrée sur la pointe de la rotule comme pour
un peignage. Ainsi le tendon rotulien est ouvert sur une courte distance dans le sens de ses fibres et la pointe
rotulienne est enlevée à la lame froide.
(Figures 2)
Patellectomie totale
En cas de fracture comminutive (Figure 3a) impliquant nécessairement un bouton rotulien descellé), une patellectomie totale est réalisée. La voie d’abord réalisée est identique à celle utilisée pour la mise en place de la
prothèse, l’arthrotomie antéro-médiale ou antérolatérale permet aisément d’éverser la rotule après libération
du cul-de sac sous-quadricipital et du tendon rotulien. L’ablation du bouton rotulien est alors réalisée et les
fragments osseux sont réséqués au bistouri ou à la pince gouge (Figure 3b). En cas de fragment résiduel médian et stable celui peut-être laissé en place mais sa fonction de bras de levier résiduel est d’une part controversée et d’autre part celui-ci est à fort potentiel de nécrose lorsque la rotule n’est pas déjà nécrosée... (Figure 3c)
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article
Genou
(Figures 3a)
(Figures 3b)
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(Figures 3c)
article
Genou
Place de l’allogreffe d’appareil extenseur
L’indication d’allogreffe d’appareil extenseur est une solution intéressante en cas de rupture chronique de l’appareil extenseur et donc de flexum actif. En cas de patellectomie totale, l’appareil extenseur est en général
en continuité et il n’y a donc pas de déficit d’extension. En cas de déficit, il s’agit d’une option intéressante
mais dont les risques notamment septiques sont à prendre en compte et c’est souvent l’option de la dernière
« chance » souvent réalisée après un échec des différents traitements chirurgicaux (ostéosynthèse, patellectomie partielle) (Figure 4a). La fixation tibiale doit être méticuleuse et doublée. Une logette est effectuée dans le
tibia pour accueillir la tubérosité tibiale (TTA) de l’allogreffe en taille pour taille. La tubérosité tibiale « allogreffée
» doit être de taille identique à celle d’un relèvement de TTA (6 cm de long environ et au moins 1 cm d’épaisseur) afin d’assurer une ostéosynthèse solide par 2 vis de 4,5mm de diamètre (Figure 4b). Une troisième vis distale tibiale bicorticale sous l’ostéotomie de la TTA est également mise en place pour consolider l’ostéosynthèse.
Un fil métallique relie les vis de part et d’autre de la TTA et cela afin d’assurer une ostéosynthèse suffisamment
solide pour répondre aux contraintes biomécaniques à ce nouveau (bras de levier) (Figure 4c). Pour la partie la
plus proximale de l’allogreffe, celle-ci est suturée au fil non résorbable respectivement au vaste médial et vaste
latéral ainsi qu’au tendon quadricipital résiduel. La hauteur de la rotule doit être évaluée.
La rééducation doit être prudente et une immobilisation stricte dans les premières semaines est préconisée ;
puis une flexion progressive de 30° en 30° est autorisée.
(Figures 4a)
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article
Genou
(Figures 4b)
Technique de Hanssen
Hanssen a récemment décrit une technique séduisante à l’aide d’un treillis synthétique (synthetic mesh)
comme cela est utilisé par exemple dans les cures de hernie en chirurgie digestive. Nous avons commencé
à utiliser cette technique dans les ruptures chroniques de l’appareil extenseur après arthroplastie du genou.
Celui-ci a publié des résultats intéressants pour les ruptures chroniques du tendon rotulien et cette technique
pourrait être intéressante dans les fractures négligées de la pointe de la rotule. De plus, elle a pour avantage
d’être une intervention moins coûteuse, plus rapide (pas de temps de préparation de l’allogreffe) et à moindre
risque septique.
Conclusion
En conclusion, le traitement des fractures périprothétiques de rotule n’est pas consensuel. L’arsenal thérapeutique chirurgical est large mais il y a un taux élevé de complications post-opératoires. Dans la plupart, ces fractures ne nécessitent pas de traitement chirurgical car asymptomatiques. A l’inverse en cas de descellement du
bouton rotulien et/ou de perte de continuité de l’appareil extenseur, un traitement chirurgical est de rigueur.
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Genou
article
La rotation fémorale
O. Courage
Lors de nos deux précédents articles, nous avions vu la planification opératoire, le choix et la réalisation de la
voie d’abord, et enfin l’exposition et la coupe tibiale . Nous allons aborder le fémur et la gestion des espaces
ligamentaires en flexion et en extension. L’espace en flexion détermine la rotation de l’implant fémoral, ce qui
n’est pas sans conséquence sur la rotule.
Nous décrirons la technique dite « lyonnaise », l’équilibrage ligamentaire débute par l’espace en flexion, cette
priorité à la flexion garantit la stabilité du 3ème condyle de notre prothèse. La hauteur de la came est faible, il y
a de ce fait peu de contraintes sur le plateau tibial, la stabilité en flexion empêche les luxations.
Après la coupe tibiale, le premier temps est d’apprécier cet espace avant de faire les coupes. Nous utilisons pour
cela un nouveau spacer correspondant à la taille du plateau qui sera utilisé, en basculant le genou fléchit à 90°
en varus et valgus, on évalue ainsi l’espace.
Photo 1. Sur ce genu-varum, l’espace en flexion est asymétrique avec plus d’espace en externe.
Dans ce cas, si l’on faisait une coupe parallèle au bord postérieur des condyles, il y aurait une laxité en flexion. Un
geste de relâchement ligamentaire médial pourrait être effectué en augmentant l’épaisseur du plateau. L’autre
technique possible est de moins couper en externe, l’espace en flexion sera alors symétrique. La prothèse sera
posée dans l’enveloppe ligamentaire sans geste de relâchement ligamentaire.
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article
Genou
Mais attention dans ce cas la prothèse est posée en rotation externe. Cela permet de diminuer les contraintes
rotuliennes externes. Il faut toujours évaluer les conséquences de ces options sur la rotule.
Comme on le voit sur ce schéma, les différentes options de coupe ont une conséquence sur l’espace antérieur.
Une coupe parallèle aux condyles postérieurs augmentera les contraintes externes de la rotule. Ces repères
sont assez difficiles à évaluer en per-opératoire, et pour certain on se fie à un scanner préopératoire pour plus
de précision.
Une fois cet espace évalué, on peu quantifier cette asymétrie en utilisant des cales.
À ce moment, cette analyse permet d’avoir une bonne idée de l’enveloppe ligamentaire.
Pour réaliser la coupe asymétrique, on dispose de 2 options, soit en utilisant des cales.
(Cette technique est recommandé pour compenser l’hypoplasie du condyle externe dans un genu valgum)
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Genou
article
Soit en réglant la rotation de la coupe en utilisant le rapporteur. Cette technique est recommandée dans les varus. Comme ici sur ce genou gauche, la prothèse est posée dans l’enveloppe ligamentaire, elle sera en rotation
externe, ce qui améliore la congruence fémoro-patellaire.
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article
Genou
Une fois le guide en place on peut évaluer la taille de la future prothèse. La palpation antérieure se fait au bon
endroit grâce à la graduation qui correspond à la partie proximale de la trochlée. Il faut se méfier de la petite
crête latérale sur la face antérieure du fémur.
La coupe condylienne postérieure est alors réalisée. L’espace en flexion est créée. Il ne doit pas être serré, en
effet un serrage excessif entrainera des douleurs et un déficit de flexion. Il doit donc être vérifié avec un spacer
qui correspond à l’encombrement total de la prothèse.
Ici le spacer de 19 mm corresponds à une prothèse avec un plateau de 9 mm, en balançant le genou en varus
et en valgus on s’assure du bon équilibrage en varus et en valgus.
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article
Genou
Il faut maintenant reporter cet espace en extension en réalisant la coupe fémorale distale. La goniométrie
préopératoire a permis de déterminer l’angle fémur /axe mécanique.
Le tenseur et guide de coupe est introduit dans le canal médullaire. L’orifice d’introduction ne doit pas être trop
postérieur pour éviter la mise en flessum de l’implant.
Le tenseur doit être utilisé avec modération, il ne doit surtout pas entrainer de flexum. Il est surtout utile dans
les grandes déformations avec laxité de la convexité.
La coupe fémorale distale est alors réalisée.
Parfois si le genou semble serré, il ne faut pas hésiter à régler la coupe à 11 mm
On peut utiliser le guide de coupe tibial notamment pour le mini-invavif .
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article
Genou
Les deux coupes fondamentales en flexion et en extension sont réalisées. Une libération des coques condyliennes postérieures peuvent être réalisée à ce moment en cas de flessum.
Avant de réaliser la coupe antérieure, il faut valider la taille de l’implant en utilisant les guides de coupe et leur
jauge. Une autre astuce est de valider l’absence de risque de surcoupe à l’aide de la broche antérieure.
L’utilisation des trous décalés permet d’antérioriser l’implant en cas de nécessité. Cet avancement de l’implant
augmente l’espace en flexion, mais de façon tout à fait tolérable. Cette éventualité est exceptionnelle.
On fixe alors le guide de coupe avec les vis latérales, et l’on réalise la coupe antérieure et les chanfreins, puis on
met en place l’implant d’essai, la cage centrale est réalisée à l’ostéotome.
On teste alors la mobilité, il faut veiller à ce moment à l’absence de flessum, une libération ligamentaire à ce
stade est possible, mais la plupart du temps n’est pas nécessaire. La flexion et l’extension doivent être obtenues
sans forcer.
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Genou
article
Le scellement des pièces définitives se fait en un temps. Le resurfaçage de la rotule n’est pas obligatoire, mais
cela fera l’objet d’un autre article !
La rotule resurfacée en dôme, et une rotule non resurfacée, le Hoffa faisant effet de pare choc.
En fin d’intervention il faut être soigneux pour la fermeture surtout du MPFL, il doit être plutôt fermé à moins
de 30° de flexion. On teste ensuite l’isométrie de la fermeture en testant les sutures en flexion et en extension,
la stabilité rotulienne est aussi évaluée.
La flexion doit être facile, il ne faut pas espérer une augmentation des amplitudes avec la rééducation.
Voici notre prothèse mise en place, le nouvel ancillaire permet d’autres techniques de pose en débutant par
la coupe fémorale distale première, cette technique sera présentée dans la prochaine édition : à suivre donc !
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