
Patrick Letourneur
Avocat au barreau de Paris, Docteur en droit, Maître de conférences associé à l’Université de Corse
d’une disposition impérative du Livre II du Code de commerce qui emporterait également nullité, la
violation des statuts par les associés engage leur responsabilité.
Si l’on recherche ensuite plus de critères relativement aux droits et obligations des associés, on trouve
les dispositions communes suivantes du Code civil : l’article 1833 qui stipule que la société doit « être
constituée dans l’intérêt commun des associés », l’article 1836 qui stipule que « les engagements d’un
associé ne peuvent être augmentés sans le consentement de celui-ci », l’article 1843-2 qui stipule
que « tout associé a le droit de participer aux décisions collectives, l’article 1844-1 qui stipule que « la
part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion
de sa part dans le capital social », l’article 1844-9 qui stipule que le partage de l’actif est effectué entre
les associés dans les mêmes proportions que leur participation aux bénéfices ». On voit que, sauf la
règle essentielle de proportionnalité des droits au montant des apports qui cristallise, en principe,
l’existence d’associé(s) majoritaire(s) et le fonctionnement démocratique de la société, le Code civil ne
donne pas d’indications sur l’existence de catégories d’associés sinon pour responsabiliser plus
particulièrement les fondateurs qui concourent aux actes de création de la société (articles 1840 et
1843). Or, ces dispositions peuvent, dans certaines conditions, être aménagées.
Le principe du partage du profit ou des pertes est relatif avec pour limites les dispositions de l’article
1844-1 du Code civil proscrivant les clauses extrêmes (« léonines ») de répartition qui littéralement
priveraient totalement un associé de toute part dans les résultats sociaux, bons ou mauvais.
Ce propos introductif autorise une première définition de l’associé ou de l’actionnaire : la personne
physique ou morale qui, dans le cadre d’une entreprise poursuivie sous forme d’une société, en
échange d’une mise en commun de moyens réalisée par un apport détient parts sociales ou actions
de cette société (droits patrimoniaux) en vue, dans le cadre du principe relatif d’égalité entre associés
ou actionnaires, de participer au contrôle de son activité (droits politiques) et d’en partager les risques
et le résultat économique (droits pécuniaires dont droit au dividende, droit aux réserves, droit au boni
de liquidation) et, last but not least, le droit de céder ses titres6.
Ces attributs définissent donc l’associé type et son statut, en notant que le droit à partager le résultat
(hors cession) est bridé par l’existence d’une décision collective des associés statuant généralement à
des règles de majorité ordinaire (sauf liquidation) et la créance de dividendes de l’associé n’existe que
pour autant qu’elle ait été ainsi votée7 et ne soit pas prescrite. Le rendement du titre est doublement
conditionnel, au résultat (y compris les réserves distribuables) et à une décision conforme.
Cette clarification faite des critères juridiques qui définissent le statut « commun » ou « collectif » de
l’associé, il est intéressant d’identifier les autres critères attachés à la personne des associés et en
tout ou partie matérialisés dans les titres dont les associés seraient propriétaires, ou bien l’existence
de relations entre catégories de titres et catégories d’associés, et, tous les éléments qui précisent la
définition ou viennent, au contraire, différencier les associés entre eux, du point de vue de leur rôle et
responsabilités ou encore du point de vue du contrôle de l’entreprise ou du rendement spécifique des
titres.
Sans s’exempter totalement de l’affectio societatis et de la thèse contractualiste de la société, ni, à
l’inverse, se référer exclusivement aux critères et prérogatives qui, selon la thèse institutionnelle de la
société, définissent davantage l’associé, une recherche sur la caractérisation des associés ne peut
faire l’impasse sur les nombreux aménagements du statut d’associé et, en définitive, l’existence de
catégories d’associés, … plus ou moins « associés », quoique tous soumis au pacte social, en
fonction des avantages octroyés ou de la nature et de l’intensité de prérogatives propres, voire
étrangères aux concepts de société et d’associé en droit des sociétés.
6 Il faut de cette manière s’intéresser à la constitution du capital (l’un des facteurs essentiels des systèmes
économiques) lorsque l’on réfléchit au rôle des associés et au devenir des entreprises, et notamment aux moyens
permettant aux entreprises (parfois à travers une structure de contrôle) de se créer, de se développer et
d’atteindre une taille adéquate (besoin auquel répond précisément la société par actions), i.e. une dimension
concurrentielle susceptible de créer et pérenniser emplois et richesse et, dès lors, analyser, par ce biais, les rôle et
prérogatives dévolus aux associés et leurs éventuelles limites. A ce stade, on peut également observer le rôle et
les prérogatives des associés dans leur ensemble exercés au sein d’une société (en tant que « Shareholders » ou
« Stockholders ») et constater que leurs intérêts ne se confondent ni avec ceux de la société (« intérêt social »), ni
nécessairement avec ceux de ses dirigeants, ni davantage avec ceux de ses partenaires («Stakeholders »).
7 Voir en ce sens Cass. Com.28 novembre 2006 Bull. civ. IV, n°235 ; JCP 2007,II, 10008.