DOSSIER Avec l`Expo Shanghai 2010, la Chine souhaite obtenir un

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DOSSIER
CHINE
L’ÉBULLITION CHINOISE
Avec l’Expo Shanghai 2010, la Chine souhaite obtenir un retentissement
mondial comparable à celui des Jeux Olympiques de Pékin et propulser ainsi
Shanghai sur le devant de la scène internationale. La manifestation,
qui déclinera la thématique “Better city, better life” du 1er mai au 31
octobre, se présente comme la plus grande exposition universelle de tous les
temps. Plus de 200 pays et organisations participants sont attendus,
ainsi que 100 millions de visiteurs.
Shanghai est à l’image du pays : en pleine ébullition, ambitieuse et
prometteuse. Cette dynamique inégalable attire évidemment un nombre
croissant de diplômés HEC, tandis que les partenariats entre HEC Paris et
les business schools chinoises gagnent en intensité. Devenue incontournable
dans bien des secteurs, la Chine n’est pourtant pas un marché facile.
Comment travaille-t-on dans l’empire du Milieu ? Quels sont les atouts
et les faiblesses de l’économie chinoise ? Quels sont les opportunités
professionnelles, les pièges à éviter, les rouages à connaître ?
Hommes & Commerce vous livre les clés d’une Chine très éveillée.
SOMMAIRE
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Fotolia
Le monde du business chinois
et ses subtilités
30
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
34
Portraits de diplômés
39
La Chine, une priorité
pour HEC Paris
40
Analyses : multinationales
chinoises, PMI chinoises,
finances en Chine...
© Delphimages - Fotolia.com
AVRIL-MAI
2010 • HOMMES ET COMMERCE
31
DOSSIER
CHINE
Expertises
Business en Chine :
un défi culturel !
’usine du monde ne cesse de multiplier
les records. Avec des exportations atteignant les 1200 milliards de dollars en
2009, la Chine a détrôné l’Allemagne de
la plus haute marche du podium des exportateurs mondiaux. En 2010, l’empire du Milieu,
dont la croissance dépassera largement celle
des pays occidentaux les plus industrialisés,
deviendra vraisemblablement le dauphin des
États-Unis en termes de PIB nominal. “Paradoxalement, la Chine a
accéléré sous l’effet de la
crise ses gains de productivité dont la croissance
moyenne de 1990 à 2008
est à 4 %, soit quatre fois
supérieure à celle de notre
pays”, souligne Paul ClercRenaud (H.70), Managing Director de Fargo.
La Chine est-elle pour autant un Eldorado où
les entreprises doivent s’implanter impérativement, une terre d’expatriation ? “Dans le
panorama émergent global de nombreux secteurs, le marché chinois devient incontournable. Toutefois, la décision de s’y développer
ne doit pas résulter d’un effet de mode. Il faut
un plan soigneusement élaboré, des moyens
financiers et humains conséquents, ainsi que
l’implication personnelle du chef d’entreprise
et des cadres supérieurs concernés”, pour-
L
“La quête du consensus et
l’absence de conflits sont deux
principes primordiaux.”
suit-il. Éric Goujon (H.84), associé de PricewaterhouseCoopers Audit & Conseil à Pékin
et président du groupement HEC Pékin,
conseille la même prudence avisée : “Entre
3000 et 5000 jeunes diplômés arrivent à Shanghai chaque année pour trouver un emploi ;
beaucoup d’entre eux repartent au bout de six
mois. Il existe de nombreuses opportunités,
mais sans un projet professionnel bien échafaudé, sans expertise et sans parler chinois,
c’est difficile.”
32
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
EXPLORER LA CULTURE CHINOISE
Une fois préparé, l’expatrié ou le chef d’entreprise peut aborder le marché chinois, à condition de s’armer de patience. “C’est le maître
mot !, insiste Paul Haouzi
(MBA.98), président de
Bluebell Greater China et
président du groupement
HEC Hong Kong. Il faut
laisser du temps au temps,
car tout est plus compliqué
ici de par l’histoire, les
problèmes de langue et les différences culturelles.” L’apprentissage du chinois, s’il est
recommandé, n’est pas toujours indispensable.
En revanche, les expatriés doivent se plonger
dans la culture chinoise. “Si un Occidental
ne comprend pas notre culture, il est alors très
difficile de travailler ensemble !”, juge Li-Ya
Qiu (H.84), VP chez Total Raffinage Marketing Chine.
La quête du consensus et
l’absence de conflits sont
deux principes primordiaux. “Après avoir été
discutées en groupe, les
décisions sont prises lors
des réunions. Il faut parvenir à bâtir un consensus et éviter de se fâcher
ou de critiquer quelqu’un en public. Cela peut
avoir des effets contre-productifs”, prévient
Man-Ying Lee (D.01), professeur, consultant
en stratégie d’entreprise et président du groupement HEC Taipei. “Il faut toujours garder
la face, enchérit Leo Lui
(H.84), président d’Hermès Chine. Souvent, lors
d’une réunion, les Chinois
ne refusent pas explicitement mais communiquent
leurs souhaits indirectement, car un refus est une
infraction en Chine. Il faut alors prêter attention à la communication non verbale (comme
le langage corporel).” Les expatriés s’avouent
souvent surpris par cette communication indirecte, comme le remarque Éric Goujon : “À
une question directe, en France, on obtient
généralement une réponse directe. Pas en
Chine. La réponse pourra prendre la forme
d’une anecdote qui vous paraîtra décalée ou
de propos “circulaires” qui, peu à peu, vous
laissent deviner l’intention de votre interlocuteur.”
“Un refus est une infraction en
Chine : il faut prêter attention à
la communication non verbale.”
La Chine valorise également le respect et la
hiérarchie. “Lorsqu’on s’adresse à un homme
d’affaires ou à un haut fonctionnaire, on l’appelle par son nom et son titre. Par exemple,
Monsieur le Président Chen. Lors de réunions
ou de négociations, les cartes de visite sont
obligatoires : elles doivent être reçues des deux
mains, examinées puis déposées sur la table.
Il serait extrêmement impoli de les jeter sur la
table sans leur prêter attention ! Il est aussi
considéré comme une politesse de faire un petit
cadeau à un partenaire d’affaires lors de la
première réunion. En revanche, il serait irrespectueux d’envoyer un jeune cadre français à
une réunion avec un interlocuteur chinois
senior : cela voudrait dire que l’entreprise
française ne considère pas sérieusement son
partenaire chinois”, détaille Leo Lui.
RELATIONS ET TRANSACTIONS
Pour illustrer les différences culturelles saillantes entre Français et Chinois, Hao Guan
(MBA.87), Managing Director China pour
VSL et président du groupement HEC Shanghai, conte une anecdote :
“Supposez qu’un directeur
envoie son subordonné lui
acheter un paquet de cigarettes. En France, on dira
que c’est un abus de pouvoir, alors qu’ici ce sera
considéré comme une
marque de confiance.” Or, en Chine, la
confiance mutuelle s’avère centrale dans les
relations professionnelles. Les cadeaux, les
conversations qui démarrent les réunions avant
La Chine attire de plus en plus de diplômés HEC. Les opportunités de carrière
y sont nombreuses et prometteuses, à condition de bien préparer son projet
et de savoir s’adapter aux spécificités culturelles. Sept diplômés HEC
décortiquent pour vous le monde des affaires chinois et ses subtilités.
LES FRANÇAIS VUS PAR LES CHINOIS
de plonger dans le vif du business, le sens de
l’écoute sont autant de tentatives pour tisser
des relations autres que purement professionnelles. Un bémol toutefois : selon Man-Ying
Lee, il faut “faire confiance
aux gens, mais ne pas
avoir une confiance aveugle dans leurs actions”,
d’où l’importance d’un bon
système de contrôle.
Les réseaux (“guanxi”)
restent un trait fort du paysage des affaires, malgré l’ouverture de la Chine
et la professionnalisation des relations d’affaires. “L’efficacité de la relation d’affaires dépend
de la qualité des guanxi : il convient de cultiver ses relations en recherchant toujours la
perception partagée d’une situation équilibrée
où les deux parties trouvent leur compte,
observe Paul Clerc-Renaud. Simple étape dans
cette relation, le contrat peut connaître des
rééquilibrages consensuels si les circonstances
évoluent. C’est là toute l’ambiguïté des affaires avec la Chine, ce qui implique une disponibilité et une capacité d’écoute du partenaire
au plus haut niveau de la hiérarchie.”
UNE EXPÉRIENCE FASCINANTE
Travailler en Chine n’est pas pour autant mission i mp o s sible. Au
contraire. “Vivant depuis
nombre d’années en Chine
et confrontés chaque jour
à cette différence, nous
n’entendons pas la nier
mais quel autre pays n’est
pas différent ?, interroge
Éric Goujon. Si les circonstances et contraintes varient d’un pays à l’autre, les objectifs
économiques et principes de gestion demeurent
quant à eux rigoureusement semblables.”
Le romantisme, la tour Eiffel, le luxe et l’art de vivre sont des images souvent
associées aux Français. L’envers de la médaille ? Nos compatriotes sont également
taxés d’arrogance et de mesquinerie. Selon Éric Goujon, la collaboration francochinoise n’est pas évidente : “Alors que les Chinois ont une vision holistique, les
Français se démarquent par le souci du détail. Les Chinois ne comprennent pas
pourquoi nous nous attachons à certains points contractuels et non pas à l’esprit
du contrat. Car s’ils sont nécessaires, ce n’est pas seulement en signant des contrats
que l’on fait du business en Chine !” Paul Clerc-Renaud considère que les Français
souffrent aussi d’un déficit de sérieux. “Nous avons la réputation de ne pas réagir rapidement. Par ailleurs, les 35 heures, perçues comme un symbole de décadence
et de paresse, ont nui à notre image.”
Côté business, les marques françaises liées au luxe et à la mode sont célèbres en
Chine, tout comme l’enseigne de grande consommation Carrefour. En revanche,
les autres secteurs d’excellence de l’Hexagone, tels que le nucléaire, les transports
ou encore les travaux publics, demeurent plutôt méconnus.
“Simple étape dans une relation d’affaires, le contrat
peut connaître des rééquilibrages consensuels si les
circonstances évoluent.”
LE RÉSEAU HEC EN CHINE :
4 GROUPEMENTS
612 DIPLÔMÉS HEC EN CHINE
• Shanghai, 135 diplômés
• Pékin, 164 diplômés
• Hong Kong, 144 diplômés
• Taipei, 30 diplômés
• Autres villes en Chine, 139 diplômés
Les diplômés HEC installés dans la région
s’avouent parfois surpris ou déstabilisés, mais
tous font part de leur fascination pour ce pays
qui marie traditions culturelles et profondes
évolutions économiques. “Il est très agréable
de travailler avec des Chinois, car c’est une
culture qui privilégie encore l’humain par
rapport au résultat. Et quand un Chinois sent
que vous appréciez sa culture, il vous le rend
au centuple”, conclut Paul Haouzi. ●
© Airdiasol
“Ici, il faut faire confiance aux
gens, mais ne pas avoir une
confiance aveugle dans leurs
actions.”
AVRIL-MAI
2010 • HOMMES ET COMMERCE
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DOSSIER
CHINE
Témoignages
Parcours et regards
sur la Chine
LA FINANCE EN QUÊTE D’EFFECTIFS
UN MARCHÉ CONTRAIGNANT
Deepak Rao (H.95), Managing Director au bureau
de Hong Kong de Goldman Sachs
Jacques Ponty (H.86), directeur général Danone Waters Chine
Vous vous déclarez fasciné par la Chine. Pourquoi ?
Voici plus de 13 ans que je travaille en Asie, dont 10 à
Hong Kong. Durant cette période, nous avons vécu
des événements susceptibles d’inquiéter sa croissance
(la reprise de Hong Kong en 1997, la crise asiatique de
1998, l’épidémie du SRAS en 2003). Cependant, la
Chine est ressortie plus forte à chaque reprise. D’un
point de vue financier, chaque année a fourni plus
d’opportunités de croissance que l’année précédente.
Aujourd’hui, la Chine est selon moi le pays au monde
qui a le mieux compris le capitalisme !
Quelles sont les opportunités dans le secteur financier ?
La Chine représente le plus important marché de consommateurs au
monde, le plus important détenteur de réserves de dollars, et
conserve un bilan très peu endetté.
Son économie croît de plus de 10 %
par an depuis 2000. Cette croissance a besoin d’être encadrée,
financée et mise en œuvre, ce que
s’efforcent d’assister les financiers basés en Asie. Voici
déjà plusieurs décennies, les banques occidentales
ont installé leur QG asiatique à Hong Kong, recrutant
expatriés et locaux. Un expatrié basé en Asie bénéficie souvent, pour une expérience donnée, d’un voire
de deux niveaux de responsabilités plus élevés qu’en
Europe ou aux États-Unis, et les carrières peuvent se
monter rapidement.
Quel a été l’impact de la crise en Chine ?
Rappelons-nous que l’Asie a vécu sa propre crise,
bien plus douloureuse, en 1998. Forte des leçons
qu’elle en avait tirées et grâce à sa puissance fiscale
actuelle, la Chine a disposé pour amortir la crise
récente de nombreux moyens qui,
dans l’ensemble, ont fonctionné
très rapidement. C’est à se demander si la crise a jamais eu lieu en
Asie ! Plus subtilement peut-être,
cette crise a été pour la Chine l’opportunité d’accélérer la mise en
place de jalons nécessaires à faire
évoluer son positionnement d’“usine du monde” vers
celui de fournisseur de produits et services à haute
valeur ajoutée. La Chine ne fait que se réveiller…
“La Chine est selon moi
le pays au monde
qui a le mieux compris
le capitalisme !”
34
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
Expatrié en Chine depuis un an, Jacques Ponty porte un regard neuf sur ce
marché aux nombreux défis. “La taille du pays, la vitesse de croissance de
la consommation (de 15 à 20 % sur le secteur des boissons),
le caractère très concurrentiel et compétitif du marché
et l’organisation de la distribution encore traditionnelle
et complexe nécessitent une remise en question de nos
méthodes et de nos stratégies de développement”, souligne-t-il. L’empire du Milieu, “plus challenging et
contraignant que d’autres marchés”, s’avère très gratifiant en termes de business : “Même avec des positions
de niche, on peut réussir à créer des business significatifs
dans des délais assez rapides et regarder l’avenir sur du long terme en restant très optimiste.”
LE FILON DU VIN
David Chow (MBA.96), fondateur d’Altavis Fine Wines
Quel est votre parcours ?
J’ai passé la quasi-totalité de ma vie professionnelle en Asie,
pour de grands groupes comme Peugeot, Pernod
Ricard, LVMH et DuPont. Il y a cinq ans, j’ai décidé
de devenir entrepreneur. J’ai commencé par gérer
des projets liés aux biotechnologies, avant de
fonder une société d’importation de vins, Altavis Fine Wines.
Pourquoi avoir choisi ce secteur ?
Je connais bien ce domaine pour avoir dirigé les
vins Dragon Seal du groupe Pernod Ricard. Le potentiel est
énorme : la Chine est déjà le septième producteur mondial de
vin, et le dixième en termes de consommation. Dans les dix
années à venir, la Chine figurera vraisemblablement parmi les
trois premiers marchés mondiaux.
Quelles sont les principales difficultés rencontrées en tant
qu’entrepreneur ?
Il ne faut pas se limiter à une vision simpliste de la Chine, à
savoir un marché énorme où le PNB explose. En réalité, il est
difficile de trouver sa place sur ce marché atomisé, concurrentiel et immature, où chaque zone nécessite un marketing et une
distribution différents. Il faut donc se démarquer en apportant
le professionnalisme et l’expertise du vin. Quant aux capitaux,
le système de prêts bancaires est beaucoup plus complexe qu’en
Europe.
UN MARCHÉ INCONTOURNABLE POUR
LA CHIMIE
Michel Ybert (H.72), président de Rhodia Asie Pacifique
Jérôme Benoit (H.06), administrateur de
WSEIP et DG Chine de Delta Plus Group
Il y a une trentaine d’années, Jacques Benoit
(H.75) fondait Delta Plus : initialement
importatrice d’équipements de sécurité
individuelle (harnais antichutes, casques
de chantier…), l’entreprise finit par concevoir et fabriquer ses propres articles en
Chine. Lorsque le poste de directeur général Chine se libère, son fils Jérôme Benoit
(H.06), qui a fait ses armes au sein de la
direction financière puis de la direction
marketing du groupe familial, postule. “La
Chine est un pays euphorisant où tout est
difficile à comprendre et où tout va très
vite”, juge Jérôme Benoit. Parallèlement,
la famille Benoit a ouvert depuis deux ans
le Wujiang Sino-european industrial park
dans la banlieue de Shanghai. Ce site propose des locaux industriels clés en main
aux PME européennes. “On gère toute une
gamme de services (ressources humaines,
exportations…) pour que les PME puissent
se concentrer sur leur cœur de métier, dans
un esprit pépinière.” Ses
conseils ? “Pour qu’une
PME s’implante avec succès, il faut réaliser une
étude préliminaire poussée, appréhender les
différences de culture et
s’adapter au marché. Le
dynamisme et la rapidité d’action sont
essentiels pour distancer les éventuelles
copies.”
“Le dynamisme et la rapidité
d’action sont essentiels pour
distancer les éventuelles
copies.”
“Il est plus important de
respecter la culture et
l’identité chinoises que de
parler la langue.”
“13,6 millions de véhicules ont été vendus en Chine
en 2009.”
LE RÊVE CHINOIS
Alice Lopin (H.04), directrice commerciale monde
chez Qeelin
“Je vis la version chinoise de l’American Dream !”, s’enthousiasme Alice Lopin. Après avoir travaillé pour Van Cleef & Arpels
au Japon et à Hong Kong, obtenu le diplôme de la Chinese
University of Hong Kong et ouvert deux boutiques
de luxe dans l’île de Guam, cette gemmologue
revient à Hong Kong en tant que directrice commerciale monde pour Qeelin, “la première marque
de haute joaillerie chinoise”. Considérant qu’il est
“plus important de respecter la culture et l’identité
chinoises que de parler la langue”, elle communique en anglais ou via des interprètes. Et multiplie
les efforts d’adaptation afin de ne pas “bloquer
le bon fonctionnement de l’entreprise” : “Si je souhaite par exemple m’adresser au membre d’une
équipe, je dois d’abord contacter son manager et
éviter à tout prix de court-circuiter la hiérarchie.”
Chaque journée comporte son lot de malentendus,
d’anecdotes amusantes ou improbables... et
d’émerveillement. “J’apprécie le dynamisme inépuisable de cette mégalopole, son style de vie cosmopolite et
surtout cette nouvelle aventure professionnelle “unique” : je
suis la seule Française au monde à travailler pour une marque
de luxe chinoise devenue internationale !”
© Airdiasol
UNE AFFAIRE DE FAMILLE
“J’ai intégré la zone Asie Pacifique de Rhodia en
2003, après avoir occupé des fonctions de direction
générale au sein des différentes divisions du groupe.
Basé à Singapour, j’ai ensuite rejoint Shanghai :
le centre de gravité de nos activités se déplace en
effet vers la Chine, devenue une priorité sur tous
nos marchés. C’est là que nous réalisons l’essentiel
de nos investissements de capacité et déployons
une politique très agressive de croissance : 20 %
de notre activité est liée à l’automobile. Or la Chine
est devenue le premier consommateur au monde
avec 13,6 millions de véhicules vendus en 2009.
Dans le domaine de la consommation, la classe
moyenne achète de plus en plus de shampoings,
détergents et autres produits dans lesquels interviennent nos composants chimiques. Enfin, nos
produits pour bitume et traitement des métaux profitent de
la croissance spectaculaire des infrastructures. La Chine est un
pays où il est difficile, en tant qu’industriel, de prendre ses
premiers pourcentages de part de marché. Mais si on y arrive,
la rapidité d’exécution est alors extraordinaire.”
AVRIL-MAI
2010 • HOMMES ET COMMERCE
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DOSSIER
CHINE
Témoignages
Parcours et regards sur la Chine
GARE À LA QUALITÉ !
AFFIRMER SON LEADERSHIP
Sébastien Breteau (M.97), président
d’AsiaInspection
Hao Guan (MBA.87), Managing
Director de VSL Chine, président
du groupement HEC Shanghai
C’est en créant une société d’import-export à
Hong Kong (SEBO, lauréat d’un Mercure HEC
2001) que Sébastien Breteau a appréhendé
l’ampleur des problèmes de la qualité en Asie.
“Les prestataires historiques de la qualité en
Chine sont des mastodontes qui servent mal
les besoins des PME”, juge-t-il. Il vend alors
son entreprise et fonde AsiaInspection. L’offre
destinée aux PME propose, via un site Internet,
trois types de services : des audits d’usine, des
inspections qualité sur site et la certification
des produits en laboratoire. “En 2010, nous
allons réaliser 50 000 contrôles qualité avant
expédition, et environ 18 000 produits seront
rejetés”, estime-t-il. La prudence s’impose
donc. “Malgré l’amélioration de la qualité ces
dernières années dans le sud de la Chine, les
problèmes ne disparaissent pas. En effet, pour
des logiques de coût, les importateurs s’approvisionnent désormais davantage au nord
et à l’ouest de la Chine, régions où les standards
de qualité sont loin des exigences occidentales. L’importateur doit bien garder en tête qu’il
est légalement responsable, et non le distributeur, de la conformité des produits qu’il met
sur son marché. D’où l’importance des inspections avant expédition.”
© Airdiasol
“Au nord et à l’ouest
de la Chine, les
standards de qualité
sont loin des exigences
occidentales.”
“VSL, filiale de Bouygues, est leader mondial des bétons précontraints. Les Chinois apprécient de
tels produits technologiques à
forte valeur ajoutée. Dans le cas
de grands groupes généralistes, mieux vaut d’ailleurs
s’implanter via les filiales leaders dans leur domaine,
quitte à déployer le réseau ensuite. Il faut également
privilégier une vision à long terme : cela signifie affirmer son leadership, soigner la relation clientèle, ne
pas s’endormir sur ses lauriers, se protéger contre le
piratage en ne lésinant pas sur la propriété intellectuelle, et bien suivre les évolutions du cadre juridique,
toujours très mouvant.”
SE MÉFIER DES ÉTATS FINANCIERS !
Éric Goujon (H.84), associé de PricewaterhouseCoopers Audit & Conseil à Pékin,
président du groupement HEC Pékin
“Les entreprises chinoises qui n’ont jamais connu d’ouverture internationale peuvent
avoir des systèmes comptables archaïques, voire frauduleux : il est courant que des
entreprises privées aient deux ou trois jeux de comptes ! Mais elles sont capables de
se mettre à niveau très rapidement. Avant d’entreprendre une joint-venture ou
effectuer un rachat, les investisseurs doivent donc entreprendre des travaux d’analyse poussés, et non pas seulement se reposer sur les états financiers qui leur sont
présentés.”
36
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
“Les Français
négligent le rôle
important que les
Chinois réservent au
facteur émotionnel.”
CONSTRUIRE LA CROISSANCE VILLE PAR VILLE
Jean-Michel Ripoll (H.85), directeur général en charge du département
prospective et insight Chine pour L’Oréal
Quel est votre itinéraire professionnel ?
Je travaille chez L’Oréal depuis 25 ans. Après huit années passées au Japon
et une parenthèse en Europe, j’ai pris la direction générale de la zone Asie
pour la Division des produits grand public en 1998, peu de temps après la
création de notre filiale à Shanghai. J’ai ensuite rejoint les bureaux chinois
en 2005.
Comment qualifieriez-vous le marché chinois dans votre secteur d’activité ?
Tous les marchés sur lesquels nous opérons sont en plein développement
et la Chine est le plus grand marché au monde pour les soins du visage. Le
potentiel de croissance est énorme : les statistiques montrent qu’en 2012,
pour la première fois, il y aura autant d’habitants à la campagne que dans
les villes. Or nos marchés sont concentrés dans les villes. Par ailleurs, la
pyramide des consommateurs en termes de revenus rend nécessaire une
offre de produits de qualité aux prix variés. La segmentation par marques
de L’Oréal est donc en parfaite adéquation avec cette pyramide et accompagne ainsi l’enrichissement des consommateurs
de ce pays.
Quels conseils donneriez-vous à une entreprise
désireuse de conquérir le marché chinois ?
Il faut proposer des produits de qualité pour satisfaire les attentes de consommateurs extrêmement
exigeants et savoir s’entourer de bons collaborateurs chinois. La Chine doit également être considérée comme plusieurs pays : il faut bien identifier
les zones les plus intéressantes pour son produit,
puis avoir la patience de construire sa stratégie et
son marché ville par ville.
“La Chine doit être
considérée comme
plusieurs pays. ”
CULTIVER LA SENSIBILITÉ
CULTURELLE
Man-Ying Lee (D.01), professeur,
consultant en stratégie d’entreprise et
président du groupement HEC Taipei
“D’après mon expérience, le point faible
des Français est le manque de sensibilité
culturelle dans leurs négociations et leur
communication avec les Chinois. Connus
pour leur logique et leur approche rationnelle, les Français négligent le rôle
important que les Chinois réservent au
facteur émotionnel. Lorsqu’on traite avec
des Chinois, il faut également penser aux
bénéfices mutuels (et non pas adopter
la mentalité typiquement française du
“chacun pour soi”) et se mettre dans
l’optique d’une relation à long terme.
Enfin, il ne faut pas négliger la communication indirecte et le second degré. Je
cite l’exemple d’un directeur chinois qui
souhaitait annuler un projet. Plutôt que
de l’annoncer clairement à ses partenaires français, il a critiqué certains points
du programme. Les Français ont tenté
d’y remédier en vain, sans comprendre
la véritable intention du directeur.”
CHOC CULTUREL
Cui Wen Pottier (MBA.04)
Jacques Chirac, Gerhard Schröder, Chris Patten, Rupert Murdock... Elle les a tous interviewés. Alors
reporter à la Télévision de Shanghai, Cui Wen Pottier produit un programme quotidien d’information
en langue anglaise et devient directrice adjointe du service international, à la tête de 70 collaborateurs. Mais lorsque le ministère français des Affaires étrangères lui attribue une bourse d’excellence
pour suivre le MBA d’HEC, elle n’hésite pas un seul instant à demander un congé sabbatique. “De par
mon travail, j’avais un pied dans les reportages, un autre dans l’administration. Je souhaitais en
savoir plus sur le management, d’autant plus que les MBA sont très populaires à Shanghai, ville de
commerce”, raconte-t-elle. Ce diplôme lui permet de changer de voie quelques années plus tard.
Aujourd’hui employée à Paris par Arte Charpentier et Associés, elle veille aux bonnes relations entre
la filiale du cabinet d’architecture à Shanghai et les autorités chinoises. Travailler pour une entreprise
française représente à ses yeux un vrai choc culturel. “Les grèves étaient quelque chose d’impensable
pour moi. Le patron français est à égalité avec les employés. Le plus étonnant, c’est sans doute que
les gens licenciés organisent un pot d’au revoir et remercient leur patron. Chez nous, si quelqu’un est
licencié, il part en pleurant et menace de se suicider...”
“Les MBA sont très
populaires à Shanghai,
ville de commerce.”
AVRIL-MAI
2010 • HOMMES ET COMMERCE
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DOSSIER
CHINE
Témoignages
LE SECTEUR BANCAIRE
SE LIBÉRALISE
François Cristofari (H.72),
responsable Chine
de BNP Paribas
“Depuis son entrée dans l’OMC, la
Chine s’est engagée à libéraliser
son secteur bancaire : les banques
étrangères sont désormais autorisées à avoir des f iliales. Le
marché du retail, trop lourd et
compliqué, n’est pas facilement
rentable pour les banques internationales. En revanche, les
grandes banques internationales,
comme BNP Paribas, sont mieux
outillées que les chinoises pour
les financements spécialisés à
haute valeur ajoutée et les activités de marché, notamment Fixed
Income. Avec l’obtention d’une
“Securities License”, BNP Paribas
pourrait compléter son of fre
domestique en ayant l’autorisation d’émettre des actions et de
faire des fusions-acquisitions :
nous pourrions alors devenir l’une
des deux ou trois premières banques étrangères dans la banque
de financement et d’investissement en Chine.”
Parcours et regards sur la Chine
AU CŒUR DE L’ACTION
Patrick Schuler (MBA.07), manager en stratégie pour Areva Chine
Patrick Schuler veut “être là où ça se passe, connaître les grandes puissances actuelles et à venir”. Après avoir travaillé pour Siemens aux États-Unis
et étudié à Berkeley, cet ingénieur de formation enchaîne donc avec un
double diplôme MBA HEC Tsinghua : “Le prestige de Tsinghua est comparable à celui de Harvard. Au Parti communiste, la majorité des leaders
viennent d’ailleurs de cette école.” Il rejoint ensuite Areva Chine. “Le fait
de parler la langue grâce à six mois de cours intensifs et d’être diplômé
d’une université chinoise m’a permis d’être intégré très rapidement par
mes collègues chinois”, se félicite-t-il.
“Au Parti communiste, la majorité des leaders
viennent de Tsinghua.”
LE DÉFI ENVIRONNEMENTAL
Alexandre Xing (H.84), fondateur et président de GRE Investment Services Co. Ltd
Ancien du groupe Veolia Environment en Asie, Alexandre Xing crée en 2004
sa société de conseil spécialisée dans l’environnement et les industries
propres. “La Chine est devenue, avec les États-Unis, le principal pollueur de
la planète”, rappelle-t-il. Une véritable politique environnementale a été
mise en place. “La Chine figure d’ores et déjà parmi les champions des
énergies renouvelables et l’objectif de 15 % fixé pour 2020 devrait être largement atteint”, continue Alexandre Xing. Néanmoins, les défis environnementaux de la Chine restent de taille, avec “une énorme demande en
énergie qui croît de 15 % par an, des ressources en pétrole et gaz limitées,
et la primauté des centrales au charbon.”
“WE WANTED THE BEST IN INTERNATIONAL MARKET AND
CORPORATE FINANCE!”
Wen Zeng (E.06 HEC EMBA China), Vice President of China National Aero-Technology Import
and Export Corporation (CATIC)
The CATIC Group is a subsidiary organization of the former Aviation Industries
Corporation of China (AVIC) which oversees the international market of R&D,
production and sale of all military and civilian aircraft in China. The CATIC
Group is not a production entity but rather sells military and civilian aircraft,
engines, missiles and other airborne equipment. The annual business of
CATIC is $1.5 billion. “There is lot of choice in China and Asia for quality MBAs
and Executive MBAs, says Wen Zeng. But one of the best programs for the
comprehension of International Market and Corporate Finance is surely the
EMBA provided by HEC Paris in China under the auspices of SASAC.” According
to him, one of the strengths of the program is the high level of qualification of the professors:
“we of course studied a lot of cases, some coming directly from their own professional experience in major companies.” Is CATIC satisfied? “I was part of the first EMBA HEC China Class in
2006, and 8 persons from CATIC have followed this course since!”
38
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
Académie
La Chine, une priorité
pour HEC Paris
Grande école pionnière en Chine, HEC a multiplié les partenariats durant
les 25 dernières années. Aujourd’hui, Shanghai fait partie de ses priorités.
D
Supervision and Administration Commission
(SASAC), chargée d’exercer la tutelle sur les
grandes entreprises publiques du pays, et la
National Development and Reform Commission (NDRC), dont le rôle est majeur dans
l’élaboration des politiques du pays. Dans ce
cadre, différents programmes de formation
sont proposés aux chefs d’entreprise et cadres
supérieurs, à Pékin et Shanghai, tels que “Navigating Sino-EU Opportunities” ou encore
l’“AMP, Advanced Management Program in
Fashion and Luxury”, développé par Tsinghua
University SEM, HEC Paris et l’Institut Français de la Mode. Sans oublier l’opération
10 000 Women : “Piloté par Goldman Sachs,
ce projet vise à former 10 000 femmes à l’entrepreneuriat à l’échelle mondiale, dont 500
en Chine dans les cinq prochaines années. La
première promotion de 50 femmes, dont l’âge
moyen est de 31 ans, vient d’être formée par
HEC et Tsinghua University SEM”, précise
Geneviève Barré.
De nombreux échanges académiques et travaux
de coopération viennent compléter ces relations
déjà denses. L’ouvrage “Les Multinationales
chinoises” (lire l’article page 40), édité par HEC
et Tsinghua University SEM, en trois éditions,
anglais (WSPC, Singapore), chinois (Huazhang, Beijing) et français (Eska, Paris), marque
ainsi l’aboutissement de trois ans de recherches
menées par une équipe mixte d’une douzaine
de professeurs. “La Chine est très importante
pour le développement d’HEC Paris dans le
monde. Tout comme Londres et New York, Shanghai constitue l’une des villes prioritaires pour
notre école. Le groupement HEC de Shanghai est
d’ailleurs celui qui croît le plus vite au monde”,
conclut Jean-Paul Larçon. ●
DR
ès 1984, HEC Paris a tissé des partenariats avec l’empire du Milieu. “Nous
avons été l’une des premières écoles à
nous développer en Chine”, rappelle
Jean-Paul Larçon (H.68), doyen associé en
charge du développement
international d’HEC.
Actuellement, l’école d’excellence française est liée
aux six plus prestigieux
établissements du monde
chinois : Tsinghua University School of Economics & Management (SEM) à Pékin, China
Europe International Business School (CEIBS)
et Fudan University School of Management
(SoM) à Shanghai, Chinese University of
Hong Kong Faculty of Business (CUHK/FBA)
et Hong Kong University of Science & Technology (HKUST) Business School, ainsi que
National Taiwan University (NTU) College
of Management à Taipei. “Cent soixante étudiants et participants chinois sont présents sur
le Campus au sein de nos différents programmes”, poursuit Geneviève Barré, Head International Development
Asia-Pacific pour HEC.
Dès la première année, la
Grande École envoie des
étudiants à Shanghai et
Hong Kong afin qu’ils se
forment à la langue, à la
culture et à l’environnement des affaires dans le cadre du “Global
Exchange Program”. Sur le Campus, l’intérêt
pour la Chine est vivace : le chinois figure
parmi les langues les plus enseignées, derrière
l’anglais et le français. Des échanges ont également été mis en place avec les six business
schools pour les étudiants de la Grande École
tandis que deux doubles diplômes MBA sont
proposés respectivement avec la Chinese University of Hong Kong/FBA et Tsinghua University SEM.
Concernant l’Executive Education, HEC travaille en collaboration avec deux grands organismes chinois : la State-owned Assets
Le pavillon de la France de l’Exposition Universelle de Shanghai a été conçu par l’architecte Jacques Ferrier.
HEC PARIS À L’EXPO SHANGHAI 2010
“Entrepreneurship and the Sustainable City” : tel est le thème du concours international “Shanghai 2010 Award” organisé par HEC Paris et Tsinghua School of Economics & Management, à
l’occasion de l’Expo Shanghai 2010. Cette compétition est ouverte à des équipes d’étudiants
d’écoles de commerce, d’ingénieurs, d’architecture, d’urbanisme ou de jeunes entrepreneurs
ayant obtenu leur diplôme il y a moins de trois ans. Les lauréats se verront récompensés au
Grand Théâtre de Shanghai le 15 juillet prochain au cours d’une cérémonie présidée par Wu
Jianmin, ancien ambassadeur de Chine en France et président honoraire du Bureau International des Expositions. Les équipes gagnantes recevront aussi des billets pour visiter l’Exposition
universelle, un bonus de plusieurs milliers d’euros, ainsi qu’un accompagnement pour la réalisation de leur projet.
Par ailleurs, le 14 juillet, HEC Paris donnera une conférence-débat intitulée “The Enterprise and
the City” au Pavillon de Paris Île-de-France. L’événement réunira les organisateurs du Pavillon,
les experts d’HEC et les lauréats du concours.
Plus d’infos sur www.shanghai2010award.com.
AVRIL-MAI
2010 • HOMMES ET COMMERCE
39
DOSSIER
CHINE
Analyse
La montée en puissance
des multinationales chinoises
Par Jean-Paul Larçon (H.68), doyen associé en charge du développement international d’HEC
HEC Paris et la School of Economics and Management de l’Université de
Tsinghua développent depuis 2009 une coopération étroite en matière
d’enseignement et de recherche en management international. Le livre “Les
Multinationales chinoises” a mobilisé une équipe de 12 experts des deux
institutions pendant trois ans et une vingtaine d’entreprises chinoises publiques
et privées de tous les secteurs de l’économie. Celles-ci ont ouvert largement
leurs portes aux équipes de recherche tant au niveau de leur direction générale
qu’au niveau du siège en Chine et de leurs filiales à l’étranger.
QUATRE OPPORTUNITÉS DE CROISSANCE
SIMULTANÉES
Le gouvernement Chinois encourage les entreprises – tout en les encadrant – à investir
fortement à l’étranger pour y bâtir une présence
durable au-delà des simples exportations. Cette
politique, de plus en plus marquée depuis les
années 2000, différencie la Chine des autres
grands pays émergents.
“Le rattrapage technologique
est au cœur des préoccupations
tant du gouvernement que des
chefs d’entreprise.”
Les investissements chinois à l’étranger sont
d’abord ceux de grandes entreprises dans lesquelles l’État est actionnaire, mais aussi de
plus en plus les sociétés privées et des entreprises de taille moyenne. Les entreprises
chinoises sont dans une posture stratégique
remarquable car elles ont à faire face simultanément à quatre opportunités de croissance.
La première opportunité vient de la consolidation du marché intérieur chinois. C’est ce
qui a conduit Tsingtao Beer à se concentrer
sur une série d’acquisitions en Chine avant de
développer ses investissements à l’étranger. La
deuxième opportunité est liée à des besoins
d’intégration verticale dans certaines industries. Les coopérations de Shanghai Baosteel
avec le brésilien CVRD (Companhia Vale Do
Rio Doce) – l’un des trois leaders mondiaux
du minerai de fer – permettent de développer
la production d’acier nécessaire à l’économie
chinoise. La troisième opportunité – et ten-
40
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
tation – est celle d’une diversification conglomérale, sur le modèle des groupes diversifiés
coréens. C’est la stratégie par exemple de Haier,
géant de l’électroménager, dans des secteurs
non reliés comme la pharmacie, l’immobilier
ou l’assurance. Enfin, la quatrième opportunité
de croissance est l’international.
Aussi les firmes chinoises sont-elles conduites
pour mieux gérer leurs ressources à élaborer
des stratégies focalisées : concentration sur un
nombre limité de cœurs de métiers, investissement sur les maillons-clés de la chaîne de
valeur, et déploiement des ressources financières et humaines sur deux fronts géographiques complémentaires : le marché domestique
et le marché international.
LES TROIS OBJECTIFS MAJEURS
DE L’INTERNATIONALISATION
Les motivations des entreprises varient d’un
secteur et d’une entreprise à l’autre, mais trois
mobiles l’emportent : accès aux marchés, accès
à la technologie, accès aux ressources naturelles. Une série d’investissements visent également à garantir la présence de l’entreprise à
l’intérieur des grandes zones mondiales de libre
échange comme l’Union Européenne ou le
Nafta (North American Free Trade Agreement).
Le rattrapage technologique est au cœur des
préoccupations tant du gouvernement que des
chefs d’entreprise. En ce sens, les stratégies
technologiques des entreprises sont en parfaite
adéquation avec les programmes nationaux
de recherche. Cela implique des priorités très
claires en termes d’axes de recherche et de
standards technologiques, des budgets importants tant au niveau des agences de l’État que
des entreprises, et une vision à long terme
ainsi qu’un management efficace des fonds
publics de recherche.
Enfin les marchés financiers internationaux,
en tant que sources de financement, sont un
élément important de la stratégie internationale des firmes chinoises : elles sont de plus
en plus nombreuses à être présentes sur les
marchés financiers internationaux, en particulier Hong Kong, New York et Londres. En
2010, plus d’une centaine d’entreprises chinoises sont ainsi cotées au Nasdaq.
DES RÉSULTATS RAPIDES
ET REMARQUABLES
Une série d’entreprises chinoises se placent
déjà en tête des classements des multinationales des pays émergents en termes de pourcentage d’activité à l’étranger. C’est le cas du
conglomérat financier public CITIC Group,
de Cosco (China Ocean Shipping Group),
“Elles ont une présence
géographique plus diversifiée
que celle de leurs homologues
russes, indiennes ou latinoaméricaines.”
de sociétés d’ingénierie et de construction
dont la première est China State Construction
Engineering, des entreprises pétrolières comme
CNPC (China National Petroleum Corporation) et CNOOC (China National Offshore
Oil Corporation). C’est le cas également de
Lenovo (informatique), SAIC (le constructeur
automobile de Shanghai), Baosteel (acier),
Haier et TCL (électroménager, électronique
grand public), ZTE et Huawei Technologies
(équipement téléphonique).
“Ces entreprises ont dû
adapter leur organisation et
leur processus de décision au
nombre et à la diversité de leurs
réseaux commerciaux et filiales
à l’étranger.”
Ces entreprises se sont internationalisées
rapidement, grâce en particulier à des stratégies d’acquisitions, de prises de participation,
ou encore de joint-ventures avec des partenaires à l’étranger. Les acquisitions les plus importantes ont été réalisées surtout après 2001,
date de l’entrée de la Chine dans l’Organisation Mondiale du Commerce : TCL a pris le
contrôle de Thomson Multimedia en 2003,
Lenovo de la division PC d’IBM en 2004, SAIC
de SsangYong Motor en 2004, ou encore
SINOPEC de Petrokazakhstan en 2005.
Plus récemment, le 28 mars 2010, le constructeur automobile Geely – fondé en 1986 – a
racheté Volvo Cars à Ford Motor.
Dans le domaine financier, les mouvements
sont plus récents avec par exemple les prises
de participation par ICBC (Industrial & Commercial Bank of China) dans Standard Bank
en Afrique du Sud en 2007 et dans ACL Bank
en Thaïlande en 2008.
DES CIBLES GÉOGRAPHIQUES
DIVERSIFIÉES
Les multinationales chinoises ont une présence
géographique plus diversifiée que celle de leurs
homologues russes, indiennes ou latino-américaines. Elles sont présentes à la fois dans les
pays émergents et dans le monde développé.
Dans les pays émergents, leur présence est
forte en Asie (Indonésie, Vietnam, Malaisie),
mais aussi en Amérique latine, Afrique, Russie et en Asie centrale, pays qui présentent de
riches opportunités tant en termes de nouveaux marchés que d’accès à l’énergie et aux
matières premières. Mais c’est aussi une présence non négligeable dans les pays développés : Japon et Corée en particulier pour l’accès
à certaines technologies, mais aussi aux ÉtatsUnis et en Europe. Une série d’entreprises
chinoises comme Cosco, Haier, Hisense,
Huawei Technologies, Lenovo, TCL, et Wan-
xiang ont démontré leur capacité à bâtir une
présence durable aux USA, mais aussi en
Europe, en particulier en Allemagne et en
Grande-Bretagne.
UNE ORGANISATION ADAPTABLE
Les entreprises chinoises ont donc dû adapter
leur organisation et leur processus de décision
au nombre et à la diversité de leurs réseaux
commerciaux et filiales à l’étranger. Elles ont
d’abord accordé une plus grande délégation
aux filiales étrangères pour mieux répondre
aux spécificités du management local. Ainsi,
la stratégie de Haier en Europe est de type
multidomestique, c’est-à-dire différente en
Italie, en France, en Espagne ou en Allemagne.
Une entreprise comme Wanxiang, sous-traitant automobile et fournisseur de General
Motors à Shanghai, a réussi une triple localisation aux USA : la recherche, la fabrication
et le personnel.
“Une des raisons des succès
des multinationales chinoises
est sans aucun doute
l’apprentissage acquis sur le
marché domestique au sein des
joint-ventures sino-étrangères.”
Les entreprises chinoises disposent dans le
monde entier d’un réservoir unique d’ingénieurs et de managers dotés d’une double
culture chinoise et internationale, en plus
d’être très attractives vis-à-vis des jeunes diplômés des meilleures universités chinoises et
internationales. Elles ouvrent aussi à l’étranger
des opportunités de carrière à des managers
non chinois.
Cependant, il existe parfois au sein des multinationales chinoises une distance trop grande
entre le siège en Chine et la direction de la
filiale. On peut attribuer par exemple à cette
distance les difficultés de TCL dans sa jointventure en Europe avec Thomson Multimedia :
une gamme de produits vieillissante – celle de
Thomson – et la sous-estimation du temps
nécessaire à une restructuration commerciale
et industrielle en Europe.
que leurs homologues japonaises ou coréennes
à se lancer avec succès sur la scène internationale. Comme leurs homologues américaines
et dans une moindre mesure européennes, les
multinationales chinoises peuvent bâtir leur
avenir à long terme sur deux piliers : un très
grand marché domestique et une capacité forte
de présence internationale. La stratégie des
entreprises et la politique nationale se complètent harmonieusement, et on peut parler
d’un processus de codétermination. Enfin, une
des raisons de leur succès est sans aucun doute
l’apprentissage acquis sur le marché domestique au sein des joint-ventures sino-étrangères.
Pour la Chine, c’est une nouvelle étape dans
la politique d’ouverture économique internationale menée depuis 30 ans, progressivement
mais avec détermination. Pour le reste du
monde et pour l’Europe en particulier, c’est
aussi un avantage car les entreprises chinoises
contribuent autant aux échanges commerciaux
qu’à l’investissement à long terme.
Dans l’ensemble, ceci conduit à une plus
grande intégration de la Chine dans l’économie mondiale et à une réorganisation des
différents maillons de la chaîne de valeur sur
une base internationale. C’est un défi et une
opportunité tant pour les entreprises chinoises que pour les entreprises occidentales. ●
Les Multinationales chinoises est édité par HEC et
Tsinghua University. Coordonné par Jean-Paul
Larçon, il vise à faire mieux connaître les “champions nationaux” chinois : leurs objectifs, leurs
stratégies marketing et technologiques, leurs
alliances, leur organisation et leur impact sur le
marché mondial.
LA NOUVELLE GÉNÉRATION
DE MULTINATIONALES
Les multinationales chinoises sont nées dans
un monde des affaires globalisé. Elles ont su
faire leurs preuves sur un marché domestique
hyperconcurrentiel. Elles ont été plus rapides
AVRIL-MAI
2010 • HOMMES ET COMMERCE
41
DOSSIER
CHINE
Analyse
Face à la crise,
des stratégies opportunistes ?
Par Yuan Ding, Professor of Accounting, China Europe International Business School (CEIBS), et
Véronique Malleret (H.77), Doyen de la Faculté et de la Recherche d’HEC Paris, professeur au Département
Comptabilité-Contrôle de Gestion.
Ayant pour objectif initial de mieux connaître les méthodes de calcul des coûts des PMI chinoises,
nous avons eu l’occasion de visiter à plusieurs reprises cinq entreprises familiales chinoises de taille
moyenne (entre 200 et 2000 employés) et de rencontrer leurs dirigeants pour les interroger sur leur
stratégie, la façon dont ils réagissaient aux changements d’environnement, leurs choix en matière de
systèmes de gestion.
ette recherche nous a permis de confirmer certaines des hypothèses que nous
avions formulées ; elle nous a aussi amenés à découvrir à quel point le comportement des dirigeants chinois en matière de
décisions stratégiques était éloigné de celui
que nous observons chez des dirigeants d’entreprises similaires en Europe… et sans doute
de celui qui est présenté dans la plupart des
manuels de management stratégique.
C
Comme nous le pressentions, le calcul des
coûts dans ces PMI présente des faiblesses qui
ne s’expliquent pas seulement par la taille des
entreprises. Par exemple, alors que ces entreprises changent d’outil industriel tous les deux
ou trois ans, elles pratiquent l’amortissement
fiscal (plutôt qu’économique) sur des durées
longues, ce qui conduit à sous-estimer systématiquement les amortissements dans les coûts
de revient des produits. Il arrive également
que les entreprises oublient certains postes de
coûts importants, comme ceux d’emballages,
ou de développement et de conception. D’un
point de vue plus technique, les entreprises
choisissent souvent la mauvaise “maille d’analyse” pour calculer les coûts, raisonnant par
produit là où il faudrait raisonner par lot ou
par commande ; ou bien elles utilisent des
unités d’œuvre pour allouer les coûts indirects
qu’un simple raisonnement de bon sens suffirait à disqualifier.
L’organisation des processus de production
elle-même (gestion des stocks et donc contrôle
des consommations de matières premières,
suivi des lots et des délais, etc.), qui est le fondement d’un bon suivi des coûts, laisse souvent
à désirer.
En revanche, contrairement à l’image véhiculée traditionnellement sur les “usines chinoises”, nous avons été surpris de trouver des
processus à faible intensité de main-d’œuvre,
tant dans l’organisation physique de la production que dans les structures de coûts. Il
faut préciser que la recherche s’est déroulée
dans la région de Shanghai où les salaires sont
relativement élevés. Mais nous avons pu noter
aussi, dans les discours des dirigeants, la
volonté d’automatiser les processus de production (le “chic” étant l’achat d’une
machine à commande numérique allemande) pour éviter le recours à une
main-d’œuvre de plus en plus chère et
pas toujours fiable. La faible intensité
en main-d’œuvre peut aussi s’expliquer
par une caractéristique de la société
DR
En deux ou trois ans, plusieurs des entreprises rencontrées avaient changé de stratégie industrielle, passant
de la fabrication de produits simples à celle de produits
à fort contenu technologique.
42
HOMMES ET COMMERCE
• AVRIL-MAI 2010
chinoise qui se retrouve dans les entreprises :
l’organisation en réseau, dans laquelle les
entreprises rencontrées excellent et qui leur
permet de se procurer les ressources et les
compétences qu’elles n’ont pas en interne, tant
au niveau des approvisionnements qu’au niveau
commercial.
Enfin, nous nous sommes interrogés sur les raisons pour lesquelles les dirigeants que nous avons
rencontrés, par ailleurs dotés d’un solide bagage
intellectuel (diplôme d’ingénieur + EMBA), ne
s’efforçaient pas, comme leurs homologues
européens patrons de PMI, de rationaliser les
processus et les coûts en cas de difficultés économiques. La réponse tient dans leur attitude
stratégique que nous qualifierons “d’opportuniste” et dans leur grande capacité à changer
de produit, voire de métier. En deux ou trois
ans, parfois en quelques mois, plusieurs des
entreprises rencontrées avaient changé de stratégie industrielle, passant de la fabrication de
produits simples à celle de produits à fort contenu
technologique, lançant des lignes de produits
qui ne trouvaient pas leur place dans le portefeuille de produits existant ni dans une logique
industrielle ni dans une logique commerciale.
Les facteurs invoqués pour expliquer ces changements étaient toujours les mêmes : profits
potentiels substantiels, affaire apportée par un
contact connu (réseau) et faible risque.
Enfin, il ne faut pas oublier de souligner l’impact que peuvent avoir sur les pratiques de
gestion les aspects macroéconomiques de l’environnement chinois et la rapidité avec laquelle
les entreprises naissent, grandissent, se regroupent ou meurent dans un tel contexte. ●
Marché / Bourse
Et maintenant, se faire financer
en Asie ?
Par Bang Dang Nguyen (D.06), ancien doctorant de finance d’HEC, professeur de finance à la Chinese
University of Hong Kong (CUHK)*.
Q
ue les consommateurs voient des produits
fabriqués en Asie un peu partout dans
les rayons des supermarchés, ce n’est pas
nouveau, ils s’y s’habituent. Que les distributeurs européens (y compris Français bien
entendu) s’enrichissent énormément en se
fournissant à bas coût en Asie, ce n’est pas
non plus un secret. Mais s’y faire financer…
c’est totalement nouveau, voire du jamaisvu !
“Les investisseurs individuels
en Asie ont les taux d’épargne
parmi les plus élevés du monde :
entre 30 % et 40 % du PIB.”
C’est ainsi que l’annonce par l’Occitane de se
faire coter à la Bourse de Hong Kong le 29
mars 2010 – au détriment de la Bourse NYSE
Euronext à Paris – a fait du bruit ! L’entreprise
provençale, spécialiste des produits de beauté
naturels, a mis 25 % de son capital sur le marché en avril sous forme d’une introduction
initiale en Bourse. L’opération lui a rapporté
707 millions de dollars.
sera encore très certainement dans le futur.
Pourquoi ? En raison de l’abondance des ressources financières bien sûr ! Elle existe tant
du côté des investisseurs individuels (qui ont
les taux d’épargne parmi les plus élevés du
monde : entre 30 % et 40 % du PIB au Japon,
en Chine et au Vietnam), que du côté des
gouvernements (la Chine possède 2400 milliards de dollars en réserve, 1019 milliards pour
le Japon, 270 milliards pour Taiwan, 258 milliards pour Hong Kong…). En se faisant coter
à Hong Kong, l’Occitane vise les investisseurs
individuels qui connaissent bien ses produits,
mais aussi les fonds d’investissement souverains. L’un d’entre eux, le China Investment
Corporation, dont le capital est de 200 milliards de dollars, s’est porté acquéreur de 8,5 %
du capital, soit 50 millions de dollars d’investissement.
L’Asie est aussi le marché en plus forte croissance pour bien des marques, et il est toujours
mieux d’être proche des marchés les plus
importants. À l’heure actuelle, les entreprises
cotées en Asie jouissent souvent de meilleures
valorisations boursières. L’Occitane espère
une multiplication du prix de son action d’au
moins de 7 à 8 fois son EBITDA (Earnings
before interest, taxes, depreciation and amortisation), ou de 20 fois son EPS (Earnings per
share), un niveau quasiment impossible a
atteindre en temps de crise en Europe. Avec
un peu de chance, l’Occitane pourrait jouir
d’une multiplication de 30 fois son EPS…
comme c’est le cas du japonais Shiseido.
“Les entreprises cotées en Asie
jouissent souvent de meilleures
valorisations boursières.”
S’il s’agit de la toute première fois qu’une entreprise française de taille moyenne (avec un
chiffre d’affaires de 537 millions d’euros en
2009) est cotée à Hong Kong, il ne s’agira
probablement pas de la dernière. En fait, le
géant russe Rusal, premier fabricant mondial
d’aluminium, a déjà récolté 2,2 milliards de
dollars en janvier en étant la première compagnie russe à être cotée à Hong Kong. Le
géant anglais de l’assurance, Prudential, a
prévu** lui aussi d’être coté dès le mois de mai,
pour 21 milliards de dollars.
Fotolia
Alors… pourquoi être coté à Hong Kong et
non pas à Londres ou à New York comme dans
le passé, ou encore à Paris dans le cas de l’Occitane ? Les analystes s’accordent sur plusieurs
motivations et faits nouveaux. D’abord, les
entreprises se financent là où il y a de l’argent,
et surtout de l’argent au plus bas coût. En ces
temps de crise, cette place est l’Asie. Et elle le
L’exemple de l’Occitane montre que l’Asie
est non seulement un marché important qui
a la croissance la plus rapide et qui constitue
une source d’approvisionnement à bas coût,
mais aussi une place pour les entreprises,
même de taille moyenne, pour se faire financer. Après tout, en 2009, Hong Kong a dépassé
New York en valeur des introductions en
Bourse. Prada, Ferragamo, Prudential et bien
d’autres entreprises sont en train de se tourner vers l’Asie, et spécialement Hong Kong,
pour trouver des ressources financières à leur
développement. ●
* Le point de vue exposé dans cet article est strictement personnel et ne reflète pas nécessairement celui
de CUHK.
** Cet article a été rédigé la mi-avril.
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