Fantasmagorique Il était une ville. Une mignonne petite ville, une

publicité
 Fantasmagorique
Il était une ville. Une mignonne petite ville, une ville
banale. Dans cette ville, un théâtre. Un vrai, un beau. Avec
des sièges en velours pourpres et des accoudoirs en bois.
Sur scène, une pièce était répétée. Les comédiens
arpentaient l'estrade, en effectuant un éternel va et vient.
Dans la salle, pas un bruit. Les spectateurs n'étaient bien
entendu pas encore présents, mais tout indiquait qu'ils
seraient admiratifs et curieux de connaître la suite du
spectacle. Tout particulièrement lorsque Isis, l'actrice
principale entrerait. Isis était belle, gracieuse et
talentueuse. Tout le monde aimait Isis.
Elle jouait Lucie, une servante du XX ème siècle en
conflit avec son époque.
Isis adorait ce qu'elle faisait, mais n'était pas pleinement
satisfaite, son vide s'accroissait. Elle pensait que le théâtre
remplacerait son incapacité à s'imaginer un monde à elle.
Pouvoir s'accaparer celui des autres avait était la raison de
ses débuts sur scène. Seulement, à la fin de chaque pièce,
de chaque histoire empruntée, tout redevenait comme
avant. Elle n'avait pas de monde, pas de possibilités de
laisser vagabonder son esprit. Se contenter de la réalité
était la seule solution possible, ou alors il lui faudrait jouer
sans cesse. Elle jalousait tous les autres comédiens qui,
non seulement laissaient s'échapper leur esprit de par euxmême, mais en plus, se laissaient guider par les autres...
Elle se sentait comme un monstre, et la vie, en dehors du
théâtre lui semblait éteinte.
Lors de son enfance, Isis avait du mal à faire le travail que
lui demandait son institutrice. Par exemple, écrire des
rédactions lui étaient impossible. Comment faire travailler
son imagination, lorsque l'on en a pas? Son existence sans
les couleurs chatoyantes de l'irréel s'était avérée bien
morne... Elle avait pourtant déjà essayé d'expliquer son
problème à ses parents, seulement elle n'y était jamais
parvenue. En même temps, comment expliquer une chose
qu'elle même ne pouvait s'expliquer? D'autant plus qu'il
était difficile de paraître sérieuse lorsque l'on avouait ne
pas être capable d'imaginer quoi que ce soit. Il lui était
souvent arrivée de se demander si d'autres personnes
étaient dans son cas et si le fait de ne pouvoir s'imaginer
des choses n'était pas tout simplement un blocage de sa
part, et non une absence totale. Toutes ses questions
restaient suspendues, et à 24 ans, elle ne savait toujours
pas vers qui se tourner.
1 Pourtant, il y avait eu une fois où elle avait failli tout
raconter... Au lycée, lors de l'année où elle devait passer
son bac, voilà plus de six ans. A l'époque, elle sortait avec
un certain Maxime Blanchet. Maxime était son petit ami
depuis bientôt un an, et le seul grand rêve dont il jouissait
était de devenir avocat. C'était un garçon sans histoires et
brillant. Il était gentil avec elle, vraiment gentil.
Seulement, il n'y avait pas pire garçon pour elle. Il était
si... banal. Il lui fallait quelqu'un qui pouvait réussir à
stimuler son imagination, quelqu'un d' hors normes ! Pas
un gentil garçon, façonné par la société. Déjà que la réalité
lui paraissait assez difficile, voilà que l'ennui prenait
place... Isis n'avait jamais été réellement amoureuse de lui.
Finalement, elle ne faisait que tolérer sa présence. Il ne lui
apportait rien, si ce n'est une stabilité qui la répugnait.
Malgré tout, elle était restée suffisamment avec lui pour
s'habituer à sa présence et étrangement elle s'était plus ou
moins attachée à lui.
Du jour au lendemain, Isis avait décidé de rompre. Après
tout, pourquoi se forcer ? Ce n'était honnête ni envers elle,
ni envers Maxime. Il lui demanda bien des explications,
mais la seule qu'elle fut capable de lui soumettre, était que
leur relation s'étiolait à vue d' œil et que c'était injuste pour
eux deux de continuer ainsi. Ce qui était en partie vrai,
seulement la source du problème n'était pas là. Au dernier
moment, elle avait hésité à tout lui dire, tout depuis le
début. Mais elle s'était ravisée et s'était contentée de le
laisser partir, la mine déconfite et son sac de sport Adidas
à la main...
Depuis, Isis eu bien quelques aventures avec d'autres
hommes, mais elle préférait les histoires d'une nuit à la
stabilité d'un couple. Ainsi, elle se sentait d'avantage
vivante, et peut être même humaine.
En matière de relation de courte durée, on pouvait la
qualifier d'experte, elle avait même couché avec de
nombreuses filles. Certaines lui avait plu plus que d'autres,
et même si l'idée ne lui avait fait que traverser l'esprit, il
lui était arriver de penser de se mettre en couple avec
quelques unes. Bien sûr, elle y avait renoncé.
De toute manière, ces temps-ci, Isis préférait pas penser à
tout cela. Elle se contentait de s'abreuver de pièces de
théâtre et de jouer la comédie. C'est pour cela qu'une fois
de plus, elle passait sa soirée à observer les autres jouer.
Elle aimait vraiment pouvoir se laisser guider de la sorte et
laisser les autres lui créer des rêves. A peine la première
partie achevée, sa voisine de gauche s'était adressée à elle :
-Oh, quelle superbe pièce ! Vous semblez l'avoir appréciée
autant que moi, vous avez la larme à l’œil !
2 Un peu surprise par son engouement et son aisance, Isis
l'avait dévisagé un court instant, avait souri et lui avait
répondu:
-C'est vrai que cette pièce m'émeut... Voyez-vous, j'adore
le ton que prend l'actrice principale, elle me fait penser à
mes débuts...
-Vos débuts ? Vous êtes comédienne alors ? C'est
fantastique !
Sa joie semblait sans limite et son regard brillait de mille
lumières.
filles. Isis oubliait tous ses soucis devant tant de
désinvolture. Ainsi, elle avait apprit que Lola était en sa
dernière année d'études, qu'elle raffolait de livres,
d'accordéon et de lasagnes.
Puis la pièce avait reprit.
Dans la semi obscurité, Isis souriait. Elle était contente de
discuter avec quelqu'un d'autre que les comédiens de sa
pièce. Elle aimait bien Lola, elle la trouvait plutôt
amusante. Parfois, au cours de la pièce, elle avait jeté des
regards furtifs vers sa voisine. Celle ci remuait les lèvres
lorsque les acteurs parlaient, bien qu'elle ne connaisse pas
les dialogues. Isis trouvait cela adorable.
-Oui, c'est vrai. D'ailleurs, je joue demain soir.
-Vraiment ? Je comptais venir demain aussi, je suis friande
des pièces de théâtre !
Elle n'avait pu réprimer un rire enchanté. Comme cette
fille était spontanée...
-Nous sommes faites pour nous entendre dans ce cas !
Environ deux heures après, la pièce s'était terminée. Lola,
les yeux brillants avait alors affiché un sourire niais,
satisfaite du spectacle.
L’extrait vous a plu ? Alors achetez l’ouvrage complet auprès de l’auteur ! Lors des 15 minutes d'entracte, toutes deux avaient
continué à discuter. Lola était une lycéenne pétillante et
pleine de vitalité, qui adorait sortir, s'amuser et côtoyer des
3 
Téléchargement