prise en charge rééducative d`un patient ayant subi une

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INSTITUT DE FORMATION EN MASSO KINÉSITHÉRAPIE
- BERCK-SUR-MER -
PRISE EN CHARGE RÉÉDUCATIVE
D’UN PATIENT AYANT SUBI UNE SUTURE
DU TENDON PATELLAIRE
APRÈS RUPTURE PROXIMALE COMPLÈTE
ANCIENNE
Occupationnal assumption of responsability of a patient having undergone a
joining of the patellar tendon after proximal total old rupture
Étude d’un cas clinique effectuée dans le service de : Traumatologie du Centre de
rééducation SANCELLEMOZ (Plateau d’Assy)
Période du stage : du 5 septembre au 14 septembre 2005
Encadrement Médical : Docteur TOBÉ
Encadrement Masseurs Kinésithérapeutes : M. CHATRENET, Mme FORESTIER
Marie BEGUIN
D. E. Session 2006
SOMMAIRE
RÉSUMÉ
I - BILAN ET DIAGNOSTIC KINÉSITHÉRAPIQUE
p. 1
A – BILAN
1 - Dossier médical
1.1 Présentation du patient
1.2 Histoire de la pathologie
1.3 Compte rendu opératoire et consignes chirurgicales
2 - Bilan fonctionnel
2.1 Équilibre
2.2 Locomotion
2.3 Activités de vie quotidiennes
3 - Bilan analytique
3.1 Observation
3.2 Palpation
3.3 Évaluation articulaire
3.4 Évaluation musculaire
3.5 Douleur
3.6 Sensibilité
3.7 Aspect psychologique
4 - Bilan situationnel
p. 1
p. 1
p. 1
p. 1
p. 1
p. 2
p. 2
p. 2
p. 2
p. 3
p. 3
p. 3
p. 3
p. 4
p. 4
p. 4 à p. 5
p. 5
p. 5
B – DIAGNOSTIC KINÉSITHÉRAPIQUE
p. 5
C – OBJECTIFS THÉRAPEUTIQUES
p. 5
II - TRAITEMENT KINÉSITHÉRAPIQUE
p. 6
A – PRINCIPES ET PRÉCAUTIONS
p. 6
B – TECHNIQUES PAR OBJECTIF
1 - Amélioration des qualités cutanées trophiques et vasculaires
2 - Libération articulaire fémoro-patellaire et fémoro-tibiale
3 - Récupération en force et extensibilité du quadriceps
4 - Amélioration de la vigilance arthro-musculaire
5 - Correction des asymétries dans la locomotion
6 - Entretien des muscles sains et
renforcement des ischio-jambiers affaiblis
p. 6
p. 6 à p. 7
p. 7 à p. 8
p. 8 à p. 10
p. 10 à p. 11
p. 11 à p. 12
III - DISCUSSION
p. 12
p. 13
A – RÉSUMÉS
p. 13 à p. 14
B – RÉFLEXION PERSONNELLE
p. 14 à p. 16
IV - CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES ET ARTICLES
p. 17
RÉSUMÉ
Pierre, âgé de 37 ans, est victime d’une chute dans les escaliers en mai 2005. Les investigations médicales mettent en évidence une entorse grave du genou gauche. Il se voit prescrire une
attelle de Zimmer qui lui permet de travailler. Ne voyant pas d’évolution favorable, Pierre consulte
un chirurgien en juillet 2005. L’IRM permet le diagnostic suivant « désinsertion du tendon patellaire au niveau de la pointe de la patella et une fragilisation du tendon à proximité de la tubérosité
tibiale antérieure ». L’intervention a lieu le 22 juillet, elle consiste en la mise en place d’un cerclage.
Notre bilan, réalisé à J50 post-opératoire, met en évidence un œdème, une flexion de genou
très limitée (75° en actif et 80° en passif), une hypoextensibilité du droit fémoral et une diminution
de force du quadriceps et des ischio-jambiers, une boiterie.
Les objectifs kinésithérapiques sont alors de :
Améliorer les qualités cutané-trophiques c’est-à-dire lutter contre l’amyotrophie, résorber l’œdème
et faire céder les adhérences.
Libérer le genou : augmenter la mobilité articulaire fémoro-patellaire et fémoro-tibiale.
Amorcer une récupération en force et extensibilité du quadriceps.
Améliorer la vigilance arthro-musculaire du genou.
Rendre la locomotion harmonieuse et sans asymétrie.
Entretenir les qualités des muscles sains et renforcer les ischio-jambiers du côté opéré.
Les techniques utilisées afin d’assouplir les éléments capsulo-ligamentaires sont des mobilisations physiologiques et spécifiques pratiquées en position de raideur. Les étirements ont également un rôle important dans le gain articulaire et la récupération musculaire. Les qualités musculaires sont améliorées en pratiquant les diagonales de Kabat, par la mise en place du protocole de Stanish, et l’emploi de l’électrothérapie. Afin d’améliorer la vigilance arthro-musculaire, un programme proprioceptif est utilisé. Tout au long de notre prise en charge nous tenons compte du risque de survenue d’algoneurodystrophie lié à la présence de rebonds inflammatoires, de douleurs qui
constituent la limite de notre rééducation.
Après 5 semaines passées auprès de Pierre l’ensemble des symptômes évolue favorablement. Cependant nous nous interrogeons quant à la récupération complète de la flexion de genou.
Mots-clé: assouplissement, confiance, excentrique, kinésithérapie, vigilance.
Key-words: warming-up exercises, confidence, eccentric, physiotherapy, vigilance.
1
I - BILAN ET DIAGNOSTIC KINÉSITHÉRAPIQUE
A – BILAN
1 - Dossier médical
1.1 Présentation du patient
Pierre est né le 1/11/1968, il vit en Haute-Savoie avec sa compagne. Il est éducateur et pratique de nombreuses activités physiques comme le ski, le football et le tennis qui lui ont occasionnées
de nombreuses entorses de chevilles. Il vit au premier étage d’un immeuble équipé d’ascenseurs.
Le projet de Pierre est de retrouver ses capacités physiques antérieures quelque soit le temps
qu’il lui faudra rester au centre. Il veut pouvoir retrouver son niveau sportif.
1.2 Histoire de la pathologie
Pierre est victime d’une chute dans les escaliers en mai 2005. Un choc direct sur le tendon
patellaire gauche entraîne sa rupture complète. Il s’en suit une douleur aiguë et une impotence fonctionnelle immédiate marquée par une impossibilité de faire une extension de genou. Les explorations cliniques ne détectent pas la rupture du tendon patellaire mais signalent une entorse grave. Il
se voit prescrire une attelle de Zimmer qui lui permet de travailler, il l’a desserre simplement pour
pouvoir conduire. Les symptômes ne s’améliorant pas, Pierre consulte un chirurgien orthopédique
en juillet. Une IRM est réalisée et permet d’affirmer « une désinsertion du tendon patellaire de la
pointe de la patella et une fragilisation du tendon à proximité de la tubérosité tibiale antérieure ».
L’intervention a lieu le 22/07. Avant cette date la mobilité du genou gauche est évaluée à 45°/0/0°
pour F/E.
1.3 Compte rendu opératoire et consigne chirurgicale
L’intervention a consisté en la mise en place d’un cadre protecteur métallique (annexe 1)
après réinsertion du tendon. Le détail de l’intervention constitue l’annexe 2. Nous sommes à J50 de
l’opération et avons pour consigne d’insister sur le gain en flexion sans limitation. Pierre a quitté
l’attelle il y a 5 jours et se voit autoriser la natation et le vélo (annexe 3). Il est sous antiinflammatoires systématique et sous antalgiques selon la douleur : Proxalyoc, Mopral, Myolastan.
2
2 - Bilan fonctionnel
2.1 Équilibre
L’équilibre bipodal n’est pas altéré quelque soit la position des genoux (en extension ou déverrouillés). Pierre a les pieds écartés d’une largeur de chaussure, il joint ses mains vers l’avant,
coudes tendus. Des déstabilisations multidirectionnelles sont appliquées sur ses mains. Elles sont
lentes puis rapides avec puis sans contrôle visuel. L’exercice est parfaitement réalisé. Sur plan instable, type gyroplan, il réagit également correctement sans risque de chute.
Les tests sont reproduits en unipodal. Genou en extension, les exercices sont maîtrisés. Sur
un genou déverrouillé, nous notons une appréhension importante vis à vis du risque de chute en
flexion, il ne parvient pas à tenir cette position sans aide.
2.2 Locomotion
Il se déplace avec 2 cannes anglaises en 4 temps. L’attelle de Zimmer a été abandonnée il y
a 5 jours. Le déroulement du pas est correct mais il persiste une raideur active en flexion de genou
en fin de phase portante (lors du décollement du talon). Lorsqu’il marche sans canne, nous notons
que le temps d’appui est plus long du côté sain, nous avons donc une esquive d’appui, plus nette en
marche rapide. Le temps de marche est limité à environ 15 minutes car les phénomènes inflammatoires apparaissent.
La montée des escaliers se fait lentement et est gênée par la raideur active en flexion, compensée par une élévation de l’hémi-bassin. À la descente Pierre exprime une sensation d’inconfort
et d’instabilité ; ceci se traduit par une utilisation de la rampe importante et un transfert d’appui
quasi-inexistant sur le membre opéré. La montée et descente se font malgré tout en alterné, à vitesse
lente, avec une canne et la rampe.
2.3 Activités de vie quotidiennes
Le patient est autonome pour sa toilette, l’habillage et a même repris la conduite automobile.
3
3 - Bilan analytique
3.1 Observation
Nous ne décelons aucun trouble de la statique en charge. En décharge, nous notons que les
tendons patellaires ont sensiblement la même obliquité et les patellas regardent vers le haut de façon
symétrique. La longueur des membres inférieurs est identique ; un mètre ruban tendu de l’épine
iliaque antéro supérieure à la malléole médiale donne 91 cm dans les deux cas.
L’aspect cutané trophique est objectivé par une
périmétrie dont les résultats figurent dans l’annexe 4.
Les chiffres de la première ligne (à gauche : +2.5 cm au
niveau de l’interligne) indiquent un épanchement (figure
1) ou un œdème dont la nature sera précisée à la
palpation. Nous mettons en évidence également une
amyotrophie crurale globalement homogène. Il persiste
une légère amyotrophie surale. La cicatrice est située à
la face antérieure du genou, elle débute sur la tubérosité
tibiale antérieure et se poursuit 18,5 cm vers le haut.
Figure 1 : Reliefs osseux masqués par
l’œdème
3.2 Palpation
Vasculaire : les signes de phlébite sont absents. Afin d’identifier la nature de l’œdème, nous réalisons le signe du Godet ; la pression appliquée sur les condyles fémoraux et tibiaux provoque une
empreinte difficilement résorbable. L’œdème est à prédominance veineuse.
Cutanée : la température est constamment plus élevée du côté opéré ce qui témoigne d’un phénomène inflammatoire. La cicatrice est adhérente dans sa moitié inférieure.
Musculaire : les masses musculaires se dépriment facilement.
3.3 Évaluation articulaire
Les articulations tibio-fibulaires ne présentent aucune restriction de mobilité.
Fémoro-patellaire : la mobilité longitudinale est réduite de 2/3 et la mobilité transversale de moitié.
Fémoro-tibiale : les résultats sont mentionnés dans le tableau de l’annexe 5. Ils mettent en évidence
une limitation importante en flexion (80° en passif). Il s’agit d’un cas de douleur raideur avec diminution des mouvements intra-articulaires spécifiques, témoin d’une rétraction capsulo-ligamentaire
importante. Le mouvement d’extension est normal.
4
3.4 Évaluation musculaire
Force : Pierre est sur une chaise avec des appuis à la face postérieure des mollets. Une flexion
statique maximale lui est demandée. Un appareil de mesure relié à ce dispositif (figure 2) rend
compte de la Résistance Maximale des ischio-jambiers : 24 kg à gauche contre 30 kg à droite. Nous
notons ainsi une diminution de force des ischio-jambiers, responsable en partie du manque de
flexion active. Sur cet appareil le test n’est pas réalisé
dans le sens de l’extension car les résultats sont faussés
par la douleur. La force du quadriceps est testée de façon
manuelle selon le protocole de Daniels et Worthingham
[1]. L’extension de genou est cotée à 4 (annexe 6) mais
déclenche des douleurs de part et d’autre du tendon
patellaire. Les autres muscles des membres inférieurs
sont cotés à 5.
Figure 2 : Evaluation de la force des
ischio-jambiers
Extensibilité : afin d’apprécier l’extensibilité du droit fémoral, nous mesurons la flexion de genou
sur une hanche en extension et sur un mode passif. Pierre est en décubitus ventral, à droite nous
obtenons 160° (contact talon-fesse) et à gauche le goniomètre indique 65°. Ceci signe une hypoextensibilité majeure du droit fémoral et nous pouvons alors affirmer que la limitation de la flexion est
d’origine capsulo-ligamentaire (restriction des mouvements spécifiques du genou) et musculaire
(faiblesse des ischio-jambiers et hypoextensibilité du droit fémoral).
3.5 Douleur
Relatée : Pierre évalue sa douleur à 4/10 en fin de journée « sous forme de pointe ». Suite à un travail soutenu il a ressenti à plusieurs reprises une sensation « d’étau » et un phénomène inflammatoire marqué. Ceci nous rend vigilant quant à l’algoneurodystrophie.
Provoquée : la douleur constitue un frein à la flexion. Elle est située de part et d’autre de la base de
la patella.
3.6 Sensibilité
Profonde : stathestésie et kinesthésie ne sont pas altérées.
5
Superficielle : nous notons une dysesthésie sur la partie antéro-latérale de genou avec un « pictouche » erroné, ceci est lié au geste chirurgical.
3.7 Aspect psychologique
Pierre est très motivé car il souhaite retrouver son niveau sportif antérieur. Mais les douleurs et les phénomènes inflammatoires récurrents renforcent l’appréhension et son manque de
confiance.
4 - Bilan situationnel
De mai à juillet Pierre se déplace avec des cannes anglaises et une attelle de Zimmer, il travaille
mais aucune activité sportive ne lui est possible. Il est hospitalisé depuis le 21 juillet et en arrêt de
travail, il a quitté l’attelle le 8 septembre mais conserve les cannes anglaises.
B – DIAGNOSTIC KINÉSITHÉRAPIQUE
L’intervention retardée de Pierre, visant à traiter une rupture du tendon patellaire, amène comme
principale anomalie de structure une flexion de genou très limitée dont l’origine est musculaire et
capsulo-ligamentaire. Son articulation est sujette à des rebonds inflammatoires fréquents qui imposent un dosage des efforts demandés. Quadriceps et ischio-jambiers sont touchés par une amyotrophie et une diminution de force. Pierre se déplace à l’aide de cannes anglaises afin de suppléer à des
troubles proprioceptifs et déficits musculaires. Il présente alors comme perturbations situationnelles
le fait d’être hospitalisé depuis le 21/07 et aucune activité sportive n’a pu être pratiquée depuis mai.
En accord avec le patient nous déterminons les objectifs suivants.
C – OBJECTIFS THÉRAPEUTIQUES
Améliorer les qualités cutané-trophiques c’est-à-dire lutter contre l’amyotrophie, résorber l’œdème
et faire céder les adhérences.
Libérer le genou : augmenter la mobilité articulaire fémoro-patellaire et fémoro-tibiale.
Amorcer une récupération en force et extensibilité du quadriceps.
Améliorer la vigilance arthro-musculaire du genou.
Rendre la locomotion harmonieuse et sans asymétrie.
Entretenir les qualités des muscles sains et renforcer les ischio-jambiers du côté opéré.
6
II – TRAITEMENT KINÉSITHÉRAPIQUE
A – PRINCIPES ET PRÉCAUTIONS
Nous sommes à J50 de l’intervention et le principe fondamental est de respecter le geste chirurgical en mettant en tension avec précaution la plastie. C’est pourquoi les mobilisations passives
se pratiquent si nécessaire avec un abaissement de la patella.
Aucune extension n’est réalisée contre résistance maximale ou contre un grand bras de levier et les résistances manuelles sont favorisées. Nous privilégions également le travail en chaîne
fermée.
Le risque d’algoneurodystrophie est présent, le respect de la nature des symptômes est essentiel et il faut tenter de rester infra-douloureux pour ne pas déclencher de phénomène inflammatoire [2].
B – TECHNIQUES PAR OBJECTIF
1 - Amélioration des qualités cutanées trophiques et vasculaires
Afin d’améliorer la trophicité crurale et surale et de les préparer aux sollicitations musculaires, il est nécessaire de réaliser un massage tonique en début de séance. Le patient est en décubitus
dorsal avec un coussin sous le genou pour libérer la face postérieure du membre inférieur. Toutes
les manœuvres sont rapides afin d’être stimulantes. Effleurages, pressions glissées, pétrissages profonds et percussions sont alors réalisés avec un abord large de façon à intéresser un maximum de
masses musculaires. Ces manœuvres ont pour effet d’augmenter le tonus musculaire, de favoriser
les échanges liquidiens et d’améliorer l’élasticité et la résistance musculaire.
À ces manœuvres sont ajoutées des pressions glissées péri-patellaires ; elles sont lentes, appuyées et disto-proximales. Ainsi nous favorisons la résorption de l’œdème. De plus Pierre bénéficie de cryothérapie gazeuse à chaque fin de séance, et une vessie de glace dans un linge humide lui
est posée environ 5 fois 20 min par jour.
En fin de journée, un massage à base de manœuvres lentes lui est proposé pour garantir une
récupération musculaire optimale en complément des étirements.
7
Sont ajoutées des techniques plus superficielles sur la cicatrice dans le but de lever les
adhérences. Grâce au pétrissage superficiel (manœuvre de Diacquenod ou Morice), au palperrouler, la cicatrice est parfaitement libérée à environ à J60.
2 - Libération articulaire fémoro-patellaire et fémoro-tibiale
Elle constitue l’un des objectifs essentiel de cette prise en charge. Les techniques intéressent
tous les degrés de liberté mais insistent évidemment sur une récupération en flexion.
La fémoro-patellaire est la première mobilisée. Le patient est en décubitus dorsal avec ses
genoux en extension. Bien que des glissements passifs transversaux soient réalisés, nous effectuons
principalement des glissements céphaliques et caudaux afin de solliciter le tendon patellaire dans
son allongement et raccourcissement. Le fait de le mobiliser dans le sens de son allongement le
prépare pour les mobilisations passives en flexion de la fémoro-tibiale. (Cependant nous n’obtenons
pas de réel allongement du tendon puisque le cerclage nous en empêche)
Afin de mobiliser la fémoro-tibiale dans sa course maximale, le patient est assis en bord de
table, avec un coussin sous le fémur gauche pour l’horizontaliser. Avant toute mobilisation, nous
veillons au maintien postural de Pierre car, même si les mobilisations sont passives, il se doit d’être
attentif. Ma main proximale est sur la face antérieure de
cuisse. Elle accompagne un abaissement de la patella afin
de retarder l’apparition de la douleur tendineuse, et ainsi,
permet une plus grande amplitude. L’autre main est sur la
tubérosité tibiale antérieure. Elle porte le tibia vers
l’arrière en associant un glissement postérieur par rapport
au fémur (figure 3). Cette combinaison améliore les
symptômes et permet un balayage plus ample. Il est
judicieux d’ajouter une composante rotatoire médiale car
elle est automatique en temps normal.
Figure 3 : Mobilisation en flexion
Les techniques de « scooping », les pivots, les tractions, les bâillements sont aussi réalisés
pour assouplir les éléments capsulo-ligamentaires au maximum.
8
La technique du piégeage articulaire n’a pu être réalisé avant J75, car, trop douloureuse.
Pierre est en décubitus dorsal, genou en flexion maximale. Cette technique (active aidée) impose au
patient d’enfoncer son talon dans la table et de réaliser une flexion dorsale ; ainsi nous obtenons un
recul du tibia par rapport au fémur (figure 4). La position
est maintenue 5 s et relâchée 5 s. Une prise sous la
tubérosité tibiale accompagne le glissement postérieur,
l’autre sur la cuisse empêche le recul du segment crural.
Cette technique, en complément des mobilisations
passives, a permis une évolution plus rapide du gain en
flexion et a été déterminante dans le dépassement des 90°
(100° en actif aidé, 5 semaines après le début de notre
prise en charge).
Figure 4 : Piégeage articulaire
En complément de ces mobilisations, nous demandons à Pierre de pratiquer des automobilisations : il est assis sur une chaise, un skate-board est placé sous son pied gauche, il fléchit
activement son genou au maximum et posture la position, son membre sain peut appliquer des surpressions. À ceci s’ajoute le travail en balnéothérapie où il pédale et s’accroupit.
Le manque de flexion est également dû à une hypoextensibilité du droit fémoral mais ceci
est traité dans le paragraphe suivant.
3 - Récupération en force et extensibilité du quadriceps
Contractions statiques, concentriques et excentriques du quadriceps sont pratiquées sans difficulté dans la mesure où ce travail se fait contre la pesanteur ou résistances manuelles adaptées.
Course et mode de contraction n’influencent pas les symptômes. Cependant l’exécution rapide et
répétée d’un mouvement contre résistance est difficilement supportée car elle déclenche de nouvelles sensations douloureuses.
Tous les types de chaînes sont utilisées afin de recruter les quatre chefs du quadriceps :
chaînes parallèles de triple flexion/triple extension, chaînes séries diagono-spiralées de Kabat. Les
trois modes de contraction sont sollicités car la récupération musculaire est spécifique de
l’entraînement imposé. Il est alors primordial de « surprendre » le muscle et de varier les stimulations en terme de vitesse, course, mode, placement de la résistance, temps de travail [3].
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Il faut cependant garder à l’esprit qu’il est nécessaire de privilégier le travail excentrique
afin d’améliorer le rôle freinateur du tendon patellaire et augmenter la résistance du complexe
musculo-tendineux [4]. C’est pourquoi nous nous sommes inspirés du protocole de Stanish (annexe
7).
Le protocole comporte trois séries de dix répétitions. La vitesse, l’amplitude de flexion et la
charge représentent les paramètres de la progression. Pierre débute ce programme en réalisant des
étirements activo-dynamiques des droits-fémoraux et ischio-jambiers pour préparer ses muscles à
l’effort (ils sont décrits ultérieurement). Ensuite il est en appui bipodal, une calle est placée sous les
talons, les pieds sont écartés d’une largeur de chaussure, les genoux sont fléchis à 15°, le haut du
corps est vertical. Il fléchit lentement les genoux jusqu’à 30°. Il tient 8 s et reprend sa position
initiale pour se reposer 8 s. Il répète ce mouvement 10 fois. Il recommence alors une série à 45° de
flexion, puis à 60°. La séance suivant, Pierre reproduit ces trois séries à vitesse moyenne puis à
vitesse rapide au troisième jour du protocole. A ce stade il ne ressent pas de douleur, donc nous
ajoutons une charge de 2 kg qu’il porte sur ses épaules à l’aide d’une barre. La même progression
est reprise (vitesse lente/vitesse moyenne/vitesse rapide). Dans les séances suivantes, 2 kg
supplémentaires s’ajoutent et l’évolution continue. Les douleurs apparaissent lorsque Pierre fléchit
rapidement à 60° avec 8 kg sur les épaules. Dans ce protocole, la douleur est l’élément de contrôle
de la progression et nous impose d’arrêter l’augmentation des difficultés à ce niveau. Il termine
chaque séance par des étirements passifs et un glaçage de 20 minutes [5]. Ce travail permet
progressivement le contrôle excentrique en charge et participe donc à l’amélioration de la marche et
à la descente des escaliers.
Dans le but d’améliorer le gain articulaire en flexion et permettre une récupération
musculaire optimale, il est indispensable de réaliser des
étirements du droit fémoral. Au début de notre prise en
charge il est question d’étirements passifs : Pierre est en
décubitus dorsal avec les ischions en bord de table, il
saisit son genou droit et le tire vers lui pour stabiliser
son bassin, je place son genou gauche en flexion
maximale infra-douloureuse et j’amène la hanche en
extension lentement et sans à coup (figure 5). Ceci se
fait sur le temps expiratoire, la position est tenue 20 s et répétée 3 fois.
Figure 5 : Etirement du droit fémoral
10
Une technique active comme l’isométrique/isotonique est rapidement privilégiée. La position est la même que précédemment. Je réalise passivement une flexion de genou jusqu’à la limite
de l’amplitude. Ensuite Pierre tente de poursuivre la flexion contre une résistance manuelle
(contraction statique de 6 s) que je relâche progressivement afin de gagner en amplitude. Cette technique est stoppée par l’apparition des phénomènes douloureux.
En parallèle, lorsque la charge de travail musculaire s’élève, des étirements activodynamiques lui sont proposés afin de solliciter la jonction myo-tendineuse et de préparer son muscle à l’effort. Pierre est debout, il fléchit le genou gauche (flexion non maximale), la face dorsale de
son pied repose alors sur un tabouret. Ensuite il réalise une extension de genou contre résistance
(contraction isométrique du quadriceps pendant 8 s) en association avec une rétroversion de bassin.
Puis il quitte la position et effectue des flexions /extensions rapides de ce même genou pendant 8 s.
Chaque étirement activo-dynamique est répété 2 fois et se fait en symétrique [6].
En complément, le patient bénéficie d’électrothérapie en mode de renforcement musculaire,
il s’agit de courants excito-moteurs tétanisant bidirectionnels à basse fréquence (20 Hz). Trois électrodes sont utilisées ; une est placée sur le vaste médiale (à proximité de la patella), une autre est sur
le vaste latéral (tiers moyen de la cuisse) et la troisième, plus large, est sur le droit fémoral (tiers
supérieur de cuisse). Pierre est en décubitus dorsal, il réalise une contraction volontaire du quadriceps (« plaquez votre genou sur la table ! »), ainsi il accompagne activement la stimulation électrique dans le but d’améliorer l’efficacité de ce travail [7].
4 - Amélioration de la vigilance arthro-musculaire
Le programme se veut varié et progressif. Le geste chirurgical nous autorise à utiliser tous
les plans de mobilités, seul le ressenti du patient nous guide dans la difficulté des exercices.
L’immobilisation prolongée de Pierre (2 mois 1/2) a perturbé son système de vigilance arthromusculaire. Il est intéressant de s’attarder sur un travail dans le plan sagittal afin de recruter le potentiel freinateur du tendon patellaire et de l’améliorer.
Le programme proprioceptif commence par un exercice en décharge. Pierre est assis en bord
de table, son genou est fléchi au maximum supportable. Un ballon de Klein est placé sous son pied
gauche. Nous provoquons des déstabilisations multidirectionnelles sur le ballon et la consigne est
d’enfoncer le pied dans le ballon et de contrôler sa position. Au départ les déstabilisations sont
11
prévenues, lentes et régulières, puis non prévenues, rapides et saccadées avec et sans contrôle
visuel.
En charge, les exercices en fente avant sont privilégiés pour tendre vers une position en appui
sur genou déverrouillé. Je suis assise face à lui et les déstabilisations sont axées sur le genou. La
progression est la même qu’à l’exemple précédent. Un plan instable (type coussin d’air) peut être
placé sous son pied. Il est précisé à Pierre d’augmenter le poids porté sur son membre inférieur gauche
pour avoir comme finalité une tenue unipodale contrôlée sur genou déverrouillé. Un exercice sur
planche basculante lui est proposé : il est en fente avant et
gère ses déséquilibres jusqu’à se porter entièrement sur son
membre opéré et tenir le plus longtemps possible (figure 6)
.Lorsque la tenue unipodale est acquise, des jeux de passes
au pied lui sont proposés. Une série en appui sur son
membre opéré et une autre sur son membre sain car Pierre
affirme shooter avec ses deux pieds lors la pratique du
football.
Figure 6 : exemple d’exercice
proprioceptif
Avec la même progression, de nombreux exercices sont exécutés, l’utilisation d’outils variés
(ballon, escarpolette de Dotte, plateau de Freeman…) a permis une rééducation diversifiée et attractive.
5 - Correction des asymétries dans la locomotion
Les principaux défauts de marche sont la raideur en flexion en fin de phase portante et
l’esquive d’appui. La raideur, perçue dans ce cas, est liée à la faiblesse des ischio-jambiers et est
donc améliorée par leur renforcement traité dans le chapitre suivant. La phase d’appui est plus
rapide à gauche, ceci peut s’expliquer par le fait qu’entre la phase « appui talon » et « pied au sol »,
le droit fémoral s’active en excentrique pour freiner et stabiliser le bassin, donc, c’est une situation
dans laquelle le tendon lésé est sollicité. Comme Pierre ne maîtrise pas cette action, il l’accélère.
Afin d’améliorer ce passage, Pierre travaille en fente avant, une balance est placée sous chaque pied
dans les premiers essais. Je suis assise face à lui, une main est sur la tubérosité tibiale antérieure et
l’autre stabilise le bassin par l’épine iliaque antéro-supérieure. Dans un premier temps, il lui est
demandé de venir se mettre en appui total sur sa jambe avant, sans décoller le pied arrière. Pierre
atteint 62 kg (il pèse 68 kg). A force d’encouragements et de répétitions Pierre atteint 68 kg. Malgré
12
ce résultat, lorsqu’il s’agit de décoller le pied arrière, il éprouve encore des craintes à se positionner
en unipodal déverrouillé sans aide, mais il y parvient à 3 semaines du début de notre prise en
charge.
Un travail plus fonctionnel est également entrepris avec des mises en situation répétées dans
les escaliers, des passages d’obstacle et un travail de marche en piscine. Pierre bénéficie de séance
de balnéothérapie afin d’entretenir les progrès acquis lors du travail en salle, mais c’est également à
visée de détente que cet outil est utilisé.
6 - Entretien des muscles sains et renforcement des ischio-jambiers affaiblis
Il est nécessaire de réaliser cet entretien d’autant plus que Pierre passe une grande partie de
son temps libre à faire du sport. Afin d’intéresser plusieurs muscles à la fois, nous utilisons les diagonales de Kabat. Ces chaînes sont réalisées avec des variations de vitesse, dans différentes courses
et avec des modes de contractions changeants. Pour cela nous modulons la résistance et les consignes sont différentes suivant l’effet recherché ; « tirez » ou « poussez contre mes mains » pour du
concentrique, « tenez » pour de l’isométrique, et « empêchez moi de… » pour de l’excentrique. Le
contact des mains est ferme mais permet le mouvement. La position des résistances est précise afin
d’orienter le mouvement dans la direction recherchée. Elles intéressent membres supérieurs et
membres inférieurs. Nous décrivons une chaîne destinée aux membres inférieurs (annexe 8). Les
ischio-jambiers du côté opéré sont aussi renforcés de façon analytique et isométrique, car le travail
soutenu de façon dynamique et répétitive déclenche des phénomènes douloureux. Pierre est assis en
bord de table, il fléchit au maximum et tient la position 6 à 8 s contre ma résistance postérieure. Des
séries de 10 tenues sont réalisées. A ce niveau, nous nous autorisons cependant l’utilisation des diagonales de Kabat mais de façon lente afin d’éviter tout rebond inflammatoire. En parallèle, il commence le vélo et le stepper et augmente le temps de travail en fonction de son ressenti. Pierre termine sa séance par une série d’étirements passifs afin d’optimiser sa récupération musculaire.
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III – DISCUSSION
A – RÉSUMÉS
Article 1 : La douleur en kinésithérapie - M. Laot
La douleur, témoin d’une lésion corporelle, constitue un repère essentiel dans la prise en
charge kinésithérapique. Il faut déterminer l’équilibre le plus convenable entre provocation et abolition de celle-ci afin de permettre une cicatrisation optimale. En effet, une inhibition totale, par immobilisation prolongée, entraîne des complications, et renforce la gêne fonctionnelle par atteinte des
structures initialement saines. Cependant cet équilibre diffère selon les individus, leurs expériences
passées, leurs objectifs. Chacun a un rapport unique avec la douleur et ceci rend son évaluation particulière. Elle ne peut se résoudre à la mesure des anomalies de structures articulaire et musculaire
mais doit aussi tenir compte des facteurs sociaux, psychologiques et biologiques. Ainsi un dialogue
doit être établi entre le thérapeute et le patient de façon à appréhender la douleur le plus justement
possible. Le but étant d’éviter une inhibition ou une facilitation abusive qui entraverait la récupération.
Article 2 : Plasticité musculaire et kinésithérapie - M.Trudelle
La cicatrisation du tissu musculaire dépend de plusieurs facteurs : une innervation, une vascularisation, et un tissu conjonctif de bonne qualité. Les tissus lésés doivent être sollicités dans le
but d’orienter la cicatrisation. Mais cette activation prend en compte plusieurs phénomènes
d’adaptation à différents niveaux.
En premier lieu il s’agit d‘une adaptation neurologique puisqu’elle vise à améliorer le recrutement, la fréquence et la synchronisation des unités motrices. Dans ce cas, l’entraînement améliore
le contrôle de la contraction et non son intensité.
Si la durée de l’entraînement dépasse 8 semaines, c’est le tissu contractile qui évolue. Il se
produit alors une modification « structurale » avec hyperplasie et hypertrophie des myofibrilles. Les
fibres II sont les plus sujettes aux transformations. Or l’adaptation se veut spécifique aux sollicitations imposées, elle est également transitoire. Le nombre de fibres recruté, l’angle sollicité, la longueur des fibres, la vitesse de raccourcissement et la charge appliquée sont à considérer dans
l’évaluation de la modification. Le choix de l’entraînement est alors tributaire des objectifs fixés.
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Le tendon finit par s’adapter à son tour. Seuil de plasticité et coefficient d’élasticité sont à
prendre en compte. Le coefficient d’élasticité est le premier à pouvoir évoluer et conditionne la rééducation. Fyfe et Stanish privilégient une exploration complète de la course avant d’augmenter la
vitesse et la charge pour améliorer le seuil de plasticité.
Article 3 : Le travail musculaire excentrique : de la théorie à la pratique – M. Middleton
Le travail musculaire excentrique obéit à des processus physiologiques différents de ceux du
travail musculaire concentrique. L’association d’une contraction à l’étirement conditionne son fonctionnement en anaérobie et la force est fonction du degré d’étirement. Ce type de sollicitation est
souvent à l’origine de lésions musculaires. Elles concernent l’antagoniste d’un mouvement lorsque
son rôle freinateur est dépassé par l’action de l’agoniste, ou alors elles touchent l’agoniste d’un
mouvement sollicité excessivement en excentrique. Mais paradoxalement, le travail musculaire excentrique est indiqué dans la prévention et le traitement des lésions musculo-tendineuses, et il est
utilisé en complément du travail proprioceptif dans le cadre d’instabilité. Ceci s’explique par le fait
qu’il augmente la résistance du complexe musculo-tendineux en plus d’améliorer certaines qualités
musculaires comme la force. Le travail musculaire excentrique doit alors répondre à des protocoles
rigoureux (notamment en isocinétisme) afin de ne pas contrer les objectifs de rééducation et créer
des lésions supplémentaires.
B - RÉFLEXION PERSONNELLE
L’absence de protocole de rééducation concernant la pathologie traitée nous amène à orienter nos techniques en considérant la douleur et la cicatrisation. Le délai auquel nous nous trouvons
et les consignes chirurgicales autorisent l’exploration de toutes les courses à tous les modes. Cependant la suture reste fragile, nous devons alors rester précautionneux et pour cela, la plainte exprimée
par le patient est le premier élément guide de notre prise en charge. D’après Michel Laot, la difficulté de l’évaluation de la douleur est qu’elle fait intervenir la notion de subjectivité, de personnalité
de chacun. Or, dans notre cas, Pierre est très impliqué dans sa rééducation et affirme pouvoir accepter la douleur (dans la limite du supportable) lors de la réalisation des techniques. Cette décision
rend ainsi notre prise en charge plus ambitieuse, mais comment être sûre de ne pas altérer la lésion
fraîchement cicatrisée ? Comment trouver le juste équilibre entre inhibition et facilitation évoqué
dans le premier article ?
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Lors des mobilisations passives en flexion, la douleur provoquée est ponctuelle et fluctuante
au fur et à mesure des mobilisations. Dans ce cas nous incluons la douleur aux manœuvres mais
nous prenons comme précaution le fait de protéger la suture en abaissant la patella. Lors du travail
actif (proprioceptif ou sollicitation dynamique du quadriceps contre résistance), la nature des phénomènes douloureux est différente : Pierre décrit parfois une sensation « d’étau » englobant son
genou. Dans ce cas l’exercice est interrompu car cette sensation peut être annonciatrice d’une algoneurodystrophie. La douleur doit donc être analysée afin de comprendre son expression et pouvoir
l’accepter. Le dialogue est nécessaire, car la description des symptômes constitue la clef de leur
évaluation et de leur compréhension.
La douleur ressentie pendant les exercices excentriques est encore différente. Par exemple,
lorsqu’une répétition de flexion de genoux en charge est demandée à Pierre, elle est ressentie sur la
patella et constitue la limite de l’exercice. Cependant l’intérêt du travail excentrique est considérable dans le cas de Pierre. D’après Patrick Middleton, il est le seul à pouvoir augmenter la résistance
du complexe musculo-tendineux, mais il peut être à l’origine de lésions supplémentaires graves.
C’est pourquoi nous protégeons le tendon en nous inspirant du protocole de Stanish utilisé dans les
tendinopathies. Comme l’entraînement excentrique en isocinétisme n’est autorisé qu’à 12 semaines
post-opératoires (article 3), nous utilisons un travail plus fonctionnel, moins contraignant et nous
profitons des bénéfices du travail excentrique sans prendre de risque vis-à-vis de la suture. Il est
clair que le type d’exercice proposé à Pierre a moins d’impact bénéfique sur l’amélioration du complexe musculo-tendineux que les protocoles isocinétiques décrits par P. Middleton. Cependant il a
permis à Pierre d’améliorer sa locomotion et la descente des escaliers et nous pouvons penser qu’il
constitue une bonne préparation à la prise en charge isocinétique.
Même si les sollicitations excentriques semblent améliorer les qualités concentriques et statiques d’un muscle, il n’est pas suffisant car l’entraînement conditionne l’activité musculaire. Depuis son accident et jusqu’à l’intervention (plus de 2 mois), Pierre n’a pu réaliser d’extension de
genou, son organisation musculaire s’en trouve profondément perturbée à différents niveaux : unités
motrices, fibres, tendons… D’après Pierre Trudelle, les adaptations neurologiques et musculotendineuses nécessitent plusieurs semaines et sont transitoires. C’est pourquoi nous nous efforçons
de solliciter tout type de contraction musculaire dans tout le secteur articulaire de façon à faciliter la
reprise des activités supérieures de la marche et la reprise du sport. Le principal loisir de Pierre est
le football, les qualités concentriques de son quadriceps doivent dés maintenant être sollicitées et
améliorées pour obtenir un muscle prêt et adapté à cette pratique.
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Le travail proprioceptif, utilisé pour stimuler la vigilance musculaire, a pour but de mettre le
muscle en situation de « stress » et ainsi améliorer la stabilité de l’articulation. Dans ce cas, c’est
principalement la coordination musculaire et la rapidité d’action des unités motrices qui sont sollicitées.
En plus des délais de cicatrisation et des phénomènes douloureux, la localisation de la lésion
(tendon), les principales fonctions altérées (rôle freinateur dans les situations courantes et extension
de genou), et la spécificité du patient (sportif amateur : football, ski alpin…) ont « imposé à la rééducation » d’investir tous les modes de contractions musculaires de façon à retrouver une vie quotidienne sans perturbation dans la locomotion, favoriser la reprise du sport et limiter le risque de
lésions (tendinite).
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IV - CONCLUSION
Les principaux objectifs de cette phase rééducative étaient d’augmenter l’amplitude de
flexion de Pierre, d’améliorer sa vigilance arthro-musculaire et certaines qualités du quadriceps
comme la force et l’extensibilité. Nous sommes passés de 80° à 100° de flexion (en passif) 5 semaines après le début de cette prise en charge. Pierre se libère des cannes anglaises lorsqu’il est dans sa
chambre ou chez lui le week-end, sa marche est symétrique mais la descente des escaliers est encore
difficile. La récupération des qualités musculaires se fait lentement car, encore à ce stade, le genou
de Pierre est rapidement inflammatoire et il décrit à plusieurs reprises une sensation « d’étau ». À
2,5 mois de son intervention, Pierre présente encore un déficit important de flexion et de force musculaire quadricipitale, ceci étant sans doute la conséquence d’une chirurgie trop attendue.
L’ablation des cannes se fera définitivement sous ordre du chirurgien. Les sollicitations du
tendon en rapidité, endurance, et puissance se feront une fois que les phénomènes inflammatoires
seront maîtrisés. Pierre est informé dés maintenant des risques de tendinite patellaire éventuelle,
nous insistons alors sur l’importance de la bonne réalisation des étirements et d’une alimentation
adaptée surtout lors de la reprise d’activité sportive, une contention adhésive préventive pourra lui
être proposée pour minimiser le risque de lésions tendineuses [8].
Les objectifs à moyen terme seront alors de récupérer une amplitude de flexion se rapprochant de celle du coté sain, de continuer l’augmentation de force et d’extensibilité musculaire du
quadriceps avec une intensification des techniques. La reprise du travail sera autorisée sous avis
médical, pour cela Pierre devra retrouver une locomotion libre de toute aide technique et endurante
car sa profession lui impose d’être dynamique. En effet, il est éducateur et travaille avec des jeunes
en difficulté. Il doit parfois les accompagner dans des activités sportives.
A long terme, il sera proposé d’améliorer la rapidité d’exécution du geste (puissance),
l’endurance et de l’accompagner dans la reprise des activités physiques (reprise sur le terrain).
Nous pouvons penser que la flexion complète ne sera pas récupérée mais il faut tenter de réduire au maximum ce risque de séquelle. Pierre n’explore pas les derniers degrés de flexion dans la
vie courante ou dans la pratique du sport. Donc si ce déficit reste mineur, il ne s’en suivra aucune
gêne fonctionnelle.
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