EXPLORATION URODYNAMIQUE G. Amarenco Service de Rééducation Neurologique et d’Explorations Périnéales, Hôpital Rothschild, 33 bd de Picpus, 75571 Paris Cedex 12 Correspondance et tiré à part : Docteur Gérard Amarenco Service de Rééducation Neurologique et d’Explorations Périnéales, Hôpital Rothschild, 33 bd de Picpus, 75571 Paris Cedex 12 [email protected] Introduction Les explorations urodynamiques ont pris ces dernières années un essor considérable. Ces techniques permettent en effet une évaluation objective du fonctionnement vésicosphinctérien et partant une analyse physiopathologique précise des symptômes urinaires tout particulièrement de l’incontinence. C’est ainsi le rôle essentiel de l’exploration urodynamique que de préciser le ou les mécanismes des troubles urinaires. Parfois des éléments étiopathogéniques, pronostiques, évolutifs, ou thérapeutiques peuvent être apportés par ces explorations, mais cela n’est pas leur objet initial. Ces investigations ne doivent jamais être isolées et se substituer à l’examen clinique pour la détermination diagnostique et thérapeutique. Interrogatoire et examen physique restent absolument indispensables et constituent le préalable avant toute réalisation d’un bilan urodynamique. L’édiction récente de recommandations par les Sociétés Savantes et l’ANAES permettent désormais de mieux préciser les algorithmes décisionnels et la place de ces investigations manométriques dans la réflexion diagnostique et thérapeutique des troubles vésico-sphinctériens. L’exploration urodynamique n’est pas réduite à une seule exploration. Elle comprends plusieurs types d’examen. La plupart sont des examens manométriques, c’est-à-dire une évaluation de la pression intracavitaire. La cystomanométrie (ou cystométrie) est l’exploration la plus classique et la plus ancienne, permettant l’enregistrement des pressions intra-vésicales. La sphinctérométrie analyse les pressions intra-urèthrales. L’examen uro-débimétrique autorise la quantification de la miction. L’exploration électrophysiologique complète souvent les examens manométriques en évaluant l’aspect fonctionnel sphinctérien et analysant d’éventuelle composantes neurogènes dans la genèse des troubles. Exploration urodynamique : les limites de l’interprétation. L’exploration urodynamique est habituellement plus qu’un simple examen : sa prescription n’est souvent que le prétexte à une consultation spécialisée dépassant la seule détermination du mécanisme physiopathologique des troubles vésico-sphinctériens [et c’est là le rôle premier des explorations urodynamiques]. C’est en effet le moyen pour le prescripteur d’appréhender l’étiopathogénie des symptômes, le pronostic des troubles, et de solliciter un conseil thérapeutique. Mais pour celui qui le réalise, le bilan urodynamique ne doit être, dans un premier temps, qu’un examen complémentaire dont il faut connaître les aléas en terme de fiabilité, de reproductibilité, de stabilité des résultats en raison des variabilités intra et inter individuelles, des limitations techniques ... et des erreurs humaines inhérentes à la complexité d’enregistrement du signal. C’est dire qu’une bonne dose d’objectivité, de neutralité, voire de circonspection vis-à-vis des résultats bruts, “mathématiques” affichés par les instruments de mesure, doit toujours guider non seulement l’examinateur mais aussi celui qui a prescrit l’exploration et qui va en disposer. Au mieux, et paradoxalement, l’analyse des courbes doit se faire de manière neutre, détachée du contexte clinique qui peut polluer, parasiter, forcer l’analyse dans le sens de l’habitude médicale... ou d’une direction thérapeutique souhaitée par le thérapeute (qu’il soit le prescripteur ou le technicien réalisant l’exploration). Respect des définitions, prise en compte des artéfacts, déchiffrage pas à pas et rigoureux des paramètres d’acquisition doivent permettre une analyse objective et non affective des données. Cette analyse doit ensuite être resitué dans le contexte global du patient, clinique, psychologique, parfois social : c’est là où l’interprétation commence, fonction des données cliniques (interrogatoire et examen physique) et des autres examens complémentaires (radiologiques et endoscopiques). Le médecin reprend son rôle, l’exploration urodynamique ne restant qu’un de ses outils d’évaluation et de diagnostic. Acte médical, sa réalisation, même si elle peut être protocolée et donc déléguée, est souvent modulée en fonction du contexte clinique. En effet, l’établissement de procédures par grands groupes pathologiques n’est pas toujours possible. De plus, la présence effective du médecin à toute étape de l’enregistrement, permet de s’affranchir d’un certain nombre d’artéfacts et de difficultés d’interprétation, et de modifier “sur l’instant”, le protocole de réalisation en fonction des premiers éléments diagnostiques apportés par le début de l’examen : la constatation au cours d’une débimétrie pré-cystomanométrie d’une dysurie avec résidu post mictionnel chez une femme avec prolapsus consultant pour incontinence d’effort va probablement modifier la conduite de l’examen urodynamique et faire rechercher des facteurs particuliers qui n’auraient eut aucun intérêt au cours d’une “banale” incontinence urinaire d’effort ... Les différentes techniques d’investigations urodynamiques L’information au patient est un élément éthiquement élémentaire et médico-légalement indispensable. C’est dire que comme pour tout acte médical, une information claire et intelligible doit être donnée au patient tant de la part du prescripteur que de l’opérateur. En annexe figure un exemple de notice d’information validée par le Comité Scientifique de la SIFUD (Société Internationale Francophone d’Urodynamique). L’exploration urodynamique a un coût (consommables stériles à usage unique) et donc un prix. Avant la réforme attendue prochainement, la nomenclature est la suivante : débimétrie et sphinctérométrie seules ne sont pas cotables. La cystomanométrie seule (avec ou sans pression de référence rectale ou vaginale, et sans EMG) est codifiée K 40 ; la cystomanométrie avec étude EMG couplée (aiguille ou électrode de surface), K 50. Depuis quelques mois, la formalité d’entente préalable n’est plus nécessaire pour le bilan urodynamique. La Cystomanométrie La cystomanométrie permet l'étude des pressions intra vésicales. L'examen débute par un sondage vésical (sonde de cystomanométrie plastifiée ou microcapteur électronique). Les pressions intravésicales sont alors étudiées au cours d'un remplissage progressif de la vessie par un fluide (eau ou gaz). L'analyse simultanée des pressions rectales (afin d'éliminer des artefacts éventuels) , des pressions urétrales (dépistage d'une instabilité urétrale) et de l'activité électromyographique du sphincter strié urétral est possible. Différents paramètres sont analysés : sensibilité détrusorienne (perception par le patient de la chronologie normale des différents besoins mictionnels), compliance vésicale (capacité de la vessie à s'adapter au remplissage), capacité vésicale fonctionnelle et surtout activité du détrusor, l'existence de contraction survenant à faible volume (moins de 200 ml) et supérieure à 15 cm d'eau, définissant l'hyperactivité vésicale. La sensibilité détrusorienne peut être altérée: une hypoesthésie (besoin trop tardif à plus de 400 ml. voire aboli) peut être secondaire à une lésion neurogène périphérique (atteinte tronculaire du nerf honteux, atteinte plexique, atteinte radiculo-médullaire basse), ou médullaire. Mais cette anomalie sensitive n’est pas forcément neurologique (séquelle des détrusors claqués par exemple), ni forcément pathologique lorsqu’elle s’intègre dans le cadre d’une mégavessie constitutionnelle (syndrome des mictions rares). La compliance vésicale dépend des propriétés viscoélastiques de la vessie mais aussi, en partie, du contrôle neurologique du tonus vésical. Certaines lésions périphériques (syndrome de la queue de cheval, dénervation post opératoire) s'accompagnent d'un défaut de compliance comme certaines anomalies de la muqueuse vésicale (cystite radique, cystite intersticielle, cancer de vessie, cystopathies spécifiques, infectieuses, …). L'activité du détrusor est un des paramètres fondamentaux. L'existence de contraction survenant à faible volume (moins de 200 ml) et supérieure à 15 cm d'eau, définit l'hyperactivité vésicale, témoin cystomanométrique de la libération du réflexe mictionnel. Ces hyperactivités vésicales peuvent être le fait de toute lésion affectant les voies de contrôle neurologique au-dessus de l'arc réflexe primaire sacré (lésions médullaires, du tronc cérébral, encéphaliques), ou encore de certaines lésions neurogènes périphériques telles les neuropathies végétatives où l'on incrimine dans ces cas non pas une interruption de l'inhibition corticale mais un déséquilibre dans la balance sympathique-parasympathique. Cette hyperactivité est d'autant plus suspecte d'une pathologie neurologique, qu'elle s'accompagne d'un trouble concomitant de la sensibilité (abolition de la perception du besoin) et/ou d'une dyssynergie vésico-sphinctérienne (absence ou mauvais relâchement du sphincter strié pendant la miction obtenue par contraction détrusorienne). La mise en évidence d'une telle anomalie a de plus une valeur localisatrice, préjugeant d'une lésion supra-sacrée et infra-protubérantielle. Mais l’hyperactivité vésicale peut aussi être idiopathique (instabilité vésicale, vessie immature) ou secondaire à une obstruction sous cervicale (sténose urètrale, maladie du col, compression extrinsèque par un trouble de la statique pelvienne par exemple). La méthodologie de la cystomanométrie doit être rigoureuse. Le protocole d’examen doit être identique pour toutes les patientes (position du sujet, vitesse de remplissage,..) et parfaitement explicite sur le compte rendu. Les paramètres analysés doivent toujours être référés par rapport à une valeur normale. En annexe figure la méthodologie de la cystomanométrie telle qu’elle a pu être définie par la SIFUD. Globalement et en simplifiant, plusieurs types de vessies peuvent être décrit. La vessie normale se laisse facilement remplir jusqu’à 400 ml, sans contraction parasite, sans élévation des pressions témoin d’une bonne faculté d’adaptation visco-élastique, et avec une sensation de besoin perçue avant 3000 ml. De manière optionnelle, une miction par contraction détrusorienne peut être obtenue sur table lors de l’ordre de miction, miction qui est alors facile, avec des pressions inférieures à 40 cm d’eau, sans résidu post mictionnel, avec bonne ouverture sphinctérienne (relâchement sphinctérien objectivé par l’électromyogramme du sphincter strié ou par la chute des pressions urèthrales). La vessie hyperactive, quelque en soit l’étiologie, est caractérisée par des contractions non inhibées du détrusor pendant le remplissage. Le trouble de compliance se caractérise par une vessie ne tolérant pas le remplissage, avec une élévation quasi immédiate, trop importante, rapidement croissante des pressions intra vésicales, et réduction très habituelle de la capacité cystomanométrique maximale. La vessie hypoactive (en règle hypo ou acontactile) est plus difficile à définir sur le plan cystométrique. C’est le plus souvent une vessie flasque, hypercompliante, hyposensible, à grande capacité, se laissant trop facilement distendre, sans contraction détrusorienne jamais objectivée (même lors d’une éventuelle miction obtenue alors par poussée abdominale). Cystomanométries en condition sensibilisatrice L’exploration cystomanométrique de base peut parfois être normale alors que la symptomatologie clinique est bruyante ou des complications sont observées. C’est alors que la pratique d’explorations urodynamiques en conditions sensibilisatrices peuvent aider au diagnostic. Le test à l’eau glacée est dans ce cadre l’examen le pus réalisé. D’autres sont en cours d’évaluation (remplissages rapides, cystomanométries après épreuve de marche, holter vésical, …). LE TEST A L'EAU GLACEE Le réflexe vésical au froid ("cooling reflex") est connu de longue date (Adler, 1918), l'instillation intravésicale d'eu glacée favorisant la contraction détrusorienne. Utilisé comme test diagnostique (test à l'eau glacé) par Bors et Blinn (1957), il permet de différencier les lésions médullaires supra-sacrées où le test est positif des lésions infra-sacrées où le test est négatif comme chez les sujets normaux. Outre cet apport diagnostique et son intérêt physiologique (mise en évidence de thermorécepteurs vésicaux par McDonald en 1959), il a pu être utilisé comme thérapeutique (réentrainement à l'eau glacée des vessies médullaires). Le réflexe vésical au froid est considéré comme un réflexe primitif disparaissant vers l'age de 5 ans, lors de la maturation du système nerveux. Secondaire à une stimulation des thermorécepteurs vésicaux, médié par les fibres afférentes non myélinisées de type C, c'est un réflexe segmentaire sacré sous influence inhibitrice des centres supérieurs suprasegmentaires. L'instillation d'eau glacée (0 à 4°) déclenche une contraction du détrusor supérieure à 15 cm d'eau chez le sujet atteint de lésion médullaire supra-sacrée. Cette réponse est à différencier d'une augmentation plus faible des pressions ("cold contracture" de Kurihara). L'apparition d'une réponse à l'injection d'eau glacée pourrait constituer un argument en faveur d'une possibilité de motricité vésicale, quelle que soit la cause de l'acontractilité (mécanique ou neurologique notamment périphérique) et de préjuger ainsi d'un meilleur pronostic et/ou d'une lésion incomplète. La méthodologie de réalisation du test à l’eau glacé est variable selon les équipes. Bors et Comarr en 1971 utilisent un cathéter ch 18 et 60 à 90 ml d’eau glacée. Le TEG est considéré comme positif si ce cathéter est expulsé dans la minute. GEIRSSON (1993), après une cystomanométrie, injectent 100 ml d’eau à 0° en 15 à 20 sec par cathéter ch 8, laissée 1 mn. Le test est positif en cas de contraction vésicale soutenue avec fluide expulsé. Le test est considéré comme un faux négatif si on objective une contraction vésicale soutenue de même amplitude que la contraction mictionnelle, sans expulsion du fluide. Plus récemment une autre technique a pu être utilisée : cystomanométrie de base à 100 ml (sérum tiède) ; cystomanométrie à l’eau glacée : si une contraction apparaît avant 200 ml, le test est classé A; si la contraction apparaît entre 200 et 400 ml, le test est classé B. Le test est classé C, si la cystomanométrie de base retrouve une hyperactivité vésicale et que le volume auquel apparaît la contraction non inhibée durant l’injection d’eau glacée est inférieur de moitié à celui observé au cours du test de base. Débimétries et études pression-débit L'examen débimétrique permet l'étude objective et quantitative de la miction en appréciant notamment le débit urinaire maximum et le débit moyen. Cette exploration simple permet d'appréhender au mieux les dysuries et d'évoquer l'éventualité d'une obstruction souscervicale voire d'un défaut de contraction vésicale, le débit enregistré n'étant en effet que la résultante des forces d'expulsion vésicale et des résistances sphinctériennes. La morphologie de la courbe de débimétrie peut suggérer nue pathologie donnée. Une courbe aplatie, prolongée, évoque une sténose urèthrale ; une courbe polyphasique avec plusieurs jets successifs peut rendre compte soit d’une compression extrinsèque (prolapsus par exemple) ou d’un spasme itératif du sphincter strié (soit fonctionnel, soit psychogène soit neurogène dans le cadre général des dyssynergies vésico-sphinctériennes). L’existence d’une dysurie clairement objectivée et quantifié par l’examen urodébimétrique, pose toujours le problème de son mécanisme physiopathologique : s’agit-il d’un défaut de contractilité vésicale ou plutôt d’une obstruction sous cervicale (intrinsèque ou extrinsèque, organique ou fonctionnelle). L’étude pression-débit permet de résoudre cette question. Un monitorage des pressions endovésicales est effectué simultanément à l’enregistrement débimétrique. À tout instant, une analyse temporelle et spatiale du rapport pression-débit est effectuée et reportée sur un diagramme de valeurs normales (nomogramme d’Abrams et Griffith) décomposé en trois zones (obstrué, normal, équivoque). Bien évidemment, les mictions d’effectuant à forte pression et à faible débit procèdent d’un obstacle (et seront situées en zone « obstrué » sur le diagramme), les mictions d’effectuant à faible pression et à fort débit, étant situées dans la zone normale de ce même nomogramme. Modélisation Mathématique de la miction Le principe de cette méthode est la restitution théorique d’une débimétrie à partir d’une débimétrie réelle, à l’aide d’un modèle mathématique de la miction. La variation successive d’un ou plusieurs paramètres entrant dans la composition du modèle permet la reconstitution de la courbe qui doit être “in fine” strictement superposable à la courbe initiale. Les paramètres entrant dans la constitution globale du modèle font partie de 4 sous ensembles (mécanique de l’urètre, mécanique du detrusor, mécanique des fluides, excitation nerveuse vésicale). Chaque sous-ensemble est régi par une série d'équations basées sur des lois et principes tirés de la littérature. L'utilisation d'un support informatique permet un traitement rapide des données (moins de 2 secondes) et permet ainsi de prendre en compte l'intégralité des paramètres sans simplifier le modèle en perdant alors de sa précision. La restitution à l'aide du modèle mathématique et grâce à la variation d'un ou plusieurs paramètres d'une débimétrie théorique superposable à la débimétrie réelle permet de préjuger de l'importance de ce(s) paramètre(s) dans les mécanismes physiopathologiques d'une affection donnée. De plus, l'application de ces analyses modélisées avant et après traitement, permet de vérifier la cible d'action de ce dernier, cette cible étant donc le (ou les) paramètre(s) ayant dû être ajustés pour obtenir la courbe réelle après manipulation mathématique. La modélisation mathématique de la miction correspond à un besoin en tant qu'outil de recherche. Elle permet, grâce à l'élaboration d'un modèle dont on peut tester par approches successives le degré de pertinence par rapport à des courbes expérimentales tirées de la pratique quotidienne, de mieux appréhender les différents phénomènes physico-biologiques régissant l'équilibre vésico-sphinctérien. La modification des variables du modèle au cours de certaines conditions pathologiques permet de suggérer l'intervention de ces paramètres dans un dysfonctionnement vésical. L'individualisation de ces facteurs de variation potentiels du comportement vésico-sphinctérien permet de suggérer des cibles et des modes d'action précis pour des drogues connues ou à développer. L'observation de la variabilité des paramètres testés avant et après traitement (grâce à la conservation de certaines variables et à la restitution d'une courbe théorique superposable à la courbe de référence expérimentale réelle) permet de suggérer outre un mode d'action précis du produit, son influence quantitative dans la définition du modèle. Cependant, le caractère incomplet du modèle, son absence probable de stabilité dans les conditions pathologiques, invite à être prudent dans les interprétations. Sphinctérométrie La sphinctérométrie permet l'étude des résistances statiques et dynamique de l'urètre lors du retrait progressif de la sonde depuis la vessie jusqu'au méat urétral. La pression urétrale de clôture est le paramètre fondamental permettant de dépister une insuffisance sphinctérienne. Les tests dynamiques permettent d'une part de chiffrer le ratio de transmission des pressions vésicales à l'urètre lors d'efforts de toux successifs (pouvant ainsi rendre théoriquement compte du degré de cervico-cystoptose) et d'autre part d'analyser la composante active de la continence urinaire en dépistant notamment une fatigabilité sphinctérienne à l'effort. La mesure continue des pressions urétrales permet enfin de dépister une instabilité urétrale. L'urétromanométrie a un intérêt limité. L’étude du ratio de transmission est désormais totalement abandonnée par la plupart des équipes, car d’une faible reproductibilité, sensibilité et spécificité. La mise en évidence d’une insuffisance sphinctérienne est plus intéressante. Mais là encore la méthodologie d’enregistrement (cf. annexes) ne permet pas toujours de s’affranchir des causes d’erreur, des artefacts, des variations intra et inter-individuelles importantes. L'examen sphinctérométrique (profil urétral) permet l'évaluation des pressions de clôture urétrales. Différentes techniques peuvent être utilisées : microcapteur électronique, capteur perfusé à eau, fibre optique, capteur à gaz. Le "gold standard" actuel est sans contexte le capteur électronique. La reproductibilité sur plusieurs mesures effectuées dans une même séance est bonne. En revanche, cette reproductibilité est mal connue sur le long terme (examens séparés de quelques semaines). L'uretromanometrie permet l'étude des résistances urétrales lors du retrait progressif de la sonde depuis la vessie jusqu'au méat urétral. La pression urétrale maximale est le paramètre fondamental. La valeur de cette pression correspond grossièrement à la formule : P. Urétrale = (106 - âge) +/- 20 %. Toute élévation définit l'hypertonie urétrale, toute diminution l'hypotonie urétrale ou insuffisance sphinctérienne. L'étude du ratio de transmission des pressions vésicales à l'urètre est souvent utilisée dans l'expertise diagnostique et thérapeutique des incontinences urinaires à l'effort de la femme. Les études portant sur la reproductibilité de cette technique en fonction de l'intensité de la toux, du lieu de calcul (urètre proximal ou distal), et des profils successifs mettent le plus souvent en évidence une mauvaise reproductibilité de cette technique pour un même examinateur puis entre examinateurs différents. C'est pour cela que de nombreuses équipes notamment anglo-saxonnes accordent peu de valeur diagnostique ou thérapeutique à la valeur du ratio de transmission des pressions vésicales à l'urètre, privilégiant l'étude quantitative fonctionnelle des résistances sphinctériennes urétrales par l'analyse du Leak Point Pressure lors de la manœuvre de Vasalva, voire l'approche pragmatique clinique (test d'incontinence, étude du retentissement psychosocial des troubles par les échelles de qualité de vie). En effet, même si la valeur de la pression urétrale est bien reproductible lors d'un même examen et d'un examinateur à l'autre, de nombreuses variations sont observées en fonction de la technique et du matériel utilisé (microcapteur électronique, perfusion à eau voire à gaz), dépendant du système et de la rapidité de perfusion, de la compliance des tubulures, des cathéters utilisés, de l'orientation des capteurs. Il a de plus était démontré une faible reproductibilité du ratio de transmission sur un même profil lors des toux successives. Vasalva Leak Point Pressure Le Vasalva Leak Point Pressure a été récemment introduit en France. Il permet de quantifier la pression de fuite, c’est-à-dire la valeur de la pression intravésicale nécessaire pour obtenir une fuite urinaire au méat lors d’un effort de poussée effectué à glotte fermée (épreuve de vasalva). La méthodologie précise figure en annexe. C’est une manière grossière mais assez pertinente et pragmatique de quantifier la résistance urèthrale et de définir une incompétence sphinctérienne. Fluid Bridge Test Le test du pont liquidien (TPL) (“Fluid bridge test“ des anglosaxons), est un test permettant de détecter l’arrivée du contenu liquidien vésical dans l’urèthre proximal (région du col) pendant la toux. Ce test a été décrit pour la première fois en 1979 par Sutherst et Brown et proposé en tant que complément de la profilométrie au cours de l’examen urodynamique standard. La positivité de ce test pourrait signifier l’ouverture, la béance du col vésical pendant l’effort de toux. Il fut ainsi proposé comme moyen d’étude de l’incompétence sphinctérienne chez les femmes incontinente à l’effort. Principe et résultats Le test peut-être fait par une sonde à deux voies vésicale et urétrale (sonde ch. 8, voie vésicale s’ouvrant à l’extrémité distale de la sonde, voie urétrale 5 cm en proximal). La sonde perfusée selon la méthode de Brown-Wickham perd sa sensibilité aux changements de pression si la perfusion est arrêtée ou tout au moins inférieure à 1 ml/min (sonde sèche). Le fait de retirer la sonde jusqu’à ce que les capteurs urétraux soient placés en regard d’un point quelconque de l’urètre permet l’enregistrement simultané des pressions vésicale et urétrale. La perfusion de la voie urétrale est arrêtée dans la suite pour rendre ce capteur insensible aux changements de pression. En ce cas pendant l’effort de toux si le capteur urétral reste sec il n’enregistre pas de variation de pression et son tracé se dissocie de celui du capteur vésical (TPL -). En revanche, si pendant l’effort de toux l’ouverture du col vésical arrive au niveau des orifices du capteur urétral, le liquide passe de la vessie jusqu’aux orifices du capteur urétral établissant un " pont liquidien ". Ce pont liquidien restaure ainsi la sensibilité à la pression du capteur urétral et détermine alors sur l’enregistrement une courbe urétrale parfaitement similaire à la courbe vésicale (TPL+). En comparant la pression à l’emplacement choisi pour le capteur urétral avec le profil urétral préalable, on peut alors définir la situation exacte par rapport au col vésical. Une critique de cette méthode est le mouvement du capteur pendant la toux, mais selon Henriksson en 1977, ce mouvement peut être détecté car la pression dans ce cas serait immédiatement différente avant et après la toux. Méthodologie simplifiée du TPL La technique a été simplifiée par Abrams qui s’affranchit dans sa méthode de tout monitorage de pression. Un cathéter simple est placé juste distalement par rapport au col vésical, ce point est retrouvé par le retrait lent du cathéter jusqu’à l’arrêt d’écoulement du liquide. Pendant la toux, si le col s’ouvre il se reproduit une continuité de la colonne de liquide (urine) et on voit l’écoulement réapparaître par la sonde. Le test est alors dit positif. La critique suggérée étant l’artéfact de mouvement du cathéter pendant la toux. On pense que si le soutènement du col vésical par le plancher pelvien et les ligaments pubourétraux n’est pas suffisant, le col subirait un mouvement vers le bas pendant la toux faisant rentrer l’extrémité distale du cathéter dans la vessie simulant une incompétence du col. Ce test reste ainsi peu usité en raison de critiques méthodologique (difficulté de positionnement exact du cathéter et mobilisation involontaire de celui-ci pendant la toux) et physiopathologique (signification clinique de l’éventuelle constatation d’un col vésical ouvert). Néanmoins, ce test reste facile à réaliser, et complète efficacement sphinctérométrie et VLPP dans l’exploration de l’incontinence urinaire par incompétences sphinctériennes chez la femme. Sa méthodologie reste à perfectionner, et sa signification à clarifier. Conductance et compliance urétrale (“cross sectionnal aera”) Il s’agit d’une nouvelle technique permettant d’apprécier la compliance de l’urètre. Une sonde à ballonnet est introduite dans l’urètre. Dans ce ballonnet est infusé du sérum salé à une concentration et à un volume donnés. Deux antennes (une émettrice, l’autre de réception) permettent une analyse de la conductance : le signal reçu par l’électrode de réception est proportionnel à la quantité de liquide contenu dans le ballonnet. Par ailleurs, dans ce même ballonnet, est mesurée par un perthuis la pression intra-ballonnet. Ainsi à tout moment peut être calculée la relation pression intra -ballonnet vs conductance (proportionnelle au volume). Une analyse de la “distensibilité”, de la compliance uretrale peut ainsi être effectuée. Cette technique reste à évaluer en pratique, mais elle semble très prometteuse dans le bilan des incontinences et de certaines dysuries de la femme non neurologique. Explorations Electrophysiologiques Périnéales Les explorations électriques périnéales permettent d’investiguer les différentes voies neurologiques végétatives et somatiques, motrices et sensitives, proximales et distales, impliquées dans le contrôle des fonctions vésico-sphinctériennes, ano-rectales et génitosexuelles. Complétant les données cliniques, urodynamiques et morphologiques, elles sont d'un appoint important dans la mise en évidence d'une atteinte neurologique au cours des troubles urinaires, ano-rectaux et sexuels chez la femme. Outre cet intérêt diagnostique, elles permettent parfois de préjuger du pronostic de la lésion causale, d'appréhender les mécanismes physiopathologiques des troubles et de quantifier certain type de fonctionnement normal ou pathologique. Nous ne pourrons les détailler ici. Examen de détection à l’aiguille, étude des latences distales du nerf pudendal, analyse des latences réflexes sacrées sont les examens les plus usités dans ce type d’indication. Différents travaux ont fait état depuis quelques années, d'anomalies de type neurogène périphérique dans le plancher périnéal au cours de l'incontinence urinaire d'effort féminine. Ces anomalies ont été successivement mises en évidence par l'exploration électromyographique des muscles périnéaux (rafales pseudo-myotoniques, activité de dénervation, appauvrissement du tracé, sommation temporelle), puis par la perturbation des latences sacrées et des potentiels évoqués corticaux du nerf pudendal, données confirmées par biopsies neuro-musculaires, et d'une manière plus récente par un calcul de la densité en fibres du plancher périnéal. Le mécanisme est le même que pour l'incontinence fécale idiopathique et les périnés descendants, à savoir l'étirement des nerfs du petit bassin . Le mode d'expression de l'atteinte neurogène périphérique périnéale sera différent suivant la sélectivité éventuelle de l'atteinte et son caractère complet ou non. Une lésion associée des voies sensitives distales peut déterminer des troubles génito-sexuels (hypo ou anorgasmie, dyspareunie, hypo ou dysesthésie de la région vulvo-vaginale), une discrète modification de la perception du passage urétral des urines ou du passage des selles dans le canal anal. L'atteinte motrice induit une diminution des résistances du sphincter urétral, responsable d'une incontinence urinaire. Informations médicales avant examen urodynamique L’examen urodynamique est une mesure des pressions dans la vessie (qui contient les urines) et dans l’urètre (canal qui conduit les urines de la vessie à l’extérieur). Afin que vous soyez clairement informé(e) du déroulement de cet acte, nous vous demandons de lire attentivement ce document d’information. Nous restons à votre disposition pour vous exposer, en complément, toutes autres précisions que vous pouvez souhaiter. Pourquoi un examen urodynamique ? Cet examen vous a été demandé par votre Médecin Généraliste ou par un Spécialiste (Urologue, Gynécologue, Neurologue, Médecin de Rééducation) pour préciser le(s) mécanisme(s) de vos troubles urinaires (fuites urinaires, mictions trop fréquentes, nécessité de pousser pour vider la vessie, envie pressante d'uriner, douleur à la miction, ...). Il participe à l’analyse de vos troubles en complément de l’examen clinique et des autres examens complémentaires. Comment se déroule l’examen ? Après un examen clinique du périnée, l'examen urodynamique comporte en règle 3 parties : o la débimétrie consiste à uriner dans un appareil ressemblant à des toilettes et mesure la puissance du jet urinaire ; o la cystomanométrie est l'étude des pressions de la vessie. Après désinfection locale, une sonde de petit calibre, stérile à usage unique (ou un microcapteur électronique restérilisable) est introduite dans la vessie par les voies naturelles. La vessie est alors progressivement remplie avec du sérum physiologique stérile (ou du gaz) et les pressions automatiquement enregistrées. Il est parfois nécessaire d’associer un enregistrement des pressions abdominales par une sonde rectale (ou vaginale) de petit calibre et d’analyser l’activité du sphincter urètral (muscle fermant la vessie) par une électrode aiguille à usage unique (ou dans certains cas par une électrode de surface). Pendant le remplissage, il vous est demandé de signaler vos envies d’uriner, et à la fin de l’examen d’essayer d’uriner ; o la sphinctérométrie mesure les pressions dans le sphincter (muscle qui assure la continence des urines), le plus souvent à l’aide de la sonde de cystomanométrie qui est retirée progressivement hors de la vessie ; o L'examen est parfois complété lorsqu'on recherche une atteinte neurologique par une exploration électrophysiologique. Cette dernière consiste à examiner par une électrode (aiguille stérile à usage unique) le fonctionnement des muscles et des nerfs du périnée par des stimulations électriques peu douloureuses. La durée globale de l’examen est variable (de une demi heure à une heure). Précautions - il n'est pas nécessaire de boire ou d’être à jeun pour l’examen ; - abstenez-vous (si vous le pouvez) d'uriner avant l'examen (1 heure) ; - munissez vous de la liste des médicaments que vous prenez ; - le bilan ne peut être réalisé si vous avez une infection urinaire (douleur pendant la miction, brûlure urinaire, urines troubles, fièvre) ; - Prévenez nous en cas : d'allergie à des désinfectants locaux ou au latex, de prise de traitements anticoagulants, de port de pacemaker. Risques encourus : Tout le matériel utilisé est à usage strictement unique (sauf si un microcapteur électronique restérilisable a été utilisé, faisant alors l’objet de procédures de décontamination-désinfection validées). Aucune injection de médicament ou de produit de contraste (iode, etc..) ne sera effectuée. Malgré toutes les précautions, une gêne voire une douleur urétrale pendant la miction est possible pendant quelques heures ou jours au décours de l'exploration. Exceptionnellement peut survenir une infection urinaire pour laquelle il conviendra alors de consulter votre médecin et de nous prévenir. C’est pour cette raison qu’il est recommandé d’augmenter vos boissons après l’examen. METHODOLOGIE DE LA CYSTOMANOMETRIE Installation du patient : libre : decubitus dorsal, position assise, gynécologique, debout. Avant l’enregistrement : - faire uriner le patient et mesurer le RESIDU par sondage ; - le rectum doit être vide (préparation ou vidange digitale de l’ampoule rectale) ; - mise en place et fixation de la sonde de cystomanométrie ; - mise en place éventuelle de la sonde rectale (avec ou sans ballonet) ; (sonde vaginale chez la femme possible) ; - purge de toutes les tubulures de perfusion ; - mise à zéro des capteurs et du système en maintenant au niveau de la SYMPHYSE PUBIENNE l’extrémité des tubulures, puis raccord des sondes vésicale et rectale aux tubulures. Possibilité, (notamment pour la sonde rectale) de faire le zéro avec la sonde déjà fixée à la tubulure, puis introduire la sonde, une fois le zéro effectué, dans la vessie ou le rectum ; pour une valeur de référence, le zéro intra-rectal peut être effectué. - de manière systématique, quelque soit la manière dont est effectué le zéro (avec ou sans les sondes fixées sur les tubulures), après sondage du patient et raccordement des différentes tubulures sur les sondes rectale et vésicale, PURGER une nouvelle fois afin de s’assurer qu’il ne reste aucune bulle d’air, ou qu’il n’existe pas de fuite sur un raccord. - avant le remplissage : enregistrement de 10 secondes en faisant effectuer au moins deux efforts de toux avec vérification que l’effort de toux augmente simultanément et dans les mêmes proportions les pressions vésicales et rectales (SI SONDE RECTALE MISE EN PLACE) ; - vérification que la pression vésicale de base est supérieure (ou égale) à la pression rectale ; - débit de perfusion : 20 ml/mn d’eau distillée ou de chlorure de sodium à température ambiante si vessie neurologique; sinon inférieur ou égal à 50 ml/mn ; un remplissage à 100 ml/mn peut être toléré et la cystomanométrie analysée si tous les paramètres sont normaux (besoin, compliance et activité du détrusor) : en cas d’anomalie, un nouveau remplissage plus lent (50 ou 20 ml/mn) doit être effectué ; - l'arrêt du remplissage vésical se fait en fonction du contexte clinique et de l'apparition des évènements suivants : besoin impérieux, hypertonie vésicale (PV> 60 cm d'eau) avec ou sans fuite, douleurs, manifestations dysautonomiques. Figure 1 : vessie hyperactive avec contraction non inhibée précoce, survenant à partir de 50 ml de remplissage, avec préservation de la sensibilité détrusorienne (besoin perçu à 100 ml), compliance normale et réduction de la capacité cystomanométrique maximale (220 ml). Miction à pression élevée (95 cm d’eau). METHODOLOGIE DE LA SPHINCTEROMETRIE - position libre du sujet : decubitus dorsal, position assise, gynécologique, debout ; - volume vésical recommandé = 200 ml (ou moitié de la CVF si celle ci est inférieure à 100; la profilométrie peut aussi être réalisée vessie vide, avant le bilan urodynamique ; - retrait manuel ou automatique (vitesse de traction de 1 mm /sec recommandée) ; - si capteur électronique ou sonde monotrou perfusée : orientation à 3h recommandé ; - si sonde à eau, vitesse de perfusion à 2 ml/mn, vitesse de traction de 1 mm /sec ; - 3 évaluations du profil sont nécessaires : la plus faible valeur de la pression urétrale est retenue ; - la sphinctérométrie est à refaire en cas de contraction vésicale simultanée ; - paramètres à étudier : PUC [pression urétrale de clôture]; LUF (longueur urétrale fonctionnelle) optionnelle ; - la sphinctérométrie est réalisée prolapsus refoulé(s) (pince ou manuellement en prenant garde de ne pas comprimer l’urètre). METHODOLOGIE DU VASALVA LEAK POINT PRESSURE CONTRE INDICATION antécédent de pneumothorax NON INDICATION prolapsus à la vulve ou extériorisé DEROULEMENT DU TEST o position : demi-assise, sur table gynécologique o site du capteur : intra-rectal o déroulement du test : indépendant et au décours de la cystomanométrie o volume de remplissage vésical : 200 ml. o type d’effort : poussée abdominale o visualisation de la fuite : directe au méat, sondes otées o interprétation : 3 mesures (par palier); test positif (= fuite) : donner la valeur la plus basse des 3 test négatif (pas de fuite) : donner la valeur max de poussée abdominale atteinte