EXPLORATION URODYNAMIQUE
G. Amarenco
Service de Rééducation Neurologique et d’Explorations Périnéales,
Hôpital Rothschild, 33 bd de Picpus, 75571 Paris Cedex 12
Correspondance et tiré à part :
Docteur Gérard Amarenco
Service de Rééducation Neurologique et d’Explorations Périnéales,
Hôpital Rothschild, 33 bd de Picpus, 75571 Paris Cedex 12
gerard.amarenco@rth.ap-hop-paris.fr
Introduction
Les explorations urodynamiques ont pris ces dernières années un essor considérable. Ces
techniques permettent en effet une évaluation objective du fonctionnement vésico-
sphinctérien et partant une analyse physiopathologique précise des symptômes urinaires tout
particulièrement de l’incontinence. C’est ainsi le rôle essentiel de l’exploration urodynamique
que de préciser le ou les mécanismes des troubles urinaires. Parfois des éléments
étiopathogéniques, pronostiques, évolutifs, ou thérapeutiques peuvent être apportés par ces
explorations, mais cela n’est pas leur objet initial. Ces investigations ne doivent jamais être
isolées et se substituer à l’examen clinique pour la détermination diagnostique et
thérapeutique. Interrogatoire et examen physique restent absolument indispensables et
constituent le préalable avant toute réalisation d’un bilan urodynamique. L’édiction récente de
recommandations par les Sociétés Savantes et l’ANAES permettent désormais de mieux
préciser les algorithmes décisionnels et la place de ces investigations manométriques dans la
réflexion diagnostique et thérapeutique des troubles vésico-sphinctériens.
L’exploration urodynamique n’est pas réduite à une seule exploration. Elle comprends
plusieurs types d’examen. La plupart sont des examens manométriques, c’est-à-dire une
évaluation de la pression intracavitaire. La cystomanométrie (ou cystométrie) est l’exploration
la plus classique et la plus ancienne, permettant l’enregistrement des pressions intra-vésicales.
La sphinctérométrie analyse les pressions intra-urèthrales. L’examen uro-débimétrique
autorise la quantification de la miction. L’exploration électrophysiologique complète souvent
les examens manométriques en évaluant l’aspect fonctionnel sphinctérien et analysant
d’éventuelle composantes neurogènes dans la genèse des troubles.
Exploration urodynamique : les limites de l’interprétation.
L’exploration urodynamique est habituellement plus qu’un simple examen : sa prescription
n’est souvent que le prétexte à une consultation spécialisée dépassant la seule détermination
du mécanisme physiopathologique des troubles vésico-sphinctériens [et c’est là le rôle
premier des explorations urodynamiques]. C’est en effet le moyen pour le prescripteur
d’appréhender l’étiopathogénie des symptômes, le pronostic des troubles, et de solliciter un
conseil thérapeutique. Mais pour celui qui le réalise, le bilan urodynamique ne doit être, dans
un premier temps, qu’un examen complémentaire dont il faut connaître les aléas en terme de
fiabilité, de reproductibilité, de stabilité des résultats en raison des variabilités intra et inter
individuelles, des limitations techniques ... et des erreurs humaines inhérentes à la complexité
d’enregistrement du signal. C’est dire qu’une bonne dose d’objectivité, de neutralité, voire de
circonspection vis-à-vis des résultats bruts, “mathématiques” affichés par les instruments de
mesure, doit toujours guider non seulement l’examinateur mais aussi celui qui a prescrit
l’exploration et qui va en disposer. Au mieux, et paradoxalement, l’analyse des courbes doit
se faire de manière neutre, détachée du contexte clinique qui peut polluer, parasiter, forcer
l’analyse dans le sens de l’habitude médicale... ou d’une direction thérapeutique souhaitée par
le thérapeute (qu’il soit le prescripteur ou le technicien réalisant l’exploration). Respect des
définitions, prise en compte des artéfacts, déchiffrage pas à pas et rigoureux des paramètres
d’acquisition doivent permettre une analyse objective et non affective des données.
Cette analyse doit ensuite être resitué dans le contexte global du patient, clinique,
psychologique, parfois social : c’est là où l’interprétation commence, fonction des données
cliniques (interrogatoire et examen physique) et des autres examens complémentaires
(radiologiques et endoscopiques). Le médecin reprend son rôle, l’exploration urodynamique
ne restant qu’un de ses outils d’évaluation et de diagnostic. Acte médical, sa réalisation,
même si elle peut être protocolée et donc déléguée, est souvent modulée en fonction du
contexte clinique. En effet, l’établissement de procédures par grands groupes pathologiques
n’est pas toujours possible. De plus, la présence effective du médecin à toute étape de
l’enregistrement, permet de s’affranchir d’un certain nombre d’artéfacts et de difficultés
d’interprétation, et de modifier “sur l’instant”, le protocole de réalisation en fonction des
premiers éléments diagnostiques apportés par le début de l’examen : la constatation au cours
d’une débimétrie pré-cystomanométrie d’une dysurie avec résidu post mictionnel chez une
femme avec prolapsus consultant pour incontinence d’effort va probablement modifier la
conduite de l’examen urodynamique et faire rechercher des facteurs particuliers qui n’auraient
eut aucun intérêt au cours d’une “banale” incontinence urinaire d’effort ...
Les différentes techniques d’investigations urodynamiques
L’information au patient est un élément éthiquement élémentaire et médico-légalement
indispensable. C’est dire que comme pour tout acte médical, une information claire et
intelligible doit être donnée au patient tant de la part du prescripteur que de l’opérateur. En
annexe figure un exemple de notice d’information validée par le Comité Scientifique de la
SIFUD (Société Internationale Francophone d’Urodynamique).
L’exploration urodynamique a un coût (consommables stériles à usage unique) et donc un
prix. Avant la réforme attendue prochainement, la nomenclature est la suivante : débimétrie et
sphinctérométrie seules ne sont pas cotables. La cystomanométrie seule (avec ou sans
pression de référence rectale ou vaginale, et sans EMG) est codifiée K 40 ; la
cystomanométrie avec étude EMG couplée (aiguille ou électrode de surface), K 50. Depuis
quelques mois, la formalité d’entente préalable n’est plus nécessaire pour le bilan
urodynamique.
La Cystomanométrie
La cystomanométrie permet l'étude des pressions intra vésicales. L'examen débute par un
sondage vésical (sonde de cystomanométrie plastifiée ou microcapteur électronique). Les
pressions intravésicales sont alors étudiées au cours d'un remplissage progressif de la vessie
par un fluide (eau ou gaz). L'analyse simultanée des pressions rectales (afin d'éliminer des
artefacts éventuels) , des pressions urétrales (dépistage d'une instabilité urétrale) et de
l'activité électromyographique du sphincter strié utral est possible. Différents paramètres
sont analysés : sensibilité détrusorienne (perception par le patient de la chronologie normale
des différents besoins mictionnels), compliance vésicale (capacité de la vessie à s'adapter au
remplissage), capacité vésicale fonctionnelle et surtout activité du détrusor, l'existence de
contraction survenant à faible volume (moins de 200 ml) et supérieure à 15 cm d'eau,
définissant l'hyperactivité vésicale.
La sensibilité détrusorienne peut être altérée: une hypoesthésie (besoin trop tardif à plus de
400 ml. voire aboli) peut être secondaire à une lésion neurogène périphérique (atteinte
tronculaire du nerf honteux, atteinte plexique, atteinte radiculo-médullaire basse), ou
médullaire. Mais cette anomalie sensitive n’est pas forcément neurologique (séquelle des
détrusors claqués par exemple), ni forcément pathologique lorsqu’elle s’intègre dans le cadre
d’une mégavessie constitutionnelle (syndrome des mictions rares). La compliance vésicale
dépend des propriétés viscoélastiques de la vessie mais aussi, en partie, du contrôle
neurologique du tonus vésical. Certaines lésions périphériques (syndrome de la queue de
cheval, dénervation post opératoire) s'accompagnent d'un défaut de compliance comme
certaines anomalies de la muqueuse vésicale (cystite radique, cystite intersticielle, cancer de
vessie, cystopathies spécifiques, infectieuses, …). L'activité du détrusor est un des paramètres
fondamentaux. L'existence de contraction survenant à faible volume (moins de 200 ml) et
supérieure à 15 cm d'eau, définit l'hyperactivité vésicale, témoin cystomanométrique de la
libération du réflexe mictionnel. Ces hyperactivités vésicales peuvent être le fait de toute
lésion affectant les voies de contrôle neurologique au-dessus de l'arc réflexe primaire sacré
(lésions médullaires, du tronc cérébral, encéphaliques), ou encore de certaines lésions
neurogènes périphériques telles les neuropathies végétatives où l'on incrimine dans ces cas
non pas une interruption de l'inhibition corticale mais un déséquilibre dans la balance
sympathique-parasympathique. Cette hyperactivité est d'autant plus suspecte d'une pathologie
neurologique, qu'elle s'accompagne d'un trouble concomitant de la sensibilité (abolition de la
perception du besoin) et/ou d'une dyssynergie vésico-sphinctérienne (absence ou mauvais
relâchement du sphincter strié pendant la miction obtenue par contraction détrusorienne). La
mise en évidence d'une telle anomalie a de plus une valeur localisatrice, préjugeant d'une
lésion supra-sacrée et infra-protubérantielle. Mais l’hyperactivité vésicale peut aussi être
idiopathique (instabilité vésicale, vessie immature) ou secondaire à une obstruction sous
cervicale (sténose urètrale, maladie du col, compression extrinsèque par un trouble de la
statique pelvienne par exemple).
La méthodologie de la cystomanométrie doit être rigoureuse. Le protocole d’examen doit être
identique pour toutes les patientes (position du sujet, vitesse de remplissage,..) et parfaitement
explicite sur le compte rendu. Les paramètres analysés doivent toujours être référés par
rapport à une valeur normale. En annexe figure la méthodologie de la cystomanométrie telle
qu’elle a pu être définie par la SIFUD.
Globalement et en simplifiant, plusieurs types de vessies peuvent être décrit. La vessie
normale se laisse facilement remplir jusqu’à 400 ml, sans contraction parasite, sans élévation
des pressions témoin d’une bonne faculté d’adaptation visco-élastique, et avec une sensation
de besoin perçue avant 3000 ml. De manière optionnelle, une miction par contraction
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