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Revue
Ezzaitouna 3 (1 et 2), 1997, 52-65
"LE JAUNISSEMENT DES OLIVIERS A LA FIN DE L'IllVER :
II
-
CAUSES ET MANIFESTATIONS"
Ahmed TRIGUI *
Résumé:
Le jaunissement observé au début du printemps dans les plantations
d'oliviers est un phénomène qui touche particulièrement les feuilles
(généralement vertes) et intervient au cours de la période de reprise de leur
activité et donc de mobilisation conséquente des réserves. .
Les origines de ce phénomène sont assez variées. Leur étude montre
que, outre l'intervention des particularités variétales (Cv. à feuilles de
couleur vert pâle), ces manifestations généralisées sont le plus souvent la
conséquence de changements physiologiques, d'attaques parasitaires et/ou
pathologiques, ou d'origine chimique traduisant une carence minérale
prononcée. Cette dernière s'accentue notamment à la fin de l'hiver et au
début du printemps, lors des années à pluviométrie et/ou à production
(attendue) abondante, sur des sols peu riches en matière organique.
Cette variabilité des origines fait que les manifestations,
généralement peu perceptibles à l'oeil nu précocement, s'accentuent sous
l'effet de la durée de vie relativement longue (deux années et demie) des
feuilles d'olivier et de l'absence d'amendements qui amplifient davantage
les jaunissements et leurs répercussions néfastes sur le capital végétal et la
production.
Mots clés: Olea europaea 1., jaunissements, propriétés optiques des
feuilles et des arbres, carences minérales.
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Abstract :
The yellowness observed on the tunisian olive groveland appears specially
on the leaves at the end of the winter and the beginning of the spring, and
intervenes during the period of the trees activity recovery involving an important
mobilisation of trees mineraI reserves.
The origins of that phenomen on were too diverse. Beside the differences
between cultivars, often those manifestations were
the consequence of a mineral pronounced deficiency accented at the end of the
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* Directeur de recherche, Institut de l'Olivier
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winter and the beginning of the spring, during the years with an important rainfall
and/or on trees expecting a good yield, on sandy soils very po or in organic matter.
The colour changes of the olive trees beeing diversified, their accentuation
is due to the persistance of the leaves (life duration of 30 months) and to the
absence of mineral fertilization which increases that manifestation and its
repercussions on the trees and the yields.
Key words : O/ea europaea L., yellowness, spectral properties of leaves and trees,
mineral deficiencies.
1-
Introduction:
La manifestation à la fin de l'hiver et au début du printemps de
chaque année de phénomènes de jaunissement plus ou moins perceptibles à
l'oeil nu selon la zone, l'année et l'état des oliviers inquiète aussi bien les
agriculteurs que les techniciens d'autant plus qu'ils s'accentuent notamment
lors des années à pluviométrie et/ou à production (attendue) abondante.
Etant un arbre sempervirent (toujours vert), l'olivier présente un port
et une forme caractérisant la variété, et un développement dépendant des
conditions climatiques, de la qualité et de la fertilité du sol et des soins
culturaux qui lui sont prodigués.
Les manifestations extérieures, souvent peu perceptibles, traduisent
généralement l'effet des conditions intrinsèques et extrinsèques. Elles
s'extériorisent par des changements de couleur des feuilles (et par voie de
conséquence de la frondaison des arbres) qui passent du jaunissement
mitigé au brunissement franc.
L'objectif de la deuxième partie de la présente synthèse est de savoir
comment se manifestent les changements de couleur au niveau des feuilles
et de connaître leurs origines et leur étendue (manifestations localisées ou
généralisées), dont la perception et le diagnostic permettent de mettre en
évidence l'état physiologique et sanitaire des arbres.
II - Causes du jaunissement
Le jaunissement est un phénomène relatif dont la manifestation peut
être élucidée précocement grâce à une étude de la composition spectrale de
la feuille, et peut donner -selon son origine et les causes ayant aidé à son
installation- une couleur qui va de la simple pâleur (diminution de la
chlorophylle) à un ton jaune clair avec possibilité d'un brunissement de
l'extrémité des feuilles.
Etant donné sa localisation spatiale et temporelle et sa répétitivité
dans les plantations d'olivier, cette manifestation des arbres mérite d'être
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élucidée afin de faire la part des phénomènes intervenant dans la
décoloration des feuilles, à l'origine de cette réaction des oliviers.
La couleur verte d'une frondaison ou d'une feuille d'olivier est la
manifestation d'une activité photo synthétique normale, mais, la verdure est
une notion très relative puisque les feuilles de certains cultivars d'olivier
présentent un aspect vert pâle, alors que d'autres sont d'un aspect vert foncé
ou même grisâtre.
Généralement, outre l'artefact causé occasionnellement par le
pollen, généralement abondant chez quelques variétés dont la Chemlali,
déposé à la pleine floraison au niveau des feuilles, le jaunissement de
celles-ci peut
avoir des origines aussi multiples que diverses :
A -
Origine physiologique: une sénescence normale ou accélérée
des feuilles:
En vieillissant, la feuille saine d'olivier ne montre un début de
changement de couleur (perceptible à l'oeil nu) qu'aux dernières semaines
de sa vie active partir de l'âge de deux ans, si les conditions de stress
hydrique et thermique n'ont pas eu d'effet négatif prématuré accélérant sa
chute), à un changement de structure et à une diminution de la
concentration en chlorophylle, plus rapide que celle des autres pigments. A
cet âge avancé (coïncidant avec la période cruciale de la manifestation du
jaunissement), elle devient entièrement jaune, quelques jours avant sa
chute.
Par ailleurs, les stress hydriques, thermiques (TRI GUI, 1989 et
1993) ou consécutifs à des agressions parasitaires ou fongiques (fumagine)
peuvent aussi induire une sénescence prématurée des feuilles (TRIGUI,
1987 et 1992).
Or, le phénomène de jaunissement est parfois prononcé notamment
chez les arbres sénescents se trouvant sur des sols squelettiques ou filtrants,
et n'ayant pu développer de nouvelles pousses végétatives (donc sans
réserves minérales) au cours de l'année précédant le jaunissement.
Enfin, la réaction de l'arbre à un stress hydrique ou à l'hydromorphie
peut engendrer des réactions physiologiques importantes.
En effet,
1 - la succession d'années sèches entraîne souvent soit la formation
de pousses végétatives généralement très courtes et à entre-noeuds très
courts soit l'arrêt de développement, alors que le rameau d'olivier très âgé
prend un aspect dénudé que le jaunissement et la chute des feuilles âgées
accentuent. C'est le cas du jaunissement des olivettes sénescentes du sud
observé pendant et après les années sèches (1967-68-69 ; 1987-88-89 et
1994-95-96) ;
55
2 -
étant donné la sensibilité de l'olivier à l'asphyxie après une
hydromorphie prolongée, les stagnations d'eau dans les oliveraies sur sols
lourds et mal drainés notamment (zones de l'Enfida et de Tébourba par ex.)
et au cours d'années à pluviométrie abondante et surtout diluvienne gênent
le développement des arbres qui peuvent être le siège d'un brunissement
(localisé ou même généralisé) des feuilles (figure 1) plutôt que d'un
jaunissement.
Fig. 1 : Etude comparative des propriétés spectrales de la face supérieure
d'une feuille d'olivier saine (rfs ln) et d'une feuille d'olivier de même âge
mais brunâtre (rfs 2d) prélevée sur des oliviers subissant l'effet d'une
hydromorphie prolongée.
B - Origine pathologique ou parasitaire (TRI GUI et BALDY 1983,
TRI GUI, 1983-87) : une réaction à des attaques de ravageurs ou de
pathogènes inféodés à l'olivier
1 - La pullulation de la pyrale peut entraîner un jaunissement des
feuilles, généralement confondu avec une carence minérale. En effet, la
pyrale attaque les branches charpentières de l'olivier. Elle y creuse des
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galeries qui gênent la circulation de la sève, et par voie de conséquence la
photosynthèse; en 1986, les prospections faites en vue de l'étude du
phénomène dans les olivettes de l'extrême Sud ont permis de le montrer. La
manifestation de l'arbre à cette attaque diffère de celle d'une carence par le
fait que le jaunissement (dans ce cas précis) est localisé et ne touche que les
feuilles de la charpentière attaquée, ce qu'une vigilance et un diagnostic
appropriés permettent de mettre en évidence.
2 -
Par ailleurs, les acariens et d'autres pathogènes attaquent
l’olivier dans des situations édapho-climatiques assez favorables à leur
pullulation (humidité excessive, et/ou température élevée) provoquent des
'nécroses générant une décoloration d'abord partielle et localisée qui
peuvent gagner l'ensemble du limbe (cas du cyc1oconium sur les variétés
sensibles). L'observation minutieuse d'un connaisseur peut les diagnostiquer
aisément.
- La fumagine, surtout au début de l'attaque, induit des changements
peu perceptibles à l'oeil nu que le spectrophotomètre peut déceler
précocement (Fig. 2).
Fig. 2 : Evolution des propriétés spectrales dans la partie visible du spectre
de la face inférieure d'une feuille d'olivier: saine d'un an (1); subissant
l'effet d'un début d'une attaque de fumagine, (2) ; d'une attaque plus
avancée (5) et complètement noire (6).
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