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© Charles Larue – Les Yeux du Monde – 2015
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présidentielle de 1996, première élection démocratique dans l’histoire russe post-soviétique.
Si ce dernier est largement en tête dans les sondages, Eltsine profite de l’aide économique
extérieure pour sa campagne et s’assure le soutien des médias et des autres candidats lors
du second tour pour l’emporter avec 53% des votes. Néanmoins, aujourd’hui encore, l’issue
de cette élection est controversée, des fraudes massives étant suspectées ou, dans certains
cas, avérées.
Durant la décennie, de nombreux problèmes économiques secouent la Russie. Tout d’abord,
le Rouble, monnaie héritée de l’URSS : si celle-ci ne peut être qu’imprimée par la Banque
centrale de Russie, les autres Etats de l’ancienne URSS peuvent continuer à délivrer des
crédits. La Russie n’a donc pas complètement le contrôle de sa monnaie, jusqu’à la création
du Rouble russe en juillet 1993. Dans le même temps, le troc, courant durant la période
soviétique, se développe particulièrement, empêchant les entreprises de payer leurs salariés
et l’Etat de collecter l’impôt. L’impôt, justement, consiste en une multitude de taxes qui,
additionnées entre elles, peuvent dépasser 100% des revenus des entreprises, d’où des
fraudes importantes, tandis que la plupart des particuliers refusent de payer un impôt sur les
revenus. Cette difficulté à faire entrer l’impôt rend alors difficile l’accomplissement des
obligations budgétaires russes. Ainsi, en 1998, un an après la crise asiatique, la Russie entre à
son tour en crise : le 17 août, le Premier ministre Sergueï Kirienko dévalue le Rouble de 34%
tout en demandant un moratoire pour payer ses dettes étrangères. Le Rouble est alors
considéré comme surévalué et la dette trop importante, notamment à court-terme.
Rapidement, l’économie russe sombre, la bourse russe décline de 90% entre 1997 et l’été
1998, et le chômage explose.
B) Un repli sur ses propres conflits internes
Contrairement à l’URSS, superpuissance au même titre que les Etats-Unis jusqu’à la fin des
années 1980, la Russie n’a pas, dans les années 1990, les moyens de rivaliser au plan
géopolitique sur la scène internationale. Certes, elle récupère le siège permanent de l’URSS
au Conseil de Sécurité de l’ONU ainsi que la majeure partie des infrastructures et
équipements militaires hérités de l’Union Soviétique. Mais ceux-ci sont vieillissants et ne
peuvent être remplacés du fait des difficultés économiques de l’Etat. La préoccupation
première de la Russie réside plutôt en l’établissement et la sécurisation de son propre
territoire, issu de l’éclatement de l’Union Soviétique. Mais la réalisation de son unité
territoriale est rendue difficile par les velléités indépendantistes de certains peuples, en
particulier dans la région du Caucase. Ainsi, un conflit en Ossétie du Nord entre Ingouches et
Ossètes éclate en 1992. En parallèle, de l’autre côté de la frontière, l’Ossétie du Sud déclare
son indépendance vis-à-vis de la Géorgie, tout en souhaitant se réunifier avec l’Ossétie du
Nord, située en Russie. La Première guerre d’Ossétie du Sud commence ainsi en 1991,
voyant s’affronter la Géorgie aux Ossètes du Sud, appuyés par l’Ossétie du Nord et la Russie.
En juin 1992, la Géorgie et la Russie signent finalement un traité rappelant l’intangibilité des
frontières de l’Etat de Géorgie. Une autre région sécessionniste, l’Abkhazie, pose par ailleurs
problème à la Géorgie : une guerre de six jours, la Guerre d’Abkhazie, éclate d’ailleurs en
1998. L’Arménie et l’Azerbaïdjan se disputent dès 1992 autour de la province du Haut-
Karabagh. En 1992, un différend entre l’Ukraine et la Russie apparait aussi concernant la
Crimée, finalement reconnue comme étant ukrainienne en 1997 par le Kremlin en échange
d’un bail accordé à l’armée russe concernant la base navale de Sébastopol. Cette instabilité