Une campagne sur le salaire minimum aux Etats

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Une campagne sur le salaire
minimum aux Etats-Unis, par Gilles
Bourque
Comme je l’expliquais récemment dans un billet sur la conjoncture aux États-Unis, dans
certaines villes la situation devient tout à fait explosive en raison de la crise financière que
plusieurs d’entre elles traversent. Ignorant l’injonction d’un juge fédéral, les dirigeants de la ville
de Scanton, en Pennsylvanie, ont décidé de diminuer les salaires des 398 employés municipaux
(policiers, pompiers, fonctionnaires) au salaire minimum fédéral (7,25 $) !!! C’est là un cas
extrême. Mais pour des centaines de milliers de familles, la perte d’un emploi dans le secteur
manufacturier implique un nouvel emploi dans le secteur des services, souvent payé au salaire
minimum. D’où la campagne actuelle dans plusieurs États pour une hausse du taux du salaire
minimum.
Deux études récentes viennent d’ailleurs confirmer les impacts socioéconomiques bénéfiques
d’une telle hausse aux États-Unis. La première nous vient de l’Économic Policy Institute (EPI).
Elle est en lien avec la tentative du gouvernement démocrate de l’État du Massachussetts de
faire passer le salaire minimum de 8$ (soit 0,75$ supérieur au salaire minimum fédéral) qu’il est
actuellement à 10$ au 1er janvier 2013. Selon l’étude, une telle mesure toucherait plus d’un
demi-million de travailleurs et pourrait générer 4 500 nouveaux emplois directs en raison de la
hausse de l’activité économique entraînée par la mesure. « It would provide nearly $824 million
in additional wages to directly and indirectly affected families, who would, in turn, spend those
extra earnings. Indirectly affected workers—those earning close to, but still above, the proposed
new minimum wage—would likely receive a boost in earnings due to the “spillover” effect
(Shierholz 2009), giving them more to spend on necessities ».
Pour la petite histoire, le Massachussetts aurait été le premier État des États-Unis à passer, il y a
une centaine d’années, une loi sur le salaire minimum. Cette mesure s’inscrivait dans un
mouvement global de réforme progressiste qui a plus tard débouché sur le New Deal. Hier
comme aujourd’hui, une telle mesure permet d’aller à l’encontre des tendances lourdes de
croissance des inégalités et de crise économique larvée. La hausse du salaire minimum
entraînerait un transfert du revenu national des plus riches (qui épargnent une part importante
de leurs revenus) vers les plus démunis qui, eux, ne peuvent que dépenser en totalité ce qu’ils
gagnent, stimulant ainsi l’activité économique.
C’est la raison pour laquelle un groupe de Démocrates de la Chambre des représentants ont
lancé un mouvement pour hausser le salaire minimum fédéral à 9,80$. Encore une fois, l’EPI a
appuyé la démarche en démontrant dans une étude qu’une telle mesure déboucherait sur une
hausse des revenus des familles (28 millions de travailleurs touchés avec des revenus
additionnels de 40 milliards $) et sur un coup de pouce à la reprise (hausse du PIB de 20
milliards $ et création de 100 000 emplois). Ce sont les femmes qui seraient les plus
favorablement affectées par la hausse du salaire minimum puisque « the women comprise 54.5
percent of workers who would be affected by a potential minimum-wage increase makes it a
women’s issue ».
La droite est contre ce type de mesures parce que, selon le discours économique traditionnel, la
hausse du salaire minimum heurte les petites entreprises et tue l’emploi. Or, l’EPI récuse ces
idées en précisant que, aux États-Unis, les plus grosses et les plus profitables entreprises sont
aussi celles qui emploient le plus de salariés au salaire minimum (voir mon billet de demain sur
les chiffres de la semaine) !
BOURQUE, Gilles. Une campagne sur le salaire minimum aux Etats-Unis, (page consultée le
14 janvier 2013), [en ligne], Adresse URL :http://www.oikosblogue.coop/?p=12891
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