La Rhodoccocose équine
Dr. Sarah BUISSON
La rhodoccocose équine est une maladie qui pose problème et qui intrigue. Elle pose
problème parce que c’est une forme de « tuberculose du poulain » et qu’elle est donc très
séerieuse. Mais elle intrigue aussi car comment expliquer qu’une maladie ne touche ni les très
jeunes poulains, ni les très vieux, ni les adultes ? Voilà donc une maladie qui ne touche q’une
classe d’âge (1 à 6 mois) et encore si le temps le permet (temps chaud)! Depuis une vingtaine
d’années, en France (IPC de Dozulé) , au Japon, aux USA, ou en Australie de nombreuses
équipes de chercheurs consacrent tout leur travail à essayer de comprendre cette maladie. Ce
fléau pose donc problème aux éleveurs et aux vétérinaires qui, pour parvenir à l’éradiquer,
doivent essayer de travailler en étroite collaboration.
LA RHODOCCOCOSE EST UNE MALADIE RARE : FAUX
La Rhodocccocose est due à un germe, Rhodococcus equi, qui est naturellement
présent dans le sol et qui affecte les poulains de plus de 1 mois au moment où leur sensibilité
est la plus grande. En effet, c’est entre 1 et 3 mois que le poulain est le plus faible sur le plan
immunitaire car les anticorps ingérés avec le colostrum de la mère diminuent (immunité
passive) et les anticorps fabriqués par le poulain lui même ne sont pas encore assez nombreux
(immunité active). La contamination se fait soit par inhalation de poussière contenant les
germes pathogènes soit par ingestion de crottins contaminés. L’ennemi numéro un c’est la
température extérieure. C’est en effet quand celle-ci dépasse les 25° C que les bactéries se
multiplient à une vitesse folle et qu’elles sont dispersées dans l’air avec la poussière ambiante.
Ainsi, 5 à 17% des poulains peuvent être touchés et 80% des malades peuvent en mourir.
Une enquête récente en Basse-Normandie a permis d’établir que 63% des poulains
morts de broncho-pneumonie entre 1 et 6 mois d’age étaient atteints de Rhodoccocose. Les
facteurs prédisposant à l’infection par ce germe sont le mauvais statut immunitaire des
poulains, la virulence des souches mais aussi les conditions d’élevage.
LES CONDITIONS D’ELEVAGE SONT IMPORTANTES DANS LA PREVENTION
DE LA MALADIE : VRAI
Prévenir l’apparition de la Rhodoccocose c’est jouer sur les deux tableaux : médical et
environnement.
La prophylaxie médicale repose sur la vaccination des mères et sur le bon passage des
anticorps du colostrum. Pour cela, l’éleveur doit vérifier la qualité du colostrum à la naissance
(dosage des immunoglobulines G avec un Colotest) pour éventuellement supplémenter le
poulain si le colostrum n’est pas suffisamment riche (moins de 30g/L). Il devra aussi s’assurer
que l’ ingestion du colostrum s’est faite en quantité suffisante. En cas de doute, il est
recommandé de tester les Ig G dans le sang du poulain à 18 à 24 heures après la naissance en
vue d’une éventuelle perfusion de plasma hyper immun si ce dosage s’avère insuffisant.
L’immunité propre du poulain pourra être stimulée par la vaccination avec des auto-vaccins
préparés à partir de souches mise en évidence sur le haras en cas « d’épidémie ».
La prophylaxie sanitaire consiste à limiter la contamination de l’environnement en
réduisant le nombre d’animaux par parcelles, en privilégiant les sols en herbe plutôt que ceux
en terre (cf. poussière), en évitant la formation de poussière (arrosage éventuel, rotation…), en
assainissant les locaux ( ventilation et désinfection), en ôtant régulièrement les crottins des
paddocks et en évitant que tous les poulains mangent groupés au même endroit. Il faut
également limiter la contamination entre les poulains sains et les poulains malades en isolant
les animaux atteints en box individuels, en évitant les contacts avec des poulains extérieurs et
en détectant précocement les poulains malades
LA DETECTION PRECOCE DES POULAINS MALADES EST PRIMORDIALE
VRAI
Ce qui est frustrant avec la Rhodoccocose c’est que l’on a toujours un métro de retard.
La maladie est insidieuse et les symptômes sont tardifs est souvent frustres. Quand des
symptômes évidents apparaissent cela signifie souvent que la maladie est bien installée
depuis plusieurs semaines et que des lésions sont présentes. Les premiers signes à rechercher
sont un abattement et une baisse d’appétit (mamelles de la mère non vidées voire présence de
lait sur les postérieurs de celle-ci) . Un poulain nonchalant ou docile est un poulain
malade. Il convient donc de lui prendre la température immédiatement, laquelle est souvent
supérieure à 39° en cas de Rhodoccoccose. L’éleveur peut également relever la fréquence
respiratoire du poulain au repos (se mettre à l’extérieur du boxe, évaluer cette fréquence
quand le poulain dort, sans le déranger), une fréquence respiratoire supérieure à 40 battements
par minute est anormale. Tous ces paramètres justifient à ce stade l’intervention du
vétérinaire, mais ils ne sont pas exhaustifs.
LA RHODOCCOCOSE EST UNE MALADIE EXCLUSIVEMENT PULMONAIRE
FAUX
La forme pulmonaire est certes la plus fréquente du fait de la contamination par
inhalation des poussières. Elle se manifeste par une polypnée (respiution rapide) associée à
une baisse de forme, un manque d’appétit et une hyperthermie. La toux et le jetage sont des
symptômes beaucoup plus tardifs et indiquent un stade avancé de la maladie.
Mais il existe également d’autres formes de Rhodococcose notamment une forme
digestive associée le plus souvent à de la diarrhée. Rhodococcus equi peut également avoir
une forme ostéo-articulaire avec le plus souvent des arthrites septiques qui se manifestent par
une boiterie et une synovite d’une ou de plusieurs articulations.
A la moindre suspicion de la part de l’éleveur, il est important de pouvoir émettre un
diagnostic précis afin de traiter au mieux la maladie.
LE DIAGNOSTIC EST FACILE
FAUX
Les signes cliniques évocateurs de la Rhodoccocose sont une polypnée, un abattement,
une perte d’appétit , une augmentation de la température rectale avec parfois jetage, toux ou
boiterie. L’auscultation pulmonaire permet de mettre en évidence des bruits respiratoires
anormaux bien que la corrélation entre l’auscultation et la gravité des lésions ne soit pas
bonne. En effet, un poulain atteint d’abcès pulmonaires importants peut présenter une
auscultation normale et inversement une mauvaise auscultation ne traduit pas toujours des
lésions graves du poumon. Les analyses de laboratoire permettent d’orienter le vétérinaire
dans sa démarche diagnostique.
En ce qui concerne la prise de sang, les paramètres les plus intéressants à analyser sont
les globules blancs et le fibrinogène du sang. L’augmentation des globules blancs est le reflet
d’une infection et peut être très importante en cas de Rhodococcose (supérieure à 20 000
GB/µl) mais attention, une valeur physiologique de ce taux ne veut pas dire que le poulain
n’est pas malade. Le fibrinogène est un marqueur de l’inflammation et sa valeur est inférieure
à 2 ou 4g/l chez un poulain sain. Si le poulain est atteint de Rhodoccocose, cette valeur est
souvent supérieure à 5 ou 6 g/l. Mais là encore, ce paramètre n’est pas spécifique à cette
maladie et l’augmentation du fibrinogène peut être due à autre affection (comme une
infestation parasitaire par exemple).
En cas de forme d’arthrite, l’analyse du liquide synovial après ponction de
l’articulation permet au vétérinaire de déterminer s’il y a infection. Malheureusement le
germe n’est pas toujours trouvé (seulement 30% de prélèvements positifs).
La seule façon de poser un diagnostic de certitude est de réaliser un lavage trachéal,
c’est-à-dire de recueillir du liquide présent dans la trachée du poulain et de le mettre en
culture afin de déterminer si on est en présence de Rhodoccocus equi. Ce prélèvement
nécessite une tranquilisation du poulain puis une ponction de la trachée. La sérologie (dosage
des anticorps dans le sang) n’est malheureusement pas spécifique dans la mesure où il existe
des souches de Rhodoccocus equi non pathogènes, c’est-à-dire n’entraînant pas de maladie.
La sérologie ne donne qu’une indication pour le suivi de la maladie ou pour un dépistage
approximatif en comparant le sang de la mère et celui du poulain.
La radiographie et l’échographie pulmonaires permettent d’évaluer le degré
d’avancement de la maladie mais aussi de suivre l’évolution de la maladie au cours du
traitement.
LE TRAITEMENT EST LONG ET DIFFICILE : VRAI
Rhodoccocus equi est une bactérie intra-cellulaire donc très difficile à atteindre par les
antibiotiques car ceux-ci doivent rentrer dans les cellules infectées. Seule l’association
d’érythromycine et de rifampicine a une efficacité satisfaisante sur ce germe. Ce traitement
s’apparente à celui de la tuberculose chez l’homme ; il est donc très long (de 3 à 12 semaines)
et contraignant dans la mesure où il s’administre par voie orale trois fois par jour. Il est
d’autant plus efficace qu’il est mis en place tôt, d’où l’intérêt de diagnostiquer précocement
la maladie. Parfois, le poulain réagit mal au traitement (diarrhée, hyperthermie) et il convient
alors de réduire ou arrêter ces antibiotiques et de passer à d’autres qui seront moins efficaces.
Une surveillance étroite des poulains malades est importante car en plus des
symptômes décrits précédemment, les poulains peuvent présenter des signes de
déshydratation (absence de tétées), d’ulcères gastriques (stress de la maladie ou du
traitement), d’uvéite (infection généralisée à tout l’organisme). Les traitements de soutien sont
alors primordiaux dans la réussite de l’éradication de la maladie. Car si le traitement est
poursuivi correctement jusqu’à son terme, le poulain ne présentera pas de séquelles
pulmonaires à l’age adulte et pourra donc être exploité comme cheval de course.
Le suivi du poulain repose donc essentiellement sur la fréquence respiratoire,
l’auscultation pulmonaire, la température rectale, le dosage des globules blancs et du
fibrinogène dans le sang. Le traitement ne doit pas être interrompu tant que tous ces
paramètres soient redevenus normaux.
FIN
DIAPOSITIVES :
1 = (crédit = Dr. J-M BETSCH) les premiers signes de la maladie sont souvent un poulain
abattu et qui respire vite. La fièvre est souvent présente mais la toux et le jetage très variables.
2 = (crédit = Dr. J-M BETSCH) le diagnostic le plus fiable consiste à trouver la bactérie dans
le liquide de la trachée.
3 = (crédit = Dr. J-M BETSCH) vue au microscope des bactéries Rhodoccocus (nombreux
petits points violets) au milieu d’un globule blanc pulmonaire
4 = (crédit = Dr. Collobert Laugier) poumon d’un poulain mort de Rodoccocose : de
nombreux abcès ont insidieusement envahi les poumons au cours des semaines précédent les
premiers symptômes.
5 = (crédit = Dr. J-M BETSCH) pour suivre l’évolution de la maladie et savoir quand arrêter
les antibiotiques le vétérinaire suit plusieurs paramètres et attend qu’ils passent tous au vert.
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