L`allergie alimentaire est une pathologie fréquente en pédiatrie. Elle

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PRISE EN CHARGE DIETETIQUE DE L’ENFANT ALLERGIQUE AUX PROTEINES
DU LAIT DE VACHE ET MISE EN EXERGUE DE MESSAGES-CLES
POUR LA PRATIQUE QUOTIDIENNE
MADAME MARTINE ROBERT
DIETETICIENNE PEDIATRIQUE EN CHEF
HOPITAL UNIVERSITAIRE DES ENFANTS – REINE FABIOLA – BRUXELLES
INTRODUCTION
L’allergie alimentaire est une pathologie fréquente en pédiatrie. Elle affecte 6 à 8 % de la
population pédiatrique. Le traitement de l'allergie alimentaire est principalement diététique. Il
consiste en l'éviction de l'allergène incriminé. L'éviction doit être prescrite par un médecin à
l'issue d'un bilan allergique soigneusement conduit. L'explication du régime semble simple
mais sa mise en pratique l'est beaucoup moins. La tâche consiste à éviter les aliments
contenant les allergènes, à trouver des aliments de substitution et à maintenir un bon état
nutritionnel afin de permettre un bon développement staturo-pondéral, intellectuel et
psychomoteur.
ALLERGIE AUX PROTEINES DU LAIT DE VACHE
Chez le nourrisson, c’est l’allergie aux protéines du lait de vache qui est la plus fréquente.
Avant la diversification, le traitement sera simple. Si le lait maternel est toujours disponible,
on conseillera l’allaitement maternel exclusif. De rares cas d’allergie aux protéines du lait de
vache peuvent survenir sous allaitement maternel. Dans ce cas, une éviction du lait de vache
de l’alimentation de la maman sera recommandée ainsi qu’une supplémentation en calcium.
Si le nourrisson est nourri avec une préparation à base de protéines du lait de vache, celle - ci
sera remplacée par une préparation pour nourrisson à base d’un hydrolysat poussé de
protéines.
La diversification est plus délicate et peut être une source méconnue de protéines du lait de
vache. L’introduction d’une farine lactée, d’un biscuit contenant du lait ou même de yaourt ou
de petit suisse à la place du repas de fruits peut être faite à l’insu du médecin prescripteur qui
peut ainsi ne pas comprendre la persistance des symptômes du nourrisson allergique. Les
parents doivent être mis en garde contre la fausse sécurité que peut induire la lecture de la
liste des ingrédients se trouvant sur l’étiquette des produits vendus dans le commerce courant.
Pour un résultat optimal, les patients doivent recevoir une information complète. Le rôle du
diététicien devient primordial : il doit à la fois informer le patient et rassurer sans banaliser.
Prise en charge diététique de l’enfant allergique aux protéines du lait de vache et mise en exergue de messagesclés pour la pratique quotidienne ▪ M. Robert ▪
Symposium « Allergies – Maladies du futur ? » ▪ Institut Danone ▪ 21/10/2006 ▪1▪
ROLE DU (DE LA) DIETETICIEN(NE)
Dans un premier temps, le (la) diététicien(ne) réalise une anamnèse diététique afin de recenser
la présence d’aliments expliquant la symptomatologie, d’évaluer les ingesta et de préciser les
habitudes alimentaires. Ensuite, il (elle) explique le régime d'exclusion en insistant sur les
aliments autorisés. Enfin, il (elle) proposera un schéma alimentaire qui tient compte des
habitudes familiales, des idées de menu exempts de l'allergène tout en veillant à couvrir ses
besoins nutritionnels. Il est nécessaire d'informer les patients des risques de contamination de
l'alimentation par l'allergène au cours des préparations ménagères et industrielles ainsi que
leur apprendre à choisir les aliments du commerce sans risque.
Les causes de déséquilibre nutritionnel chez des patients présentant une allergie alimentaire et
donc soumis à un régime d'exclusion sont multiples. L'éviction d'un aliment aussi riche en
nutriments essentiels que le lait de vache est à risque d'induire une alimentation carencée
(protéines de haute valeur biologique, calcium, vitamine B12 …) si le diététicien ne propose
pas des aliments de remplacement. Le choix de ces substituts doit se faire avec beaucoup de
circonspection.
• Préparations à base d’un hydrolysat poussé de protéines
En première intention, les préparations à base de protéines du lait de vache seront remplacées
par une préparation pour nourrisson à base d’un hydrolysat poussé de protéines. En cas de
malabsorption avec symptômes digestifs, un hydrolysat poussé sans lactose et riche en
triglycérides à chaîne moyenne sera préféré.
Avant la diversification, la préparation pour nourrisson à base d’un hydrolysat poussé de
protéines est proposée en volume adéquat, adapté au poids de l’enfant. Chez un nourrisson de
6 à 12 mois, 500 à 600 ml d’une préparation pour nourrisson à base d’un hydrolysat poussé de
protéines, un repas de légumes et de viande et un repas de fruits permettent de couvrir les
besoins nutritionnels.
• Substituts à base d’acides aminés
Dans de très rares cas, on peut observer une réactivité aux traces de protéines du lait de vache
présentes dans les préparations à base d’un hydrolysat poussé de protéines. On peut alors
proposer des formules à base d’acides aminés spécialement profilées pour l’alimentation des
nourrissons et enfants présentant une allergie alimentaire sévère. Leur prescription fait l’objet
d’un remboursement récent en Belgique et doit être impérativement expliquée par un(e)
diététicien(ne).
• « Laits alternatifs »inadaptés
Pour de nombreuses raisons telles que le goût particulier, le prix ou les résultats jugés
insuffisants des préparations pour nourrisson à base d’un hydrolysat poussé, les parents ont
recours à d’autres « laits » qui peuvent être d’origine animale comme le lait de jument, de
chèvre ou de brebis ou à des formules d’origine végétale : « laits » d’amandes, noisettes,
châtaignes, riz, avoine. Ces "laits alternatifs" ne sont pas formulés pour répondre aux
recommandations nutritionnelles du nourrisson et du jeune enfant et les préparations d’origine
végétale ne répondent pas à la définition d’un lait. Ces "laits" sont pourtant positionnés pour
l'alimentation des bébés dont c'est la principale source alimentaire.
Les laits d’origine animale (brebis, chèvre et jument) doivent être évités en raison de
nombreux épitopes communs avec les protéines du lait de vache. Ils sont en outre trop riches
en protéines, carencés entre autres en acides gras essentiels, en fer, vitamines C et D.
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Les « laits » d’origine végétale (amandes, noisettes, châtaignes, riz, avoine …) proposés dans
les magasins diététiques sont carencés en acides aminés essentiels, en calcium, en fer, en zinc,
en vitamine D, de plus ils sont maigres et donc hypocaloriques.
• Laits de soja
Les laits de soja ne sont pas recommandés dans le traitement de l’allergie aux protéines du
vache en raison d’un risque d’allergie. Ils peuvent être proposés comme alternative aux
hydrolysats poussés après 1 an à condition d’être une formule infantile. En effet, le
remplacement d’un hydrolysat poussé de protéines par un lait de soja ou un dérivé de soja
(yaourt, pudding) pour adultes et vendus en grande surface peut provoquer des déficits en
énergie, en lipides, en calcium, en fer, en zinc, en vitamine D.
• Diversification
Une diversification trop précoce augmente le risque d’apparition ultérieure de manifestations
allergiques. Chez le nourrisson présentant une allergie aux protéines du lait de vache, il est
conseillé de ne commencer la diversification qu’après l’âge de 6 mois. Il est aussi souhaitable
de retarder au-delà de l’âge d’un an l’introduction des aliments réputés comme étant les plus
allergéniques (poisson, œuf, kiwi …). Les arachides, fruits à coques (noix, noisettes …) et
graines de sésame ne seront introduits qu’après l’âge de 3 ans.
CONCLUSION
L’instauration d’un régime d’éviction aux protéines du lait de vache ne se résume pas à la
remise d’une liste d’aliments permis et défendus. Les parents doivent être guidés dans les
choix alimentaires par des diététicien(nes) possédant une bonne connaissance des produits, de
la technologie alimentaire, des processus de fabrication.
Pour assurer la couverture des besoins nutritionnels de chaque patient, le (la) diététicien(ne)
doit proposer un régime équilibré tenant compte des goûts et de certaines habitudes afin
d’obtenir une bonne compliance.
Une évaluation régulière des ingesta est nécessaire afin de garantir le bon suivi et la
couverture nutritionnelle adéquate. Cette prise en charge idéale ne peut s’envisager que dans
le cadre d’une collaboration étroite entre le médecin prescripteur et le (la) diététicien(ne).
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