N° 26 Mardi 09 février 2016 Nous étions 31 membres accompagnés de nombreuses conjointes Conférence de Conférence Pierre Gayraud sur les épices Notre président, Eric, salue les membres présents et leur conjointe et note le retour de notre ami José. Nous remercions l'Institution Sainte Croix qui nous accueille ce soir ainsi que Robert qui s'est occupé des démarches et de l'agencement de la salle. Infos du Club : - Plaquette : actuellement nous avons environ 70 annonceurs sûrs. Il ne reste plus qu’une dizaine de jours avant la finalisation de la plaquette. Il nous faut encore des annonceurs. Mobilisez-vous ! - Gala du 12 mars : Les invitations sont disponibles à l’agence de Nicolas. Au dernier pointage il devrait y avoir une trentaine de rotariens allemands et une dizaine de rotariens hollandais. Prochains rendez-vous: Samedi 13 février 2016 District 1770 : 34e conférence de district à l’Escale de Melun Jeudi 11 février 2016 Bourse K. Conférence Jacques Treiner CinéParadis de Fontainebleau Mardi 16 février 2016 Conférence : Association le Goêland proposée par Nicolas Bayard. . Résumé en annexe (PDF) A la fin de la conférence , Gérard Adrien, prend la parole et nous présente 5 mélanges d’épices utilisés par le Chef Olivier Rollinger. Gérard a selectionné ces 5 mélanges d’épices car il les a déjà utilisés à une époque où ces mélanges n’étaient pas préparés.Gerard se rendait alors chez Izraêl rue François Miron à Paris,dans une minuscule épicerie où l’on trouve toutes les épices du monde. Gérard nous donne uniquement les épices entrant dans la composition des mélanges, en mentionnant le plat pour lequel celui-ci a été conçu. 1. Poudre des indes (très complexe et la plus achevée) Mélange : macis – noix de badiane (anis étoilé) – graines de coriande –pétale de lys – carvi – poivre de Sechuan – écorce d’orange amère – curcuma (frais en poudre) – gingembre – girofle – poivre de cayenne – poivre noir – vanille – cardamone verte. Plat : Saint Pierre retour des Indes en hommage à Mahé de Labourdonnais. 2.Poudre grande caravanne Mélange : cardamone – fenugrec – cannelle en bâton – girofle – cumin – niora – sésame – muscade – macis – poivre Plat :Selle d’agneau de pré salé à la broche, assaisonnement de grande caravane 3.Poudre du vent Mélange: cardamone – fenouil – canelle en bâton – cumin – badiane – maniguette Plat : Pigeonneau et oignon paille en cocotte à l’eau de vie de pommes. 4.Poudre Nevis Mélange : paprika – cumin – graines de moutarde – thym sec – origan sec – sauge sèche – ail d’Iran – fève de Tonka. Plat : coquilles Saint-Jacques Nevis, émulsion à la fève de Tonkin. 5.Infusion d’épices pour grog des iles Mélange : noix de coco râpée – lait de coco – canelle – vanille – girofle – noix de muscade – gingembre frais – cardamone. Ce mélange est infusé, additionné de petis fruits en cube et de pulpe de fruits de la passion et finalement corsé au rhum de Marie Galante pour accompagner un dessert fabuleux. Plat : Invitation au voyage, fruits et saveur des îles, grog au rhum de Marie Galante. La saga des épices La SAGA des EPICES de l'Antiquité à nos jours 1 - La période antique : Inde, Egypte, Phénicie, grecque, romaine : l'expansion du commerce des épices. 2 - L'âge d'or musulman : Ses conséquences géopolitiques ainsi que les répercussions sur le commerce des épices. 3 - La période ibérique ( Portugal et Espagne) : Expansion navale et territoriale, répercussion sur le commerce des épices , naissance des échanges mondiaux. 4 - La ruée des nations européennes vers les régions productrices d'épices : ( Pays Bas - Grande-Bretagne - Danemark - France) Accaparement de ces richesses et délocalisation progressive de ces ressources végétale vers d'autres continents. 5 - La situation actuelle du commerce des épices Son importance économique et ses enjeux stratégiques. Epices = ? Tout le monde connaît les épices mais qu’en est -il réellement ? Si vous recherchez sur internet : "liste d’épices" vous allez trouver une liste impressionnante classée suivant la partie de la plante utilisée. Or cette liste est insuffisante pour bien définir les véritables épices. D’après certains spécialistes il existe 3 grandes catégories : Les condiments : ce sont les produits consommés à côté de la nourriture principale, exemple beurre avec radis, moutarde, sel, petits oignons, mayonnaise, etc. Les aromates: issus des plantes aromatiques ou forte en goût telles que l'ail, l'oignon, le thym, le laurier, le céleri, le persil, le romarin, etc. Les épices : le poivre, la cannelle, le safran, le gingembre, le curcuma, le clou de girofle, la noix de muscade, le curry, le ras el ahout, le piment, le paprika, etc. La majorité est native de pays lointains LA SAGA DES EPICES : LA NAISSANCE DE LA MONDIALISATION DES ECHANGES J’ai eu l’occasion de visiter une librairie hors du commun appelée LE BLEUET situé dans un petit village de Haute - Provence dénommé BANNON. Mon œil fut attiré par un ouvrage dont le titre évocateur était le suivant : « 50 plantes qui ont changé le monde » écrit par Bill LAWS J’ai parcouru avec avidité cet ouvrage qui m’a donné envie d’aller plus loin pour mieux comprendre combien le destin de l’homme est lié à celui de nos amies les plantes. Sur les 50 espèces citées, un groupe est particulièrement intéressant à étudier par suite des bouleversements qu’il a causé dans l’histoire de l’humanité : LES EPICES LA SAGA DES EPICES 1 - La période antique : Inde, Egypte, Phénicie, grecque, romaine : l'expansion du commerce des épices D’après les recherches historiques, l’utilisation des épices par l’homme remonte à plus de 6000 ans. A titre d’exemple, il a été retrouvé sur le site archéologique de TERQUA en SYRIE des clous de girofle datant de 1700 ans avant JC ,provenant de l’ile de TERNATE située à côté de l’ile Nouvelle Guinée Papouasie (Indonésie). Très tôt, les populations d’Inde du sud surent maîtriser l’utilisation de nombreuses épices poussant naturellement dans cette région du globe, telles que le poivre noir, la cannelle, le curcuma. Les épices servaient à agrémenter la nourriture mais aussi à traiter de nombreuses maladies. C’est ainsi que prit naissance la médecine traditionnelle AYURVEDIQUE , très répandue encore aujourd’hui en Inde et qui est reconnue de nos jours par l’Organisation Mondiale de la Santé. Comment les épices ont pu arriver en Mésopotamie et en Egypte dés les Pharaons ? On a retrouvé à l’intérieur des momies Egyptiennes des épices telles que la cannelle, qui servaient à conserver les chairs. Apparemment le royaume de KOUSH, situé au niveau du SOUDAN actuel, fournissait à l’Egypte des pharaons les produits rares tels que l’ivoire venant d’Afrique centrale ou les épices qui arrivaient sur de petits bateaux faisant du cabotage le long des côtes de la Mer Rouge, de la Péninsule Arabique et de l’Inde. Un changement considérable s’est produit il y a environ 4000 ans lorsque les hommes de la péninsule arabique arrivèrent à domestiquer les dromadaires. Cela a permis d’organiser le transport de charges lourdes sur de longues distances en milieu hostile (désertique). Rapidement des routes caravanières furent crées joignant l’Inde à la Mésopotamie puis à l’Egypte et au Levant. C’est au Levant que se développa la civilisation Phénicienne, il y a 3200 ans. Elle brilla par son art du commerce et de la navigation. Mille ans avant notre ère les Phéniciens traversèrent le détroit de Gilbraltar. Ils transportaient dans différentes zones de la Méditerranée des métaux ( fer, cuivre, plomb, argent etc.) des bois du mont Liban mais aussi des épices telles que le safran, le poivre et le cumin. Ce sont les Phéniciens qui ont fait découvrir d’abord au Grec puis aux Romains l’intérêt des épices. Plus proche de nous la création de l’Empire Achéménide (– 566 à -330) par CYRUS le GRAND eut des conséquences notables sur les flux commerciaux de l’époque. Ce royaume immense rayonna de l’Asie centrale en passant par l’Egypte, l’Iran, la Turquie ainsi qu’une partie des rives ouest de la Mer Noire. Pour gouverner cet immense empire les souverains successifs mirent en place une division administrative autonome commandée par des satrapes (20 gouverneurs) qui rendaient compte directement au roi. Parallèlement, il fut construit un immense réseau routier reliant sa capitale aux autres territoires dont la fameuse route royale de SUSE ( Iran) à SARDES ( Turquie ) d’une longueur de 2600 km. Il fut aussi creusé un canal reliant la Mer Rouge au Nil pour faciliter les transports fluviaux. Darius 1er , finança vers – 508 les voyages du navigateur grec SCYLAX de CARYANDA qui explora les bouches de l’Indus ainsi que les côtes de la péninsule arabique et arriva en Egypte via la Mer Rouge. Toutes ces nouvelles liaisons « modernes » favorisèrent les échanges entre les contrées lointaines de l’empire, notamment le commerce des épices. Tout ceci fut possible grâce à l’apparition à Babylone de banquiers, pour la plupart d’origine juive, qui prêtaient l’argent nécessaire au financement de ces longues expéditions commerciales. Cependant l’immensité de l’empire ainsi que la grande diversité des peuples fut source de l’apparition de nombreuses rebellions, ce qui attisa entres autres la convoitise d’un petit royaume guerrier : la Macédoine. Le roi Perse Artaxerxés fut assassiné par son ministre eunuque Egyptien Bagoas. il fut remplacé par le roi Darius 3 qui n'avait pas une grande expérience pour gérer un si vaste empire. C’est le moment que choisit le roi de Macédoine Alexandre le Grand ( né en – 356 mort en -323), pour attaquer les Perses. En quelques années, il conquit l’ensemble du premier empire perse et arriva aux bouches de l’Indus. Au cours du voyage retour il fit explorer par sa flotte les côtes du Golfe de persique en vue de créer ultérieurement une route maritime vers l’Inde. Peu de temps après sa mort en – 323 à Babylone, son empire éclata sous la pression des ambitions de ses proches mais le commerce des épices survécu par suite des profits qu’il générait. S’en est suivie l’époque hellénistique (-323 à -146) marquée par un accroissement des échanges économiques et culturels malgré un orient éclaté Ceci fut possible grâce à la création de comptoirs autour des rives de la Méditerranée, mais aussi de la Mer noire telle que TREBIZONDE qui fut un des points d’arrivée de la route de la soie et des épices. Avant d’aller plus loin intéressons nous un instant à un grand bouleversement qui s’est produit à cette époque dans le monde : l’ouverture de la route de la soie par les chinois. L’empereur WUDI de la dynastie HAN (-141 à – 87) demanda à un de ses officiers , ZHANG QUIAN, d’aller vers l’ouest pour nouer des alliances diplomatiques afin de contrer des peuplades XIANGNU, qui peuplaient une vaste zone entourant la Chine en fer à cheval de la Mongolie à l’Asie centrale. Il ramena en Chine dans ses bagages des produits tels que la luzerne, le raisin et le vin. Il découvrit aussi l’existence des chameaux de Bractiane (animal à deux bosses), des ânes mais surtout une race de chevaux aux longues jambes originaire de la vallée de Ferghana (Ouzbekistan). L’empereur fut ébloui par cette race de cheval inconnue en Chine et décida d'en acquérir. En échange des chevaux, il daigna fournir pour la première fois, de la soie à un pays étranger, ce qui jusqu’alors était puni de mort. C’est ainsi que démarrèrent des échanges réguliers entre l’Empire du milieu et le reste du monde. D'abord la soie, puis au fil du temps, la porcelaine, l’ambre, les métaux précieux et les épices. Côté ouest ce sont les Parthes qui servaient d’intermédiaires et acheminaient les marchandises jusqu’aux abords des colonies grecques puis romaines. Concernant les épices, une branche de la route de la soie descendait via KASHGAR (Chine) vers le Pakistan et l’Inde au travers du col vertigineux Khunjerab pass 4.693 m . Mais revenons du côté ouest du monde connu. La montée en puissance de la République Romaine qui gagne la deuxième guerre punique aboutit à la destruction de Carthage en -146. Cela se traduit pour les romains par l’acquisition d’immenses richesses appartenant aux carthaginois ainsi qu’à leurs alliés grecs. Ceci entraîne un afflux de prisonniers aussitôt transformés en esclaves ce qui donne un vif coup de fouet au développement économique de Rome. La mise au pas de la Macédoine permet à Rome de s’étendre en Asie mineure et de rencontrer directement les richesses d’orient telles que la soie et les épices. Au départ, les romains étaient un peuple terrien frugal et citoyen. La nouvelle puissance et la richesse de l’Empire romain se traduisit par une évolution rapide des mœurs ainsi que des habitudes de consommation. C’est ainsi que les riches romains disposaient des toges en soie qui coûtaient une fortune. Ils organisaient des banquets avec des mets de plus en plus raffinés qui utilisaient beaucoup d’épices provenant de l’Orient. Il existait à Rome « La Via Piperatua » rue au poivre ( cf. Apicus -25 av JC) Dès cette époque on savait que les épices, et plus particulièrement le poivre, servaient à conserver les aliments. D’autres épices étaient utilisées pour la fabrication de parfums et de cosmétiques. La partition de l’Empire Romain en deux parties par l’empereur Théodose 1er au profit de ces deux fils en 395 (empire d’orient capitale, Byzance devenue ensuite Constantinople, et empire d'occident capitale Rome). Ce dernier s’effondra rapidement sous la poussée des invasions barbares telles que les Huns qui envahirent l’Italie .Des peuplades se réfugièrent sur la lagune : LE RIALTO en 421 et fondèrent la cité de VENISE. Romulus Augustule, dernier empereur romain fut déposé par le chef Ostrogoth, ODOACRE, en 476. Face à la déferlante des invasions, les byzantins assurèrent au mieux la défense de l’Italie car Rome était alors le siège unique de la chrétienté. En occident, on assista à un effondrement, voire à une régression des peuples. Seul subsista, au travers des monastères, une partie du savoir acquis durant les siècles précédents. C’est ainsi que l’on vit apparaître les jardins de simples et d' épices dans les couvents pour leurs vertus médicinales. L’invasion des LOMBARD en 568 a chassé les Byzantins de la ville de Ravenne capitale régionale du nord de l’Italie. En 589, le général BELISAIRE, arriva à protéger BYZANCE, de l’invasion des Huns qui menaçaient sérieusement la ville. Cependant, l’empire d’orient fit l’objet d’attaques incessantes de la part des slaves et des avars au nord et des lombards à l’ouest. Les relations à l’est avec l’empire perse SASSANIDE étaient plus complexes. Ce dernier détenait le monopole du commerce de la soie et des épices par suite de sa position géographique. Il existait avec Byzance un mélange de courants d’affaires importants et de conflits territoriaux quasi permanent avec son puissant voisin jusqu’en 641. Une nouvelle route terrestre de la soie fut établie plus au nord longeant la Mer caspienne et arrivant en Crimée. Cet équilibre géo- stratégique fut mis à mal avec l’apparition de la religion musulmane. 2 - L'âge d'or musulman MAHOMET ( 570 – 632) eut la révélation divine au travers de l’ange Gabriel. Il fonda un groupe de croyants qui s’appelèrent les Musulmans. Après des débuts difficiles, ils furent obligés de se réfugier à MEDINE. MAHOMET gagna la bataille de BADR en 624 contre la caravane annuelle en direction de la Syrie, organisée par les marchands QURAYCHITES originaires de la MECQUE. Grâce à cet exploit, MAHOMET arriva progressivement à conquérir la péninsule arabique et ainsi contrôler les routes caravanières qui servaient, entre autres, à transporter les épices et l’encens de l’Arabie heureuse (Yémen) vers le royaume NABATEEN (sud du Jourdain, nord Arabie) dont la capitale était PETRA, pour ensuite se rendre aux ports du Levant ou d’ ALEXANDRIE. Au cours des trois décennies qui suivirent la mort du Prophète MAHOMET, les 4 califes qui lui succédèrent, dit les » biens guidés", envahirent la Syrie, l’Iran, la Palestine (prise de Jérusalem en 638) et l’Egypte, grenier à blé de Byzance. Face à cette invasion, les grecs byzantins quittèrent précipitamment la ville d’Alexandrie en 641, tandis que les Coptes et les juifs accueillirent à bras ouvert l’armée Musulmane. Ils purent ainsi poursuivre leur commerce avec l’Afrique, l’Arabie et l’Inde moyennant une redevance aux vainqueurs (la Jizya) accompagnée d’une liberté restreinte. C’est à partir de cette période que les courants commerciaux vers le nord de la Méditerranée se dirigèrent progressivement vers VENISE. L’expansion musulmane sous la dynastie des OMEYYADES ( capitale DAMAS) s’est poursuivie à l’ouest avec la conquête de l’Espagne en 711 mais fut définitivement stoppée en 732 avec la bataille de Poitiers. Les troupes musulmanes refluèrent peu à peu vers la péninsule ibérique. En 747 débuta la révolte contre les Omeyyades qui se conclut par la prise du pouvoir par les ABASSIDES (750 - 1258 capitale Bagdad) après la bataille du grand ZAB en 750. Côté est, la progression des armées musulmanes se poursuivit jusqu’en 751 avec la bataille remportée contre l’armée chinoise à Talas près de la ville de TARAZ (Kirghizistan). Cette victoire eut pour conséquence de récupérer auprès des prisonniers chinois, la technique de fabrication du papier, qui jusqu’alors, était jalousement gardée secrète. Ce nouveau support de la pensée permit de faciliter la propagation de l’Islam. La ville de SAMARCANDE, devint le haut lieu de l’imprimerie des textes sacrés (Coran). Ces derniers furent diffusés sur les routes caravanières par les marchands arabes. Pendant ce temps, Venise étendait ses comptoirs commerciaux autour de la mer Adriatique et de la Méditerranée orientale. En 828 des marchands vénitiens volèrent à Alexandrie les reliques de Saint Marc aux Chrétiens Orthodoxes grecs . Venise se trouvait en terme de notoriété, de facto, à égalité avec Rome et s'éloignait ainsi un peu plus de la dépendance politique de Byzance. Pendant ce temps, une cohabitation entre l'empire romain d'orient et l'empire Abbasside se mit en place, les chrétiens pouvaient continuer à se rendre en pèlerinage à Jérusalem sans difficulté. Il en fut autrement avec l'invasion des SELJOUKIDES, tribus turques d'origine OGHOUZES, natives du nord de la mer d'Aral. Elles envahirent, dans un premier temps, le nord de l'Iran, et prirent Bagdad en 1055 . Ils battirent l'armée Byzantine de l'empereur romain 4 DIOGENE à MANZIKER en 1071 et prirent enfin Jérusalem en 1078 où Ils massacrèrent la population civile. Ils interdirent ensuite l'accès aux lieux saints des pèlerins chrétiens qui, jusqu'alors, étaient libres sous la domination arabe. L'empereur romain d'orient Alexis 1er Comnène demanda l'aide de Rome. Le Pape Urbain 2 au cours du concile de Clermont le 27 novembre 1095 lança un appel à la croisade et promit le pardon des péchés à tous ceux qui y participeraient. C'est la flotte génoise qui aida les croisés au siège d'Antioche en 1097, moyennant finances, en apportant le bois nécessaire à la construction des machines de guerre. Une deuxième flotte génoise apporta la logistique pour la conquête de Jérusalem le 13 janvier 1099. En 1144, l'Etat latin du Comté d'Edesse est envahie brutalement par ZENG Atabey de Mossoul et d'Alep. Raymond de Poitiers ( oncle d'Aliénor d'Aquitaine) est obligé de faire allégeance à Byzance qui envoie une armée en attendant des renforts d'occident. La deuxième croisade est lancée ( 1147 - 1149). Deux armées se mirent en mouvement, l'une commandée par l'empereur romain germanique Conrad 3 de Hohenstaufen et l'autre par Louis 7 de France. Ce dernier partit en croisade avec son épouse Aliénor d'Aquitaine qu'il répudia quelques années après. L'empereur byzantin Manuel 1er Comnène, laissa passer avec méfiance les troupes croisées sur son territoire. Pendant ce temps Roger 2 de Sicile s'empara de Corfou et pilla, entre autres, Thèbes et Corinthe. Manuel 1er demanda l'aide de Venise pour terrasser la flotte normande venant de Sicile. En 1156, Manuel 1er doit faire face à l'invasion de Chypre par le nouveau prince d'Antioche Renaud de Châtillon. Il s'empressa, avec une rapidité fulgurante, de traverser son empire et mettre à la raison ce prince félon d'une grande cruauté. Le règne de Manuel 1er, se caractérisa par le retour d'une prospérité inégalée depuis plusieurs siècles de l'empire Byzantin. Les échanges commerciaux se développèrent rapidement et Constantinople devient la plaque tournante commerciale pour de nombreux marchands du monde connu. Cependant en 1171, il saisit toutes les possessions acquises au sein de son empire par Venise. Cette dernière envoya sa flotte de 120 navires de guerre mais celle- ci fut battue par la flotte byzantine grâce en partie à une épidémie qui s'abattit sur les équipages vénitiens. Passons rapidement à la quatrième croisade qui eut d'immenses répercutions sur le devenir de l'empire Byzantin ainsi que sur les échanges commerciaux. Le chef de cette croisade devait être Thibaut 3 de Champagne mais ce dernier mourut au cours des préparatifs et fut remplacé par Boniface de Montferrat. Ce dernier demanda l'aide de Venise pour transporter en terre sainte les troupes croisées. Le prix demandé de la traversée étant exorbitant, les croisés se trouvèrent à court d'argent. C'est à ce moment là que le Doge leur proposa de prendre le ville de Trieste et de Zara pour le compte de Venise ce qui fut fait. Boniface de Montferrat se laissa convaincre par Alexis 4 Ange, fils de l'empereur Isaac 2 Ange déchu par son oncle du trône impérial, de conquérir Constantinople. En échange, il avait promis d'effacer la dette contractée auprès de Venise par les croisés ainsi que de les aider à conquérir l'EGYPTE. Le doge donna son accord pour attaquer Constantinople. Celle ci fut prise en 1204 et mise à sac ( Chevaux de St Marc ) La famille impériale se refugia au royaume de Nicée. Une partie de l 'empire fut transformé en royaume latin par les Francs l'autre, plus petite, par Venise avec le duché de Naxos ( Marco Sanudo). Le commerce vers l'orient fut accaparé par Venise au détriment de Constantinople et de GÊNES pendant de nombreuses décennies. Ce fut aussi le départ d'un net affaiblissement économique et politique de l'empire d'orient. Cependant l'empire byzantin n'avait pas dit son dernier mot. Le royaume de NICEE se trouvait coincé entre le royaume romain d'orient et le sultanat de ROUM. Cependant, il profita indirectement de l'avancée des troupes de GENGIS KAN ,qui envahirent en 1222 la partie est du sultanat de ROUM ( Est de l'actuelle Turquie). Pendant plusieurs décennies, de nombreuses tentatives pour reconquérir Constantinople échouèrent jusqu'à l'arrivée au pouvoir de Michel 8 Paléologue. Ce dernier, brillant général, issu de la noblesse Byzantine pris le pouvoir au détriment de la famille régnante LASCARIS. Il signa en 1261 avec Gêne le traité de NYNPHAEON, afin de disposer d'une marine puissante et octroie en contrepartie, aux Génois, l'exclusivité du commerce très lucratif de la Mer noire qui depuis la quatrième croisade était aux mains des vénitiens. Il passa aussi un accord avec le Khan Mongol : HOULAGOU KHAN ( marié à une chrétienne) qui avait envahi l'est le sultanat de ROUM. Ce fut la dernière fois que l'empire byzantin réussit à renaître avant de décliner lentement sous les coups de butoir des attaques ottomanes. C'est durant la période s'étalant de 1271 et 1295 que MARCO POLO séjourna avec son oncle en Chine et se mit au service de l'Empereur Mongol KUBILAI KHAN (petit fils de Gengis Kan) avant de revenir par la route nord de la route de la soie qui passait par Trébizonde. Les Ottomans réussirent à traverser le détroit et prendre GALLIPOLI en 1354. Trente ans après, la bataille du Champ des merles en 1389 au KOSOVO, gagnée par les Ottomans contre la coalition Serbe, Albanaise et Hongroise, marqua le début de la présence durable des Ottomans en Europe. Cependant la poussée ottomane pour conquérir CONSTANTINOPLE fut momentanément stoppée par suite l'invasion de l'Anatolie par les troupes de TAMERLAN qui se conclut par la défaite du sultan ottoman, BAYEZID 1er à la bataille d'ANKARA en 1402. L'empire Byzantin connut 20 ans de répit, avant que les ottomans lui donnent le coup de grâce avec la prise de Constantinople en 1453 par le sultan Ottoman Mehmet 2.. La route terrestre nord des épices s'est trouvée coupée. Il restait la route sud qui débouchait en Egypte au port d'Alexandrie. Les mamelouks maître du pays en profitèrent pour augmenter d'une façon substantielle les taxes prélevées sur les épices auprès des marchands Vénitiens. Parallèlement, en Occident, la consommation d'épices continuait à augmenter rapidement . On assista à une bulle spéculative qui eut pour effet de faire exploser le prix de ces denrées. au point qu'un kilo de poivre coûtait alors l'équivalent d'un kilo d'or. Venise vit régresser ses juteux marchés et toute l'Europe de la fin du moyen âge cherchait à trouver une route de remplacement pour contourner cet embargo. Pendant ce temps, à quelques milliers de kilomètres à l'est, un événement exceptionnel peu connu en Europe se produisit. L'empereur de Chine YONGLE de la dynastie MING, chargea l'amiral ZHENG HE d'explorer (1405 - 1433) l'océan Indien à la tête d'une flotte de guerre surpassant l'ensemble des flottes de guerre du reste du monde tant en quantité qu'en technologie. Elle avait aussi pour mission d'évaluer le potentiel économique des pays rencontrés tel que les épices. 3 - La période ibérique : (Portugal et Espagne) Le XVI em siècle : l'âge d'or portugais Ce fut l'oeuvre du Portugal, petit pays de 800.000 habitants, au porte du détroit de Gibraltar. Pourquoi? • Le Portugal avait chassé les Maures depuis plus de 200 ans (1238). Cependant les rois portugais successifs avaient su protéger la communauté musulmane. Elle avait un quartier dédié à Lisbonne où elle possédait mosquées et madrassa. La plupart étaient des artisans et ils étaient tenu à payer un impôt spécial. • Lisbonne conserva également au moment de sa Réconquista , la communauté juive qui occupait une place importante dans le commerce du pays. Le royaume du Portugal accepta aussi d'accueillir ultérieurement une grande partie des juifs avec leur savoir faire et leur argent expulsés d'Espagne par Isabelle la catholique. • Lisbonne était devenue au fil du temps une escale entre Gènes et Bruges puis Anvers. La ligue des villes Hanséatiques ( 1241 - 1648 traité de Westphalie) mit en place à l'aide de navires "cogue" un commerce nord/sud par voie maritime avec l'aide des génois. Cette voie maritime était à l'époque le moyen de transport le plus sûr et le plus économique. • C'est à partir d'Anvers ( création bourse 1409) que les portugais, alliés aux génois s'approvisionnaient en minerai d'argent, en échange des épices très recherchées par les consommateurs d'Europe du nord. Comment ? Grâce à la politique visionnaire de plusieurs souverains successifs qui avaient deux objectifs: Faire obstacle aux ambitions Castillanes en faisant du Portugal le fer de lance de la "Republica Christiana" pour s'assurer le soutien de la Papauté et des autres royaumes européens. Neutraliser les tensions internes en offrant un exutoire à la noblesse terrienne . Cette expansion commerciale renforcerait le trésor royal ainsi que celui des marchands des villes. • Jean 1er ( très cultivé) découvertes de Madère 1419 et des Acores 1427 • Henri le navigateur qui créa l'académie navale à SAGRES 1416 et un chantier naval à LAGOS au sud du Portugal + capitalisme d'Etat • Jean II exploration de la voie terrestre et découverte du cap de Bonne Espérance • Manuel 1er : Découverte de l'Inde et des iles aux épices La conquête de l'Atlantique prit une petite centaine d'année ( 1410 - 1502) au prix de nombreuses vies humaines. Environ 10 % de la population mâle portugaise périt en mer. Dans un premier temps, Il fallut se réapproprier les connaissances navales arabes mais aussi inventer des bateaux capables de remonter au vent ( boutre) et de se diriger avec un véritable gouvernail (cogue) . Il a également fallu Innover dans les conduites de la navigation ( astronomie, boussole) mais aussi découvrir les courants marins ainsi que les cartes des vents de l'ensemble de l'Océan atlantique ( portulans), le cycle des moussons, etc.. Une véritable prouesse technologique en un temps si court. Face au refus des rois portugais, Christophe Colomb qui cherchait lui aussi la route des épices, découvrit en 1492 les Amériques pour le compte de la couronne espagnole Six ans plus tard, en 1498, fut ouvert la route du Cap de Bonne Espérance, qui entraina un effondrement brutal du commerce Vénitien des épices ainsi qu'une perte considérable de taxes pour le gouvernement Mamelouk d'Egypte. Venise réagit en s'alliant aux Mamelouk ainsi qu'au peuple ZAMORIN ( région de CALICUT) pour tenter de déloger les portugais de l'Inde. Une flotte de guerre fut construite rapidement à SUEZ. Après un premier succès mitigé à CHAUL une deuxième bataille navale se produisit quelque temps après, le 3 février 1509 au large de DIU ou la flotte Mamelouk fut écrasée par la flotte Portugaise.( Francisco ALMEIDA) La stratégie portugaise tenait dans la formule suivante: "Faire du commerce là où c'était possible et faire la guerre là où c'était nécessaire" La stratégie espagnole était: Faire la guerre en s'emparant des richesses des Maya puis des Incas (or et argent) et s'approprier les terres arables des nations vaincues. Le commerce des épices fut pris directement en main par la couronne portugaise sous l'impulsion du vice roi des Indes Francisco ALBUQUERQUE. Des échanges triangulaires se mirent en place: INDE : Import ( or, argent) Export ( épices, textiles) Afrique de l'est : Import ( textile) PORTUGAL : Import ( épices) Export ( or) Export ( argent provenant d'Europe du nord) Cependant, en parallèle, fut mis en place une politique de bâtiments royaux corsaires, sur le même modèle que celui existant en méditerranéen, pour calmer la noblesse. La prise d'Ormuz permit de contrôler la voie terrestre de la route des épices pour les marchés du Moyen Orient ce qui entraîna des revenus substantiels au trésor royal portugais. De plus Ormuz était un grand centre d'exportation de chevaux tandis que GOA exportait du riz et du fer dans cette direction. Prise de Malacca en 1511 par ALBURQUERQUE qui s'allia avec les riches marchands KELINGS qui tenaient une place importante dans le commerce du Bengale et des zones situées à l'est de Malacca. Des expéditions maritimes conjointes furent entreprises notamment aux Moluques( Indonésie) jusqu'en 1518. C'est ainsi qu'est né le système des Carreiras (route maritime de commerce royal) Le roi "épicier", comme le surnommait le roi de France, François 1 er, subissait une forte opposition interne, sur cette politique mercantiliste, au niveau de la noblesse traditionnelle portugaise encouragée en sous- main par la couronne d'Espagne. Un virage stratégique fut pris par le troisième vice roi des Indes, Lapo SOARES. Il était favorable au libre échange. Il mit en place en 1518 la "Grande Soltura" la grande liberté où le commerce privé fut autorisé sous forme de concession ,moyennant une redevance payée au trésor. Le commerce privé s'est en particulier développé dans la mer de Chine méridionale à partir des ports voisins de MACAO et de CANTON. CANTON était la porte d'entrée des épices utilisées en Chine Le volume importé d'épices était du même ordre que celui expédié en Europe via la route du CAP. Cependant leur origine était différente puisqu'elles provenaient des Iles Indonésiennes et non du sud de l'Inde. L'empereur de Chine ayant interdit à ses sujets de commercer directement avec le Japon, ce furent les commerçants portugais qui servirent d'intermédiaire. C'est avec l'aide des WAKÔ, (pirate japonais) que les marchands portugais ont pu atteindre le Japon en 1542 (HIRADO) à la suite d'une tempête. L'ouverture d'une liaison maritime entre MACAO et le sud du Japon (HIRADO) en 1543 par des commerçants portugais attira l'attention des jésuites. La compagnie de Jésus, fondée en 1540 dans le but de lutter contre la réforme, se mit rapidement à vouloir évangéliser le Brésil, l'Afrique et l'Asie. Les jésuites arrivèrent à GOA en 1542 . Puis, François Xavier (1549) décida dans un premier temps d'évangéliser le Japon mais ses successeurs ont voulu aussi participer activement au commerce bilatéral de la soie chinoise et du minerai d'argent japonais. Ce fut rapidement la route commerciale la plus profitable de l'ensemble de l'empire asiatique portugais. Il faut garder à l'esprit, un autre événement majeur: l'apparition via l'ESPAGNE de l'inquisition au Portugal à partir de 1531 mais réellement effective à partir de 1540, puis quelques années plus tard "exportée" à GOA (1561 - 1580). Malgré des succès commerciaux indéniables, le royaume du Portugal se vit confronter à un dilemme . Comment un petit pays pouvait il continuer à financer en même temps une guerre en Afrique du nord (pour faire plaisir à la noblesse), développer le réseau des comptoirs asiatiques et coloniser le Brésil? Les ressources humaines portugaises étaient limitées, et les pertes humaines sur trajet Portugal - Asie étaient considérables 10 à 20 % (bateaux). Ceci eut pour effet de favoriser la mise en place d'équipages en partie étrangers.(italiens, hollandais) Le "virage atlantique" : le début du déclin Portugais Annexion du Portugal par l'Espagne Le désastre de la bataille d'al Qasr al Kabir ( Maroc) en 1578, où le roi du Portugal trouva la mort entraîna par ricochet l'annexion du Portugal par le roi Philippe 2 d'Espagne en 1581. Mise en place d'un réseau mondial par "les nouveaux chrétiens" (1580 - 1630) Suite à l'annexion du Portugal à l'Espagne, les juifs convertis d'origine portugaise, tissèrent un réseau commercial entre les deux empires allant de l'Europe en passant par le Pérou (Callao), le Mexique, les Philippines ( route URDANETA - 1565), Macao, l'Inde, Malacca, le Brésil (Pernambouc). Pendant environ 40 ans il permit des échanges réguliers entre tous les continents. Malheureusement les persécutions de l'Inquisition, notamment à Goa et Lima, mirent à mal ce très fructueux commerce . Beaucoup d'entre eux quittèrent Goa pour Macao ou quittèrent définitivement l'Estado da India. La montée en puissance du Brésil Avec l'expansion de la culture de la canne à sucre et l'utilisation d'esclaves en provenance d'Angola mais aussi du GANA , un flux migratoire de travailleurs majoritairement issus du nord du Portugal se fit jour . Contrairement à l'ESTADO da INDIA, le commerce du Brésil n'était pas un monopole d'Etat. Il était donc beaucoup plus facile de développer une activité avec moins de risques de pertes humaines (naufrage+ scorbut). Abandon du commerce Japonais au profit des Hollandais Face au prosélytisme spirituel et économique envahissant des jésuites, tel que le vice provincial Gaspar Coelho (qui disposait d'une galère armée pour se déplacer) dans les années 1580 à Nagasaki, le pouvoir japonais conduit par Toyotimi Hideyoshi en prit ombrage et demanda aux missionnaires européens de partir de l'archipel mais cela ne fut pas suivi d'effet immédiat . La venue des premiers hollandais (12 avril 1600: ERASMUS), ennemis jurés des portugais, changea la donne. Ils se firent un malin plaisir de critiquer" l'impérialisme portugais" auprès des autorités japonaises. L'ordre d'expulsion définitif des portugais fut décrété en 1614 par TOKUGAWA Izyasu. Le Japon se referma sur lui même, à l'exception des hollandais pour service rendu, qui obtinrent la possibilité de faire accoster 2 bateaux par an, avec de très sérieuses restrictions de circulation (Ile Dejima) mais en contrepartie de ce monopole, des profits conséquents. 4 - La ruée des principales nations européennes vers les régions productrices d'épices Le XVII siècle : l'âge d'or Hollandais L'indépendance des Provinces Unies en 1579 entraîna, sur décision de Philippe2 roi d'Espagne, la fermeture des ports tels que Lisbonne ou Cadix aux marchands hollandais qui venaient s'approvisionner en vin mais surtout en épices. Le commerce ayant horreur du vide, la réaction fut quasiment immédiate. Les hollandais devaient trouver rapidement la solution pour se rendre directement par leurs propres moyens aux iles aux épices. En cela, Ils furent aidés par plusieurs heureuses circonstances : • L'inquisition exportée d'Espagne vit la fuite d'une partie des nouveaux chrétiens de Lisbonne vers les Provinces Unis apportant avec eux leur fortune, mais surtout leur savoir sur les routes maritimes portugaises • Le manque de marins amena le Portugal à utiliser des marins "étrangers" génois mais aussi Hollandais tel que Cornalis de Houttman 1592 qui fut démasqué par les autorités portugaises. Les marchands de Rotterdam se cotisèrent pour payer sa rançon. Dés son retour il s'empressa de repartir à la tête d'une flotte batave vers les iles aux épices. • Les cartes marines étaient un secret d'état. Cependant certains documents furent vendus par des fonctionnaires espagnols peu scrupuleux aux hollandais. • Jean Huygues van Linschoten fut secrétaire de l'archevêque de Goa ( 1583 et 1588) Il ramena lui aussi de précieuses informations sur les iles aux épices. Entre 1598 et 1602, date de naissance de la VOC (Compagnie néerlandaise des Indes orientales) , les provinces unies n'envoyèrent pas moins de 14 flottes totalisant 65 navires à la conquête des iles aux épices. Contrairement aux portugais, les hollandais poursuivaient uniquement des buts mercantilistes et ne dépendaient pas directement du pouvoir central. Dans un premier temps les hollandais se cantonnèrent à mettre en place des infrastructures commerciales et militaires dans les zones éloignées du centre de gravité de l'Estado de India. Ils trouvèrent des routes maritimes plus septentrionales ( ile d'Amtersdam) afin d'éviter la confrontation avec la flotte portugaise. 1605 fut l 'année où la VOC prit le contrôle des iles produisant la muscade ( Banda) et les clous de girofle (Amboine ou AMBON ) au détriment des portugais. A l'inverse des autres puissances européennes les Pays- bas s'occupèrent de la mise en oeuvre des moyens de production afin de mieux contrôler le marché des épices. Ils ajustèrent la production en fonction de la demande, n'hésitant pas de détruire chaque année les stocks d'épices excédentaires pour garder les cours élevés. Ils décidèrent de se concentrer sur la production des épices les plus coûteuses : noix de muscade et clou de girofle, sur quelques petites iles faciles à contrôler. Des campagnes systématiques d'éradication des plants de muscadier et de giroflier furent appliquées dans l'ensemble des iles de MALAKU où poussaient à l'état sauvage ces épices. En 1608, les Hollandais fondèrent sur l'ile de JAVA la ville de BATAVIA ( Jakarta) qui servit de pivot au commerce batave dans toute l'Asie du sud est. Il s'installèrent ensuite en Inde ( PULICAT 1600) et chassèrent les Portugais de CEYLAN (SIR LANKA 1656 ) pour s'approprier le marché de la cannelle ainsi qu'une partie du marché du poivre. 1600 - les anglais Au même moment sous l'impulsion de la reine Elisabeth 1er, fut créée la compagnie britannique des Indes Orientales (British East India Company) le 31 décembre 1600. Là aussi, cela n'est pas le fruit du hasard. En effet quelques années auparavant, le corsaire Francis DRAKE réalisa la première circumnavigation ( 1577 - 1580 ) durant laquelle il se distingua en arraisonnant, entre autre, un galion espagnol rempli d'or et d'argent au large du Pérou. Au cours de son arrêt aux iles Célèbes (Indonésie) il compléta son chargement par des épices avec la complicité de marchands portugais. A son arrivée en Angleterre, la moitié de son chargement était dévolue au trésor royal. Sa valeur était équivalente à l'ensemble de revenus annuels de la couronne en 1580 . De quoi donner de l'appétit et des idées aux puissants de l'époque! Une flotte fut construite et le premier comptoir anglais fut établi à SURATE en 1608 suivi de MADRAS (1639) et HUGLI (1658). Il est à noter que la perle indienne des comptoirs Anglais a été BOMBAY. Elle fut donnée en dot, , à Catherine de Bragance, fille du roi du Portugal, lors de son mariage en 1660, au roi Charles STUART roi d'Ecosse et d'Angleterre, et ce, malgré la vive désapprobation de GOA. 1616 - les Danois La compagnie danoise des Indes orientales fut fondée à TRANQUEBAR en 1616 par le roi Christian IV. Elle avait pour mission d'importer, dans un premier temps, des épices et des cotonnades, pour ensuite se diversifier dans le commerce du thé. Ce dernier produit provenait directement de Chine. 1664 - les Français La première tentative d'aller vers les iles aux épices, financée par le roi François 1er , revient au malouin Jacques CARTIER qui découvrit le QUEBEC en 1534. A la même époque les corsaires Dieppois sévissaient dans tout l'Océan Atlantique pour "soulager" les bateaux espagnols de leur cargaison d'or en provenance d'Amérique, et les bateaux portugais de leur cargaison d'épices en provenance d'Asie. Ils avaient des connaissances sur les conditions de navigation sur l'Océan Atlantique équivalentes aux marins portugais. Apparemment d'après certains historiens, ils auraient découvert une bonne partie des côtes africaines avant les portugais. Pendant des décennies la" récolte des épices à la française" se faisait en grande partie au travers de bateaux français pratiquant la course. Malheureusement, le royaume de France avait une mentalité " de terrien". La plupart des rois de France ne considérait pas le transport maritime comme une priorité, à l'exception de Louis XVI. Ce sont deux grands commis du royaume de France qui sauvèrent la face : Le premier : le cardinal Richelieu créa en 1625 la compagnie St. Christophe pour le développement du commerce du sucre aux Antilles. Il envoya aussi, par l'intermédiaire du père Joseph, son proche collaborateur, Pacifique de Provins, établir des relations diplomatiques et économiques avec le Shah Abass 1er afin d'essayer de contourner l'encerclement du royaume de France par l'empire des Habsbourg mais, aussi, en profiter pour trouver un accès direct aux épices indiennes. Le second: Colbert arriva à convaincre Louis XIV, de construire une véritable marine afin d'établir des liens économiques avec l'Asie. Il fonda la compagnie des Indes orientales en 1664 (directeur Caron , huguenot français ayant travaillé 30 ans pour la VOC). C'était une compagnie commerciale sous charte royale. Elle se concentra en premier lieu à la colonisation de MADAGASCAR et des iles Mascaraignes ( BOURBON ) délaissées par les portugais et les hollandais) pour servir d'escale vers les Indes et les iles Indonésiennes . Un premier comptoir fut établi en Inde à PONDICHERY (1674) pour acheter des épices suivi par CHANDENAGOR ( 1675) dans le Bengale, pour acheter les étoffes de coton de plus en plus prisées dans les colonies mais aussi dans le royaume de France pour sa légèreté et sa facilité de coloration. ( 8 à 10 bateaux par an) ainsi que du salpêtre. A la fin du 17em siècle le marché des épices était divisé en deux parties: Le poivre La culture du poivre, implantée initialement en Inde s'est propagée sous l'instigation des Hollandais dans les iles de Java et de Sumatra. Les quantités de poivre mises sur le marché avaient augmenté significativement au fil du temps , ce qui eut pour conséquence de faire baisser le prix de cette épice . Le poivre , petit à petit, est devenu abordable pour la plupart des tables des pays européens. Le clou de girofle et la muscade La culture et les circuits de distribution étaient tenus d'une main de fer par les Hollandais dans quelques iles Indonésiennes puissamment gardées. Ce monopole permettait de garder des prix très élevés et d'assurer des profits considérables. Le volume de ces "épices fines" était nettement inférieur à celui du poivre noir mais beaucoup plus profitable. Le XVIII em siècle : Affaiblissement du rôle stratégique des épices dans le commerce Euro-Asiatique Fin de la primauté gastronomique des épices: Apparition de nouvelles denrées alimentaires Pendant deux siècles, le marché des épices a permis de créer la première mondialisation des échanges. Cependant son poids stratégique commença à fléchir vers la fin du règne de Louis XIV. Pourquoi ? En premier lieu par un changement des habitudes alimentaires initiées à la cour de Versailles par une nouvelle cuisine ( liaison à la mie de pain , à la farine, aux jaunes, roux, etc.) utilisant moins d'épices (VATEL) . Celle-ci était basée sur des sauces et l'introduction d'autres produits exotiques. En quelques années les épices devinrent "vulgaires" pour la haute société et cette nouvelle mode se répandit rapidement aux bourgeois plus ou moins fortunés. La nouvelle tendance de la mode fut la découverte de nouvelles boissons. En quelques décennies leur consommation explosa, entraînant de nouvelles rivalités économiques. • Le chocolat Introduit par Marie Thérèse d'AUTRICHE, fille du roi d'ESPAGNE, Philippe IV , première épouse de Louis XIV, à la cour de Versailles. Cette nouvelle boisson fit fureur dans les salons branchés de l'époque. • Le café Boisson utilisée depuis fort longtemps par les populations de la péninsule arabique. Elle se propagea au levant .Les vénitiens ramenèrent cette nouvelle boisson dans leur" bagage "à Venise. Son développement au niveau mondial fut l'oeuvre des négociants Malouins après la déconfiture de la compagnie française des Indes Orientales à titre privé et cela au nez et la barbe des commerçants anglais et hollandais, en inventant le commerce de droiture ( sans intermédiaire). • Le thé Découvert par les marchands portugais dans leurs périples en Asie. Les hollandais commencèrent à en consommer comme prescription médicamenteuse. Catherine de Brangance introduisit en 1660 à la cour d'Angleterre la consommation de thé. Cette nouvelle boisson eut un succès foudroyant auprès des sujets Britanniques. En quelques années le thé devint un produit stratégique pour l'économie anglaise. • Les cotonnades ou "Indiennes" Elles étaient transportées en premier lieu par les équipages Portugais dans leur coffre de permission en compagnie de graines de poivre. Ce tissu, issu de la fleur du coton, produit au Bengale depuis de nombreux siècles, était reconnu pour sa légèreté et sa facilité à être teint. Son prix d'achat était nettement inférieur à la soie. Il fut vite adopté par les populations, perse et arménienne au 13em siècle, puis européennes au 17 et 18em siècles pour son confort, au détriment du lin. Son commerce devient aussi stratégique que les épices. Les cales des navires qui empruntaient les routes maritimes Europe/ Asie contenaient très souvent ces deux marchandises. Disparition du monopole des épices fines au détriment des hollandais Ce fut l'oeuvre de Pierre POIVRE qui, après beaucoup d'efforts, réussit à subtiliser avec la complicité des populations locales, en réaction des exactions des Hollandais, des pieds de muscade et de clou de girofle sur l'ile de FAO (TIMOR) en 1755. Ce fut aussi un botaniste de premier plan créant, entre autre, le fameux jardin de Pamplemousse et diffusant avec l'aide de son ami JUSSIEU, la culture des épices dans l'ensemble des colonies françaises cela brisa définitivement le monopole du commerce hollandais des épices fines. Malheureusement, quelques années plus tard, se déclencha la guerre de sept ans qui se conclut par le traité de PARIS en 1763 où le royaume de France perdit son premier empire colonial au profit de l'Angleterre. L'ile de France (Maurice) qui était économiquement très florissante ainsi que les possessions indiennes à l'exception de cinq comptoirs, sont cédées à la Grande Bretagne. Etrange coïncidence c'est en 1763 qu' Edmond CARTWIGT inventa, en Angleterre, un métier à tisser le coton dont le débit était cent fois supérieur au tissage traditionnel fait à la main .Cela eut pour conséquence de lancer la première révolution industrielle de Grande Bretagne , tout en ruinant au passage les filatures traditionnelles du Bengale. XVIII em siecle: délocalisation de la culture des épices Les botanistes européens, au cours de ce siècle, bouleversèrent la géographie de la culture des épices en acclimatant ces dernières à d'autres continents. Ils démocratisèrent sa production ce qui entraîna une baisse considérable du prix des épices tout en conservant une excellente profitabilité. On assista à un rapide brassage, d'un continent à l'autre, des cultures de nombreuses espèces végétales. A titre d'exemple le piment originaire du Mexique fut acclimaté aux continents africain et asiatique. De même la fameuse noix de muscade fut délocalisée aux Antilles. Un nouveau venu sur le marché des épices apparut dans le dernier quart du 18 em siècle ce sont les Etats Unis d'Amérique qui, dès leur indépendance, s'impliquèrent fortement dans ce commerce lucratif. 5 - L'évolution du commerce des épices au cours du 19em siècle à nos jours XIX em siècle : nouvelles utilisations des épices Au cours du 19em siècle, l'apparition des bateaux à vapeur permit de transporter rapidement d'un continent à l'autre toutes sortes de marchandises à des coûts de plus en plus bas. Durant cette période, les Etats Unis devinrent le premier consommateur d'épices au monde tandis que le premier pays producteur d'épices toutes catégories fut l'Inde. Aujourd'hui, ce classement n'a pas changé même s'il est difficile de disposer de statistiques fiables sur l'ensemble des épices. Il est à noter que le clou de girofle trouva une deuxième vie économique en Indonésie à partir de 1880. Il servit à la confection d'un nouveau type de cigarettes à base de clou de girofle (Eugenol) et de tabac appelé "KRETECK". A l'heure actuelle, la consommation indonésienne représente environ 95% du marché mondial du clou de girofle. PRODUCTION DES PRINCIPALES EPICES 20773 ( TONNES) EPICE ORIGINE CURCUMA INDE PARTIE PLANTE UTILISEE RHIZOME GENGEMBRE CHINE RHIZOME POIVRE INDE GRAINE CEYLAN INDE ECORCE DE TIGE FRUIT CLOU DE GIROFLE INDONNESIE FLEUR NOIX DE MUSCADE INDONNESIE FRUIT CANNELLE CARDAMONE PROPRIETE MEDICALE ANTI INFLAMATOIRE ANTI BACTERIEN ASTHME - NOSEE HEMOROIDE EMBAUMEMENT ANTISEPTIQUE INFECTION DENTS DOULEUR ESTOMAC ANTISEPTIQUE ANESTHESIQUE RHUMATISME MALADIE RESPIRATOIRE TOTAL Les épices ont elles perdu leur intérêt dans la vie d'aujourd'hui ? La réponse est négative. La cuisine européenne redécouvre, depuis une dizaine d'années, les subtilités des saveurs des épices au travers de grands chefs étoilés. L'industrie du parfum ne peut pas se passer des épices pour créer les odeurs les plus subtiles que l'on trouve dans la plupart des parfums de renommée mondiale ( Ex: clou de girofle dans l'Opium d'Yves Saint Laurent) De même, il y a un net regain d'intérêt pour la médecine traditionnelle AYURVEDIQUE Indienne par l'industrie pharmaceutique. L'Université du MISSISSIPI, avait déposé un brevet, en 1993, sur les propriétés du CURCUMA. Ce brevet fut vivement contesté par l'INDE, pour cause de biopiraterie. Elle obtint gain de cause, après une longue bagarre juridique auprès de l'US Patent Trademark Office. Depuis cette date, l'Etat Indien est en train d'inventorier toutes les recettes millénaires pratiquées quotidiennement par la médecine AYURVEDIQUE afin de les mettre à l'abri des appétits financiers de groupes pharmaceutiques. Les épices n'ont pas fini de nous surprendre tandis que le comportement de l'homme est toujours égal à lui même : la cupidité et la gloire. Ainsi va le monde! Février 2015 Sources L'empire portugais d'Asie 1500 - 1700 : Sanjay SUBRAHMANYAM Editions Points 2013 50 plantes qui ont changé le cours de l'Histoire: Bill LAWS Editions Ouest France 2011 Des épices au parfum : comment les épices ont écrit l'histoire des hommes et des parfums : Brigitte BOURNY- ROMAGNE Edition Aubanel 2006 Fond ancien de la ville de Provins Wikipedia