VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2014 - Thèse n° ETUDE DU SYSTEME IMMUNITAIRE DE LA TORTUE CAOUANNE (CARETTA CARETTA) : UTILISATION COMME OUTIL DIAGNOSTIQUE ET INDICATEUR DE TOXICITE DES POLYCHLOROBIPHENYLES (PCBs) THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 28 Novembre 2014 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par ROUSSELET-RUSSO Estelle Née le 8 Février 1981 à Grenoble VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2014 - Thèse n° ETUDE DU SYSTEME IMMUNITAIRE DE LA TORTUE CAOUANNE (CARETTA CARETTA) : UTILISATION COMME OUTIL DIAGNOSTIQUE ET INDICATEUR DE TOXICITE DES POLYCHLOROBIPHENYLES (PCBs) THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 28 Novembre 2014 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par ROUSSELET-RUSSO Estelle Née le 8 Février 1981 à Grenoble 2 3 4 REMERCIEMENTS À Monsieur le Professeur Frédéric BERARD De la Faculté de Médecine de Lyon, Qui m’a fait l’honneur d’accepter la Présidence de ce jury de thèse, Mes hommages respectueux. À Monsieur le Professeur Michel PEPIN De VetAgro Sup, Pour avoir accepté d’encadrer ce sujet de thèse, Qu’il voit ici le témoignage de ma sincère reconnaissance et de mon respect le plus profond. À Monsieur le Professeur Philippe BERNY De VetAgro Sup, Qui a eu la gentillesse d’accepter de participer à ce jury de thèse Qu’il trouve ici l’expression de ma gratitude. 5 6 REMERCIEMENTS Je tiens à remercier mes co-auteurs : Aux docteurs Joseph Flanagan, Maryanne Tocidlowski, Mmes Erika Ghebard, Kara LaVictoire, le personnel de NOAA Fisheries à Galveston Au Docteur Céline Godard-Codding pour avoir initier le projet à mes côtés et m’avoir accorder sa confiance, A Mr Benjamin Higgins, pour m’avoir accueilli à bras ouvert, et sans qui ce projet n’aurait jamais vu le jour, Aux Docteurs Sylvain DeGuise et Milton Levin, pour leur aide tant logistique que morale, pour leur confiance, leurs conseils avisés et nos longues discussions, Au Docteur Nicole Stacy, mon mentor, mon guide, mon amie, sans qui la compréhension de l’interprétation de la pathologie clinique des reptiles aurait été complexe, Au Docteur Terry Norton, pour sa patience, sa confiance, pour son partage, ce qu’il m’a transmis et me transmet. Au Docteur Nancy Mettee, qui sans me connaître a accepté de faire partie du projet. Pour toutes les personnes merveilleuses qui m’ont aidé de près ou de loin dans ce projet. 7 8 TABLE DES MATIERES TABLE DES ILLUSTRATIONS………………………………………………………………………………...13 INDEX DES ABREVIATIONS…………………………………………………………………………………..15 INTRODUCTION…………………………………………………………………………………………………...17 PARTIE 1 : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE I. Histoire naturelle de la tortue caouanne………………………….22 Diagnose d’espèce……………………………………………………....22 Répartition et habitat…………………………………………………….25 1. Répartition………………………………………………………….25 2. Habitat……………………………………………………………...27 C. Biologie………………………………………………………………….30 1. Les femelles sexuellement matures………………………………...30 2. Les nouveau-nés……………………………………………………31 3. Les juvéniles………………………………………………………..31 4. Adultes néritiques ou océaniques…………………………………..32 A. B. II. Menaces et protections……………………………………………32 A. B. Menaces anthropiques…………………………………………………..33 1. Menaces terrestres………………………………………………….33 2. Menaces marines…………………………………………………...34 Statut et protection ……………………………………………………...36 III. Le système immunitaire………………………………………….37 A. B. 1. 2. 3. 4. C. 1. Le système hématopoïétique des reptiles……………………………….37 Les organes lymphoïdes des reptiles……………………………………38 La moelle osseuse…………………………………………………..38 Le thymus…………………………………………………………..39 a. Anatomie………………………………………………………...39 b. L’involution thymique……………….…………………………..41 La rate……………………………...……………………………….41 a. Anatomie…………………………………….…………………..41 b. Fonction de la rate……………………………………………….43 Agrégations lymphoïdes et structures lymphoïdes accessoires…….43 a. Le tissu lymphoïde associé aux intestins………………………...44 b. Les nœuds lymphatiques et autres structures lymphoïdes………44 Le système immunitaire…………………………………………………44 Les mécanismes de défense innée………………………………….46 a. Revêtements cutanés et muqueux……………………………….46 b. Les facteurs humoraux non spécifiques…………….…...………46 9 c. 2. a. b. c. d. 3. 4. 5. a. b. IV. Les facteurs cellulaires non spécifiques………………………...48 Les mécanismes de défense spécifique…….……………...……….54 Les lymphocytes………………………………………….……..54 Les lymphocytes B et T des reptiles……………………….……58 Les immunoglobulines……………………….………………….61 La réponse immunitaire à médiation cellulaire…………...……..63 Récapitulatif des tests pouvant être utilisés………………………...65 La mémoire immunitaire chez les reptiles…………………………66 Facteurs de variation de la réponse immune……………………….66 La température…………………………………………………..66 La saison et les hormones……….………………………………67 Toxicité des Polychlorobiphényles chez la tortue marine………..70 A. Les polychlorobiphényles (PCBs)…………………………………….70 1. Histoire naturelle des polychlorobiphényles……………………….70 2. Toxicité des PCBs : généralités…………………………………….72 3. Effets biologiques des PCBs chez les tortues………………………73 a. Les voies d’entrée……………………………………………….73 b. Excrétion du sel : les glandes à sel……………………………...74 c. Toxicité sur les embryons……………………………………….76 d. Contamination et marqueurs d’exposition………………………77 4. Effets des PCBs sur le système immunitaire……………………….79 a. Généralités………………………………………………………79 b. Les tortues marines……………………………………………...80 B. Les outils d’étude………………………………………………………..82 1. L’hématologie et la biochimie……………………………………...82 2. L’immunité innée…………………………………………………..82 3. L’immunité acquise………………………………………………...83 V. Conclusion partielle…………………………………………………84 PARTIE 2 : ETUDE EXPERIMENTALE I. Matériel et méthodes………………………………………………86 A. B. C. D. Sujets d’étude et conditions de captivité………………………………..86 Prélèvement de sang chez les tortues marines………………………….88 Analyse sanguine hématologique et biochimique……………………….89 Fonctionnalité du système immunitaire…………………………………91 1. Isolement des cellules sanguines mononuclées…………………….91 2. Prolifération lymphocytaire………………………………………...91 3. Activité NK cellule tueuse naturelle avec et sans PCBs…………...92 4. Isolement des sous populations de cellules leucocytaires………….93 5. Tri cellulaire et caractérisation morphologique……………………94 10 6. 7. 8. Phagocytose avec et sans PCBs……………………………………94 Explosion respiratoire……………………………………………...95 Préparation des PCBs………………………………………………95 E. Analyse statistique………………………………………………………96 1. Etude des paramètres hématologiques et biochimiques……………96 2. Etude du système immunitaire avec et sans PCBs…………………96 II. Paramètres hématologiques et biochimiques……………………..97 A. Résultats…………………………………………………………………97 1. Morphométrie et hématologie……………………………………....97 2. Biochimie plasmatique…………………………………………....102 B. Discussion……………………………………………………………...111 1. Hématologie………………………………………………………111 2. Biochimie plasmatique……………………………………………117 III. Evaluation du système immunitaire d’un point de vue fonctionnel…………………………………………………….....123 A. Résultats………………………………………………………………123 1. Profils obtenus en cytomètre de flux et caractérisation morphologique des leucocytes du sang périphérique……………..123 2. Le système immunitaire inné des tortues caouannes……………..126 a. La phagocytose…………………………………………………126 b. L’explosion respiratoire…………………………………….......127 c. L’activité des cellules tueuses naturelles……………………….128 3. Réponse des lymphocytes de tortue caouanne à une stimulation…129 B. Discussion……………………………………………………………...130 1. Fonctions du système immunitaire inné chez les tortues caouannes………………………………………………………….131 2. La prolifération lymphocytaire……………………………………133 C. Conclusion……………………………………………………………...134 IV. Modulation du système immunitaire inné par les PCBs………...136 A. Résultats………………………………………………………………..136 1. Effets des PCBs 105 et 138 sur la phagocytose…………………...136 2. Effets des PCBs 105, 138 et 169 sur l’activité NK………………..138 B. Discussion………………………………………………………………139 CONCLUSION……………………………………………………………………………………………………….143 BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………………………………………..145 ANNEXES…………………………………………………………………………………………………………….163 Annexe 1 : Nomenclature IUPAC des PCBs…………………………………………………163 Annexe 2 : Article 1 : J. Zoo. Wild.Med. 2013. 44(4), 859-874………………………164 11 Annexe 3 : Article 2 : Vet. Immunol. Immunupathol. 2013. 56 (1-2) 43-53 ………………………………………………………………………..…………………………….165 Annexe 4 : Article 3 : Short communication (non publiée)…………………………..166 Annexe 5 : Poster Morris animal Foundation, Vet Student scholar Combined hematology and immunology : a breakthrough to understand immune functions of stranded sea turtles……………………………………………………..171 12 TABLE DES ILLUSTRATIONS LISTE DES FIGURES Figure 1. Identification des espèces de tortue marine (D'après NMFS/SEFSC)……..23 Figure 2. Mesures de la carapace…………………………………………………….24 Figure 3. Répartition mondiale de la population de tortue caouanne. 2009………….26 Figure 4. Répartition mondiale des sites de nidification de la tortue caouane. 2008...26 Figure 5. Cycle de vie de la tortue caouanne………………………………………...28 Figure 6. Tortue luth adulte prise dans les filets et échouée (Crédit Aquarium La Rochelle)……………………………………………...35 Figure 7. Turtle Excluder Device, filet permettant la fuite des tortues………………37 Figure 8. Thymus de tortue verte (Chelonia mydas) en position anatomique……….40 Figure 9. Coupes histologiques de thymus de tortue caouanne (Caretta caretta) riche ou non en tissu lymphoïde……………………….……………...……………40 Figure 10. Structure histologique de splénopancréas de crotale (Crotalus viridis)….41 Figure 11. Structure histologique de rate de tortue caouanne (Caretta caretta)……..43 Figure 12. Photomicrographies des monocytes de testudinidae, réactifs ou non…….49 Figure 13. Photomicrographies d’hétérophiles de reptiles, réactifs ou non………….52 Figure 14. Photomicrographies d’éosinophiles de reptiles, réactifs ou non………….54 Figure 15. Immunité adaptative…………………...…………….…………………...58 Figure 16. Réponse immunitaire en réponse à une infection virale………………….58 Figure 17. Photomicrographie de lymphocyte de boa constrictor…………………...59 Figure 18. Structure générale des polychlorobiphényles…………………………….71 Figure 19. Voies d’entrée et conséquance d’exposition aux toxiques……………….74 Figure 20. Glandes à sel de tortue caouanne (Caretta caretta)………………………75 Figure 21. Prise de sang réalisée dans le sinus cervical dorsal sur une tortue caouanne juvénile……………………………………………………………………….88 Figure 22. Lecture du PCV (Packed cell volume) comme estimation de l’hématocrite. ……………………………………………………………………………….90 Figure 23. Corrélation entre le poids et la longueur de carapace (SCL) pour les 5 classes d’âge de tortues caouannes…………………………………………...97 Figure 24. Représentation sous forme de boxplots de certains paramètres hématologiques et biochimiques de la tortue caouanne…………………….101 13 Figure 25. Photomicrographies de cellules sanguines de tortue caouanne juvénile.……………………………………………………………………...102 Figure 26. Profils de cytométrie de flux et examen cytologique du gradient de Ficoll….……………………………………………………………………..123 Figure 27. Gradients de Percoll discontinus obtenus après centrifugation………….125 Figure 28. Profils de cytométrie de flux et examen cytologique des gradients de Percoll……………………………………………………………………….125 Figure 29. Profils de cytométrie de flux et phagocytose associée…………………..127 Figure 30. Explosion respiratoire des leucocytes de tortues caouannes…………….128 Figure 31. Activité cellules tueuses naturelles (NK) des tortues caouannes………..129 Figure 32. Prolifération lymphocytaire consécutive à l’exposition aux mitogènes....130 Figure 33. Profils de cytométrie de flux et activité phagocytaire en présence du PCB-105………………………………………………………………….137 Figure 34. Activité phagocytaire et effets du PCB-138……………………………..137 Figure 35. Effets des concentrations croissantes du PCBs-105 et PCB-138 sur l’activité cellules tueuses naturelles (NK)…………………………………...138 LISTE DES TABLEAUX Tableau I : Concordance entre stade physiologique, localisation et taille de carapace… ……………………………………………………………………………..…25 Tableau II : Valeurs hématologiques publiées chez les reptiles……………………...60 Tableau III : Divers tests des fonctions du système immunitaire utilisés chez les reptiles ainsi que leurs limites………………………………………………...65 Tableau IV: Paramètres hématologiques et morphométriques obtenus dans notre étude…………………………………………………………………………..98 Tableau V: Analytes biochimiques obtenus dans notre étude……………………….105 Tableau VI: Synthèse des paramètres hématologiques et morphométriques de la littérature…………………………………………………………………….113 Tableau VII: Synthèse des analytes biochimiques de la littérature………………….119 14 INDEX DES ABREVIATIONS 2-ME: 2-mercaptoéthanol Ac: Anticorps ANOVA: Analysis of Variance: Analyse de variance BALT: Bronchus-associated lymphoïd tissue : tissu lymphoïde associé aux bronches BrdU: 5-bromo-2'-deoxyuridine CBC: Complete Blood Count ou hémogramme CCL: Curved Carapace length= longueur courbe de la dossière CITES ou Convention de Washington: Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction ConA : Concanavalin A : lectine extraite du haricot CPA: Cellules Présentatrices d’Antigène CR: CRitically endangered : espèce critique d’extinction DMEM: Dulbecco's Modified Eagle Medium : Milieu de culture pour cellules mammifères DMSO: Diméthylsulfoxide DPS: Distinct Population Segments: Segment de population disctincte ELISA: Enzyme-linked immunosorbent assay EN: ENdangered : Espèce en Danger FSC: Forward Scatter FWS: Fish and Wildlife Service GALT: Gut-associated lymphoïd tissue : tissu lymphoïde associé aux intestins HEPES: acide 4-(2-hydroxyéthyl)-1-pipérazine éthane sulfonique HBSS: Hank's Balanced Salt Solution Hct: Hématocrite IUCN: Union internationale pour la conservation de la nature K-562: lignée érythroleucémique humaine LPS : Lipopolysaccharide NMFS: National Marine Fisheries Service NPS: Newborn Piglet serum: Sérum de porcelet NOAA: National Oceanic and Atmospheric Administration PALS: Periarteriolar lymphoid sheath: Gaines ou manchons lymphoïdes périartériolaires PAS: Periodic Acid Schiff PBMC: Peripheral blood mononuclear cells: leucocytes mononuclés du sang périphérique PBS: Phosphate Buffered Saline: tampon phosphate salin PCV: Packed cell Volume 15 PDB: phorbol 12,13-dibutyrate PELS: manchon lymphoïde péri-ellipsoïdal PFC: hemolysin plaque forming cell: plage de lyse PHA : Phytohémagglutinine : lectine de haricot PI: iodure de propidium PMA: phorbol myristate-2 acétate-3 ppt: Part per trillion PWM: pokeweed: Phytolacca Americana ou raisin d’Amérique RPMI: Roswell Park Memorial Institute : Milieu de culture pour cellules mammifères RRBC: Rat red blood cells: erythrocytes de rat SCL: Straight carapace length: longueur en ligne droite de la carapace SRBC: Sheep red blood cells: erythrocytes de mouton SSC: Side scatter STH: anti-Saitohin TED: Turtle Excluder Device TEF: Toxic Equivalent Factor TEWG: Turtle Expert Working Group Thy-1: THYmocyte differentiation antigen 1 TWBC: total white blood cell: Numération des leucocytes VU: VUlnérable risque élevé d’extinction à l’état sauvage YAC-1: lignée de lymphome murin 16 Introduction Bien qu’animaux fascinants et chéris de l’opinion publique, empreints d’une forte symbolique, les tortues marines n’en demeurent pas moins, plus que jamais, menacées d’extinction. Il existe deux familles, les Dermochelyidae et les Cheloniidae (ordre des Testudines). Les Cheloniidae sont des tortues à carapace dure, incluant la tortue caouanne (Caretta caretta), la tortue verte (Chelonia mydas), la tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata), la tortue de Kemp (Lepidochelys kempii), la tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea) et la tortue à dos plat (Natator depressus) que l’on trouve exclusivement dans les eaux australiennes. L’autre famille des Dermochelyidae est constituée de la seule tortue luth (Dermochelys coriacea). Mis à part la tortue à dos plat dont le statut n’est pas connu à ce jour, ces tortues marines figurent toutes sur la liste rouge de l’IUCN où elles sont menacées d’extinction à des degrés variables. Ainsi, par ordre croissant de gravité se trouvent la tortue olivâtre (VU), les tortues vertes et caouannes (EN) et enfin les tortues de Kemp, imbriquées et luth (CR). Parmi les dangers responsables de cette inéluctable déclin figurent la pêche, le braconnage, la destruction des habitats et sites de ponte, la pollution qu’elle soit chimique, biologique ou physique et le changement climatique (Hamman et al., 2010). Des groupes d’experts (IUCN’s Marine Turtle Specialist Group) se réunissent régulièrement pour établir les priorités de conservation et de recherche afin d’aboutir à l’élaboration de stratégies d’action en vue de la préservation de ces espèces. Décrié depuis de nombreuses années, voire des décennies, l’impact direct de la pollution anthropogénique sur la santé et le déclin des populations n’est pas trivial. En 2010, un groupe d’étude s’est réuni afin de faire le point sur les connaissances actuelles ; de toutes les formes de pollutions existantes, la pollution chimique et les effets physiologiques provoqués par les contaminants sont les moins bien connus. La difficulté est multiple : d’une part il est difficile d’identifier le toxique mis en cause car ces animaux ont une longévité importante, parcourent les océans du globe et ce à différents stades de leur vie ; par conséquent ils sont exposés à un vaste mélange de polluants. D’autre part, les tortues marines sont protégées par la convention de Washington (CITES) et figurent sur la liste rouge de l’IUCN ce qui exclut toute 17 possibilité d’expérimentation animale et nécessite l’utilisation de modèles cellulaires soumise à l’obtention de permis fédéraux, notamment aux Etats-Unis. Les concentrations de toxiques chimiques sont généralement mesurées à partir de carcasses d’animaux échoués, d’échantillons de sang lors de campagnes d’évaluation de la santé des animaux ou directement dans les œufs pondus saccagés. Le lien entre le toxique chimique et son effet sur la santé de l’animal peut être matérialisé grâce à l’étude du système immunitaire qui se révèle être à l’interface entre l’environnement et l’animal. De façon très simplifiée et schématique, tout dysfonctionnement ou défaillance du système immunitaire aura des répercussions sur la santé de l’animal. L’étude du système immunitaire chez les reptiles en général et, plus particulièrement les tortues marines, en est à ses prémices. De plus, face à l’importance croissante de la conservation des espèces menacées associée à l’implication des vétérinaires travaillant dans des centres de réhabilitation ou aquariums, la recherche concernant la pathologie variée des tortues marines est devenue nécessaire. Les animaux échoués requièrent une prise en charge médicale spécifique afin d’aboutir à leur rétablissement. Actuellement les paramètres hématologiques et biochimiques constituent des indicateurs pronostiques de premier choix afin d’évaluer l’état de santé des animaux y compris lors d’exposition à des polluants environnementaux (Deem et al. 2009, Casal et al. 2009). Cependant ils ne permettent pas d’évaluer l’aspect fonctionnel du système immunitaire, ce qui constituerait un outil diagnostique supplémentaire afin d’aboutir à la compréhension de son fonctionnement chez les animaux affectés, et à plus long terme aboutir à l’élaboration d’un traitement médical mieux adapté pour réhabiliter les animaux échoués. Ainsi, ce travail résulte d’une volonté d’allier plusieurs disciplines que sont la toxicologie, l’immunologie et la pathologie de la tortue. Il se situe donc à l’interface d’une problématique extrêmement complexe et a pour but le développement d’outils et méthodes permettant l’évaluation de diverses fonctions du système immunitaire et leur utilisation comme outils indispensables afin de mesurer l’impact des polluants chimiques tels que les polychlorobiphényles. Pour la réalisation de ce travail j’ai bénéficié d’une bourse de postdoctorat de un an de la Fondation Rotary. Ce travail a été effectué aux Etats-Unis, à plusieurs endroits et avec l’aide de nombreux collaborateurs : Dr Céline Godard-Codding (The Institute of Environmental and Human Health, Texas Tech University, Lubbock, TX), 18 Drs Joseph Flanagan et Maryanne Tocidlowski (Houston Zoo), Dr Nicole Stacy (University of Florida, College of Veterinary Medicine, Gainesville, FL), Drs Milton Levin et Sylvain DeGuise (University of Connecticut, Storrs, CT), Mr Benjamain Higgins (NMFS, NOAA, Galveston, TX). Les tortues caouannes incluses dans l’étude sont des animaux du Sea Turtle Facility, National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) (Galveston, TX). Ces animaux font partie de programmes de recherche, arrivent au centre alors qu’ils ne sont encore qu’au stade d'embryons et sont relâchés lorsqu’ils atteignent une taille convenable (généralement au bout de 5 ans). Dans un premier temps, nous nous familiariserons avec la tortue caouanne, son habitat et sa biologie, puis nous aborderons les menances auxquelles elles sont soumises. Ensuite nous rentrerons dans le cœur du sujet en nous intéressant au système immunitaire des reptiles en général et des chéloniens en particulier. Dans le dernier chapitre dans cette partie bibliographique, nous traiterons des aspects toxicologiques et des effets des polychlorobiphényles, polluants organiques largements répandus et toujours d’actualité malgré son interdiction aux Eetats-Unis en 1979. En seconde partie nous nous intéresserons spécifiquement à la tortue caouanne comme modèle d’étude. Cette partie se déclinera en trois volets : 1/ L’étude de la comparaison des paramètres hématologiques et biochimiques de cinq classes d’âge de tortues juvéniles captives, afin de mieux appréhender l’état de santé des animaux sur lesquels nous avons entrepris les études suivantes, 2/ L’étude des fonctions du système immunitaire de la tortue caouanne juvénile et enfin, 3/ Les effets de PCBs sélectionnés sur certaines des fonctionnalités précédemment décrites. 19 20 PARTIE 1 ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE 21 Partie 1: Etude Bibliographique I. Histoire naturelle de la tortue caouanne A. Diagnose d'espèce Décrite par Linné en 1758 sous le nom de Testudo caretta, la tortue caouanne (Caretta caretta) ou Loggerhead sea turtle en anglais est l’une des six espèces de tortues de mer à carapace dure, formant la famille des Cheloniidés (Ordre des Testudines). D’après les analyses génétiques il y aurait deux populations distinctes ; celle d’Atlantique et celle de l’Indopacifique (Conant et al., 2009). La tortue caouanne possède un bec et une tête plus grands que les autres espèces de tortues marines. Sa tête est non rétractile. Chez l’adulte, la tête et la dossière sont brun rougeâtre, les nageoires sont marron. Le dimorphisme sexuel est apparent chez les individus adultes dont la longueur de la dossière dépasse 67 cm de longueur mesurée en ligne droite (Dodd, 1988). Les mâles ont une queue très longue, qui dépasse nettement le bord postérieur de la dossière ainsi que la présence d’une griffe plus longue et plus courbée sur les nageoires. La carapace de l’adulte est épaisse et fortement kératinisée. Elle est longue et cordiforme. Caractère important de diagnose d’espèce, elle comprend 5 plaques osseuses vertébrales, habituellement 5 paires de plaques costales, 12 ou 13 paires de plaques marginales et une large plaque nucale qui rejoint de part et d’autre les deux premières plaques costales (Fig. 1). 22 Figure 1. Identification des espèces de tortue marine (D'après NMFS/SEFSC) 23 Les mesures de la dossière s’effectuent de diverses manières. Ces considérations seront utiles pour la suite de l’exposé (Fig. 2). - Mesure curviligne de la dossière : CCL: Curve carapace length - Mesure en ligne droite de la dossière : SCL: Straight carapace length - SCL min - SCL max - SCL notch to tip : de l’encoche nucale à l’extrémité postérieure Figure 2. Mesures de la carapace (SCL en bas à gauche et CCL en bas à droite, NMFS) 24 Les mesures de longueur de la dossière correspondent à chacun des cinq stades de développement de la tortue caouanne telles que décrit par le Turtle Expert Working Group (TEWG, 2009) et présentées dans le tableau ci-contre : Tableau I : Concordance entre stade physiologique, localisation et taille de carapace. Stade Stade physiologique Localisation SCL 1 <1 an Terrestre à océanique 4,5 à 15 cm 2 Juvénile Océanique 15 à 63 cm 3 Juvénile Océaniques ou Néritiques, 41 à 82 cm, max 63 cm petits juvéniles benthiques dans l’Atlantique 4 Juvénile 5 Adulte Océaniques ou Néritiques, grands juvéniles benthiques Océaniques ou Néritiques 63 à 100 cm 82 à 100 cm et plus B. Répartition et habitat 1. Répartition Les tortues caouannes sont largement répandues dans les eaux tempérées et tropicales des océans Atlantique, Pacifique et Indien (Fig. 3). La plupart des tortues caouannes nichent sur les côtes occidentales des océans Atlantique et Indien (Fig. 4), les sites de nidification les plus importants se trouvant au sud de la Floride, Etats-Unis, et dans l’île de Masirah, Oman, (Witherington et al., 2009). La limite nord de l’aire de nidification de l’Atlantique en Amérique du Nord se trouve en Virginie ; la plus grosse colonie nicheuse se trouve en Floride et regroupe 80% des activités de nidification des populations de l’Atlantique (NMFS and USFWS 2007). Les tortues caouannes du Pacifique Nord nichent presque exclusivement au Japon, dans l’est de 25 l’Australie et en Nouvelle-Calédonie (NMFS and USFWS, 2007). Il a été signalé l’existence d’une aire de nidification de faible importance sur l’archipel Xisha, dans la mer de Chine méridionale (Chan et al., 2007). Les trois principaux sites de ponte se trouvent sur l’île Yakushima et sur les plages de Miyazaki et de Minabe, sur les îles principales du Japon (Conant et al., 2009). Figure 3. Répartition mondiale de la population de tortue caouanne. 2009 (D’après NMFS) Figure 4. Répartition mondiale annuelle des sites de nidification (nesting females) de la tortue caouane. 2008 (D’après NMFS). 26 La tortue caouanne compte deux lignées qui ont divergé il y a environ trois millions d’années. L’une vit dans les océans Pacifique et Indien et l’autre dans l’Atlantique et la Méditerranée (Conant et al., 2009). Deux transferts matrilinéaires sont survenus successivement il y a 250 000 et 12 000 ans ce qui a permis le maintien des deux lignées au sein d’une espèce commune. Des études d’ADN mitochondrial ont confirmé l’existence d’une forte structure de population au sein des colonies nicheuses (Conant et al., 2009). Les populations du Pacifique et de l’Atlantique sont génétiquement et géographiquement distinctes. Il existe à l’échelle mondiale neuf DPS (Distinct Population Segments) représentant chacun une vaste portion de l’aire de répartition de l’espèce et un écosystème unique (Conant et al., 2009). Cela tend à appauvrir considérablement la diversité génétique de l’espèce. Les DPS sont répartis par le Biological Review Team (BRT) dépêché par le biais du NMFS et FWS (Fish and Wildlife Service) des Etats-Unis: Pacifique Nord, Pacifique Sud, Nord de l’océan Indien, Sud-est de la région indo-Pacifique, Sud-ouest de l’océan indien, nord-ouest de l’Atlantique, mer Méditerranée et Atlantique Sud. 2. Habitat La tortue caouanne a besoin d’un habitat mixte à la fois terrestre, nécessaire à la ponte, et marin. Toutefois elle passe la plus grande partie de sa vie en mer. Dès leur éclosion, les petites tortues quittent les nids creusés sur des plages sableuses pour se réfugier dans la mer. Les mâles ne reviendront plus jamais sur la terre ferme, contrairement aux femelles qui y reviendront pour pondre leurs œufs. Les nids sont habituellement creusés entre la ligne de marée haute et le front dunaire (Witherington et al., 1986). Les œufs ont besoin d’un substrat très humide permettant un échange de gaz suffisant ainsi qu'un maintien des températures propices à leur développement (Miller et al., 2003). Les sites de nidification aus Etats-Unis s'étendent des côtes du sud de la Virginie, Caroline du Sud, Caroline du Nord, Géorgie jusqu'en Floride. Il en existe également de la côte mexicaine des Caraïbes, jusqu’en Guyane française, aux Bahamas, dans les Petites Antilles et dans les Grandes Antilles (NMFS et USFWS, 2007 ; Conant et al., 2009 ; TEWG, 2009). A chaque étape de son cycle correspond un habitat marin différent. Toutefois, les changements d’habitat ne seraient pas permanents (Bolten et al., 2003 ; Conant et 27 al., 2009). Les tortues choisiraient individuellement leur habitat, épipélagique, benthique ou les deux, en fonction de leurs besoins alimentaires (Fig. 5). Figure 5. Cycle de vie de la tortue caouanne (Foley communication personnelle). Chaque étape importante est associée à changement d’habitat lui-même lié à un besoin alimentaire spécifique. (1) La femelle pond puis repart tout en restant près des côtes où la nourriture est abondante. Elle migre ensuite en vue d’entamer sa migration de reproduction (5) puis son accouplement afin qu’un nouveau cycle recommence. Elle restera environ 2 semaines près des côtes (6). Une fois les œufs éclos (2), les nouveaux-nés entament leurs nages frénétiques, puis s’éloignent afin d’atteindre les eaux océaniques (3). De nombreux aller-retour entre les eaux océaniques et néritiques se succèderont (4) jusqu’à maturité sexuelle. Le devenir des mâles est peu connu. Les tortues du nord-ouest de l’Atlantique fraîchement écloses se déplacent vers le large et s’associent aux colonies dérivantes de sargasses (Witherington et al., 2002). Elles se réfugient dans les eaux néritiques de la zone peu profonde située sur le plateau continental ou sur le bord de ce plateau, où la profondeur de l’eau est inférieure à 200m (Bolten et al., 2003), et gagnent ensuite les eaux océaniques plus profondes. Dans les zones néritiques, les individus se situent dans des zones de 22 à 49 m de profondeur (Hopkins-Murphy et al., 2003). Les juvéniles restent fidèles à leurs aires d’alimentation. Dans les zones océaniques, les tortues caouannes passent 75% de leur temps dans la couche supérieure à 5 m de la colonne d’eau (Bolten et al., 28 2003). Ainsi, quatre-vingts pour cent de leurs plongées ne dépassent pas 5 m, les autres s’échelonnant dans les 100 premiers mètres avec quelques rares incursions à des profondeurs supérieurs à 200 m (Bolten et al., 2003). Les juvéniles migrent à travers les océans, utilisant le tourbillon de l’Atlantique Nord pour se déplacer vers le nord-est de l’Atlantique et de la Méditerranée, particulièrement Madère et les Açores puis reviennent en zones néritiques. Les juvéniles de ces zones s’observent de la baie de Cape Cod (MA, USA) jusqu’au Golf du Mexique. Les tortues caouannes adultes non pondeuses de la zone néritique sont moins nombreuses à fréquenter les milieux estuariens fermés et peu profonds qui offrent un accès à la mer plus limité (Conant et al., 2009). Les eaux estuariennes plus ouvertes sur la mer (à l’exemple de la baie de Chesapeake) sont fréquentées à la fois par les juvéniles et adultes (Conant et al., 2009). Les eaux peu profondes débouchant sur de vastes milieux marins (baie de Floride) offrent l’année durant des aires d’alimentation importantes pour les mâles et femelles adultes (Conant et al., 2009). Les adultes vivent principalement dans les eaux du plateau continental, de l’Etat de New York jusqu’au Golf du Mexique. Il semblerait que les tortues caouannes se déplacent entre les zones océaniques et néritiques (Bolten et al., 2003 ; Conant et al., 2009 ). A mesure qu’elles parviennent à maturité, les femelles recherchent la plage où elles sont nées. Les aires d’alimentation cruciales pour les individus du Pacifique comprennent les eaux du centre du Pacifique Nord, y compris les eaux de bifurcation du courant de Kuroshio (Polovina et al., 2006) et les eaux côtières de la BasseCalifornie du Sud, au Mexique (Peckham et al., 2007). La mer de Chine orientale constitue un habitat important pour les femelles adultes après la nidification qui effectuent les migrations saisonnières de reproduction entre les aires d’alimentation et les plages de nidification (Conant et al., 2009). Ces considérations sont importantes à connaître dans la mesure où cela va nous aider à comprendre les tenants et les aboutissants des effets de la pollution à chaque étape de la vie de l’animal. Le trajet migratoire et l’habitat des adultes matures et des mâles sont encore très mal connus. 29 C. Biologie Le cycle de vie biologique des tortues marines est complexe et peut se décliner en trois schémas (Bolten et al., 2003) en fonction des espèces de tortues marines: Le premier comprend un développement et une maturation complète au sein de la zone néritique. Cela concerne uniquement la tortue à dos plat (Natator depressus). Le second schéma est caractérisé par un développement initial en zone océanique suivit d’un changement en zone néritique. Ce changement d’habitat tendrait à favoriser une croissance maximale alliée à un risque de prédation minimal. Ce schéma est commun et typique des tortues C. caretta, C. mydas, E. imbricata, L. kempi, et sporadiquement L. olivacea. Ces changements sont complexes et réversibles; la taille et l’âge des individus en zone néritique varie en fonction des espèces. On sait maintenant que le stade océanique est le plus long pour la tortue caouanne d’Atlantique qui retourne au stade néritique après 7 à 11,5 ans pour une taille (CCL) variant entre 46 et 64 cm (Bjorndal et al., 2003). Enfin, le troisième schéma est illustré par D. coriacea et L. olivacea de l’est Pacifique qui effectuent leur développement au sein de la zone océanique exclusivement. Plusieurs stades peuvent être distingués : 1. Les femelles sexuellement matures Elles ne retournent sur la terre que pour pondre, généralement sur leur plage natale (Conant et al., 2009), tous les deux à trois ans. Seules deux plages de nidification de tortues caouannes ont plus de 10 000 femelles par an qui viennent pondre ; il s’agit de la Floride du Sud (Etats-Unis) et de l’île de Masirah (Oman). Les estimations aux Etats Unis sont d’environ 68 000 à 90 000 nids par an. Cependant, des analyses démographiques récentes ont montré que le nombre de nids sur la côte sud-est de la Floride était en déclin (Index Nesting Beach Survey program). Il en va de même en Caroline du Nord, du Sud et Georgie. Les îles du Cap-Vert abritent un nombre de nids plus modeste. En 2000, les chercheurs ont pucé plus de 1000 femelles 30 en nidification sur 5 km de plage de l'île de Boa Vista. Les aires de nidification aux Caraïbes sont rares. Il y a environ 4000 nids par an au Brésil. En Méditerranée, les nids sont confinés à la portion est : Chypre, la Grèce et la Turquie. Il a été enregistré entre 3300 et 7000 nids par saison de ponte (Conant et al., 2009). La ponte se déroule en général la nuit. Chacune des pontes comprend environ 110 œufs. Les tortues pondent trois à quatre fois et ce à 14 jours d’intervalle (Miller et al., 1997). Les œufs éclosent au bout de 49 à 90 jours, selon la température du nid (Miller et al., 1997). Plus le sable entourant le nid est chaud, plus rapide sera le développement des embryons. La longueur de la période d’incubation, le taux d’éclosion et la taille des nichées dépendent des conditions d’humidité qui règnent dans le nid (Conant et al., 2009). La détermination du sexe est également fonction de la température d’incubation : ainsi les femelles seront majoritaires voir exclusives si la température dépasse 29°C. Une température inférieure engendrera des mâles (Miller et al., 2003). 2. Les nouveau-nés L’éclosion survient pendant la nuit et se déroule sur 1 à 3 jours ; les nouveaunés remontent à l’air libre et émergent du nid sur une période de 2 à 4 jours. Les petits utilisent la lumière ambiante pour trouver le chemin de l’océan (Witherington et al., 1997) dans lequel ils entament une période de nage frénétique d’environ une vingtaine d’heures. Ils s’orientent en fonction de la direction des vagues et du champ magnétique terrestre (Conant et al., 2009). Ils restent en zone néritique (sur le plateau continental) pendant plusieurs semaines à plusieurs mois (Bolten et al., 2003) puis se dispersent en zone océanique en suivant les courants marins. Les individus de la zone océanique d’Atlantique Nord sont retrouvés près des Açores, les îles Canaries et de Madère où ils arrivent via le Gulf Stream (Conant et al., 2009). 3. Les juvéniles Les jeunes tortues caouannes deviennent ensuite largement inactives, les périodes de nage devenant peu fréquentes et moins énergiques. Elles se nourrissent d’une large variété de proies flottantes comme les hydroïdes et les copépodes associés aux sargasses (Witherington et al., 2002). Le stade océanique débute lorsque les juvéniles 31 arrivent pour la première fois dans cette zone. Ils se déplacent en suivant les courants dominants et y passent plusieurs années avant de retourner aux zones d’alimentation néritiques et à l’habitat de reproduction (Bolten et al., 2003). La durée du stade juvénile océanique est variable, et la taille des tortues qui quittent la zone océanique varie largement (SCL entre 15 à 63 cm ; TEWG, 2009). Lors de leur recrutement en zones néritiques, les tortues caouannes passent à un régime composé principalement d’invertébrés benthiques à carapace dure (Conant et al., 2009) : ils deviennent ainsi des carnivores généralistes. Les individus reviennent dans un habitat proche de leur plage natale afin d’établir une structure de population. Juvéniles et adultes peuvent aller et venir entre les zones néritiques et océaniques, et seule la disponibilité de nourriture déterminera leur habitat (Conant et al., 2009). 4. Adultes néritiques ou océaniques Les tortues caouannes deviennent adultes à partir d’un SCL de 82 cm et le sont toutes dès 100 cm (TEWG, 2009). La maturité sexuelle est atteinte tardivement après 16 ans, cela pouvant aller jusqu’à une trentaine d’années (NMFS and SWFSC, 2008). Carnivores, les adultes se nourrissent de divers crustacés, poissons, calmars, méduses. Les mâles ne reviennent jamais sur la terre ferme après leur éclosion, et les connaissances sur leur cycle vital sont incertaines (Conant et al., 2009). Grâce à l’analyse de l’ADN nucléaire, il semblerait que cette espèce ait une structure de population complexe caractérisée par un flux génétique sous contrôle mâle (Conant et al., 2009). Cela s'expliquerait par le fait que les mâles ne reviennent pas à leur plage natale ou que l’accouplement se déroule dans des aires d’alimentation ou des corridors migratoires où diverses populations se côtoient. II. Menaces et protections La capacité de survie de la tortue caouanne est dépendante de plusieurs facteurs ; en effet cette espèce est limitée par son faible taux de recrutement dû à une maturité sexuelle tardive, à une nidification ne survenant que tous les 2 à 3 ans, au taux élevé de mortalité des œufs et des nouveau-nés et à une sensibilité important des adultes aux changements chroniques de capacité de survie. 32 A. Menaces anthropiques 1. Menace terrestre Les menaces pesant sur l’habitat terrestre de la tortue caouanne sont nombreuses ; parmi les principales nous retiendrons : - L’aménagement des côtes et la construction modifiant l’habitat des tortues nicheuses et participant à l’augmentation du nombre de personnes et de véhicules sur les plages de nidification, entraînant le compactage du sable et le piétinement des nids (Conant et al., 2009). Le remblayage des plages peut rendre impropre la nidification et l’incubation des œufs. - Les ouvrages de défense des côtes qui bloquent l’accès à la zone supérieure des plages, obligeant les tortues à nicher près de la mer. - Les sources de lumière artificielle associées aux côtes aménagées qui désorientent les nouveau-nés et les empêchent de trouver la mer (Witherington et al., 1997). - Les changements climatiques pouvant entraîner un taux d’érosion plus important en provoquant une élévation du niveau de la mer ce qui a pour conséquence un risque d’inondation accru des nids, ainsi qu’une réduction de superficie de l’habitat de nidification disponible (Baker et al., 2006), et une augmentation de la fréquence des tempêtes ou une modification des courant dominants (Baker et al., 2006). Les changements climatiques pourraient enfin influer sur le rapport des sexes de la tortue caouanne, puisque le sexe des nouveau-nés dépend de la température d’incubation des œufs (Miller et al., 2003). Ainsi une hausse de température à l’échelle mondiale pourrait participer à une augmentation de la proportion de femelles (Miller et al., 2003). - La récolte des œufs ne constitue plus un problème au Japon (Conant et al., 2009). Toutefois, il n’en est pas de même dans le nord-ouest du Mexique où les tortues sont toujours prélevées à visée alimentaire et ce malgré l’interdiction de la chasse et du commerce de ces animaux par les autorités fédérales (Conant et al., 2009). La récolte des œufs des tortues vertes et imbriquées constitue la première cause de mortalité 33 dans le monde. Les tortues vertes sont exploitées pour leur chair et cartilage tandis que les tortues imbriquées sont prisées pour leur magnifique carapace. 2. Menaces marines Concernant la qualité de l’habitat marin, les points suivants sont les principaux retenus et ne sont en aucun cas exhaustifs. - La principale menace est la pêche pélagique à la palangre (Fig. 6) dans les eaux nord océanique où le nombre d’individus tués annuellement est estimé entre 2600 et 6000 (Lewison et al., 2004). Le dragage des chenaux et l’extraction de sable (Conant et al., 2009) constituent également de sérieuses menaces. La pêche commerciale constitue la menace anthropique la plus importante pour la population du Pacifique Nord, touchant juvéniles et adultes en zone néritique (Conant et al., 2009). - Prises accessoires lors de la pêche au chalut dans les eaux côtières qui sont des aires d’alimentation et de reproduction de ces animaux, notamment dans l’ouest du Pacifique. Le braconnage aux Bahamas, Cuba et Mexique est également un facteur de déclin. - Perturbations indirectes de l’habitat par la pollution marine, comprenant les herbicides, les pesticides, les déversements de divers produits chimiques, le pétrole et des eaux usées (Lutcavage et al., 1995 ; Conant et al., 2009). L’effet direct des fertilisants et pesticides est peu connu, toutefois leurs effets indirects tels que la dégradation de l’habitat via la prolifération d’algues à cause d’un excès de nutriments semblent plus évidents. Ainsi, les proliférations de Prorocentrum, une espèce de dinoflagellés sont dangereuses car l’acide okadaïque produit est toxique et peut induire des tumeurs. L’acide okadaïque a été retrouvée dans divers tissus de tortues vertes Hawaiiennes souffrant de fibropapilloma (Arthur et al., 2006). Les tortues marines sont particulièrement vulnérables aux maréees noires à tous les stades de leur développement. Il existe des effets sur la peau, le sang, les glandes à sel et les systèmes digestifs et immunitaires (Milton and Lutz., 2003). Il semble également que les activités liées à la production pétrolière et gazière extracôtière tels que les rejets opérationnels aient un impact sur les tortues caouannes (Conant et al., 2009). Les recherches dans ce domaine restent toutefois limitées. 34 - Ingestion de débris marins tels que des morceaux de plastique ou de polystyrène extrudé (Lutcavage et al., 1997) ; confusion entre ces débris et les proies ayant des effets létaux (Witherington et al., 2002). Les effets secondaires surviennent dans le cas où des débris secondaires remplacent les aliments ingérés, diluent l’apport en nutriments et réduisent de ce fait la croissance somatique et la reproduction (Conant et al., 2009). Le contenu digestif est tout aussi surprenant qu’écœurant : sacs plastiques, billes, cordes, fils de pêches, hameçons, charbon, verre, aluminium, cartons, papiers, ballons, polystyrène, … Figure 6. Tortue luth adulte prise dans les filets de palangre et échouée (Crédit Aquarium La Rochelle) - Les changements climatiques modifiant les trajets migratoires et l’augmentation de la température de la surface des océans qui les accompagne ayant des répercussions sur l’abondance et la répartition des proies (Conant et al., 2009). L'élévation du niveau de la mer risque de perturber les individus dans leur milieu marin et d’entraîner des changements du niveau trophique qui modifierait l'abondance ou la répartition de leurs proies (Conant et al., 2009). Les femelles ont besoin d'au moins un an pour constituer leurs réserves de graisses nécessaires à la reproduction ainsi qu’à la production de l’énergie requise pour la migration. Les milieux océaniques plus froids sont en général plus productifs ; une baisse de la productivité due à un réchauffement de température de l’eau pourrait conduire à une diminution des pontes et du recrutement (Conant et al., 2009). 35 B. Statut et protection Les efforts de conservation des populations de tortues caouannes au sein d’un pays peuvent être totalement ruinés par les activités d’un autre. La protection de cette espèce sur les plages de nidification aux Etats-Unis et dans les eaux territoriales américaines n’est pas suffisante. C’est pourquoi sa protection requière une collaboration internationale. La tortue caouanne bénéficie de la protection de la Endangered Species Act des Etats-Unis (USFWS and NMFS, 1978), de la Convention interaméricaine pour la protection et la conservation des tortues marines (InterAmerican Convention for the Protection and Conservation of Sea Turtles), du protocole relatif aux zones et à la vie sauvage spécialement protégées (Protocol Concerning Specially Protected Areas and Wildlife), de l’annexe I de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction et de la Convention sur la conservation des espèces migratrices (CITES) qui interdit le commerce international de ces espèces et de leurs produits dérivés. Elle est considérée « espèce en danger » par l’Union internationale pour la convention de la nature (IUCN, 1996) et figure donc sur la liste rouge. Aux Etats-Unis, NOAA Fisheries et USFWS possèdent une juridiction conjointe afin de régler les problématiques relatives aux tortues marines. La NOAA est responsable de l’environnement marin et USFWS régule la politique inhérente aux aires de nidification. Ces deux agences fédérales ont promulgué des régulations visant à éliminer ou réduire les menaces dont souffrent les tortues marines. Ainsi, des mesures concernent les prises accidentelles dans les palangres pélagiques ou de fonds, les filets maillants d’Atlantique, les filets de la Baie de Chesapeake et les chaluts de crevettes et de limandes sur la côte sud-est. En étroite collaboration avec l’industrie de la pêche chalutière à la crevette, NOAA Fisheries a développé des filets permettant d’exclure les tortues des prises, les dispositifs d’exclusion des tortues ou Turtle Excluder Devices ou TEDs (Fig. 7). Ceux-ci visent à réduire la mortalité des tortues de mer capturées incidemment. Les TEDs sont suffisamment grands pour exclure les plus gros individus, ils sont maintenant rendus obligatoires sur tous les chalutiers de pêche à la crevette. Toute importation de crevettes pêchée de manière délétère aux tortues marines est interdite et ce depuis 1989. 36 Figure 7. Turtle Excluder Device, dispositif d’exclusion des tortues leur permettant de fuir. Crédit NOAA III. Le système immunitaire A. Le système hématopoïétique des reptiles Le sang des reptiles comprend des éléments cellulaires et acellulaires. Le volume de sang total est variable en fonction des espèces avec par exemple 7,3 ml pour 100 g de poids vif pour l'alligator et 9,1 ml pour 100 g poids vif pour la tortue à tempe rouge (Trachemys scripta elegans) (Strik et al., 2007). Les composants cellulaires comprennent l'hématocrite variant entre 20 et 40% qui est composé d’érythrocytes, puis de granulocytes, lymphocytes, monocytes, cellules plasmatiques et thrombocytes. La fraction acellulaire du sang, le plasma, formant entre 60 et 80 % du volume de sang est soit incolore, ou jaune très pale, ou encore très fortement pigmenté comprenant des caroténoïdes en fonction des espèces. Au sein du plasma se trouvent des électrolytes inorganiques ainsi qu’une grande diversité de composés organiques. Il existe des variations des centres hématopoïétiques en fonction des espèces de reptiles et de l’âge de l’animal au sein d’une même espèce. Les organes principaux responsables de l’hématopoïèse sont la moelle osseuse, le foie et la rate. Bien que les lignées erythropoïétiques et granulopoïétiques soient produites spécifiquement au sein de la moelle osseuse, la rate participe également au maintien de cette activité. Les 37 cellules souches myéloïdes sont multipotentes et donnent naissance à tous les types cellulaires ayant pour origine la moelle osseuse. Les érythrocytes matures sont nucléés et ovales, les immatures sont ronds avec un cytoplasme basophile. Les globules rouges séniles sont plus grands que les érythrocytes matures avec un cytoplasme plus pâle et un noyau pycnotique. Les dimensions des globules rouges varient à la fois entre espèces et au sein de la même espèce. Par exemple, pour le lézard arc-en-ciel (Ameiva ameiva), le diamètre moyen des érythrocytes est de 7,6 µm alors que pour le sphénodon ponctué (Sphenodon punctatus) le diamètre est de 23,3 µm. De manière analogue, le nombre des érythrocytes varie de manière intra et interspécifique, en fonction de l’âge, du sexe, de la saison, de l’altitude, de l’alimentation et des maladies potentielles (Stacy et al., 2011). Le groupe des globules blancs comprend une variété de cellules ayant une homologie avec les lignées cellulaires des vertébrés supérieurs. Nous reviendrons sur ces lignées cellulaires ultérieurement. B. Les organes lymphoïdes des reptiles Le système lymphoïde est composé d’organes majeurs et structures anatomiques tels que la moelle osseuse, le thymus et la rate. Les autres organes lymphoïdes secondaires incluent les tissus lympoïdes associés aux intestins (GALT) et aux bronches (BALT). 1. La moelle osseuse Elle constitue l’un des organes lymphopoïétiques et hématopoïétiques majeurs. Chez les mammifères, la moelle osseuse est le siège de la lympho-, hémato- et myélopoïèse. Pour la majorité d’entre eux, elle est également le siège de la maturation des lymphocytes B. Chez les reptiles, la moelle osseuse est localisée dans les cavités : 1/ de certains os du crâne, 2/ des os longs chez les lézards, chéloniens et crocodiliens, 3/ des côtes et vertèbres des serpents, 4/ du plastron, carapace et pelvis chez les chéloniens (Origgi et al., 2007). L’activité hématopoïétique de la moelle osseuse des reptiles en fait un groupe intermédiaire situé entre les amphibiens pour lesquels la rate est l’organe érythropoïétique majeur et les oiseaux où la moelle osseuse joue ce rôle 38 (Cooper et al., 1985). Chez les tortues, la rate et la moelle osseuse constituent les organes érythropoïétiques (Origgi et al., 2007). Chez la tortue du désert (Gopherus agassizii), les prélèvements de moelle osseuse sont effectués à partir de diverses écailles (nucales, anales, marginales et supercordes) de la carapace ainsi que des écailles (gulaires, inframarginales, fémorales, et anales) du plastron (Origgi et al., 2007). La moelle osseuse peut être prélevée à partir du fémur, de l’humérus et du pelvis. Le stroma est composé d’un réseau fibreux de cellules réticulées, de graisse, d’artérioles, de veinules, de nerfs ainsi que de nombreux sinus veineux, à parois fines, bordés de cellules endothéliales. Au sein des cavités extravasculaires se trouvent également des mélanophores et mélanocytes ainsi que des granulocytes remplis de granules éosinophiles (hétérophiles et éosinophiles ne peuvent être distingués), des précurseurs des granulocytes et des cellules mononuclées. Les précurseurs des érythrocytes peuvent être visualisés dans les sinus veineux. Les granulocytes contenant des granules éosinophiles forment les leucocytes majoritaires de la moelle osseuse tandis que les cellules plasmatiques ne représentent que moins de 1% des cellules. 2. Le thymus C’est un organe propre aux vertébrés où s’effectue la maturation des lymphocytes T. Les cellules du thymus joue un rôle critique dans la maturation fonctionnelle des lymphocytes T chez les mammifères. Chez les reptiles, l'existence d'un processus similaire est incertain, toutefois, les évidences fonctionnelles de l’existence du complexe majeur d'histocompatibilité chez les reptiles (Farag and El Ridi, 1985, 1990) analogue à celui des mammifères suggère qu’une chaîne d’événements similaires existe. a. Anatomie Des différences à la fois embryologiques (Cooper et al., 1985) et morphologiques ont été objectivées chez les différents groupes de reptiles. Chez les chéloniens, le thymus est localisé crânialement au cœur, à côté de la bifurcation entre l’artère sous-clavière et la carotide (Fig. 8). 39 Figure 8. Thymus de tortue verte (Chelonia mydas) en position anatomique. Le thymus est cranial au coeur. D'après Origgi et al., 2007 (Crédit Bobby Collins). Le thymus des reptiles est entouré d’une capsule formée de tissu conjonctif dense. Des septa partent de la capsule et subdivise le thymus des chéloniens en lobules distincts. Certaines espèces de chéloniens ont des lobules consistant en une corticale externe et une médullaire interne, tandis que chez d’autres cette subdivision n’est pas apparente ou varie de manière saisonnière (Cooper et al., 1985). Les thymocytes et cellules épithéliales sont les types cellulaires les plus courants dans le thymus des reptiles (Fig. 9). Les cellules épithéliales sont distribuées à la fois dans le cortex et la médullaire. Les cellules myoïdes forment un autre type cellulaire présent dans le parenchyme thymique. Figure 9 Coupe histologique de thymus chez la tortue caouanne (Caretta caretta), coloration Hémalun & Eosine. Une capsule de tissu conjonctif (CT) entoure le thymus. A gauche, le tissu est normal, chaque lobule comprend une médullaire (ME) et une corticale (CO). Par comparaison, à droite, le thymus est en phase d’involution et la distinction corticale / médullaire n'est plus possible. D'après Origgi et al., 2007. 40 Les kystes épithéliaux forment une structure supplémentaire du thymus (Cooper et al. 1985). Leurs origines et fonctions ne sont pas très claires. Les kystes sont toujours associés aux cellules épithéliales et peuvent être intra- ou extracellulaires. b. L’involution thymique L’involution thymique est saisonnière, réversible, cyclique et est associée à une réduction sévère des cellules lymphoïdes et une augmentation du tissu conjonctif (Fig. 9 à droite). Cette involution progresse avec l’âge. En effet les populations lymphoïdes régressent continuellement saison après saison (Origgi et al., 2007). Cette involution a été décrite chez les animaux malades ou affamés ; elle est réversible lorsque le facteur de stress est ôté (Cooper et al., 1985). 3. La rate a. Anatomie Cet organe a été étudié chez moins de 30 espèces de reptiles sur les 7500 recensées actuellement (Origgi et al., 2007). Elle peut être ovale, sphérique ou allongée. Elle est localisée dans la cavité abdominale proche du pancréas. Chez certaines espèces, ces deux organes sont pratiquement indiscernables au point qu’ils ne forment qu’une unique entité anatomique que l’on nomme le splénopancréas (Fig. 10). Figure 10. Coupe histologique de splénopancréas (Crotalus viridis), coloration Hémalun & Eosine. Sur cette coupe, le pancréas exocrine (EX) ainsi que les îlots de Langerhans (IS) sont en continuité avec la rate. (SP) D'après Origgi et al., 2007. 41 La structure histologique de la rate montre qu’elle est formée d’une capsule de tissu conjonctif, de travées plongeant dans la pulpe rouge et de la pulpe blanche (Fig. 11). Cette dernière représente la composante immunologique de la rate. Elle est bien développée et subit les variations saisonnières. La structure générale est similaire chez les chéloniens, crocodiliens et lézards, avec des différences chez les serpents. Les rates de plusieurs espèces de chéloniens ont été étudiées (Origgi et al., 2007) incluant les Trionyx de Chine (Pelodiscus sinensis), les tortues Emydes du Japon (Mauremys japonica), les tortues alligator, les tortues à tempes rouges, la tortue caspienne et les tortues-boîte de Chine (Cistoclemmys flavomarginata). Les travées de la capsule se projettant vers le parenchyme peuvent ou non être présentes. La pulpe blanche est composée de deux types d’agrégats lymphoïdes entourant les éléments vasculaires. Les artérioles de la pulpe blanche sont entourées d’un manchon de lymphocytes appelé manchon lymphoïde péri-artériolaire (PALS). Ils contiennent des cellules lymphoïdes, des cellules plasmatiques matures et immatures et des cellules interdigitées. Les artérioles centrales donnent naissance aux capillaires qui sont entourés d’un tissu de fibres réticulés (ellipsoïde) qui est lui même entouré d’un tissu lymphoïde, le manchon lymphoïde péri-ellipsoïdal (PELS). La délimitation entre la pulpe blanche et rouge est difficile à définir car beaucoup de lymphocytes et granulocytes se situent également dans la pulpe rouge. Aucun centre de germination n’a été observé dans les rates de chéloniens et ce même après stimulation antigénique (Origgi et al., 2007). La pulpe rouge entoure la pulpe blanche et est composée de sinus et de cordons. Les cordons de la pulpe comprennent le tissu intervasculaire et contiennent des cellules inflammatoires telles que les lymphocytes, macrophages, cellules plasmatiques, granulocytes et des éléments structuraux tels que les cellules interstitielles. L’activité érythropoïétique de la rate est toujours controversée. Très peu d’informations sont disponibles concernant la distribution des lymphocytes B et T dans la rate des reptiles. 42 Figure 11. Coupe histologique de rate (Caretta caretta), coloration Hémalun & Eosine. Sur cette coupe, les pulpes rouge et blanche sont entrelacées. La pulpe blanche consiste en des vaisseaux entourés de tissu lymphoïde. D'après Origgi et al., 2007 b. Fonction de la rate Il existe très peu d’études portant sur la fonction de la rate chez les reptiles consécutive à une stimulation antigénique (Origgi et al., 2007). Chez la tortue hargneuse, une forte réponse proliférative entraînant une augmentation de la masse de la pulpe blanche a été obtenue suite à une stimulation antigénique avec de l’hémocyanine de Megathura crenulata. Cette prolifération active a tout d’abord été observée dans la pulpe blanche (8 à 10 jours après immunisation) puis dans la pulpe rouge (15 à 20 jours après immunisation). Aucun changement histologique n’a pu être observé dans la rate des tortues alligator ni des agames après une seconde immunisation. La pulpe rouge de la couleuvre de Forsskal est soumise aux variations saisonnières; elle est bien développée en hiver avec un très faible nombre d’agrégats lymphoïdes dans la pulpe blanche. Au printemps, les agrégats lymphoïdes augmentent en taille et nombre, pour devenir plus denses et presque coalescents. La réponse humorale vis à vis de divers antigènes est forte à ce moment là. De fin juin à juillet le tissu splénique lymphoïde régresse à nouveau, entraînant une réaction humorale plus faible. 4. Tissus lymphoïdes associés et structures lymphoïdes accessoires. Les structures lymphoïdes ne faisant pas partie des organes lymphoïdes majeurs (rate, thymus, moelle osseuse) sont regroupées. Chez les mammifères, ces structures forment le GALT (gut-associated lymphoïd tissue) et incluent les 43 amygdales, les végétations, et les plaques de Peyer, le BALT (bronchial-associated lymphoïd tissue) et les nœuds lymphatiques. Ces structures se situent où les cellules du système immunitaires ont la plus forte probabilité de rencontrer un antigène. Ces structures ont également été décrites chez les reptiles. a. Le GALT : Tissu lymphoïde associé aux intestins Le GALT composé de nombreuses structures lymphoïdes disséminées est distribué le long du tractus digestif et forme l’organe lymphoïde le plus important du corps. Les structures constituant le GALT sont situées en majorité dans l’œsophage, la jonction iléo-caecale, le colon et le cloaque. Elles sont petites, non encapsulées et s’étendent de la lamina propria (ou lame basale) jusqu’à la sous-muqueuse (Cooper et al., 1985). Contrairement aux composants lymphoïdes de la rate et du thymus, le GALT ne semblent pas subir de variations saisonnières (Cooper et al., 1985). b. Les nœuds lymphatiques et autres structures lymphoïdes Il n’existe pas de nœuds lymphatiques sensus stricto chez les reptiles contrairement aux mammifères. Par contre des structures similaires assimilées à un tissu lymphatique ectopique ont été décrites dans divers organes tels que les poumons, les reins, la vessie, le pancréas et les testicules (Cooper et al., 1985). Ces structures ont également été décrites dans les régions péri-vasculaires chez divers reptiles (Cooper et al., 1985), suggérant une homologie fonctionnelle potentielle avec les nœuds lymphatiques des mammifères. C. Le système immunitaire Le système immunitaire des vertébrés possède une composante innée et une composante acquise. L’immunité acquise et une partie de l’immunité innée sont basées sur la reconnaissance du « non soi ». L’immunité innée entre en action en premier lieu car elle ne requière aucune activation que celle fournit par l’agent pathogène lui-même. Cette première ligne de défense est composée de cellules phagocytaires dont le but va être de détruire et d’éliminer l’envahisseur. Les divers acteurs du système immunitaire inné reconnaissent des motifs structuraux très conservés au cours de l’évolution de nombreux pathogènes. Ces motifs « clés » représentent le signal nécessaire et suffisant à l’activation des effecteurs du système 44 immunitaire inné. Cependant, les agents pathogènes plus virulents vont pouvoir échapper à ce contrôle. Ainsi entre en jeu le système immunitaire acquis qui va être activé via une série d’interactions cellulaires complexes afin de déployer les défenses nécessaires. Le système immunitaire acquis est lui-même subdivisé en deux réponses possibles : une réponse cellulaire et une autre humorale. La réponse cellulaire est principalement basée sur l’activité cytotoxique de deux groupes de cellules spécialisées que sont les lymphocytes T cytotoxiques (CD8+) et les cellules tueuses naturelles ou natural killer (NK). Ces cellules effectrices peuvent cibler et détruire les cellules infectées grâce à des signaux spécifiques que les cellules infectées par un agent pathogène exposent sur leur membrane. Les cellules T effectrices reconnaissent la présence du pathogène dans une cellule hôte grâce au récepteur cellulaire T (TCR). Ces récepteurs engagent également une molécule du complexe majeur d’histocompatibilité ou CMH de classe 1 dans le cas des cellules T CD8+, exprimé sur la membrane cellulaire de la cellule hôte. Ces antigènes d’histocompatibilité sont impliqués dans la présentation de petits fragments peptidiques spécifiques du pathogène aux cellules T. La fonction la plus importante de la réponse humorale du système immunitaire est la production d’immunoglobulines qui sont des molécules solubles, synthétisées et sécrétées par les lymphocytes B et qui font fonction d’anticorps (Ac). Ces Ac se lient à un antigène spécifique de l’agent pathogène. La stimulation par l’agent pathogène déclenche la synthèse d’anticorps ainsi que leur libération dans la circulation sanguine jusqu’à ce qu’ils rencontrent puis se lient à un agent pathogène spécifique. Ainsi, les réponses cellulaires et humorales s’interpénètrent lors de la réponse immunitaire. Il en est de même pour la réponse immunitaire innée. Une première exposition et réponse à un nouveau pathogène, vont induire la formation d’un groupe spécifique de lymphocytes. Celles-ci constituent les cellules mémoire latentes en attente d’une ré-exposition ultérieure. Ces cellules patrouillent dans la circulation sanguine de l’hôte à l’affût du pathogène ayant déjà déclenché une première réponse. Ce groupe de cellules mémoire va se réactiver chaque fois que le pathogène initial se représentera. 45 La réponse immune est un processus complexe impliquant de nombreux acteurs : cellules et molécules effectrices. Il est possible qu’un grand nombre de ces fonctions effectrices et des interactions décrites chez les mammifères, existent également chez les reptiles. Toutefois, le système immunitaire des reptiles a été très peu étudié, principalement entre les années 1970 et 1980 puis tout intérêt dans ce domaine a disparu. Un fossé énorme en terme de connaissances s’est formé et celles ci sont désormais limitées et parcellaires. Ce qui est connu va être développé dans les sections suivantes. 1. Les mécanismes de défense innée Ces mécanismes peuvent être actifs via des facteurs humoraux et cellulaires non spécifiques ou passifs tels que jouer un rôle de barrière (revêtements cutanés ou muqueux). a. Revêtements cutanés et muqueux La peau est la première barrière physique du reptile. La couche externe kératinisée est très spécifique chez le reptile. Elle est très épaisse ce qui offre une résistance mécanique et biologique importante ainsi que l’exuviation. L’exfoliation de la région du cou a également été rapportée chez les tortues marines ainsi que la mue de certaines écailles. La capacité à remplacer la peau de manière régulière est une stratégie de défense contre les pathogènes cutanés. La muqueuse au contraire est souvent déficiente en kératine au sein de sa couche externe ce qui tend à rendre ces structures plus délicates et vulnérables aux sollicitations mécaniques et aux agents microbiologiques. Une exception est l’œsophage des tortues marines qui est composé de papilles kératinisées. Il a été montré que les salmonelles ne peuvent envahir et traverser la muqueuse intestinale des tortues à tempes rouges lorsque celles-ci sont maintenues à 26°C (Pasmans et al., 2001, 2002). Par contre cela est tout à fait possible lorsqu’elles sont maintenues à 37°C. Ainsi la température semble être un facteur important de l’intégrité des muqueuses chez les reptiles. b. Les facteurs humoraux non spécifiques Les sécrétions, la surface des muqueuses et autres fluides corporels contiennent des composés ayant pour rôle la protection de l’organisme et limitant 46 l’invasion par des micro-organismes pathogènes. Ces composés sont les interférons, les transferrines, le lysosyme ainsi que le complément. Les interférons font partie de la grande famille des cytokines et sont connus pour leur activité antivirale. Chez les mammifères, les interférons de type I (alpha et béta) possèdent une activité antivirale et permettent d’augmenter l’expression du CMH-1 à la surface des cellules et d’activer les cellules NK. L’augmentation de l’expression du CMH-1 renforce la réponse cellulaire à l’encontre des virus grâce à une présentation exacerbée des peptides viraux aux cellules T cytotoxiques. Les interférons de type II (gamma) sont impliqués dans la réponse immunitaire de lutte contre les pathogènes intracellulaires et dans l’activation des macrophages ainsi que dans la maturation des lymphocytes T CD4+. Ce sont des protéines clé de la modulation des réponses immunitaires innées et acquises lors d’infections et d’inflammations. L’existence d’un facteur soluble ayant une activité antivirale similaire à l’interféron (Origgi et al., 2007) a été rapportée dans les reins de tortues grecques à la suite de diverses infections virales (West Nile, Newcastle, Sendai). Ce facteur a permis aux cellules de résister à la charge infectieuse. Il a également été décrit la production d’un facteur similaire par les cellules du tissu cardiaque des terrapines infectées avec par le virus de l’encéphalite de Saint Louis. Les transferrines sont présentes dans le plasma de tous les vertébrés, y compris les reptiles. Ces protéines ont une très forte capacité à fixer le fer. En séquestrant le fer disponible, les transferrines ont une activité à la fois bactériostatique et fongicide. Le taux de fer plasmatique diminue chez des lézards préalablement infectés avec des bactéries. Ainsi, la combinaison de faible taux de fer plasmatique associée à des températures corporelles élevées possèdent des effets délétères sur la croissance bactérienne (Origgi et al., 2007). Le lysozyme est un facteur antimicrobien qui est produit principalement par les lignées lymphocytaires/macrophagiques. Après inoculation avec Leishmania agamae, les taux de lysozyme sérique augmentent de deux à cinq fois chez le lézard vert (Lacerta viridis), et de trois fois chez l’agame (Agama caudospinosum, Origgi et al., 2007). Chez les tortues caouannes, l’activité du lysozyme a été corrélée positivement avec les concentrations plasmatiques de brevetoxine, une neurotoxine produite par un dinoflagellé Karenia brevis (Walsh et al., 2010 47 Le complément est un complexe de 30 facteurs solubles et de molécules qui faisant partie d’une cascade inflammatoire. Le système du complément des reptiles comprend de multiple isoformes de la fraction C3. Cela participerait à étendre leur capacité de reconnaissance immunitaire (Sunyer and Lambris, 1998). Les effets inhibiteurs du sérum d’alligator (Alligator mississippiensis) contre E. coli et Naegleria gruberi sont très probablement médiés par le complément (Merchant et al., 2004). Une activité antivirale du complément a également été évoquée (Merchant et al., 2005a). Kuo et al., (2000) ont montré comment la voie alterne du complément était responsable de la destruction des spirochètes (Borrelia burgdorferi) chez le lézard des palissades (Sceloporus occidentalis) et le lézard alligator (Elgaria multicarinata). L’identification de la voie alterne de l’activation du complément a relativement récemment été mise en évidence chez l’alligator (Merchant et al., 2005b). c. Les facteurs cellulaires non spécifiques La phagocytose Il s’agit de la capture et de l’ingestion de particules telles que des bactéries et des débris cellulaires par des cellules spécialisées. Ces cellules incluent les macrophages, les hétérophiles et les cellules dendritiques. La membrane cellulaire des phagocytes englobe les pathogènes afin de former une vésicule de phagocytose qui va ensuite fusionner avec les lysosomes afin de former un phagolysosome. Le matériel ingéré est ensuite dégradé par des enzymes ainsi qu'un pH acide. L’activation de la production de composés toxiques pour le pathogène comme le peroxyde d’hydrogène et les radicaux libres est appelée explosion respiratoire. Les monocytes - macrophages Les leucocytes les plus grands (8 à 25 µm) dans la cirulation sanguine des reptiles sont les monocytes. Ils sont similaires à ceux des mammifères en fonction et en morphologie (Sypek and Borysenko, 1988). Ils sont ronds avec un cytoplasme gris, pâle à modérément basophile (Fig. 12). En fonction de leur stade de réaction, les monocytes peuvent contenir des vacuoles cytoplasmiques de taille et forme variables (Fig. 12). En quantité, les monocytes peuvent constituer 10% des leucocytes (Sypek and Borysenko, 1988). Leur nombre varie peu en fonction des saisons et leur 48 pourcentage reste constant (Duguy et al., 1970). Toutefois, leur nombre augmente lors de l'hibernation de la tortue du désert et en cas de dystocies chez les caméléons (Stacy et al., 2011). Leur nombre augmente également lors de stimulation antigénique ce qui est fortement évocateur d'un processus infectieux chronique. Ils sont présents dans les granulomes et la formation des cellules géantes en cas d'infection bactériennes ou en présence d'oeufs de trématodes (Campbell, 1996). Figure 12. Photomicrographie de monocyte de tortue Gopherus agassizii, normal à gauche et de monocytes réactifs de tortue Geochelone sulcata. Coloration Wright-Giemsa. D'après Strik et al., 2007 Les macrophages sont des phagocytes spécifiques des organes dérivant des monocytes circulants. Ils font partie à la fois de l’immunité innée et acquise. Les macrophages phagocytent activement bactéries, parasites, débris cellulaires et autres matériaux. Après phagocytose les micro-organismes sont digérés et leurs déterminants structuraux sont présentés sur le CMH aux cellules T circulantes afin d’activer la réponse acquise. Chez les reptiles, l’activité phagocytaire des macrophages a été étudiée par plusieurs auteurs. Roy et Rai (2004) ont montré que de faibles niveaux de catécholamines pouvaient augmenter l’activité phagocytaire des macrophages spléniques chez le gecko (Hemidactylus flaviviridis). A forts taux cependant, les catécholamines agissent comme immunosuppresseurs. Mondal and Rai (2002), ont montré que le temps d’exposition et la dose de glucocorticoïdes affectaient l’activité phagocytaire et la libération des nitrites issus des macrophages spléniques activés par le liposacharide (LPS). Les hormones sexuelles (mâles et femelles) possèdent également un rôle inhibiteur de l’activité phagocytaire, de la libération de nitrites avec pour conséquence une perturbation importante de l’activité cytotoxique des macrophages (Mondal and Rai, 1999). La température est aussi un facteur affectant la phagocytose des macrophages spléniques du gecko. En effet, la phagocytose et l’activité cytotoxique des macrophages sont plus importantes à 25°C 49 qu’à de plus hautes ou de plus basses températures (Mondal et Rai, 2001). Une autre étude réalisée en 2002 (Pasmans et al., 2002) a montré que les macrophages de tortues à tempes rouges ne phagocytaient aisément Salmonella enterica (ser Muenchen) qu’entre 30˚C et 37˚C. Les mélanomacrophages sont des macrophages caractérisés par la présence de mélanosomes intracellulaires. Une autre étude menée sur les mélanomacrophages a montré qu’à basses températures les mélanophages des tortues avaient une activité phagocytaire plus importante vis à vis de E. coli que leur homologue de mammifères (Stacy et al., 2011). Les cellules dendritiques Les cellules dendritiques sont des cellules présentatrices d’antigène (CPA) spécialisées, capables de présenter via le CMH, les antigènes aux lymphocytes-T. Contrairement aux cellules dendritiques immatures, les cellules matures perdent toute activité phagocytaire pour ne conserver que leur rôle de CPA. Chez les reptiles, il semble que les cellules dendritiques se situent dans la zone marginale de la rate (Origgi et al., 2007). Chez la tortue caspienne, l’injection de billes de carbone ne semble pas induire la phagocytose de celles-ci par les cellules dendritiques matures. Les hétérophiles Ces cellules sont grandes, rondes, avec un cytoplasme clair qui contient de nombreux granules cytoplasmiques allongés, pouvant recouvrir le noyau. La forme du noyau dépend de l'espèce étudiée varie de rond à ovale, est excentré (chez la plupart des serpents, chéloniens et crocodiliens) ou encore posséde deux ou plusieurs lobes (lézards). La taille de ces cellules varie de 10 à 23 µm. Les granules cytoplasmiques des chéloniens et crocodiliens sont éosinophiles et fusiformes (Fig. 13). Une morphologie anormale peut être observée lors de réponse à un processus inflammatoire et particulièrement lors de maladies infectieuses. Des hétérophiles dits "toxiques" se forment dans la moelle osseuse avant leur libération dans le sang périphérique. Les changements les plus sévères, aussi bien morphologiques que numériques des hétérophiles, sont provoqués par des toxines bactériennes et sont souvent témoins d'entérite ou autres infections bactériennes sévères à gram négatif (Stacy et al., 2011). La toxicité est caractérisée par l'intensification de la basophilie du 50 cytoplasme, la dégranulation, la vacuolisation, une granulation excessive du cytoplasme et un noyau excessivement lobulé (Fig. 13). Ces changements toxiques varient en intensité avec la sévérité de la maladie. Une toxicité modérée est associée à une augmentation de la composante basophile du cytoplasme, avec des granules hétérophiles normaux en nombre et morphologie. La dégranulation peut résulter d'un artéfact lors de la préparation du frottis sanguin ou d'une conservation excessive du sang dans l'anticoagulant. Une modification des granules, qui deviennent violet très foncé ou moins nombreux et de taille augmentée, accompagne une toxicité sévère. Une lobation du noyau chez des espèces n'en ayant habituellement pas peut également témoigner d'une toxicité (Campbell, 1996). Un déplacement vers la gauche est visualisable par la présence de myélocytes et métamyélocytes. Les hétérophiles immatures possèdent un noyau plus grand, des granules pléiomorphes, un cytoplasme plus basophile contenant des granules primaires (Fig. 13). Cela se produit en cas d'infection très sévère avec une demande de mobilisation accrue. Les bactéries intracytoplasmiques dans le sang périphérique chez les animaux septicémiques sont très rarement observées. Leurs fonctions consistent en la phagocytose et l'activité microbicide lors de maladies inflammatoires (Stacy et al., 2011). Les hétérophiles représentent entre 30 et 45% des leucocytes lors du comptage cellulaire chez les reptiles sains (Frye, 1991). Une hétérophilie est décrite lors de réponses inflammatoires chez les reptiles au cours de infections microbiennes, des maladies parasitaires, et des processus inflammatoires non spécifiques ou de processus nécrotiques (Campbell, 1996). La gestation, l'administration de glucocorticoides, le stress, les processus néoplasiques, les leucémies granulocytiques entrainent également une hétérophilie (Stacy et al., 2011). L'hétéropénie est décrite en cas d'infection extrèmement sevère, résultant d'une demande excessive de cellules dans les tissus atteints. Des anomalies hématologiques telles que les modifications toxiques peuvent se produire de manière concomittante. 51 Figure 13. Photomicrographie d'hétérophiles. A gauche, il s'agit d'un hétérophile d'alligator, qui est normal ; on remarque un petit lymphocyte bien différencié (tête de la flèche) et un autre plus grand (flèche). A droite par contre, il s'agit d'hétérophiles de Physignathus, ceux-ci sont modérément toxiques avec une dégranulation et un cytoplasme basophile. Coloration Wright-Giemsa. D'après Strik et al., 2007 Il y a très peu d’informations concernant les mécanismes cellulaires conduisant à la phagocytose des micro-organismes par les hétérophiles. Activation de la phagocytose La phagocytose réalisée par les macrophages et hétérophiles peut également être influencée par des molécules telles que les opsonines ou interférons gamma. Pasmans et al., 2001, ont décrit chez la tortue à temps rouge l’osponisation de Salmonella enterica, entraînant une augmentation de l’explosion respiratoire des macrophages et ce par comparaison aux bactéries non préalablement opsonisées. Les cellules tueuses cytotoxiques (NK cells) Elles forment un sous groupe de lymphocytes et sont caractérisées par leur capacité innée à détruire les cellules infectées sans avoir été préalablement ni recrutées ni activées par les cellules présentatrices d’antigènes. Les cellules tueuses naturelles prennent en charge les cellules infectées via leur récepteur Fc, qui se lie aux anticorps recouvrant les cellules infectées. Ce processus est nommé cytotoxicité à médiation cellulaire dépendante des anticorps (ADCC). Les cellules tueuses naturelles ont été mises en évidence et caractérisées par Sherif and El Ridi (1992) chez les couleuvres sifflantes des sables (Psammophis sibilans) et par Munoz et al., (2000) chez la tortue Caspienne. Pour cette espèces, l’activité NK était plus importante en hiver et été (hiver et printemps pour les cellules thymique des mâles) qu’en automne et printemps. Une activité plus importante a été détectée chez la couleuvre africaine 52 (Psammophis sibilans) au printemps et en automne (Sherif and El Ridi, 1992). Cela suggère une variation saisonnière quant au nombre de sous populations ayant une activité NK chez ces deux espèces avec très probablement une panoplie de cellules NK différente. Sherif and El Ridi (1992) suggère que l’activité NK chez Psammophis sibilans est corrélée aux lymphocytes B et T car leur variation saisonnière en nombre était directement proportionnelle à l’activité NK chez cette espèce. Au contraire, Munoz et al., (2000) suggèrent que l'augmentation d'activité des cellules NK, qui se produit au même moment que l’involution des tissus lymphatiques chez la tortue caspienne, pourrait être une adaptation d'évolution à cette immunosuppression physiologique saisonnière. Les éosinophiles Les éosinophiles sont de grandes cellules (9 à 20 m), rondes, de même taille que les hétérophiles. Elles possèdent un cytoplasme clair rempli de granules éosinophiles et sphériques ainsi qu'un noyau bilobé, qui peut être centré ou non (Fig. 14). Chez les tortues vertes, deux types d'éosinophiles ont été décrits (Work et al., 1998). Une morphologie anormale est extrèmement rare ; les éosinophiles immatures contiennent des granules intracytoplasmiques pâles, modérément basophiles, ronds ou allongés (Fig. 14). Chez les reptiles sains, leur nombre varie entre 7 et 20% des leucocytes (Frye, 1991) avec les valeurs les plus élevées chez les tortues et les valeurs faibles chez les lézards (Sypek and Borysenko, 1988). Leur nombre varie en fonction de facteurs saisonniers, avec des valeurs plus faibles rapportées en été et élevées au cours de l'hibernation (Duguy, 1970). Une éosinophilie peut être associée au parasitisme ou à une stimulation immunitaire non spécifique. Les éosinophiles participent à la réponse immunitaire des tortues hargneuses (Chelydra serpentina) en phagocytant des complexes immuns lors d’infections, ainsi que chez les jeunes alligators Américains sains dont les cellules sanguines périphériques sont mises en présence de Staphylococcus aureus (Stacy et al., 2011). 53 Figure 14. Photomicrographie d'éosinophiles. A gauche, il s'agit d'un éosinophile normal (tête de la flèche) d'alligator ; on remarque un hétérophile toxique (flèche). A droite, il s'agit de 2 éosinophiles de Cuora galbinifrons, tortue indonésienne très rare. L'un est normal (flèche) et l'autre plus large est toxique avec des granules basophiles primaires et éosinophiles secondaires (Coloration WrightGiemsa ; D'après Strik et al., 2007). Les cellules dites toxiques subissent un changement morphologique tel que dans les cas modérés une dégranulation, un cytoplasme basophilique, et dans les cas sévères, une vacuolisation cytoplasmique et la présence de granules cytoplasmiques pléiomorphiques. Ces cellules « toxiques » ont été activées et libèrent par phase des médiateurs inflammatoires et de molécules toxiques. 2. Les mécanismes de défense spécifique a. Les Lymphocytes : présentation générale (Abbas et al., 2015) Les lymphocytes sont des cellules intervenant dans l’immunité acquise. Ils sont traditionnellement divisés en deux groupes, les B pour Bourse de Fabricius (chez les oiseaux) et Bone marrow (moelle osseuse pour les mammifères) ainsi que les lymphocytes T (Thymus chez les mammifères). Les deux sous-populations proviennent de la moelle osseuse ; les lymphocytes migrent progressivement vers leur organe de différenciation où ils se divisent, puis subissent un processus de maturation par étapes. Le processus de maturation des lymphocytes B s’effectue dans la moelle osseuse; le lymphocyte B immature exprimant une IgM complète à sa surface subira une sélection envers les antigènes du soi. Les cellules B qui survivront à cette sélection se retrouveront dans les organes lymphoïdes secondaires, où elles deviendront des lymphocytes B matures, exprimant en plus une IgD à sa surface et pouvant être activées par des antigènes exogènes. Le processus de maturation des lymphocytes T permet de conserver une grande diversité de reconnaissance des antigènes par les récepteurs des lymphocytes T et des anticorps tout en prévenant d’une action contre les antigènes du soi. Les 54 lymphocytes sélectionnés positivement permettent la défense contre les antigènes étrangers reconnus dans un contexte CMH, tandis que la sélection négative est essentielle pour éviter les réactions auto-immunitaires. À leur arrivée dans le cortex thymique, les progéniteurs lymphoïdes vont interagir avec un réseau de cellules épithéliales, afin d’acquérir certaines molécules de surface dont le Thy-1. Les cellules deviennent ainsi thymocytes « doubles négatifs ». Lorsque les thymocytes expriment les molécules CD44 (molécule d’adhésion) et CD25 (récepteur de l’interleukine 2), les gènes codant pour la chaîne β du récepteur T se réarrangent pour être exprimée. Les cellules qui échouent meurent, alors que les cellules qui réussissent et produisent une chaîne β fonctionnelle, survivent et perdent l’expression de CD25. La chaîne β s’assemble ensuite avec une chaîne α pour former le pré-récepteur T (pré-RcT), accompagné du CD3. L’assemblage CD3/pré-RcT engendre une prolifération et l’expression des molécules CD4 et CD8, appelés thymocytes « doubles positifs ». Lorsque la prolifération s’arrête, les gènes codant pour la chaîne α se réarrangent. Lorsque la chaîne α et la chaîne β sont exprimées à la surface cela forme le récepteur T fonctionnel. Par la suite, les cellules « doubles positives » passent un processus de sélection positive avant de migrer vers la médulla pour subir une sélection négative. La sélection positive permet la survie des thymocytes qui possèdent une bonne affinité avec les CMH de classe I et II exprimés sur les cellules épithéliales du cortex thymique. Cette sélection est nécessaire pour induire une réponse immunitaire restreinte spécifique du soi. Les thymocytes « doubles positifs » interagissent avec les CMH I et II par leur RcT et les molécules CD8 et CD4 respectivement. Les thymocytes qui ne se lieront pas aux CMH mourront par apoptose. La sélection négative permet d’éliminer les thymocytes qui réagissent fortement aux interactions entre le CMH de classe I et II des cellules dendritiques et macrophages, présentant un peptide du soi. Le but étant de développer une tolérance au soi. Une fois matures, les lymphocytes B et T, en état de repos, se retrouvent dans la circulation sanguine afin d’atteindre les organes et tissus lymphoïdes (nœuds lymphatiques, tissu lymphoïde associée aux intestins et aux bronches, rate, …) où ils rencontreront des antigènes étrangers. L'activation des lymphocytes T nécessite la présentation des antigènes étrangers par une cellule présentatrice d’antigène ou CPA (macrophage, cellule dendritique ou lymphocyte B). Le premier signal d'activation du lymphocyte T présentant un marqueur de surface CD4+ est constitué par l'engagement 55 d'un récepteur T avec un CMH de classe II, présentant un peptide immunogène sur une CPA. L’activation complète des lymphocytes nécessite un second signal, appelé co-stimulation, qui doit être reçu au moment de la reconnaissance de l’antigène par le RcT. Les lymphocytes activés synthétisent des cytokines et entrent en division cellulaire. Les lymphocytes CD4+ libèrent l’interleukine 2 (IL-2) et expriment la chaîne α du récepteur de l’IL-2 (CD25), permettant ainsi à cette cytokine d’agir de manière autocrine pour activer leur prolifération. Les lymphocytes T CD4+ reconnaissent également les peptides antigéniques exposés en association avec le CMH de type 1. La libération d'IL-2 par les cellules CD4+ peut aussi activer les lymphocytes CD8+ reconnaissant un antigène étranger présenté par un CMH de classe I. Les lymphocytes T CD4+ sont impliqués dans la régulation de la réponse immunitaire acquise. La différenciation des lymphocytes T CD4+ naïf peut se produire en deux directions : lymphocyte T helper TH1 ou TH2. La production de cellules TH1 mène à une immunité cellulaire, tandis que la production de cellules TH2 mène à une immunité humorale. La différence entre les cellules TH1 et TH2 réside dans les patrons de cytokines produites. Les cellules TH1 sécrètent principalement l’intéféron INF-γ, l’IL-2, les TNF-α et TNF-β, tandis que les cellules TH2 sécrètent principalement les interleukines IL-4, IL-5, IL-10 et le TGF-β. La stimulation des lymphocytes T CD8+ ou cellules T cytotoxiques requiert un signal généré par la liaison du CMH de classe I présentant un peptide étranger, des signaux de co-stimulation et un signal généré par la liaison de L'IL-2 à son récepteur. Une cellule dendritique activée, possédant des molécules de co-stimulation, peut directement activer un lymphocyte T CD8+. La cellule T CD8+ peut alors sécréter l’IL-2 et induire sa propre activation et différenciation. Les protéines virales produites par les cellules infectées, sont dégradées par un complexe de protéases catalytiques appelé le protéasome. Les peptides de l’agent viral qui en résultent sont ensuite transportés au sein du réticulum endoplasmique où ils sont chargés avec le CMH-1 pour être exprimés à la surface cellulaire. Ces peptides présentés avec le CMH-1 sont détectés par les récepteurs des lymphocytes T CD8+. Lors de la rencontre entre un lymphocyte T CD8+ activé et sa cible spécifique, celui-ci s’attache à la cible et sécrète un grand nombre de facteurs (perforines et granzymes principalement) qui forment 56 ainsi des « trous » dans la membrane cellulaire conduisant à la mort cellulaire. Les cellules T cytotoxiques sont efficaces pour éliminer les cellules infectées par des virus ou des parasites, inaccessibles par les anticorps et interviennent dans le rejet de greffes allogéniques. Les lymphocytes B forment une population responsable du bon fonctionnement de la réponse immunitaire humorale. Ces cellules peuvent détecter les antigènes via les immunoglobulines ancrées dans leur membrane. Elles forment le récepteur des lymphocytes B. Il a été montré qu’elles existent chez les reptiles (Sherif and El Ridi, 1992). Lorsqu’un lymphocyte B rencontre un antigène donné, il est en général nécessaire qu’apparaisse un second signal en provenance des lymphocytes Th CD4+ afin que les lymphocytes B s’activent et soient en mesure de produire des anticorps. Suite à la captation de protéines solubles par leur récepteur, les lymphocytes B internalisent ce complexe où l’antigène sera dégradé et présenté par les CMH de classe II. Les récepteurs des cellules T CD4+ reconnaissent le peptide étranger présenté par les CMH II sur le lymphocyte B, puis les cellules CD4+ sécrètent les interleukines IL-4 et IL-5, qui sont nécessaires à l'activation complète des lymphocytes B. Cette activation conduit à une expansion clonale de la cellule B spécifique de l’antigène donné. Ces cellules B actives et en grand nombre vont ensuite subir une maturation afin de devenir des plasmocytes capables de produire et libérer des anticorps dans l’environnement dans lequel se trouve l’antigène. Une fois l’infection résolue, les cellules B et T activées, spécifiques de l’antigène forment un pool de cellules mémoires circulantes qui seront réactivées lorsqu’elles rencontreront le même pathogène. 57 Figure 15. Immunité adaptative. D’après Abbas et al, 2015. Figure 16. Réponse immunitaire en réponse à une infection virale. D’après Lambotin et al., 2010. Immunité humorale impliquant les lymphocytes B. Secretion d’anticorps pour éliminer les microbes extracellulaires. Immunité à médiation cellulaire. Les lymphocytes Th activent les macrophages afin qu’ils tuent les microbes phagocytés. Les lymphocytes Tc éliminent directement les cellules infectées par des virus. CPA activées présentant l’antigène aux lymphocytes T CD4+et CD8+ naïfs qui sont activés via la reconnaissance du CMH par le TCR. Les CPA produisent aussi des cytokines: interféron-α (IFNα), interleukine-12 (IL-12) et IL-15 qui vont influencées la survie et différenciation des lymphocytes et cellules NK. Les lymphocytes T CD4+ vont se différencier en TH1 ou TH2. L’interféron-γ (IFNγ) sécrété par les TH1 va stimuler l’activation des lymphocytes cytotoxiques ainsi que la production d’IgG1 par les lymphocytes B tout en inhibant l’activation des TH1. Les anticorps sont dans ce cas neutralisants. Les cellules cytotoxiques et les NK sécrètent de l’IFN-γ ou lyse directement les cellules infectées via la libération de médiateurs de lyse. b. Les lymphocytes B et T des reptiles Les lymphocytes des reptiles ressemblent à ceux des mammifères, variant en taille avec un diamètre de 5 à 10 m pour les petits et de 15 m pour les grands. La distinction avec les thrombocytes n'est pas évidente (Fig. 17). Comparé aux thrombocytes, les lymphocytes sont plus grands et possèdent une bordure plus distincte. Le noyau du lymphocyte est plus grand, rond ou légèrement oval et positionné au centre ou légèrement excentré. Les lymphocytes possèdent un rapport nucléo-cytoplasmique très élevé. Les immatures, présents en faible nombre chez les animaux sains, sont plus grands, avec un cytoplasme fortement basophile et réduit et un noyau qui contient de la chromatine très violette et pouvant contenir un nucléole. 58 Figure 17. Photomicrographie de lymphocyte de boa constrictor (tête de flèche) à côté d'un thrombocyte. Coloration Wright-Giemsa. D'après Strik et al., 2007 Les lymphocytes réactifs sont indicatifs de stimulation antigénique. Ils sont typiquement plus grands, bien différenciés et possèdent un cytoplasme abondant, modérément à intensément basophile pouvant contenir de discrètes vacuoles. Certains lymphocytes réactifs sont plasmacytoïdes en apparence ; ils possèdent un cytoplasme basophile étendu, avec un noyau excentré ce qui les fait ressembler à des plasmocytes. Les lymphoblastes, en très faible quantité apparaissent chez des animaux malades dont le système immunitaire a été très fortement stimulé. Les lymphocytes sont les leucocytes prédominants du sang périphérique et des tissus hématopoïétiques de la plupart des reptiles avec un pourcentage pouvant atteindre 80% (Stacy et al., 2011). Le tableau II illustre les valeurs hématologiques les plus communément obtenues chez les reptiles. Les valeurs concernant les tortues marines sont décrites dans le chapitre 1 de la partie expérimentale. Leur nombre est influencé par les saisons ainsi que des facteurs individuels (Stacy et al., 2011). Ils sont en plus faible quantité en hiver ou au cours des périodes d'hibernation et en quantité élevée l'été ainsi qu'au cours de la mue. Une lymphocytose est souvent associée à un processus de cicatrisation, une maladie infectieuse ou inflammatoire, représentant un processus chronique. Les maladies virales, parasitaires telles que l'anisakiase ou la spirorchidiase ou les maladies dues aux hématozoaires peuvent induire une lymphocytose (Stacy et al., 2011). Chez les boidés une lymphocytose peut être provoquée par une leucémie lymphoïde ou la maladie des corps d'inclusion (Inclusion body disease, IBD) (Stacy et al., 2011). Une lymphopénie peut également être le témoin de malnutrition ainsi que consécutive à l'utilisation de corticostéroïdes (Stacy et al., 2011). 59 Tableau II. Valeurs hématologiques publiées chez les reptiles. D’après Campbell., 2012. Leucocyt es x 1000/µl Hétérophiles % Lymphocytes % Monocytes % Eosinophiles % Basophiles % Lézard 3,9-22,4 16 - 58 2 - 40 0-6 0 - 18 4 - 26 Boa constrict or 4-10 20 - 65 10 - 60 0-6 0-3 0 - 20 Python royal 7,9 – 16,4 56 - 67 7 - 121 2 - 22 – 0-2 Tortue géante des Séychell es 1-8,3 32 - 79 2 - 40 0–8 0–7 Tortue du désert 6,6 – 8,9 35 – 60 25 - 50 0- 4 0- 4 0- 4 2 - 15 L’existence de diverses populations de lymphocytes a été indirectement documentée dans plusieurs études mais n’a jamais été mise en évidence directement. Ces études suggèrent que l’organisation des lymphocytes circulants chez les reptiles serait similaire à celle des mammifères et des oiseaux. Ceci a été mis en évidence chez l’alligator Américain grâce à l’utilisation de mitogènes spécifiques des lymphocytes B et T afin de distinguer fonctionnellement ces deux populations (Cuchens and Clem, 1979). De plus, des anticorps polyclonaux de lapin dirigés contre les immunoglobulines d’alligators ont été utilisés afin d’identifier et de distinguer les lymphocytes B des autres. L’évidence de l’existence des sous-populations de lymphocytes T chez les reptiles a été rapportée. El Masri et al., 1995, suggère l’existence de quatre sous-populations de lymphocytes T chez le scinque (Chalcides ocellatus) qui sont distinctes phénotypiquement soit par la présence ou l’absence de deux antigènes de surface (antigène thêta) et le récepteur pour l'agglutinine de cacahuète. D’autres études suggèrent l’existence d’une sous-population de cellules Thelper (Origgi et al., 2007). Chez la couleuvre de Forsskal (Psammophis schokari), les éléments lymphoïdes de la rate, thymus, et une partie du GALT sont bien développés en automne et au printemps alors qu’ils en sont dépourvus en été et hiver. 60 La réponse humorale aux divers antigènes tels que les érythrocytes de rat (RRBC), le sérum d’albumine humaine (HSA), ou de polyvidone (PVP) était forte durant le printemps et l’automne. Au contraire, cette réponse dirigée contre les RRBC et HSA était faible en été alors qu'elle demeurait forte vis-à-vis de la PVP, un antigène thymoindépendant chez les mammifères. Ainsi, ces résultats montrent l’existence de l’activité des lymphocytes T-helper en automne et printemps qui est absente pendant les autres saisons à cause de la disparition ou réduction des sous-populations de lymphocytes T. Plus récemment, la prolifération des lymphocytes T a été mise en évidence chez le sphénodon ponctué (Sphenodon punctatus) (Burnham et al., 2005) consécutive à une stimulation par des mitogènes spécifiques des lymphocytes T (PHA et ConA). Les sous-populations de lymphocytes B ont également été explorées (Munoz et al., 2000). Il a été observé une saisonnalité concernant l’adhérence des lymphocytes B et la prolifération cellulaire au mitogène constitué par la phytolaque chez la tortue caspienne, contrairement à l’exposition au lipopolysaccharide où la prolifération cellulaire a été détectée tout au long de l’année, suggérant une souspopulation différente. c. Les immunoglobulines Les immunoglobulines sont des glycoprotéines sécrétées par les lymphocytes B en réponse à une stimulation antigénique. Elles possèdent une structure conservée en « Y ». Les immunoglobulines sont en général composées de deux paires de chaînes légères et lourdes reliées par des forces non covalentes et des ponts di-sulfure. Les chaînes lourdes et légères sont composées de domaines variables et constants. Les domaines variables interagissent avec l’antigène alors que les domaines constants sont structuraux. L’activation des lymphocytes B conduit à leur expansion clonale afin de créer un groupe de lymphocytes spécifiques de cet antigène. Ces cellules activées vont subir une maturation afin de devenir des cellules productrices d’anticorps dirigés contre l’antigène initial qui pourront être libérés dans l’organisme. Chez les reptiles, les immunoglobulines ont été peu étudiées. La plupart des informations proviennent d’extrapolations par comparaison aux autres espèces. Il existerait des différences de maturation des anticorps entre les divers groupes de reptiles (Origgi et al., 2007) comme les tortues des steppes (Agrionemys horsfieldii) par comparaison au serpent de verre (Ophisaurus sp.). Il y a peu d’information 61 concernant la structure des immunoglobulines chez les reptiles. L’immunoglobuline IgY est considérée comme l’homologue des IgG et IgE chez les mammifères. Contrairement aux IgG des mammifères, les IgY ne possèdent pas de jonction ce qui confère à la molécule une moindre flexibilité. Considérant l’ensemble des reptiles, au moins deux isotypes distincts ont été détectés : IgM et IgY (Cooper et al., 1985). Plus récemment, la cinétique de production des anticorps a été suivie chez la tortue verte en utilisant des anticorps monoclonaux dirigés contre les fractions 19S, 7S et 5,7S des immunoglobulines (Herbst and Klein, 1995) de tortue verte. La réponse des IgY (7S) est précoce, suivie par celle des IgY tronquées (5,7S) pour laquelle 3 mois à plus de 8 mois sont nécessaires pour être détectée. Les cinétiques de production des IgM sont plus délicates à évaluer (Herbst and Klein, 1995). L’étude de la réponse immunitaire humorale des reptiles a bénéficié du développement de tests sérologiques. Des tests ELISA ont été développés afin d’évaluer la production d’anticorps chez la tortue du désert (Gopherus polyphemus), l’alligator d’Amérique, le caïman à museau large (Caïman latirostris), le crocodile du Siam (Crocodylus siamensis) (Origgi et al., 2007), la tortue marine verte (Herbst and Klein, 1995 ; Work et al., 2000), les tortues grecque et d’Hermann (Origgi et al., 2001) et le boa constrictor (Boa constrictor) (Origgi et al., 2007). Une séroconversion vis à vis de l’antigène sélectionné pourrait être détectée dès 4 semaines post-injection chez la tortue grecque (Origgi et al., 2001), chez la tortue gaufrée du désert et le boa constrictor (Origgi et al., 2007), et dès 6 semaines chez l’alligator, le caïman, le crocodile du Siam et la tortue verte (Work et al., 2000). Les fonctions des Igs comprennent la neutralisation, l’agglutination, la précipitation et la fixation du complément. Les deux dernières fonctions ne seront pas développées puisqu’il n’existe pas de travaux probants à ce jour. La neutralisation est la capacité à bloquer l’interaction entre un virus ou une toxine avec les récepteurs exposés à la membrane de la cellule cible. La neutralisation par des anticorps reptiliens est utilisée dans les tests de séroneutralisation afin de déterminer l’exposition éventuelle des chéloniens aux herpès virus (Origgi et al., 2001). La neutralisation des anticorps sériques requièrent sept à neuf semaines afin d’obtenir un seuil de détection suffisant pour déterminer l’exposition aux herpès virus. Pour détecter les anticorps IgY, deux à cinq semaines supplémentaires sont 62 nécessaires (Origgi et al., 2001). En effet, l’activité neutralisante nécessite une maturation des anticorps, ce qui requière plusieurs semaines. Le test ELISA détecte la production de tous les anticorps anti-herpèsvirus, ce qui commence peu après l’infection tandis que la présence d’anticorps capables de neutraliser le virus demande plus de temps. L’agglutination se produit lorsque les anticorps se lient aux antigènes qui se regroupent et par conséquent ne peuvent plus diffuser dans l’organisme. Cette étape induit l’activation de la phagocytose. La précipitation se produit lors de la liaison entre anticorps et antigènes solubles qui précipitent et deviennent ainsi inactifs. Ces deux mécanismes ont été décrits chez les tortues hargneuses, les tortues grecques et les tortues d’Hermann et des Steppes (Origgi et al., 2007). L’inhibition de l’hémagglutination a été utilisée pour évaluer l’exposition des serpents au paramyxovirus (Jacobson et al., 1981). d. La réponse immunitaire à médiation cellulaire. L’évaluation de ce type de réponse immune a été réalisée en grande partie grâce à des études fonctionnelles. Celles-ci sont en effet basées sur la détection et la mesure de trois réactions fondées sur la médiation cellulaire : le rejet de greffes, le rejet du greffon contre l’hôte et la réaction lymphocytaire mixte. Ces trois composantes ont toutes été observées chez les reptiles, indirectement, suggérant l’existence de lymphocytes T allo-réactifs et d’homologues reptiliens de déterminants de base et d’acteurs de la réponse immunitaire cellulaire comme chez les vertébrés supérieurs (Origgi et al., 2007). Allogreffes et xénogreffes Des organes de tortues peintes (Chrysemys picta) transplantés au sein d’embryons de tortues hargneuses ont été soit acceptés soit rejetés partiellement tandis que des xénogreffes provenant de tortues à carapace molle de Floride (Apalone ferox) ont toujours été rejetées. La distance phylogénétique faible existant entre les deux premières espèces peut expliquer le rejet partiel par comparaison à la distance phylogénétique plus imporatante existant entre les deux espèces de tortutes suivantes (Cooper et al., 1985). Les allogreffes ont été rejetées de très nombreuses fois et ce pour diverses espèces de reptiles. 63 La réaction du greffon contre l’hôte La réaction du greffon contre l’hôte a été objectivée in vitro en mélangeant des splénocytes de tortues hargneuses adultes (hôte) avec des fragments de rate de juvéniles (greffon) afin d’obtenir des splénocytes allogéniques (donneur et receveur différents). La réaction du greffon contre l’hôte a été observée uniquement lorsque les individus avaient moins de trois mois. Réaction lymphocytaire mixte : MLR Des injections intrapéritonéales de splénocytes administrées à des nouveaux nés, receveurs allogènes ont induit une splénomégalie, un retard de croissance et aboutit à la mort. Farag and el Ridi (1985) ont étudié la réaction lymphocytaire mixte chez la couleuvre africaine (Psammophis sibilans) en utilisant des splénocytes provenant d’autres races de serpents. La prolifération observée lors des cultures de réactions lymphocytaires mixtes a mis en évidence la présence de sous-populations lymphocytaires capables de reconnaître et de répondre aux allo-antigènes. Les analyses plus poussées de greffes de peau, réaction lymphocytaire mixte et de lympholyse à médiation cellulaire ont permis de suggérer l’existence d’un CMH chez les reptiles (Farag and El Ridi, 1990) 64 3. Récapitulatif des tests pouvant être utilisés Tableau III : Divers tests des fonctions du système immunitaire utilisés chez les reptiles ainsi que leurs limites. (Adapté d'après Keller et al., 2005b). Test Catégorie Captivité Euthanasie Réactif spé Référence requise? requise?a d'espèce? Biochimie Général Non Non Non Keller et al., Numération formule Général Non Non Non Bolten et al., Histologie Général Non Oui Non Leceta et al., Activité NK Inné Non Oui/Non Non Munoz et al., Phagocytose Inné Non Oui/Non Non Mondal et al., Production nitrate Inné Non Oui/Non Non Mondal et al., Activité lysozyme Inné Non Non Non Walsh et al., Explosion respiratoire Inné Non Oui/Non Non Pasmans et al., Lymphocyte Immuno-marquage IMC Non Oui/Non Oui El Masri et al., Munoz et al., Réaction lymphocytaire mixte IMC Non Oui/Non Non Saad and El Ridi Hypersensibilité IMC Oui Non Non Coope et al., Rejet d'allogreffe IMC Oui Non Non Saad and El Ridi Activité cytotoxique IMC Non Oui/Non Non Farag and El Ridi Prolifération lymphocytaire Lymphocyte T IMC Non Oui/Non Non Lymphocyte B IMH Non Oui/Non Non Keller et al; Ulsh et al; Mc Kinney and Bentley; Cuchens et al., idem Titrage IgY IgM IMH Non Non Oui/Nonb Herbst and Klein Titrage anticorps suite à épreuve IMH Oui Non Oui/Nonb Herbst and Klein Lyse formant des plages IMH Oui Oui Non Leceta and Zapata IMC: immunité à médiation cellulaire IMH: immunité à médiation humorale a Oui/Non : Euthanasie requise pour collecter les lymphocytes de la rate et du thymus ou les macrophage de la cavité péritonéale. b Réactif spécifique d'espèce requis sauf si le test utilisé est l'hémagglutination. 65 4. La mémoire immunitaire chez les reptiles La caractéristique la plus importante de l’immunité adaptative est probablement la capacité du système immunitaire de l’hôte à réagir contre un antigène précédemment rencontré de manière plus rapide, plus forte (titre d’anticorps plus important) et plus longue qu’au cours de la réponse primitive. La mémoire immunitaire est permise par l’existence de lymphocytes B et T produits au cours de la réponse primaire. L’existence d’une mémoire immunitaire chez les reptiles est encore controversée. Le stress a un effet immunosuppresseur important pouvant biaiser les études. La température est également un facteur important : de faibles variations peuvent conduire à des déductions erronées. L’étude la plus récente de l’existence d’une mémoire immunitaire humorale chez les reptiles a été apportée par Origgi et al., (2004). Lors d’une étude expérimentale de transmission d’herpès virus chez la tortue grecque, une courte phase de décalage et des titres de neutralisation plus élevés ont été enregistrés lors d’une seconde exposition à l’antigène. Cependant il était impossible de détecter une quantité plus importante d’anticorps totaux (non neutralisants) dirigés contre le virus. La durée du pic de la réponse secondaire n’a pas pu être déterminée. 5. Facteurs de variation de la réponse immune De nombreux facteurs peuvent influencer les processus complexes de la réponse immunitaire tels que l’âge, le statut nutritionnel, la reproduction, la génétique, les antigènes utilisés, les voies de pénétration des antigènes, la température, la saison, le stress, et beaucoup d’autres pouvant être regroupés en facteurs intrinsèques (relatif à l’hôte) et extrinsèques. Les reptiles sont des vertébrés ectothermes donc particulièrement sensibles aux facteurs extrinsèques. Nous n’aborderons que les deux principaux que sont la température et la saisonnalité. a. La température Le système immunitaire inné et acquis des reptiles est très fortement influencé par la température (Cooper et al., 1985 ; Origgi et al., 2007). Les tortues d’Hermann immunisées avec du sérum de porc (NPS) ont montré une production d’anticorps 66 retardée lorsqu’elles étaient maintenues à 20°C comparativement à 28°C. Le système immunitaire humoral des tortues grecques vis à vis de Brucella abortus était réprimé lorsque celles-ci étaient maintenues en dessous de 10°C par comparaison à 15 ou 30°C. Chez les iguanes du désert, les températures au delà de 40°C et en deçà de 25°C étaient associées à une production d’anticorps plus faible contre l’antigène antiSaitohin. Chez Emerias véloce (Eremias velox) et l’iguane de l’île d’Andros aux Bahamas (Cyclura cychlura), la réponse anticorps contre l’encéphalite à tique n’était pas détectable lorsque les lézards étaient maintenus à 4°C mais l’était à 37°C. De manière identique, aucune réponse anticorps n’a été détectée chez le saurien Egernia cunninghami immunisé avec des SRBC, lorsque les individus sont maintenus à 20°C, tandis qu’une réponse mesurable était présente à des températures plus élevées avec une réponse maximale à 30°C. Les allogreffes et xénogreffes sont dépendantes de la température chez la tortue hargneuse, ainsi que la réaction du greffon contre l’hôte chez les très jeunes individus de cette même espèce. b. La saison et les hormones L’influence des saisons a été décrite très largement chez les reptiles (Origgi et al., 2007). Chez la tortue de Hermann immunisée à diverses périodes de l’année, la réponse immunitaire varie grandement. La plus forte réponse immunitaire est obtenue chez les individus immunisés au printemps (avril), tandis que les animaux immunisés début octobre réagissaient faiblement. De manière intéressante, les tortues immunisées tardivement en automne (novembre) possèdent une réponse humorale légèrement plus faible qu’une immunisation de printemps, mais plus forte qu’en automne. Leceta and Zapata (1986) ont évalué les réponses anticorps primaires et secondaires ainsi que les réponses PFC (« hemolysin plaque-forming cell ») chez la tortue caspienne en été et automne. Les réponses PFC sont obtenues en injectant des globules rouges de mouton, comme antigènes, aux animaux. Après prélèvement de la rate, la production d'anticorps anti-globules rouges de mouton est estimée par le nombre de PFC, c'est-à-dire par le nombre de plages de lyse obtenues. La première immunisation déclenche la production d’anticorps sensibles au mercaptoéthanol (2ME) ainsi que de réponses PFC en automne, contrairement à l’été. Au cours de la seconde réponse, des anticorps résistants au 2-ME ont été détectés en automne et en été, tandis que le nombre de PFC était significativement réduit en été. 67 Concernant la réponse cellulaire, chez la couleuvre des sables africaine, la réaction lymphocytaire mixte est observable uniquement au printemps et en automne (Farag and El Ridi, 1985). Chez le scinque ocellé, la réaction lymphocytaire mixte et le rejet de greffe étaient non fonctionnels en hiver, et plus faibles au printemps qu’en automne (Saad and El Ridi, 1984). Munoz and De la Fuente (2001) ont étudié les fonctionnalités (adhérence au substrat, chimiotaxie, réponse de prolifération lymphocytaire, cytotoxicité cellulaire dépendante des anticorps et cytotoxicité des cellules tueuses naturelles) des splénocytes chez la tortue caspienne à divers moments de l’année. En hiver, il a été observé une faible adhérence au substrat, une forte chimiotaxie et une forte activité cytotoxique, tandis qu’en automne, seule l’adhérence au substrat était importante. Enfin, au printemps, de fortes activités ont été enregistrées uniquement pour les réponses lymphocytaires prolifératives. Les mêmes auteurs ont étudié l’influence des saisons sur les thymocytes de la tortue caspienne (Munoz and De la Fuente, 2001). De manière générale, les plus faibles réponses (chimiotaxie, cytotoxicité et prolifération lymphocytaire après exposition aux mitogènes) étaient observées en automne et ce pour les deux sexes. La prolifération lymphocytaire était à son maximum au printemps. Chez les femelles, les thymocytes possèdent la plus forte cytotoxicité et activité chimiotaxique durant l’été. Enfin, les mêmes tests fonctionnels ont été utilisés pour étudier l’influence de la saison sur les lymphocytes du sang périphérique. La chimiotaxie, réponse lymphocytaire aux mitogènes et la cytotoxicité étaient élevées en hiver. La prolifération lymphocytaire était élevée jusqu’au printemps avant de diminuer en été, alors que l’adhérence, la chimiotaxie et la cytotoxicté augmentaient en été. Les saisons influencent également la structure et le remaniement des tissus lymphoïdes. Chez la tortue caspienne, la rate et le thymus présentent des variations saisonnières : la corticale et médullaire du thymus ainsi que les manchons lymphocytaires péri-artériolaires et la pulpe blanche péri-ellipsoïdale sont affectés différemment (Leceta and Zapata, 1985). L’involution thymique se produit généralement en été. Au début du printemps la corticale n’est pas bien développée et ce malgré une augmentation de volume du thymus. Toutefois en fin de printemps, la corticale et la médullaire sont à nouveau bien développées, dès lors que le thymus prend un volume plus conséquent. A cette même période, la pulpe blanche de la rate 68 se développe également de manière conséquente avant d’involuer en été. Les structures non lymphoïdes du thymus, subissent aussi une variation saisonnière. Les changements saisonniers des fonctions immunitaires des reptiles semblent être corrélés aux variations hormonales et aux changements structuraux des tissus lymphoïdes. Chez le scinque ocellé, quatre populations de lymphocytes T (PNA+Thy1-, PNA+ Thy1+, PNA-Thy1-, PNAThy1+) étaient affectées indépendemment des saisons en présence de niveau de stéroïdes endogènes (El Masri et al., 1995). Les cellules PNA+ démontrent une capacité à lier une lectine particulière, la peanut agglutinine (PNA). Chacune des populations lymphocytaires T (moelle osseuse, rate, thymus et autres populations lymphocytaires) était modulée différemment par des taux de stéroïdes endogènes. L’étude des effets des variations saisonnières des corticoïdes endogènes sur les fonctions du système immunitaire du scinque ocellé ont montré que le développement optimum de la pulpe blanche associé à une forte réponse immunitaire se produisait du printemps à début d’automne et été correlé avec un faible niveau de corticoïdes (Origgi et al., 2007). A l’inverse, une involution marquée des tissus lymphoïdes était observée en automne et hiver et associée à de forts niveaux de corticoïdes endogènes ou exogènes (acétate d’hydrocortisone). Un traitement des lézards à l’acétate d’hydrocortisone montraient une élévation de corticoïdes sanguins forte et durable associée à une involution des tissus lymphoïdes et un dysfonctionnement de la réactivité immunitaire, mimant ainsi le statut physiologique de celui-ci d’automne à hiver. De plus, un traitement avec un antagoniste synthétique du cortisol (metyrapone) en début d’automne interférait avec l’immunosuppression dépendante des saisons. La corticostérone est également impliquée dans l’apoptose des thymocytes comme rapportée chez le gecko d’Inde (Hemidactylus leschenaultii). La fragmentation de l’ADN induite par la corticostérone semble être dose-dépendante et requière 48h (Origgi et al., 2007). Le thymus de ce gecko subit de profonds changements structuraux saisonniers, telle qu'une involution en hiver lorsque les niveaux d’androgènes sont au maximum. Le thymus se régénère au printemps afin de devenir pleinement compétent en été, lorsque le niveau de testostérone est à son minimum. Au cours de ce travail, les auteurs ont pu castrer les animaux et ajouter des concentrations de testostérone exogène. Il a été décrit ultérieurement un effet 69 inhibiteur direct de la dihydrotestostérone sur la prolifération des thymocytes ainsi que ses effets indirects sur l’augmentation du processus d’apoptose de thymocytes dépendant des caspases, le tout médié par les cellules réticulo-épithéliales de la corticale (Origgi et al., 2007). Chez deux espèces de lézards (Psammodromus algirus et Acanthodactylus erythrurus), il semble que la stimulation des lymphocytes par la phytohémagglutinine (PHA) soit fortement diminuée chez les mâles traités à la testostérone. Une corrélation significativement négative entre la variabilité individuelle de la réponse médiée par les lymphocytes T et la concentration plasmatique en testostérone a été observée. Des résultats identiques ont été rapportés chez le scinque ocellé (Origgi et al., 2007). Cela est à considérer lors d’exposition de ces reptiles à des polluants organiques mimant les effets des hormones sexuelles (Bergeron et al., 1994). IV. Toxicité des polychlorobiphényles chez la tortue marine Les aspects toxicologiques sont souvent initialement abordés à l’aide de dosage de la concentration d’un toxique au sein d'un tissu qu’il s’agisse de muscle, graisse ou divers organes clés entrant dans des processus de détoxification de l’organisme comme le foie ou les reins. Alors que les tortues marines sont relativement résistantes aux dommages physiques, tels que les attaques de requins ou les collisions avec les bateaux, elles sont extrêmement sensibles aux polluants chimiques (Keller et al., 2005b). Nous nous restreindrons aux polychlorobiphényles pour ce travail, bien que la même approche pourrait s'appliquer à d'autres composés chimiques. A. Les polychlorobiphényles (PCB) 1. Histoire naturelle des polychlorobiphényles Les polychlorobiphényles (PCB) sont des hydrocarbures halogénés qui forment un groupe de 209 congénères (Annexe 1) possédant entre 1 et 10 substituts chlorés sur le cycle biphényle (Fig. 18). Ils possèdent une nomenclature IUPAC (International Union of Pure and Applied Chemistry). Leur formule empirique est C12H10-nCln avec n entier nombre d'atomes de chlore. 70 La nomenclature utilisée pour le positionnement des atomes de chlore est la suivante : - Ortho : substitution au niveau des positions 2, 2’, 6 et 6’ - Meta : substitution au niveau des positions 3, 3’, 5 et 5’ - Para : substitution au niveau des positions 4 et 4’ Figure 18: Structure générale des Polychlorobiphényles En France, ils ont été synthétisés par l’industrie de 1930 à 1980. Leur utilisation était alors extrêmement variée : isolants électriques dans les transformateurs et condensateurs de puissance, additifs dans certaines formulations de pétrole, agents plastifiants dans les peintures, colles, encres, plastiques, huile de coupe ou encore lubrifiants (Environmental Protection Agency, 2013), etc … Ces composés sont des ignifugeants, possèdent une grande stabilité chimique et thermique, d’où leur intérêt pour l’industrie. Les propriétés physico-chimiques suivantes sont les points clés à retenir: Les PCB ont une répartition étendue du fait de leur transport lors du lessivage des sols ou par le courant, la pluie et le vent (décharges à ciel ouvert) (Safe, 1992). Faible solubilité aqueuse, ils s’adsorbent aisément sur le sédiment ou les particules organiques. Faible dégradation dans l'environnement. Fonction du nombre et de la répartition des atomes de chlore. Molécules très stables avec des demi-vies très longues (Safe, 1992). Lipophiles: concentrent dans les tissus et organes riches en graisse (Safe, 1992). Bioamplifiables le long de la chaîne trophique, surtout dans les écosystèmes aquatiques car les chaînes trophiques y sont plus longues (Safe, 1992). Bioaccumulables. 71 2. Toxicité des PCBs: généralités En France, leur utilisation a été interdite en 1979 dans quelques produits tels que les encres, les huiles, les adhésifs ainsi que leur application dans les espaces ouverts. Puis, en 1987, il a été interdit de vendre ou d’acheter tout matériel contenant des PCBs. Finalement, en 2003 un plan de décontamination a été mis en place pour éliminer tout appareil contenant des PCB. Aux Etats Unis, la production de PCBs a été interdite en 1977. Détectés initialement dans l’environnement en 1966, ces polluants sont toujours d'actualité malgré les régulations internationales, et se retouvent dans l’environnement et en particulier dans le milieu aquatique. Il existe une littérature abondante concernant les PCBs et leurs effets reprotoxiques, neurotoxiques, immunotoxiques et sur le système endocrinien des mammifères (Safe, 1994). De nombreuses études ont montré que certains congénères des PCBs avaient un potentiel cancérigène avéré (US Environmental Protection Agency et The International Agency for Research on Cancer). La première évaluation des PCBs en tant que substances cancérigènes effectuée par l’EPA date de 1987. Les études portaient sur l’Aroclor 1260 uniquement. Ultérieurement, d’autres mélanges comme l’Aroclor 1016, 1242 et 1254 ont été évalués. Il existe 9 types d'Aroclor (1221, 1232, 1016, 1242, 1248, 1254, 1260, 1262 et 1268), tous commercialisés par Monsanto Corporation. Les congénères capables d’accumulation dans les poissons et se liant fortement aux sédiments sont les composées ayant le plus fort potentiel cancérigène. Des études épidémiologiques rétrospectives effectuées chez des ouvriers travaillant chez Monsanto exposés aux PCBs en 1936 ont montré que ceux-ci souffraient plus fréquemment d’acné chlorique ainsi que de cancers hépatiques (EPA, accessed 2013). Bien que nous ne rentrerons pas dans les détails, il est important de comprendre que tous les congénères ne possèdent pas tous la même toxicité. Cela est dû au nombre d'atomes de chlore ainsi que leur position sur le cycle (Safe, 2001). Certains congénères dits PCB "dioxin-like", partagent une similarité de structure ainsi que la coplanarité de la dioxine. Les autres PCB (non "dioxin-like") présentent une toxicité liée au nombre de substitutions. La 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-p-dioxine (TCDD) possède une forte affinité pour le récepteur Aryl hydrocarbon (AhR) ainsi qu'une toxicité élevée. Ainsi un facteur d'équivalence toxique (TEF) a été mis en place afin d'évaluer la toxicité des PCBs par rapport à celle de la dioxine. Les 72 congénères de PCB sans substitution en position ortho (non-orthosubstitués) ou avec une substitution en position ortho (mono-orthosubstitués) et ayant des chlores en position para et au moins deux chlores en position meta sont appelés "dioxin-like" (PCB-126, voir Annexe 1). Ainsi les congénères "dioxin-like" non-orthosubstitués (comme les PCB-77, PCB-81, PCB-126 et PCB-169) sont coplanaires et les "dioxinlike" mono-orthosubstitués sont non coplanaires (PCB-105). Chez les vertébrés, les enzymes de phase 1 des processus de détoxification comme les cytochromes P450isoforme A1 sont induites par les hydrocarbures aromatiques polycycliques via leur liaison au récépteur AhR (Safe, 2001). Les PCB di-,tri- ou trétra-orthosubstitués sont plus encombrants ce qui leur confère une toxicité différente de celle des "dioxin-like", faisant intervenir des mécanismes de toxicité indépendante de l’activation du récepteur AhR (Safe, 2001). 3. Effets biologiques des PCBs chez les tortues a. Les voies d'entrée Dans l’environnement, les PCBs sont toujours sous forme de mélanges complexes, associés à d’autres contaminants, et il est ainsi souvent impossible d’assigner un lien de causalité à un composé en particulier. A cause du faible nombre d’études expérimentales, les voies d’entrées des contaminants et les mécanismes conduisant à leur toxicité sont relativement peu connus chez les reptiles. Comme tout vertébré, les voies d’entrées principales sont le derme, les tractus respiratoire et digestif. L'importance du rôle du derme est souvent sous-estimé. La pérméabilité de la peau des reptiles varie considérablement d'une espèce à l'autre et ce en fonction de l'hypoderme et de la kératinisation. Les espèces aquatiques possèdent une peau relativement perméable afin de faciliter la respiration, ce qui va les rendre plus susceptibles aux atteintes chimiques. Les études ayant montré la susceptibilité du derme des tortues marines aux polluants concerne les effets du pétrole (Lutcavage et al., 1995). Les tortues caouannes ayant une alimentation carnée donc se situant assez haut dans le réseau trophique encourent un risque accru d’exposition aux polluants permis par une bioaccumulation importante. Les ingestions accidentelles de déchets, notamment plastiques concourrent à l'absorption de toxiques (organiques ou inorganiques). Le comportement de plongée des tortues marines n'est pas dépourvu 73 de risque. En effet, les tortues inspirent un large volume d’air, à l’interface air-eau, avant de plonger et remontent à la surface. Tous les produits émettant des vapeurs toxiques à la surface de l’eau, comme par exemple le pétrole, sont dangereux et arrivent directement aux poumons (Milton and Lutz, 2003). Les nouveaux-nés sont les plus affectés par cette voie d’entrée car passent plus de temps à la surface que les juvéniles et adultes. Les voies d'entrées principales de toxiques ainsi que leurs conséquences majeures chez la tortue marine sont schématisées sur la Fig. 19. • Carcinogène • Parasitisme • Dermatite Peau • Capacité aérobie réduite Poumon • Temps de plongée réduit Intestin Organes des sens Oeufs • Diminution de l'assimilation • Effets internes: hormone et dysfonction organique • Interférence (glande à sel) • Développement anormal Figure 19. Voies d'entrées et conséquence d'exposition aux toxiques (adapté d'après Lutz, 1990). b. Excrétion du sel : les glandes à sel Les reptiles ne peuvent pas concentrer leurs urines qui sont hyperosmotiques par rapport au sang ; ainsi de nombreuses espèces possèdent des sites extra-rénaux d’excrétion du sel (sel de l’eau de mer et de l’alimentation) constituant un mécanisme d’homéostasie. Cela est particulièrement vrai pour les espèces marines, telles que les tortues marines, les serpents de mer, les crocodiles de mer ainsi que les espèces désertiques telles que le chuckwalla (Sauromalus spp.) et l’iguane du désert (Dipsosaurus dorsalis). Chez les tortues marines et les terrapins à dos de diamant (Malaclemys terrapin), les glandes lacrymales situées dans la partie postérieure de 74 l’orbite ont été modifiées en glandes à sel (Fig. 20). Contrairement aux Malaclemys où de nombreux canaux drainent la glande et s’ouvrent individuellement le long de la paupière inférieure, chez la tortue marine, tous les canaux lobulés se rejoignent en un seul canal. Figure 20. Glandes à sel de tortue caouanne (Caretta caretta). Elles se situent derrière chaque oeil (flèches) et latéralement au cerveau (BR) (d'après Jacobson et al., 2007). Comme tous les vertébrés, les tortues marines ont une concentration en chlorure de sodium dans leur corps d’environ 1/3 de celle de l’eau salée. Leur nourriture (crabes, oursins ou autres invertébrés) a la même teneur en chlorure de sodium que l’eau de mer. L’œsophage des tortues marines est constitué de longues papilles coniques alignées et réparties de manière très dense qui sont orientées vers l’estomac. Les contractions de l’œsophage pendant la prise de nourriture permettraient d’expulser l’eau de mer à travers la bouche ou les naseaux et donc de limiter la consommation excessive d’eau de mer pendant leur repas. Stimulées par d’importantes quantités de chlorure de sodium dans le sang, les glandes à sel peuvent excréter une solution saline deux fois plus concentrée que l’eau de mer. Récemment, une étude a montré une association négative entre les électrolytes plasmatiques (sodium et potassium) mesurés chez la tortue caouanne et le 75 dichlorodiphényldichloroéthylène suggérant une altération des reins et ou glandes à sel, les deux étant sensibles aux polluants organiques (Camacho et al., 2013). c. Toxicité sur les embryons Plusieurs études, effectuées sur des résidus d’œufs retrouvés lors de patrouilles côtières, ont rapporté que les œufs de tortues caouannes contenaient divers polluants chimiques tels que les PCBs, le chlorane, la dieldrine, les hydrocarbures polyaromatiques, et les dérivés du naphtalène (Alava et al. 2011). En Malaisie, la consommation d’œufs représente un problème de santé publique tant les concentrations en PCBs sont élevées (van de Merwe et al. 2009). La concentration de PCBs dans les œufs est la plus importante dans la membrane chorio-allantoïdienne (Cobb and Wood 1997). Bien que la voie d’exposition ne soit pas déterminée avec exactitude, le transfert maternel est probablement la voie la plus importante. Les tortues marines sont ovipares et à ce titre, les contaminants lipophiles sont transmis par la mère lors de la vitellogenèse qui requière la synthèse de lipoprotéines, cruciales pour fournir des nutriments et des hormones à l’embryon. Ces lipoprotéines sont également des transporteurs de contaminants environnementaux de la mère vers le jeune. Tout composé lipophile ou s’associant aux lipoprotéines va pouvoir être transmis au jeune. Ainsi, ce transfert maternel de composés organiques a été rapporté chez les tortues marines (Stewart et al., 2011) et est corrélé avec le taux d’éclosion prématuré et des déformations des nouveau-nés (Bishop et al. 1998). Tous PCBs (mélange, congénères individuels ou métabolites hydroxylés) ayant une pertinence environnementale peuvent entraîner une augmentation de la féminisation chez la tortue à tempe rouge (Trachemys scripta elegans) (Bergeron et al. 1994). Ainsi par extrapolation, le transfert maternel des PCBs peut éventuellement compromettre le succès reproducteur des tortues marines. Beaucoup de reptiles produisent une seule couvée et la concentration de contaminants est relativement similaire dans tous les œufs de la couvée (Alava et al., 2011). La structure et le processus de calcification de la coquille varient en fonction de l’espèce de reptile et ces paramètres ont une importance en terme de transfert potentiel des contaminants. Les crocodiliens, geckos ainsi que les tortues possèdent des coquilles dures et relativement imperméables. Ainsi, l’utilisation de l’œuf de 76 reptile comme indicateur biologique de la contamination à un endroit donné est maintenant très repandue. Cela n’est pas envisageable chez les espèces menacées dont le prélèvement d’œufs impacterait sur le taux de renouvellement de la génération suivante et donc réduirait le nombre d’animaux attaignant l’âge adulte. Cependant devant les anomalies constatées chez ces espèces, quelques prélèvements ponctuels d’œufs non éclos (après éclosion générale) ont été autorisés (Keller et al., 2013). Dans le cas d’espèces non menacées, il est possible d’incuber les œufs artificiellement afin de déterminer le succès d’éclosion et le cas échéant la fréquence des malformations (Bishop et al., 1998). Les nouveau-nés sont ensuite relâchés dans leur site naturel. Le dosage concomitant de contaminants chez les adultes doit si possible être réalisé afin de pouvoir tirer des conclusions quant à la possibilité de transmission verticale (Keller et al., 2013). Les diverses études ont montré que la distribution des contaminants au sein des organes chez les reptiles est similaire à celle des autres vertébrés. d. Contamination et marqueurs d’exposition La contamination environnementale en PCBs a été démontrée chez de nombreuses espèces de reptiles incluant les tortues marines (Camacho et al., 2013, 2014; Gardner et al., 2003; Lake et al.1994; Miao et al. 2001; Keller et al. 2004b; Keller et al. 2004c; Oros et al., 2009; Storelli et al. 2007; Swarthout et al., 2010). Les marqueurs d'exposition nous renseignent sur la présence de substances exogènes ou de leurs métabolites ou encore sur les interactions entre la cellule ou molécule cible et le contaminant. Il n’existe pas de seuil de toxicité des PCBs chez les tortues marines ou les reptiles plus généralement. Les congénères possédant le plus d'atomes de chlore 138>153>180, et 118 sont les plus communément retrouvés chez les tortues caouannes (Camacho et al., 2013, 2014; Keller et al., 2004b; Lazar et al., 2011; Oros et al;, 2009; Storelli et al. 2007). Ces composés ont le potentiel d’affaiblir le système immunitaire de ces animaux (Keller et al. 2006) et d’affecter leur régulation métabolique (Keller et al. 2005b). Une étude récente a mesuré la concentration en PCBs dans le foie chez trois espèces de tortues marines (tortues vertes, caouannes et olivâtre). Les PCBs majoritaires étaient les biphényl penta et hexa chlorés (PCB-138 et -153). Plus de 70% des PCBs mesurés étaient constitués de congénères ne possédant pas de chlore en positon ortho (PCB-77, -126, -169) et constituant la famille des "dioxine-like". Les enzymes CYP2K1 et CYP3A27 ont été détectées 77 (Western Blot) dans les microsomes hépatiques, au contraire du cytochrome CYP1A. Le cytochrome P450 2K1 est constitutif chez les poissons et permet la catalyse de l’hydroxylation des stéroïdes (catalyse l’hydroxylation du 17β-estradiol, de la testotérone (16β-hydroxylation) et progestérone (16α-hydroxylation)). Il catalyse également l’oxydation de l’acide laurique. Concernant la transformation des xénobiotiques, il active l’aflatoxine B1 en sa forme époxyde carcinogène (Uno et al., 2012). Le CYP3A27 permet la catalyse de l’hydroxylation 6β de la testostérone et progesterone (Uno et al., 2012). L’enzyme CYP1A contribue chez les mammifères à la biotransformation des PCBs. En se basant sur les relations structure-activité des PCBs existant pour les isoenzymes du cytochrome P450, il a été conclu que chez ces 3 espèces de tortues marines existait une activité limitée de l’enzyme CYP1A. Cela implique une accumulation hépatique possible des PCBs qui sont usuellement substrats des CYP1A ainsi qu’une capacité de biotransformation qui diffère des mammifères (Richardson et al., 2009). Une autre étude récente (Oros et al., 2013) a mis en évidence un cas de panstéatite chez une tortue caouanne adulte échouée qui contenait des taux très élevés en PCB-138, -153, -180 et -209. Même si une cause nutritionnelle ne peut pas être écartée, les nombreux dépôts de céroïdes et la réponse inflammatoire présente dans la cavité coelomique ne peuvent exclure un phénomène de peroxidation lipidique ayant pour orgine une forte concentration de PCBs hépatiques. Une bioaccumulation hépatique a été suggérée mais non corrélée aux PCBs résiduels chez les tortues vertes, caouannes et de Kemp (Gardner et al. 2003; Milton and Lutz 2003). Il est important de mentionner que l’ingestion accidentelle de débris et particulièrement de plastiques à la surface desquels les PCBs sont adsorbés concourent à une accumulation des PCBs à un niveau d’environ cent fois plus élevé que l’eau environnante (Mato et al. 2001). Les débris plastifiés sont donc une source importante de PCBs lors de leur ingestion accidentelle. Cela est particulièrement vrai pour les juvéniles qui naviguent les océans. Les tissus les plus communément utilisés pour la détection de PCBs sont le foie et le tissu adipeux où les hexachlorobiphényles sont majoritaires (Miao et al. 2001). Les quantités de PCBs mesurés chez les tortues de Kemp sont beaucoup plus importantes que chez les autres espèces (Lake et al. 1994). Puis viennent ensuite la tortue caouanne, la tortue luth et la tortue verte. La position des espèces au sein du réseau trophique, l’âge et l’habitat semblent être des 78 critères qui contribuent très probablement à la bioaccumulation de plusieurs organochlorés (Keller et al. 2005b). 4. Effets des PCBs sur le système immunitaire a. Généralités De nombreuses études illustrent la capacité des PCBs à moduler le système immunitaire des mammifères entraînant des effets néfastes. Ils semblent jouer un rôle dans la susceptibilité accrue vis à vis d’agents pathogènes. Ainsi, chez les singes Rhésus il a été observé une diminution significative de la taille du thymus chez les jeunes, une diminution de la capacité de réponse suite à une épreuve aux globules rouges de mouton (évaluation de la capacité d’une réponse anticorps afin de développer une immunité protectrice), ainsi qu’une diminution de la résistance au virus d’Epstein-Barr (Strauss and Heiger-Bernays, 2012). En 1988, plus de 20 000 phoques communs (Phoca vitulina) sont morts en Europe lors de l'épidémie de maladie de Carré due à un morbillivirus, le « phocid distemper virus-1 » (Aguilar et al., 1994). Les individus morts avaient des taux de contaminants organochlorés plus élevés que ceux qui ont survécu. Une étude a ensuite montré que les individus nourris avec du hareng contenant des PCBs possédaient une activité NK fortement diminuée (Ross et al. 1996). Le même résultat a été objectivé chez le dauphin bleu blanc (Stenella coeruleoalba) à la suite d’une épizootie de morbillivirus en mer Méditerranée (Aguilar et al., 1994). Les PCBs sont également impliqués comme facteur de risque d’apparition de lymphomes non Hodgkinien (Strauss and Heiger-Bernays, 2012) ainsi que dans l’augmentation de la prévalence de néoplasmes chez les bélugas du Saint Laurent (DeGuise et al., 1995b). Plusieurs études réalisées sur les mammifères marins, ont montré que 5 µg/ml de chacun des congénères PCB-138, -153, -180 (15 µg/ml total de PCBs), diminuait la prolifération des splénocytes de béluga (De Guise et al., 1998). Enfin, une étude récente et intégrée a mis en évidence les effets des PCBs sur la santé de populations de grands dauphins (Tursiops truncatus) sauvages résidents en Géorgie (USA). Les concentrations de PCBs étaient associées à une hypothyroidie, une suppression des fonctions de l'immunité aquise et innée ainsi qu'une anémie 79 sévère (Schwacke et al., 2011). Ces études, prises dans leur ensemble, suggèrent fortement que l'exposition aux PCBs, aux concentrations environnementales, peuvent moduler les fonctions du système immunitaire. Il est plausible que cela conduise à une diminution de la résistance de l'hôte vis à vis d’agents pathogènes et à l’induction de cancers pouvant conduire à la mortalité dans des cas extrêmes. Toutefois aucun lien de causalité direct n’a été mis en évidence. b. Les tortues marines Chez les tortues caouannes juvéniles de la côte sud-est des Etats-Unis les concentrations de PCBs mesurées dans le sang et le tissu adipeux corrélaient positivement avec le nombre total de leucocytes entraînant une augmentation de ceuxci. Une augmentation du rapport hétérophile/lymphocyte, utilisé comme indicateur de stress, corrélait positivement avec les concentrations de PCBs "dioxine-like" mesurées dans la graisse des individus (Keller et al., 2004b). La prolifération lymphocytaire était augmentée lors d’exposition aux PCBs in vitro et ex vivo (Keller et al. 2005b; Keller et al. 2006). Ainsi, une corrélation positive significative a été établie entre la concentration plasmatique de l'Aroclor 1254 (0,1 à 50 ng/g masse humide) et la prolifération lymphocytaire des lymphocytes B et T (Keller et al., 2006). La majorité des corrélations mises en évidence pour les concentrations de PCBs plasmatiques ont également été mises en évidence pour les concentrations mesurées dans les graisses. Ces résultats concordent avec d'autres publiés chez les oiseaux et rongeurs (Keller et al., 2005b). En effet, une augmentation de la réponse cutanée au PHA a été mise en évidence chez les faucons crécerelles d'Amérique adultes (Falco sparverius) nourris avec un mélange de trois Aroclor (1248, 1254, 1260). Les goélands argentés juvéniles vivant dans des sites très fortement contaminés des Grands Lacs d'Amérique, possèdaient une lymphoprolifération plus importante que les oiseaux des sites de référence. Les souris à pattes blanches (Peromyscus leucopus) exposées in utero à l'Aroclor 1254, montraient une prolifération accrue des thymocytes et splénocytes. 80 Au contraire, chez les tortues caouannes juvéniles de Caroline du Nord, l'activité du lysozyme plasmatique, un indicateur de l'immunité innée, diminuait significativement avec les concentrations croissantes de PCBs mesurées dans le sang (Keller et al., 2006). Une diminution de la prolifération lymphocytaire a été mise en évidence chez les tortues vertes atteintes de fibropapillomes (Cray et al. 2001; Aguirre and Lutz 2004) et vivant dans des zones très polluées. Enfin, les leucocytes de 16 tortues caouannes ont été exposées in vitro à l’Aroclor 1254 (1 ng/ml à 13500 ng/ml) sans qu’aucune différence significative de prolifération des lymphocytes T n'ait été mesurée, bien qu’une augmentation générale par comparaison au contrôle ait été rapportée (Keller et al., 2005b). Une courbe doseréponse biphasique a été obtenue pour la prolifération des lymphocytes B. En effet, une concentration de 5 ng/ml d'Aroclor 1254 augmentait la prolifération tandis que celle de 498 ng/ml la diminuait. Les concentrations plasmatiques de PCBs mesurées chez les tortues caouannes variaient de 0,121 ng/g à 23,9 ng/g, ce qui correspond à la première phase de la courbe (ascendante). Les tendances observées lors d'exposition in vitro ont également été observées lors d'exposition ex vivo. Les concentrations de PCBs mesurées chez les tortues marines sont généralement bien inférieures à celles mesurées chez les phoques ou les sternes (Keller et al., 2004a, 2004b). Il semblerait que les PCBs aient un effet immunostimulant sur la prolifération des lymphocytes de tortues aux faibles concentrations (concentrations mesurées dans l’organisme) tandis qu’ils entraînent une immunodépression aux concentrations plus fortes. Alors que la diminution des fonctions du système immunitaire est souvent néfaste, une réaction immunitaire exacerbée n'est pas nécessairement une chose profitable. En effet, cela s’illustre dans le cas des réponses d'hypersensibilité et maladies autoimmunes. Certains PCBs mesurés dans divers tissus de tortues marines possèdent des activités oestrogènes et anti-androgènes chez les reptiles (Bergeron et al., 1994). Des concentrations légèrement plus élevées que le niveau d'oestrogènes endogènes peuvent décupler la prolifération lymphocytaire, alors que des taux encore plus importants inhibent cette fonction (Keller et al., 2005b). Il est ainsi purement spéculatif mais non impossible de penser que les PCBs ayant un effet activateur de la prolifération lymphocytaire chez les tortues caouannes implique un mécanisme reliant 81 les perturbations du système endocrine (via des mécanismes dépendant des oestrogènes) à une immunomodulation. B. Les outils d'étude Comme décrit dans le tableau III, les tests principaux permettant l'évaluation des fonctions du système immunitaire ont été utilisés chez les reptiles. 1. L'hématologie et biochimie Les paramètres hématologiques tels que la numération formule sangine fournit des informations importantes quant au stress que subit l'animal. Un rapport hétérophile/lymphocyte augmenté a été associé à une exposition aux PCBs chez la tortue caouanne (Keller et al., 2004b). Dans cette même étude, Keller et al., ont montré qu'il existait une corrélation négative entre la numération de leucocytes sanguins et la somme des PCB mesurés. Une corrélation négative a été décrite entre la somme des congénères PCBs-138 et -180, mesurés dans le sang et le taux d'hématocrites des tortues caouannes adultes. Il a également été montré que pour cette même population d'individus, le congénère -52 était associé à une diminution des leucocytes sanguins (Camacho et al., 2013). Le comptage des diverses populations de lymphocytes T (CD4 et CD8) utilisant des marqueurs de surface pourrait être plus précis et prédictif quand à la réponse immunitaire enclenchée. 2. L'immunité innée Les outils à notre disposition sont la mesure de l'activité lysosyme (Walsh et al., 2010), les propriétées bactéricides du sérum et la production d'ions superoxyde (Merchant et al., 2009), la phagocytose des macrophages spléniques (Mondal and Rai, 2002) sans que cela ait été mis à profit pour des études de toxicité. L'activité des cellules tueuses naturelles a été étudiée chez la tortue caspienne ainsi que la cytotoxicité cellulaire dépendante des anticorps (ADCC) chez la tortue verte afin d'objectiver les modifications saisonnières (Munoz and De la Fuente., 2001 ; McKinney and Bentley., 1985). 82 3. L'immunité acquise Cette immunité comprend les réponses humorale et cellulaire. L'évaluation de l'immunité cellulaire a été relativement bien étudiée à travers la prolifération lymphocytaire grâce à l'utilisation d'agents mitogènes. Si les tests de prolifération lymphocytaire peuvent sembler un peu désuets chez les mammifères, ils n'en demeurent pas moins très indicatifs chez les reptiles. En effet, chez les tortues marines échouées et émaciées, la capacité de prolifération lymphocytaire est annhilée pour les animaux ayant des concentrations significatives de mercure (Day et al., 2007). Les conditions optimales de fonctionnement des tests requièrent de nombreux ajustements; en effet, les reptiles sont ectothermes et la température adéquate doit être déterminée. Les études mesurant les fonctions du système immunitaire ex vivo montrent que la température optimale varie entre 27°C et 37°C (Cray et al., 2001; Keller et al., 2005a; McKinney et al., 1985; Munoz and De la Fuente, 2001). Une étude offre une explication détaillée pour optimiser les méthodes de prolifération lymphocytaire chez la tortue à tempe rouge (Ulsh et al., 2001) ainsi que la tortue caouanne (Keller et al., 2005a), l'alligator (Cuchens et al., 1979) et la tortue verte (McKinney and Bentley, 1985). Comme précédemment décrit, une immunisation a été réalisée puis les titrages en anticorps ont été mesurés grâce à l'utilisation de l'hémagglutination qui ne requière pas de réactifs spécifiques d'espèce (Keller et al., 2005b). Le facteur limitant est la durée nécessaire après l'immunisation avant que la production d'anticorps soit détectable. Chez les mammifères, la production d’Ac est relativement rapide avec la détection d'IgM variant entre 4 et 7 jours après l’immunisation. Chez les reptiles l’apparition est plus lente allant de 4 semaines pour les alligators à 5 et 9 mois pour les tortues vertes (Herbst et al., 1995). Enfin, l'immunité humorale a déjà été explorée grâce à l'utilisation du test de cellules formant des plages de lyse. Ce test prend en compte la réponse humorale dépendante des lymphocytes T dans son intégralité. En effet, les macrophages sont requis lors de la présentation des antigènes aux cellules Th, qui permettent aux cellules B d'initier la production d'anticorps. Ce test a également été utilisé par Munoz and De la Fuente (2001), nécessite toutefois l'euthanasie de l'animal afin de récolter les splénocytes, ainsi qu'une immunisation préalable. 83 V. Conclusion partielle Au terme de cette étude bibliographique, il ressort que les tortues marines, animaux à la fois terrestres mais surtout marins constituent des espèces sentinelles de l’environnement aquatique. En effet, elles parcourent les eaux du globe, vivent longtemps, atteignant une maturité sexuelle tardive, et sont exposées de manière chronique à de nombreux polluants chimiques. Ces composés constituent les menaces les moins bien documentées et par lesquelles ces animaux semblent être très affectés. Parmi tous les composés chimiques, les polychlorobiphényles, composés dont la fabrication remonte au siècle dernier mais dont l’impact environmental se fait encore sentir, ont été relativement bien étudiés. Ces polluants organiques s’accumulent et persistent au sein des tissus biologiques des tortues caouannes. Des études relativement récentes montrent leurs effets délétères chez ces reptiles en induisant une prédisposition aux maladies, via un affaiblissement de l’animal. Le système immunitaire constitue ainsi une interface entre l’état de santé de l’animal et son environnement. La littérature dans ce domaine est ancienne et plutôt rare chez les reptiles. Après avoir fait l’état des lieux des connaissances actuelles, nous nous proposons d’étudier certaines fonctionnalités du système immunitaire inné et acquis, consécutif à une étude préalable d’investigation des paramètres hématologiques et biochimiques des individus étudiés ultérieurement. Puis nous montrerons l’effet de quelques PCBs sur les fonctionnalités du système immunitaire inné. 84 PARTIE 2: ETUDE EXPERIMENTALE 85 Partie 2: Etude expérimentale Ce travail propose de déterminer les paramètres hématologiques et biochimiques chez 5 classes d’âge de tortues caouannes juvéniles, puis d’étudier certaines fonctions du système immunitaire inné et acquis avant de se pencher sur les effets de PCBs sélectionnés sur les fonctionnalités du système immunitaire inné. Dans cette section, nous nous attacherons à décrire les conditions de zootechnie, de prélèvement sanguins ainsi que les méthodes de biologie cellulaire utilisées. I. Matériels et méthodes A. Sujets d’étude et conditions de captivité Pour l’étude portant sur les paramètres hématologiques et biochimiques, 85 individus répartis dans 5 groupes d’âge consécutif de 8, 20, 32 44 et 56 mois ont été étudiés. Chaque groupe comportait respectivement 21, 21, 22, 14 et 7 animaux. Toutes les tortues ont été collectées après leur éclosion sur les sites de ponte en Floride entre 2005 et 2009. Cette collecte faisait partie intégrante du programme d’élevage d’animaux captifs du centre d’étude et réhabilitation des tortues marines de Galveston (National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) Sea Turtle Facility (Galveston, TX, USA)). Chaque groupe d’âge consécutif était de 12 mois plus âgé que le précédent. Toutes les tortues étaient élevées et maintenues au Sea Turtle Facility dans des conditions d’environnement identiques (Higgins, 2003). Les individus captifs sont maintenus dans des bassins d’élevage séparés contenant de l’eau de mer provenant directement du Golf du Mexique. L’eau pompée est filtrée et l’eau du bassin est renouvelée tous les deux jours. La température de l’eau (27–29 ºC), son acidité (pH=7.5–7.8) et sa salinité (25–26 ppt) ont très peu varié entre chaque bassin et au cours de l’étude. La durée de la photopériode est en adéquation avec la durée naturelle du jour. 86 L’alimentation des tortues caouannes est principalement composée de croquettes industrielles produites par PMI International Inc. Les individus âgés de 8 et 20 mois recevaient respectivement de l’AquaMax™ 400 et 500, tandis que les individus de 32, 44 et 56 mois étaient nourris avec un aliment pour crocodile (Small Mazuri® Crocodilian Diet). Leur ration étaient également complétée avec des calmars jusqu’à satiété, et ce une fois par semaine, afin d’augmenter le taux d’humidité. Le calcul de la quantité de nourriture est basé sur le poids vif de l’animal. Une formule a été développée lors de calculs de rations chez des tortues de Kemp captives âgées de 0 à 18 mois (Fontaine and Shaver, 2005), au cours du projet Kemp's ridley Headstart (1978–1992). Passé 18 mois, la ration est ajustée afin de permettre une croissance optimale suivant des critères de recherche. Les individus de 8 à 20 mois sont nourris le matin et l’après-midi tandis que les individus plus âgés sont nourris le matin uniquement. Les apports alimentaires quotidiens sont les suivants pour les cinq groupes d’individus (de 8 à 56 mois): 1% (1g de nourriture pour 100g de poids vif), 0,94% (9,4g de nourriture pour 1 kg de poids vif), 0,36%, 0,24%, et 0,34% du poids vif (kg) de chacun des animaux respectivement. Pour l’étude portant sur le système immunitaire de la tortue caouanne, les échantillons de sang ont été collectés à partir de 65 tortues caouannes immatures maintenues en captivité au NOAA Fisheries Sea Turtle Facility (Galveston, TX). Les conditions de prélèvements sont décrites dans les permis 1 . Toutes les recherches étaient conformes aux recommandations institutionnelles sur le bien-être animal. La NMFS n’avait pas requis d’approbation d’IACUC mais respectait intégralement les conditions requises par l’USFWS et par l’état de Floride sur la détention de tortues marines et leur prise en charge lors d’échouage. Les animaux des deux sexes étaient inclus dans cette étude. Ils étaient âgés entre 20 et 56 mois avec une longueur de carapace (SCL moyenne ± SD) de 45,5 cm ± 7,4 et un poids moyen de 12,2 kg ± 5,3. Tous les animaux inclus ont été préalablement examinés par un vétérinaire et étaient en bonne santé. De plus, leurs paramètres biochimiques et hématologiques étaient connus. (Rousselet et al., 2013a). Les permis ont été délivrés par l’U.S. Fish and Wildlife Service (USFWS) Endangered Species Act Section 10a(1)a (Scientific Research Permits # TE-676379-4 and TE#676379-5), ainsi que par le Florida Fish and Wildlife Conservation Commission Marine Turtle (Permit #MTP-015) 1 87 Pour l'étude portant sur les effets des PCBs sur l'immunité innée, les échantillons sanguins de 19 tortues caouannes immatures captives ont été utilisés. Les animaux de cette étude étaient âgés de 32 et 44 mois et possédaient une moyenne pondérale de 12,6 kg ± 2,3. Tous les animaux de cette étude étaient en bonne santé (Rousselet et al., 2013a). Pour cette étude un IACUC (Institutional Animal Care and Use Committee) était requis et a été délivré par l'Université du Connecticut. B. Prélèvement de sang chez les tortues marines Au moment des prises de sang, un examen physique de chaque individu a été réalisé afin de s’assurer du score corporel de l’animal et de son état de santé. Les animaux ont ensuite été pesés, et les mesures de carapace en ligne droite (SCL) ont été effectuées. Les prises de sang ont été effectuées sur animaux vigiles bénéficiant d’une contention manuelle. Chez les tortues marines, le sinus cervical dorsal prenant son origine au niveau du plexus veineux post-occipital est utilisé comme site de prélèvement préférentiel (Owens and Ruiz, 1980). L'aiguille est insérée perpendiculairement à la face dorsal du cou, craniale à la carapace et légèrement latérale à une ligne centrale. La tête de l'animal doit être maintenue plus basse que son corps afin de gorger le sinus (Fig. 21). A cet endroit une hémodilution par la lymphe peut survenir. Figure 21. Prise sang réalisée sur un juvénile (Photo de Mr Higgins). 88 C. Analyse sanguine hématologique et biochimique Les individus de cette étude ont été mis à jeun 24h avant la prise de sang. Tous les échantillons ont été prélevés pendant 3 jours consécutifs en mars 2010. La quantité de sang maximale prélevée est basée sur le poids de l’animal et a variée entre 300 µl et 12 ml pour cette étude (National Marine Fisheries Service Southeast Fisheries Science Center, 2008). Une seringue jetable de 1 ml montée d’une aiguille de 25gauge, 5/8 inch a été utilisée pour les animaux pesant moins de 500g. Pour les individus plus lourds, des seringues de 3, 6 ou 12 ml montées d’une aiguille de 21gauge, 1-inch (unités américaines) ont été utilisées. Pour l’étude fonctionnelle du système immunitaire, les échantillons sanguins sont obtenus en utilisant un système de tube hépariné sous vide (Vacutainer, Becton Dickinson). Tous les échantillons de sang ont été conservés au frais et acheminés pendant la nuit jusqu’au laboratoire afin d’être analysés en moins de 24h. Concernant l’étude hématologique et biochimique, le sang a été transféré dans des tubes héparinés (lithium-heparin BD Microtainer®). Les échantillons de sang contaminés par de la lymphe ont été écartés de l’analyse. Immédiatement après le transfert du sang dans le tube approprié, ceux-ci ont été maintenus dans une glacière à une température de 10°C puis les échantillons ont été traités dans les 4h suivant la prise de sang. Une fraction d’échantillon a été utilisé afin d’effectuer le comptage manuel des leucocytes. Le reste de l’échantillon a été centrifugé à 6000g pendant 10 min, et le plasma incolore a immédiatement transféré dans des cryotubes (cryotubes™ Corning Incorporated). Le plasma ainsi collecté a ensuite été stocké à -80°C pour un maximum de trois semaines avant d’effectuer les analyses biochimiques. Deux frottis sanguins ont été préparés pour chaque échantillon de sang collecté, séchés à l’air libre, puis colorés avec du Diff-Quik® (Dip Quick Stain Kit, Jorgensen Laboratories) en suivant les recommandations du fabricant. Les frottis ont été évalués au niveau des aires représentatives de distribution homogène des leucocytes sous microscope. Deux cents leucocytes ont été comptés et répartis entre lymphocytes, hétérophiles, monocytes, éosinophiles, et basophiles comme précédemment décrit (Campbell, 2006). La numération formule des reptiles s’effectue manuellement et à l’aide de deux méthodes qui doivent toujours être confrontées pour permettre l’obtention d’un résulatat le plus précis possible. Ainsi, deux paramètres sont obtenues : l’estimation 89 des leucocytes ou TWB estimate à partir du comptage des leukocytes au microscope et la concentration leucocytaire absolue ou TWBC absolute à partir du nombre de granulocytes. L’estimation des leucocytes a été obtenue en multipliant le nombre moyen de leucocytes observés dans 10 champs du microscope à l’objectif 40x par 2000 (Campbell, 1995). Le paramètre mesuré est appelé TWBC (Total White blood cell) estimate dans la suite du manuscrit. Il s’agit en effet d’une estimation à confronter avec la mesure absolue décrite ultérieurement. Le degré de polychromasie ainsi que les thrombocytes ont été évalués de manière qualitative (Stacy et al., 2011). Concernant le nombre absolu de leucocytes, le comptage des éosinophiles et hétérophiles a été réalisé en utilisant le système Avian Leukopet® system (Vetlab). La concentration en leucocytes (TWBC/µl) a été obtenue suite à au comptage différentiel (comptage de chaque type cellulaire pour 200 leucocytes) et au résultat du Leukopet® en utilisant l’équation suivante (Campbell, 1995): (Nombre de cellules totales obtenues avec AvianLeukopet® x 1.1 x 16 x100)/(% Hétérophiles + % Eosinophiles obtenus lors du différentiel). Deux tubes capillaires ont été remplis puis centrifugés à 12,000g pendant 5 minutes. Le PCV a été évalué comme sur la Fig. 22. Par abus de language nous appelerons PCV, hématocrite. A noter que le PCV (Packed cell Volume) n'est pas un paramètre calculé comme l'est l'hématocrite mais bien mesuré (Fig. 22). Les protéines totales ont été mesurées grâce à l’utilisation du refractomètre (TS : total solid). Les échantillons plasmatiques précédemment récoltés pour les animaux âgés de 20 à 56 mois ont été analysés par l’analyseur Modular-P Analytics® (Roche Diagnostics) au Texas Veterinary Medical Diagnostic Laboratory (TVMDL), College Station, Texas, USA. Le volume des échantillons obtenus pour les tortues de 8 mois était trop faible pour pouvoir effectuer une analyse biochimique. Figure 22. Lecture du PCV (packed cell volume) après centrifugation d'un microtube. Sur la figure le PCV est de 22%. Noter la couleur du plasma. 90 Pour les tortues de 20 à 56 mois, les paramètres biochimiques suivants ont été analysés : albumine, alanine aminotransférase (ALT), alkaline phosphatase (ALP), amylase, aspartate aminotransférase (AST), Urée (BUN), calcium (Ca), chlore (Cl), cholestérol, créatine kinase (CK), créatinine (Crea), gamma glutamyltransférase (GGT), globuline, glucose (Glu), phosphore (P), potassium (K), sodium (Na), bilirubine totale, protéine totale (TP) et l’acide urique (UA). D. Fonctionnalité du système immunitaire 1. Isolement des cellules sanguines mononuclées (PBMC) Les cellules sanguines mononuclées ont été isolées par centrifugation de gradients de différentes densités. Quatre ml de sang total ont été mélangés à 4 ml de milieu de culture (RPMI) puis ensuite répartis sur du Ficoll-Paque plus (1.077 g/ml, Amersham Biosciences). Les échantillons ont été centrifugés pendant 35 min à 600 g. Le gradient a été collecté et les cellules ont été re-réparties sur du Ficoll-Paque une seconde fois si de nombreux érythrocytes persistaient. Les cellules mononuclées ont été re-suspendues dans un milieu complet de RPMI (Mediatech Inc.) supplémenté avec 2mM de L-glutamine, 1 mM de pyruvate de sodium (BioWhittaker), 100 mM d’aminoacide non essentiel (BioWhittaker), 10 mM d’HEPES, un mélange de pénicilline (50 U/ml) et streptomycine (50 µg/ml, MP Biomedicals) et 10% de sérum de fœtus bovin (BioWhittaker). Les cellules ont été rincées deux fois, comptées et leur viabilité a été évaluée par le test d’exclusion au bleu de trypan. 2. Prolifération lymphocytaire La prolifération lymphocytaire induite par les agents mitogènes a été testée in vitro comme précédemment décrit avec quelques modifications (Levin et al., 2007a). Les lymphocytes, maintenus en milieu RPMI complet, ont été distribués sur une plaque de 96 puits à fond plat à raison de 2 x105 cellules/puits (Falcon, Becton Dickinson) et ce en triplicata avec et sans (cellules non stimulées) ajout de mitogènes. Les cellules ont été maintenues dans un incubateur à 28°C, en atmosphère humide enrichie avec 5% CO2 pendant 96 hr. Deux agents mitogènes ciblant les lymphocytes T ont été testés: la concanavaline A (ConA, C5275, Sigma, St. Louis, MO) et la 91 phytohemagglutinine (PHA-P, L1668, Sigma, St. Louis, MO) aux concentrations finales de 1, 2, 5, 10 et 20 μg/ml. Le lipopolysaccharide (LPS E. coli 0127:B8, L4516, Sigma) a été choisi afin de cibler la croissance des lymphocytes B, aux concentrations finales de 1, 2, 5, 10 et 20 μg/ml. Le raisin d’Amérique ou « pokeweed mitogen » (PWM ; Phytolacca Americana, L8777, Sigma, St. Louis, MO) a été testé aux mêmes concentrations que précédemment afin de stimuler à la fois les lymphocytes B et T. La prolifération lymphocytaire a été évaluée par l’incorporation de la bromodéoxyuridine (5-bromo-2'-deoxyuridine, ou BrdU) dans l'ADN nouvellement synthétisé des cellules en cours de division. Il s’agit d’un nucléoside synthétique analogue de la thymidine. La BrdU a été ajouté pendant les 18 dernières heures d’incubation puis a ensuite été détectée grâce à un anticorps monoclonal et une réaction enzymatique colorimétrique (Cell Proliferation colorimetric ELISA BrdU, RocheDiagnostics) en suivant les instructions du fabricant. La mesure de la densité optique a été réalisée avec un lecteur de plaques ELISA (Multiskan EX v.1.0) à la longueur d’onde de 450 nm et celle de référence à 690 nm. 3. Activité NK cellule tueuse naturelle avec et sans PCBs L’activité des cellules tueuses naturelles (NK) a été testée contre deux lignées cellulaires, une lignée érythroleucémique humaine (K-562, CCL-243™, ATCC) et une lignée de lymphome murin (YAC-1, ATCC, TIB-160™) selon le protocole décrit par DeGuise et al. (1997), avec de légères modifications. Un ml de suspension de la lignée cellulaire cible (un million de cellules/ml) a été ajoutée à 10 µl d’une solution lipophile à 3 mM de carbocyanine permettant la coloration des membranes cellulaires (perchlorate de 3,3’-dioctadécyloxabocyanine (DiO, Molecular Probes) dissous dans du diméthylsulfoxide (DMSO, Sigma). Les cellules cibles ont ensuite été incubées pendant 20 min à 37°C et 5% CO2, suivi de deux lavages dans le milieu de RPMI complet. Les cellules sanguines mononuclées constituant les cellules effectrices ont été ajustées à une concentration de un million de cellules/ml et ajoutées afin d’obtenir les rapports cellules effectrices : cellules cibles de 100 :1. 50 :1, 25:1, 12,5 :1 et 6,25 :1. L’activité des cellules tueuses naturelles a été mesurée après deux heures et demie d’incubation soit à 28°C ou 37°C. Les cellules ont ensuite été colorées à l’iodure de propidium (PI, Invitrogen) immédiatement avant l’acquisition de la fluorescence par un cytomètre de flux (FACScan, Becton Dickinson) et analysées par 92 le logiciel CellQuest Pro software (Becton Dickinson, Immunocytometry System) afin de mesurer la mort des cellules cibles (cytoléthalité). Les résultats ont été exprimés en pourcentage de cellules cibles mortes2. L'activité des cellules NK suite à leur exposition aux PCBs a été mesurée en utilisant la lignée de lymphome murin (YAC-1) comme cellules cibles (Rousselet et al., 2013b). La concentration des cellules effectrices (PBMC) a été ajustée à 106 cells/mL puis les cellules ont été incubées dans du RPMI avec ou sans PCB à des concentrations croissantes de 0,5 à 20 ppm pendant 3h. Les cellules cibles ont ensuite été ajoutées aux PBMC pour un rapport cellules effectrices/ cibles de 50:1. L'activité des cellules NK a été mesurée après 2.5 hr d'incubation à 28 C. Le reste du protocole est identique à ce qui a été décrit ci-dessus. 4. Isolement des sous-populations de cellules leucocytaires Les monocytes, lymphocytes et granulocytes ont été séparés grâce à l’utilisation de gradients interrompus de Percoll. Quatre ml de sang total ont été placés au dessus de 10 ml du gradient de Percoll 3 (Percoll, P4937, Sigma). Ce gradient de faible osmolarité a été préparé selon les recommandations du fabricant et était constitué de multiples couches de 2 ml de densité différente (la densité la plus importante se trouvant sous la précédente). Les densités suivantes ont été utilisées : 1,053 g/ml (40%), 1,059 g/ml (45%), 1,064 g/ml (50%), 1,070 g/ml (55%) and 1,076 g/ml (60%). Le sang placé au dessus des gradients de Percoll a ensuite été centrifugé à 400g pendant 5 min à 4°C, suivi immédiatement par une centrifugation à 800g pendant 20 min à 4°C, puis arrêté sans utilisation du frein afin de ne pas perturber les couches ainsi obtenues. Les diverses couches cellulaires obtenues, situées entre deux gradients, ont ensuite été récoltées à l’aide d’une pipette puis transférées stérilement, mises en suspension puis lavées deux fois (400g pendant 5 min à 4°C) dans du milieu RPMI complet. Le comptage et la viabilité cellulaire ont été déterminés par exclusion du bleu de Trypan et en utilisant un hémocytomètre. 2 Lors des lésions membranaires des cellules cibles induites par les cellules NK, le PI se lie à l’ADN des cellules cibles, qui deviennent ainsi doublement positives DiO+, PI+. Au contraire, les cellules cibles non affectées par les cellules NK, vont exclure le PI et restent ainsi DiO+, PI−. 3 Le Percoll est une solution de particules de silice colloïdale revêtue de polyvinylpyrrolidone. 93 5. Tri cellulaire et caractérisation morphologique Le type cellulaire des sous populations de leucocytes déterminées par cytomètre de flux en se basant sur leur taille (FSC) ainsi que leur granulosité (SSc pour Side Scatter) relative, a été confirmé grâce au tri cellulaire (FACSAria II) puis à l’évaluation morphologique des cellules au microscope. Les leucocytes isolés soit par utilisation de gradient de Ficoll® ou de Percoll® ont été triés grâce au cytomètre de flux FACSAria II (BD Biosciences) utilisant une douille filtrante de 70 ou 85 µm. Des lames de cellules en couche mince ont été préparées à l’aide d’une cytocentrifugeuse (Cytospin, Shandon Inc., Pittsburgh, Pennsylvania, USA) à 450 rpm pendant 10 min. Les lames de cellules en couche mince ont ensuite été colorées au Diff Quick (Jorgenson Dip Quick Stain set, Loveland, CO). 6. Phagocytose avec et sans PCBs La capacité de phagocytose in vitro a été déterminée selon le protocole décrit par Levin et al. (2005), avec quelques modifications. Brièvement, la concentration des leucocytes a été ajustée à 2 millions de cellules par ml de HBSS (sans calcium ni magnésium, BioWhittaker, Walkersville, MD) enrichi avec 1% de sérum de fœtus bovin (Lonza Bioscience, Rockland, EA). Un million de cellules ont été distribuées dans des puits à fond arrondi de plaques 96-puits (Falcon, Becton Dickinson, Franklin Lakes, NJ) puis une suspension de billes de 1 µm en latex fluorescentes (Molecular Probes, Eµgene, OR) dans du PBS (Mediatech Inc., Manassas, VA) a été ajoutée à la suspension cellulaire afin d’obtenir un rapport d’environ 100 billes par cellule. Les cellules ont été incubées pendant 1h à 28°C sous agitation à 300 rpm en utilisant un Thermomixer R (Eppendorf, Hamburg, Germany). La suspension cellulaire de chaque puits a été déposée sur du sérum d’albumine bovine à 3% glacial (Sigma, St Louis, MO) puis le tout a été centrifugé à 150g pendant 8 min à 4°C. Le surnageant contenant les billes libres a été écarté et les cellules ont été mises en suspension dans 200 µl de PBS contenant 1 % de solution tampon de formol (Decal Corp., Tallman, NY). La suspension cellulaire ainsi préparée a été stockée à 4°C jusqu’aux analyses (24h plus tard au maximum). La fluorescence de 10000 évènements environ a été mesurée à une longueur de 530 mm (FL-1) avec le cytomètre de flux FACScan. 94 L’échelle de lecture est logarithmique et les billes libres servent de référence. Les diverses populations cellulaires, granulocytes, lymphocytes et monocytes ont été délimitées électroniquement en fonction de leur taille (FSC) et de leur granulosité (SCC). Les cellules possèdent ainsi une fluorescence correspondante au nombre de billes ingérées. La phagocytose a été rapportée comme le pourcentage de cellules ayant phagocyté une bille ou plus (Burleson et al., 1995; Brousseau et al., 1999, 2000). Les granulocytes ont été séparés grâce à l'utilisation de gradients discontinus de Percoll comme décrit précédemment (Rousselet et al., 2013b). Les cellules situées entre le plasma et 40% de Percoll ainsi que celles situées entre 40-45% de Percoll ont été combinées. Les granulocytes ont été incubés avec PCBs aux concentrations de 0,5 à 15 ppm, pendant 3 hr à 28 C. Le reste du protocole est identique à ce qui est mentionné ci-dessus. 7. Explosion respiratoire L’explosion respiratoire in vitro a été réalisée selon le protocole de Levin et al., 2007a. Brièvement, la concentration des leucocytes a été ajustée à 2 millions de cellules par ml de RPMI complet. Les suspentions cellulaires ont été incubées pendant 30 min à 28°C, en présence de 5 mM de diacétate 2,7-dichlorofluorescine (DCFDA, Molecular Probes), une sonde fluorescente permettant de détecter la production d’hydroxyde d’oxygène. La suspension cellulaire a été centrifugée pendant 10 min à 220 g puis mise à nouveau en suspension dans du PBS-glucose (1 g/L; PBS-G). Les cellules ont été distribuées dans des plaques 96-puits à fond rond, en présence ou non de 10-9 M de phorbol myristate-2 acétate-3 (PMA, Molecular Probes), un activateur cellulaire. Les plaques ont ensuite été incubées pendant 1 hr à 28°C. Les cellules ont ensuite été fixées avec 1 % de solution tampon de formol dans du PBS puis stockée à 4°C jusqu’aux analyses (24h plus tard au maximum). L’explosion respiratoire a été mesurée à la longueur d’onde de 530 nm (FL-1), et exprimée selon le rapport (ou indice de stimulation) : fluorescence moyenne émise par les cellules stimulées par le PMA / fluorescence moyenne émise par des cellules non stimulées. 8. Préparation des PCBs Les PCBs utilisés (PCBs -105, 138 et -169) avaient une pureté >98.4% (Ultra Scientific, North Kingston, RI, USA). Ils ont été mis en suspension dans du DMSO 95 exempt d’endotoxine, puis dans du DMEM utilisé comme diluant afin de préparer les solutions-mère. La concentration finale en DMSO ne dépassait pas 0,4%. E. Analyse statistique Les analyses statistiques ont été effectuées grâce à l’utilisation de SigmaStat Windows 1.0 (Jandel Scientific) et du logiciel R; p ≤ 0.05 est considéré comme statistiquement significatif. La puissance statistique pour chaque expérience était supérieure à 0,8 qui est considéré comme le euil requis par les logiciels de statistique afin de s’assurer de la confiance pouvant être accordée à l’interprétation des résultats. 1. Etude des paramètres hématologiques et biochimiques Le test de normalité de Shapiro-Wilk a été utilisé pour l’analyse de tous les jeux de données d'analytes hématologiques et biochimiques de chaque groupe d’âge. La moyenne, déviation standard, et gamme (pour les variables distribuées normalement) et la médiane, les quartiles à 25-75% et la gamme (pour les variables non normales) ont été déterminés pour tous les analytes. Trente deux comparaisons entre les cinq groupes de tortues ont été réalisées en utilisant un test d’analyse des variances (ANOVA). Le test ANOVA non-paramétrique de Kruskal-Wallis suivi par le test de Wilcoxon sur données appariées a été utilisé lors de distribution non normale et le test ANOVA paramétrique de Holm-Sidak suivi par un t-test a été utilisé dans le cas contraire. Le test de Mann-Whitney a été utilisé pour des comparaisons deux à deux. Les corrélations de Spearman ont également été réalisées. 2. Etude du système immunitaire avec ou sans PCBs Les analyses statistiques One-way repeated-measures analysis of variance (RM ANOVA) suivi d'un test post hoc de Bonferroni (test paramétrique) ou Holm-Sidak (test non paramétrique) ont été utilisées. Si les données étaient distribuées normalement pour une comparaison de deux jeux de données, un t-test a été utilisé; sinon un test des rangs de Mann-Whitney a été utilisé. 96 II. Paramètres hématologiques et biochimiques A. Résultats 1. Morphométrie et Hématologie L’évolution du poids des tortues et de la longueur de la carapace est montrée dans la Figure 23. Figure 23. Evolution du poids (Weight) et de la longueur de carapace (SCL) pour les 5 classes d'âge (Age) de tortues juvéniles (8, 20, 32,44 et 56 mois). Ces deux paramètres sont étroitement correlés (p= 0,01) Les résultats complets d’hématologie sont présentés dans le Tableau IV (p 98). Plusieurs analytes hématologiques varient de manière significative parmi les groupes d’âge. La moyenne d’hématocrite était significativement plus basse chez les tortues de 8 mois (moyenne 20,3%, p < 0,001, Fig. 24A) comparativement aux animaux de 20 mois (moyenne 27,5%), 32 mois (moyenne 25,4%), 44 mois (moyenne 25,5%) et 56 mois (moyenne 29,1%). Le degré de polychromasie (Fig.25) était de 6% chez tous les individus étudiés, cependant sans différence significative parmi les groupes d’âge. Les stades érythrocytes immatures (par ex les rubricytes) étaient absents des frottis chez tous les animaux étudiés. Les animaux de 8 mois avaient une médiane de numération leucocytaire significativement plus basse (4800 cellules /μl, p < 0,001) comparée aux individus de 20, 32, 44 et 56 mois. Les animaux de 20 mois avaient une médiane de numération leucocytaire significativement plus haute (13700 cellules/μl, p < 0,001) que les animaux âgés de 8, 32, 44 et 56 mois. 97 Tableau IV. Paramètres hématologiques et morphométriques [Moyenne (M) ± SD ou Médiane (Med), 25–75% quartiles (q)] chez les tortues caouannes immatures (8, 20, 32, 44 et 56 mois). L’asterisque (*) indique une difference statistique significative figurant en détail en bas du tableau par orde alphabétique. Age Nombre échantillon SCL (cm) M 20 mois 32 mois 44 mois 56 mois (nés en 2009) (nés en 2008) (nés en 2007) (nés en 2006) (nés en 2005) n=21 n=21 n=22 n=14 n=7 9,6 SD (Gamme) Poids (kg) M 8 mois SD (Gamme) 0,4 32,4 0,7 44,9 1,2 51,0 2,1 55,8 1,1 (8,8 –10,2) (31,4 – 33,6) (42,9 – 47,4) (46,0 – 54,5) (54,4 – 56,5) 0,13 4,25 10,52 15,70 22,11 0,01 0,23 0,67 0,94 1,23 (0,11 – 0,14) (3,72 – 4,62) (9,39 – 11,96) (13,50 – 16,98) (20,3 – 23,39) 20,3 1,9 (17 – 23) a* 27,5 ± 2,4 (23 – 30) 25,4 2,5 (20 – 30) 25,5 2,1 (22 – 29) 29,1 2,4 (25 – 32) 4,8, 3,9 – 6,5 13,7, 10,8 – 19,4 11,4, 7,7 – 13,7 12,5, 7,6 – 18,0 7,0, 5,1 – 8,2 Hct (%) M SD (Gamme) 3 Total WBC (x10 /µl) Médiane, q b (Gamme) b (2,1 – 12,3) * (6,8 – 27,3) * (2,6 – 21,1) (5 – 24,6) (4 – 12,3) 5,4, 3,8 – 6,4 11,4, 9,6 – 14,6 8,8, 7,2 – 10,3 10,0, 7,4 – 11,3 9, 7,8 – 9,6 (3 – 16,8) (5,2 – 15,4) (6,4 – 17,4) 3 WBC Estimate (x10 /µl) Médiane, q (Gamme) c (1,8 – 10,4) * c (4,4 – 19,8) * 98 Lymphocytes (%) 82,5, 73,3 – 87,8 Médiane, q 92,0, 88,0 – 95,0 91,0, 88,0 – 95,0 92,0, 88,5 – 95,0 92,0, 88,2 – 93,0 (41 – 96) * (75 – 99) (77 – 100) (74 – 99) (83 – 95) 3,8, 2,9 – 5,1 12,5, 10,4 – 17 9,8, 6,8 – 12,6 11,1, 6,9 – 16,4 6,5, 4,8 – 7,1 d (Gamme) 3 Lymphocytes (x10 /µl) Médiane, q e e (2 – 11, 2) * (6 – 25,3) * (2,6 – 19,9) (4,2 – 22,9) (3,7 – 11,2) 11,0, 5,3 – 17,0 (0 – 41) f* 4,0, 3 – 8,0 (0 – 19) 6,0, 2,8 – 8,0 (0 – 20) 7,0, 3,0 – 10,0 (1 – 25) 5,5, 4,0 – 7,0 (1 – 10) Médiane, q 0,46, 0,25 – 1,15 0,7, 0,4 – 1,3 0,6, 0,4 – 1,1 0,7, 0,3 – 1,2 0,3, 0,25 – 0,5 (Gamme) (0 – 2,4) (0,1 – 2,2) (0 – 1,6) (0,1 – 1,7) (0,2 – 0,9) 1,5, 1,0 – 3,0 (0 – 9) 1,0, 0 – 2,25 (0 – 10) 2,0, 1,0 – 3,0 (0 – 8) 0,5, 0 – 1,7 (0 – 9) h* 1,0, 1,0 – 4,0 (0 – 7) 0,1, 0,02 – 0,2 (0 – 0,9) 0,15, 0 – 0,4 (0 – 2,1) 0,2, 0,07 – 0,3 (0 – 1,2)i* 0, 0 – 0,1 (0 – 0,9)i* 0,1, 0,05 – 0,3 (0 – 0,5) 3, 1 – 5 (0 – 9) j* 1, 0 – 1 (0 – 6) 1, 0 – 1 (0 – 3) 0, 0 – 1 (0 – 2) 1, 0 – 0,2 (0 – 6) 0,1, 0 – 0,2 (0 – 0,6)k* 0,1, 0 – 0,2 (0 – 0,4) 0,07, 0 – 0,14 (0 – 0,3) 0, 0 – 0,1 (0 – 0,2) 0,05, 0 – 0,1 (0 – 0,6) 1, 0 – 2 (0 – 7) l* 0 (0 – 1) 0 (0 – 1) 0 (0 – 1) 0 (0 – 2) 0,05, 0 -0,08 (0 - 0,9) m* 0 (0 – 0,2) 0 (0 – 0,1) 0 (0 – 0,1) 0 (0 – 0,2) (Gamme) Hétérophiles (%) Médiane, q (Gamme) 3 Hétérophiles (10 /µl) g* Monocytes (%) Médiane, q (Gamme) Monocytes (x103/µl) Médiane, q (Gamme) Eosinophiles (%) Médiane, q (Gamme) 3 Eosinophiles (10 /µl) Médiane, q (Gamme) Basophiles (%) Médiane, q (Gamme) 3 Basophiles (10 /µl) Médiane, q (Gamme) 99 Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois, Chi-squared=52,01, significatif avec p < 0,001*, a b One Way ANOVA performed on logarithmic values: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois et 20 mois vs 8, 32, 44, 56 mois, F=34,6, significatif avec p < 0,001*, Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois et 20 mois vs 8, 32, 44, 56 mois, Chi-squared =68,2, significatif avec p < c 0,001*, Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois, Chi-squared =41,7, significatif avec p < 0,01, d e One Way ANOVA performed on logarithmic values: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois et 20 mois vs 8, 32, 56 mois, F=43,7, significatif avec p < 0,001*, Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois, Chi-squared =18,6, significatif avec p < 0,02*, f Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test: Chi-squared =7,2, p = 0,12: not significant, g h Mann -Whitney Ranks 44 mois vs 8 mois U=726,5, T=716,5, P = 0,019*, 44 mois vs 32 mois U=731, T=686, P = 0,009*, 44 mois vs 56 mois U=101, T=328, p = 0,036*, i Mann -Whitney Ranks 8 mois vs 32 mois U=519,5, T=1580,5, P = 0,027*, 20 mois vs 44 mois U=470,5, T=518,5, p = 0,038*, 32 mois vs 44 mois U=580,5, T=500,5, P = 0,004*, j Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test: 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois, H=41,9, significatif avec p < 0,01*, k Mann -Whitney Ranks 8 mois vs 32 mois U=1014, T=1086, P = 0,004*, 8 mois vs 44 mois U=737,5, T=504, significatif avec p < 0,001*, l Kruskal -Wallis test on Wilcoxon Rank-sum test : 8 mois vs 20, 32, 44, 56 mois, H=54,8, significatif avec p < 0,02*, m Mann -Whitney Ranks 8 mois vs 20 mois U=950, T=848, p < 0,001*, 8 mois vs 32 mois U=1161,5, T=938, p < 0,001*, 8 mois vs 44 mois U=760,5, T=481, P < 0,001*, 8 mois vs 56 mois U=322,5, T=152,5, significatif avec p = 0,007*, 100 Ces résultats ont également été rapportés en ce qui concerne les numérations leucocytaires estimées. La numération leucocytaire obtenue par estimation corrélait avec le comptage absolu (Coefficient corrélation Spearman 0,6, p < 0,0001). Cela nous permet de renforcer la confiance vis à vis des résultats obtenus. Les animaux âgés de 8 mois avaient un pourcentage (82,5%, p < 0,01) ainsi que des valeurs absolues (3800 lymphocytes/µl, p < 0,001) du nombre de lymphocytes (Fig.25) significativement plus bas ainsi qu’un pourcentage d’hétérophiles (11%, p < 0,02), d’éosinophiles (3%, p < 0,01) et de basophiles (1%, p < 0,02) et des valeurs absolues (50 basophiles/µl, p < 0,007) significativement plus élevées que chez les tortues plus âgées. Figure 24. Boxplot faisant figurer la médiane, les percentiles 25 et 75 (limites basses et hautes de la boite) et les percentiles 5 et 95 (moustaches du diagramme) pour le paramètre choisi. Chaque classe d'âge (en mois) des tortues caouannes juvéniles est représentée en abscisse. Les astérisques (*) indiquent les différences significatives. A : Packed cell volume (PCV) ; B : Comptages leucocytaires réalisées par estimation (WBC estimates) par microlitre. Les tortues de 8 mois avaient également un nombre d’éosinophiles (Fig.25) significativement plus élevé (100 éosinophiles/µl, p < 0,004) comparé aux animaux âgés de 32 et 44 mois. Les animaux de 20 mois avaient un nombre significativement plus élevé de lymphocytes (12500 lymphocytes/µl, p < 0,001) que les autres groupes. Les pourcentages de monocytes (Fig.25) obtenus pour les animaux de 44 mois étaient significativement plus bas que chez les animaux de 8, 32 et 56 mois (p < 0,036), tandis que le nombre de monocytes était significativement plus bas chez les animaux de 44 mois que chez les animaux de 20 et 32 mois (p < 0,038). De plus, les animaux de 32 mois avaient un nombre de monocytes significativement plus élevé (200 monocytes/µl, p < 0,027) que les animaux de 8 mois. 101 Il n’y avait aucune différence morphologique des leucocytes en fonction de l’âge. Les thrombocytes semblaient normaux en nombre et morphologie chez tous les animaux (Fig.25). A B C D Figure 25. Photomicrographies de cellules sanguines de tortue caouanne juvénile. Crédit. Estelle Rousselet. A. >lymphocyte, *thrombocyte. B. >éosinophile. C. > hétérophile, ** polychromatophile ou érythrocyte immature. D. monocytes. Bar :5µm. 2. Biochimie plasmatique Les résultats des paramètres plasmatiques et les comparaisons statistiques entre les groupes d’âge sont présentés dans le Tableau V (p105). Les animaux de 8 mois avaient des valeurs plasmatiques de protéine totale déterminée par réfractométrie (TS) significativement plus basses (médiane 1,1 g/dl, p < 0,001) comparées aux animaux plus âgés. Les valeurs de solide plasmatique corrélaient avec le poids et la longueur de la carapace des individus (Corrélation de Spearman, r=0,50 et 0,56 respectivement, p = 2x10–8 et 1,2x10–6, n=85, tous groupes d’âge). Les taux de protéines plasmatiques totales étaient significativement plus bas chez les animaux de 20 mois (médiane 2,0 g/dl, p < 0,017) comparés aux animaux de 32, 44 et 56 mois (Fig. 24C). Les taux de protéines plasmatiques corrélaient faiblement au poids ou longueur de carapace (Corrélation de Spearman, r=0,32 et 0,34 resp., p = 0,01 et 0,006 resp., n=64, pour les animaux de 20 à 56 mois). Une corrélation significative a été montrée entre les taux 102 plasmatiques de protéines totales mesurées par réfractométrie et analyseur (Corrélation de Spearman, r=0,63, p = 2x10–8; de 20 à 56 mois). Il n’y avait pas de différence significative concernant l’albumine ainsi que le rapport albumine/globuline pour les individus âgés de 20 à 56 mois. Les animaux de 20 mois avaient des concentrations de globuline significativement plus basses (médiane 1,1 g/dl, p < 0,006) que les tortues plus âgées. Les concentrations de glucose (moyenne 153,5 mg/dl ± 21,7 SD, p < 0,001; Fig. 24D), et les activités AST (moyenne 157,7 U/l ± 51 SD, p < 0,001) et ALP (moyenne 73 U/l ± 24,2 SD, p < 0,001) étaient significativement plus élevées chez les animaux de 20 mois que chez les animaux plus âgés alors que les concentrations de cholestérol (moyenne 60 mg/dl ± 14,2 SD, p < 0,001, Fig. 24E) étaient significativement plus basses. Pour les tortues de 32 mois, les activités CK avaient la variabilité la plus importante, allant de 288 à 2829 U/l, et étaient significativement plus élevées (moyenne 991,5 U/l ± 536,1 SD, p < 0,01) que pour les tortues de 44 mois. Les animaux de 32 mois avaient des activités amylase significativement plus basses (médiane 562 U/l, p < 0,001) que pour les tortues de 20 et 44 mois. Les valeurs d’acide urique étaient significativement plus basses pour les tortues de 32 mois (moyenne 0,5 mg/dl ± 0,14 SD, p < 0,01) que pour celles de 20 mois. Les tortues de 56 mois avaient des concentrations d’urée significativement plus élevées (moyenne 43,3 mg/dl ± 6,6 SD, p < 0,016) que pour tous les autres groupes (Fig. 24F). Chez ces mêmes individus, la créatinine était significativement plus élevée (médiane 0,07 mg/dl, p < 0,04) que pour les animaux de 20 et 32 mois. Les concentrations de bilirubine totale étaient en dessous de 0,1 mg/dl, les activités alanine aminotransférase étaient inférieures à 4 U/l et celles des gammaglutamyltransférases étaient inférieures à 3 U/l pour tous les groupes d’âge. Il n’y avait aucune différence significative entre les classes d’âge concernant les concentrations plasmatiques de calcium, phosphore, rapport phospho-calcique, sodium, chlore et potassium. 103 Figure 24. Boxplots faisant figurer la médiane, les percentiles 25 et 75 (limites basses et hautes de la boite) et les percentiles 5 et 95 (moustaches du diagramme) pour chaque paramètre hématologique et biochimique d'intérêt. Les classes d'âge (mois) des tortues caouannes immatures sont en abscisse. Les cercles à l'extérieur des moustaches représentent les valeurs extrèmes. Les astérisques (*) indiquent les différences significatives. C. Protéines totales ; D. Glucose ; E. Cholestérol ; F. Urée (BUN). 104 Tableau V. Analytes biochimiques [Moyenne (M) ± SD ou Médiane (Med), 25–75% quartiles (q)] chez les tortues caouannes immatures (8, 20, 32, 44 et 56 mois). L’asterisque (*) indique une difference statistique significative figurant en détail en bas du tableau par orde alphabétique. Age 8 mois 20 mois 32 mois 44 mois 56 mois (2009 hatchlings) (2008 hatchlings) (2007 hatchlings) (2006 hatchlings) (2005 hatchlings) n=21 n=21 n=22 n=14 n=7 1,1, 1 – 1,2 a* 1,6, 1,4 – 1,7 1,6, 1,53 – 1,80 1,55, 1,4 – 1,8 1,8, 1,7 – 1,9 0,9 - 1,8 1,0 - 2,0 1,2 - 2,0 1,2 - 2,0 1,5 - 2 Médiane, q 2,0, 2 – 2,2 b* 2,2, 2,1 – 2,4 2,25, 2,1 – 2,37 2,3, 2,15 – 2,35 Gamme, g/dl 1,3 - 2,3 1,7 - 2,6 1,3 - 2,7 1,9 - 2,5 Médiane, q 0,9, 0,9 – 1,10 1, 1,0 – 1,10 0,9, 0,9 – 1,1 1,0, 0,95 – 1,1 Gamme, g/dl 0,5 - 1,1 0,8 - 1,2 0,6 - 1,1 0,8 - 1,1 Médiane, q 1,1, 1,1 – 1,2 d* 1,2, 1,1 – 1,3 1,25, 1,2 – 1,3 1,3, 1,15 – 1,3 Gamme, g/dl 0,7 - 1,3 0,9 - 1,4 0,7 - 1,6 1,1 - 1,4 0,8 0,9 0,8 0,8 Taille échantillon Protéine Totale (réfractométrie) g/dl M SD or Med, q Gamme, g/dl Protéine Totale (analyseur) g/dl Albumine c g/dl Globuline g/dl Albumine: Globuline Ratio Mean SD 0,1 105 0,1 0,1 0,1 Créatinine, µmol/l (mg/dl) Médiane, q Gamme, µmol/l (mg/dl) 2,64, 2,64 – 3,52 3,52, 2,64 – 3,52 3,98, 3,52 – 5,08 6,19, 3,98 – 6,19 e* (0,03, 0,03 – 0,04) (0,04, 0,03 – 0,04) (0,045, 0,04 – 0,058) (0,07, 0,045 – 0,07) 0,88 - 5,30 2,65 - 6,19 2,65 - 9,72 3,54 - 6,19 (0,01 - 0,06) (0,03 - 0,07) (0,03 - 0,11) (0,04 - 0,07) 41,6, 35,7 – 47,6 29,7, 23,8 – 35,7 f* 35,7, 29,7 – 35,7 35,7, 35,7- 41,6 (0,70, 0,60 – 0,80) (0,50, 0,40 – 0,60) (0,60, 0,50 – 0,60) (0,60, 0,60 – 0,70) 17,6 - 65,4 17,8 - 47,6 23,8 - 41,6 35,7 - 41,6 (0,30 - 1,10) (0,30 - 0,80) (0,40 - 0,70) (0,60 - 0,70) 11,3, 10,1 – 11,6 11,0, 9,9 – 12,6 10,6, 9,3 – 11,5 16,4, 13,7 – 16,9 g* (31,7, 28,2 – 32,5) (30,7, 27,63 – 35,25) (29,6, 26,05 – 32,2) (46,0, 38,3 – 47,4) 5,9 - 12,7 7,8 - 17,1 6,96 - 13,7 12,2 - 18,3 (16,6 - 35,6) (21,9 - 47,9) (19,5 - 38,5) (34,1 - 51,3) Acide urique, µmol/l (mg/dl) Médiane, q Gamme, µmol/l (mg/dl) Urée, mmol/l (mg/dl) Médiane, q Gamme, mmol/l (mg/dl) Glucose, mmol/l (mg/dl) 8,5 Moyenne 1,2 h* 5,2 0,7 5,0 0,9 5,2 0,5 16,1) (93,9 9,5) SD (153,5 Gamme, mmol/l (mg/dl) 21,7) (92,8 11,9) (91,0 6,6 - 10,5 4,1 - 6,4 3,6 - 6,9 4,6 - 6,0 (119,0 - 189,0) (74,0 - 115,0) (65,0 - 124,0) (83,0 - 108,0) <0,1 Bilirubine totale (mg/dl) 106 Cholestérol, mmol/l (mg/dl) Moyenne 1,55 0,37i* 2,30 0,53 2,33 0,53 2,64 (60,0 14,2) (89,5 20,4) (90,1 20,6) (102,2 0,69 SD Gamme, mmol/l (mg/dl) 26,6) 0,76 - 2,05 1,36 - 3,30 1,18 - 3,17 2,02 - 3,93 (29,2 - 79,1) (52,8 - 127,8) (45,6 - 122,4) (78,1 - 152,1) Médiane, q 78,0, 66,0 – 82,0 j* 28,5, 25,0 – 35,5 30,0, 25,5 – 34,0 31,0, 27,0 – 40,0 Gamme 22,0 - 118,0 22,0 - 67,0 18,0 - 43,0 25,0 - 50,0 ALP, U/l CK, U/l Moyenne SD Gamme 699,8 344,9 991,5 201,0 - 1464,0 536,1 k* 288,0- 2829,0 582,4 397,4 83,0 - 1381,0 507,7 243,1 269,0 - 944,0 AST, U/l Moyenne SD 157,7 51,0 l* Gamme 75,0 - 298,0 ALT, U/l <4 GGT, U/l <3 101,8 17,5 97,1 19,9 89,0 11,5 57,0 - 128,0 56,0 - 147,0 75,0 - 104,0 Amylase, U/l Médiane, q 835,0, 694,0 – 1090,0 562,0, 506,0 – 618,75 m* 951,5, 871,0 – 1025,0 790,0, 620,0 – 1136,0 Gamme 582,0 - 1276,0 414,0 - 1003,0 664,0 - 1179,0 439,0 - 1249,0 107 P, n mmol/l (mg/dl) Médiane, q Gamme, mmol/l (mg/dl) 2,48, 2,27 – 2,66 2,29, 2,22 – 2,48 2,09, 2,02 – 2,32 2,05, 2,02 – 2,22 (7,68, 7,04 – 8,25) (7,10, 6,87 – 7,68) (6,48, 6,25 – 7,19) (6,36, 6,25 –6,89) 1,66 - 2,86 1,75 - 2,69 1,51 - 2,84 1,88 - 2,45 (5,14 - 8,85) (5,41 - 8,33) (4,69 - 8,8) (5,82 - 7,59) 1,7, 1,48 – 1,75 1,61, 1,53 – 1,65 1,66, 1,54 – 1,72 1,67, 1,51 – 1,8 (6,80, 5,90 – 7,0) (6,45, 6,13 – 6,60) (6,65, 6,18 – 6,90) (6,7, 6,05 – 7,2) 1,17 - 1,85 1,25 - 1,77 1,25 - 1,825 1,40 - 1,85 (4,70 - 7,40) (5,00 - 7,10) (5,00 - 7,30) (5,60 - 7,40) 0,89 0,89 0,99 1,01 Ca, o mmol/l (mg/dl) Médiane, q Gamme, mmol/l (mg/dl) Ca:P Moyenne SD Gamme 0,08 0,07 0,10 0,11 0,77 - 1,02 0,74 - 1,04 0,77 - 1,17 0,85 - 1,16 Médiane, q 150,0, 128,0 – 153,0 149, 145,25 – 151 149,5, 146,3 – 150 140, 132 – 148 Gamme, mmol/l 84,0 - 155,0 115,0 - 154,0 102,0 - 154,0 128,0 – 151,0 p Na, mmol/l = meq/L q K, mmol/l= meq/L Moyenne SD Gamme, mmol/l 3,8 0,7 3,9 0,4 3,8 0,4 3,5 0,2 2,1 - 4,7 3,1 - 4,7 2,8 - 4,5 3,3 - 3,7 Médiane, q 119, 100 – 120 115,5, 114 – 119 117, 115 – 119,25 112, 103,5 – 117,5 Gamme, mmol/l 63,0 - 122,0 90,0 - 122,0 79,0 - 212,0 100,0 -120,0 r Cl, mmol/l= meq/L 108 Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: 8 vs 20, 32, 44, 56 mois, H=36,855, significatif avec p < 0,001*, Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: 20 vs 32, 44, 56 mois, H=10,176, significatif avec p = 0,017*; Mann-Whitney 20 mois vs 32 mois (p = 0,007), 44 mois (p = 0,021), 56 mois (p = 0,031), c Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=6,389, p = 0,09, d Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=12,5, significatif avec p = 0,006*; Mann-Whitney 20 mois vs 32 mois (p = 0,043), 44 mois (p = 0,002), 56 mois (p = 0,01), e Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=15,24, significatif avec p = 0,002*; Wilcoxon rank sum test: 56 mois vs 32 mois (p = 0,04), 20 mois (p = 0,01), f Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=13,78, significatif avec p = 0,003*; Wilcoxon rank sum test: 20 mois vs 32 mois (p = 0,01), g Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=14,49, significatif avec p = 0,002*; Wilcoxon rank sum test: 56 mois vs 44 mois (p = 0,009), 32 mois (p = 0,016), 20 mois (p = 0,002), h One Way Test with non equal variance (Welsh) and normal distribution, significatif avec p < 0,001*; Pairwise comparisons using t tests: 20 mois vs 32, 44, 56 mois (p < 0,001), i One Way ANOVA with equal variances and normal distributions, significatif avec p < 0,001*; Pairwise comparisons using t tests 20 mois vs 32, 44, 56 mois, j Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=30,2, significatif avec p < 0,001*; Wilcoxon rank sum test: 20 mois vs 32 mois (p < 0,001), 44 mois (p < 0,001), 56 mois (p = 0,009), k One Way ANOVA with equal variances and normal distributions after log transformation p = 0,005; Pairwise comparisons using t tests: 32 mois vs 44 mois (significatif avec p < 0,01*), l One Way Test with non equal variance (Welsh) and normal distribution significatif avec p < 0,001*; Pairwise comparisons using t tests: 20 mois vs 32, 44, 56 mois (p < 0,001), m Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method: H=23,45, significatif avec p < 0,001*; Wilcoxon rank sum test: 32 mois vs 20, 44 mois (p < 0,001), n, o, p, q Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method, resp. H=8,59, p = 0,035; H=3,22, p = 0,359; H=2,006, p = 0,571; H=6,71, p = 0,082. a b r Kruskal-Wallis One Way ANOVA on Ranks Dunn’s method, H=1,89, P = 0,60, 109 110 B. Discussion Les tableaux VI et VII présentent une synthèse respectivement des analytes hématologiques et des paramètres biochimiques référencés dans la littérature pour les tortues caouannes et vertes. Dans cette étude, nous avons pris pour références ces données bibliographiques, en rappelant que ces valeurs varient en fonction de la taille de l’échantillonnage et de la méthodologie utilisée pour obtenir ces résultats, à l’origine de variations inter-laboratoires. 1. Hématologie Le volume de sang total d'un reptile varie en fonction des espèces mais de manière générale est d'environ 5 à 8% du poids total (Strik et al., 2007). Donc le volume de sang d'un serpent de 100g est de 5-8 mL. Les reptiles sains peuvent aisément perdre 10% de leur volume de sang total sans conséquences délétères; ainsi 0,7 mL de sang peut être prélevé sans problème chez un animal de 100g. Pour les animaux de 8 mois, les valeurs d’hématocrite de notre étude sont incluses dans les gammes précédemment publiées (Bradley et al., 1998; Kakizoe et al., 2007). Les tortues de 20 à 56 mois ont des valeurs d’hématocrite similaires à celles rapportées pour des tortues caouannes immatures, captives d’élevage présentes au Japon ainsi que pour des immatures sauvages de taille/âge similaires (Casal and Oros, 2007; Kakizoe et al., 2007; Keller et al., 2004b; Morpurgo and Gelman, 1991). Dans notre étude, le taux d’hématocrite varie en fonction de l’âge des individus ce qui corroborent les corrélations (en fonction de l’âge et de la longueur de la carapace) précédemment décrites chez diverses espèces de tortues marines (Frair and Shah, 1982; Kakizoe et al., 2007; Wood and Ebanks, 1984). Bien que des reptiles sains puissent avoir un faible degré de polychromasie (<5%), les jeunes peuvent avoir un degré plus élevé que les adultes (Duguy, 1970). Les petites inclusions basophiles ponctiformes observées fréquemment au sein des érythrocytes chez tous les groupes d’âge sont morphologiquement évocateurs d’organelles dégénérées (Alleman et al., 1992; Casal and Oros, 2007). Le nombre de leucocytes totaux de notre étude entre dans la gamme de valeurs rapportées précédemment chez des tortues caouannes immatures sauvages (Casal et 111 al., 2009; Flint et al., 2010a; Keller et al., 2004b; Stamper et al., 2005) ainsi que chez les tortues vertes (Flint et al., 2010b; Work et al., 1998). Les variations de pourcentage de leucocytes observées en fonction des diverses classes d’âge sont en adéquation avec la relation positive existant entre l’âge et le pourcentage de lymphocytes ainsi que la relation négative qui existe entre l’âge et le pourcentage d’hétérophiles ayant été décrite par Kakizoe et al. Dans notre étude, le nombre absolu total de lymphocytes est similaire aux valeurs précédemment rapportées chez des tortues caouannes immatures, maintenues en captivité ou sauvages (Keller et al., 2004b; Stamper et al., 2005). Le type cellulaire le plus fréquent de notre étude chez toutes les tranches d’âge est le petit lymphocyte bien différencié. Très peu de lymphocytes larges ou intermédiaires étaient présents sur les frottis de certains individus. Ils peuvent toutefois être observés en faible nombre dans la circulation périphérique des reptiles sains (Stacy et al., 2011). En seconde position viennent ensuite les hétérophiles, ce qui concorde avec les tortues caouannes immatures de Caroline du Nord (USA, Keller et al., 2004b) et les tortues vertes de Hawaii (Work et al., 1998). Par contre deux études, l’une réalisée sur des tortues caouannes captives âgées d’un an en Caroline du Sud (Bradley et al., 1998) et l’autre réalisée sur des immatures aux Canaries (Casal and Oros., 2007; Casal et al., 2009) ont montré que les hétérophiles constituaient la population leucocytaire dominante. Les valeurs du nombre d’hétérophiles rapportées dans notre étude sont inférieures à celles précédemment rapportées chez des individus captifs immatures (Bradley et al., 1998; Kakizoe et al., 2007). La population de monocytes représente généralement un faible pourcentage des leucocytes présents dans le sang périphérique des reptiles sains (Bradley et al., 1998; Casal and Oros, 2007; Deem et al., 2009; Flint et al., 2010a). Les pourcentages d’éosinophiles obtenus étaient dans la gamme des valeurs précédemment publiées chez les tortues caouannes (Bradley et al., 1998; Stamper et al., 2005; Keller et al., 2004b) ; cependant aucune valeur, qui aurait pu servir de comparaison, n’est disponible dans l’étude réalisée par Kakizoe et al. (2007). Les basophiles étaient présents mais en très faible nombre, ce qui a également été mentionné dans des études ultérieures chez les tortues vertes et caouannes (Work et al., 1998; Casal and Oros, 2007). 112 Tableau VI. Synthèse des paramètres morphométriques et hématologiques rapportés dans la litérature pour C. caretta et C. mydas C. mydasa C. mydasb C. mydasc C. mydasd C. carettae C. carettaf C. carettag 38,9 – 107,2 38,9 – 107,2 16,5 – 49,3 45,7 – 77,3 64,55 Longueur SCL (cm) 41 – 59 Poids (kg) >10 0,8 – 26,4 5,5 – 149 5,5 – 149 1,4 – 26 14,4 – 56,6 41 HCT (%) 17 – 35 18 – 56 13,4 – 53,2 13,4 – 53,2 17 – 45 23 – 38 32 Total WBC (103/µl) 5,9 – 23,6 20 – 60 0,8 – 30,1 2,6 – 29,2 2 – 18,9 5,8 – 20,7 15,8 Lymphocytes (%) 72,5 24 – 86 Lymphocytes (x103/µl) 3,6 – 18,6 Hétérophiles (%) 10,1 Hétérophiles (x103/µl) 0,3 – 3,2 Monocytes/Azurophils (%) 5,8 Monocytes/Azurophils (x103/µl) 0,1 – 1,9 Eosinophiles (%) 12,3 Eosinophiles (x103/µl) 0,7 – 3,2 Basophiles (%) 0 Basophiles (x103/µl) 0–1 65 0,6 – 22,3 0,6 – 22,3 0,1 – 1,8 4,6 – 15 0 –17 9,92 27 0,04 – 6,8 0,4 – 8,3 1,8 – 7,3 1,3 – 8,2 0 3,48 3 0,07 – 3,4 0,07 – 3,4 0 – 0,3 0,17 – 1,5 8 – 37 0,75 6 0,01 – 1,7 0,01 – 2,9 0 – 1,2 0,14 – 2,7 2 – 45 0,88 0 0 0 113 0 – 10-6 0 – 0,38 0 Tableau V. suite, C. carettah C. carettai C. carettaj C. carettak C. carettal C. carettam Longueur SCL (cm) 59,45 4,5 – 58,2 8,46 – 20,6 67,5 – 95,5 67,5 – 95,5 8,8 – 56,5 Poids (kg) 31,8 0,02 – 26,7 0,11 – 14,4 49 – 90 49 – 90 0,11 – 23,4 HCT (%) 28 16 – 26,2 16,4 – 20,3 Total WBC (103/µl) 14,3 4,7 – 10,2 0,38 – 6,19 Lymphocytes (%) 36 24,6 – 58,6 8,6 – 32,8 Lymphocytes (103/µl) 4,29 1,3 – 5,2 Hétérophiles (%) 60 35,8 –73,3 Hétérophiles (x103/µl) 6,33 2,5 – 5,1 Monocytes/Azurophils (%) 4 0 – 2,2 Monocytes/Azurophils (x103/µl) 1,52 Eosinophiles (%) 2 Eosinophiles (x103/µl) 0,23 Basophiles (%) 0 Basophiles (x103/µl) 0 13,9 – 47,3 2,63 – 31,3 3,67 – 50,9 2,1 – 27,3 41 – 100 0,55 – 15,5 0,64 – 33,9 55,4 – 85,9 2 – 25,3 0 – 41 0,97 – 8,20 0,18– 48,95 2,3 – 4 0 – 2,4 0 – 10 0,05 – 3,22 0,05 – 3,22 1,9 –7 0 – 2,1 0–9 0,09 – 3,45 0,17 – 0,8 17 – 32 0,09 – 3,45 0 – 0,6 0–7 0 – 0,9 114 a D’après Work et al, 1998 (Unopette method, n=26, immatures sauvages, gamme), b D’après Wood and Ebanks, 1984 (n=20-102, animaux en captivité 6 -18 -30 et 45 mois, gamme), c D’après Flint et al, 2010 (WBC estimate, n=34-141, mâles immatures sauvages, Intervalle de Reference), d D’après Flint et al, 2010 (n = 72 -141, femelles immatures sauvages, Intervalle de Reference), e D’après Casal et al, 2009 (Méthode Natt and Herrick, n=69, juvéniles sauvage suite rehabilitation, gamme), f Keller et al, 2004b (Natt and Herrick method, n=13, juveniles sauvages, gamme), g Stamper et al, 2005 (Natt and Herrick method, n=15, juveniles résidents, médiane), h Stamper et al, 2005 (Natt and Herrick method, n=42, juveniles en migration, médiane), i D’après Kakizoe et al, 2007 (Méthode Unopette, n=5, animaux captifs 1-36 months of age, gamme de moyennes), j D’après Bradley et al, 1998 (Méthode Unopette, n=10, animaux captifs 2-12 months of age, gamme de moyennes), k D’après Flint et al, 2010 (WBC estimate, n=34-55, mâles immatures sauvages de grande taille, Intervalle de Reference), l D’après Flint et al, 2010 (WBC estimate, n=23-55, femelles immatures sauvages de grande taille, Intervalle de Reference), m Notre étude (Méthode Unopette, n=85, animaux captifs 8-56 mois, gamme), 115 116 2. Biochimie plasmatique Notre étude des paramètres biochimiques plasmatiques a permis de mettre en évidence plusieurs différences significatives ainsi que les sens de variations telles que rapportées dans le tableau VI. Les variations des valeurs biochimiques en fonction des différences d’âge, de poids et de taille des tortues caouannes ont été rapportées dans plusieurs études antérieures (Bradley et al., 1998; Casal et al., 2009; Deem et al., 2009; Delgado et al., 2011; Flint et al., 2010a; Gelli et al., 2009; Keller et al., 2004b; Osborne et al., 2010; Stamper et al., 2005). Les concentrations significativement plus faibles de protéines totales, mesurées à la fois par réfractométrie et analyseur, chez les tortues de 8 et 20 mois respectivement sont concordantes avec des études antérieures qui mentionnent une augmentation relative des protéines totales avec le poids et l’âge des tortues (Casal et al., 2009; Frair and Shah, 1982; Kakizoe et al., 2007). Une étude mentionne que la longueur de la carapace (SCL 81 cm) et le poids des tortues caouannes immatures corrèlent avec les concentrations en protéines totales (Osborne et al., 2010). Cela n’a pas été objectivé dans notre étude. Les concentrations en globulines augmentent avec l’âge. Les augmentations relatives à l’âge en concentration de protéines totales, albumine et globuline chez les animaux captifs comparées aux individus sauvages peuvent être associées aux disparités nutritionnelles, à une stimulation du système immunitaire et/ou un stade reproductif différent. Kakizoe et al. (2007) ont décrit une glycémie décroissante avec l’âge chez les tortues caouannes, ce qui correspond à nos observations (Kakizoe et al., 2007). De manière tout à fait similaire aux observations effectuées sur des crocodiles du Nil, les concentrations en cholestérol des tortues de notre étude augmentent avec l’âge (Morpurgo and Gelman, 1991). Les activités tissulaires des enzymes ALP, AST et CK ne sont pas spécifiques d’un tissu donné chez les tortues marines et reptiles terrestres mais sont plutôt présentes dans divers organes (Wagner and Wetzel, 1999). Ainsi, une augmentation significative de l’activité d’une des enzymes précédemment citées n’est pas spécifique d’une lésion d’un tissu donné chez les reptiles mais plutôt indicateur, chez les individus captifs immatures, d’une phase de croissance tissulaire et/ou d’effets imputés à la captivité tels que la manipulation et les possibles agressions entre 117 congénères (Innis et al., 2009). Le lien avec une croissance tissulaire a été confirmé dans notre étude grâce à une prise de poids concomitante et non négligeable. Les concentrations plasmatiques en créatinine et urée de nos individus augmentaient graduellement avec l’âge, ce qui correspond aux résultats de Kakizoe et al. (2007). Ce résultat peut être très probablement associé aux différences de nutrition, et aux rations chez les animaux de 32 mois versus ceux de 56 mois et peut être ainsi attribué à l’utilisation de deux aliments commerciaux différents chez les animaux de 32 et 56 mois. Les concentrations en bilirubine étaient en dessous du seuil de détection de l’analyseur (< 0,1mg/dl) dans tous les groupes d’âge et également par comparaison avec les autres tortues caouannes juvéniles (Keller et al., 2004b). Cet analyte est rarement rapporté chez les tortues marines et les autres espèces de reptiles puisque la biliverdine est le principal pigment biliaire chez ces espèces (Campbell, 2006). L’importance clinique de la bilirubine périphérique chez les reptiles n’est pas encore éclaircie. Aucune différence significative n’a été décelée pour le calcium, phosphore, sodium, chlore et potassium entre les différentes classes d’âge. La moyenne de calcémie et phosphatémie correspondait aux valeurs rapportées pour des tortues caouannes juvéniles d’Espagne (Casal et al., 2009), de Caroline du Nord (Keller et al., 2004b) et pour des individus immatures d’Australie (Flint et al., 2010a). La moyenne des natrémies était légèrement plus basse que celle précédemment décrite chez des caouannes immatures (Keller et al., 2004b). La moyenne des kaliémies et chlorémies se situait dans les gammes de valeurs physiologiques connues pour les tortues marines (Campbell, 2006). Ainsi notre étude avait pour but de rapporter des gammes de valeurs hématologiques et biochimiques pour des tortues caouannes immatures, captives et saines appartenant à diverses catégories d’âge. La prise de sang constitue un outil diagnostique indispensable pour le vétérinaire, ainsi ce travail a pour but de fournir un outil supplémentaire d’intérêt médical dans le soin et les traitements mis en place chez cette espèce. 118 Tableau VII. Synthèse des analytes biochimiques rapportés dans la litérature pour C. caretta et C. mydas et sens de variation des paramètres de notre étude. C. mydasa C. mydasb C. mydasc C. carettad C. carettae 6,2 Protéine Totale, g/dL 3–5 2,08–6,2 1,5– 3,3 * 2,9– 4,1 2,07 Albumine, g/dL 1 – 2,9 0,69 – 1,75 1,0 – 2,5 C. carettag 4,6– 6,1 d 2,6–5,5 C. carettaf 1,6– 5,6f* 2,9–7,2 1,4–1,9 d 0,56 – 1,37 * 0,7– 3,1 0,8–1,6g* 0,75 – 1,6 2,7– 5,1 1,54 – 4,66 Globuline, g/dL 1,0– 4,0f* 1,6 – 3,3 Créatinine, 0,28 – 0,54 0,1 – 0,2 d 0,44 – 1,13 * 0,10 – 0,5f* 0,46 0,2 – 0,90 Acide urique, mg/dL 0,7 – 1,4 0,37 – 2,21 0,81 – 2,10 0,14 – 0,96d* Urée, mg/dL 0,6 – 1,4 4 –35 0 – 77,03 54,06 – 143,98 41,45– 142,3d* 28 – 74 66,7 – 178,4 97,3 – 185,6 122,0 – 165,0d* 119 0,29 – 2,64 1,0 – 107,0f* 60,8 – 135,6 73,9 – 113,5 110,45 72 –128 0,20 –1,20f* 0,16 – 0,47 5,0 – 13,0 83,98 Glucose, mg/dL 0,10 – 0,60 0,81 mg/dL 2,12– 5,9 73 – 111 70,3– 136,9f* 77,48 – 160,4 Cholestérol, 189,2 –339,8 409,3 mg/dL 92 – 207 ALP, U/L 7–107 92,7 – 312,7 8,3–37,9 103,5 – 193d* 31–63 53 – 228 7–22 544,7 CK, U/L 181–3145 326–2728,5 145–1802 AST, U/L 99–343 74,1–244,6 396–3175 Amylase, U/L 45,2 – 200f* 400–2,810,6d* 163–1470 221,7 –1016d* 10,5–132,9 81–1,627 319–1742 3–1,899f* 157–2,211 149–318 2 – 255f* 78,7–247,6 2–417f* P, mg/dL 6,1–10,5 4,95 –11,1 6,19 – 13,3 6,1 – 16,8d* 6,0–9,5 4,1 – 7,9f* 4,9 – 9,9 Ca, mg/dL 5,3–11,3 0,8 – 8,8 5,6 – 8,0 5,96 – 8,5d* 4,3–7,7 5,6 – 8,3f* 4,8 – 8,0 Na, mmol/L 147–174 139,2–157,8 148–162 143,2–154,4d* 150–168 135–175f* K, mmol/L 4,0–5,1 3,0–7,1 3,5–6,7 3,2–4,48d* 3,5–7,9 3,3–13,9f* Cl, mmol/L 94–119 100,7–121,1 116–131 103,0–120,6d* 103–128 107–158f* 120 3,2–5,7 Tableau VI, suite, C. carettah C. carettai C. carettaj C. carettak C. carettal 2,6– 6 Protéine Totale, g/dL 2,4– 5,9 2– 11i* 2,1– 4 2,9–4,60 1,3 - 2,7 Comparaison et sens de variation tortues caouannes immatures sauvages d, f, h, i, j a, b, c ou réhabilitées et tortues vertes tortues caouannes adultes sauvages ou en d, e, f, g, h, i réhabilitation 1,1–2,6 1,0–1,4i* d, e, f, g, h, i, k Albumine, g/dL <1,0 – 1,5 0,1 – 0,2 1,0 – 1,6 0,5 –1,2 Globuline, g/dL 1,5– 4,5 0– 2,6i* 1,7– 3,8 0,7 – 1,6 Créatinine, mg/dL 0,1 – 0,2 0,3 – 0,8 0,3 – 0,5 Acide urique, mg/dL 0,3– 3,4 <0,84 – 1,68i* 1– 2,4 0,17 – 1,0 0,30 – 1,10 Urée, mg/dL 25 – 197 5,0 – 188,5i* 62 – 344,5 42,0 – 93,6 16,6 – 51,3 1,5– 3,6 0,01 – 0,11 tortues caouannes a, b, c tortues vertes immatures c tortues de Kemp immatures tortues marines sauvages immatures ou b, c, i, g, k adultes (Gelli et al., 2009), caouannes sauvages et immatures de d, g, h, i, j, k diverses tailles e, h, i, j tortues caouannes immatures b tortues vertes sauvages + tortues de c Kemp convalescents tortues vertes immatures en centre de c a réhabilitation + tortues vertes de Floride d, h, i caouannes juvéniles g caouannes adultes immatures f, tortues caouannes immatures sauvages g, h, i a, b Glucose, mg/dL Cholestérol 76–143 19,8 – 291,9i* 71 – 197 212,3 – 351,3 60 – 200 54,8 – 104,3 65 – 189,0 tortues vertes et Kemp immatures (Alleman et al., 1992) tortues femelles adultes en phase de f, i jeûne pendant la saison de reproduction 29,2 – 152,1 tortues caouannes de taille et poids 121 d, f, i 50,2 – 397,7i* mg/dL ALP, U/L 9–74 CK, U/L 281–5,667 AST, U/L 128–355 51–562i* analogues a, c tortues vertes et de Kemp 51–120 6,4–17,6 83,0 – 2,829,0 <10–844i* 414 – 1,276,0 5,2–9,1 g, h tortues caouannes 57,0 – 298,0 13–238 Amylase, U/L P, mg/dL 18,0 –118,0 3,3–13,4 4,9 – 7,6 4,7–8,85 3,1–7,1 5,4 – 8,2 4,70–7,40 (Casal et Oros, 2007) 8,4 – 17,2 2,8 – 12,4 i* Ca, mg/dL 5,5–11,4 Na, mmol/L 154–164 135,9–166,2 148,0–156,2 84,0–155,0 K, mmol/L 3,1–5,6 3,7–7,3 2,84–3,92 2,1–4,7 Cl, mmol/L 110–125 100,0–136,0 105,4–118,0 63,0–212,0 D’après Jacobson et al., 2007 (33,5 cm <SCL< 47,3cm, juvéniles, range), D’après Flint et al., 2010 (n>190, immature de grande taille, Intervalle de Référence), c D’après Anderson et al., 2011 (29,4cm<SCL< 47,1cm, gamme), d D’après Kakizoe et al., 2007 (n=61, femelles adultes, moyenne n=5, juvéniles *, 1-36 mois, gamme des moyennes), e D’après Jacobson et al., 2007 (SCL>60 cm, gamme),25 f D’après Deem et al., 2009 (femelles en ponte, juvéniles*, gamme), g D’après Flint et al., 2010 (n=63, adultes et juvéniles de grande taille, Intervalle de Référence) , h D’après Keller et al., 2004b (n=40, juvéniles sauvages, gamme), i D’après Casal et al., 2009 (n=34, femelles adultes sauvages, n=69, juvéniles réhabilités*, gamme), j D’après Delgado et al., 2011 (n=21, 19,7 cm, SCL<51,9 cm, juvéniles sauvages, sérum), k D’après Stamper et al., 2005 (en migration, 10th et 90th percentiles), l Notre étude (n=85, 8-56 mois, gamme) Valeurs de notre étude dans la gamme, Valeurs de notre étude inférieures vs autres études,Valeurs de notre étude dans la limite inférieure a b 122 III. Evaluation des fonctions immunitaires de la tortue caouanne immature et captive (Caretta caretta). A. Résultats 1. Profils cellulaires obtenus en cytomètre de flux et caractérisation morphologique des leucocytes du sang périphérique. La figure 26 représente un nuage de points (Figure 26A) des cellules collectées sur Ficoll (Fig. 26B). Les cellules ont été circonscrites électroniquement (Figure 26A) en se basant sur leur taille relative (FSC) et leur granulosité (SCC) puis triées par cytomètre de flux afin d’être examinées histologiquement (Fig. 26C et D). La population lymphocytaire constituait 79,5% ±7 (n=20) du gradient de Ficoll (Fig. 26B), le reste étant des débris cellulaires et membranaires. Les lymphocytes sont des cellules rondes et mononuclées, possédant peu de cytoplasme bleu-violet. Ce cytoplasme ne contient pas de granules (Campbell, 2006). Figure 26. A. Profils obtenus par cytomètre de flux et B. Examen cytologique des cellules sanguines de tortues caouannes (objectif 40x) collectées sur Ficoll. Noter la complexité (SSC) et taille relative (FSC), qui sont caractéristiques des lymphocytes de Caretta caretta. (C) Lymphocytes. (D) Débris et membranes cellulaires. 123 Les sous-populations cellulaires obtenues entre chaque gradient de Percoll (Fig. 27) ont été triées et isolées par cytométrie de flux. La première couche (L1) se situait entre le plasma et le gradient à 40% de Percoll, la seconde couche (L2) entre les gradients à 40 et 45% de Percoll et enfin la troisième couche (L3) été située entre les gradients à 50 et 55% de Percoll. La figure 28 montre les nuages de points obtenus par cytométrie de flux représentatifs des cellules présentes dans les premières et secondes couches (Fig. 28A et B respectivement), ainsi que les morphologies cellulaires des sous-populations obtenues par cytologie lors de leur séparation par gradient discontinu de Percoll. Les divers types cellulaires collectés dans chacun des gradients de Percoll ont été triés par cytométrie de flux afin de pouvoir examiner leur morphologie cellulaire (Fig. 28C, D et E). Pour chaque couche de Percoll, vingt mille événements totaux ont été enregistrés par cytométrie de flux. Le nombre de cellules (moyenne, % du nombre d’évènements totaux) appartenant à un type cellulaire donné pour chaque couche de Percoll a été mesuré. Quatre populations ayant une morphologie distincte ont été définies sur la base de la taille et de la granulosité. Les lymphocytes (Fig. 28E) sont de petites cellules, les moins granuleuses, tout comme les thrombocytes, alors que les monocytes (Fig. 28D) sont plus des cellules plus grandes et légèrement plus granuleuses. Les monocytes sont les plus grandes cellules circulant dans le sang périphérique des reptiles. Ces cellules sont rondes, possèdent un seul noyau ainsi qu’un cytoplasme bleu-gris abondant (Campbell, 2006). Les éosinophiles sont les cellules les plus granuleuses (Fig. 28C). Ce sont de grandes cellules rondes, possédant des granules cytoplasmiques rose vif et sphériques ainsi qu’un noyau basophile et périphérique. Leur cytoplasme est bleu pâle (Campbell, 2006). Les éosinophiles constituaient 11,2% des cellules détéctées par cytométrie de flux (n=20 animaux) se situant entre le plasma et le Percoll à 40%. Les thrombocytes constituaient 34,5% des cellules détéctées (n=20) de cette même première couche. Les monocytes constituaient 12% (n=20) des cellules détectées dans les couches formées des gradients plasma 40 % de Percoll (première couche) et 40-45% de Percoll (seconde couche). Finalement, les lymphocytes formaient 65% des cellules (n=27) de la seconde couche ainsi que 87% (n=11) des cellules de la troisième couche (gradients 50-55% de Percoll) dans laquelle ils étaient majoritaires. 124 Figure 27. Gradients de Percoll discontinus obtenus après centrifugation. Le sang total de tortue caouanne a été déposé au dessus de plusieurs couches de Percoll de différentes densités allant de 1,053 (40%) à 1,076 g/ml (60% solution stock) afin de former un gradient discontinu. Figure 28. A. Profils obtenus par cytomètrie de flux des leucocytes sanguins de tortues caouannes isolés entre les gradients de plasma et 40% de Percoll ainsi que 40-45% de Percoll. Les différentes populations cellulaires ont été distinguées sur la base de leur taille (FSC) et granulosité (SSC). B. Examination cytologique d’étalement sur lame des cellules sanguines de tortues caouannes (microscopie avec objectif 40x) préalablement triées par cytométrie de flux. C. Les éosinophiles sont granuleux avec un cytoplasme abondant ainsi qu’un grand noyau excentré. D. Les monocytes sont de grandes cellules, peu granuleuses, tandis que les lymphocytes (E) sont de petites cellules peu granuleuses. 125 2. Le système immunitaire inné des tortues caouannes Les données d’au moins quatre expériences indépendantes portant sur la phagocytose (trois individus par expérience), et portant sur l’explosion respiratoire (de deux à six individus par expérience) ont été regroupés. Pour les tests portant sur la fonctionnalité des cellules tueuses, une à deux expériences indépendantes (quatre individus pour chaque expérience) pour chaque température, milieu de culture et temps d’incubation testés ont été regroupés. a. La Phagocytose La Fig. 29A montre les capacités de phagocytose des sous-populations leucocytaires. Les monocytes ont été principalement isolés à partir des couches 1 et 2 (Fig. 29A and B). Il n’y avait pas de différences significatives de l’activité phagocytaire des monocytes (Fig. 29B) entre les couches 1 et 2 pour: l’ingestion d’une bille ou plus (1+ beads, moyenne= 28,8% et 27,8%, respectivement, p=0,445), l’ingestion de deux billes ou plus (2+ beads, moyenne=12,7% et 11,4%, respectivement, p=0,250) et l’ingestion de trois billes ou plus (3+ beads, moyenne=6,7% et 5,6%, respectivement, p>0,05). La phagocytose (1+ et 2+) était significativement plus importante pour les monocytes que pour les autres types cellulaires (Fig. 29B) au sein des couches 1 et 2 (p<0,001). Cependant, il n’y avait pas de différences significatives de phagocytose entre les monocytes et les éosinophiles lorsque trois billes ou plus étaient phagocytées (Fig. 29B, p>0,05). Il n’y avait pas de différences significatives de phagocytose entre les thrombocytes, éosinophiles et lymphocytes lorsque une bille ou plus était impliquée (p>0,05). La phagocytose des éosinophiles était légèrement plus importante (p<0,025) que celles des thrombocytes et lymphocytes (isolées dans la troisième couche) pour deux billes ou plus (6,9% vs 5,7% et 1,3% respectivement) et trois billes ou plus (4,8% vs 2,45% et 0,1% respectivement). 126 Figure 29. A. Profils obtenus par cytomètre de flux des cellules collectées entre le plasma et 40% de Percoll et les histogrammes d’activité phagocytaire des éosinophiles et monocytes correspondants. B. Pourcentage de cellules (éosinophiles, monocytes et lymphocytes) phagocytant une bille ou plus (1+beads), deux billes ou plus (+ beads) ou trois billes ou plus (3+beads). N=22 pour les cellules (éosinophiles, thrombocytes, monocytes) isolées entre le plasma et 40% Percoll (L1); N=34 pour les cellules (lymphocytes et monocytes) isolées entre les gradients 40 et 45% de Percoll (L2) et N=22 pour les lymphocytes isolés entre les gradients 50 et 55% de Percoll (L3). * Différences significatives pour tous les types cellulaires sauf les monocytes. ** Différences significatives des éosinophiles. b. L’explosion respiratoire Les lymphocytes isolés dans les couches 2 ou 3 ont généré une faible explosion respiratoire (Fig. 30, moyenne du rapport des cellules stimulées par le PMA / cellules non stimulées =1,37 dans la couche 2 et 1,09 pour la couche 3). Les monocytes isolés dans la couche 2 (Percoll 40-45%) ont montré une explosion respiratoire statistiquement plus importante (rapport = 2,34) que les lymphocytes isolés dans les couches 2 and 3 (Fig. 27, p<0,001). 127 Figure 30. Explosion respiratoire in vitro (moyenne ± SD) chez les tortues caouannes juvéniles, exprimée par le rapport cellules stimulées par le PMA/ cellules non stimulées. n = nombre d’individus. * Différences significatives (p < 0,001, α=0,99). Les monocytes isolés entre les gradients 40 et 45% de Percoll (L2) figurent en noir. Les lymphocytes isolés entre les gradients 40 et 45% de Percoll (L2) sont en gris et les lymphocytes isolés entre les gradients 50 et 55% de Percoll (L3) sont en blanc. c. L’activité des cellules tueuses naturelles (cellules NK) La figure 31 montre l’activité des cellules tueuses naturelles en utilisant deux lignées cellulaires cibles avec des conditions d’incubation différentes et des rapports cellules effectrices/cellules cibles différents. L’activité des cellules tueuses naturelles était significativement plus importante vis à vis des cellules cibles YAC-1 que des cellules cibles K-562 (p≤0,02) pour des rapports E:T (Effector =cellules NK: Target=cellules cibles) de 100:1 à 25:1. Pour les ratios E:T de 100:1 et 50:1, il n’y avait pas de différences d’activité des cellules NK entre celles incubées dans le DMEM ou RPMI (p=0,057). Toutefois pour les dilutions supérieures (25:1 à 6:1), le milieu de culture avait une influence puisque l’activité des cellules NK était significativement plus importante pour le RPMI que pour le DMEM (p<0,001). Il n’y avait pas de différence significative concernant l’activité des cellules NK vis à vis des cellules cibles YAC-1 lorsque le RPMI était utilisé comme milieu de culture, à 28°C que l’incubation était de 2,5 h ou 3 h et ce pour des rapports E:T de 100:1 à 6:1 (p=0,163). Une activité tueuse plus importante pour des rapports E:T allant de 100:1 à 6:1 a été obtenue à 28°C comparé à 37°C (p<0,04) et ce pour une incubation de 2, 5 h ou 3 h. 128 Figure 31. Activité des cellules NK in vitro (moyenne ± SD) mesurée en fonction des cellules cibles tuées (lignée cellulaire sensible au cellules NK) par les cellules NK (cellules effectrices). Divers paramètres ont été testés (milieu de culture, température, cellules cibles et durée d’incubation) n=nombre d’individus. *Différences significatives entre les cellules cibles YAC-1 et K562 dans le DMEM, **Différences significatives entre 28 et 37˚C soit après 2h30 ou 3h d’incubation dans le RPMI. ***Différences significatives entre les DMEM et le RPMI à 28˚C après 2h30 d’incubation. T-tests (p < 0,05, α=0,8). 3. Réponse des lymphocytes de tortue caouanne à une stimulation Les données de neuf expériences indépendantes portant sur la prolifération lymphocytaire (trois individus par expérience) ont été regroupés. La figure 32 montre les résultats des tests de prolifération lymphocytaire obtenus lors de la stimulation par des agents mitogènes. La phytohémagglutinine PHA-P et la concanavaline A ConA induisaient une augmentation statistiquement significative de la prolifération des lymphocytes, comparée aux cellules non stimulées et ce pour des concentrations de 1, 2, 5 et 10 µg/ml (resp. p<0,001 et p<0,02). Toutefois à 20 µg/ml aucune prolifération significative n’avait été rapportée, pour aucun des deux mitogènes testés stimulant la prolifération des lymphocytes T. PHA-P a induit un changement plus important de l’indice de prolifération que ConA. Les concentrations optimales pour le PHA étaient 1 et 2 µg/ml, tandis qu’elles étaient de 5 et 10 g/ml pour ConA. Les cellules stimulées avec le « pokweed mitogen » (PWM ; Phytolacca americana) à une concentration de 1, 2, 5, 10 et 20 µg/ml avaient un indice de 129 prolifération significativement plus important que pour les cellules non stimulées (p<0,01), et l’amplitude de changement était comparable à ce qui a été obtenu lors d’une stimulation avec ConA pour des concentrations similaires. Enfin, une concentration de 1 µg/ml de LPS induisait une augmentation modeste mais significative de la prolifération cellulaire par comparaison aux cellules non stimulées (p=0,002). Figure 32. Prolifération lymphocytaire in vitro après stimulation par les agents mitogènes. Moyenne ± SD de 9 expériences réalisées en triplicat. Différences statistiquement plus élevées que les controles *p<0,05,**p<0,01, ***p<0,001. B. Discussion Notre étude portait sur l’optimisation, la validation et la mesure de fonctions du système immunitaire inné et acquis chez les tortues caouannes juvéniles. Dans notre étude, les monocytes possédaient une activité phagocytaire et une explosion respiratoire plus importantes que les autres leucocytes. Les éosinophiles ont montré une capacité à phagocyter. Ce travail décrit pour la première fois l’activité des cellules tueuses (NK) chez les tortues marines. La lignée cellulaire YAC-1 semble être la cible la plus adéquate. Enfin, nous avons également confirmé que les leucocytes du sang périphérique des tortues marines pouvaient produire une réponse 130 lympho- proliférative à une diversité d’agents mitogènes, comme cela a été largement décrit chez les mammifères. Afin de s’affranchir de l’absence de réactifs disponibles nécessaires à l’identification des sous-populations de cellules immunitaires chez les reptiles, les cellules immunitaires circulant dans le sang périphérique ont été identifiées grâce à l’utilisation conjointe du cytomètre de flux et la caractérisation morphologique. Leurs fonctions ont ensuite été explorées. Contrairement aux érythrocytes des mammifères qui peuvent être lysés par choc osmotique avec du chlorure d’ammonium, les érythrocytes des tortues caouannes sont nucléés et donc osmotiquement plus résistants (Aldrich et al., 2006). Les sous-populations de leucocytes sanguins ont été isolées, grâce à l’utilisation d’une superposition de gradients de Percoll discontinus, triées et analysées. Comme précédemment décrit, la population de granulocytes de faible densité migrant entre le plasma et 40% de Percoll a été identifiée (Harms et al., 2000). Les éosinophiles étaient la principale sous-population de granulocytes isolée. Les monocytes migraient aussi bien entre le plasma et 40% de Percoll qu’entre 40 et 45% de Percoll, tandis que les lymphocytes ont été retrouvés principalement entre les gradients de 50-55% de Percoll comme précédemment décrit (Harms et al., 2000). Les érythrocytes étaient présents au fond du gradient. Chaque population de cellules identifiée par cytométrie de flux (basé sur la taille et la granulosité) a également été étudiée par cytologie afin d’identifier le type cellulaire. 1. Fonctions du système immunitaire inné chez les tortues caouannes Les mesures de phagocytose de différentes sous-populations de leucocytes ont été déterminées de façon simultanée grâce au cytomètre de flux. Les monocytes possédaient l’activité phagocytaire combinée à une explosion respiratoire la plus importante. Chez les reptiles, les monocytes constituent généralement la première ligne de défense dans la réponse immune. Tandis que les monocytes ont été rapportés comme participant aux interactions entre antigènes spécifiques et immunoglobulines, impliquant particulièrement les IgM et IgY (Campbell, 2006), la phagocytose dans ce cas s’est avérée être indépendante des immunoglobulines puisque les billes en latex ne sont pas opsonisées. En effet, les monocytes peuvent phagocyter des particules non préalablement opsonisées et ce via un processus direct non spécifique, ce qui diffère 131 de la phagocytose médiée par les récepteurs de la fraction Fc des immunoglobulines (Liao et al., 1994). Bien que les granulocytes les plus nombreux chez les tortues caouannes soient les hétérophiles (Bradley et al., 1998; Kakizoe et al., 2007; Rousselet et al., 2013a), nous n’avons pu les isoler correctement malgré l’utilisation de protocoles spécifiques des hétérophiles aviaires (Andreasen et al., 1989; Latimer et al., 1989). Il existe plusieurs descriptions montrant que les hétérophiles adhèrent au verre, nécessitant des traitements préalables (Andreasen et al., 1990, Brooks et al., 1996) que nous avons effectué sans succès. Les éosinophiles ont montré une activité phagocytaire plus faible que les monocytes. L’étude réalisée a montré que les éosinophiles sont capables de phagocyter les billes de latex, ce qui corrobore avec leur capacité de phagocytose de complexes immuns (Campbell, 2006). Bien que les éosinophiles des mammifères sont connus pour jouer un rôle dans les infections parasitaires en produisant des radicaux peroxyde et superoxyde (Coico et al., 2009), la capacité des éosinophiles des tortues marines à générer une explosion respiratoire en plus de la phagocytose requière des études supplémentaires. Chez les tortues caouannes juvéniles en bonne santé, les éosinophiles constituent la population de granulocytes minoritaires (Rousselet et al., 2013a), ce qui rend leur évaluation fonctionnelle difficile car un grand nombre d’éosinophiles est nécessaire pour réaliser le test d’explosion respiratoire. Dans notre étude, la phagocytose a été mise en évidence à la fois pour les lymphocytes et les thrombocytes. Les thrombocytes des reptiles possèdent les mêmes capacités d’hémostase et de cicatrisation que les plaquettes des mammifères (Sypek and Borysenko, 1988). Ils sont en plus capables de phagocyter les bactéries chez les oiseaux (Bertram et al., 1998; Wigley et al., 1999) et d’autres espèces de reptiles (Frye, 1991). Tandis que les lymphocytes sont habituellement impliqués dans le système immunitaire acquis, une étude a mis en évidence les capacités phagocytaires des lymphocytes T humains (Wu et al., 2009) de la même manière que les lymphocytes B chez les téléostéens et Xenopus (Li et al., 2006). Cependant, notre étude n’exclut pas la possibilité que les billes aient pu s’attacher à la membrane cellulaire externe, plutôt que d’avoir été internalisées. L’activité des cellules tueuses constitue un autre mécanisme de défense non spécifique. Les cellules NK forment une population hétérogène CD3 négative, sans récepteur T, constitués de grands lymphocytes qui expriment couramment des 132 marqueurs de surface tels CD16 et CD56 chez l’homme (O’Shea and Ortaldo, 1992). Ces cellules se définissent par leur fonction, i.e. la lyse de cellules infectées par un virus ou de cellules tumorales. L’activité des cellules NK n’est pas restreinte par le complexe majeur d’histocompatibilité et ne requière pas une sensibilisation préalable. Les cellules NK partagent des mécanismes tueurs avec les lymphocytes T CD8+ cytotoxiques et produisent des cytokines de manière similaire aux lymphocytes T CD4+ helper (Boysen and Storset, 2009). Les interleukines IL-2, IL-15, IL-21 et l’interféron de type I (IFN- / ) augmentent l’activité cytotoxique des cellules NK (Boysen and Storset, 2009). Une augmentation de l’activité des cellules NK en réponse à l’interleukine IL-2 a été mise en évidence chez diverses espèces (Henney et al., 1981) incluant les belugas et les phoques communs (Ross et al., 1996; De Guise et al., 1997). L’activité des cellules NK est fortement conservée parmi les vertébrés. Cette activité a précédemment été détectée chez les tortues d’eau douce (Munoz et al. 2000) contrairement aux tortues vertes (McKinney and Bentley, 1985). Dans notre étude, la lignée cellulaire YAC-1 de lymphomes T murins constitue la meilleure cible comparée à la lignée érythroleucémique humaine K-562. L’activité cytotoxique la plus importante a été obtenue dans le milieu de culture RPMI à 28˚C, paramètres identiques pour l’évaluation de la prolifération lymphocytaire. Le temps d’incubation optimal de mise en présence des cellules NK avec leur cible était de deux heures et demi ou 3 h. Ce laps de temps est similaire à celui des amphibiens anuriens, tilapias, poissons chat, pour lesquels l’activité cytotoxique NK/ non spécifique a été rapportée avec les cellules YAC-1 comme cellules cibles (Evans and Cooper, 1990). 2. La prolifération lymphocytaire La prolifération lymphocytaire mesure seulement une étape unique et précoce au sein de la réponse immunitaire. La prolifération lymphocytaire (LP) est fortement diminuée chez les tortues vertes malades (Work et al., 2001) et a été montré comme étant corrélée positivement aux contaminants organo-chlorés ainsi que les dérivés du mercure (Day et al., 2007; Keller et al., 2004b). La prolifération lymphocytaire sous stimulation aux mitogènes a précédemment été étudiée chez les reptiles terrestres et aquatiques (Farag and El Ridi, 1986; Burnham et al., 2005 ; Munoz et al., 2003) ainsi que chez les tortues marines (Work et al., 2000; Cray et al., 2001; Keller et al., 2005a, 133 2006). Dans notre étude, les PBMC ont été exposées à quatre mitogènes pour des concentrations de 1 à 20 µg/ml pendant 96h, ce qui avait déjà été rapporté comme pouvant induire une mitogènèse chez les lymphocytes de tortues (Ulsh et al., 2001, Munoz et al., 2003, Keller et al., 2005a). Les indices de stimulation sont plus élevés pour le PHA que pour la ConA, avec cependant des variations entre animaux importantes. Le LPS utilisé dans notre étude est celui produit par le sérotype 0127:B8 de E coli. Etant donné que ce sérotype a été le seul testé, les auteurs ne savent pas s'il était le plus approprié pour induire la prolifération des lymphocytes B. L’utilisation d’un test ELISA colorimétrique BrdU au lieu des tests impliquant la thymidine tritiée, rend la comparaison directe avec les résultats précédemment obtenus dans la littérature très difficile (Keller et al., 2005a). Les études des paramètres hématologiques effectuées sur ces individus (Rousselet et al., 2013a) ainsi que d’autres tortues caouannes juvéniles (Bradley et al., 1998; Kakizoe et al., 2007) démontrent des variations du nombre de leucocytes ainsi que des hématocrites en fonction de l’âge des individus, ce qui peut avoir comme conséquence la modulation des fonctions du système immunitaire des ces animaux comparativement à des animaux plus âgés. Notre étude rapporte une prolifération des lymphocytes B et T chez les tortues caouannes ce qui concorde avec des études précentes chez la même espèce (Keller et al., 2005a) ainsi que chez les tortues vertes (Herbst and Klein, 1985; McKinney et al., 1985; Munoz et al., 2009; Work et al., 2000). Le PHA-P était le mitogène induisant la prolifération la plus importante tandis que LPS induisait la réponse la plus faible avec la ConA et le PWM intermédiaires. La réponse proliférative mesurée successivement à une stimulation par des mitogènes, fournit une preuve indirecte de l’existence des populations de lymphocytes B et T chez les reptiles. C. Conclusion Le système immunitaire constitue un réseau complexe d’interaction entre types cellulaires identiques ou différents et de messages faisant intervenir entre autres les cytokines. Dans cette étude, un nombre de tests précédemment utilisés chez les mammifères marins (DeGuise et al. 1995a, 1996, 1997) ont été optimisés afin d’évaluer le type puis la fonction des divers leucocytes chez la tortue caouanne. Considéré dans sa globalité, une batterie de tests représentatifs de divers aspects du 134 système immunitaire constitue un outil de qualité, permettant d’aider à identifier l’intégrité des mécanismes de défense dont dispose l’individu. Des études ultérieures peuvent inclure le développement d’anticorps monoclonaux spécifiques d’un type cellulaire chez la tortue caouanne ainsi que l’évaluation de niveau d’expression des cytokines, notamment suite à l’activation des lymphocytes. Ces deux axes permettront de mieux caractériser les mécanismes sous-jacents des fonctionnalités du système immunitaire chez les chéloniens. L’utilisation des outils optimisés dans notre étude donnera de nouvelles pistes sur les interactions entre le système immunitaire et la susceptibilité aux pathogènes, comme le fibropapillomavirus (Work et al., 2001). Cela s’applique également aux individus en centre de réhabilitation, débilités et/ou souffrant d’anémie non régénérative consécutive à une infection systémique et/ou inflammation sèvere. Cette thématique a donné lieu à une étude préliminaire, présentée sous forme de poster, ayant fait l’objet d’un financement de la bourse aux idées Mérial ainsi que de la Morris Animal Foundation (Annexe 5). Ainsi, l’utilisation de ces tests combinés à l’hématologie pourrait nous renseigner sur l’état d’évolution du patient en cours de traitement, et ce à travers la réponse du système immunitaire face au traitement médical et ainsi potentiellement permettre un ajustement de la prise en charge médicale chez les individus malades. Enfin, ce travail est un outil à l’investigation des actions immunotoxiques de certains polluants émergents, décrits comme affectant les tortues marines (Keller et al., 2004b). Cela va être développé au cours de la partie suivante. 135 IV. Modulation du système immunitaire inné par les PCBs A. Résultats Dans notre étude, nous avons évalué les effets de trois PCBs (PCB-105, -138 et -169), sur la phagocytose et l'activité des cellules tueuses naturelles à partir de leucocytes de tortues caouannes juvéniles. Les tests utilisés ont été préalablement validés dans cette espèce (Rousselet et al., 2013b). Le pourcentage de PBMC viables après exposition à chacun des PCB-105, 138 et -169, pendant 96 heures a été déterminé par cytométrie de flux. Il n'y avait aucune différence significative concernant la viabilité des cellules exposées par comparaison aux cellules non exposées. La viabilité était supérieure à 90%. 1. Effets des PCBs-105 et 138 sur la phagocytose Les résultats d'au moins trois expériences de phagocytose indépendantes ont été réunis (trois individus par expérience). Le PCB-105 considéré "dioxine-like", induisait une augmentation de la phagocytose (1+ beads, 2+ beads et 3+ beads) pour les éosinophiles (Fig 33) de tortues caouannes consécutivement à leur exposition in vitro pendant 3 hr et cela contrairement au PCB-138 (Fig. 34). Cette augmentation était dose-dépendante. Une corrélation positive entre l'activité phagocytaire et la concentration en PCB-105 a été déterminée pour 1+ beads (Corrélation de Pearson, r = 0,66, p = 5,2x10-6), 2+ beads (r = 0,59, p = 4,2x10-5) et 3+ beads (r = 0,56, p = 1,4x10-4). Le PCB-105 induisait une augmentation significative aux concentrations de 10 et 15 ppm (p<0,002) tandis que pour le PCB-138 la phagocytose augmentait significativement pour 15 ppm uniquement (p<0,04). 136 Figure 33. A. Profils obtenus par cytométrie de flux des cellules isolées par gradient de Percoll. B. Histogramme d’activité phagocytaire des granulocytes correspondants (entourés sur le diagramme de gauche). C. Une corrélation positive entre l'activité phagocytaire et la concentration en PCB-105 a été déterminée pour 1+ beads (M1, Corrélation de Pearson, r = 0,66, p = 5,2x10-6), 2+ beads (M2, r = 0,59, p = 4,2x10-5) et 3+ beads (M3, r = 0,56, p = 1,4x10-4). * Augmentation significative aux concentrations de 10 et 15 ppm (p<0,002). Figure 34. Activité phagocytaire en fonction de la concentration en PCB-138. Le PCB-138 induisait une augmentation significative aux concentrations de 15 ppm (p<0,04) 137 2. Effets des PCBs 105, 138 et 169 sur l’activité NK Les résultats de l'activité NK étudiée chez quatre individus pour chaque PCB ont été combinés. Les cellules YAC-1 ont précédemment été définies comme les cibles des PBMC de tortue caouanne les plus adéquates. Les PBMC ont été exposées in vitro à chacun des trois PCBs puis la capacité des cellules tueuses naturelles à lyser les cellules YAC-1 a été déterminée. Les cellules NK montraient une capacité de lyse statistiquement plus faible (Fig. 35) après exposition aux PCB-105 et 138 et ce aux concentrations de 15 et 20 ppm (p<0,01) pour un rapport de 50:1 (NK: cellules cibles). L’exposition aux PCBs n'affectait pas la viabilité des cellules NK. L'activité NK n'était pas modulée par le PCB-169. Une corrélation négative entre l'activité NK et la concentration croissante du PCB-105 (Corrélation de Pearson, r = -0,585, p = 0,0027) ainsi que du PCB-138 (r = -0,557, p = 0,0087) a été déterminée. Figure 35. Activité cytotoxique des cellules NK avec les cellules YAC-1 comme cellules cibles et ce pour un rapport de 50 :1. Activité NK statistiquement plus faible après exposition aux PCB-105 et 138 à 15 et 20 ppm (p<0,01). Corrélation négative entre activité NK et concentration croissante des PCB105 (Corrélation de Pearson, r = -0,585, p = 0,0027) et PCB-138 (r = -0,557, p = 0,0087). 138 B. Discussion Il s'agit de la première étude portant sur la modulation de deux fonctions majeures du système immunitaire inné (phagocytose et activité NK) par les PCBs chez la tortue caouanne. Les effets biologiques des polluants sur les tortues marines constituent une préoccupation actuelle critique, listés parmi les 20 priorités de conservation de ces espèces devant être adressées (Hamann et al., 2010). Les premières mesures de concentrations de PCBs chez les tortues marines datent des années 90. Une littérature croissante, témoignant d’une préoccupation environnementale accrue chez ces espèces nous permet désormais d’avoir plus de recul sur le sujet. Les concentrations en PCBs ont été mesurées dans de nombreux organes et pour chacune des 7 espèces de tortues marines. Le tissu adipeux, le foie et maintenant les œufs (van de Merwe et al., 2009; Alava et al., 2011 et Keller et al., 2013) sont les tissus biologiques les plus étudiés pour la mesure de ces composés. Trois auteurs rapportent à ce jour les concentrations de PCB mesurées à partir du plasma des tortues caouannes (Camacho et al., 2013, 2014; Keller et al., 2004a, 2006, Ragland et al., 2011). L’utilisation de ce fluide biologique comme matrice de mesure des PCBs est intéressante car les prises de sang constituent un acte non léthal. Il a été montré que les PCBs se répartissaient très majoritairement dans le plasma et non dans les érythrocytes de tortues marines (Keller et al. 2004a). Le PCB-138, composé hexachloré non coplanaire et marqueur de la contamination environmentale s’avère être le congénère le plus abondant chez les tortues caouannes (Camacho et al., 2014; Gardner et al., 2003; Keller et al., 2004b, 2006; Lazar et al., 2011; Oros et al., 2009, 2013; Storelli et al., 2007). D’autres PCBs coplanaires, tels que les PCB-105 (mono-ortho) et PCB 169 (non-ortho) ont également été mesurés chez la tortue caouanne (Alava et al., 2011; Camacho et al., 2013; Storelli et al., 2007; Richardson et al., 2009). Leur détection est importante car ils sont considérés comme stéréoisomères de la dioxine, possédant des mécanismes d'actions identiques chez les mammifères, et ce par liaison au récepteur AhR. Comparativement à d’autres espèces marines cotières (mammifères marins, elasmobanches, alligators et oiseaux), les concentrations de PCBs sont souvent d’un à plusieurs ordres de grandeur de différence pour les tortues marines (Keller et al., 2014). En effet, les concentrations sont beaucoup plus faibles (Camacho et al., 2013; 139 Keller et al., 2004b) ce qui peut s’expliquer grâce à à leur position dans le réseau trophique et type d’alimentation. Chez les tortues marines, les tortues de Kemp se situent en haut de ce réseau avec une alimentation carnée, suivi des tortues caouannes qui sont omnivores et avec un habitus opportuniste. Cela tendrait à favoriser la bioaccumulation des contaminants (Bjorndal, 1997). Enfin viennent les tortues luth et vertes se situant au bas de ce réseau. L'ingestion de débris notamment plastifiés contribue à la variabilité de teneur en PCBs chez ces animaux (Bjorndal, 1997). Les concentrations peuvent être un million de fois plus élevée que celles de la mer environnante (Mato et al., 2001). Bien que pour notre étude, le nombre de congénères testés soit réduit, elle constitue néanmoins une première approche. Les concentrations en PCBs utilisées s’échelonnaient de 0,5 à 20 ppm. Les concentrations de dix et 15 ppm de PCB-105 induisaient une augmentation significative de la phagocytose des éosinophiles. Cette augmentation était dose-dépendante et une corrélation positive a été déterminée. Le PCB-138 induisait une augmentation significative de la phagocytose pour 15 ppm uniquement et ce sans relation dose-dépendante. L’exposition aux PCB-105 et 138 a entraîné une diminution significative de l’activité lytique des cellules NK et ce aux concentrations de 15 et 20 ppm. Une corrélation négative entre l'activité NK et la concentration croissante des PCB-105 et PCB-138 a été objectivée. Contrairement aux deux PCBs précédents, les PCB-169 n’a pas modulé l'activité NK. Les concentrations de PCBs utilisées dans notre étude sont identiques à celles précédemment utilisées pour étudier et comparer les effets immunotoxiques des composés organochlorés chez diverses espèces de mammifères marins (Levin et al., 2007a). Toutefois, la concentration plasmatique de la somme des PCBs chez les tortues caouannes se situe en deça. En effet, la gamme de valeur s’étale de 27 ± 42 ng/ml soit 0,027 ± 0,04 ppm (Camacho et al., 2014), à 5560 pg/g soit 5,56 ppm (sang total, moyenne, Keller et al., 2004a) et 7267 pg/g soit 7,3 ppm (plasma, médiane, Ragland et al., 2011). Au moment de notre étude (2009), seule le travail de Keller et al., portant sur le sang total était accessible. Nous nous sommes basés sur les travaux réalisés chez les mammifères marins, en y incluant la valeur de 5ppm (Keller et al., 2004a) dans notre gamme de concentration. Chez les mammifères, l’exposition in vitro aux PCBs entraînent généralement une immunosuppression pour des 140 concentrations correspondant à celles de fin de gamme pour notre étude (13.5 μg/ml=13.5 ppm). Chez de nombreux vertébrés, les PCBs peuvent déclencher une augmentation de certaines fonctions pour de faibles concentrations alors que ces même composés vont induire une diminution pour des concentrations plus fortes (Keller et al., 2005b). Une augmentation de certaines fonctions du sytème immunitaire a été observée chez le rat pour des concentrations faibles (0,005 μg/ml) engendrant une augmentation de la prolifération lymphocytaire chez la tortue caouanne (Keller et al., 2005b). Toutefois, dans notre étude les concentrations induisant des changements significatifs des fonctions du système immunitaire inné étaient bien plus élevées que les concentrations mesurées actuellement dans le sang de ces animaux. La signification biologique exacte des changements rapportés dans notre étude portant sur une exposition in vitro des cellules isolées à partir de sang total est difficile à évaluer. En effet, les animaux « sauvages » sont exposés à une variété de polluants et contraintes environmentales (température, ressources alimentaires, interactions négatives, maladies) qui sont autant de facteurs difficiles à transposer chez des animaux maintenus captifs. Ainsi, dans le but de s’approcher d’une réalité biologique, il serait nécessaire de pouvoir réaliser cette même étude (utilisation de sang) sur des animaux sauvages, capturés puis relachés afin de mesurer les fonctions innées du système immunitaire simultanément aux mesures de PCBs et autres polluants organiques. Enfin les animaux utilisés dans notre étude étaient jeunes, en bonne santé et maintenus captifs. L'eau de mer des bassins individuels dans lesquels ils sont maintenus est issue de la filtration de l'eau de mer du Golf du Mexique (Galveston, TX, USA). Bien qu'au moment de l’étude celle-ci n'était pas encore affectée par la marée noire du Deepwater Horizon (BP), aucune mesure de PCBs potentiellement présents dans le plasma des animaux n'a été réalisée. Ces limitations sont directement liées à plusieurs paramètres que sont 1/ le financement nécessaire à la poursuite de ce projet, 2/ le temps et 3/ la mobilisation de personnel. En effet, concernant le facteur temporel, deux études publiées ont été réalisées en une année scolaire ainsi que cette étude préliminaire. Les délais d'obtention des permis fédéraux et IACUC sont longs, se comptant en mois. 141 142 Conclusion Les tortues caouannes (Caretta caretta) sont menacées et figurent sur la liste rouge de l’IUCN des espèces en danger d’extinction. Leurs caractéristiques biologiques ainsi que les risques auxquels ces animaux sont exposés, notamment la pollution chimique, en font des animaux sentinelles de l’environnement marin. Parmi les nombreux polluants organiques, les concentrations de polychlorobiphényles (PCBs) dans divers organes et fluides sont élevées et sont associées à des dysfonctionnements de nombreuses fonctions organiques et hormonales, et du système immunitaire en particulier. Face à l’importance croissante de la conservation des espèces menacées, associée à l’implication des vétérinaires travaillant dans des centres de réhabilitation, la recherche concernant la pathologie variée des tortues marines est devenue nécessaire. Les paramètres hématologiques et biochimiques constituent des indicateurs pronostiques de premier choix afin d’évaluer l’état de santé global de animaux, y compris lors d’exposition à des polluants environnementaux. Cependant ils ne permettent pas d’évaluer l’aspect fonctionnel du système immunitaire qui constitue une interface entre l’animal et son environnement. Nous avons donc déterminé 33 paramètres chez cinq classes d’âge successives de tortues caouannes juvéniles et captives afin d’estimer la variabilité inter-classes pour certains de ces paramètres. Ce travail visant à déterminer les valeurs de référence pour ces 33 paramètres a constitué un outil fondamental pour objectiver les dysfonctionnements et suivre les soins et traitements mis en place chez les tortues échouées. Les mêmes animaux pour lesquels les analyses hématologiques et biochimiques ont été réalisées, ont été utilisés pour l’évaluation du système immunitaire. Le second objectif de ce travail était de développer et d’optimiser des tests permettant l’exploration fonctionnelle du système immunitaire inné et acquis. En cytométrie de flux, nous avons isolé, à l’exception des hétérophiles, chacune des populations cellulaires sanguines, à savoir les lymphocytes, les monocytes et les éosinophiles et confirmé leur identité par étalement sur lame. Cette technique nous a permis de nous affranchir de l’absence de marqueurs membranaires disponibles chez les chéloniens. Parmi les lymphocytes, nous avons pu confirmer l’existence de deux populations de lymphocytes, B et T chez la tortue caouanne, grâce à l’utilisation de mitogènes spécifiques. Concernant la composante innée, nous avons mis en évidence pour la première fois dans cette espèce, une activité « natural killer » (NK), confirmé l’importance de la phagocytose portée par diverses populations cellulaires et montré l’influence de paramètres extrinsèques sur ces deux activités. Une fois ces tests validés, nous les avons utilisés pour évaluer les effets de trois PCBs (PCB-105, -138 et -169) sur le système immunitaire inné des tortues caouannes. Nous avons mis en évidence une modulation de la phagocytose et de l’activité des cellules tueuses naturelles. Cette étude pionnière, constituant une première approche des effets des PCBs sur le système immunitaire des tortues caouannes, devra être confirmée par des études ultérieures. Les concentrations de PCBs devront être mesurées directement à partir du plasma des animaux sauvages, puis des tests fonctionnels du système immunitaire pourront être 143 réalisés ex vivo. Pour des animaux captifs, les résidus de PCBs sanguins seront mesurés puis les tests fonctionnels précédemment cités seront utilisés après exposition in vitro. Ces tests pourront servir dans un but de suivi sanitaire des animaux en centre de réhabilitation, afin de savoir si l’individu répond correctement au traitement et permettre ainsi l’amélioration de la prise en charge chez ces individus afin d’aboutir à leur ré-introduction dans le milieu naturel. Thèse de Mme Estelle ROUSSELET-RUSSO 144 BIBLIOGRAPHIE Aguilar, A., and Borrell, A. 1994. Abnormally high polychlorinated biphenyl levels in striped dolphins (Stenella coeruleoalba) affected by the 1990–1992 Mediterranean epizootic. Science of the Total Environment, 154(2), 237-247. Aguirre, A.A., Balazs, G.H., Zimmerman, B., Galey, F.D., 1994. Organic contaminants and trace metals in the tissues of green turtles (Chelonia mydas) afflicted with fibropapillomas in the Hawaiian islands. Marine Pollution Bulletin 28, 109-114. Aguirre, A.A., Lutz, P.L., 2004. Marine Turtles as Sentinels of Ecosystem Health: Is Fibropapillomatosis an Indicator? EcoHealth 1, 275-283. 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Hematologic analytes included packed cell volume, white blood cell counts, white blood cell estimates, and leukocyte differentials. Biochemical analysis included albumin, alanine aminotransferase, alkaline phosphatase, amylase, aspartate aminotransferase, blood urea nitrogen, calcium, chloride, cholesterol, creatine kinase, creatinine, gamma glutamyltransferase, globulins, glucose, phosphorous, potassium, sodium, total bilirubin, total protein, total solids and uric acid. In due consideration of small sample size in all 5 age groups, the results of hematologic and biochemical analysis were used to determine ranges for these analytes and to compare values among consecutive age groups. Several significant differences in some hematologic and biochemical variables were identified and need to be considered in the interpretation of blood work of immature, growing sea turtles in human care. Word count: 181 Key words: Caretta caretta, loggerhead sea turtle, immature, captivity, hematology, plasma biochemistry. 164 Article 2: Vet Immunol Immunopathol. 2013 Nov 15;156(1-2):43-53. (Annexe 3) Evaluation of immune functions in captive immature loggerhead sea turtles (Caretta caretta). Estelle Rousselet, Milton Levin, Erika Gebhard, Benjamin M. Higgins, Sylvain DeGuise and Céline A.J. Godard-Codding. ABSTRACT Sea turtles face numerous environmental challenges, such as exposure to chemical pollution and biotoxins, which may contribute to immune system impairment, resulting in increased disease susceptibility. Therefore, a more thorough assessment of the host’s immune response and its susceptibility is needed for these threatened and endangered animals. In this study, the innate and acquired immune functions of sixtyfive clinically healthy, immature, captive loggerhead sea turtles (Caretta caretta) were assayed using non-lethal blood sample collection. Functional immune assays were developed and/or optimized for this species, including mitogen-induced lymphocyte proliferation, natural killer (NK) cell activity, phagocytosis, and respiratory burst. Peripheral blood mononuclear cells (PBMC) and phagocytes were isolated by density gradient centrifugation on Ficoll Paque and discontinuous Percoll gradients, respectively. The T lymphocyte mitogens ConA significantly induced lymphocyte proliferation at one and two µg/ml while PHA significantly induced lymphocyte proliferation at 5 and 10 µg/ml. The B lymphocyte mitogen LPS significantly induced proliferation at one µg/ml. Monocytes demonstrated higher phagocytic activity than eosinophils. In addition, monocytes exhibited respiratory burst. NK cell activity was higher against YAC-1 than K-562 target cells. These optimized assays may help to evaluate the integrity of loggerhead sea turtle’s immune system upon exposure to environmental contaminants, as well as part of a comprehensive health assessment and monitoring program. Keywords: Caretta caretta; Lymphocyte proliferation; Mitogen; Natural killer; Phagocytosis; Respiratory burst; Sea turtle 165 Article 3: Short communication non publiée (Annexe 4) Communication orale à l’ISTS : International Sea Turtle Society Conference (Baltimore, 2012) Modulation of the innate immune system by selected polychlorinated biphenyls upon in vitro exposure of leukocytes in juvenile loggerhead sea turtles (Caretta caretta). Estelle Rousselet1, 2, 5, Milton Levin3, Erika Gebhard3, Benjamin M. Higgins4, Sylvain DeGuise3 and Céline A.J. Godard-Codding1 1 Department of Environmental Toxicology, The Institute of Environmental and Human Health, Texas Tech University, 1207 Gilbert Drive, Lubbock, Texas, 79416, United States 2 Present address: VetAgroSup-Campus Vétérinaire de Lyon, 1 avenue Bourgelat, 69280 Marcy l’Etoile, France3 Department of Pathobiology and Veterinary Science, University of Connecticut, 61 North Eagleville Road, U-89 Storrs, CT 06269, United States4 National Oceanic and Atmospheric Administration, National Marine Fisheries Service, Southeast Fisheries Science Center, 4700 Avenue U, Galveston, Texas, 77551, United States 5Corresponding author (email: [email protected]) ABSTRACT Endangered loggerhead sea turtles (Caretta caretta) face numerous environmental challenges including exposure to polychlorinated biphenyls (PCBs). Although banned in the 1970 in the United States, they still persist in the environment and are documented to exert immunotoxicity in a wide range of species. This is of particular concern as modulation of the immune system may lead to an increase of disease’s susceptibility. In vitro immune assays were used to quantify the direct effects of PCB 105, 138 and 169 on innate immunity at increasing concentrations (0.5, 1, 2.5, 5, 10, 15 and 20 ppm). Peripheral blood mononuclear cell viability was > 90% after 96h of exposure with both coplanar non-coplanar PCBs. PCB 105 and 138 significantly increased phagocytosis at 10 and 15 ppm (p<0.002, n=4, PCB 105) and 15 ppm (p<0.04, n=4, PCB 138) compared to unexposed eosinophils. PCB 169 did not modulate NK cell activity, while PCBs 138 and 105 significantly decreased NK cell activity at 15 ppm (p=0.007, n=3) and 20 ppm (p=0.008, n=3) respectively, compared to unexposed control. This research will help to establish relationships between chemicals measured in loggerhead sea turtles and the integrity of innate defense mechanisms as indicators of disease susceptibility to pathogens. 166 Widespread coastal oceanic pollution is a result of both direct pollutant discharges and diffuse sources such as land runoff and atmospheric emissions. Ocean pollution is leading to a growing concern for the health of threatened marine species. The loggerhead sea turtle, Caretta caretta, is protected as a threatened species under the U.S. Endangered Species Act (TEWG, 2009) and is considered an endangered species under the International Union for Conservation and Nature (IUCN, 2012). Our understanding of the impact of pollution on marine turtle survival and health is very limited, in large part due to insufficient knowledge of basic sea turtle toxicology (Aguirre et al. 1994; Keller et al. 2004b; Lutcavage et al. 1995). Sea turtles are particularly at risk as they are long-lived, air-breathing marine vertebrates that are exposed to pollutants through food, seawater and air. Their long life implies longterm exposure to marine pollutants, which can make them particularly susceptible to chemical bioaccumulation (Aguirre et al. 2006; Camacho et al. 2013; Hamann et al., 2010; Keller et al. 2006; Oros et al. 2013). Moreover, sea turtles appear to be very sensitive to chemical insults (Lutcavage et al. 1997) and various deleterious effects have been reported in these species such as chronic stress, tissue necrosis and other physiological disturbances (Camacho et al, 2013; Milton and Lutz, 2003; Oros et al. 2009, 2013). Environmental organochlorine contaminants, including polychlorinated biphenyls (PCBs) are ubiquitous persistent chemicals widely used until banned in the late 70s. Due to their bioaccumulative nature, PCBs are still detected in liver, muscle and fat of Caretta caretta (Camacho et al., 2013; Keller et al., 2004b; Lazar et al., 2011; Oros et al., 2009, 2013) all around the globe, Chelonia mydas from Pacific Ocean (Gardner et al. 2003; Miao et al., 2001; van de Merwe et al. 2010) and Lepidochelys kempi from the Atlantic Ocean (Keller et al., 2004a; Lake et al. 1994; Swarthout et al. 2010). Only five studies have reported PCBs in the blood of live loggerheads (Keller et al. 2004a, 2006; Ragland et al. 2011; Camacho et al., 2013; 2014). Both experimental and epidemiological studies have demonstrated that PCBs exert negative effects on the immune system of marine mammals (De Guise et al., 1995 and 1998, 2003; Levin et al., 2005, 2007a, 2007b; Schwacke et al., 2011) and sea turtles (Keller et al. 2004a, 2006). Impaired immune system may lead to increased vulnerability to disease (Camacho et al., 2014; Cray et al., 2001; Work et al., 2001; Keller et al., 2004b; Oros et al., 2013), which could severely affect the recovery of endangered sea turtles. PCBs have been found positively correlated with WBC and heterophil counts as well as lymphocyte proliferation (Keller et al. 2004b and 2006). On the contrary, lysozyme activity decreased with increasing concentration of PCBs (Keller et al. 2006) and higher concentrations of PCBs were reported in debilitated animals when compared to healthier one (Keller et al. 2006; Camacho et al., 2014). In our study, we propose to address for the first time the immunomodulatory effects of PCB 105, 138 and 169 on phagocytosis and NK activity upon in vitro exposure of leukocytes of juvenile loggerhead sea turtles. These tests of the innate immune functions have been previously validated in the loggerhead sea turtles 167 (Rousselet et al., 2013b). Blood samples were colletected in 2010, from 19 immature captive loggerhead sea turtles at the NOAA Fisheries Sea Turtle Facility in Galveston, (TX, USA) (Higgins, 2003) were collected. Animals were 32 and 44 month old with an average weight of 12.6 kg ± 2.3. All animals in this study were clinically healthy based on a veterinary examination as well as complete blood count and plasma chemistry panel values (Rousselet et al., 2013a). All research complied with all institutional animal care guidelines of the University of Connecticut and conditions described in U.S. Fish and Wildlife Service Endangered Species Act Section 10a(1)a Scientific Research Permits# TE-676379-4 and TE#676379-5, and Florida Fish and Wildlife Conservation Commission Marine Turtle Permit #MTP-015. Eight mL of blood were collected into lithium heparin tubes kept cool until processed within 24 h. PCBs (purity >98.4%) were re-suspended in endotoxin free dimethyl sulfoxide and then added to Dulbecco’s modified eagle medium (DMEM) to prepare working solutions. The final DMSO concentration did not exceed 0.4%. Peripheral blood mononuclear cells (PBMC) were isolated by density gradient centrifugation using Ficoll-Paque plus (1.077 g/mL) as previously described (Rousselet et al., 2013b). Viability of PBMC after 96 hours of PCBs’ exposure was evaluated by flow cytometry using propidium iodide (PI) (100 µg/mL) as described by Brousseau et al. (1999). Samples were analyzed with a FACScan flow cytometer (Becton Dickinson, Rutherford, NJ) and the fluorescence of 10000 events was read. Data are expressed as a percent of viable cells. Natural Killer (NK) cell activity after exposure to PCBs was measured using the murine lymphoma cell line (YAC-1) as previously described (Rousselet et al., 2013b). PBMCs (effector cells) were adjusted to 106 cells/mL and were incubated in RPMI with or without one congener of PCB at increasing concentration ranging from 0.5 to 20 ppm for 3h. Then, target cells were added to PBMCs at an effector:target (E:T) ratio 50:1. NK cell activity was measured after 2.5 hr incubation at 28 C. Granulocytes were separated using discontinuous Percoll-gradients as previously described (Rousselet et al., 2013b). Cells obtained at the interface between plasma and 40% and 40-45% of percoll were pooled and used for phagocytosis. 2x105 leukocytes were plated in each well of round bottom 96-well plates and incubated with or without one PCB congener at concentration ranging from 0.5 to 15 ppm, for 3 hr at 28 C. The method was then previously described (Rousselet et al., 2013b). Data from at least three independent phagocytosis experiments (three individuals per experiment) were pooled. Data from four individuals per NK experiment were used. One-way repeated-measures analysis of variance (RM ANOVA) followed by Bonferroni’s or Holm-Sidak’s post-hoc testing were used to compare the different experimental groups. If only two experimental groups were compared and the data were normally distributed, t-test was used; otherwise Mann-Whitney Rank Sum test was used instead. RM ANOVA was evaluated using the SigmaStat Windows 1.0 (Jandel Scientific, San Rafael, CA) software, using p<0.05 for statistical significance. Statistical power for each experiment was greater than 0.8, the threshold required by the statistical software to assure confidence in the interpretation of the statistical 168 results. The percentage of viable cells was > 90% as determined by flow cytometry after in vitro exposure to PCB-105 138 and 169 for 96 hr. There were no statistically significant treatment-related effects on the viability of immune cells (data not shown). The PCB-105 induced a concentration-dependent increase of phagocytosis in loggerheads’ eosinophils (Fig. 1) for 1+, 2+ and 3+ beads contrary to PCB-138 (Fig. 2). PCB-105 significantly increased phagocytosis at 10 and 15 ppm (p<0.002) while PCB-138 significantly increased phagocytosis at 15 ppm (p<0.04). The positive correlation between phagocytic activity and PCB-105 concentrations was found for 1+ beads (Pearson correlation, r = 0.66, p = 5.2.10-6), 2+ beads (r = 0.59, p = 4.2.10-5) and 3+ beads (r = 0.56, p = 1.4.10-4). The ability of NK cells to lyse YAC-1 cells after exposure to PCB-105 and -138 showed a significant decrease (Fig. 3) with 15 and 20 ppm (p<0.01) for the 50:1 ratio (NK:target), whereas PCB-169 did not modulate NK activity. A negative correlation between NK activity and PCB-105 (Pearson correlation, r = -0.585, p = 0.0027) as well as PCB-138 (r = -0.557, p = 0.0087) was found. This is the first report on the modulation of two major functions of the innate immune system (phagocytosis and NK cell activity) by PCBs in loggerhead sea turtles. The effect of pollutants is currently of critical concern as it is listed among top 20 research questions for sea turtle conservation on the global level (Hamann et al., 2010). Although the number of congeners tested is reduced, we tested three of them. Further studies have to be performed to test additional congeners or mixtures. Noncoplanar hexachlorinated PCB-138 was tested as it was among the most abundant congener in loggerhead sea turtles (Camacho et al., 2014; Keller et al., 2004b, 2006; Lazar et al., 2011; Oros et al., 2009; Storelli et al., 2007). The coplanar mono-ortho PCB 105 and non-ortho PCB 169 were chosen because they are stereoisomers of the highly toxic TCDD and have been shown to act through the same mechanism of action through binding to the AhR. These congeners were reported in the liver of loggerhead sea turtles (Alava et al., 2011; Camacho et al., 2013; Storelli et al., 2007; Richardson et al., 2009). Compared to aquatic mammalians, PCB concentrations are about one order of magnitude lower in sea turtles (Camacho et al., 2013; Keller et al., 2004). However, loggerhead sea turtles have omnivorous feeding habits, which make them more likely to bioaccumulate contaminants than some other sea turtle species, such as leatherback and green sea turtles (Bjorndal, 1997). Additionally, ingestion of debris might add variability to the concentrations of PCBs in the sea turtles. Incidental ingestion of marine debris, particularly plastics that has been found in many sea turtles (Bjorndal, 1997), increase adsorption of PCBs up to 106 higher than surrounding seawater (Mato et al., 2001). Only three authors reported measured PCBs in loggerhead sea turtles’ blood (Camacho et al., 2013; Keller et al., 2004a, 2006, Ragland et al., 2011). In these studies blood concentration of sum PCBs ranged from 5,560 pg/g (5.56 ppm) wet mass whole blood (mean, Keller et al., 2004a) to 7,267 pg/g (7.3 ppm) wet mass plasma (median for transient animals, Ragland et al., 2001). Blood sampling may act 169 as a representative, non-lethal sampling mechanism to test for organochlorine concentrations (Keller et al. 2004a). The concentrations of tested PCBs ranged from 0.5 to 20 ppm as it represented concentrations previously used to investigate and compare the immunotoxic effects of OCs upon in vitro exposures in several marine mammal species (Levin et al., 2007a). The mammalian studies that demonstrated immunosuppression by PCBs used concentrations near the high end of the range used in the loggerhead turtle study (13.5 μg/ml=13.5 ppm). Enhancement, of lymphocyte proliferation was observed in the rat study at a similar concentration that enhanced loggerhead lymphocyte proliferation (0.005 μg/ml) (Keller et al., 2005). In many vertebrate species, PCBs have been shown to trigger immunoenhancement at lower concentrations and immunosuppression at higher concentrations (Keller et al., 2005). The differences in immunotoxic effects observed between different vertebrate species may also be explained simply by species differences in immune responses or the use of different immune function tests. Finally, the exact in vivo significance of the changes reported in the present in vitro exposure study is hard to assess. Further studies to be done would measure PCBs levels in blood of the animals during health assessment campains and use the same sample to assay the innate immune functions. PCBs concentration was not determined in the blood of captive animals from our study. 170 Annexe 5 : Poster Morris Animal Foundation Veterinary Student Scholar program: Combined hematology and immunology : a breakthrough to understand immune functions of stranded sea turtles 171 172 NOM PRENOM : ROUSSELET ESTELLE TITRE : Etude du système immunitaire de la tortue caouanne (Caretta caretta) : Utilisation comme outil diagnostique et indicateur de toxicité des polychlorobiphényles (PCBs) Thèse d’Etat de Doctorat Vétérinaire : Lyon, (28 Novembre 2014) RESUME La recherche concernant les pathologies affectant les tortues caouannes (Caretta caretta) et les polluants auxquels elles sont exposées, est incontournable au vu de l’importance croissante de la conservation des espèces menacées d’extinction (IUCN) ainsi que l’implication des vétérinaires en centres de réhabilitation. Les valeurs de référence de 33 paramètres hématologiques et biochimiques ont été déterminées chez cinq classes d’âge successives d’animaux juvéniles et captifs. Des tests permettant l’exploration fonctionnelle du système immunitaire inné et acquis ont été développés et d’optimisés. Lymphocytes, monocytes et éosinophiles ont été isolés par cytométrie de flux puis identifiés. La prolifération des lymphocytes B et T l’activité « natural killer », la phagocytose et l’activité d’explosion respiratoire portée par diverses populations cellulaires ont été étudiées. Une modulation de la phagocytose et de l’activité NK ont été mises en évidence suite à l’exposition des cellules aux PCB-105, -138 et -169. Cette étude constitue une première approche des effets des PCBs sur le système immunitaire et devra être confirmée par des mesures directes de polluants à partir du plasma des animaux sauvages ainsi que de tests fonctionnels du système immunitaire ex vivo. MOTS CLES : - Biphényles polychlorés - Caretta - Système immunitaire JURY : Président : Monsieur le Professeur Frédéric BERARD 1er Assesseur : 2ème Assesseur : Monsieur le Professeur Michel PEPIN Monsieur le Professeur Philippe BERNY DATE DE SOUTENANCE : Vendredi 28 Novembre 2014 ADRESSE DE L’AUTEUR : 4 rue des Nouvelles maisons 69009 Lyon