MEMANTINE Une nouvelle option thérapeutique pour combattre la maladie d’Alzheimer 1901: une patiente de 51 ans admise à l’Hôpital de Francfort. Troubles de mémoire, difficulté de compréhension, aphasie, désorientation, hallucinations. Cette personne inspire le Docteur Aloïs Alzheimer qui donne son nom à cette maladie décrite pour la première fois. Ce n’est que dans les années 80 que cette maladie a vraiment intéressé les pouvoirs publiques en raison de la priorité de santé publique qu’elle représente. La pathologie Affection neurodégénérative conduisant progressivement et irréversiblement à la perte de mémoire (amnésie) et des fonctions cognitives: - Aphasie: perte du langage - Apraxie: perte de la stratégie des mouvements - Agnosie: perte de la reconnaissance visuelle Etiologie: 2 types de lésions dans le cerveau : - Plaques séniles: dépôts anormaux extracellulaires d’une protéine = bêta-amyloïde, fragment d’une protéine membranaire destruction des neurones avoisinants -Dégénérescence neurofibrillaire: accumulation intracellulaire de filaments anormaux constitués de protéines tau phosphorylées mort du neurone perte de mémoire et démence biochimiquement : déficit cholinergique, caractéristique d’ Alzheimer, entraînant les problèmes de mémoire et d’attention Evolution à gauche: atrophie cérébrale nette dans un cas de démence de type Alzheimer. L'atrophie corticale est associée à une dilatation ventriculaire. à droite: cerveau d'une personne du même âge, intellectuellement normale. Epidémiologie 18 M de personnes dans le monde, 350 000 en France (2000?!) et 800 000 en 2007 !! nombre multiplié par 10 dans 10 ans 64 000-100 000 nouveaux cas / an en France 24 millions dans le monde actuellement Problème majeur de santé publique dans pays industrialisés: - 5% des + de 65 ans, 20% des + de 80 ans - 70% des lits en hôpitaux de long séjour Grosse charge économique et sociale Le malade décède dans les 8 années qui suivent l’apparition des premiers signes cliniques http://www.fondation-alzheimer.org En France en 2010 cas de démence 750 000 à 850 000 cas selon les études,, (1,2% de la population). D’ici 2050 ce chiffre devrait être multiplié par 2,4 soit plus de 1 800 000 cas (3% de la population). Au niveau mondial, cas de démence 24 millions, (4.6 millions de nouveaux cas / an, soit 1 / 7s). 60% des cas vivent dans des pays développés mais le nombre de cas va aussi augmenter très fortement en Chine, Inde et autres pays d’Asie et du Pacifique Ouest. Attention, estimations assez imprécises : un cas de démence / 2 est diagnostiqué et pris en charge. Certaines formes surviennent avant 60 ans : formes rares héréditaires pour lesquelles certains gènes ont pu être identifiés. En France, ces formes précoces concernent 32 000 cas avant 60 ans et 1 000 cas avant 50 ans. Prévalence de la maladie par sexe/âge en Europe (1991) Les traitements actuels pas de traitement curatif mais traitement symptomatique actuellement,: inhibiteurs Achase manque d’ ACH dans le cerveau: - Tacrine ( COGNEX®) - Donépézil ( ARICEPT®) - Rivastigmine ( EXELON®) - Galantamine ( REMINYL®) limite le Amélioration cognitive, uniquement utilisable dans l’Alzheimer minime à modéré Ralentissement du déclin de la maladie mais tous les patients ne peuvent pas en profiter à cause des effets indésirables : Tremblements types parkinson (aussi hypercholinergie) Akinésie type catalepsie Pharmaco économie Marché: Alzheimer: 1.79 milliards $ en 2004 3 en 2009 • Mémantine: 33 M $ en 2004 350 M $ en 2014 Démence: ème maladie la + chère, 3 1ere, chez les > 85 ans Mémantine= Amélioration des coûts de traitement: diminue de 824$ le coût des soins/mois et les coûts sociaux de 1000$ Découverte du médicament Historique 1963: synthèse du 1.3 diméthyl-5-aminoadamantane (D145) lipophilie associée à la molécule d’ adamantane (architecture compacte et symétrique) préparation de N-arylsulfonyl-N’-adamantylurées pour évaluer leur potentiel hypoglycémique aucune action 1964: Amantadine est introduite comme agent anti-viral Amantadine est prescrite en prophylaxie dans les foyers infectieux grippaux. Les observations cliniques montrent que ce composé semble avoir une activité secondaire sur le cerveau des personnes âgées 1972: Etudes des effets pharmacologiques chez le rat: activation des neurones dopaminergiques traitement de le maladie de Parkinson ?? 70’s: évaluation des propriétés biochimiques, pharmacologiques et pharmacocinétiques de la Mémantine 1983: – Interfère avec le métabolisme des neurotransmetteurs dopamine, noradrénaline, sérotonine et module la transmission synaptique – Diminue résistance et conductance membranaire au Na, K, Cl et est impliquée dans la génération de potentiel d’action 1989: Les antagonistes du récepteur NMDA facilitent l’apprentissage MERZ lance la Mémantine en Allemagne pour le traitement de la démence 1991: Les 1- amino-adamantanes se fixent sur le récepteur NMDA 1991: Les antagonistes du récepteur NMDA = candidats intéressants pour traitement de la dystonie Dystonie : maladie neurologique caractérisée par des mouvements involontaires brusques, entraînant des attitudes extrêmes de contorsion (1843). 1992: Mémantine + traitements antiparkinsoniens classiques = nouvelles stratégies thérapeutiques L-dopa + Mémantine = - diminution des caractéristiques de la maladie - diminution des épisodes « off » De plus, la mémantine apparaît comme avoir un potentiel thérapeutique contre toutes entités cliniques associées à la neurotoxicité médiée par le récepteur NMDA car elle est efficace et possède peu d’ effets indésirables 1993: propriétés antidépressives 1995: prévention de la neurodégénérescence fonctionnelle chez rats protection des neurones en culture contre neurotoxicité due à une hyperactivité du glutamate au niveau du récepteur du NMDA 1995: Mémantine comme agent thérapeutique potentiel de la maladie d’ ALZHEIMER 2000: Les antagonistes avec une affinité modérée pour le récepteur NMDA combine efficacité et tolérance chez des modèles animaux avec troubles de la transmission glutamatergique 2002: Mémantine approuvée en Europe 2003: FDA approuve NAMENDA® pour le traitement de la maladie d’ Alzheimer modérément sévère à sévère 2005: Stade modéré de la maladie (EMEA) Relations Structure-activité A R1=R2=R3=H B R1=R2=CH3 C R1=CH3 D R1=R2=R3=CH3 E R=C2H5 F R1=R2=C2H5 G R1=n-Pr R3=H R2=R3=H R2=R3=H R3=H R2=R3=H Composés a Amantadine R1=R2=R3=H b Mémantine R1=R2=CH3 R3=H C R1=CH3 R2=R 3=H D R1=R2=R3=CH3 Dose (mmol/kg) Activité locomotrice 0.025 61 0.05 147 0.10 237 0.15 432 0.20 522 0.30 368 F R1=R2=C2H5 R3= H 0.025 154 0.05 383 0.10 716 0.20 478 0.025 75 0.05 75 148 G R1=n-Pr R2= R3=H 0.10 94 0.05 264 amphétamine 0.01 177 0.10 351 0.02 562 0.20 472 0.04 993 0.40 Dose létale 0.05 87 0.10 201 0.20 243 0.40 44 0.0125 181 0.025 264 0.05 377 0.10 916 0.20 1378 0.05 37 0.10 144 0.20 383 0.025 E R=C2H5 R3=H R2= Physiopathologie de la maladie d’Alzheimer et mode d’action de la Mémantine Rôle du glutamate Le glutamate stimule environ 70% de toutes les synapses excitatrices du SNC GREENAMYRE(1986): le glutamate serait impliqué dans le mécanisme pathologique de maladies neurodégénératives comme l’ «Alzheimer» L'activation excessive des récepteurs du glutamate peut entraîner un dysfonctionnement ou des dommages neuronaux : on parle alors d’ EXCITOTOXICITE Le récepteur NMDA 3 caractéristiques majeures : - haute perméabilité vis-à-vis du Ca²+ Canal bloqué par Mg²+ très fortement voltage dépendant cinétique lente d’ouverture et fermeture - Apprentissage et mémoire 1) 2) 3) 4) 5) 6) Sortie massive de glutamate Activation du R-AMPA Influx de Na+ dans le neurone: dépolarisation partielle Départ de l’ion Mg²+ Entrée de Ca²+ à travers le canal du R-NMDA et détection du signal permettant l’apprentissage Augmentation de la sensibilité et du nombre de récepteur AMPA Conditions pathologiques •Activation du récepteur NMDA par des concentrations plus faibles de glutamate et ceci plus ou moins sans interruption •Augmentation de l’influx de Ca²+ et donc survenue d’un signal parasite: diminution de la détection du signal de Ca²+ déficit des fonctions cognitives - entrée massive de Ca²+ va conduire à des dommages au niveau des neurones perte neuronale IDEE : utilisation d'antagonistes du récepteur NMDA - au départ, utilisation de la dizocilpine (MK-801) mais effets indésirables : hallucinations, perte de reconnaissance sociale et troubles de la mémoire !!! Doutes sur la possibilité de développement d'antagonistes du récepteur NMDA - Problèmes avec la dizocilpine : très forte affinité, faible voltage-dépendance et cinétique lente absence de signal parasite MAIS AUSSI absence de signal physiologique nécessaire à l'apprentissage Receptor binding de la Mémantine La Mémantine: - déplace le MK-801 H3 (dizocilpine) dans le cortex humain et de rat avec une IC50 de 0.3 µM - ne déplace pas le glutamate, la glycine pour des concentrations comprises entre 10 et 100 µM - n'influence pas la fixation des ligands pour d'autres récepteurs du SNC pour des concentrations comprises entre 10 et 100 µM - la Mémantine est donc sélective des sites de fixation du MK-801: c'est un ANTAGONISTE NON COMPETITIF DU RECEPTEUR NMDA Mode d’action de la Mémantine Du fait de sa plus forte affinité pour le récepteur NMDA et de sa plus faible voltage-dépendance que le Mg²+, la Mémantine protège d'un influx intracellulaire élevé et prolongé de Ca²+ provoquant des dommages neuronaux: elle supprime le signal parasite effet neuroprotecteur Cependant, la Mémantine quitte le récepteur lors d'une activité cognitive pcq son affinité pour le R-NMDA est modérée (/Mk-801) et sa cinétique rapide. Le Ca2+ peut alors entrer librement et le signal postsynaptique être détecté: la Mémantine préserve ainsi le processus physiologique d'apprentissage Etudes Pré-cliniques Propriétés pharmacocinétiques Absorption et Distribution Biodisponibilité par voie orale proche de 100% et pharmacocinétique linéaire Concentration maximale après 3 à 7 heures Pas d’influence de la nourriture Fixation aux protéines plasmatiques faible d’environ 45% Doses journalières de 20 mg permettent d’atteindre une concentration plasmatique de Mémantine de 70 à 150 µg/mL ou 0.5 à 1 µM, avec de grandes variations interindividuelles Métabolisme et Elimination Faible métabolisme: la majorité de la dose administrée est excrétée inchangée par les urines Pas d’ activité du CYT P450 T1/2 d’élimination d’environ 60 à 100 heures Clairance rénale: 170 mL/min/1.73 m² de surface corporelle Sécrétion tubulaire et réabsorption tubulaire pH dépendante Toxicité Pas de carcinogénicité (études in vivo souris, rats) Pas génotoxique (essais in vitro sur E.Coli) Pas de diminution de la fertilité ou de reproductivité (rat) Pas tératogène (rats et lapins). Toutefois, si Mémantine administrée avant accouplement jusqu’à la période postpartum, une diminution du poids des petits et une augmentation de l’incidence de vertèbres cervicales non ossifiées ont été observées Essais cliniques Efficacité de mémantine évaluée grâce à des échelles standardisées : CIBIC-Plus (Clinician’s Interview-Based Impression of Change Plus Caregiver Input) = échelle de 1 à 7 évaluant l’ amélioration clinique ADCS-ADLsev (Alzheimer’s Disease Cooperative Study Activities of Daily Living Inventory) = échelle de 0 à 54 (fonctionnement optimal) évaluant l’atteinte fonctionnelle SIB (Severe Impairment Battery) = échelle de 0 à 100 évaluant les fonctions cognitives Etude n°1 Multicentre aux Etats-Unis pendant 28 semaines 252 patients (67% de femmes, âge moyen: 76 ans) Alzheimer modérée à sévère séparés au hasard en 2 groupes : Placebo ou Mémantine Mémantine: 5 mg/j au début puis augmentation de la dose de 5mg chaque semaine pour atteindre une dose de 20 mg/j (10 mg 2x/j) l’ amélioration clinique fonctions cognitives l’atteinte fonctionnelle Etude n°2 Multicentre aux Etats-Unis pendant 24 semaines 404 patients Alzheimer modérée à sévère traités au Donépézil (inhib. Achase) depuis au moins 6 mois séparés au hasard en 2 groupes : Mémantine (mêmes doses que pour l’étude n°1) ou placebo Etude en double aveugle fonctions cognitives l’atteinte fonctionnelle Effets indésirables Effets indésirables Mémantine Placebo Agitation 9.0% 17.4% Incontinence 5.7% 7.3% Diarrhées 5.4% 4.9% Insomnies 5.4% 4.9% Vertiges 5.0% 2.8% Maux de tête 5.0% 3.1% Hallucinations 5.0% 2.1% Chutes 4.7% 4.9% Constipation 4.0% 4.5% Toux 4.0% 5.9% Conclusion La difficulté pour les scientifiques a été de développer un antagoniste qui prévenait de l’ activation pathologique du récepteur NMDA tout en permettant son activité physiologique normale Autres utilisations de la Mémantine… – en phase 3 des essais cliniques pour le traitement de la maladie d’ Alzheimer de légère à modérée (juillet 2007) – dépendance à l’alcool et drogues – douleurs neuropathiques – glaucome et hypertension oculaire …… On entre dans l’ ère thérapeutique de la maladie d’ Alzheimer du fait de la bonne connaissance aujourd’ hui des mécanismes pathologiques Arrivée de nouveaux médicaments sur le marché, agissant sur les plaques formées de bêtaamyloïde L'Ebixa* est disponible en France depuis fin 2002 et est pris en charge par la SS depuis août 2003. Son prix est de 98 euros la boite de 56 comprimés à 10 mg. FIN Notre sauveur !!! 2007 commission du plan Alzheimer Plan Alzheimer : dix mesures phares pour un montant de 1,6 milliard d'euros 2008 : Fondation Plan Alzheimer par le Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, pour mettre en œuvre le volet Recherche du Plan national Synthèse Réaction Mécanisme