La mastite chez la femme qui allaite

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De la mère au nourrisson
La mastite chez la femme qui allaite
La mastite de lactation correspond à une inflammation du tissu conjonctif entre les lobules de la glande mammaire, survenant le plus
souvent dans les premières semaines d’allaitement1. Elle est associée à un arrêt précoce de l’allaitement2. La mastite peut prendre trois
formes : cellulite, adénite ou abcès, et elle peut être infectieuse ou non3-6. Elle peut aussi survenir chez la femme qui n’allaite pas.
Toutefois, cet article ne traitera que de la mastite infectieuse survenant chez la femme qui allaite. Nous verrons plus spécifiquement
la mastite d’origine bactérienne et la candidose mammaire.
Texte rédigé par Julie Grenier, B. Pharm., M.Sc.,
CSSS Vallée de l’Or.
Texte original soumis le 28 juin 2007.
Texte final remis le 9 septembre 2007.
Révision : Anne Fadin, MD, Centre hospitalier
de Val d’Or, et Caroline Morin, B. Pharm., M.Sc.,
CHU Sainte-Justine.
Cas clinique
Geneviève, une jeune femme de 28 ans, est
maman depuis quelques jours pour la
deuxième fois. Elle allaite son nouveau-né de
façon exclusive. Depuis hier, elle a une douleur
au sein gauche accompagnée de rougeur et
d’enflure. L’allaitement du nouveau-né lui
paraît plus difficile que dans son expérience
antérieure. Il n’y a pas de masse apparente ou
décelable au toucher du sein affecté. Geneviève frissonne et sa température corporelle
prise par la voie orale est de 39 °C. Elle ne
prend pas de médicaments à l’exception
d’acétaminophène au besoin. Elle n’a aucune
allergie documentée au dossier pharmacologique. Geneviève a consulté son médecin qui
lui a remis une ordonnance de cloxacilline
(OrbeninMD) 500 mg par voie orale 4 fois par
jour pour 10 jours. Elle s’inquiète des effets
possibles de l’antibiothérapie pour son bébé
qui y sera exposé par le lait maternel. Elle souhaite aussi savoir comment soulager la douleur au niveau du sein affecté.
Mastite d’origine bactérienne
noter une induration et la présence de pus
dans les cas d’adénite ou d’une mastite avec
abcès4. La mastite a une présentation généralement limitée à un des deux seins et le plus
souvent localisée au quadrant supérieur
externe du sein7,10. La durée moyenne d’un
épisode de mastite tourne autour d’une
semaine avec un taux de récurrence d’environ
14 %4. Les symptômes devraient être améliorés de façon significative 24 à 48 heures après
le début d’un traitement antibiotique10.
Étiologie et voie d’entrée
des agents pathogènes
La principale bactérie susceptible d’être
retrouvée dans le lait ou dans les sécrétions
purulentes s’il y a abcès est le Staphylococcus
aureus, suivi des streptocoques, du Sta­
phylococcus epidermidis et du Escherichia
coli 3-7,11. On a aussi rapporté occasionnellement la présence de Salmonella spp et de
mycobactéries7. La voie d’entrée des bactéries vers les conduits lactifères est habituellement une lésion de la peau, le plus souvent
une gerçure ou une crevasse au mamelon3,9,10. Plus rarement, la propagation pourrait se faire par voie hématogène3,9.
Épidémiologie
L’incidence rapportée dans la documentation
scientifique varie entre 1 % et 33 %3,4,6,7. Cette
affection survient le plus souvent dans les
trois premiers mois de l’allaitement avec un
pic entre deux et six semaines post-partum7-10.
Elle peut toutefois survenir n’importe quand
durant l’allaitement. L’évolution jusqu’à la
formation d’abcès est plus rare et survient
chez 5 % à 11 % des femmes qui ont une
mastite d’origine bactérienne3,7,8.
Signes et symptômes
Les premiers symptômes incluent la fatigue,
une sensibilité localisée au niveau d’un sein
et des symptômes pseudogrippaux10. Les
autres signes et symptômes caractérisant la
mastite d’origine bactérienne sont une température supérieure à 38,5 °C ou des frissons et la présence de deux signes locaux
d’inflammation figurant parmi les suivants :
rougeur, enflure, chaleur, douleur ou inconfort au niveau du sein3,5,6,11. Il est possible de
14
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Facteurs de risque
Plusieurs auteurs rapportent comme facteurs de risque des éléments prédisposant à
un engorgement mammaire, une stase du
lait et à des traumas (fissures, gerçures, crevasses) au mamelon3,5,7,8,10. Une mauvaise
hygiène a été mise en cause chez certaines
patientes7. Une diminution de l’immunité
de la femme liée au stress et au manque de
sommeil peut aussi favoriser la mastite4,7.
L’engorgement et la stase de lait peuvent
être attribuables à une mauvaise vidange
des conduits lactifères, au port d’un soutien-gorge serré compressant la poitrine, ou
encore à une technique d’allaitement ou
une utilisation de tire-lait non optimale4,7,11.
Une bonne technique d’allaitement fait
référence aux différentes positions du bébé
et à l’attachement de la bouche à l’aréole.
Une technique d’allaitement non optimale
peut aussi mener à des fissures, des gerçures
ou des crevasses aux mamelons, créant ainsi
La mastite chez la femme qui allaite
une porte d’entrée vers les conduits lactifères pour les agents pathogènes.
Dans une étude, un antécédent de mastite
lors d’un allaitement précédent a augmenté le
risque d’un nouvel épisode jusqu’à trois fois3.
L’utilisation de crème antifongique et de lanoline dans la semaine précédant la mastite a été
associée à la mastite, mais comme cette utilisation est souvent liée aux fissures, il n’est pas
exclu que cette utilisation puisse n’être que le
marqueur d’un autre facteur de risque3,5. Il n’y
a pas lieu de déconseiller ces traitements. Pour
ce qui est des paramètres relatifs aux boires,
les mastites survenaient davantage chez les
femmes qui avaient 10 allaitements ou plus
par jour3.
Les femmes qui allaitent devraient connaître les principaux signes et symptômes de la
mastite pour qu’elles consultent rapidement
s’ils apparaissent5,10,11. Un retard dans le
début d’un traitement antibiotique augmente le risque de mastite récurrente et
d’abcès9.
Traitement
Mesures non pharmacologiques
Il est recommandé de poursuivre l’allaitement en utilisant aussi le sein affecté6,7,9-11.
Le lait maternel n’est pas contaminé et l’infection bactérienne ne peut pas se propager
à l’enfant allaité. Si le sein atteint n’est pas
vide après l’allaitement, certains auteurs
pédiatrique12,13. Quant à l’ibuprofène, on
estime que le nourrisson exclusivement
allaité est exposé à moins de 1 % de la
dose pédiatrique12-14. À ce jour, ces deux
analgésiques n’ont pas été associés à des
effets indésirables pour l’enfant allaité,
mis à part un seul cas de rash chez un
nourrisson attribué à la prise d’acétaminophène par sa mère14. D’autres antiinflammatoires offerts sur ordonnance
médicale peuvent aussi être utilisés. Parmi
ceux-ci, mentionnons le diclofénac, le
flurbiprofène, l’indométhacine et le naproxène, qui mènent à une exposition par
le lait correspondant à 1 % à 5 % de la
dose pédiatrique12-14.
En présence d’une mastite, la mère devrait allaiter
plus fréquemment mais sur une plus courte période.
Le lait n’a pas besoin d’être jeté car il ne constitue pas un risque
de transmission de l’infection à l’enfant9.
Mesures préventives
Une bonne technique d’allaitement, faisant
référence au positionnement adéquat du
nouveau-né et à la vidange complète du
sein, est essentielle afin de prévenir l’apparition de fissures ou de gerçures, l’engorgement au niveau des seins et la stase de lait5,7.
Pour guider les femmes, un enseignement
est généralement offert par une infirmière
avant le congé de l’hôpital ou encore par
une sage-femme si l’accouchement a lieu en
maison de naissances. Par la suite, divers
groupes de ressources et d’entraide existent
pour soutenir les femmes qui ont des difficultés ou ont besoin de conseils par rapport
à leur allaitement, par exemple :
n Fédération québécoise nourri-source
(www.nourri-source.org)
n Ligue La Leche (www.allaitement.ca)
n Association québécoise des consultantes
en lactation certifiées par l’IBCLE (International Board of Lactation Consultant
Examiners) (www.ibclc.qc.ca). Des consultantes sont présentes dans le réseau public
de santé, dans certaines cliniques médicales spécialisées ainsi que dans quelques
pharmacies. Certaines consultantes ont
une pratique privée. Les coordonnées sont
accessibles sur le site Internet.
Les CLSC pourront également diriger la
patiente vers une ressource pour l’aider
dans son allaitement si besoin.
www.monportailpharmacie.ca
recommandent l’utilisation d’un tire-lait
pour éviter la stase de lait9. Le fait de poursuivre l’allaitement permet aussi de maintenir la production de lait10. Il peut être plus
confortable de débuter l’allaitement par le
sein qui n’est pas atteint9. Des compresses
tièdes appliquées à la poitrine ou une douche tiède peuvent soulager la douleur10. La
documentation médicale suggère également un apport liquidien augmenté chez la
mère et du repos au lit9,10.
Si un abcès est présent, un drainage ou
une aspiration du contenu devront parfois
être faits7,9,10. L’allaitement peut être poursuivi même en présence d’abcès, selon le
confort de la patiente et la localisation de
l’abcès9,10. Si l’abcès est trop près de l’aréole
et que la décision est prise de ne pas allaiter
en attendant la diminution des symptômes,
la patiente devrait alors utiliser un tire-lait
pour vider son sein9.
Mesures pharmacologiques
Analgésiques
L’utilisation d’acétaminophène ou d’ibuprofène est recommandée pour le soulagement de la douleur, un anti-inflammatoire
étant probablement plus efficace pour ce
type de douleur. On estime qu’un nourrisson exclusivement allaité serait exposé par
le lait à une quantité d’acétaminophène
correspondant à moins de 10 % de la dose
Traitement antibiotique
Il existe plus d’un régime antibiotique possible indépendamment de la présence d’un
abcès ou non. La majorité des mastites du
post-partum sont attribuées au Staphylo­
coccus aureus et le traitement antibiotique
visera à couvrir cette bactérie3,5-7,11. Le tableau I résume les principales options de
traitement. Dans les cas plus graves, une
hospitalisation et l’administration d’antibiotiques par voie intraveineuse est nécessaire.
Une amélioration de l’état clinique devrait
survenir dans les 24 à 48 heures après le
début du traitement antibiotique1. Dans le
cas contraire, un ajustement de l’antibiothérapie est justifié, de pair avec une culture
du lait maternel dans certains cas.
La plupart des antibiotiques ne comportent pas de risques pour l’enfant allaité
(tableau I). Néanmoins, les petites quantités
qui sont transférées dans le lait maternel
peuvent altérer la flore gastro-intestinale de
l’enfant allaité et entraîner les troubles transitoires traditionnellement associés aux antibiotiques : selles molles ou diarrhées, crampes abdominales, coliques. Ces effets bénins
et passagers ont été décrits chez près des
deux tiers des enfants exposés à un antibiotique par le lait maternel, et ne nécessitent
généralement pas de consultation médicale15. Des effets graves, comme la colite
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15
De la mère au nourrisson
Tableau I
Antibiothérapie recommandée pour le traitement de la mastite du post-partum d’origine bactérienne
Traitements
Données d’innocuité durant l’allaitement
Traitement par voie orale
Tous les antibiotiques présentés dans ce tableau sont compatibles avec l’allaitement aux posologies suggérées.
Les particularités pour chaque médicament sont décrites.
Traitements de premier recours
Cloxacilline 500 mg po qid pour 10 à 14 jours8,17L’enfant exclusivement allaité est exposé à moins de 1 % de la dose pédiatrique12,13.
On a rapporté des diarrhées bénignes chez 2 enfants allaités sur 10 dont la mère recevait
de la cloxacilline dans un sondage téléphonique14,15.
Céphalexine 500 mg po qid pour 10 à 14 jours8,17,18L’enfant exclusivement allaité est exposé à moins de 1 % de la dose pédiatrique12,13.
On a rapporté des diarrhées bénignes chez 4 enfants allaités sur 16 dans des études
de surveillance14,15,19.
Autres choix de traitement
Amoxicilline/Clavulanate 500/125 mg tid ou Amoxicilline : l’enfant exclusivement allaité est exposé à moins de 1 % de la dose
875/125 mg po bid pour 10 à 14 jours8,18pédiatrique12,13. On a rapporté des diarrhées bénignes chez 5 enfants allaités sur 65 dont
la mère recevait de l’amoxicilline dans deux études; un rash a également été décrit chez
un enfant allaité14,15,19.
Acide clavulanique : pas de données sur le passage dans le lait maternel. On a rapporté
des effets indésirables bénins (irritabilité, diarrhée, rash ou constipation) chez 22 %
des 67 enfants allaités dont la mère recevait le médicament, un taux supérieur à celui
observé chez les enfants exposés à l’amoxicilline seule14,19. Un cas d’élévation légère et
transitoire des transaminases a également été décrit14,19.
Triméthoprime-sulfaméthoxazole (TMP-SMX) DS L’enfant exclusivement allaité est exposé à 10 % à 15 % des doses de traitement
1 comprimé po bid pour 10 à 14 jours17,18
pédiatriques usuelles, et jusqu’à 30 % des doses prophylactiques de TMP. Il reçoit moins
de 3 % des doses pédiatriques de SMX13,14.
On a rapporté 2 cas d’appétit diminué chez 12 enfants allaités dont la mère recevait
du TMP-SMX14,15.
Le risque de déplacement de la bilirubine de l’albumine par le SMX chez les enfants très
jeunes (moins de deux semaines) ou prématurés est cité par certains auteurs14; néanmoins,
en raison du très faible passage du SMX dans le lait maternel, ce risque demeure théorique
et ne rend pas l’allaitement contre-indiqué si le TMP-SMX est requis. Une attention
particulière au suivi des niveaux sanguins de bilirubine pourrait être envisagée chez les
enfants hyperbilirubinémiques. Le TMP-SMX ne devrait pas être donné à une mère qui
allaite un enfant qui présente un déficit en glucose-6-phosphate déshydrogénase.
Clindamycine 300 mg po qid pour 10 à 14 jours8,17,18L’enfant exclusivement allaité est exposé au maximum à 5 % des doses pédiatriques
usuelles13,14. Un enfant allaité a présenté des selles sanguinolentes, alors que sa mère
recevait de la clindamycine et de la gentamicine par voie intraveineuse14.
Bon recul d’utilisation en pratique de cet antibiotique dans le post-partum.
Traitement par voie intraveineuse
Cloxacilline 1 à 2 g i.v. q 4-6 heures17,18Voir commentaire pour le traitement oral.
Céfazoline 1 à 2 g i.v. q 8 heures8,18L’enfant exclusivement allaité est exposé au maximum à 1 % des doses pédiatriques
usuelles12-14.
Clindamycine 600 mg i.v. q 8 heures 8Voir commentaire pour le traitement oral.
(si allergie aux pénicillines ou aux céphalosporines)8,1
Vancomycine 1 g i.v. q 12 heures (si résistance L’enfant exclusivement allaité est exposé au maximum à 5 % des doses pédiatriques
bactérienne aux autres options de traitement)8,17,18usuelles13,14. Toutefois, comme l’absorption orale de ce médicament est minime, on ne
s’attend pas à ce qu’il puisse avoir un impact chez le nourrisson.
pseudomembraneuse, sont décrits beaucoup plus rarement chez des enfants allaités
exposés à des antibiotiques à large spectre14.
Les candidoses buccales (ou muguet) pourraient également survenir, même si on
observe rarement de tels effets en pratique.
Il convient d’aviser les parents qu’ils pourraient voir un changement dans les selles de
l’enfant pendant la durée de l’antibiothérapie maternelle.
16
Bien qu’elles soient rarement rapportées,
les réactions idiosyncrasiques, comme les
réactions allergiques, peuvent également
survenir chez un enfant exposé à un antibiotique par le lait maternel. Il faut également être prudent si l’enfant allaité a déjà
présenté des réactions allergiques à un
médicament qu’on s’apprête à prescrire à sa
mère. Finalement, la faible quantité d’antibiotique présente dans le lait pourrait théo-
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riquement entraîner des faux négatifs si on
effectuait un bilan infectieux (p. ex., culture
d’urine) chez un enfant allaité dont la mère
reçoit des antibiotiques16.
Candidose mammaire
Épidémiologie
La candidose mammaire est moins étudiée
que la mastite d’origine bactérienne2. Ainsi,
sa prévalence est plus difficile à estimer. On
La mastite chez la femme qui allaite
Tableau II
Antifongiques de premier recours recommandés pour le traitement
de la candidose mammaire
Mère
Candidose superficielle (cutanée)2,8,9,21,22 :
nClotrimazole ou miconazole en application topique après chaque tétée
nNystatine en application topique après chaque tétée
nDurée de traitement : jusqu’à une semaine après la résolution des symptômes
Candidose des conduits lactifères2,8,9,21,22 :
n Débuter par un traitement topique (voir candidose superficielle)
nSi le traitement topique n’est pas efficace, ajouter le fluconazole 200 à 400 mg po pour une
dose, puis 100 à 200 mg po die
nDurée de traitement : jusqu’à une semaine après la résolution des symptômes. La durée
minimum de traitement est de 2 semaines.
nÉvaluation du passage dans le lait maternel du fluconazole : un enfant né à terme et
exclusivement allaité est exposé au maximum à 5 % à 10 % de la dose pédiatrique12,14. Pas
d’effet indésirable rapporté à ce jour à la suite d’une exposition par le lait maternel. À noter
que cette quantité n’est pas suffisante pour traiter l’enfant.
Nourrisson
Asymptomatique2,13 :
nNystatine solution orale 100 000 à 200 000 UI en badigeonnage buccal qid
Symptomatique :
nPremier recours : Nystatine solution orale 100 000 à 200 000 UI en badigeonnage buccal qid
nDeuxième recours : crème d’azole topique (clotrimazole ou miconazole) en couche mince dans
la bouche de l’enfant qid
nSi l’enfant ne répond pas au traitement topique ou encore si la mère ne répond pas au
fluconazole par voie orale, un traitement de fluconazole par voie orale chez le nourrisson
pourra être envisagé
Autre traitement : violet de gentiane (solution de 0,5 % ou 1 %)2,8,9,21,22
nApplication dans la bouche du nourrisson avec un coton-tige juste avant la tétée une seule
fois par jour pour 3 à 5 jours. Après la tétée, les aréoles devraient être violettes. Si ce n’est
pas le cas, la mère peut appliquer une quantité supplémentaire de violet de gentiane sur les
aréoles après la tétée.
nDurée de traitement usuelle de 3 à 5 jours. Ne pas dépasser 7 jours au total à cause du
potentiel d’irritation et d’ulcération de la muqueuse orale. Le traitement devrait être cessé si
ces effets indésirables se manifestaient.
nLes lèvres du nouveau-né peuvent être protégées par une mince couche de lanoline.
nLa plupart des présentations retrouvées en pharmacie contiennent une petite quantité
d’alcool pour dissoudre le médicament, ce qui pose peu de risques pour l’enfant allaité. Il est
parfois possible de se procurer le produit dissous dans un milieu aqueux seulement. Les
préparations contenant du méthanol doivent impérativement être évitées.
sait que cette infection n’est pas rare et que
l’incidence a augmenté ces dernières années,
possiblement en lien avec une utilisation
plus fréquente des antibiotiques9,20,21. Certains auteurs indiquent que près de 20 %
des femmes avec des douleurs aux mamelons ont une candidose mammaire20,21.
Chez le nouveau-né, la présentation de la candidose peut inclure des taches blanches sur les
gencives, à l’intérieur des joues, au palais et sur
la langue2,21. Le nourrisson peut refuser l’allaitement. Il est également possible que l’enfant
soit asymptomatique.
Signes et symptômes
Étiologie et voie d’entrée des agents
pathogènes
La candidose se reconnaît par les signes et
symptômes suivants chez la femme : douleur
grave aux mamelons qui peut être lancinante
et irradier dans les seins et le dos, brûlement,
prurit, rougeur et points blancs2,9,21. La douleur
est persistante et plus intense durant l’allaitement et tout de suite après l’allaitement2,21. La
présentation peut être unilatérale ou bilatérale.
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mamelons de leur mère2,22. Un milieu humide
et chaud favorise la croissance du C. albicans.
Ainsi, lors de l’allaitement, l’humidité prolongée des mamelons prédispose à la surcroissance du C. albicans2. Par la suite, il peut
coloniser la peau en superficie seulement ou
encore s’insinuer plus profondément dans
les conduits lactifères2. L’infection à levures
peut coexister avec l’infection bactérienne.
Le Candida albicans est l’agent étiologique le
plus fréquemment en cause2,9. Il fait partie de
la flore normale du vagin, du tractus gastrointestinal et de la peau2. La cavité orale de
près de 90 % des nouveau-nés est colonisée
par cet organisme; lors de l’allaitement,
les nourrissons peuvent coloniser ainsi les
Facteurs de risque
Les facteurs de risque chez la femme qui
allaite comprennent le port de compresses
d’allaitement ou de vêtements qui empêchent la peau de respirer puisque ceux-ci
rendent le milieu humide23. Également, certains auteurs font état de facteurs diététiques
tels que la consommation de produits laitiers, de sucres ou des déficits en vitamines A
ou du groupe B, en zinc ou en fer2,9,10,22. Les
femmes diabétiques sont aussi à risque si
leurs glycémies tendent à être élevées2,8,9. La
prise de certains médicaments tels les anovulants ou les corticostéroïdes est aussi un facteur prédisposant8. Un traitement antibiotique peut aussi augmenter le risque d’une
infection à levure8,10. L’intégrité de la peau
constituant la première ligne de défense
contre les levures, les lésions aux seins favorisent donc la présence de champignons2,10.
Du côté du nouveau-né, la candidose peut
découler de l’utilisation de jouets de dentition, de tétine ou de la suce2,9,10.
Traitement
Mesures non pharmacologiques
La mère devrait allaiter plus fréquemment
mais sur une plus courte période. Le lait n’a
pas besoin d’être jeté car il ne constitue pas
un risque de transmission de l’infection à
l’enfant9.
Résolution du cas clinique
Geneviève poursuivra l’allaitement et
débutera l’antibiothérapie prescrite pour
10 jours. Vous la rassurez sur l’innocuité de
cet antibiotique durant l’allaitement. Elle
reverra sa technique d’allaitement, en particulier les positionnements du nouveau-né
pour favoriser la vidange complète du sein
lors des allaitements. Vous lui suggérez
d’augmenter son apport en liquide, de se
reposer au lit et d’appliquer des compresses tièdes sur le sein pendant ses périodes
de repos. Enfin, l’utilisation d’ibuprofène
400 mg par voie orale pris aux 6 à 8 heures
au besoin pourra aider au soulagement
de la douleur en attendant l’efficacité de
l’antibiotique.
novembre 2007 vol. 54 n° 11 Québec Pharmacie
17
De la mère au nourrisson
Certains cliniciens recommandent de
laver les seins après l’allaitement avec une
solution de 250 mL d’eau à laquelle 15 mL
d’acide acétique (vinaigre) sont ajoutés puis
de laisser sécher la poitrine à l’air libre10.
Certains auteurs suggèrent aussi une diète
contenant moins d’aliments riches en sucre
si l’infection persiste9,10. Les objets entrant
en contact avec la bouche du bébé, tels les
jouets de dentition et les tétines, ainsi que
les objets entrant en contact avec les mamelons (p. ex., les parties d’un tire-lait entrant
en contact avec le mamelon ou le lait)
devraient être passés à l’eau bouillante pendant 20 minutes une fois par jour2,9,10. Il est
recommandé de ne pas réutiliser une serviette ayant été en contact avec la zone infectée sans l’avoir lavée10. Les vêtements et les
serviettes entrant en contact avec les seins
ou la bouche de l’enfant devraient être lavés
à l’eau chaude10,21.
Dans le cas contraire, il s’avère judicieux de
considérer une seconde option de traitement.
Mesures pharmacologiques
Le traitement de la candidose doit être
simultané chez la mère et le nourrisson2,8,9.
Les options de traitement de premier
recours sont présentées au tableau II. Si des
analgésiques sont nécessaires pour diminuer la douleur, la mère peut recourir à
l’acétaminophène, à l’ibuprofène ou encore
à certains autres anti-inflammatoires discutés dans la section sur le traitement de la
mastite d’origine bactérienne.
L’amélioration des signes et symptômes
de candidose devrait survenir dans les 24 à
48 heures suivant le début du traitement.
Le pharmacien joue un rôle à divers niveaux
auprès des femmes qui ont une mastite. Il
peut les conseiller sur l’utilisation des traitements antibiotiques, des analgésiques et des
méthodes non pharmacologiques pour le
soulagement de la douleur. Il peut également les rassurer quant à l’innocuité de la
médication durant l’allaitement. Les femmes présentant des signes et symptômes
suggestifs de mastite seront adressées à un
médecin afin de ne pas retarder le traitement, s’il y a lieu. Enfin, on recommandera
généralement de poursuivre l’allaitement
en présence de ces infections. n
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7.Michie C, Lockie F, Lynn W. The challenge of mastitis. Arch Dis Child 2003; 88(9): 818-21.
Questions de formation continue
3) Parmi les énoncés suivants concernant la mastite
d’origine bactérienne, lequel est faux ?
A. La cloxacilline et la céphalexine sont les traitements
antibiotiques de premier recours.
B. Les signes et symptômes typiques incluent des symptômes
pseudogrippaux, de la fièvre et des signes et symptômes
locaux d’inflammation (rougeur, enflure, chaleur, douleur).
C. Un bon positionnement du bébé lors de l’allaitement et la
vidange complète des seins sont des mesures importantes
pour la prévention de la mastite.
D. Le Staphylococcus aureus est l’agent étiologique le plus
fréquent.
E. Comme le lait peut contenir des bactéries, il devrait être
jeté dans les premiers jours de traitement pour éviter de
contaminer le nourrisson.
4) Parmi les énoncés suivants concernant la candidose
mammaire, lequel est faux ?
A. La mère et le nourrisson doivent être traités simultanément (pour toute la durée du traitement).
B. La nystatine en solution orale est le traitement de premier
recours pour le nourrisson.
C. La douleur se caractérise par un brûlement ou un prurit
pendant toute la tétée, pouvant parfois irradier dans le
sein et jusque dans le dos.
D. Si un traitement de violet de gentiane est utilisé, il devrait
être poursuivi jusqu’à sept jours suivant la résolution des
symptômes.
E. Si la mère est traitée par du fluconazole, le traitement
devrait être poursuivi au moins jusqu’à 7 jours suivant
l’arrêt des symptômes.
Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 74 
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Québec Pharmacie vol. 54 n° 11 novembre 2007
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