Allemagne-Belgique 1914-2014 : quelle histoire !

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Revue des Questions Scientifiques, 2015, 186 (1) : 17-25
Allemagne-Belgique 1914-2014 :
quelle histoire !
Manfred Peters
Université de Namur
[email protected]
Le titre de cette communication introductive est plein de sous-entendus.
Le « Quelle histoire » est suivi non pas d’un point d’interrogation, mais d’un
point d’exclamation. C’est pour souligner le caractère complexe et parfois
contradictoire de la relation entre les deux voisins.
Le Première Guerre mondiale : un point de rupture
La Première Guerre mondiale, de 1914 à 1918, a bouleversé l’histoire de
notre pays et du monde entier. Nonobstant le décès des derniers témoins humains, cette guerre demeure gravée dans la mémoire collective. Tant en Belgique que dans les autres pays européens, nombre de manifestations
commémoratives étaient programmées.
En Allemagne, 2014 a été une année de commémoration pour trois raisons. Elle marque non seulement le centenaire de la Première Guerre mondiale, mais aussi les septante-cinq ans du début de la Deuxième Guerre
mondiale et le vingt-cinquième anniversaire de la chute du mur de Berlin.
Comme le montre Carlo Lejeune1 dans un article intitulé « Les mémoires
historiques belges ne dialoguent pas. Belges germanophones, flamands, wal1.
Coordinateur du projet de recherche d’histoire régionale « Grenzerfahrungen ».
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lons – des traumatismes incompris »2, la Belgique est considérée comme l’un
des rares pays d’Europe où c’est la Première d’avantage que la Seconde Guerre
mondiale qui, dans la mémoire collective, constitue un grand traumatisme.
Avant 1914, la Belgique et l’Allemagne avaient connu des phases
d’échanges intensifs, les Belges considérant leur grand voisin comme le pays
des poètes et des penseurs.3 L’invasion du royaume par les troupes allemandes4
mit un terme à cette cohabitation harmonieuse. Le pillage du pays et le massacre de plus de six mille civils, notamment à Andenne et à Dinant, créèrent
une culture de haine.
Les historiens de la Grande Guerre ne cessent de souligner le caractère
inaugural de ce conflit, véritable matrice du 20e siècle et de ses violences extrêmes. Les pratiques de violence sur les champs de bataille ont dépassé toutes
les limites, dès 1914 et jusqu’à 1918. Le prix attaché à la vie humaine s’est effondré au sein de toutes les sociétés engagées dans le conflit, entraînant un
processus de « brutalisation » auquel même les civils n’échapperont pas et dont
les conséquences ont largement dépassé la fin du conflit. Le bilan est épouvantable : la Grande Guerre a fait près de dix millions de morts.
La Première Guerre mondiale a laissé des traces qui diffèrent selon les
trois Communautés culturelles de Belgique. Les occupants allemands avaient
essayé d’obtenir la collaboration des Flamands, en leur accordant des droits
culturels5 et en créant un « Conseil de Flandre » pour représenter leurs intérêts, ce qui a pu créer une certaine sympathie. En Wallonie, le sentiment antiallemand était particulièrement fort. Quant à l’actuelle Communauté
germanophone, la Première Guerre Mondiale a eu comme conséquence un
2.
3.
4.
5.
Dans STANGERLIN, Katrin / Förster Stephan (éd.), La communauté germanophone de
Belgique (2006-2014), Bruxelles, La Charte, 2014, p. 10-34.
« Das Land der Dichter und Denker » fait partie des stéréotypes. Carlo Lejeune (op.
cit.p.16) distingue camps dans la politique belge de l’époque : « Les couches supérieures
des milieux catholiques ne cachaient pas leur admiration pour l’Empire allemand,
dynamique, en pleine expansion économique et fortement représenté en Belgique. Les
libéraux francophones et les socialistes étaient quant à eux tournés vers la France ».
Dans son édition du 5 août 1914 (reproduite en facsimilé dans l’édition du 27 février
2014, le journal LE SOIR écrivit : « Il s’agit du choc sinon de deux civilisations, du
moins de la lutte entre deux mentalités : l’une, la mentalité des dirigeants allemands qui
ne reconnaît que la force, la brutalité ; l’autre, celle des Latins et des Anglais, qui a
comme idéal la justice et la liberté. » Les Flamands ont dû apprécier !
C’est ainsi que, dès 1917, les Flamands purent étudier, pour la première fois dans
l’histoire, dans leur langue maternelle à l’Université de Gand.
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changement de nationalité. Le Traité de Versailles en cédait la souveraineté à
la Belgique.6
En ce qui concerne les commémorations, il y a, dès lors, des différences
énormes entre les trois Communautés culturelles de Belgique. D’après l’historienne Laurence Van Ypersele de l’Université Catholique de Louvain, en Belgique néerlandophone et francophone,7 l’événement se décline désormais en
une double lecture communautaire, avec une vision nationaliste du conflit au
sud et son interprétation régionale en Flandre. Par ailleurs, explique l’historienne, la Flandre instrumentalise la Grande Guerre : « Elle ne s’en cache pas
et le fait sans état d’âme: le but touristique est de valoriser le Westhoek où 50
nations se sont battues sur le front. L’ambition est de faire connaître la Flandre
en tant que telle et non comme entité fédérée. »
Comme le souligne Carlo Lejeune8, « en Communauté germanophone,
cet anniversaire était et est peu présent dans la mémoire communicative et
culturelle. Ici, l’attention se focalise déjà davantage sur l’année 2020. C’est
cent ans plus tôt, en 1920, qu’est entré vigueur le Traité de Versailles rattachant cette région à la Belgique après qu’elle ait appartenu pendant plus de
cent ans à la Prusse et/ou à l’Empire allemand. »
La République de Weimar et le Troisième Reich
La République de Weimar est née de la Première Guerre mondiale et elle
en fut stigmatisée jusqu’à sa fin. Ses leaders furent soupçonnés d’avoir « poignardé dans le dos »9 l’armée non défaite et d’avoir signé inutilement le « traité
de la honte », celui de Versailles, en 1949. Les foyers d’anciens soldats, appuyés
par les partis de droite et la Reichswehr, créèrent d’abord l’ordre en combattant
la gauche révolutionnaire, puis ils contribuèrent à déstabiliser la République
jusqu’à l’avènement des nazis.
6.
7.
8.
9.
La consultation populaire prévue par le Traité de Versailles ne fut ni libre, ni secrète.
Dans l’histoire on parle de la petite farce belge.
Voir l’interview qu’elle a accordée, le 31 janvier 2014, à la R.T.B.F.
Op. cit., p. 15.
Le mythe du coup de poignard dans le dos (ou Dolchstoßlegende en allemand) est une
légende inventée par les militaires allemands au lendemain de la première guerre
mondiale, ces derniers refusant de porter la responsabilité de la défaite.
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revue des questions scientifiques
Après la campagne des 18 jours et la reddition de l’armée belge, le pays se
trouve tiraillé entre collaboration et résistance.
José Gotovitch a décrit succinctement la situation vécue en Belgique durant l’occupation allemande de 1940 à 1945 et met en évidence le fossé qui
sépare Wallons et Flamands : « La Résistance ne fut pas un phénomène spécifiquement wallon, ni la collaboration exclusivement flamande. Ces deux clichés sont également faux. Mais tout concourt à montrer qu’une attitude, un
comportement différent se révéla au Nord et au Sud du pays face à l’occupation. En Flandre, la collaboration fut le fait d’un parti disposant au départ
d’une réelle base populaire. Mais comme en 1914-1918, elle put apparaître à
certains comme un moyen d’assurer la réalisation d’aspirations nationalistes
ancrées dans la tradition du mouvement flamand. À aucun moment, par
contre, en Wallonie, cette collaboration ne put prendre un contour effectivement wallon, s’appuyer sur une réalité nationaliste. »
La collaboration est un concept juridique qui, en Belgique, est qualifié
par le Code pénal. Les articles, 113, 115, 118bis et 121bis abordent respectivement la collaboration militaire, la collaboration économique, la collaboration
politique et intellectuelle et les dénonciateurs. À l’issue de la guerre, environ
quatre-vingt mille citoyens belges ont été jugés coupables de collaboration
avec l’ennemi. La collaboration militaire et politique tient une place centrale
en Belgique avec des mouvements politiques tels que Rex, le VNV ou des
divisions militaires comme la division SS Wallonie et la division SS Langemarck (flamande). La collaboration économique n’est cependant pas en reste
mais ses frontières sont plus difficiles à délimiter. De nombreuses entreprises
ont accepté de travailler pour l’occupant allemand, c’était probablement
moins par sympathie pour l’idéologie nazie que pour maintenir leur compétitivité dans cette Europe en crise. Au côté d’une collaboration franche, on
retrouve ainsi une politique du moindre mal, les premiers ne se posèrent bien
vite plus de question, les seconds, tout en continuant parfois de soutenir le
Gouvernement belge en exil, se compromirent peu ou prou avec l’occupant.
Sur un plan plus culturel, la collaboration fut souvent le fait d’individus dans
la presse écrite et parlée ou d’entreprise ayant fait le choix du moindre mal.
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En 1995, j’ai été invité à faire, à Berlin, un exposé sur l’attitude des chrétiens belges durant l’occupation nazie.10 J’y ai évoqué une des grandes figures
de l’Université de Namur, le Père Camille Joset s.j.11, héros de la résistance et
éditeur du journal clandestin La voix des Belges. Il est remarquable que ce résistant, victime de la Gestapo, ait créé dans son université un département
d’allemand. N’est-ce pas un signe d’espoir ?
Camille-Jean Joset, une des figures marquantes de la Résistance
Quid de la langue du voisin ?
Les liens de bon voisinage impliquent la maîtrise de la langue du voisin.
Qu’en est-il de l’apprentissage de l’allemand en Belgique, du français et du
néerlandais en Allemagne ?
Le néerlandais n’est guère présent dans les programmes scolaires allemands. À titre d’exemple, dans le land de Berlin, seule l’école Gail S. Halverson offre le néerlandais comme cours à option (de la 7e à la 10e classe). Après
quatre ans, les élèves atteignent le niveau B1. Pendant ces quatre années, il y
a un échange avec une classe néerlandaise ou belge.
En ce qui concerne la situation du français en Allemagne, il convient de
citer les lycées bilingues.12 Pour se faire une idée de l’importance de l’enseignement bilingue dans les filières franco-allemandes, il faut être conscient
10. Voir : PETERS, Manfred: Zwischen Kollaboration und Widerstand. Die Haltung
der belgischen Katholiken gegenüber dem Faschismus. In: GUSKE, Hubertus:
Der Widerstand von Christen und Kirchen in Europa gegen Hitlerfaschismus
und Krieg, Berlin, ÖFEK, 1995, 67-82.
11. Voir WYNANTS, Paul, Le Père Camille-Jean Joset (1912-1992). Notice biographique
publiée à l’occasion du soixantième anniversaire de la fondation de l’Institut Moretus
Plantin, Namur, Presses Universitaires, 2010, 137 p.
12. Voir Olivier MENTZ, L’enseignement bilingue en Allemagne – la situation du français
langue cible. In : Synergies Pays germanophones, 1 (2008) 41-50.
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que l’origine de cette forme d’enseignement remonte au traité franco-allemand de 1963. Ce traité stipula la promotion (et la quasi-égalité en valeur) de
la langue du partenaire, c’est-à-dire de l’allemand en France et du français en
Allemagne.
Deux conséquences de cette promotion ont été la création de l’Office
Franco-Allemand pour la Jeunesse (OFAJ), et l’établissement de filières bilingues franco-allemandes dans des lycées allemands et français. La première
filière a été établie à Singen en 1969. Depuis, le nombre d’établissements scolaires ayant une filière bilingue avec le français comme langue cible a considérablement augmenté. En ce qui concerne le développement des filières
bilingues franco-allemandes, leur installation est marquée par deux phases
majeures : au début des années 1970, l’on observe environ une dizaine d’établissements scolaires qui ont créé une telle filière (la plupart en Rhénanie du
Nord Westphalie). Une deuxième phase importante peut être constatée entre
1988 et 1999 ; dans cette période, 42 établissements scolaires ont introduits
des filières bilingues franco-allemandes.
Il y a aujourd’hui – toutes formes d’établissements scolaires secondaires
confondues – presque une centaine d’établissements dans toute l’Allemagne
qui renferment une réelle filière bilingue franco-allemande.
En Wallonie, tout le monde s’accorde à dire que la connaissance des langues étrangères est capitale pour l’avenir de la jeunesse. Malheureusement, en
ce qui concerne l’allemand, seuls environ 2,7% des écoliers choisissent cette
langue à l’école (contre plus de 15% en Flandre et en France). C’est d’autant
plus étonnant que l’allemand est la langue de notre plus grand voisin et du
premier partenaire économique.13
Dans une interview qu’il a accordée, en date du 3 décembre 2002, à Pauline Antoine, M. Michel Hahn, ancien président de l’Union Wallonne des
Entreprises, a déclaré : « Si les entreprises disposaient d’un personnel mieux
formé linguistiquement, elles pourraient intensifier leurs relations commerciales avec la République Fédérale et trouver de nouveaux marchés. Les exportations wallonnes vers l’Allemagne pourraient être fortement augmentées si
13. C’est pour cette raison que l’Association pour la promotion de l’allemand en Wallonie a
lancé, en 1999, un vaste projet pilote intitulé « L’allemand en Wallonie », avec un budget
d’un million d’euros. Angela Merkel en personne a manifesté son intérêt pour cette
opération modèle qui, vu les difficultés financières, a pris un retard considérable.
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les Wallons parlaient l’allemand valablement. En 2000, 30% de nos exportations sont allées vers la France, et 16% vers l’Allemagne. Si nous avions le
même taux d’exportation vers l’Allemagne que vers la France, cela représenterait environ 3,75 milliards d’euros en plus, soit environ 30.000 emplois. »14
« Un emploi belge sur six dépend du marché allemand », titrait naguère
La Libre Belgique (11 mars 1988). Dans l’article, il est question du manque de
personnes maîtrisant la langue allemande : « Ce manque est énorme surtout
en matière commerciale, sans parler évidemment de l’allemand courant.
Certes, […] beaucoup en Belgique pensent bien parler allemand, mais
lorsqu’ils se mêlent de contacts épistolaires avec des firmes allemandes, c’est
souvent la catastrophe. C’est alors qu’apparaissent de profondes lacunes.
D’après des statistiques de l’ONEM, 32% des entreprises wallonnes utilisent l’allemand dans leurs échanges. D’après l’étude de Pauline Antoine, ce
chiffre est sous-estimé. Plus de 70% des entreprises wallonnes interrogées déclarent utiliser l’allemand. Or, moins de 3% des élèves apprennent cette
langue. C’est ce qui explique le manque dont il est question ci-dessus.
Bref, d’après les promoteurs du projet pilote, une action d’envergure
s’impose. La promotion de l’allemand devrait être une priorité du Plan
Marshal 4. Certes, nous savons que les moyens financiers sont limités, mais
une partie importante des moyens disponibles devraient y être consacrées
dans les années à venir.
Des gestes de réconciliation
Si la période de l’immédiate après-guerre a été régulièrement visitée par
les chercheurs, en revanche, l’histoire des relations bilatérales qu’ont entretenu
la Belgique et l’Allemagne, dans ce contexte de reconstruction et de guerre
froide, n’a guère été très « fréquentée », pour reprendre l’expression de Christophe Brüll, dont la thèse consacrée à « la Belgique dans l’Allemagne d’aprèsguerre » a fait l’objet d’une publication en 2009 15.
14. Pauline ANTOINE,L a place de l’allemand dans la vie économique de la Région wallonne.
Mémoire de fin d’études de la Haute Ecole de la Province de Namur, 2003, p.9.
15. Voir Christophe BRÜLL., Belgien im Nachkriegsdeutschland. Besatzung, Annäherung, Ausgleich (1944-1958), Essen, Verlag. Klartext.
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Ces dernières années, les gestes de réconciliation se sont multipliés. Je
n’en citerai que quelques- uns parmi de nombreuses autres. En 1989, j’ai pu
organiser à Namur une importante « Semaine allemande » avec plusieurs dizaines de manifestations culturelles et économiques. Certes, cela n’a pas été
sans problèmes de faire défiler d’orchestre de la Bundeswehr dans les rues de
la ville, mais finalement même les Associations d’anciens combattants l’ont
accepté.
Quelques années plus tard, le 6 mai 2001, la Ville de Dinant où depuis le
massacre de 674 civils16, le 23 août 1914, plus aucun drapeau allemand n’avait
flotté, a fait une cérémonie de réconciliation. C’est l’œuvre de l’actuel bourgmestre Richard Fourneau et de l’Ambassadeur d’Allemagne, Peter von Butler.
Notre collègue Daniel Bertrand, qui était à l’époque principal du Collège de
Bellevue, fait partie des artisans de cette cérémonie.17
En 2012, la Katholike Universiteit Leuven a organisé une « Année Allemande ».18 Or, aux premières heures du 19 août 1914, des combats eurent lieu
à Louvain et la magnifique bibliothèque universitaire fut la proie des flammes.
À cela s’ajoute l’appel « au monde culturel » lancé en octobre 1914 par 93 intellectuels allemands, dont plusieurs Prix Nobel, justifiant la politique guerrière
et les exactions. Le geste de la K.U.L. est d’autant plus méritant.
Et demain ?
L’Allemagne exerce sur la Belgique une grande fascination, tout en éveillant la suspicion ou la jalousie. Ainsi, en novembre 201319, le périodique LA
LUCARNE titrait « Le miracle allemand : un mirage ? » Le journaliste mettait en exergue les points positifs : avec moins de 6% le chômage est un de plus
bas. Même celui des jeunes de moins de 25 ans ne dépasse les 8%, alors que
dans des pays comme l’Espagne, l’Italie ou le Portugal, il s’élève à plus de
30%. Sa main d’œuvre est très bien formée, notamment grâce au système
dual. Il y a un gigantesque excédent commercial et son modèle de cogestion
est exemplaire. Mais ce même journaliste mettait au pilori les revers : la pré16. Par ailleurs, plus d’un millier d’habitations furent incendiées.
17. Certains politiques - notamment l’opposition socialiste - ont préféré boycotter les
cérémonies, un reflet de la polémique qui continue à diviser les Dinantais.
18. Sous le thème “Wissenschaftsdiplomatie zwischen Nachbarn”.
19. N° 432, 46è année
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carité croissante, un grand nombre de travailleurs pauvres et les effets nocifs
du modèle allemand sur les autres pays européens.
Dans un entretien avec la Fondation Schuman20, Andreas Schockenhoff, vice-président du groupe CDU/CSU au Bundestag a dit : « L’Allemagne
doit s’investir davantage dans la ré­solution de crises et de conflits – pas seulement quand il s’agit de problématiques diplomatiques, humani­taires, économiques et de politique de développement, mais aussi quand il s’agit du
renforcement de la poli­tique de sécurité et de défense commune. Mais avoir
de plus grandes responsabilités nécessite également des représentations plus
claires sur les plans concep­tuel et stratégique. Pour cette raison, mon groupe
parlementaire se penchera plus particulièrement sur les moyens politiques,
humanitaires, économiques et de développement pour surmonter les défis du
conti­nent voisin africain. Mais il est aussi nécessaire que nous parvenions au
niveau européen à mettre enfin en place un dialogue stratégique pour atteindre un accord politique afin d’identifier ensemble les dangers qui se présentent à nous et de travailler ensemble pour y ré­pondre et garantir la sûreté
de l’espace européen. »
2014 a été riche en commémorations. Pourtant, toutes les cérémonies du
souvenir, tous les symboles et slogans pacifistes seront de peu d’utilité pour
redonner du sens à une Europe déboussolée. Les jeunes générations n’ont pas
conscience que c’est la construction européenne des soixante dernières années
qui, à l’exception de la tragédie balkanique des années 1990, nous permet de
vivre dans des conditions bien meilleures que nos parents et grands-parents.
L’Union européenne a réussi en tant que projet de réconciliation. Elle n’a pas
convaincu comme projet social et économique. Et pourtant, c’est seulement
dans le cadre européen que les relations belgo-allemandes pourront s’épanouir pleinement.
20. Diffusé le 17 février 2014
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