23
L’insuline pulmonaire :
L’insuline pulmonaire :
état des lieux
y Jay Skyler
desséchée par nébulisation administrée
via un inhalateur (Exubera, Pfizer et
Nektar) – récemment approuvée
aussi bien par la FDA américaine
que par l’Agence européenne
pour l’évaluation des médicaments
attendue pour le milieu de 2006
des systèmes qui utilisent une
formule liquide (Novo Nordisk et
Aradigm ; Kos Pharmaceuticals)
une nouvelle préparation de poudre
sèche, baptisée ‘technosphères’, dans
lesquelles l’insuline est mélangée
à une petite molécule organique
et transformée en microsphères
d’un diamètre d’environ 2 mm ;
elle facilite une absorption très
rapide de l’insuline par le poumon
(MannKind Biopharmaceuticals)
d’autres systèmes qui utilisent une
préparation d’insuline en poudre
sèche (Eli Lilly et Alkermes).
Une action rapide
La plupart de ces préparations d’insuline
inhalée ont un délai d’action rapide. Le délai
d’action est similaire et la durée de l’action
estgèrement supérieure aux analogues
Les premières tentatives visant à passer par les poumons pour
administrer de l’insuline datent des années 1920. Mais les
sprays permettant d’administrer l’insuline via les poumons
de façon cliniquement viable n’ont pas été développés avant
les années 1990. Les poumons offrent une vaste surface
de 100 à 140 m2 (environ la taille d’un terrain de tennis)
pour l’absorption de l’insuline inhalée. En outre, la très fi ne
barrière alvéolocapillaire située à la surface des poumons
permet une rapide diffusion de l’insuline dans le sang,
similaire – voire plus rapide encore – à celle observée avec
les analogues de l’insuline à action rapide. Jay Skyler nous
informe des derniers progrès de cette alternative potentielle à
l’insuline administrée par voie sous-cutanée.
>>
La majeure partie de la dose d’insuline
administrée à partir d’un spray n’atteint
jamais le poumon ;néralement, environ
15 % d’une dose totale d’insuline inhalée
atteint le sang. Toutefois, il est important
de remarquer que la quantid’insuline
absorbée par rapport à la quantité d’insuline
inhalée varie entre 15 % et 30 % d’une
dose à l’autre, y compris pour uneme
personne, et que cette proportion est
similaire à celle observée avec l’insuline
humaine par injection sous-cutanée ou avec
les analogues de l’insuline à action rapide.
Plusieurs systèmes d’insuline inhalée sont
actuellement à des stades avancés de
veloppement clinique. Parmi ceux-ci :
une formule de poudre d’insuline
Pratique clinique
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
(
)
(
)
24
24
Pratique clinique
de l’insuline à action rapide, comme
l’insuline lispro ou l’insuline aspart – mais
inférieure à l’insuline humaine classique.
1
Etant donce délai d’action, l’insuline
inhalée peut remplacer une injection
avant le repas. Toutefois, le remplacement
de l’insuline basale par une préparation
inhalée requiert que la personne continue
à effectuer des injections d’insuline.
La préparation d’insuline sous la forme de
technosphères a une action très difrente
avec unlai d’action beaucoup plus rapide
et une durée d’action plus courte. Elle
pourrait s’avérer idéale pour supprimer
rapidement la production de glucose par le
foie qui a un effet important sur la glycémie
après les repas chez les personnes atteintes
de diabète. Linsuline en technosphères est
actuellement au stade d’essais de Phase III.
L’insuline inhalée peut
être une alternative
efficace à l’insuline sous-
cutanée avant les repas.
Remplacer les injections
Les premières études cliniques sur l’insuline
inhalée ont cherché à déterminer si l’insuline
inhalée pouvait remplacer les injections
d’insuline avant les repas. Ces courtes
études sur 12 semaines ont conclu que,
chez les personnes atteintes de diabète
de type 1 et de type 2, les injections
d’insuline humaine sous-cutanées avant
les repas pouvaient être efficacement
remplacées par l’insuline inhalée.
2,3
Des études ultérieures réalisées sur une
plus longue période (24 semaines), tant
chez des personnes atteintes de diabète
de type 1 que de type 2, ont démontré que
l’insuline inhalée pouvait être utilisée au lieu
de l’insuline sous-cutanée avant les repas et
permettait d’atteindre des taux de contrôle
glycémique équivalents – mesurés soit en
taux d’HbA
1c
soit en taux de glycémie.
4,5
Alors que, dans toutes ces études, il était
nécessaire d’administrer l’insuline basale
par injection, leur nombre était réduit
chez les personnes qui prenaient de
l’insuline inhalée. Bien que les préparations
inhalées offraient à ces personnes un
plus grand confort et une plus grande
satisfaction,
6
aucun autre avantage unique
de l’insuline inhalée n’a édémontré
dans les études celle-ci remplaçait
simplement les injections avant les repas.
Toutefois, une exception a été mise en
évidence dans une étude sur 24 semaines
impliquant des personnes atteintes de
diabète de type 2. Les personnes prenant
de l’insuline inhalée avant les repas plus
des injections d’insuline isophane ont
pris moins de poids que les personnes
qui s’administraient des injections
d’insuline humaine avant les repas plus des
injections d’insuline isophane (1,5 kg).
5
Un meilleur contrôle
Bien que le remplacement des injections
d’insuline par de l’insuline inhalée permettait
un contrôle glycémique seulement
équivalent par rapport à l’insuline injectée,
un meilleur contrôle glycémique a été
observé dans des études impliquant des
personnes atteintes de diabète de type 2
avec une glycémie mal contrôlée.
7,8
Chez des personnes atteintes de diabète de
type 2 ayant un mauvais contrôle glycémique
et prenant uniquement desdicaments
oraux ou suivant un régime accompagné
d’exercices physiques, il a été démontré
qu’un bon contrôle glycémique pouvait être
atteint grâce à l’ajout de ou le remplacement
par de l’insuline inhalée.
7,8
Par rapport à un
traitement continu par desdicaments
oraux, une baisse des taux d’HbA
1c
sur 12
semaines a éobservée lorsque l’insuline
inhalée remplaçait les médicaments oraux.
Une baisse encore plus importante de
l’HbA
1c
a été observée lorsque l’insuline
inhalée était combinée aux médicaments
oraux.
7
Dans ces études, un plus grand
pourcentage de personnes prenant de
l’insuline inhalée atteignait les objectifs
du traitement en termes d’HbA
1c
, par
rapport aux personnes s’injectant de
l’insuline par voie sous-cutanée.
Un plus grand
pourcentage de personnes
prenant de l’insuline
inhalée atteignait les
objectifs du traitement
en termes d’HbA1c.
Inquiétudes relatives à la sûreté
Dans toute nouvelle approche thérapeutique,
la sûreté est une question essentielle.
Des études cliniques sur l’insuline inhalée
suggèrent que l’administration par voie
pulmonaire est bien tolérée et est tout aussi
sûre que l’insuline par voie sous-cutanée.
9
Le seul effet secondaire significatif est la
toux. Celle-ci estnéralement légère ou
modérée, s’atténue avec le temps et n’est
pas associée à une baisse de la fonction
pulmonaire. Les deux principales inquiétudes
relatives à la sûreté de l’insuline inhalée sont
ses effets sur les poumons et la formation
potentielle d’anticorps qui pourraient
interférer avec l’action de l’insuline et/ou
entraîner d’autres effets secondaires.
Fonction pulmonaire
La plupart des données disponibles relatives
à la sûreté concernent l’Exubera. La FDA
a conclu que les personnes prenant de
l’Exubera souffrent d’une baisse de la
fonction pulmonaire – mesurée par volume
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
25
Pratique clinique
y
Jay Skyler
Jay Skyler
Jay Skyler est professeur en médicine,
Jay Skyler est professeur en médicine,
Jay Skyler est professeur en médicine,
pédiatrie et psychologie au sein de la Division
pédiatrie et psychologie au sein de la Division
pédiatrie et psychologie au sein de la Division
Endocrinologie, Diabète et Métabolisme de
Endocrinologie, Diabète et Métabolisme de
Endocrinologie, Diabète et Métabolisme de
l’Université de Miami, USA. Il est Directeur
l’Université de Miami, USA. Il est Directeur
l’Université de Miami, USA. Il est Directeur
associé pour les programmes académiques
associé pour les programmes académiques
associé pour les programmes académiques
auprès du Diabetes Research Institute. Il a
auprès du Diabetes Research Institute. Il a
auprès du Diabetes Research Institute. Il a
été président de l’Association américaine du
été président de l’Association américaine du
été président de l’Association américaine du
diabète et Vice-président de la FID.
diabète et Vice-président de la FID.
diabète et Vice-président de la FID.
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Inhaled Insulin Phase III Type 1 Diabetes Study
Inhaled Insulin Phase III Type 1 Diabetes Study
Group. Use of inhaled insulin in a basal/bolus insulin
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regimen in patients with type 1 diabetes: a 6-month,
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randomized, comparative trial.
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and safety of inhaled insulin (Exubera) compared
and safety of inhaled insulin (Exubera) compared
with subcutaneous insulin therapy in patients with
with subcutaneous insulin therapy in patients with
type 2 diabetes: results of a 6-month, randomized,
type 2 diabetes: results of a 6-month, randomized,
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Patient satisfaction and glycemic control after 1 year
Patient satisfaction and glycemic control after 1 year
with inhaled insulin (Exubera) in patients with type 1
with inhaled insulin (Exubera) in patients with type 1
or type 2 diabetes.
or type 2 diabetes.
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7
Rosenstock J, Zinman B, Murphy LJ, et al. Inhaled
Rosenstock J, Zinman B, Murphy LJ, et al. Inhaled
insulin improves glycemic control when substituted
insulin improves glycemic control when substituted
for or added to oral combination therapy in type 2
for or added to oral combination therapy in type 2
diabetes: a randomized, controlled trial.
diabetes: a randomized, controlled trial.
Ann Intern
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Exubera Phase III Study Group. Efficacy of inhaled
Exubera Phase III Study Group. Efficacy of inhaled
insulin in patients with type 2 diabetes not controlled
insulin in patients with type 2 diabetes not controlled
with diet and exercise: a 12-week, randomized,
with diet and exercise: a 12-week, randomized,
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in patients with type 1 or type 2 diabetes. An
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subcutaneous insulin: a prospective randomized
subcutaneous insulin: a prospective randomized
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pharmacodynamic study.
Diabetes Care
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2161-9.
2161-9.
d’expiration fore ou par capacité de
diffusion. Toutefois, cette baisse s’est avérée
non progressive et certaines données
suggèrent qu’elle pourrait être réversible.
9
Anticorps anti-insuline
Certaines études ontmontré que, par
rapport aux personnes s’injectant de l’insuline,
les personnes atteintes de diabète de type 1
traitées par insuline inhalée veloppaient
des anticorps anti-insuline. La hausse des
anticorps anti-insuline était plus faible chez
les personnes atteintes de diabète de type 2
traitées par insuline inhalée. Cette variation
n’a pas éobservée chez les personnes
atteintes de diabète de type 2 qui n’avaient
commenaucune forme d’insulinothérapie.
10
Ni les taux d’HbA
1c
ni l’incidence de
l’hypoglycémie n’étaient influencés par
les anticorps anti-insuline, à la fois pour le
diabète de type 1 et le diabète de type 2. Bien
que, dans une autre étude, une hausse des
anticorps anti-insuline ait été observée sur
uneriode de 24 semaines, ces anticorps
n’avaient aucun effet sur l’action de l’insuline.
11
Asthme et tabagisme
Les chercheurs ont découvert que
l’asthme ou une affection pulmonaire
chronique réduisait l’absorption d’insuline
inhalée et que le tabagisme accentuait
cet effet. Il a donc été recommandé de
ne pas utiliser l’insuline inhalée chez les
fumeurs ou les personnes atteintes d’une
condition pulmonaire préexistante.
Il faut cependant noter que les effets
secondaires potentiels à long terme
– après de nombreuses années d’utilisation
de l’insuline inhaléene peuvent pas
être évalués sur la base des données
actuellement disponibles. En outre, il faut
tenir compte du fait que, indépendamment
de l’insuline inhalée, le diabète lui-même
a des effets sur les poumons.
Conclusion
Les préparations d’insuline inhalée sont en
cours de développement clinique et devraient
être disponibles pour usage clinique dans le
courant de cette année. Jusqu’à présent, les
études ont démontré que l’insuline inhalée
pouvait être utilisée pour l’administration
d’insuline avant les repas chez les personnes
atteintes de diabète de type 1 et de type 2.
Son utilisation peut faciliter l’introduction
précoce de l’insulinothérapie chez les
personnes qui ont une aversion pour les
injections d’insuline. Elle améliore donc
potentiellement le contrôle glycémique.
Il faut noter qu’aucun problème dereté
spécifique associé à l’insuline inhalée n’a
été identifié, bien que la sûreté à long
terme de cette forme d’insuline reste
un sujet de préoccupation. Evidemment,
comme pour toute préparation d’insuline,
une hypoglycémie peut se produire et
toutes les personnes atteintes de diabète
et les membres de leur famille doivent
apprendre à l’identifier, à la traiter et à
prendre les mesures nécessaires pour
l’éviter. Des études de cohorte sur la
satisfaction et la qualide viemontrent
que les personnes concernées préfèrent
l’insuline inhalée aux injections.
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
Mars 2006 Volume 51 Numéro 1
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