Dans le combat médiatique qui les
oppose aux multinationales, on aurait pu
croire les ONG vaincues d'avance.
Comment une association pourrait-elle
parvenir à sensibiliser le public aux
problèmes sociaux et environnemen-
taux, face au déluge de moyens publici-
taires et marketing que mobilisent les
entreprises pour défendre leur image de
marque, leur positionnement, et trans-
mettre leurs valeurs ou leur vision des
choses ? Dans ce combat de David
contre Goliath, des ONG ont trouvé
leur arme : le "Culture Jamming".
Résolument ancré dans la contestation,
le Culture Jamming détourne les
moyens de communication classiques de
l'entreprise-cible pour mieux les retour-
ner contre elle : les activistes attaquent
les entreprises en ridiculisant leurs
précieux logos et en modifiant le sens de
leur message. Constitution de sites web
pirates, fausses publicités, campagnes
d'affichage détournées, rédaction de
faux catalogues… toutes les techniques
sont bonnes pour mettre en lumière les
pratiques jugées néfastes de l'entreprise.
En 1994 Greenpeace a ouvert le feu
avec sa campagne contre l'utilisation de
systèmes de réfrigération avec CFC par
la chaîne anglaise de supermarchés
Tesco : des camions de livraison dispo-
sés autour des magasins accueillaient les
clients avec un logo à peine modifié dans
la forme mais qui disait juste "Fiasco".
Mais avec Internet, le Culture Jamming a
atteint ses lettres de noblesse. En
exploitant le vide juridique qui règne en
matière de noms de domaines et la faci-
lité de diffusion de l'information sur le
web, ce mode de communication déca-
lé parasite la communication institution-
nelle de l'entreprise par la création de
sites alternatifs portant le nom de la
marque visée, à l'insu de celle-ci qui est
mise devant le fait accompli. Coca-Cola
et le menuisier Lapeyre se sont ainsi vus
dotés par Greenpeace de sites dénon-
çant les impacts écologiques de leurs
activités (cokespotlight.org et
lapeyre.org).
Aux racines de ce mouvement : The
Media Foundation, une organisation
canadienne qui lutte contre la censure
des publicités anti-commerciales dans
les médias (elle publie notamment le
magazine Adbusters, a initié la Journée