Cependant, on commence à soupçonner que ces terres nouvelles ne sont pas l'Asie. En
1504 et 1505, le Florentin Amerigo Vespucci, qui a participé à plusieurs des expéditions
vers l'ouest, publie des lettres où il prétend que l'on se trouve en présence d'un « nouveau
monde ». Et en 1507, un typographe de Saint-Dié, Martin Waldseemüller, imagine, dans
la préface d'une Cosmographie, de donner au nouveau continent le nom d'America.
Aucun doute n'est plus possible après le voyage de Balboa (1513), qui, du haut des
montagnes de Panamá, découvre un vaste océan, et après celui du Portugais Magellan,
qui, longeant la côte d'Amérique du Sud, franchit ce détroit de six cents kilomètres,
auquel il donne son nom, et s'aventure dans l'océan, qu'il appelle Pacifique, jusqu'aux
Philippines, qu'il aborde après un trajet de quatre mois et où il périt dans un combat
contre les indigènes. Son pilote, El Cano, regagne l'Espagne par le cap de Bonne-
Espérance. C'est le premier tour du monde : il a duré trois ans (1519-1522). Sur les cinq
navires et les deux cent trente-neuf hommes partis, il revient vingt et un hommes et un
navire, la Victoire, dont la charge d'épices, prise aux Moluques, suffit à payer toute la
campagne.
Tordesillas
L'expédition de Magellan illustre bien la rivalité hispano-portugaise dans la conquête du
monde : c'est à qui trouvera la route des épices. Le conflit dure depuis longtemps. Dès le
premier retour de Colomb, les Portugais ont réclamé leur part du monde. Ferdinand s'est
adressé au Saint-Siège, c'est-à-dire à l'Espagnol Alexandre VI, qui, en mai 1493, accorde
à son pays natal les terres situées à l'ouest des Açores et au Portugal les terres en deçà.
Mais, devant les réclamations du Portugal, la ligne de démarcation, par le traité de
Tordesillas (7 juin 1494), est repoussée de 170 lieues vers l'ouest. Ce traité donne au
Portugal la moitié ouest du Brésil. Aux antipodes, le traité de Saragosse (1529) accorde
les zones contestées, y compris les futures Philippines, aux Portugais. Mais ceux-ci
n'occupent pas les Philippines. Les Espagnols s'y installent dès 1542. Leur nom vient de
celui de l'infant, le futur Philippe II. Dès la fin du xvie siècle, les « galions de Manille »
apporteront chaque année à Acapulco la soie chinoise échangée contre l'argent mexicain,
au prix de périlleuses traversées.
Les conquistadores
Il reste aux Espagnols à occuper le continent américain au-delà du Brésil. La mer des
Antilles va jouer le rôle d'une véritable Méditerranée, véhicule commode des forces
militaires espagnoles. Celles-ci se heurtent à un relief difficile, au climat tropical, à des
tribus sauvages et surtout à deux centres de civilisation, l'empire des Aztèques sur le
plateau du Mexique, l'empire des Quichuas avec sa dynastie Inca, au Pérou.
En 1519, Hernán Cortés débarque sur la côte mexicaine avec six cent soixante hommes
et crée le fort de la Vera Cruz. Trouvant facilement l'appui des tribus soumises par les
Aztèques, à qui leurs croyances religieuses promettent un libérateur envoyé par les dieux
et venant de l'est, il marche sur Mexico, capitale de l'empire. Son chef, Moctezuma,