dossier du mois

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Février 2010
DOSSIER DU MOIS
Tuberculose
Dr Arnaud Trebucq
Union internationale contre la tuberculose et les maladies
respiratoires, Paris, France
La tuberculose est une maladie infectieuse due à un bacille acido-alcoolo-résistant (BAAR),
aérobie strict, communément dénommée bacille tuberculeux ou bacille de Koch (BK), dont la
variété la plus répandue est représentée par le bacille de type humain, Mycobacterium
tuberculosis.
Dans les pays développés, alors que la tuberculose était une maladie extraordinairement fréquente au
XIXème siècle, son déclin commencé au début du XXème s’est considérablement accéléré grâce aux
diverses mesures de lutte antituberculeuse et surtout par l’utilisation, à partir des années 1950, d’une
chimiothérapie efficace.
Dans les pays à forte endémie tuberculeuse et à faibles revenus, la tuberculose ne montre
pratiquement pas de tendance à la régression d’autant que l’infection par le virus de
l’immunodéficience humaine (VIH) aggrave la situation épidémiologique de la tuberculose. Les
individus doublement infectés par M. tuberculosis et par le VIH ont un risque cent fois supérieur
d’évoluer vers une tuberculose maladie que ceux non infectés par le VIH ; dans certains pays
d’Afrique subsaharienne, plus de 70% des tuberculeux sont séropositifs.
Physiopathologie
Dans l’alvéole pulmonaire, le bacille de la tuberculose est phagocyté par les macrophages où il se
multiplie. D’autres macrophages et monocytes sont attirés et il se forme un foyer initial appelé
« chancre d’inoculation ». Les bacilles sont drainés par les macrophages vers le ganglion lymphatique
satellite ; ils essaiment par voie lymphatique et sanguine à distance dans différents organes. Les
lymphocytes T identifient les antigènes de M. tuberculosis et se transforment en lymphocytes T
spécifiques avec libération de lymphokines et activation des macrophages. Habituellement, la réaction
immunitaire antituberculeuse va aboutir à la formation d’une nécrose caséeuse des macrophages qui
va entraîner l’arrêt de la multiplication des bacilles (infection latente). Cet arrêt est définitif dans 90%
des cas et correspond en clinique au virage de la réaction tuberculinique. Mais dans 10% des cas,
l’infection tuberculeuse deviendra patente au cours de la vie : c’est la tuberculose maladie.
La localisation la plus fréquente de la maladie tuberculeuse est pulmonaire (85% des cas déclarés
dans le monde en 2007). C’est elle qui, en raison de sa contagiosité, est responsable de la
transmission du bacille.
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Transmission
La transmission du bacille se fait par l’intermédiaire des aérosols de bacilles tuberculeux émis par les
malades atteints de tuberculose pulmonaire. Dans l’air rejeté par ces malades lorsqu’ils toussent,
éternuent ou simplement parlent à voix haute, se trouvent de fines gouttelettes qui, après dessiccation
partielle, se transforment en noyaux microscopiques (1 à 5 µ) demeurant longtemps en suspension
dans l’air ambiant. A partir d’un nombre défini de bacilles de la tuberculose présents dans l’air, le
volume d’air dans lequel les bacilles sont disséminés détermine la probabilité d’être infecté pour un
individu respirant cet air.
En pratique, pour qu'il y ait transmission, il est nécessaire qu’un patient tuberculeux soit capable de
produire des gouttelettes infectantes par voie aérienne. Le nombre de bacilles trouvés dans les
échantillons d’expectoration montre une bonne corrélation avec le potentiel de contagiosité du
cracheur. Il faut au moins 5 000 bacilles par ml de crachat pour qu’il y ait une probabilité raisonnable
de trouver ces bacilles à l’examen direct du frottis de crachat et il en faut quelques 10 000 pour obtenir
une probabilité de 95% d’identifier un frottis comme étant positif. C’est pour cette raison que la
microscopie des crachats est un bon test pour identifier les cas les plus contagieux. Ce n’est
cependant pas un test très sensible pour diagnostiquer les autres formes de tuberculose.
Situation épidémiologique
Environ le tiers de la population mondiale a été ou est infectée par le bacille de la tuberculose.
Dans son rapport annuel, l’OMS estime que 9 273 000 nouveaux cas de tuberculose toutes formes
sont survenus en 2007, dont 4 062 000 nouveaux TPM+. La répartition des cas TPM+ attendus et
déclarés par région ainsi que le taux de mortalité toutes formes confondues sont exposés dans le
Tableau 1.1.
En 2007, on estime que sur l’ensemble des cas de tuberculose, 1 370 000 (15%) sont VIH positifs et
que 90% de ces cas sont en Afrique subsaharienne ; sur les 1 776 000 décès annuel dus à la
tuberculose dans le monde, 456 000 (26%) sont liés au VIH.
Tableau 1.1. – Taux d’incidence et incidence estimés, incidence déclarée, taux de détection pour les
tuberculoses pulmonaires à microscopie positive (TPM+) et estimation des taux de mortalité toutes
formes selon les régions de l’OMS en 2007 (OMS, 2009, WHO/HTM/TB/2009.411)
Région
Taux
d’incidence
TPM+
attendue /
100 000
Nombre de
cas TPM+
attendus
(milliers)
Nombre de
cas TPM+
déclarés
Taux de
détection
des TPM+
Taux de
mortalité
toutes formes
(pour 100 000)
Afrique
150
1 188
561
47%
93
Amériques
17
157
120
76%
4
Méditerranée Orientale
47
259
156
60%
18
Asie du Sud-Est
81
1 410
973
69%
30
Pacifique occidental
48
859
666
78%
16
Europe et Pays Industrialisés
21
190
105
55%
6
61
4 062
2 581
64%
27
TOTAL
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Tuberculose : la maladie
C’est parmi les consultants présentant des symptômes évocateurs, notamment une toux productive
qui dure depuis plus de 2 ou 3 semaines, que doivent être recherchés en priorité les « suspects » qui
vont être soumis aux examens complémentaires confirmant le diagnostic de la tuberculose. D’autres
symptômes accompagnant cette toux sont assez évocateurs : hémoptysie, douleur thoracique,
asthénie, amaigrissement.
Les formes pulmonaires, souvent excavées et bacillifères, sont les plus communes : les formes
extrapulmonaires représentent 10% à 20% de l’ensemble des cas de tuberculose répertoriés.
Les formes aigües sévères sont la miliaire et la méningite ; elles sont liées à une dissémination
hématogène des bacilles tôt après la primo-infection. On les observe surtout chez des sujets non
vaccinés : enfants, mais aussi adultes jeunes. Elles mettent en jeu le pronostic vital rapidement en
l’absence de diagnostic.
Les atteintes ganglionnaires, hépatiques, spléniques sont fréquentes de même que celles des
séreuses : pleurésie, péricardite, péritonite, méningite, polysérite survenant dans le cadre d’une
dissémination hématogène.
Etant donné la forte liaison entre VIH et tuberculose, il est recommandé de proposer
systématiquement à tout malade tuberculeux de faire un test sérologique pour le VIH. De même, chez
les patients séropositifs connus, il faut systématiquement penser à la tuberculose devant tout signe
clinique suspect, même si ce patient est sous chimioprophylaxie à l’isoniazide.
Traitement
Pratiquement partout dans le monde, dans les pays riches et dans ceux à faibles revenus, pour les
malades qui n’ont jamais été traités auparavant pour une tuberculose, on préconise un régime
thérapeutique de 6 mois comprenant une phase initiale associant 4 médicaments administrés en
général quotidiennement (rifampicine (R), isoniazide (H), pyrazinamide (Z), éthambutol (E)) et une
phase d’entretien associant 2 médicaments (rifampicine, isoniazide) donnés quotidiennement (parfois
3 fois par semaine) ; par convention, on écrit ce régime 2{RHZE}/4{RH}.
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