4 André Cauty
était peint en rouge. Le tout formant une chaîne d’égalités du type « α
αα
α
i
[X
i
] + d
i
=
α
αα
α
i+1
[X
i+1
] » : une translation d’amplitude d
i
jours fait passer de la date α
αα
α
i
[X
i
] à la
date α
αα
α
i+1
[X
i+1
]. Assez elliptique, l’agencement typographique
6
de la page 2c
adopté par le scribe permet cependant d’isoler une ligne d’entiers alternativement
rouges et noirs, et une colonne de 5 dates de la forme 13 X dont le rang α
αα
α égal à
13 est mis en ‘facteur commun’ au-dessus de la colonne des signes X (Lamat,
Ahau, Eb, Kan, Cib). La suite alternée rouge/noir de nombres est déchiffrée :
13, 28, 2, 24, 13 et interprétée comme une suite de translations de date en date
7
.
Le scribe laisse au lecteur le soin de rétablir les éléments sous-entendus.
Prenons par ex. la 2
ème
ligne de l’almanach :
13 Ahau, 28, 2, 24, 13. Elle se lit : 13 Ahau
[+] 28 [=] 2 [Lamat] [+] 24 [=] 13 [Eb], et
dit qu’en partant d’un 13 Ahau, on arrive en
28 jours à un 2 [Lamat], d’où, en 24 jours,
on arrive à 13 [Eb]. Les durées 28 et 24 sont
écrites en numération additive ‘a la romaine’
avec les chiffres ‘vingt lunaire’, cinq et un :
28 = VCIII (vingt, cinq, un, un, un).
2
ème
Calendrier. Dans l’Ancienne parole (Durand-Forest), l’idée indienne de
jour est liée au diphrasisme ‘jour/nuit’ et donc au dieu Soleil et aux créations/
destructions des mondes humains. Le jour relevait plus du sacré que de la
science. Pourtant, à partir du 2
ème
siècle av. J.-C., des scribes olmèques et mayas
se mirent à discrétiser le temps en grains de durée d’un jour, et l’engagèrent ainsi
dans un monde peu connu et à explorer : l’abstraction numérique. Les faces
cardinale et ordinale du bifrons nombre allaient bientôt s’incarner en chaînes de
plusieurs chiffres offertes sur les stèles et les monuments au regard de tous les
publics. Jusqu’à donner ses meilleurs fruits en terre maya et dans la distinction de
la dualité cardinal/ordinal du jeune concept de jour/nombre
8
.
Dès ses premiers pas, l’innovation se présente sous la forme de nombres à cinq
chiffres significatifs. Par exemple, les nombres 7.16.6.16.18. et 9.11.12.9.0.. Le
premier est olmèque et se trouve sur la face arrière de la stèle C de Tres Zapotes.
rences, c) le logogramme KAL, UINAL ou UINIC de valeur ‘vingt’ (attesté sous deux
formes, dites du vingt ‘lunaire’ et du vingt ‘primate’) qui n’est pas répété dans les
almanachs mais qui peut l’être (apparemment sans limite fixée) notamment pour décrire
des quantités d’offrandes.
6
Outre 2 figures mythiques et 2 lignes d’augures, la page contient une ligne d’équations
T
d
(α
i
) = α
i+1
qui renvoie à une façon traditionnelle voire universelle de se repérer dans le
temps par un jeu de repères et de nombres de jours définissant les périodes (parfois
symétrisées) de l’avent et de l’après du repère. Cf. un exemple dans Chamoux (2003).
7
Les dates sont notées sous forme très abrégée : seulement leur rang a. L’opposition de
couleur est un trait pertinent : rouge = date, noir = durée. Nous l’interprétons comme
marqueur de l’opposition ordinal/cardinal.
8
Le jour/nombre à faces ordinale et cardinale sera omniprésent sur les monuments publics
mayas jusqu’au 10
ème
siècle ap. J.-C., et même jusqu’au Postclassique chez les scribes qui
en conservèrent la mémoire/l’usage dans les computs spécialisés dont les meilleurs
exemples parvenus jusqu’à nous se trouvent dans le codex de Dresde.