Maroun Khater LA CRISE RUSSO-UKRAINIENNE

publicité
LA CRISE RUSSO-UKRAINIENNE,
LES PERSPECTIVES GEOSTRATEGIQUES D’UN NŒUD DE TENSION CHRONIQUE
Maroun KHATER, Maître de conférences à la FGM
1. INTRODUCTION
Les études économiques ne cessent de démontrer l’existence d’un lien de causalité entre les
conflits géopolitiques et les incitations économiques. En effet, depuis la conception du « Droit
de propriété » le monde est devenu un espace ouvert pour les conflits. Le simple besoin de
matières premières a enflammé d’interminables guerres qui ont impitoyablement ravagé le
monde entier. La perpétuité des perturbations envahissant les quatre coins du monde ne fait
qu’appuyer la significativité de l’intercorrélation entre les conflits géopolitiques et l’économie.
L'Ukraine est un des plus vastes pays d'Europe de l'Est. Ce pays géographiquement bien placé
partage ses frontières avec la Russie d’une part et avec l'Europe d’autre part. L’Ukraine a
toujours été visée pour sa richesse en gaz et pour son emplacement médian entre la Russie et
le reste de l'Europe. D’autre part l’Ukraine est le chemin de passage exclusif du gaz russe vers
l’Europe. La crise Ukrainienne la plus récente a débuté en 2013 lors des manifestations
antigouvernementales. La situation s’est encore aggravée suite au crash de l’avion Malaisien
abattu par un missile au-dessus de l'Ukraine. L'incident a exacerbé les tensions dans la région
surtout que le gouvernement ukrainien a accusé les rebelles séparatistes russes d’avoir attaqué
l’avion. Notre article tentera de tracer les principaux axes de la crise Russo-Ukrainienne et de
mettre en relief ses implications directes et indirectes. Afin de mener à bien notre travail de
recherche, nous procédons par le développement d’un aperçu historique exposant les
différentes caractéristiques de la Russie et de l’Ukraine. Nous mettrons ensuite en relief
l’importance du gaz au sein des économies respectives de ces deux pays. Nous analysons enfin
les différentes conjonctures se rapportant à la péninsule de Crimée et aux conséquences
géopolitiques caractérisant la crise Ukrainienne.
2. L’UKRAINE, UN BREF APERÇU HISTORIQUE
Afin de mieux comprendre les déterminants, les enjeux et les conséquences de la crise
ukrainienne nous présentons un bref aperçu sur les principaux traits historiques de l'Ukraine.
L'Ukraine est un pays d'Europe de l'est situé sur la mer Noire. Ce pays de 48 millions
d’habitants se caractérise par son gaz naturel et par son emplacement géographique. L’histoire
de l’Ukraine n’est cependant pas très bien connue en Europe de l'ouest. Cette histoire est
caractérisée par des vagues d’instabilité qui sont restées sans arrêt depuis l’aube de l’histoire.
1
Les répercussions de la première guerre mondiale ont radicalement marqué l’histoire de
l’Ukraine surtout après l’effondrement de l'empire austro-hongrois et des empires russes. Une
Ukraine indépendante semblait enfin voir le jour après de nombreux siècles de l'impérialisme.
En 1919, la République nationale de l'Ukraine (Kiev) et de la République nationale de l'Ukraine
occidentale, nées sur les ruines des deux empires effondrés, votent un plan d’unification.
Cependant, l’Ukraine dont l’histoire est pertinemment troublée, n’a pas pu se convertir en un
Etat solide. Ainsi, et après une courte période d’indépendance, le territoire Ukrainien était à
nouveau tranché. La majorité de l'Ukraine est devenue une république socialiste de l'Union
soviétique. Cette république était dotée d’un certain degré d'autonomie qui est cependant
resté dans le cadre de la théorie. L’Ukraine a désespérément essayé de lutter pour
l’indépendance après la deuxième guerre mondiale. Les nombreuses tentatives des ukrainiens
n’étaient cependant pas capables de faire face aux mutations géopolitiques qui caractérisaient
cette époque. À la suite des dizaines d’années de lutte permanente et continue, le parlement
ukrainien vote la déclaration de l’indépendance le 24 août 1991. L’indépendance déclarée a été
confirmée par un référendum historique le premier décembre 1991. Ainsi, depuis le début du
septième siècle et jusqu'à nos jours, l'Ukraine a demeuré une cause pertinente des conflits
entre les nations mais aussi la victime de ces conflits interminables. Pendant des décennies ce
pays était un ample passage pour les colons et les occupants et un outil sordide leur permettant
d’atteindre leurs buts. L’Ukraine a cependant réussi à décrocher son indépendance méritée en
1991.
3. LA RUSSIE, UN BREF APERÇU ECONOMIQUE
Après avoir présenté un bref aperçu sur l’histoire de l’Ukraine, il est important de développer
certains traits marquants de l’économie de la Russie considérée depuis toujours comme étant
l’acteur principal de la crise ukrainienne
La Russie a évidemment perdu sa place sur le podium des premières puissances économiques
du monde sans toutefois sortir du club des 10 économies les plus importantes au niveau
international. Avec ses ressources naturelles, ses 143 millions habitants, ses capacités
scientifiques et technologiques avancées et sa croissance économique tenace, la Russie est un
pays qui possède une multitude de points de force lui permettant de garder sa place sur le plan
économique mondial. La Russie possède les plus grandes réserves de gaz naturel et la deuxième
plus importante réserve de charbon au monde. De plus elle est classée au huitième rang parmi
les pays du monde possédant les réserves de pétrole brut. L’économie russe a été gravement
touchée par les répercussions de la crise financière 2008. Sa situation s’est remarquablement
améliorée en 2010 et devient le premier producteur de pétrole en 2011. Cependant, un rapport
2
publié par la banque Mondiale en Septembre 20141 montre que l’économie russe est au seuil
d’une récession économique de longue durée. Ce rapport met en relief l’inefficacité du modèle
économique russe fondé sur la large participation de l’Etat et son incapacité à stimuler le
potentiel de production. Les experts de la banque mondiale font revenir leurs constats à la
baisse des investissements, au rythme accru de la consommation, à la crise avec l’Ukraine et
aux sanctions qui ont suivi. La consommation, considérée par les économistes comme étant la
force directrice de l’économie, peut être également affectée par l’extension des sanctions ainsi
que par la dévaluation de la monnaie locale.
4. UKRAINE-RUSSIE, UNE RELATION MULTIDIMENSIONNELLE ET COMPLEXE
Les relations privilégiées avec l’Ukraine sont depuis toujours de grande signification pour les
nationalistes russes pour lesquels ce pays fait partie du grand empire russe. Le nouveau
« Nationalisme Russe » considère Moscou comme étant l’ultime protecteur des russophones du
monde. Il est important de signaler que cela a été explicitement déclaré par Vladimir Poutine
en 2008. Par conséquent, l’établissement de liens particuliers avec l'Ukraine, et même,
éventuellement, la ré-acquisition de l'Ukraine, paraissent ainsi dépasser les liens historiques,
pour faire partie d’une mission corrective visant la protection des territoires et des personnes
russes délaissés depuis l’effondrement de l’Union Soviétique. Les relations constitutionnelles
entre les deux pays sont très complexes. Ces relations se sont détériorées davantage après le
21 février 2014 suite à la sortie de l’ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch2. La réponse
Russe survint rapidement à travers le remplacement du conseil de la Crimée par un autre qui
n’a pas tardé à demander l’unification avec la fédération russe. Cela étant, un référendum a été
mené en mars 2014 pour confirmer l'annexion de la Crimée à la Russie. L’affiliation de la Crimée
à la fédération russe a déclenché des vagues de perturbations qui ont envahi l’Ukraine et qui
ont sans soute des impacts négatifs sur la situation économique initialement instable, voire
vulnérable. Les analystes trouvent que la Russie aborde délicatement le dossier ukrainien afin
d’éviter le déclenchement d’une nouvelle « révolution ukrainienne orange ». Cela explique non
seulement la politique intérieure du pouvoir russe mais aussi sa sensibilité aux évènements
extérieurs. Certains analystes accusent la Russie d’avoir utilisé ses ressources énergétiques pour
exploiter ou pour harceler ses voisins. De son côté la Russie renvoie l’impasse aux conflits entre
les dirigeants respectifs de ces pays. Il s’avère enfin important de noter que les relations entre
la Russie et l’Ukraine se sont remarquablement renforcées suite à l’élection du président Viktor
Lanoukovitch pour se détériorer dramatiquement lors de la crise de la Crimée et l'intervention
militaire russe dans la péninsule. Plus tard, l'Ukraine a suspendu ses relations avec la Russie. Les
1
2
« Les perspectives économiques mondiales », rapport bi annuel publié par la banque mondiale.
Considéré comme étant le chef des pro-russes de l’Ukraine
3
conventions de coopération militaire et d'exportation de matériel de défense ont-elles aussi été
suspendues.
5. LE GAZ NATUREL ET LE BRAS DE FER
Les premières données historiques concernant l’existence du gaz ukrainien datent du 14 ème
siècle. La production commerciale de pétrole a commencé en 1820 et l’Ukraine devint le
premier producteur Européen de pétrole quelques années plus tard. Au début du vingtième
siècle, la production atteint 2 millions de tonnes par an. De plus, l’Ukraine était le premier
distributeur de gaz naturel. C’est en 1945 que l’Ukraine commença à fournir le gaz naturel à la
Pologne à partir de ses champs de gaz naturel situés dans la région de Dashavske Oparskoe. Au
début des années cinquante du siècle passé le gaz naturel ukrainien arrivait en Russie, au
Belarus, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne, en Tchécoslovaquie et en Autriche. L'industrie du
pétrole et du gaz de l'Ukraine a connu un remarquable essor après la Seconde Guerre
mondiale. Cela était principalement dû à la découverte d'importantes réserves pétrolières dans
la région du bassin Dniper-Donetsk et dans les champs pétroliers des Carpates et de la mer
noire de la Crimée. L'industrie a atteint son niveau de production le plus haut en 1972 et la
production était estimée 14,4 millions de tonnes. En 1975, la production de gaz naturel atteint
68,7 BCM3. Dans ses phases les plus primaires, le conflit se rapportant au gaz entre la Russie et
l’Ukraine avait pris la forme de simples conflits entre les entreprises pétrolières des deux pays.
Ces conflits se sont cependant transformés en des problèmes transnationaux impliquant les
chefs politiques des deux pays concernés et menaçant le passage du gaz Russe, via le sol
Ukrainien, vers certains pays européens. Nous signalons à ce stade que la Russie produit
presque 25% du gaz naturel consommé dans l'Union européenne et que 80% de ces
exportations circulent à travers les gazoducs qui traversent l’Ukraine pour atteindre leur
destination finale. Les conflits se rapportant à l’utilisation par la Russie du sol Ukrainien ont
débuté en 2005. En janvier 2006, la Russie arrêta la distribution du gaz naturel via l’Ukraine
avant de la rétablir suite à la signature d’un arrangement entre les deux pays. Les problèmes
reprennent à nouveau en octobre 2007 pour causer la réduction de l'approvisionnement en gaz
à travers les conduits ukrainiens. Les perturbations de l'approvisionnement touchèrent un
grand nombre de pays européens et 18 pays de l’UE4 décidèrent de bloquer leur
approvisionnement en gaz Russe transporté via l'Ukraine. Les conflits s’accentuent encore
après les élections présidentielles ukrainiennes de l’année 2010 et continuent jusqu’à cet
instant même.
3
4
BCM: Billions of Cubic Meters (milliards de mètres cubes)
L’Union Européenne
4
6. L’ARME DU GAZ ET DES INTERETS MUTUELS
Les intérêts mutuels de l’Ukraine et de la Russie font de la passation du gaz Russe à travers le
sol ukrainien une nécessité qui s’avère elle aussi mutuelle. Cette nécessité met l’Ukraine devant
une situation de paradoxe. En effet, après l'invasion de la Crimée en mars 2014, trois autres
régions de l'est de l'Ukraine (Kharkiv Louhansk et Donetsk) ont réclamé un référendum sur la
sécession de l'Ukraine. Il est important de signaler que ces quatre régions sont fondamentales
pour le développement économique du pays du fait qu’ils représentent le tiers du montant
total des recettes d'exportation et qu’ils produisent le quart du PIB de l'Ukraine. Par
conséquent, la situation politique actuelle crée encore plus de doutes sur l'avenir de l'énergie
en Ukraine vu la tension et la froideur des relations russo-ukrainiennes. Du côté de la Russie,
nous mettons en relief les modifications structurelles ayant affecté le système d’exportation du
gaz Russe après l’effondrement de l’ex Union Soviétique. A cet égard, l’Ukraine se classe en tête
des pays de transit et faisait passer 93% des exportations du gaz russe via l'Ukraine entre 1991
et 2000. Pour éviter ce blocage, la Russie a tenté de diversifier ses exportations de gaz vers
l'Europe à travers la construction de nouveaux pipelines contournant l'Ukraine. En 1994, la
Russie débuta la construction d'un gazoduc d'exportation conduisant le gaz vers le Belarus, la
Pologne et l'Allemagne. En 2003, une ligne directe vers la Turquie a été mise en place et en
2011 la Russie met en marche le pipeline du Nord Stream qui passe sous la mer Baltique.
Cependant, et en présence de tous ces projets, 49% du gaz Russe continue à passer vers l’union
européenne via le sol Ukrainien. Ainsi, la Russie réussit à réduire sa dépendance de l'Ukraine
qui reste cependant dépendante du gaz Russe qui forme 60% de son volume de gaz naturel
importé. En effet, l’industrie des métaux et l’industrie chimique, qui forment 42% du PIB de
l’économie Ukrainienne, consomment presque la moitié du gaz Russe importé par l’Ukraine. Le
transit ne forme quant à lui que 2% du PIB. Cela a incité l’Ukraine à négocier avec la Russie
l'importation du gaz naturel à des prix concurrentiels en échange d’un passage sécurisé et
permanent. Ainsi, les enjeux politiques en Ukraine ne sont pas seulement fonction de facteurs
culturels ou ethniques. Les règles du jeu sont ainsi fonction de facteurs stratégiques dont
l’influence est dominante sur les choix économiques et politiques de tous les pays de la région
ukrainienne.
7. LA « CRIMEE » AU CŒUR DE LA CRISE RUSSO-UKRAINIENNE
La majorité des pays du monde considèrent que la Crimée est une région de l'Ukraine
actuellement occupée par la Russie. La version Russe est cependant contradictoire. En effet,
pour la Russie la Crimée est un territoire russe qui réussit à se libérer grâce à son appui.
5
Géographiquement, la Crimée est une péninsule située sur la mer noire et caractérisée par un
emplacement stratégiquement vital. Depuis l’indépendance de l’Ukraine en 1991, la Crimée
faisait partie du territoire ukrainien et avait une autonomie spéciale. Cependant et malgré cette
marge de liberté, la Crimée était sous la supervision de la Russie sous différents prétextes
(déclarés qu’ils soient ou implicites). Avant 1991, elle faisait partie de l'Union Soviétique. Il est
important de signaler que la majorité de ses citoyens sont initialement des Russes. Cependant,
les deux millions d'habitants de la Crimée sont largement dépendants du reste de l'Ukraine leur
assurant presque 84% de leurs ressources en eau et 80% de leur électricité en plus de
l'essentiel de leurs besoins en gaz. De plus, Le PIB de la Crimée ne représente que 3% du PIB
ukrainien. L'économie de la Crimée se base principalement sur le tourisme. La péninsule a
accueilli presque 2 millions de vacanciers en 2013. Cependant, la saison 2014 a été largement
compromise par la situation politique. Comme déjà mentionné précédemment, les
mouvements réclamant la séparation de la Crimée commencèrent suite à la sortie du président
Viktor Ianoukovitch. Quelques jours après le déclenchement des perturbations, il s’est avéré
que les manifestants armés sont supportés par les forces militaires russes qui ont réussi à
mettre la péninsule sous occupation militaire. Le 16 mars 2014, les habitants de la Crimée ont
voté à une majorité écrasante en faveur du rattachement à la Russie. La majorité des pays du
monde considèrent que les résultats du référendum sur la sécessions de la Crimée sont biaisés.
Dans tous les cas, que ces résultats soient baisés ou non, légaux ou non, la Crimée a réussi à
devenir une partie de la Russie. Les Etats-Unis et l'Union européenne ont imposé des sanctions
économiques à l'égard de la Russie pour inciter Moscou à inverser sa tendance. Malgré cela, la
Russie n’a cessé d’augmenter sa présence militaire en Crimée, présence que Kiev est incapable
de contrer ou même de contourner. Quoi qu'il en soit, de nombreux évènements peuvent se
produire avant que la crise Crimée ne soit complètement absorbée.
8. LA CRISE UKRAINIENNE ET LES IMPLICATIONS PLURIDIMENSIONNELLES
L’expansion de la crise ukrainienne peut certainement avoir des implications
pluridimensionnelles sur la zone européenne comme sur l’Ukraine elle-même. En effet, le
manque de planification et l’anarchie organisationnelle sont parmi les problèmes les plus
difficilement gérables en Ukraine surtout après la sécession militairement appuyée de la
Crimée. Les implications potentielles de la crise Ukrainienne sur les économies des pays de la
région et sur l’économie mondiale ont été explicitées par Christine Lagarde, présidente du FMI5,
qui prévient de « Lourdes Conséquences Economiques » de la crise ukrainienne6. D’autre part,
pour Madame Lagarde, « La crise en Ukraine constitue un danger que l'on peut encore très
5
6
FMI : Fonds Monétaire International
Entretien oublié dans la quotidien économique Allemand Handelsblatt le 27 septembre 2014
6
difficilement mesurer et dont le risque de contagion à d'autres pays n'est guère prévisible. Cela
étant, la crise géopolitique ukrainienne paraît avoir des implications directes sur le commerce
et sur les investissements internationaux ainsi que sur les flux de capitaux et sur la réserve
pétrolière de l’Europe. Le marché des devises et le marché de capitaux de par le monde ont été
gravement touchés par cette crise dont les implications varient d’un pays à l’autre. Ils reflètent
ainsi la solidité ou la vulnérabilité des économies touchées. En conséquence, les actions
européennes baissent de 1,5 % à 3,5 % alors que leurs analogues américaines baissent de moins
de 1%. Parmi les devises du G10, l'Euro a été le plus gravement touché. Cela peut être justifié
par la dépendance économique européenne de la Russie. Les prix du blé et du maïs
augmentent considérablement depuis le début de la crise (l’Ukraine étant l'un des plus gros
exportateurs mondiaux de blé et de maïs). Cette crise a également causé l’augmentation du
prix de l’or et du pétrole brut (qui a grimpé à son niveau le plus haut dans moins de 5 mois). Le
prix des actions russes a connu de remarquables chutes depuis le début de l'année, le rouble
russe a lui aussi perdu presque 12% de sa valeur pour atteindre son niveau historique le plus
bas. Il est évident que l'Ukraine est d’une grande importance pour l’Europe et il en est de même
pour la Russie considérée comme étant l’essentiel partenaire énergétique de l’Union
Européenne. En effet, la Russie fournit à l’Europe le quart de ses besoins en gaz dont la moitié
est pompée via des pipelines passant par l'Ukraine. Un problème d’approvisionnement
énergétique pourrait ainsi mener à une augmentation considérable du prix du pétrole.
Toutefois, la hausse des prix pourrait causer le découragement de la Banque Centrale
Européenne ce qui peut avoir des effets négatifs sur l’accélération de la politique monétaire.
9. CONCLUSION
Depuis le début de son histoire, l’Ukraine a fait face à des vagues de crises politiques qui n’ont
cessé de déstabiliser son système économique et gouvernemental. La crise ukrainienne 2014
possède cependant des implications qui peuvent dépasser le cadre normal des crises
antérieures. Ces conséquences n’aboutiront certainement pas à une révocation instantanée de
l’ordre international actuel. Elles pourront cependant accélérer le rythme de cette tendance.
Ainsi, outre l’instabilité de la situation économique, le bouleversement du rapport des forces
causé par l’appui russe, le risque de l’implosion territoriale et l’arrivée des conflits aux portes de
l’Union Européenne, la crise ukrainienne actuelle paraît être capable de tracer des perspectives
encore plus intrigantes. "Le monde ne sera plus jamais le même", déclara le président du
Conseil européen Herman van Rompuy suite à la crise de la Crimée. Cette déclaration ne
mettra-t-elle pas en relief les tous premiers débuts d’un éveil géopolitique au cœur de l'Union
Européenne ? Une simple mise en perspective stratégique du conflit entre l’Ukraine et la Russie
montre l’image de l’Europe qui perd la vraie notion du pouvoir, de l’OTAN stratégiquement et
7
même militairement accablé et incapable d’intervenir, des grandes puissances mondiales
évitant l’extrême et favorisant l’ambiguïté, d’un monde où la violation des conventions
internationales devient répétitive. Dans un article développant les perspectives du conflit
Russo-Ukrainien à l’heure du cessez-le-feu7, Hugo le Damay voit que la crise ukrainienne
saborde toutes les conceptions théoriques de modèles de relations internationales relatifs à la
période succédant la guerre froide. Par conséquent, l'espoir du « nouvel ordre mondial » ne
serait ainsi qu’une phase de transition vers un « nouveau paradigme géostratégique ».
BIBLIOGRAPHIE















7
Cohen A., Why the U.S. Should Support Ukraine’s Association and Free Trade Agreements
with Europe, Heritage Foundation Backgrounder No. 2849, 21 octobre 2013.
Daren K., Orenstien M., Motyl A., Shaffer B., Foreign Affairs, Crisis in Ukraine, pages 100 à 119
Edition Gideon Rose, 2014.
Dworkin A., Levy D., Godement F., Buras P., Ten global consequences of the Ukraine crisis,
European Council on Foreign Relation, article publié sur ecfr.edu, juin 2014.
Esakova N., Europeean Energy Security, Analyzing the EU-Russia Energy security regim in
terms of interdependence theory, Pages 209 à 244, editions Stronger VS, 2009.
Gooncharuk A., impacts of political changes on industrial efficiency, case of Ukraine, Journal
of economic studies, Volume 34, pages 324 à 340, 2007.
Gumuchian M., Butenko V., and Smith-Spark L., “Russia Lawmakers Vote to Annex Crimea;
U.S. Steps up Sanctions,” CNN, le 21 Mars 2014.
International Monetary Fund, IMF Executive Directors and Voting Power, updated March 6,
2014,
International Monetary Fund, IMF Quotas, October 1, 2013,
International Monetary Fund, IMF Standing Borrowing Arrangements, le 1 octobre, 2013.
Judy Dempsey J., A Who’s Who Guide to EU Sanctions on Russia, Carnegie Endowment for
International Peace, le 20 Mars 2014.
Lee C., White G., Favole J., U.S Russia trade sanctions over Crimea, Russian Response
Includes Sanctions on U.S. Lawmakers, Officials, the Wall steet Journal, Mars 2014.
OCDE, Etudes économiques, Ukraine Evaluation Economique, pages 18 à 123, Edition OCDE
2007.
PIFER S, Averting Crisis in Ukraine, Council on Foreign Relations, pages 1 à 57, Rapport spécial
numéro 41, mars 2009.
Reuters, After Crimea, East and South Ukraine Ask If They Are Next for Russia, le 17 Mars
2014.
The Moscow Times, Putin Recognizes Crimea as a ‘Sovereign and Independent State, le 19
Mars 2014.
Le monde, page 9, le 12 septembre 2014
8
Téléchargement