L’Église n’est ni le pape, ni la Curie romaine, ni l’État du Vatican, ni les richesses
culturelles et patrimoniales accumulées au fil des âges, même si chacun de ces éléments
contribue souvent, de façon très importante, à façonner l’image publique (et médiatique)
de notre Église.
Même avec François comme pape (et sans doute davantage espérons-le), l’Église c’est
nous tous. Nous tous, c’est-à-dire non seulement ceux et celles avec qui je me sens
spontanément davantage proche et solidaire (les chrétienNEs de ma gang, ceux et celles
qui partagent ma compréhension de l’Évangile et mes priorités sociales et politiques),
mais aussi tous les autres chrétienNEs d’ici et d’ailleurs dans le monde, tous ceux et
celles qui se reconnaissent comme disciples de Jésus et qui s’efforcent de vivre, au
meilleur de leur conscience et dans le concret diversifié de leur culture, l’Évangile au
quotidien.
Et donc pour tous les dossiers qui nous tiennent à cœur, y compris tous ceux auxquels le
pape François n’apportera sans doute pas (mais peut-être serons-nous parfois surpris?) la
réponse que nous aimerions (ouverture du sacerdoce aux femmes ou aux gens mariés,
acceptation de l’homosexualité ou de l’avortement, etc.), il n’est pas question de nous en
remettre à Rome et de nous contenter d’attendre des « autorités » la réponse à nos
questionnements. Comme Jacques Gaillot nous le rappelait, lors d’une de ses premières
visites au Québec, « l’Église, c’est vous (et nous) tous : faites-le et ça se fera! »
Notre théologie de la libération
Je ne veux pas entrer ici dans une réflexion poussée sur la théologie de la libération (que
nous avons nommée au Québec « théologie contextuelle »). J’utilise ici l’expression au
sens de la théologie dont les chrétiens progressistes, socialement engagés ou « de
gauche » se réclament.
Celle-ci intègre dans sa réflexion, et avec raison, une foule d’outils humains développés
au cours des derniers siècles : sociologie, psychologie, sciences économiques et
politiques, etc. Je n’ai même pas d’objection, quant à moi, à ce que la théologie tienne
compte des analyses et des acquis du marxisme, au même titre que de la psychanalyse et
de bien d’autres branches de la recherche et du savoir. Cela n’en fait pas pour autant une
théologie marxiste ou psychanalytique.
Mais je dois reconnaître que notre fréquentation des sciences humaines a peut-être
émoussé peu à peu la dimension proprement spirituelle de notre foi-telle-que-vécue-dans-
notre-pratique-quotidienne.
Faire l’analyse tout à fait utile qu’Ivone Gebara proposait, avant le conclave, dans son
texte sur les médiations éminemment humaines que prend l’Esprit Saint pour éclairer les
cardinaux
n’équivaut pas à dire que l’Esprit Saint n’est que le nom qu’on donne aux
tractations humaines ou que la somme de celles-ci. Pour moi, l’Esprit Saint (Dieu) est
L’élection d’un nouveau pape et l’Esprit Saint, Ivone Gebara, Brésil, février 2013 (4 pages)