Naissance et évolution de la Géomorphologie, cent ans d’études et de recherches naturalistes
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Gérard MOTTET
(PNRM)
Introduction.
Dans le tome 10 de l’Encyclopaedia Universalis il est significatif que l’article
consacré par Roger Coque à la géomorphologie (pp 366-369) soit situé entre celui de la
géologie et celui de la géophysique. Cette discipline a donc acquis toute sa place au sein des
sciences naturelles, mais de manière assez récente.
Certes, si, depuis l’Antiquité, des hommes ont cherché à comprendre la forme de la Terre
et son relief, ces préoccupations n’ont pris un caractère scientifique qu’à la fin du XIXème
siècle et surtout pendant le XXème.
Comme son nom l’indique la géomorphologie avec ses trois racines grecques (gé, terre,
morphé, forme et logos, étude) est la science qui a pour objet et pour but la description,
l’explication et l’analyse des formes du relief de la Terre, qu’il soit continental, littoral et
sous-marin.
Pour ce dernier domaine, le plus vaste du globe, la géomorphologie sous-marine a été
intimement associée aux récentes découvertes effectuées sur la densité et la nature très
particulière de la lithosphère des fonds océaniques.
Associés aux travaux des géologues et volcanologues, les géomorphologues ont confirmé
la continuité de la dorsale médio-océanique atlantique au Sud, au centre et au Nord de
l’Islande.
De même, dans le Sud-Ouest de l’Océan Indien, les études de géologie sous-marine ont
été complétées, de 1967 à 1974, par des travaux de géomorphologie volcanique, continentale
et insulaire pour démontrer les étapes successives de la fracturation du continent initial ,e
Gondwana et, corrélativement, les étapes de l’ouverture de l’Océan Indien qui, comme
l’Océan Atlantique, est un océan intracontinental récent : les paléo-latitudes communes et
l’âge semblable (Turonien) des basaltes de la Côte Est de Madagascar et ceux du Deccan au
Nord-Ouest de l’Inde, en sont la preuve. Ainsi, en s’articulant intelligemment avec la
tectonique des plaques ou tectonique globale, la géomorphologie est devenue, comme celle-ci,
une science « globale ».
En organisant cette année à son tour après l’Australie, son Congrès International (A.I.G.),
la géomorphologie française a bien, elle aussi, été reconnue comme une science de la Terre à
l’échelle du globe. Et pour anticiper ce congrès international tenu à Paris en Août, la
commission nationale du patrimoine géomorphologique avait, de plus, choisi la Bourgogne et
le massif du Morvan pour tenir en Mai sur trois jours, son voyage d’études.
Car, du massif d’Uchon à la Roche de Solutré, du Mont Beuvray au plateau corallien du
Saussois, de l’Autunien au Sénonien, jusqu’au Solutréen, la géomorphologie bourguignonne,
aujourd’hui pleinement reconnue, est d’une très grande diversité de sites et de milieux.
Mais pour bien conserver un milieu, naturel ou anthropisé, il faut d’abord en bien connaître
la genèse des formes, la composition et l’évolution.
I. La naissance de la géomorphologie.
C’est au XIXème siècle et surtout au XXème que s’est affirmée cette discipline. Elle est
née des récits de voyages accomplis par Alexander Von Humboldt, récits regroupés dans son
ouvrage majeur, le Cosmos, dans lequel il décrit l’Univers, le globe qu’il vient de parcourir,
ses formes, son relief, son volcanisme, et tous les facteurs, climatiques, botaniques ou
géologiques, dans leurs rapports réciproques. Humboldt a donc fondé les principes de la
géographie moderne : voyager et observer »les trois états de la matière, air, eau, terre, pour les
expliquer en les plaçant dans leur cadre spatial ».