Lombard, peintre attitré des princes-évêques de Liège, notamment du grand collectionneur
Erard de La Marck, nous laisse une œuvre complexe. Celle-ci compte en effet aussi bien des
peintures et des gravures que des projets pour tapisseries, des vitraux, des monuments, des
constructions et, surtout, un nombre exceptionnel de dessins. On en compte en effet près
d’un millier conservé au Cabinet des Estampes de Liège, mais aussi dans de très nombreux
cabinets de dessins d’Europe et des Etats-Unis (Amsterdam, Berlin, Düsseldorf, Dresde,
Budapest, Madrid, Florence, Naples, Rome, New York, Los Angeles pour n’en citer que
quelques-uns…) Parmi cette production se mêlent croquis, compositions, copies, études de
nus, drapés, emblèmes, allégories, sujets religieux, mythologiques ou érudits.
Le nombre impressionnant de ces dessins permet de saisir plus intimement les activités, les
recherches et les centres d’intérêt de Lombard, d’autant plus que cette source d’informations
est si riche que l’on n’en connaît aucun équivalent pour l’époque ni en France, ni en Italie, ni
en Allemagne. Le peintre puise dans d’innombrables sources pour enrichir son vocabulaire
formel : statuaire antique, monnaie, gemmes, sculptures gallo-romaines, fresques
médiévales, gravures, illustrations de livres, œuvres de contemporains de différents pays
d’Europe. La reformulation du vocabulaire artistique et thématique que Lombard met ainsi au
point sera la base de son enseignement. Nombreux sont les peintres de nos régions qui
fréquentent son atelier et qui iront essaimer cet enseignement à Anvers, Bruges, Venlo,
Paris, Namur, etc.
Mais l’intérêt que Lombard suscite ne se limite pas à sa production graphique et à son école.
Des liens étroits l’unissent aux milieux humanistes qu’il côtoie à Anvers, Middelbourg, Bruges,
Liège, Rome, Florence. Il est en contact notamment avec le géographe Ortélius, le théologien
Torrentius, les historiens d’art Vasari et Lampson, le typographe Plantin, le numismate
Goltzius… Imprégné de cette érudition, Lombard produit en fait un art qui s’inscrit bien dans
cette Renaissance qui multiplie les mutations culturelles, intellectuelles et formelles. Mais la
quête du Liégeois ne se limite pas à renouveler les formes et à représenter des thèmes
antiques et savants. Sa production reflète aussi, par les sujets religieux qu’elle illustre, le
mouvement de la Réforme qui s’impose partout en Europe et qui remet en cause l’approche
traditionnelle du texte biblique. De nombreuses gravures de l’artiste montrent sa volonté
d’illustrer le message chrétien en s’inspirant directement du texte évangélique.
Par sa vaste culture et son culte de l’Antiquité, Lombard appartient à cette période
particulièrement féconde qui voit se développer, malgré les guerres et les répressions
religieuses, le retour aux sources favorisé par un Budé ou un Erasme et une intense curiosité
pour tous les domaines du savoir – de la philosophie à l’histoire, de l’anatomie à la
géographie, des mathématiques à l’astronomie.
2. La commémoration
À l’occasion de l’année commémorative du cinq centième anniversaire de la naissance de
Lambert Lombard, trois actions importantes ont été initiées en 2006 : la restauration d’un
ensemble important, à savoir le cycle de Herkenrode, la préparation d’une exposition ainsi
que l’organisation d’un colloque scientifique.
a. La restauration du cycle de Herkenrode
Au cours de la mission d’inventaire photographique de l’Institut royal du Patrimoine artistique
(IRPA) dans les années 80, un ensemble capital de tableaux réalisés par Lambert Lombard
et son atelier fut identifié. Il s’agit de huit toiles réalisées pour l'abbaye cistercienne de
Herkenrode illustrant "Les Femmes vertueuses". Ces œuvres, dispersées depuis dans des
musées communs aux Liégeois et à l'église de Stokrooie (Hasselt), ont fait l’objet, à l’IRPA,
d’un vaste travail interdisciplinaire d’étude et de restauration financé par le Fonds Interbrew-
Baillet Latour.
b. L'exposition (Liège, 2006)
L’exposition était centrée, d’une part, sur les toiles provenant de Herkenrode (réunies pour la
première fois depuis la Révolution), et, d’autre part, sur les dessins des albums conservés au