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18/03/2015 |
Etats-Unis d'Amérique
En 1776, les treize colonies anglaises situées sur la côte est de l'Amérique du Nord déclaraient leur
indépendance, reconnue au traité de Versailles en 1783: c'est le début des E. (United States of America, USA),
qui occupaient moins de dix pour cent du territoire actuel du pays et comptaient en 1790 environ trois
millions d'habitants. L'expansion outre-Appalaches (1783), l'achat de la Louisiane française (1803) et de la
Floride espagnole (1819), l'annexion du Texas (1845), l'accord sur le territoire de l'Oregon avec la Grande-
Bretagne (1846) et la victoire de 1848 sur le Mexique qui entraîna la même année la cession de la Californie,
sont les étapes qui amenèrent les Américains from Ocean to Ocean, selon l'expression des chartes coloniales.
Avant l'indépendance, les relations américano-suisses étaient largement orientées vers les colonies anglaises,
mais on trouvait aussi quelques Suisses dans les territoires sous domination française (à La Nouvelle-Orléans
par exemple) ou espagnole.
1 - Période coloniale et indépendance
1.1 - Premiers contacts
Disparu en Floride, lors de l'expédition française menée par René de Laudonnière pour établir une colonie
protestante dans le contexte de la lutte contre l'Espagne, le Bernois Théobald d'Erlach (1541-1565) fut
vraisemblablement le premier Suisse à avoir mis le pied sur le territoire des futurs E. Des artisans (origine
cantonale inconnue) participèrent à la construction de Jamestown en Virginie en 1608. Au XVIIe et surtout au
XVIIIe s., l'émigration suisse provint notamment de mouvements religieux, principalement des cantons de
Zurich et de Berne. Des anabaptistes, des piétistes et des mennonites s'établirent en Pennsylvanie, dans les
Carolines et en Géorgie. Ces premiers contacts, ponctuels au XVIIe s., se multiplièrent au XVIIIe s.
Les Suisses, surtout les Suisses alémaniques, vivant dans les colonies anglaises passaient souvent pour des
Allemands, ce qui fait que leur nombre a été sous-estimé. Le chiffre de 25 000 immigrés en 1790 (date du
premier recensement américain) doit certainement être fortement augmenté. La plupart des Suisses
s'installaient dans des villes (Philadelphie, Germantown, Charleston et Savannah étaient cotées) ou des
villages existants, mais certains fondèrent des colonies de peuplement: New Bern en Caroline du Nord (1710),
Pequea en Pennsylvanie (1710) et Purrysburg en Caroline du Sud (1732) furent les premières colonies
suisses.
De nombreux Suisses servirent en Amérique, pour la France, l'Angleterre, puis pour les E. En 1708, le
capitaine neuchâtelois Charles Frédéric de Merveilleux leva des soldats du Seeland et des régions voisines de
la Suisse romande. Sous le commandement du colonel soleurois Franz Adam Karrer, un régiment levé contre
la volonté de la Diète pour le service de France opéra en Louisiane de 1734 à 1739. Devenu régiment Hallwyl
en 1752 (colonel Franz Josef von Hallwyl), il fut à nouveau opposé aux Anglais durant la guerre de Sept Ans
(1754-1763, dite en Amérique French and Indian War). Du côté anglais, Henri Louis Bouquet, commandant en
chef des forces du Sud, conquit la vallée de l'Ohio et la défendit victorieusement contre des attaques
françaises (Bushy Run, 1763). Frédéric Haldimand, d'Yverdon, haut commandant de l'Ohio, se distingua lors
des batailles de Montréal et de Québec (1758-1760); gouverneur du Canada et commandant en chef, il
empêcha en 1777 que cette colonie soit incorporée dans le territoire des futurs E. Lors de la guerre
d'Indépendance (1776-1783), deux frères genevois, Augustin et Marc Prévost, défendirent avec succès
Savannah contre les insurgés. Dans l'autre camp, quelque 10 000 Suisses furent engagés. Les milices
américaines furent équipées d'armes et de matériel produits ou livrés par des Suisses. Pendant les premières
années de la guerre, le Bâlois Johann (ou Jean-Daniel) Schweighauser, consul américain à Nantes, organisa le
ravitaillement des troupes françaises qui combattaient aux côtés des Américains. Quant au Bâlois Johann
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Jakob Faesch, installé dans le New Jersey, il fabriqua des armes pour l'artillerie américaine.
Avant l'indépendance, le commerce anglo-américano-suisse se faisait essentiellement depuis l'Europe, les
ports atlantiques français en particulier. Ce n'est qu'à la fin du XVIIIe s. que les commerçants suisses (un Jean
Conrad Hottinguer par exemple) traversèrent l'océan, New York devenant rapidement le centre des affaires.
L'intégration de ces migrants, souvent membres de la haute finance ou du grand négoce, fut rapide (Jacques
Biedermann, Albert de Gallatin).
Auteur(e): Simon Netzle / LH
1.2 - The Sister Republics
Les relations culturelles et l'échange d'idées entre ce que d'aucuns appellent les Sister Republics ou
républiques sœurs (le terme désigne aussi les relations entre les E. et la France républicaine) sont anciens.
Genève tout particulièrement a fourni un nombre considérable de penseurs, spécialistes des questions
théologiques ou politiques, et d'hommes d'Etat, qui ont participé à ces échanges culturels. Actifs à Genève,
puis en Angleterre ou en Ecosse, John Knox, Andrew Melville et Thomas Cartwright influencèrent le
congrétionaliste Robert Browne dont les idées furent exportées en 1620 en Amérique sur le Mayflower, les
Pères pèlerins emportant aussi dans leurs bagages la Bible de Genève de 1560. Roger Williams, fondateur en
1636 des colonies puritaines du Connecticut et de Rhode Island s'inspirait des idées de Théodore de Bèze et
de François Hotman sur l'autodétermination et le droit à la résistance. L'école romande de droit naturel (Jean-
Jacques Burlamaqui et Emer de Vattel) fournit aux colons, dans la phase préparatoire de la révolution
américaine, des arguments juridiques sur la légitimation de la résistance contre l'Angleterre, et influença
aussi Thomas Jefferson lorsqu'il rédigea la Déclaration d'indépendance en 1776 (l'idée de la recherche du
bonheur par exemple). Par contre, Rousseau et ses idées de démocratie directe n'eurent guère d'influence,
les colons connaissant déjà un haut degré de participation à la vie politique. L'influence intellectuelle de
Genève fut importante: en effet, les membres de l'élite politique américaine, comme Benjamin Franklin et
Henry Laurens, envoyèrent leurs fils ou petits-fils étudier dans cette ville. François d'Ivernois envisagea même
en 1794 le plan ambitieux de transférer l'académie de Genève près de la capitale fédérale en construction.
Son condisciple Albert de Gallatin fut secrétaire aux Finances sous Jefferson. C'est à Genève que furent
publiés la plupart des écrits sur l'Amérique, rares dans le reste de la Suisse. Les échanges américano-
genevois se poursuivirent au XIXe s. avec James Fazy, qui connaissait le général La Fayette. Fazy, avec Ignaz
Paul Vital Troxler, prôna en 1848 l'adoption dans la Constitution suisse du système bicaméral tel qu'il existait
aux E.
Lors des débuts de la révolution américaine, la Suisse fut l'un des modèles constitutionnels possibles. Les
immigrés Johann Heinrich Möller et Hans Joachim Züblin propagèrent les mythes des héros suisses de la
liberté pour rallier à la cause de l'indépendance les colons germanophones. Lors des premiers débats sur la
constitution, le modèle de confédération d'Etats fut repris dans le projet de 1778 à 1781, Articles of
Confederation. Toutefois, lorsqu'on discuta la constitution de l'Union en 1788-1789, les Federalists, partisans
d'un Etat fédératif (Fédéralisme), étaient d'avis que le pouvoir central dans des confédérations comme la
Suisse et les Provinces-Unies était trop faible.
En Suisse, le modèle américain d'Etat fédératif ne porta ses fruits qu'après l'adoption du bicaméralisme en
1848. Plus tôt en effet, les conquêtes constitutionnelles américaines ne jouèrent qu'un rôle annexe dans les
discussions, par ailleurs maigres, sur les réformes à introduire dans la Confédération. Cela malgré le fait que
les membres de la Société helvétique aient vu d'un bon œil la guerre d'Indépendance, que Jean de Müller ait
été un témoin très attentif des événements et qu'Isaak Iselin ait fait paraître dès 1776 dans ses Ephemeriden
der Menschheit les documents politiques américains les plus importants. Ce rôle resta modeste durant la
République helvétique (1798-1803), pendant laquelle s'affrontèrent unitaires et fédéralistes (le mot désignant
en Suisse non pas l'équivalent des Federalists américains mais leur opposé), qui discutèrent de la possibilité
de s'inspirer de la Constitution américaine. Bonaparte ne put imposer la Constitution de la Malmaison (1801),
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qui s'en rapprochait. La prise en compte tardive d'éléments de droit confédéral américain dans la Constitution
de 1848 ancra finalement en Suisse, dans une construction mythique enjolivant la réalité, l'idée des
"républiques sœurs" partageant des idéaux politiques communs.
Auteur(e): Simon Netzle / LH
2 - L'émigration
De 1700 à 2000, l'émigration suisse pour les E. est estimée à 460 000 personnes. Par rapport à la population,
il s'agit d'une proportion comparable à celle de nombreux pays européens. Ce courant participe
chronologiquement et territorialement à l'expansion blanche sur le sol américain.
Au XIXe s., la pauvreté est l'une des premières causes de l'émigration helvétique. Après la disette de
1817-1818, de nombreuses communes tentèrent de substituer au service étranger une émigration civile
organisée ou subventionnée. L'émigration s'accentua à partir des années 1850, dans les vallées alpines en
particulier. De 1851 à 1880, les statistiques américaines enregistrèrent l'arrivée de 76 653 Suisses. Durant
ces années, les autorités américaines se plaignirent fréquemment d'une pratique helvétique de "débarras".
Les Suisses s'installaient pourtant dans les Etats du Centre-Nord où ils fondèrent de nombreuses colonies et
"établissements", tels Switzerland, Vevay, Tell City, Highland, New Glarus. Après 1885, avec l'augmentation
du niveau social de l'émigration suisse et l'afflux d'immigrants du sud et de l'est de l'Europe, la campagne
contre l'immigrant suisse s'estompa et fit même place, après 1900, aux éloges.
De 1881 à 1893, l'émigration suisse s'accéléra et dépassa le chiffre de 100 000 personnes, soit près de 8000
par année. Ce flux massif était essentiellement dû à un excédent de population agricole, lié à la chute des
prix des céréales. Le repli de l'émigration des années 1894 à 1900 résulta de la crise économique américaine.
L'émigration du secteur tertiaire devint prépondérante au début du XXe s. A l'exception de la période de la
guerre, l'émigration suisse resta forte jusqu'en 1923, plus de 4000 personnes par année. Elle recula ensuite,
surtout au cours de la crise des années 1930. Depuis la Deuxième Guerre mondiale, le nombre moyen des
émigrants suisses s'est fixé à environ 2000 par année (les statistiques sont moins précises qu'auparavant).
L'émigration a changé de nature et perdu son caractère irréversible au profit de séjours plus ou moins longs.
De 1958 à 1974, la proportion des retours est estimée à 78,5%. En 2010, 75 252 Suisses résidaient aux E.,
dont deux tiers de doubles nationaux. A l'inverse, le nombre d'Américains résidant en Suisse était beaucoup
plus modeste, avec 17 109 personnes (9332 en 1980, pour la plupart installés à Zurich, Genève et dans le
canton de Vaud).
De manière générale, l'émigration suisse aux E. concerna tous les cantons, à des degrés divers et avec des
périodisations différentes. La préférence des E. sur les autres pays d'outre-mer fut particulièrement marquée
entre 1870 et 1920 (83% des départs). A cette époque, seuls Fribourg, Valais et Genève faisaient exception
avec moins de 60% d'émigrants pour les E. En chiffres absolus, les contingents les plus nombreux
provenaient alors de Berne, du Tessin et de Zurich.
L'occupation de l'espace américain est significative des choix des émigrants. Au début du XIXe s., les Suisses,
comme les Allemands et les Scandinaves, s'installèrent en majorité dans les Etats du Centre Nord-Est, puis
dans ceux du Centre Nord-Ouest. En 1870, les douze Etats de ces deux régions concentraient 65% des
Suisses (33,7% de la population américaine). Par la suite, les Suisses se rendirent surtout vers les Etats du
Pacifique (24,4% des Suisses, 6,7% de la population américaine en 1930). A cette date, les différences de
proportions entre Suisses et Américains n'étaient plus très significatives dans les autres régions, sauf dans le
Sud où les Suisses, qui n'ont jamais été tentés par cette région, n'étaient que 5,8% (30,9% d'Américains). Ce
déplacement vers l'Ouest ne signifie pas que les Suisses étaient des pionniers; ils avaient plutôt tendance à
suivre à distance le déplacement de la "frontière". En 1900, la population suisse paraît relativement
diversifiée. Elle comprenait environ 38% d'agriculteurs, l'une des proportions les plus élevées par nationalité.
Mais 35,5% habitaient dans les villes de plus de 25 000 habitants. Les Suisses des E. étaient donc
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relativement mobiles. Ces déplacements pourraient indiquer que si certains Suisses cherchaient à
transplanter leur mode de vie sur sol américain, d'autres tentaient une expérience nouvelle aux valeurs plus
américaines qu'européennes.
Les Suisses développèrent rapidement un réseau de sociabilité composé de sociétés de bienfaisance, de
secours mutuels, de tir, de gymnastique, de chant, etc., qui servirent à maintenir une identité culturelle
d'origine nationale ou régionale et furent aussi le porte-parole des collectivités suisses. A cet égard, la Société
suisse de bienfaisance de New York, fondée en 1832, est très représentative. Elle entendait tout à la fois
secourir les immigrants démunis à leur arrivée dans le port, se présenter comme une vitrine du genre de vie
de la bourgeoisie américaine et attirer l'attention des autorités fédérales sur les dangers qu'une émigration
issue de couches sociales défavorisées faisait courir à l'image de la Suisse républicaine. Voulant développer
un véritable réseau patriotique, une partie des sociétés suisses de secours se fédérèrent en 1865 en une
association à la dénomination suggestive de Nord-Amerikanischer Grütlibund (rebaptisée Nord-
Amerikanischer Schweizer-Bund en 1911). Devenu "le plus important représentant de l'Helvétisme aux E.", le
"Bund" vit son influence croître jusque vers 1925. En 1928, l'association regroupait 95 sections et 8000
membres, soit 2% des Suisses et de leurs enfants nés aux E. En 1896, le nombre total des sociétés suisses
aux E. s'élevait à 318; il était encore de 151 en 1999. Le nombre de sociétés et de membres n'est cependant
pas forcément significatif d'une adhésion à un code de valeurs. La solidarité proclamée peut dissimuler des
clivages culturels et sociaux.
La fondation de journaux fut une autre manifestation d'une volonté élitaire de cultiver le sentiment national
suisse comme vecteur d'intégration à une certaine idée du pays d'accueil. C'est ainsi que l'Amerikanische
Schweizer Zeitung, fondé en 1876, développa un langage nationaliste suisse, expression d'une identité
alémanique. Dans l'entre-deux-guerres, le Schweizer Journal fit pour sa part profession de double allégeance
aux E. et à la Suisse sur la base d'un discours relevant de la défense spirituelle.
L'ampleur et la nature de l'émigration suisse pour les E. ont aussi représenté un enjeu social situé au centre
d'un débat politique en Suisse. Fallait-il encourager, protéger ou entraver l'émigration? Représentait-elle un
gain ou une perte pour la patrie? Posées tout au long du XIXe s. et dans la première moitié du XXe s., ces
questions trouvèrent leur réponse dans le refus de l'interventionnisme de l'Etat fédéral. Le problème de la
protection des immigrants pendant le voyage aux E. et de la création d'un commissariat dans le port de New
York fut abordé à de nombreuses reprises depuis 1850 mais n'entraîna guère que des palliatifs. Face au
développement des agences d'émigration, dont l'activité agressive contribua à amplifier le mouvement dès le
milieu du XIXe s., les autorités fédérales se résolurent par les lois de 1880 et de 1888 à placer les opérations
de ces agences sous la surveillance fédérale, sans toutefois intervenir sur le mouvement migratoire lui-même.
Auteur(e): Gérald Arlettaz
3 - Diplomatie et politique
Les premiers contacts officiels entre la Suisse et les E. eurent lieu par l'entremise de consuls. En 1822 furent
créés les consulats suisses de New York et de Washington. Suivirent La Nouvelle Orléans (1829), Philadelphie
(1841), Savannah (1841, supprimé en 1842), Madison (1842, transféré à Louisville en 1845) et Galveston
(1846). Le premier consulat américain fut installé à Bâle en 1830. Le plus ancien traité entre les deux pays,
signé en 1847, concernait le droit de propriété et de succession. Le traité d'amitié et de commerce conclu en
1850 et ratifié en 1855 constitue encore la base des relations américano-suisses. Les liens amicaux qui
rapprochaient les deux pays se fondaient sur des idéaux politiques communs. La Constitution suisse de 1848
était un compromis établi sur le modèle américain. Elle contenait toutefois un article qui heurtait les
Américains et Théodore S. Fay, premier ministre-résident à Berne (1853-1861), lutta pour obtenir la
suppression des restrictions en matière d'établissement et d'activité qui touchaient particulièrement les juifs;
l'article fut abrogé en 1866. La Suisse attendit jusqu'en 1882 pour ouvrir une légation à Washington et s'y
décida pour mettre un terme à l'insuffisance notoire des consulats. Emil Frey, futur conseiller fédéral, premier
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ministre de Suisse aux E. (1882-1888), fut nommé à cause des liens qu'il avait avec ce pays (soldat dans les
troupes nordistes pendant la guerre de Sécession, il avait été fait prisonnier à Gettysburg en 1863).
Les relations américano-suisses connurent des moments difficiles au XXe s., du fait des tensions engendrées
par les deux guerres mondiales. En février 1917, lorsque le président Wilson annonça la rupture des relations
avec l'Allemagne, les pays neutres furent informés du souhait américain de les voir suivre cet exemple. Après
avoir déclaré la guerre à l'Allemagne en avril 1917, les E., tout en affirmant vouloir respecter la neutralité
helvétique, envisagèrent la possibilité d'intervenir en Suisse, au cas où la Condéfération n'aurait pas été en
mesure de défendre son territoire face aux empires centraux. Ils instaurèrent un embargo sur les exportations
vers les pays neutres. Le Conseil fédéral envoya une mission commerciale à Washington pour négocier des
mesures permettant à la Suisse de se ravitailler aux E., notamment en blé, ce qui fut obtenu en 1918. Par
ailleurs, le gouvernement américain s'associa à une liste noire, établie par les puissances alliées, de toutes les
sociétés suisses travaillant avec les puissances centrales. Un accord entre les E., la Grande-Bretagne, la
France et la Suisse, signé à Washington le 22 janvier 1919, régla l'ensemble des questions concernant les
échanges commerciaux, le ravitaillement, les transports, le transit et les crédits consentis pour la période du
premier après-guerre, jusqu'à la signature du traité de Versailles.
Lorsque la Deuxième Guerre mondiale éclata, le souci majeur de la Suisse n'était plus le ravitaillement, mais
la crainte d'être envahie et de perdre son indépendance. Tant que les E. restèrent hors de la guerre, les
importations de denrées américaines furent autorisées, mais le blocus britannique les rendit difficiles. La
diplomatie suisse tenta d'éviter le blocage des avoirs des pays neutres, finalement décrété par le
gouvernement américain en juin 1941. Malgré tous ses efforts, le Conseil fédéral ne réussit pas à obtenir sa
suppression ni à récupérer les réserves-or de la Banque nationale suisse, déposées par sécurité à New York.
Bien au contraire, dès l'entrée en guerre de l'Amérique en décembre 1941, la pression des Alliés s'accentua
et continua après la fin des hostilités. Les Alliés demandèrent ainsi à la Suisse de restreindre ses échanges
avec l'Allemagne, de réduire le trafic ferroviaire entre l'Allemagne et l'Italie et de participer à l'opération
"Safehaven". Programme de sanctions économiques élaboré par le gouvernement américain et approuvé par
les Alliés lors des accords de Bretton Woods en juillet 1944, "Safehaven" avait pour but d'empêcher les
criminels de guerre allemands de trouver refuge dans les pays neutres et d'y transférer le butin accumulé
pendant leurs conquêtes. En vue de s'assurer la collaboration de la Suisse sur le plan économique et
financier, les Alliés envoyèrent une délégation à Berne, en février 1945 (mission Currie-Foot). L'Américain
Laughlin (ou Lauchlin) Currie réussit à obtenir des Suisses des restrictions importantes dans le domaine des
échanges commerciaux et financiers et du transit avec le IIIe Reich, sans oublier le blocage des avoirs
allemands en Suisse, décidé par le Conseil fédéral avant la négociation avec les Alliés. En août 1945, les
Américains et leurs alliés demandèrent le droit de contrôle sur tous les avoirs allemands en Suisse. En 1946,
l'accord de Washington décidait de leur liquidation, le gouvernement suisse s'engageant à payer la somme de
250 millions de francs suisses au Fonds de réparations des Alliés. Tant que cette liquidation ne fut pas
achevée, les Américains maintinrent le gel des avoirs suisses aux E., tout en menaçant de saisir l'or suisse à
New York et de cesser leurs livraisons de blé et de charbon.
Les années 1945 et 1946 représentèrent donc un moment particulièrement difficile des relations américano-
suisses dans les domaines diplomatique, économique et financier. Cependant, le temps joua en faveur de la
Suisse. Elle entama des pourparlers avec la République fédérale d'Allemagne (RFA), devenue un bastion
important dans la guerre froide, et trouva une solution acceptable aux yeux des Alliés. En août 1952, deux
nouveaux traités remplacèrent la convention de Washington, le premier signé par la RFA et la Suisse, le
second par les Alliés et la Suisse.
Un autre contentieux américano-suisse issu des opérations de la guerre elle-même concerna les dommages
(morts, blessés et destructions) subis en 1944, à la suite des bombardements de Schaffhouse, Zurich et Bâle
par des avions américains. Le gouvernement américain regretta les faits, les attribuant à des erreurs
humaines et, en 1949, versa à la Suisse plus de 62 millions de francs à titre de dédommagement. Dans un
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