Topologie algébrique 25
2 Recollements d’espaces topologiques.
2.0 Introduction
V1V2
trou
Considérons l’espace topologique X constitué
par le plan R2 privé de deux points que nous
appellerons « les trous de X ». On peut décom-
poser X en deux bandes ouvertes, V1 et V2,
horizontales oua
verticales suivant la disposition
des trous,a
de façon à ce que chacune d’entre
elles ne comporte qu’un seul trou. a Il est facile
de vérifier que achacune de ces deux bandes est
homéomorphe à R2 \
{
(0, 0)
}
et donc que (proposition 1.26) π1(V1) et
π1(V2) sont tous deux isomorphes à (Z# +).
Considérons un lacet λ de X. Trois cas se présentent ;
a) λ n’enserre aucun
des deux trous.
b) λ enserre un seul
des deux trous.
c) λ enserre les deux
trous.
Dans tous les cas, on peut décomposer λ aen deux lacets dont chacun
est contenu dans l’un des Vi. On peut donc associer à la classe 〈λ〉 de
λ le « produit formel » d’un élément de π1(V1) et d’un élément de π1(V2).
On aurait tendance à penser que π1(X) est isomorphe au produit libre
π1(V1) * π1(V2) (Z# +) * (Z# +).
Le théorème de Van Kampen démontre et généralise cette impression.
Sa version pour les groupes ne s’applique qu’à certains recouvrements
ouverts.
Bruno BIGONNET
26 Recollements d’espaces topologiques.
2.1 Le théorème de Van Kampen pour les groupoïdes
Notations a
Soit Xa un espace topologique muni d’un recouvrement
{
Va
}
aA par
des ouverts connexes par arcs. a
Pour tout élément a de A, on notera ja le morphisme de groupoïdes
de
π
..
1
Va
vers
π
..
1
X
image par le foncteur de Poincaré de l‘inclu-
sion ja : Va i X. Rappelons que, pour tout chemin χ
de Va, ja
transforme la classe 〈〈χ〉〉 de χ dans Va en la classe 〈χ〉 de χ dans X.
On notera
*
aA
π
..
1
Va
le produit libre des groupoïdes
π
..
1
Va
et φφ
φφa
l’inclusion de
π
..
1
Va
dans
*
aA
π
..
1
Va
,
On notera J le morphisme de groupoïdes de
*
aA
π
..
1
Va
vers
π
..
1
X
induit par la famille
{
ja
}
aA. Rappelons que : a A, J φφ
φφa = ja .
De plus, la restriction de J aux unités est l’identité de X. a
Considérons maintenant un couple (a, b) d’éléments de A. On notera a
iab le morphisme de groupoïdes de
π
..
1
Va Vb
vers
π
..
1
Vb
, image
par le foncteur de Poincaré de l’inclusion iab : Va Vb i Vb .
Il est facile de vérifier que jb iab et ja iba sont tous deux égaux à l’ima-
ge par le foncteur de Poincaré de l’inclusion Va Vb i X et donc
que, pour tout élément 〈χ〉 de
π
..
1
Va Vb
, φφ
φφa iba (〈λ〉) •
φφ
φφb iab (〈λ〉-1)
appartient au noyau de J.
Proposition 2.1.1
Soit Xa un espace topologique muni d’un recouvrement
{
Va
}
aA
par des ouverts connexes par arcs. a
Alors, avec les notations introduites ci-dessus, J est surjectif.
Topologie algébrique 27
Soit 〈χ〉 un élément de
π
..
1
X
. En utilisant le même procédé topologi-
que que dans la proposition 1.19 on décompose le chemin χ aen une
succession χ = γ1 γ2 • ... • γp de chemins de X tels que, pour tout
i, 1 i p, le chemin γi soit contenu dans un Va(i).
Il est alors immédiat que ; 〈χ〉 = J
〈〈γ1〉〉 ∗ 〈〈γ2〉〉 ∗ ... ∗ 〈〈γp〉〉
,
Considérons le sous-ensemble N de
*
aA
π
..
1
Va
défini par :
N :=
{
φφ
φφa iba (〈χ〉) •
φφ
φφb iab (〈χ〉-1) (a, b)
A ××
×× A, 〈χ〉
π
..
1
Va Vb
}
.
On a remarqué, en introduisant les notations, que N est contenu dans
le noyau de J.
Proposition 2.1.2
Soit Xa un espace topologique muni d’un recouvrement
{
Va
}
aA par des ouverts connexes par arcs. a
Alors,aavec les notations introduites ci-dessus, le noyau
de J coïncide avec le sous-groupoïde distingué de a
*
aA
π
..
1
Va
engendré par N,
Notons [N] le sous-groupoïde distingué de
*
aA
π
..
1
Va
engendré par N,
On sait déjà que : [N] Ker J. On va montrer que
Ker [N]
J est banal
En fait, puisque J induit l’identité sur X, son noyau est un multi-
groupe contenu dans le multigroupe d’isotropie de
*
aA
π
..
1
Va
Donnons-nous un élément ωω
ωω = 〈χ1〉 ∗ 〈〈χ2〉〉 ... ∗ 〈〈χp〉〉 du noyau de J.
La donnée de ωω
ωω équivaut à celle d’un lacet χ = χ1χ2 ... • χp
formé de
la succession des chemins
χi
1 i p dont chacun est contenu dans
un certain Va(i) ; de plus, en notant x l’extrémité de µ, on a ;
〈µ〉 = 〈χ1 〈χ2• ... • 〈χp = 〈οx.
Soit donc Λ : I ××
×× I faX une application qui met en relation µ avec
le lacet constant οx : t d x.
L’idée de la démonstration est de construire, à partir de Λ, une suite
28 Recollements d’espaces topologiques.
ωω
ωωj
1 j q d’éléments de
*
aA
π
..
1
Va
telle que :
ωω
ωω1 ωω
ωω ( [N] ) ; ωω
ωωq = ο
et : j, 1 j q-1, ωω
ωωj+1 ωω
ωωj ( [N] ) .
Première étape a
La première étape consiste à décomposer Λ, aconsidérée comme un che-
min de l’espace topologique des lacets de X d’extrémité x,a en une suc-
cession de tels chemins dont les bornes consécutives (qui sont, rappe- a
lons-le, des lacets de X) ne diffèrent entre elles que par une déforma- a
tion dans l’un des Va .
Par une construction topologiqueaanalogue à celle utilisée dans la propo-
sition 1.19, on exhibe deux subdivisions 0 = s0 < s1 < … < sm = 1 et
0 = t0 < t1 < … < tn = 1 de l’intervalle I telles que l’image par Λ du
rectangle Rjk :=
ss
jj
[]
1, ××
××
tt
kk
[]
1, soit contenue dans un cer-
tain Vb(j, k). Quitte à la raffiner, on peut de plus supposer que la sub-
division
sj
1 j m est plus fine que celle qui sert à décomposer µ en
χ1χ2 ... • χp
. Autrement dit : on peut identifier la restriction de µ à un
intervalle
ss
jj
[]
1, avec la restriction d’un certain χi à ce même inter-
valle. On a ainsi obtenu un « découpage » du pavé I ××
×× I asuivant les rec-
tangles Rjk. Dans la figure, on a représenté le cas où m = 5 et n = 4.
0 = s0
s
1
s
2s3s4s5 = 1
t1
t2
t3
1
= t4
R
11
R
12
R
42
R
43
R
43
L’idée est de choisir pour éta-
pes successives de la décom-
position de Λ les lacets for-
més de la composition de Λ
et des différentes successions
des côtés (verticaux ou hori-
zontaux) consécutifs des rec-
tangles Rjk. On en a représenté deux en pointillés dans la figure 1 ci-
dessus. Afin de préciser, on introduit les notations suivantes :
1 i
k
γi
jk est le composé de Λ et du côté horizontal supérieur
du rectangle Rji
Topologie algébrique 29
(1
k = i-1)
γk
jk
+1 est le composé de Λ et du côté vertical droit du rec-
tangle Rjk
k+2 i
m+1
γi
jk est le composé de Λ et du côté horizontal inférieur
du rectangle Rj i-1 .
(0 = k = i-1)
γ10j est le composé de Λ et du côté vertical gauche du
rectangle Rj1.
Puis, pour chaque couple d’indices (j, k), a1 j n, 0 k m, on définit
le lacet ηjk par : ηjk :=
γ1
jk
γ2
jk • …. •
γm
jk
+1.
Autrement dit, pour tout couple d’indices (j, k) différents de zéro,a ηjk est
le lacet de X qui résulte de la composition de aΛ avec le chemin de I ××
×× I
de source (0, tj) et de but (1, tj-1) qui emprunte successivement les cô-
tés horizontaux supérieurs des rectangles Rj1, Rj2 .…, Rjk, puis le côté
vertical droit deace dernier rectangle et enfin les côtés horizontaux infé-
rieurs des rectangles Rj k+1,.…, Rj m.
De même ηj0
a est la composition de Λ avec le chemin de I × I de
source (0, tj) et de but (1, tj-1) qui emprunte successivement le côté
vertical gauche de Rj1 puis les côtés horizontaux inférieurs des rectan-
gles Rj1,.…, Rj m.
On introduit ici une notation un peu délicate : apour chaque triplet d’in-
dices (i, j, k), 1 i m+1, 1 j n, 0 k ma soit a(i, j, k) l’élément de
Α
tel que Va(i, j, k) contienne le rectangle qui figure dans la définition
de
γi
jk . On notera alors 〈〈
γi
jk 〉〉 la classe de
γi
jk dans Va(i, j, k).
Seconde étape
Soit, pour tout couple d’indices (j, k), 1 j n, 0 k m, l’élément ωω
ωωjk
de
*
a
A
π
..
1
Va
défini par : ωω
ωωjk := 〈〈
γ1
jk 〉〉 ∗ 〈〈
γ2
jk 〉〉 ∗ ... ∗ 〈〈
γm
jk
+1〉〉.
On a ainsi obtenu une suite
ωω
ωωh
1 h (m+1)n d’éléments de
*
a
A
π1
Va
.
On a utilisé le dénombrement a(j, k) d (
m
+1)( j-1) + k+1. a
Il nous faut maintenant montrer les relations (1) a
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