L’enseignement des langues étrangères comme politique publique
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AVERTISSEMENT
Cette étude tente le pari de développer, en quelques pages, une réflexion sur
l’enseignement des langues étrangères qui met l’accent sur des aspects souvent
négligés de la question. On n’y parle pas de pédagogie, d’évaluation des acquis ou
d’organisation du système éducatif ; et bien que le thème de l’enseignement des
langues étrangères dans un pays spécifique, en l’occurrence la France, soit replacé
dans une perspective européenne, on ne s’essaiera pas davantage à une
comparaison entre les modalités d’enseignement dans différents pays, à une analyse
culturelle ou sociolinguistique du plurilinguisme en Europe, ou à une description du
cadre juridique et institutionnel qui l’entoure. En effet, dans une large mesure, de tels
travaux existent déjà. Ce qui, en revanche, semble toujours manquer, c’est une
analyse des enjeux sous l’angle de l’analyse de politiques : quelles langues
étrangères enseigner, pour quelles raisons, et compte tenu de quel contexte ? Telles
sont les questions que cette étude aborde, en s’appuyant principalement sur
l’économie des langues et sur l’évaluation des politiques linguistiques.
Les questions sont complexes et leur traitement, dans la mesure où il vise à se
démarquer des approches habituelles, présente nécessairement un caractère
exploratoire. Les enjeux en cause mériteraient certainement une recherche plus
approfondie et de plus longue haleine que ce qu’il était possible de réaliser dans le
cadre du mandat bref confié par le Haut Conseil de l’évaluation de l’école. Par
conséquent, il convient de considérer ce rapport comme une premier tour d’horizon.
Il tente une évaluation synthétique des enjeux en cause, en s’appuyant sur un
outillage théorique qui est, pour partie, toujours en développement, et sur quelques
chiffres réunis pour l’occasion et qui n’ont d’autre ambition que de donner des ordres
de grandeur. J’espère toutefois que cette exploration pourra utilement contribuer à
élargir la réflexion sur des enjeux dont l’importance économique, politique et
culturelle ne saurait être surestimée.
Bien que cette étude soit le fruit d’un travail individuel, elle a bénéficié d’échanges
avec plusieurs collègues sur la question des langues en Europe et sur les problèmes
d’efficacité et d’équité que cela soulève. Comme cette étude s’ancre dans une
réflexion poursuivie sur le long terme, ce sont aussi des discussions et des échanges
échelonnés au fil des années qui l’ont nourrie. Je tiens donc à signaler ici ma dette
intellectuelle envers ces collègues, notamment Philippe van Parijs et François
Vaillancourt. Je remercie en outre ce dernier, ainsi que Gilles Falquet, pour leurs très
utiles commentaires et suggestions à propos du chapitre 6. Plusieurs collègues m’ont
fait part de remarques fort à propos ou signalé des références intéressantes, et