La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 237-238 – Stratégie18
Dossier
Innovations managériales
mai-août 2009
1. Approche théorique et pratique
du management des risques.
Les entreprises ont toujours été exposées à des risques. Il est
important, avant de situer ces risques dans leur nature et dans
une perspective historique, de dégager une définition du manage-
ment des risques.
1.1. Définition du management
des risques de l’entreprise
Le Management des risques est synonyme de management des
risques des Affaires, du management holiste des risques ou du
management stratégique des risques (Simons 2000)1.
Selon le
Committee of Sponsoring organizations of the Treadway
Commission
(
COSO II report
, 2004) prolongement du
COSO
Report I
(1992), « The enterprise Risk Management- Integrated
Framework » traduit en français par : « Le management des risques
de l’entreprise » (IFACI et PriceWaterhouse Coopers Landwell, 2005,
p. 5) est défini comme étant « un processus mis en œuvre par le
conseil d’administration, la direction générale, le management
et l’ensemble des collaborateurs de l’organisation. Il est pris en
compte dans l’élaboration de la stratégie ainsi que dans toutes
les activités de l’organisation. Il est conçu pour identifier les
évènements potentiels susceptibles d’affecter l’organisation et
pour gérer les risques dans les limites de son appétence pour le
risque. Il vise à fournir une assurance raisonnable quant à l’atteinte
des objectifs de l’organisation ». Il s’agit donc d’une approche
rigoureuse de l’évaluation et du repérage de tous les risques
menaçant l’atteinte des objectifs stratégiques d’une organisation
et implique tous les membres de l’organisation et ce, à tous les
niveaux. Cette approche globale des risques est perceptible à
travers les catégories d’objectifs que poursuit le management
des risques d’entreprise à savoir : les objectifs stratégiques2,
opérationnels,
reporting
et de conformité. Elle vise également à
rattacher les objectifs aux différentes catégories permettant ainsi
au mangement de se concentrer sur les différents aspects des
risques organisationnels et non plus sur une seule catégorie des
risques comme dans l’approche traditionnelle.
1.2. La nature du risque
et l’approche traditionnelle
Pendant longtemps, l’entrepreneur a été défini comme celui qui
prenait le risque d’entreprendre, celui qui risquait son capital et
qui était rémunéré pour cela. P. Drucker (1973, p. 512), met en
1. Simons définit le risque stratégique comme « un événement imprévu ou un
ensemble de conditions qui réduit de façon importante l’habileté des gestion-
naires à mettre en œuvre la stratégie d’affaires projetée ». Il divise lerisque
stratégique en trois composantes : risque opérationnel, risque d’évaluation
d’actifs et le risque de concurrence
2. Le COSOII report se distingue du COSO I report au niveau des objectifs par la
prise en compte dans le COSO II, des objectifs stratégiques.
garde contre toute tentative d’élimination des risques. Selon lui,
« essayer d’éliminer les risques, tenter même de les diminuer…
peut aboutir au plus grand de tous les risques : la rigidité ». Il
définit les décisions managériales comme des décisions de prise
de risques et suggère même qu’une stratégie pour l’innovation
soit basée sur une acceptation claire des risques d’échec. Il s’agit
d’une prise de conscience selon laquelle les risques sont inhérents
à toute entreprise. C’est ce qui justifie également la souscription
des polices d’assurance par les entreprises visant à les couvrir
contre des pertes qui pouvaient être causées par des incendies,
vols, inondations, tremblements de terre notamment. De même,
des contrats d’assurance étaient souscrits pour se protéger contre
la perte d’un associé ou d’un dirigeant important. Certains risques
liés à l’investissement ou à un prêt étaient transférés à d‘autres
parties. Sur le plan budgétaire, l’approche traditionnelle reconnaît
l’incertitude qui entoure toute prévision de coûts et de revenus et
a préconisé, à ce titre, la rationalisation des choix budgétaires.
Dans le cas d’un projet d’investissement, pour tenir compte du
facteur temps et donc du niveau de risque pesant sur les flux de
trésorerie, il est souvent fait appel à un taux d’actualisation des
revenus futurs. Une autre technique consiste à faire appel à une
analyse de la sensibilité afin d’aboutir à une échelle de valeurs
variant d’optimiste à pessimiste. Les probabilités et la simulation
de Monte-Carlo ont aussi été utilisées comme méthodes d’ana-
lyse de risques dans les décisions d’investissement de capital.
Depuis de nombreuses années, des méthodes de production,
de conditionnement et de distribution ont abouti à des change-
ments significatifs dans la protection face à des risques tels
que des pertes durant le transit, le sabotage par les employés
et la contrefaçon. R.N. Anthony, J. Dearden et V. Govindarajan
(1992) considèrent, eux aussi, que la poursuite du profit d’une
organisation peut être limitée par la volonté du management de ne
pas prendre des risques. En effet, il est possible que la politique
managériale vise à préserver les actifs de l’entreprise et que
l’objectif du profit y soit subordonné. L’appétence pour le risque
dépend de la personnalité même des managers. L’environnement
dans lequel évoluent les entreprises est porteur de risques. Par
conséquent, le développement, la survie de l’entreprise passe
aussi par l’acceptation par l’entreprise d’une prise de risques. Les
approches traditionnelles du management des risques, malgré
leur mérite, avaient pour caractéristique, d’être fragmentées. Elles
ne semblent donc plus correspondre aux enjeux et aux risques
associés au nouvel environnement économique. En effet, Les
clients exigent des produits et services de qualité supérieure et à
des prix très compétitifs. Les investisseurs attendent des dirigeants
de plus en plus de performances financières exceptionnelles. La
faillite de certains organismes américains d’épargne et de prêt
dans les années 1980 est largement imputable à une mauvaise
approche des risques encourus par les dirigeants des mêmes
organismes. De même, l’effondrement financier en Asie durant
la dernière décennie dans le secteur des hautes technologies,
est la conséquence d’une politique inadaptée de management de
risques. La dérégulation gouvernementale a créé un climat universel
favorable à l’investissement et aux échanges internationaux. Les
© Direction et Gestion | Téléchargé le 29/07/2024 sur www.cairn.info (IP: 193.48.143.174)
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