dans tous les cas. Nous devons seulement en être conscients. Sans ressentir cette
unité, nous ne pourrons jamais aboutir à une Europe unie.
J’entends ici deux aspects de l’unité : l’unité réelle et la multiplicité dans l’unité. Le
plus important, c’est la reconnaissance que notre propre terreau, notre origine est
une. Il ne s’agit pas d’une unité constituée, mais d’une unité réelle. On l’appelle par
de nombreux noms : la Conscience, le Silence, notre nature originelle…Elle est
présente, quand tous les aspects de l’individualité sont absents. Quand il n’y a plus
d’objet, elle est là, en tant que Présence. La Présence est l’absence de tout le reste.
Mais nous sommes éduqués à considérer l’absence d’objets comme une absence de
Conscience. C’est une grave erreur. Nous nous sommes identifiés à un monde de
références et nous ne nous connaissons qu’en relation avec des objets. Nous ne
connaissons que le ‘’je’’ qualifié, comme dans ‘’je’’ suis anglais, ‘’je’’ suis français,
‘’je’’ suis avocat, ‘’je’’ suis un homme, ‘’je’’ suis une femme, etc., mais notre nature
originelle, que nous avons tous en commun, c’est quand le Je demeure sans aucune
qualification. Ce Je inqualifiable, c’est la Présence, la Conscience. C’est notre foyer à
partir duquel toute l’existence phénoménale se manifeste et où elle retourne. Avant
de pouvoir être unis ou même vraiment associés, il nous faut accepter
intellectuellement, avant même d’en avoir l’expérience vivante, que notre foyer est
unique. C’est la seule conviction préalable qui puisse jamais fonctionner pour
résoudre les conflits de notre société mondaine. C’est la seule structure fonctionnelle,
parce que c’est la seule vérité. L’autorité émane de cette vérité. La vérité est l’unique
souverain. La vérité est éthique, fonctionnelle et esthétique. C’est la connaissance
essentielle que la Conscience sans objets est notre nature originelle et que nous
prendre pour des personnages individuels est l’unique cause du conflit et de la
souffrance.
Toute entreprise d’une nature humaine doit avoir comme trame ce qui relie chacun,
ce que tout le monde a en commun, ce qui soutient le monde phénoménal, la
Conscience. L’expression de cette conviction profonde, c’est l’amour, c’est
l’ouverture, c’est l’humilité et c’est la vision des faits, tels qu’ils sont, et non pas la
vision des résultats de vœux pieux et d’illusions qui se basent sur l’idée fausse de
l’existence d’une entité personnelle. La vraie réflexion provient de l’absence de
pensées, du Silence, de la Paix, de cet arrière-plan. La pensée qui suit la pensée est
manifestement basée sur la mémoire, sur les conditionnements du passé, et toute la
pensée créative doit être fraîche, neuve et dénuée d’idées préconçues. Ce n’est pas la
pensée qui peut changer la société, mais bien se détourner de la pensée.
Au niveau des objets et des idées, il ne peut y avoir de solution à aucune situation.
On tourne dans le cercle vicieux du mental divisé et pris dans des choix
innombrables et des prises de décisions arbitraires, arbitraires car on part du principe
arbitraire qu’il y a quelqu’un qui choisit, un décideur. Il ne peut pas y avoir
d’autorité qui soit fondée sur l’arbitraire. Si nous nous considérons comme des
individus, nous nous considérons comme des fractions, et on ne peut pas clairement
voir une situation à partir d’un point de vue fractionnaire. Aucun fait ne peut être