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Sommaire
Avant-propos
Chapitre 1. – Les défis actuels
Chapitre 2. – La démarche stratégique
Chapitre 3. – Le diagnostic stratégique
Chapitre 4. – Les stratégies business
Chapitre 6. – La mise en œuvre de la stratégie
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Chapitre 8. – Le changement stratégique
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Chapitre 7. – Le déploiement organisationnel
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Chapitre 5. – Les stratégies corporate
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Cas de synthèse. – L’Oréal vaut bien une charte
Dossier. – L’entrepreneuriat et le management des petites entreprises
Avant-propos
Dans un monde fait de changements et de mutations, le « Helfer-Kalika-Orsoni », pour sa dixième
édition, change de cap afin de mieux répondre aux attentes de ceux qui souhaitent maîtriser les
subtilités d’une discipline propres à toutes les entreprises, les petites comme les grandes et, plus
généralement, à toutes les organisations.
Nos objectifs
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L’accent est mis sur la stratégie. Les dernières années ont inauguré des ruptures dans un capitalisme
globalisé qui s’était financiarisé à l’excès depuis les années 1980. Ainsi, l’on voit d’immenses
groupes industriels s’expatrier, se démembrer, externaliser une partie de leurs activités et
supprimer des échelons hiérarchiques devenus inutiles tandis que prospèrent de petites entreprises
qui se mondialisent, que les start-up font rêver, que les GAFA dominent tant que les licornes
s’agitent.
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Le comportement des consommateurs des pays développés évolue lui aussi car les attentes ne
portent plus sur des produits très standardisés, mais sur des biens originaux et souvent très
personnalisés, dont les durées de vie diminuent au gré d’incessants progrès technologiques.
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En conséquence, l’incertitude croît, entraînant une multiplication des risques pour les firmes. D’où
la nécessité de mettre en place une « bonne stratégie », à savoir une vision aussi claire que possible
de l’avenir désiré pour l’entreprise et pour tous ceux – les parties prenantes – que son activité
concerne.
Notre stratégie
Nous ne sous-estimons pas pour autant les questions portant sur les structures ou sur l’animation des
femmes et des hommes attachés à l’entreprise mais, dans la perspective de cet ouvrage, nous
considérons que le déploiement organisationnel constitue l’instrument privilégié de la mise en
œuvre stratégique. C’était, du reste, ce que pensaient déjà les premiers spécialistes en stratégie qui,
tel Alfred Chandler, n’hésitaient pas à affirmer : « Structure follows strategy ».
Nous visons deux catégories de lecteurs :
• Les étudiants en sciences du management, qu’ils soient en formation initiale (universités et
grandes écoles) ou continue, et leurs professeurs. Pour un cours toujours plus interactif, des
ressources complémentaires sont proposées aux enseignants sur le site Vuibert(1).
• Les professionnels qui s’efforcent de mieux comprendre la réalité car ce sont les stratégies
des entreprises qui donnent naissance aux grands mouvements de l’économie dont nous
profitons ou dont nous pâtissons selon le cas.
La mise en œuvre
Deux préoccupations nous animent :
• La recherche d’une voie moyenne entre les apports théoriques et les applications pratiques.
L’étudiant trouvera ici des constructions formalisées et abstraites qui expliquent les
phénomènes. Nous ne manquerons pas également de présenter les instruments concrets qui
aident à prendre des décisions, notamment au travers des nombreuses illustrations qui
agrémentent l’ouvrage. Les stratégies d’entreprises internationales bien connues des
étudiants, comme Google, Apple, Uber ou encore Airbnb, y sont notamment décortiquées.
• Une pédagogie active. Nous souhaitons offrir aux étudiants un véritable outil de travail qui
facilite la compréhension des concepts et leur application. Aussi, des tableaux, des schémas
et des exemples sont-ils fournis en abondance. À la fin de chaque chapitre, des mini-cas,
inspirés de données et de faits récents, permettent au lecteur de mettre ses connaissances à
l’épreuve et, le cas échéant, de préparer sereinement les examens.
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Management stratégique est le fruit des cours et des séminaires que nous animons depuis des années
auprès d’étudiants et de stagiaires en formation continue. Nous leur sommes reconnaissants d’avoir
suivi nos enseignements et de nous avoir poussés à toujours nous améliorer. Telle est la condition
du progrès pour tous.
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La dixième édition apporte une actualisation de tous les concepts, chiffres et exemples, mais,
surtout, elle fait la part belle aux entreprises nées de la révolution numérique. BlaBlaCar, Uber et
Airbnb viennent rivaliser avec Peugeot, Siemens et Carrefour.
J.P.H.M.K.J.O.
Chapitre 1
Les défis actuels
Les compétences clés à acquérir :
• Comprendre ce qu’est la stratégie au service du management.
• Saisir la complexité des choix stratégiques et de leur mise en œuvre.
• Repérer les divers acteurs du processus stratégique.
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• Mesurer les défis auxquels l’enseignement des principes, des concepts et des outils du management
stratégique est aujourd’hui confronté.
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• Pouvoir analyser la diversité des catégories de décisions.
Le management stratégique, c’est-à-dire le pilotage des organisations, a toujours été tributaire de
l’influence de multiples phénomènes économiques, sociétaux et culturels.
Il s’agit :
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Aujourd’hui, plusieurs déterminants pèsent particulièrement sur les décisions des managers.
– de la mondialisation des activités humaines ;
– du développement de la technoscience c’est-à-dire des multiples sciences considérées dans
leurs applications techniques ;
– d’une concurrence entre les entreprises qui s’intensifie ;
– du souci de responsabilité globale que les managers ne peuvent ignorer ;
– d’un environnement en crise sérieuse et de la nouvelle localisation des dynamismes
économiques les plus nets ;
– de la montée de l’entrepreneuriat ;
– des développements fulgurants de l’économie collaborative.
I. Un environnement complexe et mouvant
La mondialisation, qui se traduit par une globalisation des marchés, oblige les dirigeants
d’entreprise à chercher des débouchés de plus en plus lointains. De même, elle les contraint à
acquérir des ressources de plus en plus éloignées, des matières premières, des composants ou
encore des partenaires.
Figure 1.1. Les facteurs d’influence sur le management des entreprises
A. La mondialisation, une source d’adaptation
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L’élargissement des frontières, outre les besoins de financements qu’il engendre, oblige
l’entreprise à acquérir des compétences nouvelles et à se doter des capacités nécessaires pour être
plus flexible, plus réactive.
Qu’est-ce que la globalisation ?
Ce terme traduit l’imbrication des stratégies des firmes et des politiques économiques
nationales, voire macro-régionales (Union européenne, ALENA, etc.) dans un marché mondial.
Ce processus d’interdépendance des décisions de gestion s’est étendu jusqu’aux confins de la
planète. Il résulte de l’intensité et de la vitesse croissante des flux de capitaux, de biens, de
services, d’informations, de connaissances, de techniques qui se développent du Nord au Sud, de
l’Est à l’Ouest. Les grands groupes sont les acteurs principaux de cette mécanique en marche.
Deux types de manœuvres caractérisent les stratégies de ces grandes entreprises : les
investissements directs et les délocalisations. Les grands courants sont les suivants :
• Investissements des firmes issues des pays développés (Europe de l’Ouest, États-Unis,
Japon) vers les pays émergents (Chine, Inde, Europe de l’Est, Amérique du Sud). Ces
derniers constituent des marchés alléchants et disposent de ressources humaines
qualifiées et bon marché. Des groupes comme EDF ou Carrefour misent, par exemple, sur
la Chine, Uber a fait de la France son deuxième marché.
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• Investissements d’entreprises venant des pays émergents vers l’eldorado des pays riches.
De nombreuses entreprises européennes sont rachetées par des investisseurs provenant
des pays du Golfe (Émirats arabes unis, Quatar, etc.), de Chine ou d’Inde. Ainsi Volvo, le
constructeur suédois devenu américain, conquiert le monde sous pavillon chinois.
Huawei, la firme chinoise d’équipements en télécoms prospecte à tout va les marchés
mondiaux. Elle en a déjà conquis de nombreux.
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• Délocalisations industrielles. Renault a, par exemple, installé une de ses usines à Tanger,
une autre à Oran.
• Délocalisation de services fondés sur les technologies nouvelles. Ainsi, Electronic City
est devenue à Bangalore (Inde) le lieu magique de sous-traitance des services
informatiques.
B. La technoscience
Elle multiplie ses percées et ses applications dans tous les domaines du savoir.
Exemple
Des disciplines comme la physique, la biologie ou encore l’anthropologie sont les
premières concernées par les voies ouvertes par la technoscience.
En dépit de quelques protestations morales angoissées, la fameuse règle qui veut que tout ce qui est
techniquement faisable doive être réalisé est largement pratiquée par tous les agents du progrès
(entrepreneurs, chercheurs, responsables politiques). Dès lors, la maîtrise technologique devient
une arme maîtresse, mais complexe et onéreuse, pour toutes les entreprises entraînées dans un jeu
de rivalité plus intense. La circulation très rapide des capitaux sur les marchés financiers a pour
conséquence de donner la priorité à la dimension financière (« financiarisation ») dans le processus
d’élaboration des stratégies des groupes. Venant de la réflexion sur la mise en œuvre des projets
informatiques, l’idée d’« agilité » s’impose à tous.
C. La libéralisation des marchés
C’est la deuxième dimension qu’il convient d’intégrer pour comprendre l’intensification de la
concurrence. En effet, quel que soit le système politique, les économies sont de plus en plus
marquées par une économie de la concurrence. Cette concurrence est considérée par les autorités
comme un moyen à la fois de faire baisser les prix (et donc d’accroître le pouvoir d’achat) et
de développer l’innovation. La concurrence se renforce : il ne s’agit plus d’une simple compétition
commerciale visant à conquérir de nouveaux segments de consommateurs ou à accéder à des canaux
de distribution comme Internet. La rivalité porte désormais sur l’acquisition de ressources
financières, humaines (des savoirs, des savoir-faire, des savoir-être) et technologiques dans un
cadre international dont les limites reculent sans cesse.
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Une telle intensification de la concurrence conduit à l’hypercompétition. À ce stade, la situation de
toute entreprise, petite ou grande, devient fragile ; nul monopole, nul privilège, nulle barrière ne
protègent plus de la percée soudaine d’un concurrent, qui balaye en un clin d’œil les avantages que
les managers avaient patiemment construits. Des profits à court terme sont cependant réalisables,
mais ils restent éphémères. Une micro-idée développée par un « geek » astucieux devient un succès
mondial et, selon l’adage « the winner takes all », BlaBlaCar en est un magnifique exemple.
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Au même moment, l’esprit d’entreprise connaît un nouvel essor, en raison de l’effondrement des
économies planifiées et de la crise du capitalisme managérial propre aux grandes firmes gérées de
manière excessivement rationnelle. En conséquence, l’entrepreneuriat a le vent en poupe parce
qu’il incite à la création ou à la reprise d’entreprises par des personnes qui prennent des risques et
innovent dans tous les domaines.
D. La dimension écologique
Elle ne doit pas être négligée non plus. Les activités économiques mondialisées butent sur les
limites imposées par les ressources naturelles que l’on s’approprie sans retenue et que l’on
épuise. Si l’on ajoute à cela la surexploitation effrénée des sols, la pollution de l’air et des eaux, le
dépérissement des forêts, le bilan est lourd. Il faut donc vite changer de cap et trouver d’autres
modes de fonctionnement plus économes et plus respectueux de la nature. Les dirigeants
d’entreprise, plus conscients de leurs responsabilités, sont contraints de rechercher des modes de
développement durable.
E. La crise économique et financière
Depuis l’été 2007, et surtout à partir de septembre 2008 avec la faillite de Lehman Brothers, une
crise d’abord financière puis industrielle et économique a vu le jour. Quasiment toutes les
économies sont touchées par des problèmes majeurs de chômage dans de nombreux pays, par
l’ampleur des dettes souveraines, une perte de confiance généralisée et une stagnation, voire une
récession. Conséquence directe ou indirecte de ces phénomènes, les écarts de dynamisme des
économies deviennent flagrants. De nombreux pays d’Asie et d’Amérique latine ont connu des taux
de croissance frisant les deux chiffres, alors que l’Europe allait mal et que les États-Unis peinaient
à renouer avec le succès. Puis une sorte de renversement s’est opéré. Le barycentre de l’économie
mondiale se déplace en conséquence. Les effets sur le management stratégique du côté des
entreprises sont multiples et sans doute encore imparfaitement perçus. Nous les retrouverons tout au
long de l’ouvrage.
Retenons, dans un premier temps, que l’incertitude domine, que les horizons stratégiques sont
opaques au-delà de quelques semestres, que la compétition devient multiforme et dépasse les
anciens périmètres classiques des marchés et que les frontières sont devenues poreuses entre les
champs de lutte concurrentielle. Les outils à utiliser dans ces conditions ne peuvent que s’en trouver
transformés.
II. Management et analyse stratégiques
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A. Le management stratégique
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Le management stratégique est devenu un élément clé de la pérennité et du développement.
L’époque où les directions générales pouvaient ne se soucier que des choix stratégiques et en
négliger la mise en œuvre est révolue. Le management repose plus que jamais sur deux
composantes indissociables et interdépendantes : la stratégie et l’organisation. La première est
plutôt externe et tournée vers l’environnement ; la seconde, davantage associée à une vision interne.
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Comment cesser la réflexion managériale au niveau stratégique sans la prolonger au niveau de sa
mise en œuvre dans l’organisation ? Ce serait oublier qu’aujourd’hui le mot magique de la stratégie
est celui d’implementation ou déploiement, en français. Or les choix stratégiques ne s’avèrent
réellement bons que lorsque leur mise en œuvre organisationnelle est réussie. Voilà pourquoi un
chapitre entier est consacré au déploiement organisationnel. Bien évidemment, l’organisation sera
envisagée d’un point de vue managérial (celui de la direction générale), et non pas d’un point de
vue fonctionnel (gestion des ressources humaines).
B. L’analyse stratégique
1. La démarche
Les perspectives retenues par les consultants et auteurs en management, dans leur tâche d’analyse
et de compréhension du fonctionnement des entreprises, évoluent de manière continue. La
perspective prioritairement externe, guidée par les concepts clés de stratégie de croissance, de
recherche de parts de marché, d’analyse concurrentielle et de diversification, a longtemps dominé
l’analyse stratégique.
Puis une perspective davantage interne a mis l’accent sur des concepts comme ceux de compétences
de l’entreprise, de ressources, de structure, de culture, de technologie.
Au-delà des phénomènes de mode, qui ne sont pas étrangers à la question, on remarque que la
démarche externe correspond plutôt à une période de développement des marchés, tandis que la
vision reposant sur l’analyse des ressources et des compétences de l’entreprise est apparue dans un
contexte de crise.
Ces deux orientations sont en fait indissociables et complémentaires. En pratique, le manager,
oscillant tel un pendule guidé par des forces qui le dépassent, tente d’adopter la posture la plus
efficace pour son entreprise compte tenu des données de l’environnement. Cette approche du
management où les perspectives évoluent et où la diversité fait loi ne doit pas surprendre. Deux
phénomènes permettent de la comprendre :
• Tout d’abord, les pratiques stratégiques des entreprises ne sont pas, loin s’en faut, uniques.
Selon leurs dirigeants, la perception des changements de l’environnement, la taille et le
secteur, les entreprises adoptent des démarches stratégiques différentes.
• Ensuite, les champs de la connaissance en stratégie ne sont pas stabilisés et on est loin de la
pensée unique.
2. Strategy as Practice
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Figure 1.2. Le pendule des perspectives d’analyse
Dans le prolongement de la perspective interne présentée ci-avant, un courant de pensée, Strategy
as Practice (SaP), est apparu depuis une bonne décennie. Le courant dominant considère la stratégie
comme un élément que les entreprises ont en elles (stratégie de spécialisation / diversification,
croissance interne / externe, etc.). La nouvelle perspective Strategy as Practice voit la stratégie
comme une activité que les entreprises font.
Cette perspective s’intéresse aux pratiques d’élaboration de la stratégie, de formulation et de mise
en œuvre afin de réaliser le changement. Strategy as Practice ne considère pas que les plans ne sont
pas importants mais seulement que les choses se déroulent rarement selon les plans. L’accent est
donc placé sur les processus pratiques et les activités quotidiennes des organisations. On cherche
à savoir comment la stratégie est élaborée, comment elle se « fabrique », au sein d’un monde de
praticiens confrontés à la concurrence, à de nombreuses et diverses parties prenantes et dans un
contexte de surcharge informationnelle (information overload ou infobésité(2)) qui se traduit par une
information extrêmement abondante, mais cependant incomplète.
Il s’agit d’une tentative pour réintroduire le rôle de l’humain dans le champ de la stratégie souvent
considérée comme une discipline où la rationalité économique et quantitative domine. L’important
est ici de considérer la stratégie non pas seulement comme un résultat, mais comme une pratique
sociale. Elle résulte de ce que font les personnes dans l’entreprise.
La Strategy as Practice peut être abordée à travers trois points de vue :
• La pratique. Au-delà des dichotomies habituelles opposant contenu / processus,
délibéré / émergent, formel / informel, réflexion / action, stratégique / opérationnel, qui sont
peu pertinents au quotidien, ce courant analyse la stratégie comme un flux d’activités
organisationnelles qui incorpore toutes ces caractéristiques et en étudie l’interaction. C’est
la stratégie telle qu’elle se fait.
• Les praticiens. Ils jouent un rôle essentiel dans l’analyse stratégique mais, dans la vision
traditionnelle, les acteurs qui mettent en œuvre la stratégie sont ignorés. SaP met en exergue
le fait que la stratégie résulte d’interactions entre dirigeants, managers, cadres
intermédiaires, employés, consultants, chercheurs, investisseurs, actionnaires, etc., qui
interagissent au sein de jeux d’acteurs.
• Les pratiques. Ce sont les outils que les personnes utilisent au sein de l’entreprise pour
réaliser la stratégie. On distingue trois catégories :
– Les pratiques administratives : plans, budgets, processus de contrôle, tableaux de
bord... Ce sont les routines formelles du processus stratégique.
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– Les pratiques discursives : le discours de la stratégie, le langage, les mots mobilisés
pour donner du sens et pour légitimer la stratégie. Le langage est ici considéré comme
un outil stratégique. Ainsi, Clegg et al.(3) soulignent le rôle du discours dans la mise en
œuvre et l’acceptation de la stratégie. Les auteurs citent des recherches qui considèrent
que le discours stratégique requiert des compétences spécifiques :
• parler un langage compréhensible par les acteurs concernés. C’est ici
l’intelligibilité du discours et son exactitude qui sont mises en exergue ;
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• incarner le propos en ayant recours à la première personne du pluriel et à ses
déclinaisons (« nous », « notre organisation », « notre équipe », etc.) plutôt que
des termes impersonnels (« la compétition », « le challenge », etc.). La sincérité
du discours est ici valorisée ;
• susciter de l’émotion et de l’enthousiasme, par la gestuelle et l’expression ;
• utiliser des métaphores pour que chacun se sente concerné et pour fédérer le
groupe ;
• raconter une histoire qui intègre le passé, le présent et le futur.
– Les pratiques épisodiques qui créent des opportunités grâce auxquelles des interactions
entre les praticiens élaborant la stratégie se nouent (réunions, ateliers, séminaires,
conventions, etc.).
Quelle est l’utilité de cette approche ? Elle permet sans conteste de prendre de la distance par
rapport aux modèles analytiques présentés dans les chapitres 3 et 4. En outre, elle enrichit la
compréhension de la stratégie en la rendant moins abstraite et plus humaine : le rôle du discours et
de l’implémentation de la stratégie par les acteurs est valorisé. Enfin, elle rappelle, qu’en matière
de stratégie, « le diable est dans les détails » et que « les détails sont dans les pratiques », pourraiton ajouter. Cette approche porte un regard différent sur la stratégie en se focalisant sur la manière
dont elle s’élabore. Elle atténue aussi l’opposition ente le niveau stratégique et le volet
opérationnel.
III. Le management, un métier autant qu’un processus
Figure 1.3. Les deux facettes du management
A. Un métier tiraillé entre stratégie et activité
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La toute première tâche du manager est de concentrer son énergie sur le niveau de réflexion et
d’action qui est le sien et de se garder de toute tentation de « redescendre » vers la gestion
courante, vers l’aspect opérationnel de l’entreprise. Et pourtant, le danger est grand. Le quotidien
assaille ; par définition, il se renouvelle chaque jour et le risque est immense de croire important ce
qui n’est qu’urgent.
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Le management est un continuum qui va des décisions les plus courantes de tarification ou des
choix d’un argument publicitaire aux options les plus lourdes relatives à une fusion ou au lancement
d’une nouvelle ligne de fabrication.
L’opposition entre management stratégique et management opérationnel (également appelé
« management courant ou tactique ») n’implique nullement une échelle de valeur entre eux. Chacun
sait combien ils requièrent tous deux d’intelligence et d’énergie. Il demeure que les confondre ou ne
pas voir clairement les qualités spécifiques qu’il convient de réunir dans chacun des deux cas serait
lourd de conséquences.
Il est alors utile de distinguer les décisions stratégiques des décisions opérationnelles.
Figure 1.4. La distinction entre management stratégique et management opérationnel
D’après A. C. MARTINET, Diagnostic stratégique, Vuibert, 1988.
Tableau 1.1. La distinction entre décisions opérationnelles et décisions stratégiques
Nature de la décision
global, toute l’entreprise
courte
longue
aisée
peu nombreuses
contrainte
plutôt clairs
forte
difficile et coûteuse
multiples
variable
souvent flous
nulle
algorithme
faible
tous niveaux
exploitation de potentiel
existant
convergence, rigueur
faible
exploration de potentiel
nouveau
divergence, créativité
D’après A. C. MARTINET, Stratégie, Vuibert, 1993.
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Compétences requises
Décisions
stratégiques
limité, un service
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Impact
Durée de préparation et de mise
en œuvre
Réversibilité
Dimensions à intégrer
Environnement et temps
Objectifs
Répétitivité
Structuration du processus de
décision
Niveau hiérarchique
Décisions
opérationnelles
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Caractéristiques
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Notons que l’on identifie parfois une catégorie intermédiaire : les décisions administratives. Elles
portent sur les questions de structure et d’organisation.
En fait, une décision donnée n’est pas toujours homogène sur toutes les caractéristiques :
par exemple (figure 1.5), la décision A est majoritairement « opérationnelle », la B est orientée
« stratégie ».
Figure 1.5. Une comparaison des caractéristiques des deux décisions
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Ces différences de caractéristiques se traduisent non seulement sur le plan des profils de cadres à
recruter mais aussi sur le plan du diagnostic de l’entreprise. Il convient, en effet, lors de l’étude
d’une entreprise, de préciser dans lequel des quatre cas suivants elle se trouve aux différents stades
de son existence – passé, présent, futur (figure 1.6).
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Figure 1.6. La relation management/performance
B. Un processus complexe
Le management est également une succession de quatre étapes, dont chacune correspond ellemême à un processus :
• Le processus de finalisation, c’est-à-dire la définition des différentes catégories de finalités
de l’entreprise : vision, mission, objectif, stratégie, plan, budgets, etc., précise les
orientations que l’entreprise entend suivre.
• Le processus d’organisation, c’est-à-dire la définition des mécanismes de gouvernance de
l’entreprise, des structures, des mécanismes de coordination, des organigrammes, des
procédures, etc., constitue l’ossature organisationnelle et humaine du fonctionnement interne
de l’entreprise.
• Le processus d’animation des hommes, c’est-à-dire les mécanismes de gestion des
ressources humaines, suscite l’adhésion des personnes aux finalités et aux modes
d’organisation de l’entreprise.
• Le processus de contrôle. Il clôt naturellement la démarche qui, à défaut de contrôle, ne
pourrait bénéficier du regard de validation et, le cas échéant, engendrer un nouveau cycle
recommençant par « finalisation ».
Ces quatre processus fondamentaux sont en interaction avec le système d’information dont le rôle
est essentiel, tant sur le plan stratégique que sur le plan organisationnel. Le système d’information
est composé de l’ensemble des moyens techniques et humains permettant la collecte, le traitement,
la diffusion et le stockage des informations nécessaires aux décisions et au fonctionnement de
l’entreprise. Ce système d’information est, pour partie, interne (traitements commerciaux,
comptables, de production, etc.) et, pour partie, externe (veille, échange de données avec les
fournisseurs et les clients).
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Figure 1.7. Le processus de management
Cinq qualificatifs principaux s’appliquent à ce processus de management :
• Général. Ce type de processus s’applique à toute activité managériale quel que soit son
niveau dans l’organisation et vaut tant pour l’ensemble de l’entreprise, que pour une unité
d’affaires ou pour une ligne de produits.
• Séquentiel. Dans une démarche managériale, et au risque d’être normatif, il est normal de
commencer par les finalités, puis d’organiser, de s’interroger sur les questions d’animation
des hommes, pour enfin effectuer le contrôle. Il est à noter que ce dernier est trop souvent
négligé.
• Interactif. Le caractère séquentiel du processus ne doit pas occulter les interactions qui
existent nécessairement entre les phases. Ainsi, il est fréquent que les aspects
organisationnels interagissent avec les choix stratégiques et d’animation.
• Cohérent. Ce point est essentiel dans la mesure où la performance d’un processus
managérial dépend très largement de la cohérence interne de ses éléments, également
appelée « fit » ou « alignement managérial ». Ainsi, nombre d’entreprises se trouvent
confrontées à des incohérences majeures entre, par exemple :
– stratégie et animation (stratégie orientée client et animation des hommes
bureaucratique) ;
– organisation et contrôle (organisation par activité centrée sur les résultats et contrôle
traditionnel des coûts par fonction) ;
– finalité et organisation (stratégie dynamique de développement et organisation interne
fossilisée autour de chapelles).
Cette exigence de cohérence s’applique aussi au système d’information et aux processus
managériaux.
IV. La culture stratégique
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• Rétroactif. Un des rôles du contrôle est de vérifier si les finalités définies sont respectées et
de décider soit de mesures correctives, soit d’une modification des finalités initiales. La
place prise par les technologies de l’information et de la communication (TIC) dans le
processus de management conduit à utiliser le terme de e-management. Les TIC, en
changeant la relation à l’espace et au temps, transforment en profondeur les quatre phases du
processus évoquées ci-avant. La finalisation s’en trouve modifiée tant au plan des
techniques de veille sur Internet que des choix stratégiques. L’organisation repose de plus en
plus sur des équipes projet virtuelles et des outils de travail collaboratifs. L’animation des
hommes doit intégrer le travail d’alimentation des bases de connaissances des knowledge
workers et l’animation d’équipes distantes. Quant au contrôle, il s’effectue en temps réel sur
l’ensemble des activités. Les relations amont et aval avec les partenaires sont intégrées
dans les systèmes d’information de l’entreprise, dans une perspective d’entreprise étendue.
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La démarche stratégique ne repose pas que sur des outils. Elle est également un état d’esprit, une
culture stratégique.
Pour Michel Godet, la culture stratégique compte trois pôles et constitue le fondement du
management stratégique :
– l’anticipation ;
– l’action ;
– la mobilisation.
Figure 1.8. La culture stratégique
Le stratège doit être doté de trois qualités :
• D’abord, il doit faire preuve d’une immense vertu d’anticipation. Informé mais non
surinformé, il doit être capable de percevoir au sein de la multitude des signaux qu’il reçoit
ceux qui sont porteurs de sens pour l’avenir. Pour ce faire, un excellent système
d’information est nécessaire, mais aussi cette sorte de sixième sens dont sont pourvus
certains, celui de vivre leur quotidien comme si demain était dans trois ou cinq ans.
• Ensuite, le manager stratège doit être capable de traduire l’information en décision puis
en action. Nous savons combien sont nombreuses les entreprises qui ont acquis une réelle
réputation d’être dans l’incapacité de mettre en œuvre les choix qui, pourtant, sont les seuls
possibles. Baronnies, bastions culturels, forces de l’immobilisme, blocages sociologiques,
refus de voir l’avenir... les raisons se déclinent à l’envi !
• Enfin, le manager doit s’attacher la bonne volonté ou, tout simplement, la bienveillante
neutralité des acteurs. Dans l’entreprise, rien n’est possible si les individus et les groupes
n’adhèrent pas, à des degrés divers, à l’action voulue par les dirigeants. Pour ce faire, il
faut mobiliser, en inculquant des valeurs communes d’appartenance, de reconnaissance ou
en affichant clairement les termes du contrat : « Vous êtes payé pour accomplir telle tâche,
sans état d’âme ; si les conditions le permettent, vous serez maintenu dans l’entreprise. »
V. Management stratégique et décisions
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Pour R. A. Thiétart, le management stratégique se trouve à l’équilibre entre trois forces, issues de
trois dimensions :
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– la dimension économique de la rationalité traditionnelle (calcul de rentabilité, bilan
avantages/coûts) ;
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– la dimension politique des jeux et stratégies des acteurs (stratégies individuelles et de
groupe) ;
– la dimension organisationnelle des structures et procédures formelles (les règles internes
de fonctionnement).
Définition
Le management stratégique est l’ensemble des tâches relevant de la direction générale, qui ont
pour objectifs de fixer à l’entreprise les voies de son développement futur tout en lui donnant les
moyens organisationnels d’y parvenir. Toute entreprise qui ne réussit pas à marier
harmonieusement les trois dimensions souffre d’un « mal stratégique » évident.
La décision est l’acte volontaire par lequel, après examen des diverses alternatives, on tranche, on
prend parti. Diriger une entreprise consiste par conséquent à décider, à effectuer des choix
précédant l’action. Or les gestionnaires s’interrogent, comme l’ont fait depuis longtemps les
économistes, sur la rationalité – ou l’irrationalité – des décisions.
Les décisions sont si nombreuses, elles s’appliquent à des problèmes tellement différents, elles
comptent un tel mélange d’éléments quantifiables et de facteurs qualitatifs qu’on les aborde selon
diverses perspectives.
Figure 1.9. Le management stratégique
A. Les types de décisions
Rassemblons ici les distinctions les plus courantes en gestion.
Selon l’importance du problème traité, Ansoff a introduit un classement devenu célèbre :
– les décisions opérationnelles, d’exploitation courante ;
– les décisions administratives (portant sur la structure et la gestion des ressources) ;
– les décisions stratégiques intéressant les axes de développement des firmes.
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Figure 1.10. Les fonctions du décideur
De nombreux auteurs ont présenté d’autres classements :
– les décisions stratégiques qui, selon Martinet, déterminent de façon durable la nature de
l’entreprise et de ses relations avec l’extérieur ; par exemple, le choix entre une seule ou
plusieurs activités ;
– les décisions tactiques, courantes, qui ont pour objet de résoudre les problèmes qui
surgissent au jour le jour sans modifier les orientations générales.
Dans tous les cas, la décision est un processus qu’il convient de maîtriser.
1. Les décisions non programmées et programmées
Cette célèbre distinction est due à Herbert Simon. Les premières dépendent des circonstances qui
les gouvernent ; elles sont toujours nouvelles et non structurées. Les secondes, les décisions
programmables, plus que programmées, correspondent à des choix répétitifs et routiniers pour
lesquels on dispose d’une procédure appropriée. Ordinairement d’ailleurs, on peut formuler
a priori un ensemble de prescriptions telles qu’on pourrait résoudre le problème posé grâce à un
ordinateur.
Or, nombreux sont ceux qui considèrent qu’il appartient à la direction générale de pousser au
maximum la programmation des décisions les plus routinières pour libérer du temps disponible
consacré aux décisions plus importantes et non programmables.
D’une manière générale, on considère que les décisions stratégiques sont :
– complexes, non programmables ;
– fortement influencées par les motivations et les valeurs du groupe directeur (top
management), même lorsque ces personnes ne partagent pas exactement les mêmes vues. Il
en résulte des conflits ou des recherches d’influence, dont on tente de mesurer le poids au
cours des phases d’un processus qui se déroule strictement.
2. Les décisions individuelles et collectives
Dans le premier cas, une personne effectue le choix. Dans le second, plusieurs individus participent
à l’opération, et tel est bien le cas pour la plupart des décisions quel que soit leur rang.
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Encore faudrait-il faire la part des choses entre les décisions collectives réellement collectives et
celles qui le sont faussement. Au plus haut niveau (comité de direction) les entreprises peuvent
masquer des décisions fortement individuelles par une logique de réunions régulières. Tous les
acteurs y ont intérêt. Le dirigeant évacue les conflits en informant et peut uniquement jouer de la
division pour mieux imposer ses vues. Les hauts cadres se refusent à intervenir négativement dans
une instance, à la participation de laquelle ils accrochent une partie de leur statut.
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3. Les décisions liées au contexte temporel
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D’après la nature des phénomènes qui provoquent le changement de stratégie et le contexte
temporel de la décision, on peut opposer ainsi que de nombreux auteurs l’ont fait :
– les décisions anticipées : l’entreprise « a le temps », elle mûrit peu à peu ses choix ; c’est la
situation idéale ;
– les décisions émergentes : l’entreprise ne décide pas à proprement parler, mais adapte peu
à peu les formules retenues ; le « grand dessein » n’apparaît qu’a posteriori ;
– les décisions occurrentes : lors d’un événement majeur, l’entreprise réagit brutalement et
réoriente instantanément sa démarche.
B. Le processus de décision
Plusieurs étapes (figure 1.11) peuvent être distinguées, la direction générale ne tranchant qu’au
moment du choix final.
Figure 1.11. Le processus de décision
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Les problèmes qui se posent lors de chaque phase sont bien différents. Certaines étapes sont
brèves ; d’autres, longues. Les techniques mises en œuvre varient.
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Exemple
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Il est possible de faire appel à la créativité dans la phase de recherche de solutions.
L’analyse multicritère peut, quant à elle, être utilisée pour l’élaboration de la décision.
Pour réduire l’arbitraire et harmoniser les modalités de prise de décision, on définit parfois
méthodiquement le processus et les règles qui doivent être respectées pour choisir une solution. On
utilise aussi de nombreux outils d’aide à la décision (arbres de décision, comparaison d’utilité des
options : maximin, minimax, point mort, etc.).
La qualité d’une décision est une notion relative qui dépend de nombreux facteurs (figure 1.12).
Figure 1.12. Les principaux facteurs influençant la perception de la qualité de la décision
C. Rationalité ou irrationalité de la décision
D’innombrables controverses opposent différentes écoles ; certains auteurs, tel Simon, reprochent
à d’autres d’être trop rationalistes. D’une façon générale, cependant, il convient de remarquer que
c’est le modèle des économistes classiques ou néoclassiques qui a marqué les recherches sur la
décision. Selon pareille vision, l’homo economicus, cet être de logique abstraite, agit en fonction
d’un unique but : maximiser ses intérêts personnels. Avant de décider, de trancher, notre calculateur
balance entre ses propres avantages et les coûts attachés au choix.
1. L’homo economicus
Parce qu’il peut prévoir l’avenir, parce qu’il est parfaitement informé, parce qu’il est capable de
trouver une méthode mathématique pour bien appliquer sa raison, le manager, dans cette
perspective, doit chercher et trouver la meilleure solution au problème rencontré. Tel est le modèle
de la rationalité pure et parfaite qui inspire Taylor, naïvement persuadé comme bon nombre de ses
contemporains, qu’on peut trouver « the one best way ».
Mais, devant les difficultés rencontrées, on ne peut s’en tenir à cette vision scientiste et par trop
optimiste.
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Déjà, Herbert Simon et, plus généralement les tenants du courant behavioriste, conscients de la
contingence du monde et du caractère largement imprévisible de l’avenir, préfèrent s’en tenir à une
rationalité limitée, à une rationalité de procédures plutôt que de viser, par le calcul, le maximum
de gain.
By
En rationalité limitée, les managers adoptent la première solution satisfaisante qu’ils trouvent.
Ce sont des « satisficieurs » et non des optimisateurs. Les contraintes temporelles, financières, mais
aussi cognitives expliquent que la rationalité limitée soit très largement partagée par les managers.
Le modèle IMC (Intelligence, Modélisation, Choix)
Herbert Simon, dès les années 1960, schématisait toute procédure décisionnelle. Trois phases
sont présentes : l’intelligence ou la compréhension du problème tel qu’il se pose ; la
modélisation, c’est-à-dire la conception des solutions et enfin le choix, à savoir la sélection de
la variante qui donne satisfaction au plus grand nombre.
Certains auteurs vont s’en prendre aux illusions et aux croyances propres au management enseigné
dans les meilleures business schools encore tout imprégnées de la foi en le one best way. On voit
alors de nombre d’entre eux s’intéresser au rôle de l’intuition, aux jeux de l’inconscient et de
l’irrationnel, au cours de la prise de décision. Ainsi, Akio Morita, fondateur de Sony, allait jusqu’à
accorder un privilège déterminant à la dimension intuition, postulant qu’elle entraînait des ruptures
qualitatives plus fécondes que le calcul impliqué par la pratique des méthodes prétendues
scientifiques. Bref, on laisse une large part à la créativité et à la rapidité au cours du processus de
décision.
Les modèles de décision
1. Le décideur rationnel.
2. Le décideur contraint par l’organisation.
3. Le décideur politique.
4. Le « non-décideur ».
Enfin, décider c’est imposer une volonté avec les risques de conflits afférents. Pour réduire ce
risque, on s’efforce de faire converger toutes les volontés, ainsi que nous l’avons déjà souvent
constaté. Pour cela, on souhaite faire de l’organisation un foyer où se concentrent les valeurs et les
buts partagés par les différentes parties prenantes : le top management, le middle management, les
hommes des centres opérationnels. D’où les tentatives répétées, sous des formes diverses, de
décentralisation, de participation à la prise de décision, afin que chaque personne dans l’entreprise,
quel que soit son rang, puisse s’automotiver, en prenant part de façon active aux choix.
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Les entrepreneurs d’aujourd’hui ne s’embarassent pas de lourdes études avant de démarrer une
activité. Selon l’idée « d’effectuation », ils lancent pour tester, puis améliorent, transforment en
s’adaptant après les premiers résultats. Uber Pop, très critiqué, a cédé sa place d’activité
dominante à UberX chez Uber.
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2. Les facteurs psychologiques et cognitifs de la décision
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Prolongeant les doutes formulés par H. Simon sur la rationnalité des décisions managériales,
D. Kahneman(4), spécialiste de psychologie cognitive et prix Nobel d’économie, remet en cause le
caractère rationnel et logique de la pensée humaine. Son analyse repose sur une analyse duale de
notre système mental distinguant la pensée rapide – qu’il dénomme « système 1 » –, et la pensée
lente appelée « système 2 ».
Tableau 1.2. Les deux systèmes de décision selon Kahneman
Système 1
Rapide
Intuitif
Automatique
Actif en permanence
Inconscient
Permet d’économiser temps et énergie
Système 2
Lent
Délibéré, réfléchi
Contrôlé
Requiert un effort, entraîne de la fatigue
Conscient
Permet d’éviter les erreurs cognitives
Les deux systèmes sont en interaction permanente mais le système 1, intuitif, est plus influent qu’on
ne le pense. Il préside en fait à de nombreux choix. Ce système est d’autant plus sollicité que l’être
humain est dans une situation d’« aisance cognitive » qui résulte d’effets de souvenirs, de
familiarité et de clarté, conduisant à une appréciation positive de la situation.
Les biais de jugement, et donc de décision sont très fréquents, notamment chez les managers. Ils
remettent en cause la supposée rationnalité managériale.
L’auteur note ainsi :
• L’effet ou le biais de surestimation ou d’égocentrisme. Il se traduit par une confiance
excessive en ce que le décideur croit savoir et en son incapacité à reconnaître l’étendue de
son ignorance ainsi que l’incertitude du monde. Ainsi, les entrepreneurs et les investisseurs
ont tendance à surévaluer leurs chances de succès.
• L’effet de surestimation d’événements improbables ou rares.
• L’effet de statu quo. Il conduit à surestimer les risques de tout changement et à privilégier
la continuité.
• L’effet de halo. Il incite à privilégier l’impression initiale et à suivre le premier avis
formulé dans une discussion de groupe.
• L’effet de pseudo-certitude ou biais rétrospectif. Il considère comme valable et certain ce
qui est issu de l’expérience.
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• L’effet d’aversion à la perte. Il entraîne des pertes plus impressionnantes que les gains.
« L’aversion à la perte est une puissante force conservatrice qui favorise des changements
limités à partir du statu quo tant dans la vie des institutions que dans celle des individus »(5).
Les mauvaises impressions et les stéréotypes négatifs se forment plus rapidement. Ils sont
aussi plus résistants à la contradiction que leurs équivalents positifs.
• Les effets d’escalade dans l’engagement. Les managers s’entêtent dans l’erreur plutôt que
de la reconnaître et cherchent à en masquer les coûts (sophisme des coûts irrécupérables).
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Quelles sont les implications sur le plan managérial de ces résultats ? Elles sont certes très
importantes pour les décisions opérationnelles pour lesquelles on conçoit facilement que le système
1 se déploie pleinement. Sous-estimer ces effets pour les décisions stratégiques constituerait
cependant une erreur.
Exemple
Dans la matrice SWOT que les étudiants – apprentis stratèges – chérissent tant,
l’appréciation des forces et faiblesses est éminemment subjective. De la même
manière, les menaces ou les opportunités sont susceptibles d’être surestimées ou, à
l’inverse, sous-estimées en fonction du contexte dans lequel les décideurs évoluent.
Comble de la critique de la rationnalité managériale, l’auteur note que la chance joue un rôle dans
la réussite et qu’un détail peut faire la différence entre échec et succès...
VI. Stratégie et crise
La foi dans la capacité d’une démarche stratégique correctement opérée à mener l’entreprise à bon
port relèverait-elle de la pure naïveté ? En d’autres termes, convient-il d’inciter les entreprises à
dépenser de l’énergie pour suivre les prescriptions de la démarche stratégique alors que celle-ci
pourrait n’être qu’un gaspillage de ressources ?
La réponse est bien sûr négative. Il ne s’agit pas de cesser de former les dirigeants et futurs
dirigeants, les managers et futurs managers mais de les former autrement en les invitant à cultiver un
incessant esprit critique, un éveil de tous les instants aux changements amples et brutaux que nous
connaissons.
Il est utile de tenter de résumer les points qui ont évolué fondamentalement au cours des dernières
années. Si nous nous doutons que la plupart d’entre eux ont eu un puissant impact sur la démarche
stratégique des entreprises, nous ne savons ni lequel, ni où, quand et comment cette influence s’est
exercée. Quels sont-ils ? Ce sont d’abord le contexte au sein duquel les entreprises évoluent,
ensuite les entreprises elles-mêmes et, enfin, les personnes qui sont aussi les principaux acteurs des
entreprises.
A. Le contexte
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Tout d’abord, pour paraphraser un célèbre humoriste, « la prévision s’avère de plus en plus
difficile surtout lorsqu’elle concerne l’avenir ». Nous vivons dans un univers qui n’est plus
aléatoire, peu ou mal probabilisable, mais incertain. Les bouleversements nous assaillent sans le
moindre signe avant-coureur. Bien évidemment, chacun connaît le fardeau des risques que le monde
porte sur ses épaules : changement climatique inéluctable, raréfaction de l’eau, dégradation de
l’environnement, croissance dissymétrique de la population, épuisement des ressources naturelles,
ampleur des dettes souveraines, montée des nationalismes et du terrorisme, catastrophes
nucléaires... la liste est sans fin. Les plus avertis disposent de quelques longueurs d’avance, mais
ils sont toujours rattrapés par le maelström. Nombreux furent les banquiers, notamment français, qui
écourtèrent leurs vacances en août 2007, lors de la mini-crise financière de l’époque. Ils furent
pourtant, comme tout le monde, emportés par la grande crise qui a débuté le 15 septembre 2008 par
la faillite de Lehman Brothers.
Ensuite, nous vivons dans un contexte qui ne pardonne plus et qui met à mort, en moins de temps
qu’il ne faut pour le dire, les acteurs insouciants, peu experts ou malchanceux. C’est vrai pour les
pays : l’Irlande des années 2008 à 2012, la Grèce et le Brésil aujourd’hui. C’est vrai également
pour les entreprises.
Exemples
Kodak a disparu non pas tant parce que l’entreprise a mal négocié le virage du
numérique mais parce qu’elle n’a pas maîtrisé le passage du numérique d’élite au tout
numérique démocratisé. Nokia a failli quitter les écrans radar pour avoir réagi un peu
tardivement à l’implacable passage du téléphone mobile au Smartphone. Plus
récemment, Yahoo, en dépit de sa médiatique dirigeante, n’a pas pu rivaliser avec
l’immense Google et voit son activité de portail s’amoindrir.
Les causes sont-elles ici des erreurs stratégiques, des erreurs managériales, de l’arrogance, un
manque de chance ? Sans doute un peu de tout à la fois mais le changement de contexte a été, dans
tous les cas, l’élément déterminant.
B. Les entreprises
L’entreprise, acteur principal, sinon unique, de la démarche stratégique, n’est plus celle que l’on
connaissait il y a peu. Les changements sont-ils réels ? Pérennes ? Achevés ? La réponse à ces
interrogations est vraisemblablement négative mais on peut toutefois insister sur deux points.
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Le premier est, pour les entreprises, la prise de conscience de la nécessité d’une réelle humilité à
l’égard de l’environnement. D’abord, aucune entreprise ne peut s’autoriser à négliger les
préoccupations environnementales. Ensuite, chacun sait que le monde change aujourd’hui davantage
en Asie et en Amérique latine, voire en Afrique, qu’en Europe et en Amérique du Nord. Enfin, sans
verser dans un angélisme inutile qui pousserait à voir les entreprises à la quête d’une image plus
« citoyenne », reconnaissons que le passage d’une unique shareholder value à une shared value
synonyme de partage, est en marche. C’est à l’apôtre du libéralisme bon teint, Michael Porter,
qu’est due cette expression publiée pour la première fois dans un article de la prestigieuse Harvard
Business Review en janvier 2011. Les entreprises se doivent d’adjoindre aux seuls actionnaires,
dans leurs objectifs, les personnels, les clients et peut-être d’autres acteurs.
The winner takes all!
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Le second point est l’extrême diversité des positions concurrentielles, et ceci avec des évolutions
rapides, des entreprises et de ce fait, de leurs performances. Alors que Total, Schneider, LVMH et
Airbus affichent des santés remarquables, EDF et la Société Générale sont à la peine. Dans ces
conditions, il est fort délicat de suggérer à des entreprises aussi dissemblables de suivre des
principes identiques pour mettre en œuvre leur démarche stratégique.
Les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) sont devenus invincibles. Les licornes sontelles leurs successeurs ?
C. Les personnes
Les dirigeants changent, les managers évoluent et les collaborateurs se transforment. Le regard
porté sur les personnes et le regard que les personnes portent sur les autres ainsi que sur leur
entreprise n’est plus le même. Comment caractériser ces modifications ? Fatalisme mais aussi
engagement, pessimisme et également dynamisme, défiance accompagnée de volonté... tout est dans
tout. Les personnes sont devenues complexes. Selon Booz and Cy (2011), les dirigeants,
appartiennent à l’une des quatre catégories suivantes :
– les Holding Companies (le dirigeant vit son métier comme celui d’un gestionnaire –
financier – d’un portefeuille d’activités) ;
– les Strategic Management Companies (le dirigeant apporte exclusivement une vision à ses
troupes) ;
– les Active Management Companies (le dirigeant supervise diverses activités) ;
– les Operational Involved Companies (le dirigeant est impliqué dans la partie opérationnelle
de son groupe).
La question est alors de savoir comment suggérer des outils uniques aux dirigeants, aussi
hétéroclites, de ces quatre catégories. Les managers et les collaborateurs n’ont rien à envier à ces
derniers en termes de diversité. Adressons toutes nos félicitations au responsable d’une équipe
projet comptant à parts égales des représentants des générations « X », « Y » et des « Z » !
Face à ces évolutions, les spécialistes du management stratégique ne manquent pas de faire valoir
leurs opinions même s’ils mettent souvent la sourdine. Pour sortir la démarche stratégique de
l’ornière, Gary Hamel, expert s’il en est, conseillait récemment d’axer la volonté des dirigeants
vers « plus de valeurs » (seul moyen de mobilisation), « plus d’innovation » (pour rester en tête du
peloton), « plus d’adaptabilité » (pour maîtriser le changement), « plus de passion » (pour
développer l’enthousiasme) et « plus de liberté » (pour savoir dépasser la logique du tout
contrôle).
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On ne peut qu’être attentif à ces idées. Il faut absolument sortir du désarroi. Tout est bon, y compris
les antiennes rabâchées depuis toujours. Mais il convient d’être également quelque peu distant : les
gourous retombent vite dans les recettes au goût de « Yakafokon »(6). Où est la bonne formule ? Si
elle existe, elle se situe à coup sûr entre pragmatisme, écoute, bravoure, humilité et détermination.
Telle est la position que nous adoptons dans cet ouvrage.
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Figure 1.13. Le schéma d’analyse d’un cas de stratégie
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Mini-cas : la stratégie, un sens et une vision à retrouver
Les pays occidentaux traversent une crise majeure qui est en passe de devenir sociale et
politique. Au-delà de la redistribution des cartes que nous vivons dans les domaines
économiques et sociaux, il s’agit même probablement d’une crise de la pensée et du sens de
l’action. Serions-nous au bord d’une catastrophe ?
De plus en plus d’institutions, et d’abord les entreprises, sont assaillies par le court terme. La
seule logique qui semble compter est celle de l’immédiateté. Du coup, les entreprises souffrent
d’un processus délétère qui détériore la confiance dont elles jouissaient, il y a encore peu de
temps, parmi les consommateurs, les salariés et la société en général. Leur légitimité est remise
en cause. Nous sommes au pied du mur.
Après la famille, l’école, l’Église, les entreprises semblent se déliter dans un magma informe où
plus personne ne trouve de points de repère. Continuer dans cette voie permettra peut-être à
certaines de passer le gué, mais elles en sortiront en lambeaux, moribondes.
Ces trente dernières années de mondialisation galopante, alimentées par les technologies de
l’information, ont été un vaste leurre collectif. Nous nous sommes laissé duper par beaucoup de
discours qui se voulaient innovants, voire révolutionnaires, et qui se sont révélés utopistes. Nous
nous sommes imaginé que nous pourrions spécialiser certains pays dans la production, d’autres
dans les services, d’autres encore dans la finance, et que tout le monde bénéficierait de cette
nouvelle spécialisation.
L’enrichissement fulgurant de certaines zones
C’était oublier que la mondialisation n’a pas rendu les marchés plus efficients qu’auparavant.
Comme souvent lorsqu’il y a un changement profond, nous avons pu assister à l’enrichissement
fulgurant de certaines zones (les pays asiatiques notamment) et à l’appauvrissement abyssal
d’autres. La richesse mondiale a certes globalement crû, mais certains acteurs y ont perdu,
pendant que d’autres progressaient. Difficile d’expliquer aux perdants que nous pouvons nous
réjouir d’un accroissement de la moyenne mondiale du pouvoir d’achat !
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La durée de la crise remet en cause ces illusions. On sait qu’il faut, par exemple, réindustrialiser
des pays comme la France, faute d’être forcés d’accepter que notre spécialisation à terme soit
celle d’un « musée du monde ». Pour réussir ce défi, les entreprises doivent retrouver le sens de
la stratégie, de la vision à long terme. Il ne s’agit donc plus simplement pour elles de gérer le
changement, mais de se réinventer. Une vraie révolution.
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Ces dernières années ont donné beaucoup de poids aux actionnaires. On en connaît les raisons
légitimes, mais de nouvelles règles du jeu sont à trouver pour sortir de cet objectif encore trop
souvent unique qu’est la valeur à court terme.
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Le développement durable, qui se substitue aujourd’hui à la création de valeur pour
l’actionnaire, exige que les entreprises tiennent compte de tous leurs partenaires. Elles ne
pourront pas prospérer dans une société en décomposition sociale, avec une forte baisse du
pouvoir d’achat et une confiance écornée dans le système économique et financier, avec des
ressources rares et une planète abîmée.
Restaurer la confiance
La crise va imposer une refondation du dialogue social. Les entreprises pourront ainsi restaurer
la confiance et redémarrer plus vite, plus fort, et de façon plus durable, en mobilisant leurs
équipes et en attirant les talents dont elles ont besoin.
Enfin, pour être pleinement responsables, elles devront aussi davantage travailler sur les sujets
de société avec les territoires et les collectivités où elles sont implantées. La géographie est plus
que jamais importante dans les réflexions stratégiques.
Ne nous leurrons pas, une telle approche nécessitera énormément de courage. Les poncifs
lénifiants de la gestion du changement doivent être dépassés. Il faudra accepter des larmes, et
espérons que nous éviterons le sang. Il ne sera pas facile de gérer simultanément l’austérité et la
relance. Tout le monde devra être concerné. Il nous faudra en particulier accepter de corriger le
manque de leadership dont nos sociétés occidentales souffrent énormément. Ce nouveau
leadership devra se construire, au-delà des compétences techniques, sur une conscience
sociétale.
On l’aura compris, il nous faut rapidement repenser nos modèles, mais c’est une occasion unique
pour les entreprises. Il ne s’agit pas seulement pour elles d’éviter la catastrophe à court terme,
mais de retrouver une indiscutable légitimité.
Tribune de B. Ramanantsoa, directeur général de HEC, « Éviter la
catastrophe, retrouver une légitimité », Le Monde Économie,
17 septembre 2012.
Question
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Compte tenu des contextes économiques, financiers, politiques, réglementaires, et en vous
fondant sur l’article, pensez-vous que l’on puisse encore enseigner la stratégie aujourd’hui ?
Chapitre 2
La démarche stratégique
Les compétences clés à acquérir :
• Connaître l’évolution des idées et des pratiques en matière de démarche stratégique.
• Savoir ce que recouvre la notion de démarche stratégique.
• Discerner les différentes étapes du processus.
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• Savoir ce qu’implique le concept d’objectif.
• Planifier la fixation des objectifs.
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• Prendre la mesure des différents courants de démarche stratégique.
• Mesurer le poids pris par les aspects financiers dans la stratégie.
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• Intégrer les questions liées au développement durable de l’entreprise.
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Dans toutes les entreprises, les managers élaborent des plans, bâtissent des programmes, mettent en
place des instruments de contrôle, bref s’efforcent d’imaginer et de construire le futur de la firme.
On appelle planification stratégique (strategic corporate planning) le processus, le déroulement
méthodique qui consiste à formuler les objectifs visés et à choisir les moyens appropriés pour y
parvenir.
La réflexion, à propos de ces processus, a débuté dans les années 1960. Elle s’est enrichie au cours
du temps, mais elle a aussi été critiquée par certains auteurs ou par certains consultants souhaitant
proposer – ou vendre – d’autres outils. De telles controverses, dont les journalistes se délectent,
laissent généralement les managers de marbre. Ainsi des entreprises comme Vinci, Free ou encore
Google continuent à planifier. Même si d’aucuns prédisent régulièrement sa disparition, la
planification stratégique mérite d’être analysée. Nous avons donc pris le parti d’en présenter les
différents outils, lesquels forment une batterie toujours utilisée par les praticiens.
I. Le processus stratégique
Nous sommes ici au cœur d’un domaine profondément influencé par l’environnement culturel de
l’entreprise. D’un pays à un autre, d’un secteur à l’autre, d’une entreprise à une autre, le processus
stratégique diffère. Par conséquent, il est bien difficile de présenter des schémas normatifs dont le
champ d’application serait généralisable. Soulignons cependant que, pour répondre aux
changements accélérés des marchés et de la technologie, l’activité stratégique ne se prête pas à une
routinisation figée de tâches toujours identiques visant à atteindre des buts immuables. La stratégie
est un enchaînement de décisions ininterrompu concernant des objectifs qui évoluent et des moyens
destinés à atteindre ces objectifs.
Nous allons exposer tout simplement ce qui est le plus courant et nous commencerons par le
concept de planification qui, pendant de longues années, a été purement et simplement assimilé au
processus stratégique.
A. Le concept de planification
La planification s’inscrit dans le cadre de la gestion prospective. Celle-ci consiste à introduire
l’avenir dans les décisions du présent. Dans une firme, la gestion prévisionnelle est une nécessité
absolue. Les entreprises, et c’est d’autant plus vrai qu’elles sont grandes, ressemblent aux grands
bateaux qui ne peuvent brutalement virer à droite ou à gauche, s’arrêter ou reculer. Une bonne
décision intègre donc les données du futur (la prévision) et, ce faisant, prépare cet avenir en gérant
mieux le présent. Cela constitue un exercice périlleux ; l’avenir est par définition incertain même si,
parfois, des probabilités peuvent être attachées à tel ou tel événement (univers aléatoire).
1. Ce qu’elle n’est pas
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La planification est l’action qui marque la volonté de l’entreprise d’agir sur le futur ; elle se
traduit par des tableaux, des déclarations, des figures et schémas. « Planifier c’est concevoir un
futur désiré et les moyens d’y parvenir. » Dans un article célèbre, Peter Drucker définit la
planification en deux temps.
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La planification n’est pas la prévision, car en plus de celle-ci on trouve la volonté de l’entreprise
d’agir sur le futur.
La planification ne conduit pas à décider pour le futur : elle permet de prendre des décisions
aujourd’hui en fonction de leurs conséquences à venir.
La planification n’élimine pas le risque : le risque est inhérent au management.
La planification n’a pas pour but prioritaire l’élaboration d’un plan : le résultat de l’action (le plan)
est infiniment moins important que l’action elle-même (la planification).
2. Ce qu’elle est
La planification est un instrument d’action : elle donne à l’entreprise le moyen d’agir sur le futur.
La planification est un instrument de motivation : elle engendre une telle circulation d’informations
entre les acteurs que chacun peut se sentir plus motivé par la réussite de l’ensemble.
La planification est un instrument de cohérence : elle assure les ajustements entre les personnes,
entre les divisions, entre les échéances.
En caricaturant, on peut aller jusqu’à dire que, dans la planification, c’est le plan qui reste le moins
important. Celui-ci n’est pas contraignant ; il sera revu si les données changent. Mais l’activité, le
processus même et l’état d’esprit qui suscitent dans tous les services une attitude dynamique à
l’égard de l’environnement sont de loin les éléments essentiels.
La planification, d’ailleurs, ne va pas de soi ; elle rencontre tous les jours des obstacles. Ceux-ci
tiennent à deux causes :
– d’une part, les cadres de l’entreprise sont submergés par les problèmes quotidiens, par les
décisions à prendre dans l’instant, par la routine, et ne dégagent qu’avec peine du temps
pour la réflexion ;
– d’autre part, la pression du présent est forte. On peut comprendre que l’horizon d’un
manager ne dépasse pas la période sur laquelle il sera possible de mesurer sa performance.
Un chef de produit, qui sait qu’il n’occupera ce poste que pendant deux ans, est-il tenté de
s’intéresser à ce qu’il adviendra de ce produit après les deux années ?
Pour reprendre l’image des bateaux, nous nous situons ici au moment décisif du « changement de
cap », lorsque l’entreprise, pour atteindre l’avenir qu’elle se donne pour objectif, doit hisser de
nouvelles voiles et réorienter son gouvernail.
B. L’évolution de la notion de démarche stratégique
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Au cours du temps, les idées ont évolué. L’évolution de la démarche stratégique peut être découpée
en plusieurs phases.
1. L’influence du contrôle budgétaire
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Dès les années 1920, un certain nombre d’entreprises nord-américaines innovent dans ce domaine.
Certains responsables, tel Donaldson Brown, le premier, chez DuPont de Nemours, mettent en place
des méthodes de prévision de durée moyenne (un an), emboîtées et coordonnées entre elles, et qui
coïncident avec des découpages de responsabilité.
2. La politique générale et l’école de Harvard
C’est à l’université de Harvard que l’on va découvrir, au cours des années 1950, cette nouvelle
discipline managériale que constitue la politique générale (Corporate Policy). Comme les
entreprises vendent de nombreux produits sur de nombreux marchés, le rôle de la direction générale
consistera, entre autres, à harmoniser la politique générale et les stratégies produits/marchés
(Business Strategy).
Dans toutes ces études, on allonge l’horizon de la prévision (de 2 à 10 ans), mais les techniques
restent « mécanistes ». On prolonge les phénomènes de gestion dans le temps. Or, comme on
l’imagine, cette méthode rencontre rapidement des limites, car le futur n’est en rien assimilable à du
passé prolongé.
Vers les années 1960 cependant, certains chercheurs de la célèbre Business School proposent
de fonder la politique générale sur une fine analyse des capacités de la firme et des ressources de
l’environnement. L’esprit de planification change alors ; on devient de plus en plus sensible aux
ruptures qui brisent les trends ; on se met à tenir compte des aptitudes des dirigeants, de leurs
expériences, de leurs valeurs.
En vue de formaliser ces analyses, de les rendre plus méthodiques, on élabore des modèles ; l’un
des plus célèbres d’entre eux restant le modèle LCAG (du nom des auteurs : Learned, Christensen,
Andrews, Guth), qui s’applique à la stratégie de domaine (Business Strategy) (figure 2.1).
Figure 2.1. Les principes du modèle LCAG
3. La planification stratégique (Strategic Planning)
Exemple
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Elle se développe à partir des années 1970, sous l’impulsion d’Igor Ansoff et de consultants
appartenant à des cabinets spécialisés en stratégie. On perfectionne la méthode (« analyses
stratégiques ») et on invente de nouveaux outils (courbes d’expérience, matrices, etc.). La
cohérence de la démarche et la simplicité pédagogique des instruments incitent de nombreux
responsables à adopter ces procédés, le succès cédant la place à l’engouement. Il s’agit presqu’une
d’une foi. Au cours de ces dernières années, d’aucuns ont estimé que la capacité d’analyse alliée à
une volonté sans faille permettait de surmonter toutes les incertitudes du futur.
Coca-Cola calcule le nombre d’envies de boire quotidiennes des habitants de la
planète, retranche les demandes non solvables, détermine sa part de marché cible sur
le solde et adapte ses produits aux goûts des consommateurs. L’entreprise induit de ces
données son chiffre d’affaires et son bénéfice.
4. La planification douce ou le Soft Management
Mais, à la fin des années 1970, les instruments et la méthode de l’analyse stratégique vont être
vivement critiqués. Porter propose un schéma d’analyse concurrentielle qui remplace les outils
récemment élaborés. Plus encore, on critique l’esprit de la planification stratégique que l’on juge
parfois trop coûteuse et excessivement procédurière. D’une certaine manière, c’est le procès de la
rationalité – de « l’hyperrationalité », elle-même irrationnelle – en management qui est alors fait.
On stigmatise les entreprises, telle General Electric, « malade de la science », dont le projet de
domination des hommes, du monde et du temps paraît démesuré. Pour remplacer toutes les
tentatives prométhéennes de maîtrise stratégique, certains auteurs proposent une forme de
renaissance de la simplicité managériale décrite comme retour au paradis perdu. Le succès en
management n’est plus conditionné par la rigueur d’une démarche planificatrice, mais par le respect
de principes simples et sages qui consistent essentiellement à mobiliser les ressources humaines, à
écouter le client et à être réactif. Un tel management de bon sens, mais simpliste, se fonde
davantage sur les incantations (« zéro défaut », « zéro mépris ») que sur les analyses. Il possède
cependant des qualités, puisqu’il impose de s’interroger sur les organisations, sur la culture de
l’entreprise, sur son mode de direction. Mais, pour autant, la planification stratégique continue de
se développer. Elle touche de plus en plus les moyennes, voire les petites entreprises. Le processus
stratégique évolue, car les managers, dégrisés de certaines naïvetés, ne peuvent plus éviter de
prendre en compte les modifications de l’environnement.
La stratégie ne résulte pas d’heures de recherches et de modélisation minutieuse… Elle est le
résultat d’un processus simple et assez rudimentaire. Stratèges, sortez de vos zones de confort :
– piège n° 1 – la planification stratégique : trop de « plans toujours changeants » ;
– piège n° 2 – une réflexion centrée sur les coûts ;
– piège n° 3 – des cadres stratégiques autoréférentiels : partir de cadres trop connus(7).
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5. La vision stratégique : un futur désiré
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L’enseignement des dernières années nous laisse songeurs. En 2008, le monde semblait bien aller.
La liberté politique et l’initiative individuelle paraissaient pouvoir s’épanouir jusque dans les
coins les plus reculés de la planète ; la croissance économique était la plus rapide de l’histoire ;
tout laissait augurer qu’elle allait se poursuivre pendant des années grâce à une très forte
progression démographique, à l’existence d’une épargne abondante, à des progrès scientifiques et
techniques extraordinaires permettant d’espérer un développement durable.
Et patatras ! Voilà qu’une dépression fond sur la planète. Qui l’aurait prévue, même si l’on avait su
que certaines familles américaines se révélaient incapables de rembourser un crédit sur leur
logement ? Or, c’est bien là où réside la difficulté. L’effet papillon, qui veut que le battement d’aile
d’un de ces sympathiques lépidoptères au Brésil entraîne une tornade au Texas, déjoue les
tentatives de prévision des managers, comme il bouleverse les prédictions des météorologues.
La naissance d’une crise(8)
Nous sommes avant 2008. Les salaires des classes moyennes, aux États-Unis, stagnent. Les
ouvriers et employés sont incités à s’endetter (subprimes = crédits à haut risque) pour acheter
leurs logements. Le marché immobilier et celui du bâtiment connaissent alors une belle
croissance. Trop belle même, car l’endettement finit par dépasser le seuil tolérable. D’où perte
de confiance et fuite devant toute dette. Les banques du monde entier s’affolent ; certains
établissements disparaissent et obligent les chefs d’états à les renflouer. Or, les banques,
devenues frileuses, refusent de prêter à des entreprises saines qui tombent en faillite. La débâcle
bancaire, puis financière devenue économique, engendre une crise sociale de grande envergure,
particulièrement en Europe. Des millions de travailleurs sont au chômage.
Quelles leçons en tirer ?
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Depuis plus de 20 ans, l’obligation d’obtenir un ROE à 15 % (Return on Equity, c’est le
rendement des actions) entraînait les entreprises et les banques à prendre des risques démesurés.
Les managers et les banquiers ont souvent joué avec le feu et les contrôleurs les ont laissé faire.
Apprendre la stratégie, c’est apprendre à être mesuré, en mettant fin à l’absurdité d’un ROE à
15 % !
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a. Les effets de la crise sur le management
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On constate que le passé a progressivement perdu son rôle de garant d’un avenir maîtrisé ; le
présent, même lui, est vilipendé comme fauteur de myopie et inhibiteur d’innovations stratégiques
véritablement créatrices de progrès. Il faut « désapprendre le présent » et « reconstruire une
architecture stratégique », en développant une « vision stratégique ». On parle aussi d’« intention
stratégique », ce qui n’est autre que la représentation d’un futur désiré.
L’étude de grands groupes français met en évidence le fait que les raisons de la popularité du
concept de vision dans les milieux managériaux tient à ses caractéristiques et au fait qu’il remplisse
plusieurs fonctions.
Exemple
La vision de l’entreprise Valeo se définit par une croissance fondée sur l’innovation et
le développement en Asie, dans un contexte mondial de forte évolution de l’industrie
automobile. La stratégie de l’équipementier s’articule autour de deux axes : devenir le
partenaire incontournable des constructeurs dans la réduction des émissions de CO2 et
accélérer son développement dans les pays émergents et en Asie. Deux idées forces
guident cette stratégie : l’entreprise mobilise ses équipes en interne et affiche sa
détermination en externe. Il n’y a pas de chiffres, pas d’éléments opérationnels,
seulement une image de l’avenir que la direction souhaite faire partager.
La vision est généralement synthétique, aisément diffusable, intégratrice de différents concepts
du management (métier de l’entreprise, objectifs et moyens, culture, valeurs, etc.).
En résumé, la vision, en projetant une représentation commune de l’avenir souhaité de l’entreprise,
permet de diffuser simplement un message cohérent sur ses finalités.
Figure 2.2. La vision, caractéristiques et fonctions
Forte de ces caractéristiques, la vision remplit plusieurs fonctions complémentaires.
La vision est un moyen de communication :
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• À l’extérieur, la vision sert de « résumé » de la stratégie de l’entreprise vis-à-vis à la fois du
monde financier et des médias économiques. Compte tenu de l’importance prise au cours
des deux dernières décennies par la sphère financière, pouvoir diffuser de manière simple,
succincte l’orientation de la stratégie de l’entreprise sans toutefois entrer dans des détails
trop confidentiels, est important. Ainsi, l’affichage, comme vision stratégique, de la volonté
de devenir leader sur ses marchés, constitue une réponse au besoin de clarification du
monde financier concernant les stratégies des grandes entreprises évoluant dans des secteurs
mondialisés, très concurrentiels, où il est nécessaire de concentrer ses ressources sur un
seul ou sur un petit nombre de métiers.
• À l’intérieur de l’entreprise ou du groupe, les dirigeants souhaitent, par ce moyen, donner du
sens à l’activité des salariés ;
– ceux-ci ayant un niveau de qualification plus élevé que par le passé, ils sont
demandeurs d’un lien entre leur travail quotidien et les objectifs plus globaux de
l’entreprise ;
– les grandes entreprises se sont transformées en multinationales composées de salariés
de cultures très différentes et donc difficilement mobilisables dans une direction
identique.
La vision possède une dimension identitaire ; elle peut constituer un référentiel commun et elle est
un moyen pour fédérer l’ensemble des personnels autour d’une finalité commune exprimée d’une
façon compréhensible par le plus grand nombre.
La vision joue un rôle de mobilisation des équipes dans un sens commun. Elle permet d’orienter et
de guider les comportements et les pratiques managériales.
La vision possède également une fonction justificatrice. Grâce à un message simple et
relativement large, elle permet de masquer les jeux de pouvoir et les stratégies individuelles ou de
groupes des différentes parties prenantes de l’organisation. Ainsi, tant vis-à-vis de l’externe que de
l’interne, l’entreprise apparaît comme un tout homogène. Elle bénéficie d’un relatif degré de liberté
dans son adaptation à l’environnement et dans l’intégration de stratégies, éventuellement
émergentes.
Exemple
La société chinoise Huawei, qui connaît une croissance exceptionnelle sur les marchés
mondiaux à partir de sa base domestique, fonde son développement sur une adaptation
continue aux contextes. D’abord présente dans les équipements télécoms lourds, elle
s’est ensuite orientée vers le léger (les softs) puis vers les antennes 4G. Enfin, elle
annonce vouloir devenir le premier fabricant mondial de Smartphones. Sa stratégie
s’adapte pas à pas aux évolutions technologiques et aux changements des marchés.
b. Management de crise ou crise du management ?
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Pour parvenir à cette fin, l’entreprise ne doit pas mettre en œuvre une planification naïve mais se
lancer dans une analyse de ses compétences fondamentales à partir desquelles elle construira son
réseau d’activités.
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Nous retrouverons cette approche lors du diagnostic stratégique. Il demeure qu’aujourd’hui on est
assurément incité à reconnaître que la simple notion de part de marché (sur laquelle était bâtie la
planification stratégique) rive en quelque sorte l’entreprise à son présent, alors que les marchés de
demain seront autrement découpés, voire émergeront de domaines méconnus.
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Au surplus, dans la démarche naïve de planification, les effets limitatifs sont bien connus. Ils ont été
regroupés par Henry Mintzberg autour de trois idées :
• L’erreur de prédétermination. Il n’est plus envisageable de prévoir avec une précision
acceptable l’évolution de l’environnement.
• L’erreur de détachement. On pense à tort que la planification peut être indépendante des
choix opérationnels ; c’est inexact car ces derniers conditionnent, par rétroaction, la
stratégie.
• L’erreur de formalisation. En voulant tout exprimer et tout quantifier, on tue l’intuition
véritablement créatrice de progrès.
Les vertus de la planification sont certes mises en cause mais l’on s’interroge également sur les
capacités d’apprentissage des entreprises.
Toutes ces controverses à propos de la planification stratégique n’ont pas abouti à supprimer le
processus mais à l’enrichir de manière à intégrer plus de complexité dans les analyses. Pour
parvenir à ce but, il convient que l’entreprise – c’est-à-dire tous les hommes et femmes qui la
composent – développe sa capacité d’apprentissage. Les champs de la psychologie et de la
sociologie nourrissent la réflexion. Les choix stratégiques reposent en effet largement sur des
représentations mentales.
On recourt à la psychologie de la cognition pour élaborer des cartes cognitives. Cette expression
désigne les schémas construits à partir des discours d’une ou de plusieurs personnes appartenant à
la direction générale. Une carte cognitive a pour objet de faire apparaître diverses variables reliées
entre elles, par exemple, pour une entreprise de vente sur Internet (figure 2.3).
Figure 2.3. Un exemple de carte cognitive
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La carte cognitive qui constitue une représentation schématique des règles de fonctionnement de
l’entreprise et de son environnement nous rappelle que les décisions stratégiques reposent sur des
perceptions de la réalité supposée et que l’importance du subjectif, du cognitif, ne doit pas être
négligée. Les cartes cognitives sont fréquemment partagées au sein d’une entreprise. Elles peuvent
l’être au sein d’un secteur et ce, de façon erronée.
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Exemples
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L’effondrement de la « nouvelle économie » liée aux activités d’Internet nous a, en son
temps, fourni l’illustration d’effets cognitifs partagés, tant dans la période
d’engouement que dans la phase de crise. Dans le secteur automobile, l’idée que, pour
être rentable, une entreprise doive produire six ou sept millions de véhicules neufs par
an fait partie de ces éléments cognitifs partagés, et non nécessairement étayés par les
faits.
Les cartes cognitives servent à mieux connaître la perception que le top management possède de
son environnement et des conditions de réalisation des objectifs. Cette technique fournit donc une
image concrète de la vision stratégique. L’outil peut aider à prendre des décisions et à
perfectionner l’apprentissage individuel et collectif. En effet, un manager ne conçoit pas seulement
des solutions à des problèmes rencontrés, il doit aussi appliquer concrètement les remèdes choisis.
Cet engagement dans l’action entraîne fréquemment un biais, un manque de recul ou un défaut de
sérénité qui bloque les capacités de réflexion.
Exemple
Lorsqu’un dirigeant manque de recul, l’élaboration d’une carte cognitive, avec l’aide
d’un consultant, peut l’aider à prendre conscience des solutions que son engagement
dans l’action masquait.
La carte cognitive facilite, au surplus, la transmission d’idées et enrichit la conscience collective
d’un groupe de décideurs.
Enfin, l’outil sert à prévoir le comportement stratégique, dans la mesure où la pensée inscrite sur
la carte préfigure l’action stratégique.
6. Une diversité de processus, une démarche idéalisée
On vient de constater que la conception du management stratégique a évolué au fil du temps. Elle
varie aussi en fonction de la vision que les managers ont de la rationalité ou de l’irrationalité qui
préside à la prise de décision et qui commande le rôle des équipes chargées de l’élaboration
stratégique.
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Figure 2.4. Les différentes formes de planification
Des théories ont été élaborées pour expliquer une telle diversité.
Les cinq attitudes résultant des visions contradictoires
• La sélection naturelle. Comme certaines espèces animales qui survivent parce qu’elles
subissent des mutations convenant à telle ou telle modification de l’environnement, les
entreprises produisent différentes stratégies. Certaines ne correspondent pas au
changement de l’environnement et les entreprises qui les ont adoptées disparaissent.
D’autres stratégies, au contraire, s’ajustent aux nouvelles données du milieu extérieur.
Les équipes managériales qui les ont formulées rencontrent alors le succès.
• La mode. Comme les chercheurs dans les sciences avec leur théorie, les managers sont
tributaires de représentations, de paradigmes, qui orientent leurs décisions stratégiques.
Lorsque la planification est de saison, toutes les (grandes) firmes s’efforcent de
s’engager dans cette voie. Lorsque la mode passe, les dirigeants changent de méthode. On
parle en l’espèce de mimétisme organisationnel.
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• La complexité dans un environnement chaotique et imprévisible. Les managers
découvrent des signes qui les incitent parfois à changer de cap stratégique. Si cette
orientation est bonne, l’entreprise, au terme d’une démarche d’apprentissage, pourra
garder en mémoire les contenus et les processus de décision.
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• La rationalité pas à pas qui s’apparente à la rationalité limitée (Herbert Simon). Les
décideurs prennent des décisions d’ordre stratégique lorsque des problèmes importants
se posent ou lorsque des occasions fructueuses se présentent. Petit à petit, l’entreprise
« apprend » et les responsables adoptent un cadre de décision méthodique.
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• La rationalité pure et parfaite. Elle représente le cas où les équipes stratégiques d’une
firme prennent des décisions logiques et construisent l’avenir au travers de planifications
formalisées et systématiques.
Nombreuses sont les modalités pratiques d’élaboration des stratégies : depuis l’absence même de
stratégie formulée jusqu’à la programmation méthodique des décisions. D’une manière générale, on
observe que les managers tracent des sentiers stratégiques constitués de décisions prises « pas-àpas » pourrait-on dire. À une succession de décisions mineures succède au fil du temps un choix
important qui bouleverse l’organisation. Toutefois, derrière cette diversité apparente, on relève les
traces, plus ou moins marquées, d’une démarche idéale telle qu’elle a été formulée par les tenants
de la planification stratégique.
7. Les différentes étapes de la démarche stratégique
Il est commode de présenter ici, dans un schéma d’ensemble, l’intégralité du processus stratégique,
avec ses différentes étapes (figure 2.5). Nous donnerons quelques indications à propos de chacune
d’elles en sachant que les phases de diagnostic et de choix des orientations seront reprises en
détail. Soulignons que cette démarche constitue un modèle destiné à susciter la réflexion des
managers. Dans la réalité, en fonction notamment de la taille des entreprises et des secteurs, les
méthodes effectives divergent, à des degrés divers, d’un tel idéal de rationalité.
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a. Le diagnostic
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Figure 2.5. La démarche stratégique
Le diagnostic (l’analyse externe et l’analyse interne confrontées à la fixation des objectifs)
constitue la première phase et donne à l’entreprise toutes les indications souhaitables pour
confronter ses perspectives avec ses forces et ses faiblesses, ses ressources, ses compétences.
b. L’écart stratégique
L’écart stratégique ou planning gap (figure 2.6) résulte d’une comparaison entre l’objectif et la
prévision, qui elle-même découle des analyses externes et internes.
Figure 2.6. L’écart stratégique
Cette comparaison traduit une simple extrapolation du passé ; elle représente un futur subi, non pas
au sens où l’entreprise cesserait tout effort (on voit sur le graphique que la prévision de chiffre
d’affaires (n + 5) est supérieure au chiffre d’affaires actuel), mais au sens où elle n’entamerait
aucune action nouvelle particulière. L’objectif, quant à lui, dépend d’une série d’éléments que nous
exposerons ultérieurement. Ici, nous avons proposé un planning gap en termes de chiffre d’affaires ;
les taux de rentabilité ou les parts de marché pourraient tout aussi bien être utilisés.
Il demeure que l’entreprise se trouve aujourd’hui confrontée à un écart entre les objectifs n + 5 et la
prévision n + 5. C’est précisément le rôle de la démarche stratégique, et d’abord de l’analyse
stratégique, de combler cet écart. On retrouve bien ici l’idée selon laquelle la démarche engage à
prendre, dès à présent, des décisions en fonction de l’avenir souhaité.
De nos jours, la notion d’écart stratégique n’est plus guère employée en tant que différence entre
stratégie subie (prévisions) et stratégie voulue (objectifs). En revanche on distingue :
• La stratégie déduite. Les managers formulent la stratégie au terme d’une analyse des
opportunités externes. Autrement dit, on adapte les choix aux contraintes de
l’environnement.
• La stratégie construite. Elle consiste à repérer les ressources et compétences de la firme en
vue de créer les opportunités nouvelles, celles grâce auxquelles on se dotera d’un avantage
concurrentiel.
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Figure 2.7. Les dimensions déduites et construites
En réalité, la césure entre ces deux méthodes n’a qu’une vertu pédagogique. Nous allons constater
que les stratégies effectives comptent à la fois une dimension déduite et une composante construite.
c. La décision stratégique
Une technique de sélection d’une stratégie s’inspire de la méthode de prise de décision, telle
qu’elle a été formulée par Simon. On se trouve alors confronté aux questions suivantes (figure 2.8) :
Figure 2.8. La décision stratégique
Comment rechercher des choix possibles ?
Le point de départ est constitué par les objectifs et l’écart stratégiques de l’entreprise. Souhaite-telle croître en chiffre d’affaires, développer sa rentabilité pour les actionnaires, constituer un
patrimoine familial ? Selon les objectifs stratégiques retenus par l’équipe de direction, les choix
envisagés diffèrent.
Les résultats du diagnostic interne, au travers des forces et des faiblesses mises en relief, des
compétences spécifiques et des ressources détectées, orientent également les choix stratégiques
étudiés. Par exemple, une entreprise qui possède des compétences en matière de marketing direct et
de logistique est encline à envisager des choix stratégiques dans le commerce sur Internet.
Les résultats du diagnostic externe, au travers des opportunités et des risques, conduisent aussi à
analyser l’intérêt de certaines options.
Exemples
• Cdiscount, première entreprise française de e-commerce, a été lancée par trois
frères entrepreneurs, les frères Charle, puis a été reprise par le groupe Casino.
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• EasyJet, mesurant le contexte économique tendu pour les entreprises, cible la
clientèle « affaires ».
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La recherche des choix possibles peut être marquée par le principe de la rationalité limitée qui
conduit les managers à cesser la recherche de solutions possibles lorsqu’ils en trouvent une qui est
« satisfaisante » par rapport aux objectifs fixés.
Comment évaluer les choix possibles ?
À ce stade, il s’agit d’analyser si l’on peut réaliser les objectifs. Sur le plan pratique, il peut être
utile de clarifier le processus de choix à l’aide de la grille de comparaison ci-après. La démarche
consiste successivement :
– à définir des critères de choix ;
– à pondérer ces critères ;
– à noter chaque choix possible par rapport à chaque critère ;
– à totaliser les scores.
Bien sûr, il est illusoire de penser que les décisions stratégiques peuvent être prises de façon
algorithmique. La présente grille, dont les critères sont indicatifs (tableau 2.1), n’a d’intérêt que
pour la démarche qu’elle impose au décideur ou aux groupes de décideurs.
Sur quels critères peut-on juger les choix possibles ?
On distingue plusieurs critères :
– La « philosophie » de l’entreprise. On entend par cette expression les valeurs de l’équipe de
direction, tant économiques que sociales, voire morales. Elles ne vont pas manquer
d’influencer les choix stratégiques : une politique agressive ou au contraire une préférence
pour la stabilité, par exemple.
– Le degré de réalisation des objectifs. Pour chaque choix possible, on examinera les chances
qui existent d’atteindre les objectifs. Dans ce cas encore, des tableaux sont utiles, où l’on
affecte chaque stratégie d’un coefficient de probabilité.
– Le risque. Il est impliqué par les différents choix possibles. On sait ainsi que la recherche
d’un grand profit s’accompagne d’un risque important. Or, quel niveau de risque peut-on
accepter dans notre firme ? La réponse à cette question dépend essentiellement des valeurs
de l’équipe de direction vis-à-vis du risque. À une équipe timorée, on ne pourra pas
proposer les choix les plus hardis.
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Tableau 2.1. Un exemple de grille d’évaluation stratégique
– Les forces et les faiblesses de l’entreprise, les ressources disponibles et les compétences
maîtrisées. Elles servent à analyser et à mettre en relief les aptitudes et les compétences de
l’entreprise. Par exemple, maîtrise-t-on la technologie ? Les dirigeants possèdent-ils un
goût suffisant pour entreprendre ? Quelles sont les aptitudes réclamées par le marché ? Quel
est notre principal avantage par rapport au concurrent le plus proche ? Quelles sont nos
faiblesses par rapport à ce rival, etc. ?
– La synergie. La direction de l’entreprise compare les choix stratégiques en fonction de leurs
complémentarités par rapport aux stratégies actuelles.
Qu’est-ce qu’une synergie ?
On dit qu’il y a effet de synergie lorsque la combinaison de deux ou plusieurs stratégies aboutit à
un meilleur résultat que si l’on considérait isolément les résultats de chaque stratégie (2 + 2 = 5).
À niveau de risque égal, le « mix » stratégique qui produit les meilleurs effets de synergie sera
donc sélectionné.
Concrètement, on se posera des questions comme celles-ci :
– Le canal de distribution actuellement utilisé peut-il servir à vendre le nouveau produit que
nous envisageons de lancer ?
– Notre équipement technologique actuel suffit-il pour fabriquer le nouveau produit ?
Il convient de distinguer deux types de synergie :
• Les synergies de chiffre d’affaires. Elles se traduisent par une croissance du chiffre
d’affaires global résultant des complémentarités commerciales (hôtels et locations de
voitures, par exemple).
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• Les synergies de réduction de coûts. Elles résultent des économies faites lors de la fusion
d’activités.
Exemple
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Mais attention, il existe aussi, même si l’on en parle beaucoup moins, des synergies négatives
(2 + 2 = 3). Elles ont notamment pour cause des incompatibilités de cultures, d’organisations, de
gammes de produits, d’images, de systèmes d’information.
Les échecs de certaines fusions (Alcatel-Lucent repris ensuite par Nokia), voire les
processus qui avortent (Publicis Omnicom), illustrent les difficultés réelles de ces
opérations.
Pourquoi ces incompatibilités si fréquentes ne sont-elles pas anticipées ? Parce que, dans de
nombreux cas, les opérations sont étudiées sur un plan prioritairement financier et que l’on
considère à tord que « l’intendance suivra ».
d. Les plans opérationnels
La stratégie reste à un niveau de description générale du futur désiré pour la firme. Il va s’agir, au
stade où nous sommes parvenus, de transformer cette vision globale en plans précis et concrets
(business plans). Ces sous-stratégies s’appliquent aux différentes divisions et fonctions de
l’entreprise. Différentes questions peuvent alors se poser.
Exemple
Si la stratégie choisie est la diversification du produit, on peut notamment se poser les
questions suivantes :
• Quelles usines choisir ?
• Quel processus de production mettre en place ?
• Quel plan d’investissement adopter ?
• Comment financer les investissements ?
• Faut-il augmenter le capital ?
• À quel segment de marché convient-il de s’adresser ?
• Par quels canaux de distribution ?
• Quel prix établir ?
• Quelle structure choisir ?
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• Qui impliquer ?
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e. Les budgets
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Pour coordonner les activités, on crée souvent un groupe de projet animé par un project manager.
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Puis, pour chacune des divisions et fonctions impliquées, on établit des engagements financiers
pour une période donnée qui est généralement d’un an (tableau 2.2).
Tableau 2.2. La traduction budgétaire de la stratégie
Stratégies et
Budget Budget Budget Budget
sousTotal
production finance
RH marketing
stratégies
A
B
C
D
Total
Avant le lancement d’une nouvelle stratégie, il convient de vérifier si les prémisses ne changent
pas.
Exemple
On peut notamment se poser la question suivante : la conjoncture est-elle la même ? Si
ces fondements changent, les plans stratégiques doivent être alors modifiés.
En résumé, au cours de cette phase de mise en œuvre, on décompose la stratégie globale en souséléments divers.
Ces opérations constituent un processus décentralisé complexe qui touche tous les départements,
fonctionnels ou divisionnels, sur plusieurs niveaux hiérarchiques.
f. Le contrôle
Comprenons bien que les plans ne sont pas établis une fois pour toutes. Tous ces plans sont
glissants : lorsqu’une année passe, le premier exercice des plans fonctionnels devient un budget et
les plans par fonction voient eux-mêmes leur terme reculer d’une année.
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On observe, à nouveau, que le contrôle n’est pas assimilable à une simple succession linéaire
d’examens, mais qu’il constitue un enchaînement d’opérations complexes, à caractère cyclique,
hiérarchique, itératif.
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En conséquence, le processus n’apparaît pas fermé, mais il est continuel ou, pour être plus précis, il
se déroule continûment, au rythme de périodes de contrôle adaptées aux besoins de l’entreprise
(figure 2.9).
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Figure 2.9. Le contrôle stratégique
Exemple
Dans la distribution, les objectifs sont examinés et, le cas échéant, corrigés tous les
18 mois ; tandis que l’on évalue la stratégie tous les ans, les programmes et les plans
sont révisés tous les six mois. Dans d’autres entreprises, la période séparant deux
examens stratégiques est plus longue parce que l’environnement semble plus stable.
Tel est le cas des cimentiers. En revanche, lorsque le milieu extérieur est plus
turbulent – tel celui de l’informatique – la durée entre les révisions est réduite.
L’ensemble du mécanisme n’est pas placé sous la responsabilité directe de la direction générale.
Celle-ci ne fait que coordonner et approuver les différentes étapes. Pour bien le comprendre, et
également voir que le processus se déroule dans le temps, avec un calendrier précis, examinons
l’exemple de la figure 2.10.
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Figure 2.10. La démarche stratégique
Il apparaît clairement que les tâches sont réparties en fonction de la nature du travail, même si
la direction générale conserve la mission essentielle. Dans les grandes entreprises, on rencontre
généralement un ou plusieurs services qui ont pour tâche de veiller à une bonne coordination du
déroulement du processus. La place de ces services dans l’organigramme traduit l’idée que la
direction générale se fait de la planification.
L’orientation donnée par la direction générale dans les choix qu’elle opère est d’une grande
importance quant à la réussite de la démarche stratégique : elle ne met pas seulement en
mouvement, par ses choix, mais elle démultiplie leurs effets sur les collaborateurs, par un
comportement approprié.
La dernière étape du contrôle stratégique, qui repose sur la comparaison des objectifs et des
résultats, est parfois négligée. Plusieurs considérations expliquent cette situation :
• Le manque de temps. Devant arbitrer entre des activités concernant l’avenir et un travail
d’analyse du passé, les managers manifestent une préférence pour le futur et le présent.
• Les changements brutaux de l’environnement. À quoi bon comparer les objectifs et les
réalisations lorsque le contexte économique ou politique rend caducs les objectifs ?
• Les rotations des équipes managériales. La tendance au renouvellement fréquent des
managers peut conduire à oublier les objectifs passés avec le départ de ceux qui les ont
fixés.
• Les déficiences des systèmes d’information. L’inertie des systèmes d’information par
rapport aux changements stratégiques crée des situations où les managers ne disposent pas
des informations pour effectuer le contrôle stratégique d’activités nouvelles.
• Le caractère désagréable du contrôle. La comparaison des résultats obtenus avec les
objectifs fixés n’est pas toujours une activité agréable pour les managers qui ont tendance,
comme tout être humain, à fuir les tâches non valorisantes.
• Le non-contrôle. Il prive l’entreprise des enseignements tirés de l’expérience et appauvrit
sa fonction d’apprentissage. C’est pour éviter cet écueil que les entreprises formalisent leur
contrôle stratégique, le rendant de fait obligatoire.
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Figure 2.11. Le non-contrôle stratégique : causes et conséquences
g. Les stratégies de rupture
En définitive, on constate que la démarche stratégique, telle qu’elle a été conçue dans les
années 1970, est un processus complexe, hiérarchique, cyclique. Elle est révisée périodiquement
par effet de rétroaction. C’est une belle construction logique systémique.
Toutefois, un certain nombre de reproches n’ont pas manqué d’être adressés à ce modèle de
management :
• Ces études, élaborées en période de croissance, sont moins adaptées à des phases de crise,
où les responsables prévoient d’autres stratégies : désinvestissement ou recentrage, par
exemple.
• La logique de la démarche est rigoureuse, mais les auteurs n’abordent guère la question de la
nature des opérations qu’il convient de mettre en œuvre une fois les choix d’objectifs et de
stratégie effectués. En bref, la planification stratégique reste trop abstraite.
• Cette logique entraîne le règne absolu du calcul – sous l’emprise du cerveau gauche –, au
détriment d’une réflexion plus sage, ainsi qu’au détriment de l’intuition créatrice, domaine
d’excellence du cerveau droit.
• En dépit de la recherche de rétroactions, la démarche devient rapidement rigide et
contraignante ; elle bride les capacités d’adaptation, renforçant le pouvoir des
gestionnaires-technocrates, coupés de la réalité et qui favorisent la centralisation et le
contrôle paperassier.
Il apparaît que les stratégies trop enserrées dans une planification contraignante doivent être
remplacées par des « stratégies émergentes » plus souples, plus décentralisées.
Dès les années 1980, les spécialistes de la planification stratégique se sont mis en quête de
formules moins rigides, plus adaptables, qui correspondent mieux à un univers plus incertain et plus
turbulent.
L’incertitude croissante entraîne des surprises stratégiques et celles-ci obligent à rechercher des
moyens de riposte. Le problème consiste donc tout d’abord à détecter les signes, plus ou moins
forts, annonciateurs de surprises stratégiques.
Exemple
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Les entreprises se sont engouffrées dans la fabrication de panneaux photovoltaïques.
Le motif était très directement lié au prix d’achat par EDF des kWh « verts » ainsi
produits. Réglementé, ce prix n’a eu de cesse de diminuer et tout le secteur est
dorénavant en surproduction.
Le modèle, dans son ensemble, se déroule de la façon suivante (figure 2.12).
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Figure 2.12. La détection des surprises
Au fond, ce qui est préconisé, c’est d’enrichir l’ancien modèle de planification stratégique, grâce à
des techniques plus créatives, susceptibles d’anticiper rapidement les changements dans
l’environnement. D’où l’idée actuelle de formuler des stratégies de rupture.
La planification stratégique traditionnelle s’exerçait dans un environnement normalement figé,
avec les mêmes produits, sur les mêmes marchés, selon des technologies peu évolutives et dans un
cadre concurrentiel bien déterminé. Les stratégies de rupture se situent dans une autre
perspective. Elles visent, comme leur nom l’indique, à créer la surprise, à changer la règle qui
préexistait, à faire autrement et non nécessairement à chercher à faire mieux que les concurrents.
Exemple
Lorsqu’en 1971 Howard Schultz lance les cafés Starbucks, il invente un concept à part
entière : ce n’est pas un restaurant (rien à voir avec McDonald’s), ce n’est pas un
simple café non plus... Les Starbucks Coffees sont à cette époque des espaces au
« design presque négligé dans lequel il est agréable de passer une quinzaine de
minutes ».
Les stratégies de rupture ont pour effet majeur de déstabiliser les concurrents, les managers de
rupture n’ayant de cesse de créer et de détruire eux-mêmes leurs propres avantages concurrentiels.
Ces derniers sont en effet caducs, au moment même où ils sont obtenus, et inimitables par les
concurrents.
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Exemple
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Après avoir obtenu de haute lutte une licence télécom, Xavier Niel, patron de Free,
invente le « mobile low cost ». Véritable stratégie de rupture, sa mise en place
n’implique ni agence, ni terminal à payer. Le prix est donc très attractif et les clients
adhèrent par millions.
C’est perdre son temps que de vouloir les acquérir ou que de tenter de se doter de conditions (de
facteurs clés de succès) dans le cadre concurrentiel ancien. L’époque des plans stratégiques à 5 ou
10 ans est révolue, comme est terminé le temps de la concurrence respectueuse du rival. Il convient
de se doter de capacités de perturber les marchés en brouillant les pistes, en émettant des signaux
trompeurs afin d’égarer l’adversaire.
Exemple
Apple ne manque pas de communiquer sur les perspectives des nouveaux produits qui
sont encore bien loin d’être mis sur le marché. Cette stratégie a pour effet d’inciter les
clients à attendre le nouveau produit au lieu d’acheter les systèmes rivaux disponibles.
On cherche à réduire les ventes des concurrents, en stabilisant les gains de
l’entreprise.
Si perturber les règles de la concurrence devient un impératif, il convient cependant de souligner
qu’une fois la rupture consommée, les managers perturbateurs doivent mettre en œuvre une stratégie
classique. Or, cette dernière démarche exige à nouveau de programmer les opérations
(investissements, lancements de produits, rachats de concurrents, etc.).
En conclusion, quel que soit le contenu des étapes du processus stratégique, on ne peut guère
échapper à la programmation d’actions conscientes. D’une manière ou d’une autre, on ne cesse de
planifier. Une telle obligation est d’autant plus forte que la stratégie des entreprises s’enracine dans
la finance. Dans ce dernier domaine, le calcul prévaut, l’inspiration et la spontanéité n’ayant guère
leur place.
Tableau 2.3. Un bilan de la planification stratégique
Avantages
Inconvénients
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II. Les objectifs de l’entreprise
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– Paraît inadaptée en période de crise.
– Oblige les dirigeants à briser leurs habitudes. – Reste souvent très abstraite.
– Implique les dirigeants qui ont participé à
– N’est pas soucieuse de la mise en œuvre
l’élaboration de la stratégie.
opérationnelle.
– Constitue un excellent moyen de
– Bride l’innovation, la flexibilité et la
communication et de coordination.
réactivité.
– Assure les bases du contrôle.
– Favorise les tendances centralisatrices.
– Élargit la vision des responsables.
– Soumet les managers à un contrôle
paperassier.
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Pour maints auteurs, au cours du déroulement du processus stratégique, avant les objectifs, il
conviendrait de parler d’une finalité dans un sens plus large. Commençons par élucider cette notion
et la place que les objectifs occupent par rapport à certains concepts parents, avant d’examiner le
contenu même des objectifs stratégiques.
A. La finalité de l’entreprise
Le terme d’objectif est emprunté à l’art de l’archer : c’est le clou qui tient la cible et qu’il faut
frapper si l’on veut réaliser le meilleur tir. Dans le vocabulaire de la gestion, le mot sert à désigner
les représentations d’un état futur que les responsables de l’entreprise veulent voir se réaliser. Or,
exprimés en termes concrets et chiffrés, les objectifs traduisent des fins dernières plus générales,
bref une cause finale qui entraîne l’action.
1. Les diverses catégories de finalité
On distingue plusieurs modalités.
a. La mission
La détermination de la mission de l’entreprise consiste à répondre à la question : « Pourquoi existet-elle ? » ; c’est sa raison d’être.
Peter Drucker a utilisé ce terme pour désigner la réponse claire et compréhensible par tous à la
question que devraient se poser les dirigeants : « Qu’est-ce que notre affaire ? »
L’exemple donné par l’auteur est celui de l’American Telephone and Telegraph Company (Bell
System) dont le directeur Theodore Vail affirmait, il y a plusieurs décennies : « Notre affaire est de
rendre service. » Cette vision de la fin de l’activité résultait alors du risque de nationalisation de la
firme qui exploitait le réseau téléphonique américain. Il convenait de trouver un soutien auprès des
consommateurs pour empêcher l’appropriation de l’entreprise par l’État. Toutes les actions, tous
les propos devaient donc être guidés par le souci de satisfaire les utilisateurs.
b. La vocation et le métier
La vocation correspond au rôle que les dirigeants entendent faire jouer à l’entreprise pour répondre
aux besoins de l’environnement d’une part et à ses aspirations d’autre part. Quant au métier, il se
fonde sur le savoir-faire technologique, commercial, administratif, dérivant d’une culture
d’entreprise (figure 2.13).
Exemple
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Figure 2.13. Les finalités de l’entreprise
Dans une entreprise de tissu d’ameublement, le métier consiste à fabriquer des tissus
d’ameublement imprimés alors que la vocation consiste à créer, chez le client, une
atmosphère à partir d’étoffes et même de papiers colorés. La vocation de la firme est
donc définie à partir des besoins du marché : les souhaits des consommateurs et la
production des concurrents. De plus, la vocation dépend des possibilités de
l’entreprise à satisfaire ces besoins décelés. La vocation, selon cette acception, est
très proche de la mission définie précédemment.
c. Les buts
Les buts – il s’agit des préférences qui sous-tendent l’action – sont généralement latents ; ils ne
deviennent explicites que lorsqu’une crise surgit. La volonté de garder la majorité à l’assemblée
générale ne se manifeste qu’au moment où une menace pèse sur la coalition dirigeante.
Ainsi les buts ne dépendraient-ils pas de la volonté des dirigeants, mais résulteraient de contraintes
inhérentes à l’entreprise telles que la survie, la croissance et la recherche du profit.
Valeo exprime avoir « une double obsession : la croissance et la rentabilité » (déclaration du
Président, mars 2015).
d. Les objectifs
Ils ne sont que des sous-ensembles des buts, fixés par les dirigeants. Par exemple, si le but consiste
à réaliser un profit maximum, on déterminera des objectifs de rentabilité exprimés par divers taux
(rentabilité des investissements, des actifs, des capitaux propres, etc.).
C’est ainsi qu’un objectif se définit par les quatre composantes suivantes :
– un attribut, la dimension ;
– une échelle de mesure ;
– une norme ;
– un horizon temporel.
Exemple
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Un objectif peut être d’atteindre un taux (échelle) de rentabilité (attribut) de 20 %
(norme) d’ici deux ans (horizon).
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e. La vision ou l’intention stratégique
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Animés par la préoccupation de voir toujours plus loin et surtout par le souci de bien marier la
prévision et la volonté, l’incantation et l’exhortation, l’individuel et le collectif, les dirigeants ont
forgé des appellations nouvelles. La vision et l’intention stratégique (strategic intent) entrent dans
cette famille. Elles expriment, dans le discours managérial, la situation future, à laquelle aspirent
(rêvent ?) ceux qui ont en charge le devenir de l’entreprise. Quel positionnement, sur quel marché,
avec quelle structure, animée par quelles valeurs, caractériseront-ils l’entreprise dans cinq ans ?
De ces définitions, retenons qu’il existe une finalité, définie de multiples manières, plus ou moins
explicites, et qui oriente les actions de l’entreprise. Plus simplement, il existe une « raison » à ce
que font les dirigeants. Sans une telle notion plus ou moins concrète dans leur esprit, l’action serait
assurément incohérente. Toutefois, cette finalité est souvent difficile à préciser ; au mieux, elle
s’exprime par des formules emblématiques et générales, alors qu’on a besoin d’outils sûrs pour
guider l’action. Tel est le rôle assigné aux objectifs.
Qu’est-ce qu’une vision ?
Une vision, ou encore un projet d’entreprise, est matérialisée par une charte rédigée à l’initiative
de la direction. Elle a d’abord pour objet de rassembler les salariés, de concentrer leur énergie
en vue d’un but accepté par chacun. Cependant, cette première fonction de rassemblement
mobilisateur serait insuffisante, car l’ambition des promoteurs de cette pratique vise davantage
encore la régulation sociale.
Une démarche validée par la pratique
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Il ne suffit pas de déclencher le désir de prendre des initiatives à tous les échelons de la
hiérarchie, encore faut-il que ces démarches se révèlent, à l’expérience, heureuses. Certes, des
méthodes d’organisation ont été trouvées pour élargir l’espace de liberté des personnes, mais
comment peut-on réduire le risque que fait courir, à l’entreprise, l’assomption de liberté ?
Comment éviter la dispersion, voire l’anarchie ? Certaines décisions sont sans doute bénéfiques,
cependant d’autres sont susceptibles de contribuer à la ruine. Au fond, le responsable de la firme
se trouve confronté à un dilemme : d’un côté transformer des salariés routiniers en acteurs
volontaires et libres, de l’autre réduire le risque engendré par la prise de décisions spontanées
hasardeuses. On retrouve ici la recherche d’équilibre entre différenciation et intégration.
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Donner à l’entreprise une vision conduit à diminuer ce danger, par l’effet de guidage que cela
suscite chez chacun. Cet outil peut être comparé à une boussole, car il aide à maintenir le cap
dans la direction voulue. La vision constitue un instrument de contrôle, non plus par
l’intermédiaire d’une pointeuse ou d’une procédure budgétaire, mais par le truchement de la
culture et, plus encore, par les valeurs que partagent les différents groupes de personnels. En
bref, une vision d’entreprise n’a pas pour but de déclencher des pulsions libératrices
désordonnées, mais pour objet de montrer l’étoile, le but vers lequel on veut se diriger.
Le contenu d’une vision d’entreprise
L’articulation repose souvent sur quatre thèmes. Il convient tout d’abord de développer le
sentiment d’appartenance à un groupe, à une entreprise qui possède une identité forte. Ce
« patriotisme » d’entreprise trouve sa racine dans l’histoire de l’organisation. Un tel sentiment
s’accompagne – ou provoque l’émergence – de valeurs communes qui, parce qu’elles sont
volontairement protégées, entraînent l’accord, le fameux consensus du groupe. Les valeurs
auxquelles on fait le plus couramment référence restent le service du client, le respect de la
personne, l’esprit d’équipe, l’excellence, le professionnalisme et la participation.
Toutefois, la promotion de ces valeurs n’est pas tâche aisée. Pour concrétiser de telles aspirations,
il est nécessaire de déployer de grands efforts. Là réside le véritable défi (challenge) posé à
chacun, quelle que soit sa position sur l’organigramme.
Exemple
Le groupe LVMH vise à être l’ambassadeur de l’art de vivre occidental en ce qu’il a
de plus raffiné. LVMH veut symboliser l’élégance, la créativité et apporter du rêve
dans la vie au travers des produits et de la culture associée, alliant tradition et
modernité. Les valeurs fondamentales partagées par tous les acteurs du groupe se
répartissent en cinq impératifs qui ont fait l’objet d’une large réflexion à travers les
différentes sociétés du groupe : être créatif et innovant, rechercher l’excellence dans
les produits, préserver l’image de marque, avoir l’esprit d’entreprise et être animé de
la volonté d’être le meilleur dans chaque domaine.
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Enfin, de nouvelles règles de jeu restent à formuler, de manière à ne léser personne, car l’adhésion
des hommes à une vision serait problématique en l’absence d’une justice interne.
Les principes de management de Nestlé
Le développement durable est le développement des générations actuelles sans compromettre
celui des générations futures. Il permet de concilier le développement social, la croissance
économique et le respect de l’environnement.
La création de valeur partagée. L’ambition du groupe est de contribuer à l’amélioration des
conditions économiques et sociales des collaborateurs et des communautés tout au long de notre
chaîne de création de valeur tout en proposant des produits de grande qualité. Cette ambition
s’applique autant aux agriculteurs qui nous fournissent, qu’aux communautés proches de nos
usines ainsi qu’à nos différents partenaires.
Après analyse de ses activités, le groupe a décidé de se concentrer sur trois domaines,
présentant le plus grand potentiel d’optimisation de la valeur partagée : la nutrition, l’eau et le
développement rural. Ces activités sont au cœur de sa stratégie d’entreprise et sont essentielles
au bien-être des citoyens des pays où il opère. Sur ces domaines, le groupe investira plus de
ressources, de talent et de capital.
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La vision ou l’intention stratégique s’illustre par une pyramide à trois niveaux :
www.nestle.fr
2. Les fonctions pratiques des objectifs
Ce sont des instruments qui orientent la politique, entraînent l’action et aident à corriger les défauts
constatés. On peut donc découper cette fonction générale, qui consiste à diriger la firme vers un
terme, en cinq sous-fonctions dont les propriétés deviennent plus concrètes pour les gestionnaires.
a. L’innovation
La recherche d’objectifs incite les dirigeants à sortir du cadre des habitudes, à réfléchir en
commun, à examiner le milieu extérieur, à considérer l’entreprise avec quelque recul. Dès lors, cet
exercice, qui rend les hommes de la direction conscients des problèmes latents, les amène tout
naturellement à rechercher des solutions propres à résoudre les difficultés.
b. La stimulation
Les objectifs jouent un rôle important de stimulation des managers, les conduisant à se dépasser. Ils
sont une des composantes des politiques d’animation des hommes, de stimulation et de récompense.
c. La comparaison
Les objectifs servent à apprécier plusieurs possibilités. Ils sont donc au sens littéral des critères,
des signes qui permettent de juger si l’action qu’on envisage d’entreprendre est conforme aux
aspirations.
Exemple
Soit trois décisions d’investissement A, B, C laissant apparaître les taux de rendement
suivants :
A = 15 % du capital investi ;
B = 18 % ;
C = 22 %.
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d. La cohérence
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Si l’objectif défini par les dirigeants consiste à atteindre 20 % des capitaux
permanents, c’est alors, de toute évidence, le projet C qui sera sélectionné.
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La stratégie est composée de décisions multiples qui, nous l’avons souligné, risquent de diverger
entre elles, voire de se contrarier en l’absence d’un fil d’Ariane. Si les objectifs qui fondent la
stratégie constituent un système logique, les décisions qui s’appuient sur cette base ne risquent pas
de se nuire. Au contraire, elles s’aident les unes les autres, dans la mesure où elles restent
complémentaires, entraînant ainsi un effet de synergie.
e. Le contrôle
Ce sont les objectifs qui, parce qu’on les chiffre, rendent possibles les mesures des performances
attendues et, de ce fait, aident à mettre en place un système de contrôle. À l’intérieur de celui-ci, les
objectifs sont transformés en prévisions détaillées, et servent à mesurer les écarts avec les
réalisations.
B. La diversité des objectifs
Les entreprises, quelles que soient leur taille, leurs domaines d’activité, leur forme juridique sont
des organisations complexes dont l’existence est soumise à un ensemble d’impératifs vitaux. Ceuxci constituent les supports des objectifs que les managers ne peuvent manquer de poursuivre. Ces
finalités sont soit d’ordre général, assurer la pérennité de la firme par exemple, soit de nature ou
d’expression financière, ainsi réaliser un taux de rentabilité des investissements de 15 % dans deux
ans. Pareils buts ne peuvent être atteints, à terme, que par le bon fonctionnement de toutes les
composantes de la firme. Ils lui confèrent une efficacité et une efficience aussi satisfaisantes que
possible.
Les conditions du succès
Efficacité : concordance du résultat de l’action menée avec le but (le bouquet d’objectifs)
poursuivi. Exemple : objectif de chiffre d’affaires pour l’année N : 10 000 000 €/réalisation :
10 752 918 €.
→ Cette entreprise est efficace, puisque la réalisation dépasse légèrement l’objectif.
Efficience : obtention du résultat à moindre coût. Exemple : soit une entreprise dont les deux
résultats comparés sont les suivants :
Année n
Commentaires
10 000 000 €
8 000 000 €
2 000 000 €
20 %
11 000 000 €
8 500 000 €
2 500 000 €
23 %
On constate un progrès
de l’efficience de 3 %
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Chiffre d’affaires
Coûts de structure
Marge nette
% marge nette/CA
Année n – 1
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Indicateurs
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Efficacité et efficience conditionnent la satisfaction des trois impératifs vitaux : la compétitivité, la
solvabilité, la rentabilité.
Les impératifs vitaux
• La compétitivité ou l’aptitude de l’entreprise à affronter la concurrence avec des chances
de succès.
• La solvabilité, c’est-à-dire la capacité de l’entreprise à faire face à ses échéances et à
rembourser ses dettes.
• La rentabilité, autrement dit la capacité à dégager un profit, un surplus monétaire net.
Si l’on doit de plus en plus douter que la recherche de profit maximum constitue – comme la théorie
micro-économique le postulait –, l’objectif unique de l’entreprise, on ne peut guère contester que
l’enregistrement des pertes, ou la non-réalisation d’un profit suffisant, engendre un péril mortel. En
conséquence, le profit reste toujours une obligation. Test de réussite et indicateur de succès, il est la
source de l’autofinancement sans lequel l’entreprise ne peut se développer et progresser. Le profit
constitue en outre une marge de sécurité à l’égard du risque global encouru, celui-ci résultant des
risques de tous ordres et dans les domaines techniques, humains, financiers, commerciaux, etc.
Aux exigences de fonctionnement correct s’ajoute le respect de trois contraintes complémentaires
de survie :
• La vitalité de l’entreprise. On parle aussi parfois d’« animation », laquelle repose en
définitive sur la valeur des hommes qu’elle rassemble, donc sur sa capacité à développer
leurs compétences, leur coopération à l’œuvre commune et leur cohésion.
• Sa capacité à préserver son autonomie, à savoir l’indépendance du centre de décision
qu’elle représente.
• La flexibilité. L’entreprise vit dans un milieu ambiant complexe, en évolution rapide. Elle est
obligée, sous peine de disparaître, de s’adapter en permanence aux changements de
l’environnement. Elle doit, pour vaincre les résistances, s’installer dans le changement.
On constate que la fixation d’objectifs, qu’elle soit formalisée ou implicite, dépend de la
combinaison d’un ensemble complexe d’impératifs dont le poids relatif de chacun varie au cours de
la vie d’une firme. En effet, pour rester présente sur le marché, l’entreprise doit progresser au
moins aussi vite que ses concurrentes, ou plus vite, si elle veut améliorer sa position. Sa pérennité,
comme son développement, suppose une croissance qui, on le verra plus tard, peut être obtenue par
diverses voies. En conclusion, les objectifs d’une entreprise forment une constellation mouvante,
conditionnée par le respect de « lois de survie » et d’impératifs vitaux.
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III. Les grandes orientations
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Il ne faut pas être dupe des mots : l’entreprise en tant que telle n’a pas de buts, d’objectifs. Ceux-ci
et sa stratégie lui sont assignés par les détenteurs du pouvoir, c’est-à-dire ses propriétaires et/ou
ceux auxquels ils ont donné mandat d’agir pour assurer la survie et le développement de
l’organisation. Ainsi compris, les intérêts de l’entreprise peuvent ne pas coïncider avec ceux des
participants, des parties prenantes (stakeholders), dont les motivations ne sont ni homogènes ni
convergentes. Hors de l’entreprise, des revendications s’expriment dans la société,
particulièrement en matière sociale et écologique.
A. Diverses finalités, divers modes de gouvernance
L’entreprise consensuelle relève de la mythologie. Conscients de la diversité des points de vue, les
dirigeants soucieux de maintenir la cohésion de la firme nécessaire à la sauvegarde de l’efficacité
économique s’efforceront de réduire ou de prévenir les tensions conflictuelles. L’entreprise
apparaît alors comme un espace politique, c’est-à-dire un lieu de négociation permanente entre
individualités et groupes cherchant leur satisfaction. On désigne par le terme de « gouvernance » le
régime politique, c’est-à-dire les voies, les moyens par lesquels les dirigeants définissent leur
système de direction. La stratégie de l’organisation – particulièrement le choix des objectifs – est
conditionnée par les finalités poursuivies par les différents groupes d’acteurs internes ou externes.
Les économistes classiques pensaient qu’il n’y avait pas d’autre objectif rationnel que de
maximiser le profit. Dans cette perspective, certains financiers modernes invitent à maximiser la
richesse des actionnaires (shareholders). En d’autres termes, la finalité recherchée par les
dirigeants consiste à rendre maximale la valeur de l’action en Bourse. Créer de la valeur pour
l’actionnaire (shareholder value) devrait donc être l’objectif prioritaire.
Cependant, une entreprise n’a pas seulement affaire à ses shareholders. Elle connaît d’autres
partenaires (des stakeholders : des clients, des fournisseurs) et les représentants d’un
environnement qu’elle ne peut ignorer. Shareholders et stakeholders partagent un destin commun.
On distinguera dans la figure 2.15 les objectifs qui concernent les groupes de partenaires externes
(shareholders et stakeholders) de ceux qui touchent les différentes catégories de personnel de
l’entreprise : les salariés et des dirigeants.
Tous ces objectifs poursuivis s’inscrivent dans des systèmes où les priorités sont multiples : profit
bien entendu, croissance, mais aussi maintien de l’emploi ou protection de l’environnement. Une
question importante reste de savoir si le classement hiérarchique des objectifs est ou non soumis à
des facteurs de contingence : conjoncture économique, secteur industriel, taille ou structure
patrimoniale. Parmi ces facteurs, la nationalité et plus largement l’origine géographique des
dirigeants jouent un rôle important.
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Figure 2.14. Les parties prenantes ou stakeholders
Figure 2.15. Les finalités externes et les finalités internes
Exemple
Dans les pays anglo-saxons, le modèle libéral, orienté vers les actionnaires
(shareholders), domine tandis qu’en Europe continentale les managers tiennent souvent
davantage compte des parties prenantes (stakeholders). Ce second modèle est parfois
qualifié de « rhénan ». Les erreurs stratégiques commises par des entreprises
(Areva ?), voire les scandales (VW et le diesel ?), ne manquent pas d’alerter sur les
relations entre gouvernance, stratégie et performance durable.
On peut affiner l’analyse, en distinguant deux autres possibilités :
– celle des pays qui avaient fait le choix d’un système d’économie étatisée (ex. : l’Algérie), où
le poids des pouvoirs publics pèse encore lourd sur le choix des objectifs des firmes ;
– celle des pays où les traditions sont encore fortes, et où les relations se règlent au sein de
réseaux familiaux, ethniques ou claniques (pays de la Méditerranée, Afrique subsaharienne,
Asie du Sud-Est).
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Figure 2.16. Les quatre modèles de gouvernance
B. La responsabilité globale(9)
On utilise également le sigle CSR (Corporate Social Responsibility) ou RSE (Responsabilité
sociétale – ou sociale – des entreprises) en français.
1. Définition
Depuis fort longtemps, les chefs d’entreprise et les managers sont obligés de se plier à des
obligations sociales. Toutefois, depuis une trentaine d’années, on ne s’en tient plus au seul respect
de contraintes internes et légales, par exemple l’application scrupuleuse de la législation sociale,
on doit tenir compte de demandes issues de toute la société, non seulement sur un plan strictement
sociétal, mais plus largement en intégrant dans la vie de l’entreprise le souci écologique. L’idée de
développement durable, parfois nommée développement soutenable, précise cette vaste
préoccupation.
Le développement durable est défini par le rapport Brundtland (1987) comme « un développement
qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations
futures à répondre aux leurs ».
Plus précisément, il s’agit de mettre en application deux points de vue :
• Dans l’espace. Chaque homme sur cette Terre possède un même droit d’accéder aux
ressources de la nature.
• Dans le temps. Si nous possédons ce droit d’utiliser les biens naturels fournis par la Terre,
nous avons aussi le devoir d’en assurer la pérennité pour les générations futures.
Dans cette perspective, la responsabilité du chef d’entreprise et de ses managers est grande. On
peut la formuler de la manière suivante :
« Je suis responsable des relations directes que j’entretiens avec :
– mon entreprise que je dois faire prospérer ;
– les personnes qui m’entourent, au-delà du cercle de l’entreprise ;
– l’environnement naturel, base de l’existence de tout être vivant. »
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Figure 2.17. Les trois piliers du développement durable
La finalité consiste alors à définir des stratégies viables conciliant trois dimensions :
• L’économique. La performance financière, mais aussi la capacité à contribuer au
développement économique de la région où est implantée la firme.
• Le social. La prise en compte des conséquences de la stratégie mise en œuvre pour les
employés et plus largement pour les stakeholders divers (fournisseurs, clients, collectivités
locales, etc.).
• L’écologique. La compatibilité de la stratégie de la firme et des objectifs environnementaux
(maintien de la diversité, survie des écosystèmes par exemple). Ce dernier volet implique
de maîtriser la production des déchets et d’émission polluantes, en vue de diminuer la
consommation des ressources difficilement renouvelables.
En matière de gouvernance, le développement durable conduit les dirigeants de la firme à faire
participer à la prise de décision un grand nombre d’acteurs (citoyens, entreprises, associations,
élus, etc.). Il implique une forme de démocratie participative.
2. Les implications de la responsabilité globale
Le développement durable ne doit pas être considéré par les dirigeants comme une contrainte
supplémentaire jugée excessive. C’est aussi, pour l’entreprise, un mode d’expression de sa liberté
d’entreprendre et d’amélioration de sa productivité. Il s’agit, en définitive, d’articuler trois
principes.
a. Être économiquement efficace
En s’engageant dans le développement durable, les managers peuvent trouver des sources
d’amélioration de la rentabilité. Citons :
– la recherche de nouveaux positionnements pour répondre aux exigences des clients ;
– l’amélioration de la qualité, parce que le développement durable touche toutes les chaînes
de valeur et qu’il introduit des obligations de résultats ;
– le développement d’une forte valeur ajoutée allant de pair avec la recherche de nouveaux
produits ;
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– l’innovation et l’internationalisation. Le développement durable impose aux managers
d’élargir leurs activités, grâce à une politique d’innovation qui souvent s’affranchit des
frontières.
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b. Être socialement équitable
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La performance sociale se mesure à partir de toutes les améliorations internes concernant les
salariés : salaires, emploi, sécurité, hygiène, amélioration des compétences.
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Plus largement, la recherche d’une performance sociétale débouche sur l’idée d’une entreprise
citoyenne dont les dirigeants se veulent acteurs de la vie locale : développement régional, la lutte
contre le chômage et la précarité. On verra plus loin que si les dirigeants s’impliquent dans la vie
de la cité, ils doivent tenir compte des nouvelles responsabilités sociales de l’entreprise.
Dans cette perspective, les questions liées au management de la diversité dans les entreprises se
posent désormais avec une acuité particulière.
c. Être écologiquement responsable
Généralement, les entreprises recherchent ou sont engagées dans des processus de croissance. Mais
toutes les formes de croissance ne servent pas la protection de la nature. Au contraire, nombreuses
sont celles qui sapent l’écosystème où tout a sa place. Aussi, depuis peu, une distinction est-elle
faite entre croissance quantitative et croissance qualitative.
La croissance quantitative néglige la composition du chiffre d’affaires et ne tient que très peu
compte de la mise à contribution des biens écologiques (l’air, l’eau, le soleil, les ressources
naturelles, etc.), dans la mesure où ils n’entrent pas dans le calcul des coûts et n’entravent pas la
réalisation de profit.
À l’opposé, la croissance qualitative est liée à une compréhension du bien-être, qui tient compte
de la qualité de vie.
Parmi les mesures qui favorisent la croissance qualitative, on citera :
– la conception de produits verts ;
– le respect de la réglementation écologique et la formation ;
– la réduction de la consommation d’énergie ;
– la réduction des émissions polluantes et du bruit ;
– la propreté des sites ;
– la protection des sols ;
– le traitement des déchets ;
– la réduction des gaz à effet de serre.
3. Les domaines d’application de la RSE
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Nous avons vu précédemment qu’une bonne performance, en vue d’un développement durable,
devait intégrer les trois dimensions économique, sociale et environnementale. La RSE rend plus
concrète une telle ambition en développant l’idée que la responsabilité d’une firme s’exerce à
l’égard d’une foule de parties prenantes : non seulement les actionnaires, les salariés et les clients,
mais encore les fournisseurs, l’État, les collectivités territoriales, les riverains des sites où
l’entreprise est implantée, les ONG et même les concurrents. Le domaine d’application de la RSE
est donc très vaste. Son contenu varie en raison de multiples facteurs (la taille par exemple) ; il
dépasse le plan des exigences légales minimales et celui des obligations imposées par les
conventions collectives. Parce qu’elle permet de concilier les ambitions du développement
durable, la RSE figure au centre des débats mondiaux au sujet des grandes questions qu’affronte
l’humanité : la mondialisation, le réchauffement climatique ou le respect des droits de l’homme par
exemple.
En Europe, la Commission européenne demande aux entreprises de rendre compte de leurs activités
et d’améliorer la production d’informations utiles aux investisseurs et aux consommateurs. La
Commission européenne précise même ce que le public peut attendre de la RSE.
Exemples
Les citoyens européens sont notamment en droit d’attendre :
– le recrutement d’un plus grand nombre de travailleurs issus de groupes
défavorisés ;
– l’investissement dans le développement des compétences, l’apprentissage tout
au long de la vie et la capacité d’occuper un emploi ;
– l’amélioration de la santé publique dans des domaines tels que la distribution et
l’étiquetage des denrées alimentaires ;
– de meilleures performances en matière d’innovation ;
– l’utilisation plus rationnelle des ressources naturelles et la réduction des
niveaux de pollution, par l’investissement dans l’éco-innovation et par
l’adoption volontaire de systèmes de gestion environnementale ;
– une image plus positive de l’entreprise et du chef d’entreprise dans la société ;
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– un plus grand respect des droits de l’homme ;
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– le recul de la pauvreté.
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4. Le management de la RSE
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Pour donner un contenu plus concret à ce projet, les syndicats européens et certaines ONG
demandent la publication d’un rapport annuel de RSE par les grandes entreprises. Ils souhaitent
obtenir des standards sur tous les aspects de la gouvernance d’entreprise : certification des
produits, transparence et qualité de toute la chaîne de production, traçabilité des produits et des
fournisseurs. Les entreprises ayant une politique RSE bénéficient d’un accès privilégié aux fonds
communautaires.
L’engagement d’une direction d’entreprise dans une démarche de RSE prend de nombreuses formes.
Il peut se traduire par la certification d’un site ou de l’entreprise selon des normes (ISO 14001 pour
l’environnement, QSE pour l’hygiène et la sécurité, SA8000 pour le respect des droits au travail).
Il peut prendre une forme d’engagement à atteindre des objectifs d’amélioration continue, de la
qualité par exemple.
La bonne pratique de la RSE implique que l’entreprise rende des comptes à différents types de
partenaires : à des organismes de défense de l’environnement, à des investisseurs, à des syndicats
ou à des ONG spécialisées.
Les dix principes du Pacte mondial
Le Pacte mondial des Nations unies invite les entreprises à adopter, soutenir et appliquer dans
leur sphère d’influence un ensemble de valeurs fondamentales, dans les domaines des droits de
l’Homme, des normes du travail et de l’environnement, et de lutte contre la corruption. En
d’autres termes, c’est seulement dans les domaines qui les concernent que l’on requiert des
entreprises de véritables évolutions.
Organisé en dix principes, le Pacte mondial est issu de la Déclaration universelle des droits de
l’Homme ; de la Déclaration de l’Organisation internationale du travail (OIT), relative aux
principes et droits fondamentaux au travail ; de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le
développement ; de la Convention des Nations unies contre la corruption.
Droits de l’homme
Les entreprises sont invitées :
1. à promouvoir et à respecter la protection du droit international relatif aux droits de l’Homme
dans leur sphère d’influence ;
2. à veiller à ce que leurs propres compagnies ne se rendent pas complices de violations des
droits de l’Homme.
Droit du travail
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Les entreprises sont invitées :
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3. à respecter la liberté d’association et à reconnaître le droit de négociation collective ;
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4. à éliminer toutes les formes de travail forcé ou obligatoire ;
5. à abolir effectivement le travail des enfants ;
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6. à éliminer la discrimination en matière d’emploi et de profession.
Environnement
Les entreprises sont invitées :
7. à appliquer le principe de précaution face aux problèmes touchant l’environnement ;
8. à prendre des initiatives tendant à promouvoir une plus grande responsabilité en matière
d’environnement ;
9. à favoriser la mise au point et la diffusion de technologies respectueuses de l’environnement.
Lutte contre la corruption
10. Les entreprises sont invitées à agir contre la corruption sous toutes ses formes, y compris
l’extorsion de fonds et les pots-de-vin.
http://www.unglobalcompact.org/un/gc/unweb.nsf/content/thenine.htm
Le développement durable au sein du groupe Lafarge
Depuis de nombreuses années, Lafarge a intégré les trois dimensions (économique, sociale et
environnementale) essentielles du développement durable, dans sa stratégie et sa culture.
Nous sommes convaincus que notre performance ne sera durable que si elle associe rentabilité
économique, écoute et amélioration de notre société, qualité environnementale.
Axe économique
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L’optimisation de l’utilisation de nos ressources en matières premières, l’utilisation responsable
de matériaux recyclés, de combustibles de substitution nous permettent d’économiser des
ressources non renouvelables et de diminuer nos coûts de production. Il en est de même de
l’utilisation de liants hydrauliques tels que les cendres volantes ou les laitiers issus des
industries sidérurgiques qui, par leurs caractéristiques hydrauliques similaires, peuvent
remplacer des liants dans l’industrie du ciment et contribuent également à diminuer nos
émissions de CO2.
Axe social
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Le dialogue actif avec nos employés et leurs représentants et les autres parties prenantes, ONG,
populations et gouvernements locaux, etc., nous permettent d’intégrer nos opérations dans
l’économie locale en concertation étroite avec les communautés qui vivent autour de nos sites de
production. Des programmes de santé et de sécurité, de logement, d’éducation, de
développement local accompagnent nos implantations, notamment dans les pays émergents, et
permettent d’améliorer localement les conditions de vie.
Axe environnemental
Nos engagements de réduction d’émission de CO2 nous conduisent à trouver des solutions
innovantes tant en termes de procédés que de produits. De même, les réhabilitations réussies de
carrières sont des garantes de l’obtention de nouvelles autorisations d’exploiter. D’autres actions
concrètes nous permettent de réduire l’impact de nos activités sur notre environnement : en
particulier, le remplacement des matières premières et le recyclage des déchets d’autres
industries, la réduction des émissions atmosphériques, la conservation et la préservation de
l’eau, la maîtrise de notre consommation énergétique et l’utilisation de combustibles alternatifs,
la réduction des impacts du transport et la généralisation d’audits environnementaux.
www.lafarge.fr
Figure 2.18. Un exemple de mise en œuvre de la RSE chez Pernod Ricard : une plate-forme dédiée, pour une plus
grande lisibilité de la stratégie
D'après le site Pernod Ricard.
Ces règles, différentes d’une entreprise à l’autre, portent par exemple sur l’évaluation, la
rémunération, la promotion. Elles se fondent sur les grands principes que nous avons rencontrés
maintes fois (décentralisation, autonomie, droit à l’erreur, etc.).
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Depuis dix ans, nombreuses ont été les entreprises à formuler des visions de groupe. Cependant, la
dynamique résultant de cette élaboration reste encore collective, parce qu’elle se fonde sur des
valeurs partagées. Pour améliorer l’efficacité de la firme, on souhaite agir sur les valeurs
individuelles. Et c’est à ce stade qu’émergent des préoccupations éducatives ou mieux encore,
éthiques.
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5. L’éthique d’entreprise
Bien qu’il soit difficile d’en fixer un contenu précis, on s’accorde généralement sur la définition de
l’éthique d’entreprise(10). Elle consiste en l’ensemble des règles de conduite admises par la
communauté des gestionnaires, en vue de réaliser certaines fins.
Toutefois, l’éthique d’entreprise n’est pas seulement la théorie raisonnée et individuelle du bien et
du mal, comme l’a conçue la tradition religieuse et philosophique occidentale. Elle est considérée
avant tout comme une arme destinée à mieux gérer l’entreprise. Deux catégories de raisons motivent
ce choix. Selon certains auteurs, la recherche d’une morale dans les affaires « donne de l’âme »,
inspire, anime l’entreprise d’un souffle qui produit des effets bénéfiques nombreux. Pour d’autres
courants de pensée, les pratiques morales constituent une cause directe et nécessaire de
l’augmentation des profits.
a. Un « supplément d’âme »
La morale des affaires transforme en la revêtant d’un aspect éclatant et glorieux l’image de
l’entreprise, à l’extérieur comme à l’intérieur de la firme. Il devrait en résulter de nombreux fruits.
Vis-à-vis de l’environnement extérieur, la morale renforce les relations de confiance que
l’entreprise entretient avec ses différents partenaires. Ainsi, les consommateurs sont moins enclins
à la suspicion avant l’achat du produit ou du service et plus fidèles en cas de réachat.
Exemple
Darty propose depuis longtemps à ses clients de passer un contrat qui garantit la
sécurité durable des relations avec l’entreprise.
Parfois, l’ambition s’inscrit au-delà d’une simple amélioration de l’image externe. Certaines
entreprises visent l’éducation éthique de leurs employés. En fait, on s’efforce de remodeler
l’homme pour aboutir à un perfectionnement interne collectif. On diminue ainsi le risque de fuite
d’informations, de détournement de fonds, de collusion avec des ennemis potentiels ; bref, on
renforce la protection de la cité.
Exemple
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Dans l’industrie de l’armement, aux États-Unis, on cite le cas d’entreprises, comme la
General Dynamics, qui, sous peine de sanctions des pouvoirs publics, ont obligé leurs
responsables à suivre des séminaires de morale des affaires.
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Dans cette perspective, la morale constitue le moyen de fortifier une nouvelle vision de l’entreprise
par le public. La firme devient une institution éducatrice comme l’étaient la famille, l’école ou
l’Église, qui ont toutes trois perdu en efficacité. L’enseignement moral, le respect des règles du jeu
correctes vis-à-vis de la société fondent par conséquent plus solidement la légitimité toujours
recherchée par l’organisation. Antidote puissant, l’éthique dans l’entreprise protège des âpres
comportements de Wall Street, par exemple, ou des tentations aventureuses, comme celles
observées à la suite de scandales divers.
b. La transfiguration interne
Au sein de l’entreprise, les bienfaits engendrés par le souci de morale ne sont peut-être pas moins
riches. L’équipe de direction voit son rôle indiscutablement accepté par l’ensemble des employés,
s’il apparaît que la conduite des hommes de pointe de la firme est en tous domaines conforme à des
valeurs morales affichées et partagées. Au fond, le caractère exemplaire de nos dirigeants permet
non seulement d’éviter que leur statut soit contesté au sein de la ligne hiérarchique, mais encore la
morale qu’ils prônent sert surtout d’adjuvant au service des fins qu’ils poursuivent. Paraphrasant
Chandler, on pourrait écrire : « Business Strategy follows ethics ! » dans la mesure où la morale
d’entreprise reste indiscutable, dans la mesure où chacun partage les valeurs de tous.
D’où l’obligation de rédiger un code souvent simpliste et vague dans son contenu, de manière à
rassembler tout le personnel derrière les affirmations posées (foi en l’homme, respect de l’autre,
liberté d’expression, responsabilité partagée, etc.). Mais la rédaction du code ne constitue qu’une
première étape.
L’ambition éthique de la direction est plus vaste. Par contiguïté, la morale des dirigeants imprègne
en effet celle des employés. Ainsi, la direction transmet jusqu’à la base ses principes et ses règles.
Individuellement, chacun devrait y trouver son compte car, pour chaque membre de l’entreprise,
l’éthique de la firme est considérée comme un facteur de motivation.
Or, si la pratique de règles morales procure de la satisfaction aux individus, elle fournit aussi
directement plus de profit à l’entreprise.
c. Un supplément de rentabilité
Assurément, la morale d’entreprise engendre du profit supplémentaire. Un exemple indiscutable
peut être pris dans l’univers du commerce de détail. On connaît les effets pervers de la démarque
inconnue dans le secteur de la distribution. Au dire des spécialistes, la différence entre l’inventaire
physique et l’inventaire comptable proviendrait, pour une part non négligeable puisqu’elle peut
dépasser la moitié du montant total de la démarque inconnue, du vol, des larcins des employés.
Étant donné que la démarque inconnue représente environ 0,80 % du chiffre d’affaires, une simple
diminution de moitié de la part attribuée aux vols du personnel augmenterait le bénéfice de la firme
de 20 %. Les leçons de morale dans la firme paraissent donc bien fécondes.
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La théorie des droits de propriété vient renforcer cette observation empirique. On sait que, selon
les tenants de cette vision de la firme, l’intérêt de l’entreprise est de se protéger des employés
resquilleurs (hollow executives), des « passagers clandestins » qui coûtent cher aux autres. La
défense des intérêts de tous contre les excès des fraudeurs internes requiert donc la désignation
d’un superviseur qui remplit sa fonction le plus efficacement possible.
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Or, cette fonction de contrôle, qui permet de réduire les effets des actes des « passagers
clandestins », est dispendieuse parce qu’elle implique la création d’instruments de contrôle
nombreux et perfectionnés.
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Selon certains auteurs, le meilleur moyen pour tenter de réduire un tel coût consisterait à élever le
niveau de moralité en abaissant le nombre de pratiques condamnables. De fait, quelques cours de
morale, efficaces bien entendu, dispensés au personnel seraient moins coûteux qu’un lourd système
de mesure et d’évaluation visant à déceler et à sanctionner les fraudeurs éventuels.
Il résulterait donc de notre éducation morale un supplément de bénéfices, une plus grande efficacité
pour l’ensemble de l’équipe et une meilleure chance de survie en milieu concurrentiel.
En définitive, la morale n’est plus pour le gestionnaire le lieu du bien, de l’idéal, de la volonté de
Dieu, de l’impératif moral, voire celui du bonheur individuel ou pour tous ; la morale devient un
outil destiné, comme d’autres, à accroître l’efficacité de l’action des responsables engagés dans la
conduite de la firme.
IV. Les méthodes de fixation des objectifs
Quel que soit le contenu des objectifs, la question se pose de savoir comment et par qui les
contenus sont formulés.
Les spécialistes se partagent entre deux écoles : l’une, normative, préconise de rechercher des
méthodes pour objectifs ; l’autre, plus descriptive, se borne à observer les différentes pratiques qui
varient selon les circonstances.
A. Une approche normative
Selon les tenants de cette école, les objectifs doivent répondre à certaines obligations :
• Ils doivent avoir un contenu défini par des variables bien identifiées (chiffre d’affaires, parts
de marché, marges, niveaux des coûts, etc.).
• Un horizon de temps marque le moment où ils doivent être réalisés (dans trois ans ou dans
cinq ans).
• On doit désigner les hommes qui seront chargés de leur réalisation.
• Une analyse logique est nécessaire. Elle a pour objet de déterminer les différentes sortes de
relations que peuvent présenter entre eux les objectifs (relation de complémentarité, relation
de concurrence, relation d’indifférence). Sur cette base, il est possible d’établir un système
hiérarchisé d’objectifs (figure 2.19).
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Figure 2.19. Le système d’objectifs
• De façon générale, les objectifs doivent être :
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– réalistes ;
– actuels, c’est-à-dire liés à la situation présente ;
– acceptés par les hommes qui seront chargés de les réaliser ;
– écrits, pour préparer le contrôle.
B. Une approche descriptive
Selon les représentants de cette seconde orientation, les objectifs ne sont pas le produit d’un
processus rationnel.
L’entreprise est en effet composée de plusieurs coalitions de personnes, à l’intérieur de ses
frontières bien entendu (employés, ouvriers, cadres, etc.), comme à l’extérieur (clients,
actionnaires, fournisseurs, etc.).
Exemple
Chez Danone, chaque activité devait passer au crible de cinq critères : les
perspectives de croissance, la position concurrentielle, l’aptitude à la mondialisation,
le niveau de rentabilité, la contribution à la création de richesse pour l’actionnaire.
Or, ces différents groupes de participants possèdent des valeurs, des intérêts qui leur sont propres
et qu’ils souhaitent réaliser dans l’entreprise. Les sous-objectifs des groupes entrent en conflit et
les objectifs de la firme résulteront de marchandages entre coalitions et individus. La figure 2.20
représente le jeu des différentes coalitions.
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Figure 2.20. Les coalitions internes et externes
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L’analyse des parties prenantes peut être conduite selon les étapes suivantes :
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• Identifier les parties prenantes : quelles sont-elles ? Quel est leur pouvoir ?
• Analyser le comportement de chaque partie prenante : quelle est la position actuelle ? Quel
est le potentiel de coopération ? Quel est le potentiel d’opposition ?
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• Comprendre la logique de chaque partie prenante : quels sont ses objectifs, ses principes, ses
motivations ?
• Rechercher les possibilités de coalition : est-il possible d’associer plusieurs parties
prenantes ? Comment ?
Certes, l’observation de la vie effective des affaires laisse apparaître une grande variété de parties
prenantes dont les intérêts divergent. Il s’ensuit des rivalités plus ou moins profondes, une telle lutte
politique ne pouvant manquer d’influencer le mode de fixation des objectifs. Toutefois, l’effort pour
trouver des procédures plus rationnelles ne paraît pas superflu, lorsqu’on considère l’enjeu, qui
consiste tout simplement à définir, le plus clairement possible, la direction que l’on envisage de
suivre pendant un certain nombre d’années. C’est pourquoi nous allons présenter maintenant une
méthode de formulation des objectifs.
V. Le nécessaire pragmatisme
Même s’il est nécessaire de maîtriser les débats théoriques, le pragmatisme est de mise pour
adapter la démarche stratégique au contexte de chaque organisation.
A. La réconciliation des perspectives externes et internes
Nous avons déjà souligné que les stratégies effectives ne pouvaient éviter de prendre en compte
deux perspectives, celle extérieure à la firme et celle qui résulte de considérations internes. Cette
césure provient de l’opposition entre deux visions managériales, deux théories : la théorie
classique, la plus ancienne, axée sur la perspective externe et la théorie des ressources reposant sur
la vue interne. Précisons qu’il ne s’agit pas ici de théories au sens de construction de l’esprit
unifiée, donc parfaitement cohérente, ayant pour objet d’expliquer un phénomène. Mais, sous ce
vocable de théorie, parfois aussi désigné par les termes de modèle ou de paradigme, il faut
comprendre le rassemblement de points de vue d’auteurs et les conseils élaborés par des équipes
de consultants inspirés par l’une ou l’autre perspective.
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Tableau 2.4. Les deux visions de l’analyse stratégique
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1. L’école traditionnelle ou la perspective externe
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C’est la plus ancienne, puisqu’elle exerce son influence jusqu’au virage des années 1990.
L’entreprise est considérée comme un portefeuille d’activités exploité en fonction des opportunités
de l’environnement. Le succès de la stratégie dépend des choix effectués par les dirigeants pour ce
qui touche d’abord au secteur d’activité (l’automobile, la chimie, le textile, l’informatique par
exemple) où s’engage la firme. Plus la concurrence est vive dans ce secteur, moins les chances sont
grandes de réaliser du profit. Les managers axent surtout leurs efforts sur la réduction des coûts et
sur la différenciation des produits, de façon que les clients perçoivent clairement l’avantage que
leur procure un prix avantageux ou un produit original. Bref, la réussite de l’entreprise dépend de la
capacité qu’elle a de créer de la valeur pour ses clients. La stratégie est tirée par le marché (market
pull).
2. L’école des ressources ou la perspective interne
À l’inverse de la position précédente, cette théorie postule que les performances dépendent des
ressources et compétences physiques, symboliques, financières, organisationnelles et, bien entendu,
humaines qu’ont réussi à engranger les managers. Ces trésors (core of competencies) restent
propres à chaque firme. Ils sont donc différents d’une entreprise à l’autre et cachés à l’observateur
extérieur. La stratégie consiste à identifier de telles ressources et compétences, en vue d’activer la
demande à partir de l’offre. Cependant, l’avantage concurrentiel dépend des aptitudes que possède
l’entreprise à découvrir de nouveaux marchés, à inventer de nouveaux produits, séducteurs et
innovants (technology push), à se démarquer de la concurrence en offrant différemment des biens ou
des services somme toute comparables. Cette théorie ne se fonde plus sur le produit ou sur le
domaine d’activité, mais elle met l’accent sur les compétences et les ressources qui peuvent
concerner des produits ou des services fort différents.
Ces deux points de vue, interne et externe, ne peuvent pas être séparés. Ils sont indissociables. En
effet, les ressources et les compétences ne sont que les instruments par lesquels les managers créent
des activités qui, elles, engendrent des avantages concurrentiels. Les deux théories se complètent et
il serait alors vain de se poser la question de savoir laquelle prime sur l’autre. Nous puiserons
donc nos enseignements à l’une et à l’autre source.
B. Les contraintes
En définitive, à propos de la démarche stratégique, on pourrait dire que l’équipe des dirigeants doit
répondre en continu à une série de questions dont les réponses sont guidées par un réseau dense de
contraintes (figure 2.21) :
• Qui sommes-nous ? Quelle est notre affaire ? Quel est notre métier ? Que savons-nous faire ?
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• Où voulons-nous aller ? Que deviendra l’entreprise dans 3 ans, 5 ans, 10 ans ? Changeronsnous de métier ? Quels sont nos objectifs personnels ? Quels sont les objectifs des autres
acteurs internes et externes ?
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• Pourrons-nous y aller ? Quelle sera l’évolution macroéconomique du monde entier ? Les
frontières s’abolissent-elles ? Disposerons-nous des brevets, des hommes, des ressources ?
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• Comment y aller ? Quel cap devons-nous adopter ? Faut-il lancer de nouveaux produits,
conquérir de nouveaux marchés, acheter des technologies ? Faut-il se séparer de certaines
activités ?
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Ces questions générales se posent cependant dans des contextes bien différents les uns des autres.
Figure 2.21. Les contraintes stratégiques
C. Les stratégies en pratique
Si l’on compare les stratégies d’entreprise, on est frappé par leurs diversités apparentes. De
nombreuses causes sont à l’origine de cette pluralité.
Exemples
La stratégie d’Airbus n’a rien à voir avec celle de son sous-traitant Corse-Composites
Aéronautiques qui lui fournit des pièces en matériaux légers. Chez Airbus, pour
abaisser les coûts de fabrication, la résolution de problèmes d’organisation est
déterminante, tant pour coordonner les activités des centres de production des pièces
que pour réguler les flux d’approvisionnement livrés par les sous-traitants (supply
chain). Chez CCA, on effectue de gros efforts en marketing relationnel, soit pour
gagner de nouveaux prospects, tel Airbus Helicopters, soit pour fidéliser les anciens
clients comme Dassault.
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La taille de l’entreprise induit des préoccupations différentes, qui engendrent à leur tour des
stratégies dissemblables. De la même manière, le clivage entre les fabricants de biens et les
prestataires de services laisse apparaître de gros écarts en matière stratégique. Renault met l’accent
sur les caractéristiques des modèles et des prix. Le groupe Accor s’efforce de développer un
avantage concurrentiel immatériel (conseils aux clients, accueil, diversité des formules, ambiance,
etc.) pour gagner des marchés.
Six stratégies à éviter
1. exclusivement chiffrée ;
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Six stratégies à éviter
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En conclusion, on peut observer qu’à l’instar de la structure de l’entreprise ou du choix d’un mode
de gouvernance les stratégies des firmes restent tributaires de facteurs de contingence.
2. désincarnée, qui ne peut s’expliquer aisément ;
3. copiée-collée : plusieurs entreprises de même secteur adoptent des stratégies identiques ;
4. multidirectionnelle : trop d’activités peu en rapport les unes avec les autres ;
5. défensive : il faut répondre à un besoin encore inassouvi ;
6. rigide : des ajustements sont nécessaires.
Source : Marie-Sophie Ramspacher, Les Échos, 12 janvier 2015.
Mini-cas 1 : des objectifs multiples et... incohérents
Il y a trente ans, M. Bernard fuit sa Pologne natale au volant de son camion, sa famille cachée
dans la remorque. Arrivé à Paris, à force d’énergie, il s’installe comme transporteur routier.
Il devient au fil du temps sous-traitant d’une grande entreprise nationale. D’un camion il y a
trente ans, M. Bernard est passé à cinquante camions aujourd’hui, propriété de la société des
Transports Bowsky. Il est le premier prestataire de l’entreprise qui lui a fait confiance, il y a une
vingtaine d’années. D’entreprise en nom propre, il est passé à une SARL au capital de
150 000 €.
Sa fille est gérante de la société. Son fils assurait jusqu’à un passé récent la direction
administrative. Il a quitté l’entreprise pour partir à l’étranger, en laissant un système
d’exploitation particulièrement puissant.
Les Transports Bowsky ont investi dans un système embarqué qui permet à tout moment de :
– connaître la position des véhicules ;
– suivre la bonne traçabilité des marchandises ;
– sécuriser presque totalement les véhicules et leur chargement ;
– faciliter des opérations B to C avec accusé de livraison et encaissement des règlements.
C’est grâce à cette politique que les Transports Bowsky ont pu s’imposer comme un partenaire
de qualité.
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Environnement général
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Le problème est que les Transports Bowsky réalisent 95 % de leur chiffre d’affaires avec un seul
client.
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L’univers du transport est en pleine mutation avec une tendance lourde d’évolution vers le
principe multimodal. Les problèmes d’environnement et les problèmes sociaux constituent une
des préoccupations majeures des entreprises de ce secteur.
La concurrence est féroce, surtout de la part des transporteurs étrangers soumis à des règles
sociales moins contraignantes que celles imposées en France. Les transporteurs des pays de l’Est
travaillant à leur tarif font en réalité du dumping. En particulier, ils n’hésitent pas à brader sur
les itinéraires de retour.
La privatisation imposée aux postes européennes par la Commission de Bruxelles conduit à un
réaménagement complet du marché de la messagerie.
Les Transports Bowsky sont présents sur le marché de la messagerie, ce qui leur permet de ne
pas avoir à rechercher de chargements de retour moyennant un prix de prestation très élevé
(+ 30 % par rapport au marché français).
Un autre facteur de risque et de coût est le nombre de ruptures de charges supportées sur un
trajet. Les ruptures de charges ne permettent pas une bonne traçabilité des marchandises. Elles
fragilisent le transport en réduisant le coefficient de sécurité.
Les Transports Bowsky assurent un « zéro rupture de charges » moyennant les surcoûts indiqués
ci-dessus.
Situation financière des Transports Bowsky
La santé financière des Transports Bowsky est globalement bonne. Toutefois, une détérioration
générale de l’exploitation apparaît. La capacité d’endettement de l’entreprise est intacte.
Le chiffre d’affaires par personne témoigne d’un accroissement significatif des effectifs même si,
dans le même temps, le salaire par tête (hors charges) baisse également.
Le résultat net est en baisse notoire, malgré une progression spectaculaire du chiffre d’affaires.
Jusqu’à maintenant, on enregistre une progression du résultat plus forte que la progression du
chiffre d’affaires, pour aboutir à une chute aujourd’hui.
Le diagnostic général peut prendre la forme de l’analyse SWOT suivante :
Diagnostic interne
Forces
Faiblesses
Diagnostic
externe
Absence de benchmark et de veille
concurrentielle.
Méconnaissance de la démarche
commerciale, de l’affrètement et de
la structure des coûts.
Développement d’activités à forts
effets d’expérience et économies
d’échelle.
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Menaces
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Opportunités
Développement de l’activité dans un
domaine où le surcoût est accepté du
fait de la valeur du produit ou de la
prestation (conditions de délais et/ou
de sécurité).
Développement du chiffres
d’affaires.
Solides capacités financières.
Maintenance et veille technologiques.
Politique de calcul de coût et
réduction des coûts pour gains de
productivité.
Diversification client.
Objectifs de l’entreprise
Face à ce diagnostic global, M. Bernard et sa fille ont décidé de repenser la stratégie des
Transports Bowsky. Ils s’interrogent sur les axes possibles uniquement en B to B.
Trois scénarios sont envisageables :
1. La diversification de l’activité dans de nouveaux secteurs commerciaux :
a- location avec chauffeur :
• industries en flux tendu industriel (automobile), flux tendus commerciaux (processus sans
stockage intermédiaire) ;
b- trafic de lignes à horaires fixes incluant des modifications erratiques :
• industrie, commerce de gros, commerce de détail, tel que réseau développement photo,
pressing, librairies hors presse, etc. ;
• compagnies aériennes ;
c- transport routier de marchandises de proximité : mêmes secteurs ;
d- messagerie ou TRM (Transport outier de Marchandises) spécialisés dans l’absence de rupture
de charge/transport sécurisé :
• informatique, bureautique, médical (hors installation) ;
• industrie du luxe.
2. La diversification avec adjonction des métiers de :
• gestionnaire de fret (entreposage) ;
• logisticien (stockage, préparation-expédition des commandes, transport-livraison) ;
• prestations de recrutement pour d’autres entreprises et personnel intérimaire.
3. L’extension au niveau national ou une nouvelle implantation régionale :
• la gérante actuelle, fille de M. Bernard, souhaite que le développement se fasse dans une
seule entité juridique. Elle entend également que les nouvelles activités de croissance
externe se développent en modifiant aussi peu que possible le processus actuel qu’elle
connaît bien et qu’elle juge efficace.
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M. Bernard, principal actionnaire et ancien gérant à la retraite depuis peu, pense quant à lui que :
– les nouvelles activités doivent avoir la même rentabilité que les activités actuelles ;
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– la sécurité de l’outil actuel doit être totale, que la croissance soit interne ou externe ;
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– le développement de nouvelles activités passera sûrement par l’adjonction de nouveaux
métiers qui ne devront en aucun cas perturber les activités actuelles très profitables.
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Compte tenu de l’évolution rapide et parfois brutale de l’environnement, en particulier
réglementaire, père et fille sont d’accord pour envisager que ces objectifs soient mis en œuvre
dans un délai qui ne devrait pas excéder 18 mois.
Questions
1. Comment, compte tenu des éléments de diagnostic, M. Bernard peut-il conduire ses choix
d’orientation stratégique ?
2. Pensez-vous que les différents objectifs pourront être atteints dans des conditions
acceptables de réussite ?
Mini-cas 2 : Les métiers et valeurs, moteurs de la vision
stratégique
Voici le profil métier et les principaux repères de l’entreprise d’ingénierie Technip, créée en
1958, cotée aux Bourses de Paris et de New York, leader mondial dans son domaine.
Sa mission : un groupe mondial d’ingénierie de premier plan
Capable de fournir de l’ingénierie, des technologies et des services de construction à l’industrie
pétrolière, gazière, pétrochimique et à d’autres industries, Technip est l’un des leaders mondiaux
dans son domaine.
Grâce à ses bases opérationnelles dans les cinq continents, avec un effectif de 19 000 personnes,
le groupe, bien positionné auprès de tous les clients significatifs, est en mesure de prendre en
charge tous les aspects d’un projet majeur aux meilleurs coûts, depuis l’ingénierie de base
jusqu’à la réalisation clé en main.
Des domaines d’activité très diversifiés
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Les domaines d’intervention de Technip couvrent le développement de champs off-shore et onshore, le traitement et la liquéfaction de gaz, le raffinage de pétrole, les pipelines à terre et la
pétrochimie, qui représentent ses principales activités. Le groupe est particulièrement bien placé
dans le secteur de l’off-shore profond, secteur dans lequel il utilise ses propres actifs industriels.
Il développe également ses activités dans des secteurs non pétroliers, tels que les engrais, la
chimie, les sciences de la vie, la génération électrique, les industries manufacturières et autres
industries, ainsi que les bâtiments du secteur des services.
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Le métier d’ingénierie et de construction, une vocation
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L’entreprise couvre une gamme complète de services allant de l’ingénierie de base aux solutions
globales. Technip fournit tout ou partie des études de faisabilité, des services d’ingénierie de
base ou de détail, d’approvisionnement des équipements, de supervision de la construction et de
management de projet. Le groupe a une longue expérience de la réalisation de projets clé en main
et du montage des financements de projets pour le compte de ses clients.
Dans le domaine de l’off-shore notamment, Technip est en mesure de répondre aux opérateurs
qui souhaitent confier la plus grande partie des services à un seul entrepreneur général, capable
de manager tous les aspects d’un projet important de développement au meilleur coût.
Le groupe travaille régulièrement en partenariat avec des entreprises de diverses nationalités. Il
a développé une politique d’achat d’équipement qui lui permet d’obtenir les prix les plus
compétitifs sur le marché international, en utilisant une place de marché privé. Technip assure
également la formation du personnel opérateur, la mise en route, l’exploitation et la maintenance
des installations.
Une forte expertise technologique
Par l’intermédiaire de ses ingénieurs de procédé et de ses techniciens hautement qualifiés,
Technip a acquis une solide expertise technologique qui l’a conduite, dans certains cas, à
concevoir et fabriquer ses propres produits, ses propres technologies, et les équipements de
procédés associés dans les domaines de l’off-shore (conduites sous-marines, ombilicaux, ROVs,
(remotely operated vehicles ou plates-formes) ainsi que dans les secteurs du raffinage, du gaz, de
l’hydrogène, du soufre, de l’éthylène, des engrais et du ciment.
Technip a également établi des liens étroits, voire des accords exclusifs, avec des bailleurs
internationaux de licence de premier plan, notamment dans le domaine de la pétrochimie.
Ses priorités et ses valeurs : qualité, santé, sécurité et environnement
La qualité de ses prestations, la santé et la sécurité du personnel travaillant sur les chantiers en
cours ou dans les installations conçues et construites par Technip, ainsi que la protection de
l’environnement, sont des priorités absolues. Ces éléments sont pris en compte dès la conception
de l’installation et les mesures appropriées sont mises en œuvre et appliquées strictement à
chaque étape de l’exécution d’un projet. Le respect des objectifs qualité inspire la manière dont
Technip conduit ses activités : tous ses centres d’ingénierie sont certifiés ISO 9001.
Les objectifs HSE (hygiène, sécurité, environnement) gouvernent la manière dont Technip
conduit ses activités auprès de ses clients et partenaires dans les bureaux comme sur les
chantiers. Le respect de ces objectifs est assuré par la charte HSE : Technip considère que le
succès de cette politique passe par l’implication de l’ensemble du personnel.
Une vision stratégique
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Les activités de Technip sont régies par une charte de valeurs, approuvée par le conseil
d’administration. L’objectif de l’entreprise est d’apporter le plus haut niveau de satisfaction
possible à l’ensemble de ses partenaires, et notamment à ses clients, à ses actionnaires et à ses
salariés. La charte, qui repose sur les valeurs fondamentales que sont l’excellence
professionnelle et l’intégrité, définit des principes d’action et de comportement professionnel qui
soutiennent la démarche professionnelle de chacun des collaborateurs du groupe dans leur action
quotidienne.
C’est en s’appuyant sur les principales caractéristiques décrites ci-dessus que la direction de
Technip a publié en interne, pour son personnel, un document intitulé « Notre vision ». Cette
vision suggère notamment que l’entreprise atteigne le leadership mondial en termes de réputation
et de performance dans son domaine, grâce à la motivation, à l’expertise et à la créativité
technologique de ses équipes.
Question
Comment la description de la mission, des savoirs et des valeurs de Technip permet-elle
d’apprécier la nature de la démarche stratégique de la société ?
Mini-cas 3 : L’éthique est partout, n’est-ce pas trop ?
Au Forum économique mondial de Davos, dans les épiceries ou corners éthiques, sur les
marchés financiers via les fonds éthiques ou encore avec la nouvelle profession de déontologue,
l’étique est devenue incontournable.
Le jour d’une remise de diplômes, la moitié des 430 étudiants du MBA de l’Insead ont signé un
« pacte » où ils s’engageaient à tenir compte des « conséquences sociales et environnementales
des décisions qu’ils auraient à prendre dans leur vie professionnelle ». Aucune sanction – même
symbolique – n’est prévue en cas de non-respect. C’est une première !
De son côté, le Centre des jeunes dirigeants fait la promotion d’« un management humaniste » en
proposant aux chefs d’entreprises des outils d’évaluation pour qu’ils puissent concrètement
déterminer où ils en sont en matière de développement durable.
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Un récent sondage réalisé auprès de 1 200 anciens de Centrale, qui occupent des postes de haut
rang dans des entreprises, renseigne sur leur conception et leur pratique de l’éthique. Un tiers
pense que l’éthique est un « ensemble de valeurs fondamentales partagées par tous les salariés »,
un autre tiers pense qu’il s’agit d’« idées défendues avec ferveur par quelques personnes ». Les
autres se partagent entre « une notion étrangère aux règles de fonctionnement de notre
entreprise » et « une belle charte affichée dans certains bureaux ».
By
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« Le recul de l’État, la démultiplication des scandales, les nouvelles obsessions sociales sur la
santé, l’alimentation, le besoin de transparence, toutes ces raisons expliquent la montée en
puissance de l’éthique », rappelle le philosophe Gilles Lipovetsky.
L’entreprise ne peut plus se contenter de concentrer son action sur la satisfaction de son
actionnaire (stockholder), elle doit aussi prendre en compte ceux qui peuvent être touchés par
son activité, les stakeholders : les salariés, les clients, les voisins, les gouvernements, les
associations de protection de la nature, etc. « Elle doit construire sa propre légitimité.
L’efficacité privée ne suffit plus, l’éthique rassure », souligne Gilles Lipovetsky.
André Comte-Sponville, dans Le Capitalisme est-il moral ? (2004), s’insurge contre cet éthiquemanagement. Selon lui, l’entreprise n’est là que pour faire du profit, pas des bonnes œuvres. Et,
si elle en fait, c’est uniquement pour en tirer du profit !
Autre pierre dans le débat ajoutant à la confusion entre éthique et communication : Alcatel avait
annoncé des efforts en matière de « développement durable », notamment sur le plan social, mais
l’entreprise s’est retrouvée assignée devant le conseil de prud’hommes par 180 licenciés qui
l’accusaient d’avoir tout fait pour les priver d’un plan social.
Questions
1. Quels sont les objectifs actuels des entreprises et des parties prenantes intéressées ?
2. Ces objectifs sont-ils toujours compatibles ?
Chapitre 3
Le diagnostic stratégique
Les compétences clés à acquérir :
• Comprendre la logique qui guide un diagnostic stratégique.
• Connaître les différentes notions et les démarches nécessaires pour pratiquer un diagnostic
stratégique.
• Effectuer une segmentation stratégique.
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• Formuler un diagnostic externe puis un diagnostic interne.
• Formuler un diagnostic business puis un diagnostic corporate.
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• Appliquer tous les outils du diagnostic stratégique à une situation concrète.
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• Évaluer un portefeuille d’activités.
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• Comparer les différentes matrices de portefeuilles d’activités.
Le diagnostic stratégique, point de passage obligé vers la détermination des orientations
stratégiques, sera longuement présenté. Dans un premier temps, nous verrons que des options
doivent être prises avant d’effectuer le diagnostic. Puis nous entrerons dans les outils du diagnostic
externe/interne avant de conclure par une synthèse.
I. Les préalables au diagnostic stratégique
A. La séquence diagnostic-décision stratégique
La définition des stratégies est fort naturellement précédée d’une phase de diagnostic stratégique,
l’analyse et la réflexion devançant la prise de décision. Cette phase de processus stratégique est
essentielle dans la mesure où elle oriente les alternatives stratégiques qui seront envisagées et les
décisions qui seront prises, compte tenu des objectifs retenus par la direction générale. La séquence
ainsi décrite est généralement considérée comme rationnelle (cas 1 de la figure 3.1).
Figure 3.1. Les séquences diagnostic-décision stratégique
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En pratique, il faut être conscient du fait que le sens de la relation n’est pas toujours aussi net
et qu’il est susceptible d’être inversé. Les objectifs peuvent être choisis en fonction des décisions
arrêtées et les alternatives et le diagnostic orientés en conséquence. Le cas 2 de la figure 3.1 prend
en compte l’influence des décisions stratégiques envisagées sur le diagnostic réalisé. C’est ce que
l’on peut appeler une séquence « rationalisatrice »(11). L’apparente rationalité masque souvent en
entreprise des processus itératifs complexes et la séquence 3 se rapproche de la réalité. En matière
de décision stratégique, il ne faut pas surestimer la rationalité et la linéarité des processus. On dit
parfois que les stratégies retenues s’apparentent davantage à des stratégies émergentes qu’à des
orientations véritablement souhaitées.
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B. Les deux perspectives de l’analyse stratégique
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Le diagnostic stratégique repose sur deux approches complémentaires, le diagnostic interne de
l’entreprise et le diagnostic externe de l’environnement de celle-ci (figure 3.2).
Figure 3.2. Le double diagnostic stratégique
Cette démarche repose sur une conception de l’entreprise considérée comme un système ouvert sur
son environnement, la stratégie définissant les modes de relation entre l’entreprise et cet
environnement.
1. Le diagnostic interne
Il vise à définir le potentiel stratégique de l’entreprise, c’est-à-dire les forces, les atouts sur
lesquels elle pourra s’appuyer pour définir ses orientations stratégiques. Le diagnostic interne doit
permettre de mettre en évidence le savoir-faire de l’entreprise, son métier, ses compétences. Mais
l’entreprise n’est pas faite que de forces, elle compte également des faiblesses, des caractéristiques
sur lesquelles elle ne peut pas compter pour définir ses stratégies. Le diagnostic interne vise donc à
définir les capacités et les aptitudes stratégiques de l’entreprise.
2. Le diagnostic externe
Il a pour objectif de déceler, dans la situation actuelle et dans les évolutions des environnements de
l’entreprise, les perspectives susceptibles de lui être favorables et défavorables. En effet, les
environnements de l’entreprise recèlent à la fois des opportunités, des chances de développement et
des menaces qui peuvent remettre en cause les stratégies actuelles.
3. Les orientations stratégiques
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De la combinaison des résultats de l’analyse interne et externe, on déduit les orientations
stratégiques que l’entreprise peut envisager et parmi lesquelles ses dirigeants pourront puiser en
fonction de leurs objectifs.
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Cette analyse, reposant sur la découverte des forces/faiblesses et des menaces/opportunités, porte
le nom de SWOT (Strengths, Weaknesses, Opportunities, Threats).
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La décomposition formelle entre diagnostic interne et diagnostic externe ne doit pas laisser penser
que ces deux approches sont indépendantes. Elles sont en réalité fortement liées. Ainsi, en matière
stratégique, le diagnostic interne n’a de sens que par rapport aux concurrents. La situation « en
valeur absolue » de l’entreprise est dénuée d’intérêt sur un marché concurrentiel. Ce qui compte,
c’est sa situation relative. C’est la raison pour laquelle le diagnostic stratégique retient les concepts
de part de marché relative, de qualité relative, etc. De la même façon, le diagnostic externe ne
saurait être mené sans tenir compte de l’entreprise et de ses activités. Ce sont elles qui orientent les
secteurs sur lesquels le diagnostic va porter. De plus, les forces de l’entreprise n’existant que dans
un contexte précis, elles peuvent se transformer en faiblesses dans un autre. Il en est de même quand
on étudie les facteurs clés de succès dans un secteur (le délai de livraison ou la réactivité
commerciale, par exemple). C’est là une caractéristique d’un environnement donné. Mais cette
caractéristique ne prend sens, sur le plan stratégique, que dans la mesure où elle est maîtrisée par
l’entreprise. Force est de constater que les outils de diagnostic sont étroitement imbriqués entre les
aspects externes et internes.
C. La segmentation stratégique
La mise en œuvre des techniques du diagnostic stratégique nécessite au préalable que l’on précise
ce sur quoi va porter le diagnostic. Plusieurs cas de figure sont schématiquement à distinguer. Soit
l’entreprise est mono-activité et dans ce cas elle constitue un tout homogène qui peut faire l’objet
d’un diagnostic unique. Soit l’entreprise s’est diversifiée au fil du temps, elle est devenue multi-
activités et il convient, avant de mener les diverses phases du diagnostic, de s’interroger sur
l’homogénéité de l’ensemble de l’entreprise en ce qui concerne ses compétences fondamentales et,
éventuellement, de la décomposer en sous-ensembles homogènes puis, de procéder à une
segmentation stratégique (figure 3.3).
Le diagnostic se fera alors par DAS, ce qui n’exclut pas que les compétences transversales soient
étudiées. Mais, si l’entreprise constitue en elle-même une unité d’analyse pertinente, caractérisée
par des compétences transversales communes aux diverses activités, la segmentation peut devenir
inutile.
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Figure 3.3. Le choix d’une unité d’analyse
1. L’utilité de la segmentation stratégique
La segmentation stratégique consiste à découper l’entreprise en unités homogènes tant sur le plan
interne que sur le plan externe.
Exemple
Pour un groupe qui exercerait des activités aussi diverses que la production de
véhicules pour particuliers, de machines agricoles, de véhicules industriels, de
matériels d’armement, de cycles, de matériels de jardinage, de véhicule de course et
de financement, il n’est pas envisageable de procéder à un diagnostic simultané. Les
clients, les concurrents, les produits et les règles concurrentielles sont trop différents
d’un secteur à l’autre. Un découpage s’impose (figure 3.4).
Figure 3.4. La nécessité de la segmentation stratégique : l’exemple d’une industrie du secteur de la mécanique
Selon les auteurs et les approches, les unités homogènes portent des intitulés divers, mais
recouvrent globalement la même réalité. Nous considérerons comme synonymes les termes centre
d’activité stratégique (CAS), segment stratégique, strategic business unit (SBU), domaine
d’activité stratégique (DAS).
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Chaque domaine d’activité est supposé constituer une entité homogène pouvant à la fois faire
l’objet d’un diagnostic et d’une proposition stratégique adaptée. Un domaine d’activité stratégique
est homogène sur le plan des produits et des services offerts à un marché spécifique, la concurrence
y est clairement identifiée, des compétences précises y sont relevées, des ressources peuvent y être
affectées et l’entreprise peut y développer un avantage concurrentiel.
Exemple
By
Il apparaît évident qu’une entreprise ayant un portefeuille aussi diversifié que celui représenté sur
la figure 3.4 ne peut pas faire l’objet d’un diagnostic unique.
Pour une entreprise de e-commerce, qui commercialise des produits diversifiés sur
des marchés « grand public » et « professionnel », faut-il, à des fins de diagnostic,
segmenter l’activité et distinguer ces deux domaines d’activité ? Ou faut-il, au
contraire, considérer que ces activités partagent des compétences transversales
fondamentales dans les domaines du marketing direct, de la gestion d’un site Internet et
de l’animation de communautés virtuelles, de la logistique ? La réponse est loin d’être
simple. Si l’on estime que la vision différenciée de l’entreprise, selon des DAS, est
pertinente, alors il faut procéder à une segmentation stratégique et, le cas échéant, à
l’analyse des compétences transversales.
La segmentation stratégique est donc une opération importante de la démarche stratégique dans la
mesure où elle conditionne le niveau d’analyse tant interne qu’externe du diagnostic et où ensuite
elle induit le niveau auquel les décisions stratégiques seront prises. Ne perdons pas de vue qu’elle
constitue la phase préliminaire de l’analyse des portefeuilles d’activités.
2. La méthodologie de la segmentation stratégique
Il n’existe pas de méthodologie admise et efficace et l’on se contente souvent d’affirmer qu’une
bonne segmentation stratégique se reconnaît à la pertinence des décisions stratégiques prises à
partir d’elle. On peut cependant noter que deux approches complémentaires sont utilisées, l’une
plutôt théorique, l’autre plutôt empirique.
Figure 3.5. Les trois critères du segment stratégique
La première approche consiste à retenir les trois critères de définition du segment (figure 3.5) :
– la technologie (aspect fabrication) ;
– le besoin satisfait (aspect produit) ;
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– la clientèle (aspect marché).
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À partir de ces trois critères, une entité homogène est définie, c’est-à-dire qu’un domaine
d’activité stratégique (DAS) regroupe un type de clients, un produit donné, pour un besoin satisfait.
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Ainsi, dans le secteur des appareils de levage et des grues, on sera amené à distinguer les clients
selon leur appartenance aux secteurs du BTP ou de l’industrie, les technologies selon qu’elles sont
électromécaniques ou hydrauliques et les besoins ou fonctions du produit selon qu’il s’agit de
levage ou de manutention (figure 3.6).
Figure 3.6. La segmentation stratégique appliquée au secteur du levage et des grues
La seconde approche est plus empirique. Elle consiste, par tâtonnement, à définir, à partir de la
structure actuelle de l’entreprise, de ses découpages d’activité, les domaines d’activité stratégique
aux contours les plus homogènes. Il s’agit bien évidemment d’un exercice délicat puisqu’il consiste
à aller à l’encontre de l’histoire de l’entreprise, de son développement par adjonctions successives
d’activités nouvelles. La segmentation stratégique, en cherchant à créer des DAS entre lesquels il
n’existe pas nécessairement de complémentarité, vise à ignorer les synergies qui ont été la raison
d’être de certaines diversifications passées.
3. La relation technologie-segmentation stratégique
Toute analyse stratégique commence par la détermination de l’unité d’analyse ; ce sont les DAS que
nous avons définis en trois dimensions (besoins satisfaits, clients visés et technologie). Cette
troisième facette est peut-être la moins précise tant l’appellation technologie peut regrouper des
aspects variés. Il demeure que l’axe technologique constitue bien une des trois dimensions de la
segmentation stratégique. Deux activités répondant aux mêmes besoins pour les mêmes clients mais
faisant appel à deux technologies différentes constituent des DAS différents.
Exemple
Deux marteaux-piqueurs, l’un hydraulique, l’autre pneumatique, relèvent de DAS
distincts.
La présence de l’axe technologique dans la segmentation s’explique par l’existence de courbes
d’apprentissage différentes selon les technologies utilisées.
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Les changements technologiques ont pour conséquences, le cas échéant, une modification du
paysage concurrentiel, un regroupement des segments stratégiques et un redécoupage des autres. Les
frontières entre les segments, et donc la détermination des unités d’analyse stratégique, sont
susceptibles d’être bouleversées lorsque des innovations technologiques surviennent. Un DAS ne
s’explique que parce qu’il délimite des facteurs clés de succès précis. Une technologie nouvelle
périme sur-le-champ certains facteurs clés de succès alors qu’elle en fait vivre d’autres, les
rassemble parfois ou les subdivise encore.
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Nous sommes ici au cœur d’une des critiques importantes adressées à l’analyse stratégique
traditionnelle fondée sur des DAS (immuables ?). Dès lors que des changements technologiques
majeurs s’opèrent selon une fréquence rapide, il est vain de vouloir inscrire les données
concurrentielles dans un paysage représentatif du seul présent alors que celui de l’avenir est au
mieux incertain, au pire inconnu.
Exemple
Qui peut affirmer que, dans les années à venir, les automobiles connectées et
intelligentes seront encore la propriété d’une personne ? Elle se déplaceront seules et
seront assurées sans que le conducteur ne le soit.
Les entreprises sont enserrées dans un enchevêtrement de technologies évolutives à l’intérieur
desquelles elles s’allient et se concurrencent pour placer au mieux leurs produits. La convergence
technologique actuelle des activités numériques (vidéo, informatique, téléphonie, etc.) renforce
l’acuité de cette question.
4. Les difficultés de la segmentation stratégique
Les difficultés de la segmentation stratégique sont nombreuses.
a. Jusqu’où segmenter ?
Le problème du degré de détail de la segmentation stratégique à retenir n’est pas simple. Trop
globale, elle associe des activités qui ont peu de points communs. Trop fine, la segmentation
stratégique se confond avec la segmentation marketing. On peut aisément distinguer les divers
niveaux d’analyse que sont l’entreprise dans son entier, les business units (métiers), les produits et
les clients. Or, le découpage conditionne en partie les implications stratégiques.
Exemple
Dans une entreprise où un DAS de petite taille subit de lourdes pertes, une stratégie
d’isolement reviendrait à le condamner alors même que son intégration dans un
ensemble plus vaste pourrait être salvatrice.
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b. La précarité de la segmentation stratégique
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La segmentation stratégique est précaire dans la mesure où elle peut toujours être remise en cause
par un changement technologique ou une évolution du marché.
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Figure 3.7. La réflexion stratégique appliquée à l’entreprise Lafarge
Le découpage stratégique ne coïncide pas nécessairement avec l’organigramme de l’entreprise et
cela est susceptible de créer des tensions soit dans la phase d’analyse, soit dans celle de la mise en
œuvre.
La segmentation stratégique ne doit pas être confondue avec la segmentation marketing.
Tableau 3.1. La segmentation stratégique et la segmentation marketing
Segmentation
stratégique
Découpage
Décisions
Décideurs
Des activités de l’entreprise
Investir, désinvestir...
Direction générale groupe
Segmentation
marketing
Du marché
Prix, publicité, Internet...
Division Marketing
La première divise les activités de l’entreprise au niveau de la direction générale et les questions
qui se posent sont celles de l’investissement ou du désinvestissement. En revanche, la segmentation
marketing se focalise sur les clientèles, relève des décisions des directeurs marketing ou des chefs
de produits et porte sur le mix marketing.
Exemple
L’étude du groupe Danone permet de bien comprendre la distinction à opérer entre le
niveau stratégique et le niveau marketing. Face aux tendances lourdes en matière
d’obésité qui concernent toutes les tranches d’âge et tous les pays, Danone aurait pu
envisager de développer des gammes de biscuits allégés ou diététiques. Cela aurait été
une décision prise au niveau marketing. Compte tenu du positionnement stratégique de
Danone sur la nutrition et la santé, le groupe a décidé de céder le DAS Biscuit. Le
raisonnement s’est situé au plan stratégique.
c. la segmentation stratégique, une phase décisive
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La segmentation stratégique est probablement l’une des phases les plus importantes mais aussi les
plus délicates de la démarche stratégique lorsque la vision de l’entreprise s’opère activité par
activité. Pour la segmentation stratégique, comme pour le diagnostic, se pose la question de
l’internalisation ou de l’externalisation de l’analyse.
By
D. Internalisation versus externalisation du diagnostic
La question qui est ainsi posée est aussi celle de l’internalisation ou de l’externalisation
du diagnostic. Le diagnostic doit-il être effectué par des personnes membres de l’entreprise ou par
des intervenants externes ? Le tableau 3.2 présente les éléments susceptibles de faciliter le choix.
Une solution mixte (un consultant qui anime un groupe interne de diagnostic stratégique) est
également pratiquée par les entreprises. Certaines utilisent également des solutions externes moins
coûteuses en confiant à un stagiaire de haut niveau ou à un groupe de MBA une mission de
diagnostic sur longue durée (six mois).
Tableau 3.2. L’alternative internalisation/externalisation du diagnostic
Avantages
Interne à l’entreprise :
groupe ad hoc,
équipe projet, service
fonctionnel
• Risque de réapparition des
• Meilleure connaissance préalable conflits internes habituels,
des spécificités de l’entreprise.
interfonctionnels notamment.
• Implication plus grande des
• Manque d’objectivité des
équipes dans le diagnostic.
analyses.
• Mise en œuvre facilitée des
• Absence de démarches et d’outils
solutions du fait de la participation méthodologiques.
à leur élaboration.
• Inadaptation en cas de crise ou
• Coût direct moins élevé.
d’urgence, dans lesquelles des
décisions radicales sont à prendre.
• Apport méthodologique dû au
• Coût plus élevé.
professionnalisme du consultant.
• Risque de diffusion à l’extérieur
• Expérience préalable du secteur de l’entreprise d’informations
et de ses spécificités.
confidentielles.
• Rapidité d’intervention et de
• Dépendance vis-à-vis de la
mobilisation d’équipes.
direction.
• Regard extérieur plus objectif et • Risque de voir proposées
neutre par rapport aux dissensions des solutions trop standards
internes.
ou « à la mode ».
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Externe à l’entreprise :
consultant
Limites
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Solutions
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En pratique, le degré d’urgence et la situation de l’entreprise déterminent le choix. Plus l’entreprise
est en crise et plus le diagnostic est susceptible de remettre en cause de façon drastique les
stratégies et l’organisation actuelles, plus on fera appel à un consultant externe à l’entreprise
(figure 3.8).
Figure 3.8. Le degré d’urgence et l’externalisation du diagnostic
E. Les outils du diagnostic stratégique
Les outils de diagnostic doivent d’abord être distingués selon qu’ils portent sur le diagnostic
externe ou interne. Mais certains outils sont particulièrement adaptés aux décisions qui seront
prises au niveau d’une seule activité ; d’autres sont davantage utilisés dans le cadre global, celui de
la stratégie corporate. Tout en sachant que vouloir classer de manière définitive un outil dans une
case relève d’une attitude trop rigide, nous proposons cependant une typologie indicative des outils
du diagnostic stratégique qui nous permettra de les présenter de manière ordonnée par rapport aux
deux grands clivages que sont l’interne et l’externe d’une part, le business et le corporate d’autre
part.
Toutefois, on notera que le diagnostic par les ressources et les compétences s’effectue :
– soit au plan global de l’entreprise, si l’on considère que ces compétences sont transverses
aux différents DAS et communes à l’ensemble de l’entreprise ;
– soit lors du diagnostic des DAS, si les compétences en question sont spécifiques à une
division.
De la même façon, s’agissant des fonctions et processus, les deux possibilités se présentent et
dépendent en partie de l’organisation de l’entreprise étudiée :
– les fonctions et processus centralisés au niveau du siège (planification, contrôle, ressources
humaines, etc.) feront l’objet d’un diagnostic au niveau corporate ;
– les fonctions décentralisées dans les divisions et propres à chaque DAS (production,
commercial, etc.) seront analysées au niveau business.
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Il convient de constater que l’utilisation des outils du diagnostic dépend du mode d’organisation :
centralisé ou décentralisé ; ce qui démontre, si besoin était, le lien entre diagnostic stratégique et
organisation.
By
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Cette présentation a l’avantage – ce qui est réel – de montrer les outils de diagnostic comme une
boîte à outils au sein de laquelle le décideur recherchera ceux qui sont les plus appropriés au
problème à résoudre. Toutefois, elle ne doit pas faire oublier qu’un bon diagnostic fait appel à des
outils de provenances diverses, complémentaires ou concurrents, car tous n’ont qu’un seul objet :
éclairer les choix stratégiques de l’entreprise.
Tableau 3.3. Les outils du diagnostic stratégique
II. Le diagnostic stratégique externe
L’objectif du diagnostic externe est d’analyser l’attractivité actuelle mais aussi potentielle d’un
secteur. Il s’agit de déterminer les opportunités (c’est-à-dire les chances à saisir) et les menaces
(les risques auxquels il convient de faire face), de comprendre les enjeux auxquels sont confrontées
les entreprises. On ne saurait trop insister sur le caractère prospectif du diagnostic externe. Il doit
en effet permettre de construire des scenarii d’évolution du secteur. Le diagnostic externe doit
permettre de sélectionner les secteurs sur lesquels l’entreprise juge opportun d’investir ou de
désinvestir.
Sur un plan pratique, la question qui se pose est celle de savoir sur quels environnements le
diagnostic doit porter. L’environnement immédiat, proche de chaque domaine d’activité stratégique
actuel de l’entreprise, est bien évidemment concerné prioritairement ; le diagnostic peut en effet
conduire à investir ou à désinvestir à partir des activités actuelles.
Mais l’entreprise peut également être amenée à effectuer le diagnostic de secteurs connexes à
l’activité actuelle, en termes de clients, de zones géographiques, de circuits de distribution ou de
technologies et c’est alors un environnement plus lointain qu’il convient d’analyser. Enfin, le
diagnostic externe peut porter sur des secteurs sans lien avec les activités actuelles de l’entreprise,
ceci dans une perspective de développement ; dans ce cas, les environnements les plus éloignés
doivent être pris en compte.
Exemple
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Une entreprise qui fabrique des barres chocolatées procédera au diagnostic externe de
son propre secteur. Elle pourra, avec intérêt, se pencher sur les secteurs des desserts
lactés ou des biscuits qui lui sont proches en termes de clients ou de technologies. Elle
peut aussi procéder au diagnostic stratégique de la presse pour jeunes.
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En somme, on recherche le « marché pertinent » de l’activité analysée. Une bonne méthode consiste
à recourir à la notion de substituabilité : tous les produits qui répondent à une substituabilité en
termes de demande (les clients passent de l’un à l’autre) et d’offre (les fabricants peuvent les
produire dans les mêmes usines) appartiennent au même marché pertinent (relevant market).
La définition des environnements qu’une entreprise va diagnostiquer dépend de ses ressources et
compétences, de ses objectifs, mais aussi des opportunités.
Il est clair qu’une entreprise ne peut pas faire un diagnostic de la totalité de ses environnements et
que ceux-ci sont plus ou moins éloignés de son activité actuelle. On peut identifier quatre axes (les
clients, les produits, les zones géographiques, les circuits de distribution, figure 3.9) qui guident les
environnements faisant l’objet du diagnostic, sachant que l’entreprise s’éloigne plus ou moins de
ses activités actuelles.
Figure 3.9. Les axes du diagnostic de l’environnement
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Exemple
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Une entreprise fabriquant et distribuant des jus de fruits pour enfants en France peut
diagnostiquer, entre autres, le marché européen (proche sur l’axe géographique), le
marché des soupes (proche sur l’axe produit), le marché de la presse enfantine (très
éloignée sur l’axe client) ou encore la vente en ligne (circuit de distribution).
Le diagnostic externe peut d’abord être mené sur deux plans, celui de l’environnement global et
celui de l’analyse du secteur que l’on dénomme aussi « analyse de l’industrie ». Ensuite, il est très
utile, dans une perspective de synthèse, d’utiliser la méthode des facteurs clés de succès (FCS).
L’analyse de l’écosystème d’affaires (ESA) complètera la compréhension de la dynamique du
secteur. Enfin, dans une approche plus prospective, la méthode des scenarii permet de définir des
hypothèses d’évolution.
A. L’environnement global
Cette approche peut être appliquée soit pour l’entreprise dans son ensemble, soit tous DAS
confondus, soit à l’échelle d’une seule de ses activités.
L’environnement de l’entreprise possède de multiples facettes et peut être abordé selon différents
filtres (figure 3.10).
Figure 3.10. Les multiples facettes de l’environnement (SPECTRED)
Il s’agit essentiellement du regard porté sur l’environnement de l’entreprise et la méthode est
macroenvironnementale.
Globalement, l’entreprise, où qu’elle se trouve, est insérée dans des environnements multiples qui,
tous à des degrés divers, influencent la situation présente et les volontés stratégiques pour l’avenir.
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Pour résumer l’influence de ces divers environnements, on utilise différents acronymes comme
SPECTRED : Social, Politique, Économique, Culturel, Technologique, Réglementaire, Écologique,
Démographique.
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L’importance de cette grille d’analyse se manifeste sur deux plans :
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• Il convient tout d’abord de discerner quelles sont les facettes de l’environnement qu’il faut
intégrer, la réponse n’étant pas identique pour un acteur mondial des télécoms et une PME
agroalimentaire régionale. La première fera une place particulière au contexte réglementaire
international en matière de télécoms alors que la seconde se focalisera sur des aspects plus
culturels, par exemple. Ces facettes jouent un rôle de questionnement et l’on doit
s’interroger sur leur pertinence respective dans le cas étudié.
• Ensuite, pour chaque facette de l’environnement retenu, il convient de mettre en exergue les
éléments saillants susceptibles de constituer une opportunité, une menace et donc
d’influencer la stratégie de l’entreprise.
Notons que les différentes facettes de l’analyse SPECTRED ne sont pas indépendantes les unes des
autres. L’importance croissante des aspects écologiques (pollution, effet de serre, etc.) conduit les
entreprises à réserver une place spécifique à cette facette de l’environnement. Une analyse
SPECTRED du groupe McDonald’s pourrait être formulée comme suit.
Figure 3.11. L’analyse SPECTRED du groupe McDonald’s
Exemple
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L’analyse du groupe McDonald’s peut être complétée en précisant, pour chaque
élément mis en évidence, s’il apparaît plutôt comme une opportunité (globalisation des
modes de consommation) ou comme une menace (caractéristiques de l’environnement
politique). Il est d’ailleurs intéressant d’observer comment McDonald’s a adapté sa
stratégie en fonction de certains de ces facteurs d’environnement.
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La difficulté de l’analyse repose sur la question de la détermination des tendances lourdes
d’évolution ainsi que sur celle de leurs influences sur la stratégie de l’entreprise. C’est un marché
réel pour les cabinets de consultants de proposer régulièrement aux grandes entreprises leur analyse
des facteurs clés d’évolution qui sont susceptibles d’influencer leur devenir dans les trois, cinq ou
dix ans à venir.
Des tendances lourdes (un exemple d’après Microsoft)
1. Globalisation : adaptation d’une stratégie globale à des zones différenciées.
2. Dérégulation : atténuation des contraintes imposées par les autorités diverses.
3. Déstructuration : modification des frontières des marchés.
4. Mondialisation et instantanéité de la circulation de l’information.
5. Désintégration des chaînes de la valeur avec externalisation des maillons les plus faibles.
6. Migration totale des produits, des personnes, des capitaux.
L’analyse des environnements procurera une toile de fond globale à l’utilisation de tous les autres
outils et éclairera les propositions en donnant une vision globale de moyen et de long terme.
Nous voyons que l’analyse peut porter sur un pays (le diamant de Porter), une zone géographique,
voire sur le monde entier.
Le diamant de Porter
Pour séduire les groupes multinationaux, pour les inciter à s’installer dans un pays d’accueil,
Porter suggère aux hommes politiques de faire briller de tout son éclat le « diamant » de la
compétitivité, dont il transfère les règles des entreprises aux nations ou aux régions. Les quatre
pointes du diamant sont les suivantes :
– l’existence d’une demande solvable et exigeante qui pousse à innover ;
– des firmes de grande taille soumises à la concurrence ;
– un tissu dense de PME performantes, capables de répondre aux commandes passées par
les grandes firmes ;
– un environnement séduisant : main-d’œuvre qualifiée, infrastructure de qualité, système
de communication efficace.
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Plus grande sera la surface du « diamant », plus attractive sera l’image du pays apte à recevoir
l’investissement. Dans ce schéma, l’État n’intervient pas dans la politique industrielle. Il reste
l’instrument de la mise en œuvre d’une politique libérale, où l’économie mondiale est structurée
par les groupes multinationaux, sur la base d’alliances qui organisent les circuits de production
et la répartition des marchés. En un mot, la régulation mondiale est réalisée par les grandes
firmes, analyse qui est loin de faire l’unanimité.
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L’analyse de l’environnement peut revêtir différentes formes et, par conséquent, suivre différentes
démarches :
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– rechercher successivement dans chacun des environnements les tendances pouvant influencer
l’activité de l’entreprise ;
– globaliser l’analyse de tous les environnements pour appliquer les facteurs d’évolution à un
secteur ou un pays précis ;
– partir d’une problématique (technologie, commercialisation, compétences, marchés, etc.) et
faire utiliser le filtre de chaque environnement pour proposer les évolutions lourdes les plus
caractéristiques.
B. L’analyse du secteur
L’objectif du diagnostic externe est de déceler dans l’environnement de l’entreprise, d’une part les
opportunités de développement, d’autre part les menaces éventuelles afin de savoir dans quels
secteurs l’entreprise doit investir ou désinvestir.
Sur un plan pratique, il est d’usage d’organiser le diagnostic externe du secteur autour des quatre
rubriques suivantes : la demande, l’offre, les groupes stratégiques, l’intensité concurrentielle
(figure 3.12).
Figure 3.12. Les quatre rubriques du diagnostic externe
L’examen des rubriques conduit à collecter l’information et à se poser de nombreuses questions.
Les outils du diagnostic externe sont souvent présentés sous la forme de grilles ou de check-lists. Il
convient cependant, dans la démarche, de ne jamais perdre de vue l’objectif final et d’adapter
l’analyse aux spécificités du secteur étudié. Une grille ne doit pas être appliquée de façon uniforme
et rigide. Tout au contraire, elle constitue un point d’appui à partir duquel on construit son propre
cadre.
1. La demande
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Il est commode de distinguer la demande actuelle d’une part et son évolution d’autre part. L’analyse
est ici proche du marketing et recourt aux techniques classiques d’études de marché. L’étude de la
demande permet d’identifier le marché actuel et futur des entreprises présentes dans le secteur.
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Le tableau 3.4 présente une liste indicative de questions, sa mise en œuvre pouvant prévoir une
colonne pour les réponses et commentaires et une colonne d’appréciation au regard du diagnostic
stratégique en cours. On évalue chaque réponse selon qu’elle est plutôt favorable ou plutôt
défavorable à l’entreprise ; une colonne reprend les éléments pour lesquels l’appréciation est
incertaine.
Tableau 3.4. Le diagnostic de la demande
Questions
Les caractéristiques de la demande
• Quelles quantités vendues ?
• Qui achète ?
• Qui consomme ?
• Qui prescrit ?
• Quand achète-t-on et consomme-t-on ?
• Quelle saisonnalité ?
• À quelle périodicité ?
• À quelle occasion ?
• Quel besoin ?
Commentaires
Menaces /
Opportunités
/
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L’évolution de la demande
• Quel taux de croissance global ?
• Quelle phase du cycle de vie ?
• Quel taux de croissance par segment ?
• Quelle évolution économique ?
• Quelle évolution démographique ?
• Quelle évolution technologique ?
• Quelle évolution des attentes et des
goûts ?
• Quelle évolution des styles de vie ?
• Quelle évolution des circuits de
distribution ?
• Quels nouveaux usages ?
• Quelles nouvelles clientèles ?
• Quels substituts ?
• Quelle position des pouvoirs publics ?
• Etc.
Synthèse
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• Quelle motivation ?
• Quel budget ?
• Quelle élasticité prix ?
• Quelle sensibilité à la publicité, aux
promotions ?
• Quelle fidélité aux marques, enseignes,
circuits ?
• Quels lieux d’achat ?
• Quels circuits de distribution ?
• Poids d’Internet ?
• Etc.
L’ensemble des caractéristiques envisagées sur un plan statique doit, dans un second temps, être mis
en perspective afin d’anticiper pour chacune d’elles les évolutions possibles et probables.
L’analyse de l’ensemble des caractéristiques de la demande et de leurs évolutions permet de se
forger une opinion sur les perspectives des marchés en termes d’opportunités ou de risques. Il est
important, pour le diagnostic de la demande, comme pour les autres rubriques du diagnostic
externe, de conclure le tableau par une synthèse.
2. L’offre
Le diagnostic de l’offre appréhende, dans sa globalité, la structure du secteur et non pas les
produits offerts par l’entreprise (voir le diagnostic interne).
a. Les caractéristiques de l’offre
Les caractéristiques sur lesquelles il convient de s’interroger figurent dans le tableau 3.5. Là
encore, il faut tout à la fois juger des situations actuelles et des évolutions possibles sur plusieurs
rubriques.
La question des capacités globales de production ou d’offre du secteur, surcapacité (offre et
demande) ou sous-capacité est importante.
Exemple
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b. La structure des coûts du secteur
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Dans le cas d’une surcapacité globale du secteur, l’attractivité pour de nouveaux
entrants sera faible car le risque de guerre des prix et de réduction de la rentabilité des
firmes du secteur est élevé. Il est d’ailleurs fréquent que, dans cette situation, certaines
firmes rachètent des concurrents avec pour seul objectif de récupérer leur portefeuille
commercial et de fermer leurs usines pour réduire la capacité excédentaire.
Exemple
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La structure des coûts doit également faire l’objet d’une attention particulière. L’importance des
charges fixes par rapport aux charges variables détermine le seuil de rentabilité et nous renseigne
sur le niveau d’activité minimale à atteindre si l’entreprise pénètre dans le secteur.
Des charges fixes élevées constituent une barrière à l’entrée pour des prétendants
éventuels.
Le poids relatif des différents coûts (charges de main-d’œuvre, de matières, etc.) permet
d’appréhender les risques ou opportunités d’externalisation et de délocalisation résultant de
l’importance des frais de personnel par exemple.
L’existence d’économies d’échelle dans le secteur, c’est-à-dire de réduction des coûts unitaires
résultant de l’étalement des charges fixes sur des volumes plus importants, nous indique par
exemple qu’un nouvel entrant ne pourra pas démarrer petit et qu’une stratégie de petits pas sera
inadaptée.
Tableau 3.5. Le diagnostic de l’offre
Questions
Commentaires
Menaces /
Opportunités
/
Capacités du secteur
• Secteur sous-capacitaire/surcapacitaire ?
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Économie du secteur
• Existence de barrières à l’entrée ?
• Existence de barrières à la sortie ?
• Degré de concentration et d’intégration des
entreprises du secteur ?
• Organisation de la filière et répartition de
la valeur ajoutée dans le secteur ?
• Rôle des pouvoirs publics dans
l’économie du secteur ?
Circuit de distribution
• Concentration de la distribution ?
• Concurrence entre circuits de distribution,
multicanal ?
• Accès aux circuits de distribution ?
• Nombre de niveaux dans les circuits de
distribution ?
• Cycle de vie des formules de distribution ?
Financement du secteur
• Besoins de financement ?
• Caractère cyclique du besoin de
financement ?
• Sources de financement habituelles ?
publiques ?
Technologie
• Évolutions technologiques ?
• Risques de ruptures technologiques ?
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Structure des coûts
• Importance des charges fixes/charges
variables ?
• Poids relatif des coûts de matière, de
main-d’œuvre, de capital ?
• Existence d’économies d’échelle ?
• Importance de la valeur ajoutée ?
• Impact sur la compétitivité ?
Synthèse
L’existence d’effets d’expérience dans le secteur, c’est-à-dire de réduction de coûts imputables à
l’accumulation d’expérience, d’effets d’apprentissage, permet d’appréhender des barrières à
l’entrée qui ne sont pas toujours visibles pour l’observateur novice.
L’importance de la valeur ajoutée (chiffre d’affaires – charges externes) dans le secteur fournit une
idée de la base de création de valeur et de profit par les entreprises.
Exemple
Les secteurs où la valeur ajoutée est très faible sont en général délaissés par les
entreprises.
c. L’économie d’un secteur
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L’économie du secteur est définie par plusieurs notions importantes déjà évoquées :
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• Les barrières à l’entrée jouent un double rôle. Pour les entrants potentiels, c’est-à-dire les
entreprises qui ne sont pas dans le secteur, elles constituent des obstacles qu’il est très
prudent d’avoir identifié avant de décider d’investir dans le secteur. En revanche, pour les
entreprises du secteur, ces barrières constituent d’efficaces protections qui leur permettent
éventuellement de pérenniser des rentes de situation. Il n’est donc pas paradoxal de voir des
entreprises se plaindre des barrières à l’entrée, au nom de la libre concurrence, avant de
pénétrer un secteur, pour ensuite contribuer à en ériger dès qu’elles sont dans la place.
Les barrières à l’entrée dans un secteur
• Les économies d’échelle.
• Les coûts de transfert.
• L’expérience.
• L’accès aux circuits de distribution.
• La différenciation des produits.
• Les avantages spécifiques.
• Les besoins de capitaux.
• Les pouvoirs publics.
• La technologie.
• Les barrières à la sortie sont à étudier avant même de décider d’investir un secteur pour
connaître les coûts de sortie dans l’hypothèse d’un échec.
Les barrières à la sortie
• Actifs très spécialisés liés à l’activité ou à un emplacement et ayant une valeur de cession
faible ou de reconversion très élevée.
• Coûts fixes de sortie, par exemple, de licenciement, de remise en état, de fourniture de
pièces détachées.
• Interrelations stratégiques entre l’activité dont on souhaite sortir et les autres activités,
sur le plan de l’image, des synergies, etc.
• Obstacles affectifs qui limitent la mise en œuvre des décisions économiques.
• Restrictions des pouvoirs publics.
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• Le degré de concentration ou d’atomisation des acteurs du secteur permet d’évaluer les
réactions probables des entreprises déjà implantées et les difficultés associées à la stratégie
de pénétration du secteur.
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• Le degré d’intégration verticale de la filière indique à la fois l’importance de la valeur
ajoutée, mais aussi la rigidité de la filière.
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• Le rôle des pouvoirs publics est traditionnellement fort dans certains secteurs (le secteur
culturel français, par exemple) et il est important de bien prendre la mesure de ce rôle.
• Le circuit de distribution doit être analysé avec attention car sa structure conditionne les
chances de succès du nouvel entrant. De la même façon, les systèmes de financement et les
technologies peuvent avoir des caractéristiques spécifiques à chaque secteur qu’il convient
de maîtriser.
d. L’éthique du secteur
Lorsqu’une entreprise envisage d’investir dans un pays ou dans un secteur, la question du risque
éthique se pose. Elle peut influencer la décision stratégique d’investir ou même de rester. En effet,
les spécialistes de la criminalité financière et du blanchiment d’argent estiment que 20 % à 25 % de
l’économie mondiale se situent en « zone grise » c’est-à-dire dans des secteurs caractérisés par la
corruption et les pratiques illégales. Ce phénomène concerne à la fois le secteur public et le secteur
privé.
Pour le secteur public, plusieurs organismes internationaux classent les pays en fonction de leur
degré de corruption. La Banque mondiale établit un classement de la transparence, de la
responsabilisation et de la corruption dans le secteur public (base de données EPIN). L’ONG
Transparency International(12) publie, quant à elle, un indice de perception de la corruption des
personnes occupant des fonctions officielles.
Dans les relations entre entreprises ou dans les pratiques des organisations criminelles, les
menaces sur l’entreprise sont très nombreuses (séquestration, prise d’otage, violence à l’encontre
des salariés, sabotage, attaque terroriste, escroquerie, corruption et, désormais, cybercriminalité).
Exemple
Un autonomiste corse repenti écrivait dans ses mémoires que, pendant une période de
sa vie, il se rendait tous les mois au siège d’un grand club de vacances international
dont le patron lui remettait une valise de billets pour éviter le plasticage des lieux de
villégiature du groupe.
Dans certains cas, le crime organisé pénètre les activités économiques légales à l’insu des
managers.
Exemple
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Le DG anglais nommé à la tête d’Olympus, firme japonaise d’électronique, a
découvert quelques mois après sa nomination que l’entreprise qu’il dirigeait était en
lien avec les yakuza et qu’elle était utilisée dans des opérations de blanchiment
menées par la mafia japonaise. Il avait dû démissionner immédiatement après avoir
révélé qu’Olympus avait versé des honoraires inhabituellement élevés dans le cadre
de plusieurs acquisitions.
La difficulté de l’évaluation de l’éthique du secteur réside dans son caractère relatif et dans la
nécessité de tenir compte des différences légales, culturelles et de pratiques existant entre les pays.
Les entreprises internationales, pour se protéger des risques juridiques dans leur propre pays,
définissent des chartes, des codes ou nomment des compliance officers. L’observation montre qu’il
existe parfois un écart entre le discours officiel, les règles formelles et les pratiques managériales
tolérées. Dans un environnement concurrentiel très exigeant, où les objectifs de rentabilité et de
chiffre d’affaires fixés sont de plus en plus élevés, le respect des règles est parfois mis à mal. La
question est alors de savoir s’il s’agit de pratiques délictueuses isolées, de pratiques d’entreprises
ou de normes informelles du secteur.
Exemple
Le secteur de la promotion immobilière a souvent connu, dans le passé, une réputation
sulfureuse.
Le risque encouru est cependant très important.
Exemple
Les pratiques non éthiques d’Arthur Andersen ont conduit ce cabinet d’audit à sa perte.
Il convient dès lors de choisir le traitement que l’on réserve à ces informations lorsque les
managers ou les équipes de direction y ont accès.
Exemple
Le patron d’un des leaders mondiaux de la publicité indiquait avoir renoncé au rachat
d’une agence de publicité dans un pays du fait des liens entre cette agence et la mafia
locale découverts dans la phase de due diligence.
3. Les groupes stratégiques
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a. Le diagnostic des groupes stratégiques
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Le choix d’une stratégie suppose une analyse fine de la situation, des orientations et des potentiels
de développement et particulièrement de réaction des concurrents.
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Même si la collecte de l’information en est souvent délicate – chacun met tout en œuvre pour
masquer sa situation réelle –, l’analyse de la concurrence au sein des groupes stratégiques apparaît
comme une étape indispensable du diagnostic externe. Le tableau 3.6 résume les questions
qu’il convient d’aborder pour chacun des principaux concurrents actuels et potentiels de
l’entreprise.
Tableau 3.6. Le diagnostic du groupe stratégique
Questions
Commentaires
Menaces /
Opportunités
/
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Conception de la concurrence ?
• Sur l’évolution de son entreprise ?
• Sur l’évolution des concurrents et du
secteur ?
Les capacités de la concurrence ?
• Forces et faiblesses fonctionnelles
– Marketing ?
– Production ?
– Organisationnelles ?
– Financières ?
– Humaines ? etc.
• Capacités de croissance ?
• Capacités d’adaptation au changement ?
• Capacité de résistance ?
Synthèse
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Objectifs et stratégie de la concurrence ?
• Quels sont les objectifs ?
• Quelle est l’attitude à l’égard du risque ?
• Quelles sont les valeurs et les croyances ?
• Quel est le portefeuille d’activité du
concurrent ?
• Quelle est la stratégie du concurrent ?
Au sein d’un champ concurrentiel déterminé, toutes les entreprises ne se heurtent pas également de
manière frontale. Selon les choix stratégiques (et opérationnels) retenus, les entreprises peuvent se
trouver dans une situation de très forte compétition (elles ont fait des choix voisins) ou au contraire
se sentir relativement peu en interdépendance (elles ont opéré des choix différents). On parle ainsi
de groupes stratégiques lorsque, dans un univers concurrentiel déterminé, on repère des entreprises
proches les unes des autres. Le champ de la compétition devient une sorte de carte, non pas du
Tendre comme dans l’amour courtois, mais de la férocité. Les facteurs concurrentiels qui permettent
de savoir si l’on se trouve dans le même groupe stratégique qu’un adversaire sont, par exemple :
– la politique de prix élevé ou de pénétration ;
– la recherche d’une vente à haute valeur ajoutée ou au contraire dépouillée ;
– l’étendue de la gamme offerte ;
– la présence ou non à différents niveaux de la filière ;
– le recours à une vente directe ou indirecte ;
– l’intérêt pour un marché régional ou national.
Un groupe rassemble des entreprises dont les caractéristiques stratégiques sont voisines. Il serait
cependant illusoire de penser que ces groupes sont stables.
Exemple
Dans le secteur de la restauration, on compare, d’un côté, McDonald’s à Quick et
Burger King ; de l’autre, Pizza Hut à Pizza Pino. Des chaînes de restauration comme
Chez Clément et Hippopotamus se trouvent dans un autre groupe stratégique.
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b. La collecte de l’information
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L’analyse de la concurrence pose des problèmes de collecte d’information essentiels et délicats.
Sans un recueil systématique des données, une analyse sérieuse de la situation de la concurrence est
difficilement envisageable. La collecte peut être ponctuelle et réalisée en vue d’une étude ad hoc ou
systématique et s’intégrer à un véritable système de veille concurrentielle.
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Dès lors, comment les entreprises procèdent-elles pour collecter de l’information sur les
concurrents ? Cette opération s’avère plus simple qu’on pourrait le penser et les entreprises sont
généralement très informées de ce qui se passe chez leurs concurrents. Ne perdons pas de vue que
95 % des informations nécessaires à ce que l’on appelle désormais l’intelligence économique sont
disponibles sur en ligne et dans la presse. La figure 3.14 classe ces techniques en quatre catégories
selon leur degré de facilité et leur caractère éthique.
Figure 3.13. Un exemple de carte des groupes stratégiques
Figure 3.14. Les techniques de collecte de l’information sur les concurrents
On notera que de nombreuses informations figurent dans l’entreprise de façon latente, mais qu’un
déficit d’organisation interne empêche que ces informations ne parviennent aux personnes clés
chargées du diagnostic. Certaines entreprises mettent d’ailleurs en place des systèmes organisés de
remontée de ces informations.
Dans la collecte d’informations sur les concurrents, il convient de toujours vérifier la qualité des
sources et de savoir que les concurrents peuvent délibérément diffuser de fausses informations.
c. La veille stratégique
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La rapidité accrue des modifications de l’environnement, le rôle toujours plus grand des
interdépendances sur les marchés plus concurrentiels conduisent les entreprises à systématiser les
procédures de collecte d’informations auprès de leurs partenaires comme de leurs concurrents, ou
encore plus généralement auprès de tous les acteurs du monde des affaires.
Le repérage des concurrents
By
On propose souvent une démarche en quatre étapes :
Durant cette phase, tous les acteurs de l’environnement de l’entreprise sont identifiés et, grâce à des
méthodes telles que la méthode Delphi, on tente d’attribuer à chacun les traits dominants les plus
pertinents : concurrents directs et indirects (au sens de potentiels), clients et fournisseurs, pouvoirs
publics, syndicats, « mouvements » d’opinion, etc.
L’établissement des profils concurrentiels
Dans un tableau à double entrée (en ligne les critères concernant les coûts, les systèmes de gestion,
la distribution, la qualité de la fabrication, etc. ; en colonne, les concurrents), on porte des
appréciations issues du point précédent. Le tableau est utilisé soit de manière verticale (un cadre de
l’entreprise se « met dans la peau » d’un concurrent et joue un rôle virtuel, il devient son « ombre »
et essaie de réagir comme il lui semble que l’original le ferait), soit de manière horizontale (on
se compare sur un critère de management à l’ensemble des concurrents et l’entreprise tente de
se rapprocher de celui qu’elle juge le plus performant : c’est le benchmarking).
Le benchmarking
Cette méthode a commencé à être pratiquée chez Xerox. Elle consiste à comparer et à évaluer les
modalités selon lesquelles sont accomplis les tâches ou les services dans chaque unité par
rapport aux concurrents mondiaux les plus redoutables ou à d’autres entreprises de secteurs
différents. La meilleure performance devient la référence (benchmark) à atteindre et à dépasser.
La mise en place d’un tableau de bord
Toutes les informations concurrentielles sont collectées et présentées de manière synthétique après
le recours à un dialogue permanent entre tous les responsables, de sorte que chacun se sente motivé
par la mise en état de veille.
Le document n’est pas figé et vit au gré des modifications de l’environnement.
L’élaboration d’un système de veille stratégique
La démarche est au total double :
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Pour alimenter le système d’information, la veille devient permanente et systématisée auprès
de l’ensemble des acteurs. Tous les signaux, les plus forts comme les plus faibles, sont collectés
et analysés. Le « veilleur stratégique » participe au plus grand nombre de réseaux pour recueillir
et comparer les informations selon leur source.
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– agir de la façon la plus active pour s’informer auprès de toutes les sources avec pour seule
limite les obligations légales et éthiques que l’entreprise s’impose ;
– se protéger strictement de toute tentative d’intrusion en faisant valoir à tout le personnel le
caractère vital de l’information stratégique.
La diversité des sources d’information de veille
1. Banque de données Internet et centres de documentation.
2. Presse écrite et orale : quotidiens, magazines, revues professionnelles, télévision et radio.
3. Organismes privés et publics : chambres de commerce et d’industrie, chambres de métiers,
services administratifs, Insee, DAFSA, groupe Profideo, Xerfi, etc.
4. Partenaires de l’entreprise : syndicats professionnels, réunions et salons, banques,
fournisseurs et clients.
5. Concurrents : annonces de recrutement, catalogues, rapports annuels.
6. Contacts divers : clubs d’affaires et de services, colloques et séminaires, réseaux d’anciens
élèves.
7. Réseaux sociaux : LinkedIn, Viadeo, etc.
Ainsi, chez L’Oréal, l’exploration de l’environnement prend sept formes :
– veille technologique : elle est très formalisée et est diffusée d’un laboratoire à l’autre par la
circulation de documents internes ;
– veille sociétale : suivi des grandes mutations de la société et des évolutions
comportementales et socioculturelles des consommateurs ;
– veille concurrentielle : surveillance de tous les concurrents actuels, directs, indirects et
potentiels ;
– veille commerciale : essentiellement consacrée aux questions de distribution des produits ;
– veille législative : France, Union européenne et autres pays ;
– veille géographique : suivi des marchés étrangers et de tous les problèmes liés à la
mondialisation du groupe ;
– veille géopolitique : recherche d’informations utiles aux décisions stratégiques en
collaboration avec des instituts spécialisés en participant à des symposiums.
4. L’intensité concurrentielle
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a. Les six forces concurrentielles
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L’intensité concurrentielle mise en avant par M. Porter qui prévaut dans un secteur détermine le
niveau de rentabilité moyen des firmes et influence les stratégies suivies par les entreprises.
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L’analyse de cette intensité concurrentielle doit prendre en compte six forces, dont les cinq
premières sont empruntées à Porter :
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• Le pouvoir de négociation des fournisseurs. Dans le secteur, les fournisseurs des entreprises
ont-ils la capacité d’exercer une pression sur leurs clients pour leur « dicter » leurs
conditions ? Sans doute est-ce le cas dans la « presse » où les fabricants de papier sont
tout-puissants.
• Le pouvoir de négociation des clients. Se trouvent-ils dans une situation privilégiée les
autorisant à s’imposer dans les échanges ? Voilà un cas qui se retrouve dans l’industrie
agroalimentaire avec une grande distribution décidant souverainement de ce qu’elle consent
à vendre.
• La menace de nouveaux entrants. Des entreprises n’appartenant pas à un secteur sont-elles
susceptibles, avec leur acquis, de capitaliser ailleurs, d’envahir le secteur ? C’est
l’exemple de Free qui a fait un jour irruption sur le marché des téléphones portables.
• La menace de produits substituables. Peut-on imaginer que les produits actuellement
fabriqués ou les services aujourd’hui proposés soient un jour concurrencés par d’autres
produits ou services ? Est-ce aujourd’hui le cas des ordinateurs auxquels se substituera peu
à peu l’écran des tablettes ?
• La rivalité entre les entreprises existantes. À l’heure actuelle, la paix règne-t-elle entre les
concurrents en présence ou se livrent-ils une guerre sans merci ? La rivalité entre CocaCola et Pepsi Cola ou Airbus et Boeing est sans conteste moins policée que celle que l’on
observe entre les banques.
Sur ces cinq premières forces agit un facteur important, la puissance publique, qu’il convient de ne
pas négliger, sans oublier, pour les entreprises européennes, l’environnement bruxellois ! Quels que
soient les pays ou les zones d’implantation, les entreprises sont soumises au regard d’autorités
régulatrices diverses.
Nous rajoutons ce dernier facteur au modèle de Porter, de façon à permettre un traitement plus
réaliste des cas d’entreprises européennes mais aussi anglo-saxonnes.
Exemple
Les démêlés de Uber ou Google avec les justices américaine et européenne illustrent
le rôle des pouvoirs publics.
Ces forces déterminent l’intensité concurrentielle et par voie de conséquence la rentabilité du
secteur (figure 3.15).
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L’intensité de chaque force concurrentielle est fonction d’une série de caractéristiques structurelles
propres à chaque secteur que nous détaillerons ci-après. Nous envisageons en premier lieu l’impact
des trois acteurs existants (fournisseurs, clients, concurrents) pour ensuite traiter des deux facteurs
de menace (les entrants potentiels et les produits substituables). Figurent dans le schéma,
verticalement, la filière actuelle ; horizontalement, les facteurs pouvant la menacer.
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Figure 3.15. Les six forces commandant l’intensité concurrentielle et la rentabilité d’un secteur
Le pouvoir de négociation des fournisseurs
Ce pouvoir est fort et révèle une grande intensité concurrentielle :
– si les fournisseurs sont plus concentrés que les clients atomisés auxquels ils vendent ;
– s’il n’existe pas de produit de remplacement ;
– si le secteur n’est pas un client important des fournisseurs ;
– si le produit du fournisseur est un moyen de production essentiel dans le secteur d’activité du
client et particulièrement lorsqu’il n’est pas stockable ;
– si les fournisseurs ont su créer des coûts de transfert, c’est-à-dire des coûts qui seront
supportés par le client s’il change de fournisseurs ;
– si les fournisseurs ont différencié leurs produits ;
– si les fournisseurs constituent une menace crédible d’intégration en aval et de prise de
contrôle de leur client ;
– si les pouvoirs publics les protègent.
Lorsque le pouvoir de négociation des fournisseurs est élevé, ceux-ci imposent leurs tarifs
et conditions générales de vente. Cela se traduit par des conditions d’achat moins favorables et par
une chute des marges. Dans le cas inverse, ce sont les entreprises du secteur qui dictent leurs
conditions à leurs fournisseurs. Le terme « fournisseurs » doit être ici entendu au sens large. Il
s’agit non seulement des fournisseurs de matières, produits et services, mais aussi des banques ou
des fournisseurs de main-d’œuvre.
Les coûts de transfert : un facteur de fidélité
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• Les coûts financiers
– Pénalités liées à la rupture anticipée de contrat (maintenance, assurance).
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– Perte de ristournes progressives de fin d’année (distribution).
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– Frais de restitution de matériel de présentation ou de stockage au fournisseur (énergie).
– Dépôt de garantie (secteur bancaire) ou coût du paiement comptant.
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• Les coûts organisationnels
– Adaptation aux procédures du nouveau fournisseur.
– Adaptation des logiciels (échange de données informatisées).
• Les coûts relationnels
– Délais de connaissance des interlocuteurs.
– Délais de création d’un climat de confiance.
Le pouvoir de négociation des clients et des distributeurs
L’intensité du pouvoir des clients est élevée si :
– les clients sont concentrés ou achètent des quantités importantes par rapport au chiffre
d’affaires du vendeur ;
– les produits achetés représentent une part importante des coûts ou des achats du client ;
– les produits achetés sont normalisés ou indifférenciés ;
– les coûts de transfert sont négligeables ;
– les profits ou les marges des clients sont faibles ;
– les clients représentent une menace crédible d’intégration en amont ;
– le produit n’influe pas ou peu sur la qualité du service ou des produits du secteur ;
– les clients disposent d’une information complète ;
– les pouvoirs publics protègent les clients ;
– les changements technologiques les favorisent : la généralisation des codes-barres a renforcé
le pouvoir des seules sociétés d’étude qui pouvaient les utiliser pour collecter l’information
par ce canal, c’est-à-dire les plus grandes.
La rivalité entre les concurrents existants
Cette rivalité est d’autant plus intense que :
– les concurrents sont nombreux ;
– les concurrents sont sensiblement de force égale ;
– la croissance du secteur est lente ou négative ;
– les coûts fixes sont élevés ;
– les augmentations de capacité se font par paliers importants ;
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– les produits sont indifférenciés ;
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– les coûts de transfert sont faibles ;
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– les concurrents sont divers en termes d’objectifs, de personnalité, de culture ;
– les enjeux stratégiques sont élevés ;
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– les obstacles à la sortie sont élevés ;
– les changements technologiques sont importants.
La menace des nouveaux entrants
Cette menace dépend essentiellement de deux facteurs. Elle est grande si :
– les obstacles à l’entrée dans le secteur sont réduits ;
– la crainte de la riposte est inexistante.
Les barrières à l’entrée du secteur augmentent si :
– les économies d’échelle, c’est-à-dire les diminutions des coûts unitaires résultant des
volumes produits par période, sont importantes. En effet, les économies d’échelle imposent
au nouvel entrant potentiel de produire immédiatement de grands volumes pour être
compétitif ;
– l’expérience accumulée par les entreprises en place est significative et constitue un avantage
de coût ;
– la différenciation des produits perçue par les clients est forte. Ceux-ci sont ainsi fidèles à
leurs fournisseurs du fait de l’image de marque des entreprises du secteur et le nouvel
entrant potentiel devra investir massivement en communication pour dépasser cette barrière
à l’entrée ;
– le besoin de capitaux requis pour s’implanter dans le secteur est considérable. Il s’agit tant
du ticket d’entrée lié aux investissements matériels que de ceux indispensables pour
communiquer dans les médias ;
– les coûts de transfert que devront supporter les clients s’ils changent de fournisseurs sont
conséquents ;
– l’accès aux circuits de distribution est compliqué et les entreprises concurrentes s’efforcent
de limiter cet accès ;
– les entreprises présentes dans le secteur ont développé des avantages spécifiques dont ne
peuvent se doter les nouveaux entrants (brevets, accès favorables aux matières premières,
localisation, subventions, etc.) ;
– les pouvoirs publics soutiennent ou protègent les entreprises du secteur par des restrictions
publiques à l’entrée (réglementations, autorisations administratives, normes, etc.) ;
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– des évolutions technologiques privilégient une entreprise (c’est parce que l’électronique a
supplanté la mécanique en horlogerie que Texas Instruments a pu entrer dans ce secteur).
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La crainte de la riposte des entreprises du secteur
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Elle dépend :
– des pratiques antérieures du secteur ; une réaction très agressive d’une entreprise du secteur
étant susceptible de dissuader un entrant potentiel ;
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– des ressources des firmes du secteur ; celles-ci donnant une idée de leur capacité de réaction
dans l’hypothèse d’une guerre commerciale ;
– de la croissance du secteur, capable ou non d’intégrer, sans dommages pour les entreprises
actuelles, les nouveaux entrants.
La menace des produits substituables
Le risque d’arrivée des substituts est fort :
– si les niveaux de prix et de profits du secteur sont élevés ;
– si les fonctions remplies par les produits du secteur peuvent être satisfaites aisément par
d’autres produits pour un rapport qualité/coût avantageux ;
– s’ils sont adossés à une technologie nouvelle (le développement de la fibre optique a
accéléré la concurrence entre les câblo-opérateurs et les chaînes TV hertziennes).
Le rôle des pouvoirs publics et des autorités de régulation
Il convient désormais de souligner le rôle essentiel joué par les pouvoirs publics (réglementation
sur la concurrence, sur les relations fournisseurs-clients, incitations fiscales, etc.) et les autorités de
régulation dans certains secteurs (télécommunications, audiovisuel, énergie, pharmacie) sur
l’intensité de la concurrence au sein des secteurs. Il serait erroné de penser que l’influence des
pouvoirs publics et de ces organismes se limite au continent européen. Les entreprises se doivent
désormais de les intégrer dans leurs analyses stratégiques. Les pouvoirs publics et les autorités de
régulation influencent aussi bien les pouvoirs de négociation des fournisseurs et des clients
(réglementations) que les menaces de nouveaux entrants (autorisations) ou de substituts (incitations
à l’investissement) ou encore des concurrents (réglementation des fusions).
Cependant, on comprend bien que leur rôle n’est pas comparable à celui des cinq autres forces. En
pratique, cette sixième force altère les cinq forces précédentes et le libre jeu du marché. Ainsi, par
exemple, le pouvoir de négociation des clients peut être limité par voie réglementaire.
b. La synthèse de l’analyse concurrentielle
La prise en compte de l’ensemble de ces cinq premières forces et du rôle modérateur de la sixième
conduit à apprécier l’importance de l’intensité concurrentielle du secteur. La collecte analytique
des informations sur chacune des forces est synthétisée et se traduit par un jugement d’ensemble.
Enfin, on peut rassembler, dans une note, les informations collectées sur chacune des cinq forces à
l’aide du tableau 3.7.
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Tableau 3.7. Une synthèse de l’analyse de l’intensité concurrentielle
La position des curseurs permet à l’entreprise de savoir si le domaine qu’elle analyse est
particulièrement attractif (fournisseurs et clients dominés, pas de menace des substituts ou de
nouveaux entrants, compétition modeste entre les acteurs actuels : c’est le jardin d’Éden) ou, au
contraire, répulsif (fournisseurs et clients puissants, substituts prêts à se positionner, nouveaux
entrants sur le pied de guerre, compétition rude : c’est l’Enfer).
L’analyse de l’intensité concurrentielle est bénéfique aussi bien pour l’entreprise déjà présente dans
le secteur que pour celles qui souhaitent s’y implanter. La première mène une analyse des cinq
forces et cherche le moyen d’être la mieux placée (en cas d’atouts) ou la moins mal placée (en cas
de menaces) par rapport à ses concurrents. Les secondes peuvent comparer les analyses globales
qu’elles mènent sur plusieurs secteurs qui les intéressent également.
Pour une entreprise comparant plusieurs secteurs dans lesquels investir, la représentation sous
la forme d’une étoile sectorielle permet de synthétiser formellement et efficacement l’analyse. Sur
la figure 3.16, chacune des cinq forces de Porter est représentée sur l’axe. Plus la force ou la
menace est grande, plus elle se situe loin de l’origine.
Figure 3.16. L’étoile sectorielle : deux exemples différenciés (secteurs A et B)
c. Les limites de l’analyse de Porter
Pour conclure, gardons à l’esprit que l’analyse présentée ici date de plus de trente ans. Ellle
conserve un réel pouvoir explicatif de l’intérêt qu’une entreprise peut trouver à rester dans un
secteur, mais on lui adresse aujourd’hui deux critiques.
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La première est qu’elle intègre mal la dynamique concurrentielle ; elle est trop statique. Dans le
monde réel, tous les éléments évoluent à grande vitesse et il est alors nécessaire de repérer les
tendances plus que la situation à un instant donné.
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La seconde tient à l’idée même de secteur. On sait que les notions de secteur, de marché, d’activité
sont beaucoup plus floues qu’elles ne l’étaient naguère. Un secteur n’est plus un ensemble bien
délimité avec des concurrents, des clients, des fournisseurs, des entrants potentiels. Tous les acteurs
sont connectés dans des réseaux (un concurrent peut être en même temps un fournisseur et un
client !), un secteur se défait, se reconstruit, se transforme, de sorte que l’idée de « barrières »,
chère à Porter, perd de son pouvoir explicatif. Une barrière vaut si elle est dressée devant un
ensemble fermé bien délimité ; elle est sans réalité devant un espace ouvert aux dimensions
évolutives. Dans les environnements que l’on qualifie d’hypercompétitifs, la présente analyse n’a
plus sa place. Le modèle d’écosystème d’affaires permet de dépasser cette critique du cadre
d’analyse de Porter.
Les frontières des marchés disparaissent
Amazon lance Workmail, un service de messagerie à destination des entreprises, et entre ainsi en
compétition avec Microsoft et Google.
Facebook autorise ses utilisateurs à créer eux-mêmes des applications et entre sur le marché de
Apple, tout en facilitant l’accès des entreprises à sa plate-forme, ouvrant ainsi la porte du ecommerce, en concurrence avec Amazon.
C. Le modèle écosystème d’affaires (ESA)(13)
Le cadre d’analyse de l’écosystème d’affaires (ESA) apparaît comme une perspective
supplémentaire en management stratégique. Elle a pour caractéristique d’intègrer la diversité des
acteurs et la complexité de leurs liens. En rupture avec l’approche sectorielle, et notamment celle
de Porter, cette perspective propose d’inclure les membres socio-économiques directement ou
indirectement reliés à l’activité. Elle est donc particulièrement utile pour comprendre et
diagnostiquer l’environnement économique d’une entreprise. L’écosystème d’affaires représente
« la communauté économique supportée par une base d’organisations et d’individus en interaction,
les organismes composant le monde d’affaires. Cette communauté économique offre des produits et
services de valeur aux clients, qui sont eux-mêmes membres de l’écosystème. Les membres incluent
les fournisseurs, les producteurs, les concurrents et autres parties intéressées. Leurs capacités et
rôles coévoluent à travers le temps, et ont tendance à s’aligner avec les directions choisies par une
ou plusieurs entreprises centrales. Les entreprises exerçant un rôle de leader peuvent changer à
travers le temps, mais la fonction de leader dans l’écosystème est valorisée dans la communauté car
elle permet à ses membres d’avancer selon des visions communes, d’aligner les investissements et
de bénéficier de supports mutuels. »(14)
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Cette définition de l’écosystème a pour intérêt d’intégrer diverses parties prenantes, absentes dans
la chaîne de valeur traditionnelle.
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Exemple
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Les structures professionnelles, les institutions académiques, les administrations, les
syndicats, les actionnaires sont inclus dans l’analyse ESA.
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Les acteurs sont regroupés au sein de trois niveaux d’interaction :
• Le cœur de métier. Il représente les membres affectant l’activité socioéconomique centrale
(fournisseurs, distributeurs, et compétences motrices).
• L’entreprise élargie. Elle intègre les acteurs constituant le réseau immédiat (clients, clients
des clients, fournisseurs des fournisseurs, etc.).
• L’écosystéme (figure 3.17). Il englobe les parties intéressées invisibles dans les
représentations habituelles des réseaux d’acteurs (gouvernements, acteurs sociaux,
associations, compétiteurs, etc.).
Figure 3.17. L’écosystème d’affaires (ESA)
D’après J. F. Moore.
Ce cadre permet d’intégrer tous les acteurs susceptibles d’expliquer le fonctionnement et
l’évolution de ce qui est considéré comme un écosystème d’affaires.
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L’écosystème d’affaires est d’abord une nouvelle représentation qui met les diverses parties
prenantes en réseau. Quatre éléments caractérisent un écosystème d’affaires et permettent de mieux
analyser les rôles et actions des acteurs à des fins de diagnostic :
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• L’interdépendance des membres pour leur développement et leur survie. Cela explique
le choix de mise en commun des ressources et compétences pour le développement de
nouveaux services ou technologies. Les concurrents ont un impératif de coopération ou de
co-création de valeur. La coopétition se substitue à la compétition traditionnelle. La
complémentarité entre les membres de l’Ecosystème d’Affaires est une condition de
l’innovation.
• L’hétérogénéité. La diversité des acteurs est une condition sine qua non de la
complémentarité et de la dynamique de l’ESA. Les autorités de régulation doivent veiller à
ce que les entreprises les plus puissantes ne réduisent pas, par absorption des concurrents,
cette diversité, source d’innovation.
• La dynamique de l’évolution des relations entre les acteurs. L’instabilité et l’évolution
des rôles caractérisent l’ESA.
• L’impact direct des actions de chacun sur l’ensemble de l’ESA. On retrouve là une
caractéristique générique des systèmes.
Les stratégies dynamiques et évolutives des acteurs de l’ESA le font évoluer et suivre un cycle de
vie dans lequel Moore identifie quatre étapes :
– la naissance ;
– l’expansion ;
– le leadership ;
– l’auto-renouvellement.
L’analyse en termes d’écosystème d’affaires permet d’avoir une vue plus globale de la dynamique
de l’environnement d’une enteprise.
Exemple
L’analyse ESA s’applique notamment aux secteurs des télécommunications, du
numérique, de la santé ou encore de l’’éducation.
Voisin du modèle ESA, le modèle de filière repose sur la description de toutes les relations
existantes entre les acteurs dans une filière. Ces relations relèvent de cinq natures différentes.
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Figure 3.18. Modèle de filière (exemple d’assainissement de l’eau)
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D’après Marc Diviné, Marketing B to B, Vuibert, 2e édition, 2016.
D. Les facteurs clés de succès
Pour survivre et se développer dans un secteur, une entreprise doit répondre à deux types de
questions :
• Que veulent les clients, que souhaite le marché ?
• Comment affronter la compétition émanant des concurrents ?(15)
Exemple
Dans le secteur de l’hôtellerie, on sait que les clients incluent la sécurité dans le
niveau de qualité et que, pour affronter la compétition, il faut avoir une perspective
mondiale. Les FCS porteront à la fois sur la définition de normes rigoureuses et sur la
sélection de localisations prioritaires.
Un facteur clé de succès (FCS) dépend de l’environnement (c’est une caractéristique que
l’entreprise doit maîtriser si elle veut s’imposer dans un domaine) et conditionne le diagnostic
interne.
Le principe est simple. Il consiste à formuler un diagnostic sur les seuls facteurs déterminants du
succès de l’entreprise dans un secteur concurrentiel donné. La méthode repose sur l’hypothèse que
la réussite d’une entreprise dépend d’une « formule stratégique » dont les composants sont en fait
peu nombreux. Il suffit, dans une perspective stratégique, de porter son attention sur les
compétences requises pour la mise en œuvre de la stratégie dans le secteur (figure 3.19).
Figure 3.19. L’identification des facteurs clés de succès (FCS)
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Les facteurs clés de succès diffèrent selon les secteurs industriels. Ohmae donne des exemples de
facteurs clés visant soit à améliorer la rentabilité, soit à développer les parts de marché dans
différentes branches d’activité.
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Figure 3.20. Un exemple de maîtrise des FCS dans le secteur de la restauration professionnelle
On peut dès lors définir les facteurs clés de succès comme « les caractéristiques de toute nature
requises par l’entreprise dans un environnement déterminé pour qu’elle atteigne les objectifs
qu’elle s’est fixés ».
Tableau 3.8. Des FCS variables selon les secteurs
K. OHMAE, Le Génie du stratège, Dunod, 1991, p. 35.
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De même que chaque secteur appelle des FCS spécifiques, une volonté stratégique particulière
implique des FCS adaptés.
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Exemple
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Une entreprise souhaitant mener une politique de volume devra d’abord bien maîtriser
tous les processus de contrôle ; une firme préférant se recentrer aura pour impératif de
dominer prioritairement la gestion des plans sociaux.
Il convient de souligner enfin que des FCS dépendent des différentes phases du cycle de vie d’un
DAS.
Le diagnostic opéré sous cette forme vient compléter les autres outils en mettant en relation
l’interne et l’externe : une capacité donnée d’une entreprise ne devient un FCS qu’au regard d’un
environnement précis et d’objectifs définis. Ce qui est important ici, c’est donc d’apprécier la
maîtrise par l’entreprise des FCS imposés par l’environnement.
Figure 3.21. Le cycle de vie et les FCS
Nous analyserons par la suite, à propos de la stratégie Océan Bleu, la façon dont les entreprises
peuvent rechercher des espaces de compétition dans lesquels les facteurs clés de succès diffèrent
de ceux habituellement mis en avant. C’est la Strategy Canvas.
E. La méthode des scenarii
Le futur étant par définition imprévisible, la méthode des scenarii consiste à formuler quelques
hypothèses globales sur les variables clés du secteur. De façon à synthétiser les informations
disponibles sur l’évolution de l’environnement et à en extraire les éléments les plus importants pour
l’avenir de l’entreprise, la méthode des scenarii peut en effet se révéler utile. Elle repose souvent
sur l’appel à des experts dont les points de vue sont confrontés.
Les scenarii correspondent à des visions alternatives de l’évolution de l’environnement de
l’entreprise. Ces scenarii servent de base à l’élaboration de stratégies adaptées.
La démarche peut être résumée ainsi :
– identification des variables clés du secteur (démographique, prix du pétrole, espérance de
vie, etc.) ;
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– hypothèses d’évolution de ces quelques variables clés (forte, moyenne, faible) en intégrant
ce que l’on appelle les tendances lourdes ;
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– scenarii d’évolution du secteur (pessimiste, probable, optimiste) ;
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– stratégies pour chaque scénario.
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Tableau 3.9. Un exemple simplifié de scénario d’évolution de l’industrie pharmaceutique
L’entreprise Shell a joué un rôle de précurseur dans l’utilisation de la méthode des scenarii et
Thiétart cite l’anecdote selon laquelle, en 1979, le groupe pétrolier disposait d’un scénario
envisageant un conflit armé dans le Golfe persique impliquant l’intervention d’armées occidentales
pour protéger les sources d’approvisionnement en pétrole !
La méthode des scenarii n’est pas une technique de prévision, mais plutôt un processus de réflexion
et de communication interne sur le devenir de l’entreprise. Comme pour toutes les techniques
stratégiques, la méthode des scenarii vaut plus par le processus que par le résultat.
III. Le diagnostic stratégique interne
L’objectif du diagnostic interne est la mise en évidence des forces et faiblesses de l’entreprise qui
lui permettront de choisir les stratégies les mieux adaptées à ses ressources et à son potentiel.
Plusieurs méthodes complémentaires, parmi lesquelles il convient de choisir, sont utilisées.
A. Les fonctions et les processus
Classique dans sa démarche, ce diagnostic consiste à aborder successivement les différentes
fonctions et processus de l’entreprise. Dans cette approche analytique, il convient de distinguer
successivement trois étapes.
1. La détermination des fonctions et processus à analyser
À côté des fonctions habituelles (commercial, production, finance, personnel, recherche et
développement, approvisionnement, logistique, etc.), il convient de ne pas négliger les activités
plus transversales dont l’impact sur la performance est grandissant. Ce sont les processus de
finalisation, d’organisation, d’animation, de contrôle, d’information (figure 3.22).
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Figure 3.22. Les fonctions et processus à diagnostiquer
Les fonctions à retenir dépendent à la fois de l’organisation de l’entreprise, de son organigramme,
mais aussi de son activité. Négliger la fonction logistique dans le domaine de la vente par Internet
constituerait un oubli ruineux !
2. La définition des critères d’évaluation
On définit pour chaque fonction une liste de critères d’appréciation permettant d’évaluer les forces
et faiblesses de l’entreprise. Ces listes sont nombreuses et leur définition doit, avant tout, être
adaptée à l’activité de l’entreprise. Il n’existe pas en la matière de liste « idéale » de critères.
À titre d’illustration, on peut retenir, sans prétendre à l’exhaustivité, les critères suivants, pour
quelques fonctions et processus de l’entreprise. Les tableaux 3.10 à 3.17 permettent, pour chaque
critère, de préciser s’il s’agit plutôt de forces ou de faiblesses et de formuler des commentaires sur
la situation de l’entreprise. Le travail de choix des critères et la réflexion qui l’accompagne sont
aussi fondamentaux que le tableau final. La démarche de construction des tableaux menée, par
exemple, par quelques cadres dirigeants avec l’appui d’un consultant est un redoutable exercice
d’introspection pour déterminer tous les items (sans en oublier) sur lesquels on s’apprête à se juger
soi-même.
Tableau 3.10. Le diagnostic de la fonction commerciale
Critères
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• Portefeuille produits
• Volume des ventes
• Parts de marché
• Répartition géographique du chiffre d’affaires
• Répartition par canaux de distribution du chiffre
d’affaires
• Politique de marge
• Image de marque
• Étendue de la gamme
• Qualité des produits
• Qualité du service
• Politique de prix
• Fidélité de la clientèle
• Maîtrise du marketing digital
• Efficacité de la force de vente
• Efficacité de la publicité
• Efficacité des promotions
• Efficacité du marketing direct
• Etc.
SYNTHÈSE
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Faiblesses /
Forces
Commentaires
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Tableau 3.11. Le diagnostic de la fonction finance
Critères
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• Rentabilité
• Endettement à long et moyen termes
• Endettement de court terme
• Solvabilité
• Trésorerie
• Stocks (évolution et poids)
• Créances clients
• Sources de financement
• L’entreprise est-elle rachetable, « opéable » ?
• Cotation boursière
• Dettes fournisseurs
• Part des frais financiers dans le chiffre d’affaires
• Flexibilité financière
• Etc.
SYNTHÈSE
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Faiblesses /
Forces
Commentaires
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Critères
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Tableau 3.12. Le diagnostic de la fonction production
• Capacité de production
• Qualité de la production
• Flexibilité de la production, quantitative et
qualitative
• Taux de sous-traitance
• Délai de production
• Âge de la technologie
• Âge des équipements
• Coûts de production
• Localisation de la production
• Qualité du service après-vente
• Structure des coûts
• Logistique
• Etc.
SYNTHÈSE
Faiblesses /
Forces
Commentaires
/
Tableau 3.13. Le diagnostic de la fonction R&D
Faiblesses /
Forces
Commentaires
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Critères
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• Innovations technologiques
• Innovations du process
• Innovations produits
• Innovations services
• Dépôts de brevets
• Potentiel de recherche
• Moyens affectés à la R & D
• Intégration de la R & D dans la structure
• Adaptation au marché des innovations
• Etc.
SYNTHÈSE
Tableau 3.14. Le diagnostic de la fonction personnel
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Critères
Faiblesses /
Forces
Commentaires
/
By
• Pyramide des âges
• Compétences
• Formation
• Rotation du personnel
• Absentéisme
• Rémunération
• Part des salaires dans le chiffre d’affaires
• Capacité d’attraction des compétences
• Etc.
SYNTHÈSE
Tableau 3.15. Le diagnostic de l’organisation
Critères
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• Une structure a-t-elle été clairement définie ?
• Un organigramme à jour est-il diffusé ?
• La structure est-elle adaptée à la stratégie ?
• Les mécanismes de coordination sont-ils adaptés
à l’activité ?
• Les fonctions importantes sont-elles rattachées à
la direction ?
• Le système d’information est-il cohérent avec la
structure ?
• La surveillance de l’environnement est-elle
intégrée dans la structure ?
• La structure est-elle adaptée à l’évolution de
l’environnement ?
• Les procédures essentielles sont-elles définies ?
• Etc.
SYNTHÈSE
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Faiblesses /
Forces
Commentaires
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Tableau 3.16. Le diagnostic de la culture
Critères
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• Existe-t-il des valeurs communes ? Sont-elles
diffusées ?
• L’histoire de l’entreprise est-elle connue ? Estelle valorisée ?
• L’entreprise a-t-elle des héros ?
• L’entreprise entretient-elle des mythes ?
Développe-t-elle les symboles d’appartenance et
les rites ?
• Un langage propre est-il développé ?
• La culture est-elle bureaucratique ? fermée ?
ouverte ? réactive ? adaptative ?
• La culture est-elle orientée marché, recherche,
production ?
• Le personnel a-t-il un sentiment d’appartenance ?
• La culture est-elle adaptée à la stratégie de
l’entreprise ?
• La culture est-elle adaptée au secteur et à son
évolution ?
• Etc.
SYNTHÈSE
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Faiblesses /
Forces
Commentaires
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Tableau 3.17. Le diagnostic de la direction
Faiblesses /
Forces
Commentaires
/
Critères
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• L’actionnariat est-il stable ?
• Le conseil d’administration est-il performant ?
• L’équipe de direction a-t-elle montré sa
compétence, sa cohésion ?
• Quels sont les objectifs personnels des
dirigeants ?
• Quelles sont les formations de chaque dirigeant ?
• Quel est l’âge de chaque dirigeant ?
• Les tâches sont-elles bien réparties ?
• Etc.
SYNTHÈSE
3. Le mode d’évaluation
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Lorsque l’on procède à un diagnostic des fonctions ou des processus de gestion de l’entreprise,
trois approches sont possibles.
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La première consiste à procéder à une évaluation de l’entreprise, dans l’absolu, sans tenir compte
des concurrents ou de l’environnement. On est là dans une approche classique d’audit d’une
fonction. Le résultat de ce diagnostic peut être visualisé sous la forme d’un profil de compétence
(figure 3.23).
La deuxième, plus stratégique, conduit à évaluer l’entreprise ou le domaine d’activité stratégique de
manière relative, par rapport à ses concurrents. En matière stratégique, l’évaluation relative est de
loin préférable. Ce qui compte, en effet, ce ne sont pas les qualités ou les défauts de l’entreprise,
mais ses caractéristiques relatives, par rapport à celles des concurrents. Cela témoigne à nouveau
de l’imbrication nécessaire entre le diagnostic externe et le diagnostic interne. Il est ainsi possible
de représenter plusieurs entreprises concurrentes sur un même graphique en faisant apparaître
de façon comparative les profils concurrentiels.
Il peut enfin être utile de comparer le profil de l’entreprise non pas à celui des concurrents, mais à
un profil « idéal » attendu par l’environnement ou les marchés. Ainsi, dans l’exemple de la
figure 3.24, l’entreprise offre inutilement une gamme trop large à un marché qui se contenterait
d’une offre plus étroite.
Les démarches de diagnostic par fonction présentent comme inconvénient d’être détaillées, longues,
et de morceler la réalité de l’entreprise selon une conception fonctionnelle dont on sait qu’elle rend
mal compte de la réalité systémique de l’entreprise. Cette approche risque également d’orienter le
diagnostic vers des aspects opérationnels qui sont éloignés des préoccupations stratégiques.
C’est pourquoi des méthodes plus synthétiques viennent compléter cette analyse.
Nous sommes ici au cœur d’une activité. Il s’agit de mettre en évidence ce qui détermine ses
capacités stratégiques. Le diagnostic repose à la fois sur l’analyse de la chaîne de valeur et sur le
diagnostic des ressources et compétences que l’entreprise, pour une activité, est capable de
mobiliser pour définir ses stratégies et affronter son environnement concurrentiel.
B. La chaîne de valeur
Porter propose d’analyser les sources de l’avantage concurrentiel d’une entreprise ou d’un DAS et
d’utiliser un instrument qu’il qualifie de fondamental : la chaîne de valeur. Toute entreprise peut, en
effet, s’appréhender comme un ensemble d’activités destinées à concevoir, fabriquer,
commercialiser, distribuer et soutenir le produit. C’est l’interdépendance de ces activités qui crée
pour l’entreprise de la valeur et de la marge.
Dans un métier, une entreprise se donne pour objectif d’apporter à ses clients une valeur supérieure
aux coûts qu’elle supporte. Plus l’écart est important, plus la marge qui la rémunère est grande. Il
convient ainsi, pour bien analyser les avantages concurrentiels d’une firme :
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– de replacer sa propre chaîne de valeur par rapport à celle de ses fournisseurs et de ses
clients pour voir, par exemple, quelle différenciation elle apporte ;
By
4$
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Figure 3.23. Une représentation du profil de compétence
D’après R.-A. THIÉTART, Le Management, 13e édition, PUF, 2012.
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Figure 3.24. Le profil concurrentiel et le profil idéal
4$
D’après R.-A. THIÉTART, Le Management, 13e édition, PUF, 2012.
By
– de comprendre le comportement des coûts des diverses activités pour repérer celles qui
créent le plus de valeur.
Le diagnostic repose alors sur un découpage de l’entreprise entre toutes ces activités et sur
l’identification des fonctions qui dégagent l’essentiel de la marge.
Un tel outil sert à comparer la chaîne de valeur de l’entreprise à celle de « l’industrie » ou, parfois,
à celle des principaux concurrents. On détecte ainsi les points faibles et les points forts qui
appartiennent en propre à la firme concernée.
L’idée est simple : l’entreprise a pour mission d’ajouter de la valeur à un produit. Cela se réalise
au travers de deux types d’activités :
– des activités principales : acheter, produire, commercialiser ;
– des activités logistiques (de soutien) qui ont pour objet l’acquisition des ressources
productives ou facteurs de production et la coordination des activités.
Le point essentiel est que certaines activités apportent plus de valeurs que d’autres et, surtout, que
l’entreprise possède un avantage compétitif sur certaines d’entre elles, pour lesquelles elle dispose
d’une compétence distinctive.
En conséquence, l’entreprise aura intérêt à externaliser les activités pour lesquelles elle ne dispose
pas de cet avantage compétitif et à se spécialiser dans les activités clés.
Exemple
Benetton ou Hugo Boss se concentrent sur les activités de conception et de promotion
et externalisent la fabrication (sous-traitance) et la distribution (distributeurs affiliés).
La méthode de Porter présente des avantages. Elle est ouverte, qualitative, laissant au stratège une
plus grande liberté d’interprétation des résultats. Elle montre que l’entreprise est au cœur d’une
chaîne qui va de ses fournisseurs à ses clients. Toutefois, elle est lourde, longue et peu précise. De
plus, elle ignore quasiment les problèmes posés par les choix de l’organisation, de la structure et
par l’animation des hommes.
Voici quelques détails sur chacune des fonctions :
– logistique interne : activités d’approvisionnement et de stockage des matières et fournitures ;
– production : transformation en produits finis ;
– logistique externe : stockage et distribution physique des produits finis ;
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– commercialisation et vente : activités commerciales destinées à connaître le client et à
l’inciter à acheter ;
$!
– services : ils accompagnent le produit pour en accroître la valeur ;
4$
– infrastructure : activités de direction générale et de direction administrative et financière
(elle sous-tend l’ensemble de la chaîne ; voir les pointillés de la figure 3.25) ;
By
– gestion des ressources humaines : gestion des personnels (elle peut être associée à toute la
chaîne ou seulement à une activité) ;
– développement technologique : maîtrise dans tous les domaines de la technologie la plus
avancée et la plus adéquate ;
– approvisionnement : ensemble des activités relatives aux achats.
Figure 3.25. La chaîne de valeur type
Figure 3.26. La reconfiguration sectorielle des chaînes de valeur
À cette liste des fonctions définies dans les années 1980 par Porter il convient aujourd’hui
d’ajouter le système d’information.
Dans une filière, l’analyse de la chaîne de valeur peut conduire les entreprises à externaliser en
amont ou en aval les fonctions jugées non stratégiques, à un moment donné.
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De la même façon, à un même stade d’une filière, des entreprises peuvent décider de partager une
même fonction en créant une structure commune ou plusieurs divisions d’un même groupe
mutualisent une fonction. C’est la notion d’un centre de services partagés.
By
4$
$!
Figure 3.27. La structure commune gérant le système d’information de trois banques
1. Comment bâtir une chaîne de valeur ?
Si l’on prend comme exemple une entreprise industrielle qui produit des transformateurs destinés à
abaisser la tension de la distribution d’électricité à 220 volts, on peut procéder en deux temps.
a. La définition des diverses activités de l’entreprise
Voici la liste des activités dans le cas étudié :
Tableau 3.18. Exemple d’analyse de la chaîne de la valeur
Activités
Principales
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
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X
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Direction générale
Service du personnel
Comptabilité
Service commercial
Service des achats
Bureau de calcul
Bureau des méthodes
Atelier de fabrication des cuves
Atelier anti-corrosion (grattage, peinture)
Atelier de bobinage
Atelier d’assemblage
Entretien
Service de réception avant cession au client
Expédition (véhicule de livraison sur site)
De soutien
4$
On remarque que le bureau des méthodes peut être vertical (un bureau par atelier) ou horizontal (un
seul bureau). Il en est de même de l’entretien. De plus, il faut qu’il y ait une réception partielle lors
du passage d’un atelier à l’autre.
By
b. La construction de la chaîne de valeur correspondant aux activités de
l’entreprise
Une chaîne de valeur simplifiée est donnée ci-après.
Figure 3.28. Exemple simplifié d’analyse de la chaîne de la valeur
2. L’impact des TIC sur la création de valeur
L’examen de la grille d’analyse de la valeur montre que les TIC ont aujourd’hui un impact sur toutes
les activités tant principales que de soutien et qu’en conséquence, elles sont susceptibles de
modifier la marge de l’entreprise et sa position concurrentielle. Pour les activités de soutien, il en
va ainsi de l’équipement informatique et de l’infrastructure réseau, mais aussi des applications
développées sur les intranets en matière de gestion des ressources humaines. Les techniques
collaboratives de travail permettent aujourd’hui aux industriels de développer à distance avec leurs
partenaires de nouveaux prototypes et les TIC bouleversent les stratégies et l’organisation des
services d’approvisionnement du fait du développement de l’achat en ligne. Pour les activités
principales, les entrepôts et les circuits de livraison sont automatisés, la flexibilité de la production
se développe dans de nombreux secteurs, la transmission des commandes peut se faire via le Net,
les vendeurs nomades sont équipés d’ordinateurs ou de terminaux portables et les activités de
maintenance peuvent se faire à distance.
Chacune des activités de la chaîne de valeur compte deux composantes, l’une matérielle
(transformation de matières, transport de marchandises, déplacement de personnes, etc.), l’autre
informationnelle (collecte, diffusion, traitement d’information). Plus la composante
informationnelle est grande et plus l’impact des TIC est susceptible d’être considérable.
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Chaque produit fini (ou service) compte lui aussi ces deux composantes matérielle (le bien) et
informationnelle (l’information ou le service associé). On observe un développement de la place de
l’informationnel dans les produits vendus et dans la valeur créée pour le client (produits et services
associés). Les ordinateurs vendus avec une garantie ou un service d’assistance en ligne en sont une
illustration.
By
4$
$!
Figure 3.29. Des TIC omniprésentes dans la chaîne de valeur
Les gains résultant des TIC apparaissent aux plans de l’entreprise, de ses relations avec ses
partenaires et de la mise en œuvre de sa stratégie générique :
• La stratégie intra-entreprise. La création de valeur dépend de la coordination entre ces
activités ; les TIC (réseaux intégrés, bases de données, intranets) permettent de développer
fortement les capacités de coordination interne (entre les fonctions) et peuvent constituer
une source d’amélioration de la compétence. Cette compétence de coordination peut être la
source d’un avantage concurrentiel.
Exemple
Chez Danone, on développe une networking attitude. Les 84 000 managers du groupe
sont invités à échanger entre eux leurs bonnes pratiques, leurs habitudes, leurs
interrogations en partant du postulat selon lequel une solution à une question que se
pose un manager quelque part dans le monde existe nécessairement à l’intérieur du
groupe.
• La stratégie interentreprises. La chaîne de valeur d’une entreprise est liée aux chaînes de
valeur amont et aval des fournisseurs, sous-traitants, partenaires et distributeurs. Les TIC
conduisent à modifier la chaîne de valeur de l’entreprise du fait de l’externalisation de
certaines activités. Ainsi, on peut observer une reconfiguration de la chaîne de valeur dans
la filière. La compétence de coordination inter-organisationnelle s’en trouve accrue.
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Les TIC permettent de renforcer la stratégie générique suivie par l’entreprise. Ainsi, l’entreprise
qui opte pour une stratégie de volume et de coûts faibles s’oriente vers un système d’information lui
permettant une automatisation et une production de masse, des achats regroupés et un contrôle de
gestion très précis.
4$
$!
Exemple
By
Les compagnies aériennes low cost ont parfaitement intégré cette logique, en
supprimant les agences et les billets papier au profit des billets électroniques.
Le secteur des produits personnalisables, bouleversés par le développement exponentiel du
numérique, en fournit une autre illustration.
Exemple
Vistaprint, fait reposer sa stratégie sur un site Web ainsi que sur l’utilisation extensive
du système d’information pour gérer la chaîne de valeur.
En revanche, les entreprises suivant une stratégie de différenciation mettent leur système
d’information au service d’une personnalisation de la relation client et développent un site Internet
au service de l’image de marque de l’entreprise.
Exemple
Le site du groupe L’Oréal met en avant les valeurs de la marque dans le but d’installer
une complicité avec le client.
3. Les ressources et les compétences
Les ressources sont définies comme des actifs stratégiques et les compétences consistent à les
mettre en œuvre. L’avantage concurrentiel d’une entreprise dépend de ses ressources et de ses
compétences. Leur diagnostic est donc essentiel pour comprendre les capacités stratégiques de
l’entreprise. Cette analyse permet de comprendre pourquoi, dans un même secteur, grâce à des
conditions concurrentielles identiques, et avec des stratégies comparables, certaines entreprises
réussissent là où d’autres échouent. La démarche est la suivante (figure 3.30).
By
4$
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Figure 3.30. L’analyse par les ressources et les compétences
a. Les ressources
Les ressources peuvent être tangibles ou intangibles. On doit distinguer dans le diagnostic quatre
types de ressources :
• Les ressources immatérielles. L’image, la réputation de l’entreprise, la clientèle, les
brevets, etc. Par nature intangibles, donc moins « visibles » que les autres ressources, leur
rôle est fréquemment sous-estimé dans le diagnostic. La difficulté de leur diagnostic ne doit
pas occulter leur importance.
• Les ressources humaines. Elles doivent être analysées quantitativement (effectifs, pyramide
des âges, etc.), mais aussi en termes qualitatifs (flexibilité, possibilité de redéploiement,
adaptation des compétences individuelles et collectives aux marchés et aux stratégies).
• Les ressources financières. Source de financement de court terme et de long terme
(banques, fournisseurs, actionnaires, pouvoirs publics, etc.). Il faut à la fois prendre en
considération les ressources existantes et leurs capacités de mobilisation.
• Les ressources physiques (équipements, installations, bâtiments, etc.). Ce sont des
ressources tangibles en général peu flexibles et donc facteurs de risques. Il ne faut pas
omettre d’intégrer dans l’analyse les matériels de fabrication mais aussi de traitement de
l’information (ordinateurs, réseaux) dont on connaît désormais le rôle essentiel.
L’évaluation de chaque ressource peut se faire par rapport aux deux critères que constituent :
• La valeur pour le marché. L’évaluation de la valeur d’une ressource dépend de sa capacité
à créer une différence pour les clients. Ainsi, une localisation exceptionnelle du point de
vente constitue une ressource physique qui procure un avantage concurrentiel.
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• L’exclusivité pour l’entreprise. Une ressource technologique qui se traduit par la détention
de brevets constitue un atout dans la mesure où son caractère unique est protégé de la
concurrence. La pérennité de l’avantage concurrentiel d’une ressource dépend de sa rareté
(une ressource facilement accessible aux concurrents est de peu d’intérêt), de son imitabilité
et de sa substituabilité. Quand une ressource est abondante, aisément imitable ou
substituable, elle n’est pas source d’un avantage concurrentiel et n’est pas stratégique.
Une ressource sera considérée comme stratégique quand elle est source de valeur, rare, peu
imitable, peu substituable et donc génératrice d’un avantage concurrentiel.
By
Dans l’exemple ci-après (tableau 3.19), la détention d’une marque mondiale sera considérée
comme une ressource stratégique.
Tableau 3.19. Un extrait du diagnostic des ressources d’une entreprise
Évaluation
Valeur
Description,
des
Ressources
pour
commentaires
ressources
le march
Marque
Immatérielles mondialement **** ****
connue
Personnel
Humaines
**
*
bien formé
Soutien des
Financières
*
*
banques
Physiques
Machines
*
****
Importance de l’avantage concurrentiel conféré par la ressource : * très faible / **** très fort.
Mais ce qui compte pour une entreprise, ce n’est pas tant la disponibilité des ressources que sa
capacité à les mobiliser en interne ou en externe, grâce à des partenariats dans une perspective
d’entreprise en réseau.
b. Les compétences
Les compétences désignent des capacités à déployer des ressources pour atteindre un objectif. Elles
reposent sur les processus organisationnels de l’entreprise, ce que l’on appelle dans une acception
non péjorative des routines. Les compétences résultent d’un apprentissage collectif ; elles
dépendent des capacités de l’entreprise à développer un apprentissage organisationnel interne.
Alors que les ressources sont des stocks qui traduisent ce que l’entreprise sait faire, les
compétences constituent des flux qui indiquent ce qu’elle peut faire.
Les différents types de compétences
Plusieurs types de compétences peuvent être identifiés. Elles sont directement ancrées dans les
processus de l’entreprise. Nous pouvons en distinguer quatre catégories :
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|
– certaines compétences sont d’ordre général, relativement classiques en management ; elles
portent sur la capacité à gérer correctement les processus de finalisation, d’organisation, de
contrôle et d’information ;
4$
$!
– d’autres sont spécifiques aux fonctions et métiers de l’entreprise. Elles sont qualifiées
d’infra-fonction ou intra-service ;
By
– les troisièmes concernent la gestion de la transversalité tant interne qu’externe. Il s’agit là de
compétences plus difficiles à maîtriser car inter-fonctionnelles ou interentreprises. On
insiste donc sur l’importance de leur maîtrise et il est nécessaire de souligner que leur
caractère « invisible » ne doit pas laisser penser qu’elles sont mineures. Il en va tout
autrement.
Tableau 3.20. Un exemple d’évaluation des compétences
Compétences Processus
Managériale
générale
Fonctionnelle
intra-service
Finalisation
Organisation
Animation des
hommes
Contrôle
Information
Production
Recherche et
développement
Système
d’information
Savoirs
Savoirfaire
Savoirêtre
By
4$
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Amont avec
les soustraitants et
Développement
les
de nouveaux
fournisseurs
intraproduits
Individuelle,
Transversale
interentreprises Aval avec
entreprise Gestion de la
professionnelle
les
qualité
distributeurs
Service client
Horizontal
avec les
partenaires
Les compétences intra-entreprise sont déterminantes dans l’élaboration de nouveaux produits
requérant une coordination R&D/marketing dans la gestion d’une relation client efficace.
Exemple
Dyson excelle dans la coordination entre la recherche et la mise sur le marché de
produits attendus par les clients.
Au plan interentreprises, ces compétences relationnelles de coordination sont essentielles dans une
perspective de firme étendue (intégrant fournisseurs et distributeurs dans le système d’information)
et dans la gestion des alliances. Le succès de l’alliance Renault-Nissan ne doit-il pas être analysé
au travers du filtre des compétences transversales de coordination interentreprises ?
Les compétences ci-dessus sont collectives et se distinguent des compétences individuelles des
personnels que l’on qualifie de professionnelles.
Compétences de base / compétences distinctives
Certaines des compétences sont distinctives car elles possèdent un caractère stratégique. D’autres
sont dites « de base » ; il est essentiel de les maîtriser mais il serait vain de vouloir asseoir le
développement stratégique sur elles.
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Figure 3.31. Les compétences de base appliquées à une entreprise de e-commerce
$!
Il n’est pas toujours évident de distinguer une compétence de base (vision interne) d’un simple
facteur clé de succès (vision externe). Voici deux principes à suivre :
4$
– une compétence fondamentale se traduit toujours par un facteur clé de succès mais l’inverse
n’est pas exact ;
By
– une compétence est fondamentale si elle représente une valeur, un « plus » aux yeux des
clients de l’entreprise ; sa maîtrise par l’entreprise est non contestée et durable ; elle fait
preuve d’une certaine élasticité, c’est-à-dire si elle s’applique à d’autres produits que ceux
actuellement fabriqués.
Le diagnostic des ressources et compétences
Exemple
Les compétences fondamentales de UPS, l’entreprise de transports rapides sont :
technologie des codes-barres, communication sans fil, gestion des réseaux et de la
programmation linéaire.
Le diagnostic consiste à passer au crible les compétences fondamentales de l’entreprise, à les juger,
à envisager les possibilités d’amélioration, à examiner les opportunités d’acquisition externe. Seule
la possession de ces compétences fondamentales ouvrira la voie vers des avantages concurrentiels
qui permettront à l’entreprise d’atteindre ses objectifs. Les recommandations stratégiques seront
faites à partir des compétences possédées : peut-on les combiner autrement pour offrir de nouveaux
produits ? Est-il possible de les mettre en œuvre à destination d’une autre cible ? Peut-on acquérir
un complément de compétence qui ouvrirait la possibilité de fabrication d’une nouvelle gamme de
produits ? On peut schématiser ceci par une démarche en cinq phases.
Les cinq phases du diagnostic des ressources et compétences
1. Identifier les compétences fondamentales existantes.
2. Mettre sur pied un programme d’acquisition des compétences fondamentales nécessaires ou de
transfert d’un secteur de l’entreprise à un autre pour renforcer la position et préparer l’avenir.
3. Développer de nouvelles compétences fondamentales en interne.
4. Déployer les compétences fondamentales dans toute l’entreprise pour obtenir la meilleure
adéquation entre une compétence fondamentale et un produit final.
5. Protéger les compétences fondamentales contre les concurrents et un redoutable adversaire :
« l’usure du temps ».
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|
Le diagnostic des ressources et compétences conduit, dans une perspective de secteur, à se
comparer à la situation moyenne des concurrents et à se demander :
– Quel est le niveau minimal de ressources à détenir et de compétences à maîtriser ?
$!
– Quelles sont les ressources et les compétences qui sont stratégiques ?
4$
– Comment acquérir ou développer ces ressources et compétences ?
By
À partir de l’approche par les ressources(16), un outil permet d’analyser le potentiel de création
d’avantages compétitifs des ressources et compétences qu’une entreprise maîtrise. La méthode
VRIO est l’acronyme de quatre questions à se poser au sujet des ressources et compétences pour
déterminer leur potentiel compétitif : la question de la valeur, la question de la rareté, la question
de l’imitabilité, la question de l’organisation. Ces questions cumulatives sont résumées dans le
tableau 3.21.
V
R
I
|\/
|
O
Tableau 3.21. Les quatre questions de la méthode VRIO
Les ressources et les compétences permettent-elles à la firme d’exploiter une
Valeur
opportunité ou de neutraliser une menace ? Si la réponse est positive, elles
sont génératrices de valeur.
Combien de firmes en compétition possèdent déjà les ressources et
Rareté
compétences génératrices de valeur ? Si la réponse est très peu, elles sont
constitutives d’avantage compétitif.
Est-ce que les firmes qui ne possèdent pas ces ressources et compétences
subissent un désavantage de coût en cherchant à les obtenir ou à les
développer ? Si la réponse est oui, la possession de ces ressources et
Imitabilité
compétences (V+R+I), génératrices de valeur et rares, est source d’un
avantage compétitif défendable. Si la réponse est négative, les ressources et
compétences (V + R) ne fournissent qu’un avantage compétitif temporaire.
Est-ce que la firme est organisée pour tirer pleinement partie du potentiel
compétitif des ressources et compétences ? Si la réponse est positive, les
Organisation ressources et compétences (V+R+I+O) génératrices de valeur, rares, peu
imitables, constituent des compétences distinctives durables pour
l’entreprise.
$!
L’application de cette méthode au cas Dell peut être résumée comme suit (tableau 3.22).
4$
Tableau 3.22. Une application de la méthode VRIO à l’entreprise Dell
By
Ressources
Avantage
et
Valeur Rareté Imitabilité Organisation
compétitif
compétences
Achat en grosses
quantités et en juste oui
à temps
Système de ventes
par téléphone et
oui
internet
Amélioration
permanente des
lignes
oui
d’assemblage, de la
rapidité et de
l’efficience
Culture de l’écoute
oui
du client
oui
Temporaire
oui
Temporaire
oui
oui
oui
Défendable
oui
Compétence
distinctive
durable
oui
Un tableau commode à remplir pour mener le diagnostic consiste à opposer les ressources aux
compétences d’une part, et celles qui sont de base à celles qui sont distinctives d’autre part.
Tableau 3.23. Ressources et compétences
Ressources
Compétences
De base
Distinctives
c. Les TIC
Des ressources stratégiques
Le processus d’information a pris au sein de l’entreprise une place déterminante qui s’explique par
le rôle croissant des systèmes d’information et par le développement des technologies de
l’information et de la communication (TIC)(17).
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D’abord applications informatiques limitées, puis facteurs de réorganisation interne, les TIC
acquièrent aujourd’hui un rôle que l’on peut qualifier de stratégique sous le double effet d’une
pression technologique (évolution en termes de puissance, de coûts, généralisation des réseaux,
hauts débits) et concurrentielle (les TIC constituent une source d’avantage concurrentiel).
By
4$
Figure 3.32. Les TIC, des ressources stratégiques
Ce caractère stratégique est confirmé par diverses enquêtes. La présence croissante des TIC dans
les entreprises est attestée par les fréquences d’utilisation d’un certain nombre d’applications. Ces
résultats doivent bien sûr être nuancés selon les secteurs et la taille des entreprises, mais ils
témoignent d’une place croissante faite aux TIC dans le fonctionnement des organisations que l’on
peut désigner par l’expression « numérisation » ou « digitalisation croissante ».
Les impacts sur le fonctionnement sont variables selon le type de reconfiguration de l’entreprise.
Les niveaux de reconfiguration
Traditionnellement, ce qui touche au système d’information relève d’une fonction de l’entreprise,
d’abord la fonction informatique, puis la direction des systèmes d’information (DSI) et dans
certaines entreprises, la fonction organisation. Cette évolution dénote bien le changement du rôle
des technologies de l’information dans l’entreprise.
Venkatraman a distingué cinq niveaux d’impact des TIC sur l’entreprise en fonction de deux
dimensions que constituent l’importance des gains potentiels et le degré de transformation de
l’entreprise :
• Le niveau 1 est celui de l’exploitation locale des TIC au sein d’une fonction de l’entreprise.
Il s’agit par exemple de l’automatisation d’une activité administrative (facturation) ou de
production, d’une application de marketing direct. L’impact et les gains sont limités à une
fonction.
• Le niveau 2, celui de l’intégration interne des différentes fonctions, prolonge les
applications locales mais introduit la coordination des applications. Les informations du
service commercial et des stocks sont disponibles pour la production, par exemple. Ce
niveau implique à la fois une intégration technologique (plate-forme informatique commune)
et une intégration organisationnelle des processus de gestion, souvent plus difficile à
réaliser. L’impact organisationnel est ici plus important car ce sont les mécanismes de
coordination qui sont concernés et les traditionnelles frontières internes à l’entreprise qu’il
faut reconsidérer.
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• Le niveau 3 porte sur le reengineering des processus de gestion. Il s’agit là de procéder à
une véritable reconfiguration des pratiques de gestion, de la façon de travailler. La création
d’un dossier unique client, l’accès à ces informations par tous les personnels en contact, à
partir du code client, a conduit à profondément réorganiser la chaîne de traitement des
sinistres dans les secteurs de l’assurance.
By
4$
$!
• Le niveau 4, reengineering des réseaux de gestion, se situe dans une perspective
d’entreprise étendue intégrant en amont les fournisseurs et sous-traitants et en aval les
distributeurs. C’est à une remise en cause des frontières de l’entreprise que l’on assiste ici.
Les applications d’échanges de données informatisées (EDI) et d’extranet où les partenaires
accèdent aux stocks de l’entreprise en sont une illustration. C’est à ce stade également que
peuvent apparaître des applications communes à plusieurs concurrents dans le domaine des
achats ou de la conception (place de marché). Dans un quotidien de presse, la numérisation
des processus peut remettre en cause la distribution sur les marchés éloignés et la
transmission numérique ; une impression locale peut se substituer à l’expédition des
exemplaires papier.
• Le niveau 5 repose sur la redéfinition du portefeuille d’activités de l’entreprise, les TIC
devenant un axe de développement de nouvelles activités génératrices de chiffre d’affaires.
Ainsi, la création du site Fnac.com constitue pour le distributeur de produits et de services
de loisirs une extension de son domaine d’activité.
Alors que les niveaux 1 et 2 de reconfiguration relèvent de changements incrémentaux, l’entreprise
met en œuvre pour les niveaux 3 à 5 des changements radicaux.
On s’aperçoit donc au travers de l’examen de ces niveaux que les décisions de système
d’information possèdent très rapidement une dimension organisationnelle et stratégique importante.
Figure 3.33. Les cinq niveaux de reconfiguration provoqués par les TIC
4. Les contraintes financières du diagnostic
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Diagnostic stratégique et repérage des contraintes financières ne peuvent qu’aller de pair : les choix
stratégiques sont conditionnés par – et jouent un rôle sur – les équilibres financiers de l’entreprise.
Ceci a été clairement mis en avant dans la présentation du diagnostic par fonction mais doit être à
nouveau relevé ici. On peut même se demander si le diagnostic financier n’est pas un préalable à
toute démarche stratégique.
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Figure 3.34. Le diagnostic financier et le diagnostic stratégique
Sans entrer dans le détail de l’analyse financière de l’entreprise, voici les principales informations
financières susceptibles d’avoir une incidence sur le diagnostic stratégique.
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L’analyse financière au service du diagnostic stratégique
By
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Parmi tous ces calculs doivent être retenus ceux qui améliorent clairement la compréhension de la
situation générale de l’entreprise et qui peuvent avoir une incidence sur les choix stratégiques.
D’autres calculs peuvent être ajoutés à la précédente liste. Il faut cependant veiller à ne pas
transformer le diagnostic stratégique en diagnostic exclusivement financier.
Exemple
Selon les informations disponibles au sein de l’entreprise, il est également possible de
calculer le fonds de roulement et les besoins en fonds de roulement, d’élaborer le
tableau de financement et d’évaluer le poids des frais financiers.
IV. La synthèse du diagnostic stratégique
A. L’analyse SWOT
La synthèse des informations dégagées par le double diagnostic, interne et externe, peut être
représentée dans une grille (figure 3.35). Les propositions de décisions stratégiques sont notées à
l’intérieur du tableau à l’intersection des informations clés résultant du diagnostic. On donne à cette
matrice le nom de SWOT (Strengths, Weaknesses, Opportunities, Threats). Cette analyse se décline
en deux propositions :
• PS1. Proposition stratégique no 1 résultant de la combinaison de l’opportunité no 2 et de la
force no 1.
• PS2. Proposition stratégique no 2 : consécutive à la prise en compte de la faiblesse 2 et de la
menace 1.
Figure 3.35. Une grille de synthèse du diagnostic et des propositions stratégiques
|\/
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Cette grille incite à la réflexion à partir des combinaisons possibles de menaces, d’opportunités, de
forces et de faiblesses. Les propositions stratégiques naîtront de l’ensemble de ces confrontations.
$!
Dans le quadrant A, vont figurer des décisions qui associent opportunités et forces. Il s’agit là des
stratégies qui ont le plus de chances de succès. Les stratégies de croissance et de développement de
nouveaux domaines d’activité stratégique doivent se situer de préférence dans ce quadrant.
By
4$
Les décisions du quadrant B associent opportunités et faiblesses. Il peut s’agir de stratégies de
partenariat permettant de compenser les faiblesses de l’entreprise et cependant de profiter des
opportunités du marché.
À la conjonction des menaces et des forces (quadrant C) se situent des décisions de protection
permettant par exemple de créer des barrières à l’entrée à l’encontre des entrants potentiels.
Le quadrant D suggère les réponses possibles de l’entreprise compte tenu de ses faiblesses et des
menaces de l’environnement. Les stratégies de recentrage, de désinvestissement s’inscriront ici.
Leur objectif est de réduire les menaces et les faiblesses qui pèsent sur l’entreprise.
Il est important de souligner que dans ce type de tableau, il convient de hiérarchiser les
propositions par ordre d’urgence ou d’importance notamment sur le plan opérationnel.
Notons enfin que ce type d’outil peut s’utiliser tant au plan business que corporate.
B. Les matrices de portefeuilles d’activités
Ces outils ont été créés pour permettre une analyse globale et simultanée de l’ensemble du
portefeuille d’activités d’une entreprise. Ils ont été conçus à l’origine pour des grandes entreprises
possédant plusieurs dizaines, voire centaines de domaines d’activités stratégiques. Ils ont en
commun de viser à une représentation synthétique et graphique des portefeuilles des entreprises
diversifiées.
Les matrices de portefeuilles d’activités sont nées il y a plusieurs dizaines d’années et, depuis,
elles ont donné lieu à beaucoup de commentaires louangeurs comme à des critiques définitives.
Nous verrons, en conclusion de leur présentation, que la vérité se situe, comme souvent, dans la
voie moyenne.
Ces outils d’analyse de portefeuilles d’activités reposant sur une démarche commune, nous
proposons, dans un premier temps, la matrice générique de portefeuilles d’activités. Puis nous
analysons, au travers de leur originalité, les matrices créées par les cabinets de consultants BCG et
McKinsey.
1. La matrice générique de portefeuilles d’activités
La finalité d’une matrice de portefeuilles d’activités est de représenter de façon synthétique un
ensemble d’activités et de susciter une réflexion sur les décisions stratégiques à prendre pour les
différents DAS.
a. Les principes de construction de la matrice générique
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La démarche du diagnostic stratégique repose sur un double diagnostic, interne et externe, pour
chacun des DAS. Le diagnostic interne a permis de déceler les forces et les faiblesses du DAS. Le
diagnostic externe a lui conduit à identifier les menaces et les opportunités. Il convient de situer les
différents DAS par rapport à des dimensions comparables. On peut résumer le diagnostic interne de
chaque DAS en termes d’atouts de l’entreprise et le diagnostic externe en termes d’attraits de
l’environnement (figure 3.36). En effet, les questions fondamentales qu’il convient de se poser pour
un DAS à l’issue du diagnostic sont les suivantes : l’entreprise a-t-elle des atouts ? Le marché est-il
attractif ?
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Figure 3.36. Du diagnostic générique à la matrice de portefeuille d’activités
Si les axes sont ordonnés de faible à fort, chaque DAS peut être situé dans la matrice en fonction de
son ordonnée et de son abscisse. Ainsi, dans l’exemple ci-dessous, l’entreprise possède pour le
DAS no 1 des atouts importants et l’environnement de ce DAS est jugé porteur et attractif. En
revanche, pour le DAS no 2, l’environnement est en crise et l’entreprise dispose d’atouts élevés.
Pour le DAS no 3, l’environnement a été jugé favorable mais l’entreprise n’a pas véritablement
d’atouts. Enfin, le DAS no 4 est en position critique, puisque le diagnostic interne conduit à
identifier de nombreuses faiblesses et l’environnement n’est guère porteur. L’importance de chaque
DAS dans le portefeuille d’activités peut être visualisée en le représentant proportionnellement au
chiffre d’affaires, à la marge sur coûts directs, ou à l’indicateur habituellement utilisé par
l’entreprise (figure 3.37).
Figure 3.37. La matrice générique
b. Les stratégies génériques des DAS
Selon la position des DAS dans la matrice générique, des orientations stratégiques générales
peuvent être envisagées (tableau 3.24).
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Tableau 3.24. Une comparaison de portefeuilles
La matrice d’un portefeuille d’activités d’une entreprise est donc révélatrice de sa situation
stratégique, financière, mais aussi culturelle et organisationnelle. Les trois portefeuilles classiques
représentés dans le tableau 3.24 en fournissent l’illustration.
2. Les matrices des cabinets de consultants
Nous étudierons les deux outils classiques d’analyse de portefeuilles d’activités, ceux qui
ont été proposés par des cabinets de consultants : le Boston Consulting Group et McKinsey.
a. La matrice du Boston Consulting Group
Elle positionne les domaines d’activité stratégique en fonction de leur situation au regard de deux
dimensions : la part de marché relative et le taux de croissance du marché.
Tableau 3.25. Un exemple d’analyse de DAS
DAS
Taux de
croissance
Part de
marché relative
% chiffre
d’affaires
DAS 1
DAS 2
0%
+ 25 %
4
8
30 %
15 %
DAS 3
DAS 4
+ 15 %
4
20 %
+ 23 %
–5%
0,25
1
10 %
20 %
–8%
0,20
5%
DAS 5
DAS 6
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La part de marché (PDM) relative
Exemple
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Elle renseigne sur la position concurrentielle de chaque domaine d’activité stratégique de
l’entreprise et donc sur leur position en termes de leadership. Elle se calcule en rapportant la part
de marché de l’entreprise à la part de marché moyenne des principaux concurrents. Elle est
préférée à la part de marché en valeur absolue, car elle renseigne sur la véritable position
concurrentielle de l’entreprise, mesurée en part de marché. En effet, la signification de la part de
marché en valeur absolue dépend de la structure du marché.
On peut calculer la part de marché relative du domaine d’activité stratégique no 1 du
groupe Bouygues, « télévision généraliste ». Imaginons que les parts de marché soient
les suivantes : TF1 38 %, France 2 23 %, France 3 17 %, M6 13 %, ARTE 2 %,
Canal+ 5 %, France 5 1 %, autres 1 %. D’où une PDM relative (calculée par rapport
aux trois plus gros concurrents) de : 38 / [(23 + 17 + 13) × 1/3] = 2,15. Cela signifie
que TF1 « pèse » plus du double par rapport au « concurrent moyen ».
Figure 3.38. Un exemple de matrice BCG
Exemple
Une entreprise peut être leader avec 4 % d’un marché très atomisé et, avec la même
part de marché, en position peu significative sur un marché concentré.
Les exemples de calcul de PDM relative du tableau 3.26 montrent à la fois l’influence de la
structure du secteur et diverses possibilités de calcul de la part de marché relative en prenant
comme référence l’ensemble des concurrents, les principaux concurrents ou bien encore le
concurrent principal. Dans la pratique, le nombre de concurrents retenus doit, avant tout, dépendre
de la distribution des parts de marché. Pratiquement, sur l’axe des abscisses, le domaine d’activité
stratégique sera situé sur une échelle logarithmique entre 0,1 (le domaine d’activité stratégique a
une part de marché égale à 10 % de la part de marché moyenne des concurrents) et 10 (le domaine
d’activité stratégique a une part de marché 10 fois supérieure à celle des concurrents).
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Tableau 3.26. Quelques exemples de structures concurrentielles
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La PDM relative renseigne également sur la structure des coûts du DAS et sur les liquidités qu’il
dégage. Le leader est en général celui qui réalise les marges unitaires les plus importantes sur le
secteur. Ses coûts sont plus faibles en raison des avantages liés aux économies d’échelle et aux
effets d’expérience. Le leader est celui qui, à la fois, bénéficie des effets de série et qui se trouve
bas sur la courbe d’expérience. On assimile ici part de marché et volume cumulé de production, le
leader étant considéré comme ayant beaucoup d’expérience. De plus, les prix du marché permettent,
en général, à l’entreprise ayant la position concurrentielle la moins bonne de survivre et ils sont
donc très supérieurs au coût du leader. En conséquence, la part de marché relative est un indicateur
de l’importance des liquidités dégagées par le domaine d’activité stratégique.
Le taux de croissance du marché
Il est considéré comme un indicateur de l’attrait du marché ; plus il est important, plus le marché est
jugé porteur. Il renseigne également sur les besoins de liquidités que le domaine d’activité
stratégique va nécessiter. En effet, le taux de croissance annuel du marché conditionne directement
le taux d’investissement nécessaire pour maintenir et, a fortiori, développer une position
concurrentielle acquise. Plus le taux de croissance sera fort, plus les besoins de financement des
actifs immobilisés et aussi du cycle d’exploitation seront élevés. A contrario, un marché stable
n’implique que peu de besoins de financement nouveaux et, s’il est en décroissance, des
dégagements d’actifs sont même envisageables.
Les grandes catégories comprises dans la matrice BCG
La matrice BCG classe les DAS en quatre grandes catégories (figure 3.39), les limites
généralement retenues étant 10 % pour le taux de croissance, ou taux de croissance moyen des
activités de l’entreprise, et la valeur pivot 1 pour la PDM relative.
Figure 3.39. La matrice BCG : le financement des DAS
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Les vaches à lait sont des domaines d’activité stratégique où la croissance est réduite, les besoins
de financement sont limités ; en revanche, la position de leader fait de ces activités des sources
importantes de liquidités.
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Les vedettes constituent des domaines créant des ressources financières importantes qui permettent
de financer les besoins engendrés par la croissance du marché. Ces domaines d’activité stratégique
s’équilibrent ou sont excédentaires en liquidités. Ils constituent la partie dynamique du portefeuille
d’activités. Les « vedettes » se situent en phase de croissance et sont appelées à devenir des
« vaches à lait ». Elles contribuent à la croissance et s’autofinancent.
Les poids morts sont des domaines d’activité stratégique vieillis pour lesquels l’entreprise n’a pas
su s’imposer en termes de part de marché. Ils se caractérisent par une double absence de besoin et
de dégagement de liquidités. Ils n’apportent à l’entreprise ni croissance, ni marge.
Les dilemmes sont des domaines d’activité stratégique à fort taux de croissance, mais pour lesquels
l’entreprise n’a pas encore su acquérir des positions concurrentielles dominantes. Ces domaines
d’activité stratégique sont demandeurs de ressources financières pour assurer leur développement.
Ils contribuent à la croissance de l’entreprise et nécessitent des liquidités. Le terme de dilemme fait
référence au choix stratégique qui s’impose à l’entreprise : soit investir pour que le domaine
d’activité stratégique devienne une vedette, soit désinvestir. Si l’entreprise refuse de choisir, les
dilemmes sont appelés à devenir des poids morts.
Sur un plan financier, le portefeuille doit globalement s’équilibrer, les domaines d’activité
stratégique étant dans des situations complémentaires. On peut d’ailleurs représenter le circuit de
financement de la matrice BCG en précisant que « les vaches à lait » doivent financer le
développement des « dilemmes » et leur transformation en « vedettes », les « vedettes »
vieillissantes devenant des « vaches à lait » sur le déclin ayant pour avenir de rejoindre les « poids
morts » !
Les limites de la matrice BCG
La matrice BCG, la plus ancienne, a été en même temps et à des périodes différentes très utilisée et
très critiquée. Son utilisation par de nombreux consultants et par des entreprises de toutes
dimensions repose sur plusieurs raisons :
–
l’excellente intégration des aspects stratégiques (croissance,
désinvestissement) et financiers (financement du haut et du bas du bilan) ;
investissement,
– le caractère visuel et synthétique qui permet de représenter simultanément de très
nombreuses activités d’un portefeuille d’entreprise diversifié ;
– le caractère pédagogique, simple, qui donne au dirigeant une grille d’analyse
compréhensible de ses choix majeurs.
Le revers de la médaille est constitué de critiques sévères qui présentent toutes une évidente
pertinence ; plusieurs aspects sont ici mis en avant :
– les manipulations que la matrice permet, notamment en changeant le marché de référence, ce
qui a pour effet de modifier la part de marché relative et donc la position dans la matrice ;
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– la réduction abusive des questions stratégiques des entreprises à deux dimensions, et qui
plus est à deux dimensions mesurées par des indicateurs strictement quantitatifs ;
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– l’utilisation comme outil de légitimation a posteriori de décisions déjà prises ;
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– la référence exclusive aux marchés où le phénomène d’expérience est vérifié et l’ignorance
des situations où la concurrence ne se fait pas par les coûts, mais par la qualité, le service
ou l’innovation technologique ;
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– l’anachronisme de l’outil. Les matrices du BCG ont vu le jour à la fin des années de forte
croissance, à la fin des Trente Glorieuses, avant 1970. Pour se développer à cette époque et
lancer de nouveaux DAS, les entreprises devaient investir. Or les capitaux, sur les marchés,
appelaient un taux d’intérêt élevé puisqu’ils étaient fort demandés par les investisseurs. La
préconisation consistait alors à suggérer d’avoir de nombreux DAS en vache à lait, de façon
à autofinancer les investissements. Mais, après les changements de conjoncture, après le
premier choc pétrolier, cette suggestion n’était plus de saison. En effet, les projets
d’investissement devenaient moins nombreux, donc le coût du capital baissait. Il valait donc
mieux, pour financer les investissements, emprunter de l’argent bon marché parce
qu’abondant (pétrodollars) et profiter de l’effet de levier, afin d’accroître la rentabilité.
En bref, l’utilisation de la matrice n’a pas de justification dans l’absolu : un changement des
conditions macro-économiques rend, par exemple, son emploi caduc... pour un temps. Dans les
domaines des outils et procédures, l’idée de contingence est aussi vérifiée.
BCG en est parfaitement conscient. Pour la société de conseil, la matrice des années 1970 ne perd
pas toute sa pertinence, mais doit être utilisée au regard du contexte nouveau : tout change beaucoup
plus rapidement et la part de marché est devenue un piètre indicateur de la performance. De ce fait,
les cash cows ne peuvent plus représenter qu’une part modeste dans le portefeuille ; les questions
marks sont nombreuses et c’est normal. L’agilité, la capacité à évoluer rapidement, devient
l’indicateur de performance privilégié.
En somme, les entreprises (les secteurs) relèvent de quatre environnements différents par rapport
auxquels elles sont appelées à utiliser des outils de diagnostic stratégique différents(18).
b. La matrice McKinsey
Également appelé matrice ou grille General Electric, cet outil d’analyse multicritère repose sur la
représentation des domaines d’activité stratégique par rapport à deux dimensions : l’attrait du
marché à moyen terme (diagnostic externe) et la force compétitive ou position concurrentielle
(diagnostic interne).
La démarche est la suivante :
– définition de critères d’évaluation de l’attrait du marché et de la force compétitive ;
– pondération des critères d’attrait du marché et de force compétitive, le total des
pondérations de chaque dimension étant égal à 1 ;
– évaluation de chaque domaine d’activité stratégique par rapport aux critères, sur une échelle
de 1 (attrait ou force compétitive faible) à 5 (attrait ou force compétitive forte) ;
– calcul d’une note pondérée d’attrait et de force compétitive pour chaque domaine d’activité
stratégique ;
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– localisation de chaque domaine d’activité stratégique sur la grille McKinsey, la surface des
cercles est proportionnelle au chiffre d’affaires réalisé, la part de marché du domaine
d’activité stratégique peut être visualisée ;
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– préconisations stratégiques en fonction de la situation de chaque domaine d’activité
stratégique dans la matrice.
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La méthode peut être illustrée par le tableau 3.27 et les figures 3.40 et 3.41 qui présentent le calcul
des scores pour trois domaines d’activité stratégique, les critères d’attrait du secteur et de force
compétitive n’étant qu’indicatifs. Il va de soi que les critères varieront d’une entreprise à l’autre et
qu’ils doivent être définis par des personnes internes ou externes connaissant bien les
caractéristiques concurrentielles des secteurs.
Tableau 3.27. Un exemple de calcul des notes dans la matrice McKinsey
By
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Figure 3.40. Le calcul des scores dans la matrice McKinsey
Figure 3.41. Les zones de la matrice McKinsey
En fonction de la localisation des domaines d’activité stratégique dans les neuf cases de la matrice,
trois grandes zones sont suggérées (figure 3.41) :
– la zone A correspond à des segments attractifs où l’entreprise possède des atouts ; c’est une
zone stratégiquement intéressante ; il convient d’y investir ;
– la zone B regroupe des segments qualifiés de moyennement intéressants où les stratégies
vont consister à récolter ou à désinvestir ;
– la zone C rassemble des segments où l’attractivité et la force compétitive sont soit
moyennes, soit faibles ; il s’agit d’activités peu intéressantes pour lesquelles les stratégies
de désinvestissement vont s’imposer.
L’avantage essentiel de la matrice McKinsey réside dans le processus qui est nécessaire pour
son élaboration autant que dans sa présentation graphique finale. La démarche implique une
réflexion sur les facteurs de compétitivité et d’attrait des secteurs auxquels l’entreprise est
confrontée. Cette réflexion ne peut être que salutaire et fortement utile, par exemple, dans le cadre
de séminaires d’une équipe de direction. En outre, l’outil permet d’intégrer dans l’analyse les
critères clés des secteurs étudiés, sans se focaliser obligatoirement sur des variables quantitatives
telles que la part de marché ou le taux de croissance. On peut, bien sûr, trouver la méthode plus
complexe à mettre en œuvre, notamment lors de la définition des critères et de leur pondération. La
subjectivité de la pondération et de la notation peut également être critiquée, sauf à reconnaître
qu’en matière stratégique, mieux vaut une subjectivité portant sur des traits d’analyse élaborés en
commun qu’un choix personnel non étayé.
Tableau 3.28. Les intérêts et les limites des matrices
Intérêts
Limites
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Présentation réductionniste des réalités
Réduit l’analyse stratégique à deux dimensions
Ignorance du lien entre stratégie et mise en
œuvre
Ignorance des aspects organisationnels et
politiques
Caractère très général des recommandations
stratégiques
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Vue synthétique de l’ensemble des activités
Représentation graphique claire
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Simplification des situations complexes
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Intégration des préoccupations financières,
marketing et stratégiques
Identification des stratégies génériques
correspondant à un portefeuille
Possibilité de suivre l’évolution du portefeuille
Caractère fondamentalement statique des outils
dans le temps
Outils de préparation des décisions stratégiques Outil de présentation de décisions déjà prises
Outil manipulatoire pour jusitifier des options
Outil pédagogique de formation
prises d’avance
Nous ne pouvons terminer cette présentation sans rappeler que les outils d’analyse de portefeuilles
d’activités, tels que les matrices que nous venons de voir, ont été portés au pinacle par certains à
une époque donnée, puis voués aux gémonies par les mêmes quelque temps plus tard, alors que
d’autres se frayaient un chemin dans le sens exactement inverse. Trois remarques méritent d’être
formulées :
• Il est souhaitable de mettre l’accent sur le contexte ayant pour origine les cabinets de
consultants internationaux des analyses de portefeuilles. Toutes les méthodes ont été mises
au point par des cabinets de consultants dont les objectifs clairs sont :
– d’être normatif plus que descriptif ;
– de se différencier les uns par rapport aux autres ;
– de rendre les outils, notamment ceux des concurrents, obsolètes en innovant régulièrement.
Il ne s’agit pas ici de douter un seul instant du niveau d’expertise en matière stratégique des
consultants internationaux, mais de relever que « l’histoire des matrices » aurait été fort différente
si l’on s’était contenté de poser que l’entreprise doit classer ses domaines d’activité en fonction de
ses propres atouts (c’est le diagnostic interne) et des attraits du marché (c’est le diagnostic externe)
en laissant à chacun le soin de déterminer (ceci aurait été tout l’intérêt de la démarche !) quelles
variables il doit utiliser pour graduer les axes. Dès lors que les hérauts des méthodes ont voulu
imposer à la fois le choix des graduations, le nombre de subdivisions (donc le nombre de cases)
et les appellations de chaque axe, il devenait évident que l’on entrait dans un monde fait de conflits
et aussi d’une forte imprégnation de la réalité industrielle d’une époque.
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• Nous avons vu que les conditions économiques d’aujourd’hui mettaient quelque peu à mal la
notion de découpage d’une entreprise en activités stratégiques déterminées. Même si la
remarque précédente faisait largement le lit de quelques critiques adressées aux matrices, il
n’en demeure pas moins que toutes les matrices ont tendance à figer le découpage actuel des
activités, ce qui de toute évidence n’est pas satisfaisant. L’analyse stratégique impose
flexibilité, fluidité, transversalité, synergie ; le caractère mécanique de l’analyse de
portefeuille risque d’enfermer le décideur dans une logique du présent préparant mal
l’avenir, voire n’ouvrant pas les voies des découpages stratégiques du futur.
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• La financiarisation des marchés, le poids grandissant des actionnaires et des analystes
financiers dans les décisions stratégiques ont provoqué un renouveau des matrices : quoi de
plus clair en effet pour communiquer qu’un découpage des activités en un nombre limité de
DAS et qu’une représentation, même simplifiée, sous la forme d’une matrice ?
By
Nous nous bornerons à ce stade à affirmer que les analyses de portefeuilles demeurent, aujourd’hui,
un outil puissant pour inciter la direction générale de n’importe quelle structure à réfléchir au
niveau qui doit être son apanage : la stratégie.
En somme, les entreprises (les secteurs) relèvent de quatre environnements différents par rapport
auxquels elles sont appelées à utiliser des outils de diagnostic stratégique différents(19).
Figure 3.42. Les styles stratégiques selon les environnements
Conclusion
Il nous faut prendre un peu de recul sur la profonde influence de la conjoncture économique dans
cette matière. Nous avons placé sur un pied d’égalité les diagnostics externe et interne mais force
est de constater que, selon les perspectives de développement économique du moment, les
entreprises ont tendance à privilégier un des deux aspects. Lorsque la conjoncture est rayonnante, le
diagnostic externe est privilégié tant les chances de développement sont élevées ; à l’extrême
limite, dans ce cas, l’entreprise peut croître, quelles que soient ses qualités propres. En revanche,
lorsque la crise survient, le diagnostic interne retrouve toute sa vigueur : l’heure n’est plus à la
recherche des opportunités de l’environnement mais au souci de s’ancrer sur ses points d’appui
actuels (figure 3.43). En exagérant, l’environnement est tellement morose qu’il est presque inutile
de l’analyser.
Figure 3.43. Le balancier du diagnostic
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Tout mouvement pendulaire donne naturellement lieu à des outrances. Au début des années 1990,
l’accent a été placé si fortement (en raison de la conjoncture) sur l’intérêt du diagnostic interne que
l’on niait tout l’intérêt du diagnostic externe. Par exemple, emboîtant le pas à Prahalad et Hamel, le
BCG (1992) insistait lui aussi sur les capacités stratégiques de l’entreprise pour s’ouvrir des
avantages concurrentiels en rejetant toute stratégie construite à partir d’une logique de produits et
de marchés, donc réfutant la notion même de segmentation stratégique.
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C’est peut-être tout simplement le poids du présent dans le diagnostic stratégique qui est ici en
cause. À monde relativement stable, poids important du présent ; à monde extrêmement mouvant,
poids réduit accordé au présent. À la limite, le regard porté sur le présent nuit à une saine analyse
tant il risque de laisser penser que les champs concurrentiels sont fixés une fois pour toutes, que les
concurrents de demain sont identifiés, que les règles du jeu vont se maintenir. À l’évidence, toutes
ces propositions sont souvent fausses. En conséquence, si le présent compte moins (voire ne compte
plus), le stratège ne gère plus des produits/marchés (orientations passées et présentes) mais des
portefeuilles de compétences (seules vraies racines dans lesquelles il pourra puiser la réussite de
demain). Ces affirmations sont réelles mais gardons-nous de toute exagération. S’attacher aux
produits/marchés actuels, ce n’est pas conduire sa voiture en regardant dans le rétroviseur, c’est
recourir au présent pour construire un futur à son avantage.
Figure 3.44. Les trois axes de l’analyse stratégique
L’approche de l’analyse stratégique et de la concurrence, avec Porter comme héraut et, l’école des
ressources et des compétences stratégiques doivent également être prises en compte.
Une fois le diagnostic stratégique établi, il convient de suggérer les décisions sur deux plans
complémentaires. D’une part, à l’intérieur de chaque DAS, le responsable a pour mission
d’atteindre les objectifs qui lui ont été assignés en opérant les choix stratégiques adaptés à son
domaine : se développer ou se replier, rechercher un avantage concurrentiel en termes de prix,
d’image ou de qualité, lancer une nouvelle gamme, se concentrer sur un segment de clientèle, etc.
D’autre part, sur le plan global de l’entreprise, la direction générale doit gérer au mieux
l’équilibre du portefeuille d’activités en coupant les branches mortes, en investissant dans de
nouveaux domaines, en veillant à la pérennité de la valeur de l’entreprise(20).
Ces deux plans, complémentaires, comme nous l’avons déjà souligné, constituent l’objet des deux
prochains chapitres.
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Figure 3.45. Les stratégies business et corporate
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Mini-Cas : l’application du modèle ESA aux Business
Schools en France
Au cœur du modèle se trouvent les Business Schools (BS) françaises concurrentes entre elles.
Qu’ont-elles en commun ces BS françaises ? Le nom de « grande école » conféré par
l’appartenance au Chapitre de la Conférence des Grandes Écoles qui est fondamentalement
caractérisé par une sélection par le concours. C’est un élément de la « plate-forme » définissant
l’ESA. Nous laissons de coté les autres concurrents nationaux (IAE, universités et acteurs
internationaux). La concurrence entre ces écoles porte sur de nombreux aspects, principalement
le recrutement des étudiants, mais aussi le recrutement des professeurs, les ressources
financières, les partenariats avec les entreprises, etc. La concurrence ne se fait pas entre toutes
les écoles, mais au sein de groupes stratégiques dont les contours résultent des choix des
étudiants lors des concours.
En amont des BS, nous devons situer les élèves ou étudiants qui vont constituer le flux entrant.
Nous partageons cet ensemble composé d’étudiants en cinq groupes d’acteurs :
– Le premier groupe d’acteurs, historique est composé des classes préparatoires qui
forment le flux traditionnel des candidats aux BS. C’est un ensemble relativement
homogène où les professeurs jouent un rôle de prescription déterminant.
– Le deuxième groupe est composé des universités françaises dont viennent, par les voies
d’accès parallèles, les étudiants en recherche de professionalisation et d’image. Cet
ensemble est diffus, les étudiants décidant individuellement de candidater aux différentes
écoles via les banques d’épreuves (Passerelle, Tremplin) pour le Programme Grande
École (PGE).
– Le troisième groupe est composé des parents qui orientent leurs enfants à la sortie du
lycée vers les programmes Bachelor, post-bac.
– Le quatrième groupe est encore plus large et divers puisqu’il est composé des étudiants
internationaux qui alimentent en nombre de plus en plus important toutes les filières
(Bachelor, PGE, masters spécialisés, MBA, etc.) des BS.
– Enfin, le cinquième comprend une population plus âgée, déjà diplômée en formation
initiale, en activité dans des entreprises et organisations. C’est là une population
hérérogène correspondant à plusieurs segments qui alimentent les cycles d’executive
education des BS.
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En aval de la BS, les diplomés, les alumni, sont en quelque sorte la « production » de la BS. Ce
sont des acteurs en interactions durables avec la BS dans la mesure où, d’une part, ils apportent
à « leur » école des soutiens sous différentes formes (fonds, partenariats, etc.) et où « leur » BS
contribue à leurs propres notoriété et employabilité. Les BS se caractérisant par des procédures
sélectives d’admission, plusieurs types d’acteurs se sont développés :
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– Des systèmes de concours communs (Atout + 3 pour le Bachelor, BCE, ECRICOM pour
le Programme Grande École, Passerelle, Tremplin, Atout, Passerelle World, pour
l’international) ont été développés pour mettre en commun des coûts d’organisation et de
communication. Pour chaque voie d’accès, plusieurs systèmes de concours qui
regroupent des BS en concurrence entre elles, sont eux-mêmes en concurrence. On est là
typiquement dans une logique de coopétition entre les BS.
– Des systèmes de test de référence (GMAT, TAGE MAGE, TOEIC, TOEFL, etc.)
founissent des scores utilisés dans les filières de recrutement.
– Des organismes de préparation aux concours, généralement privés, permettent de
préparer ces concours et ces tests.
Mais le contact entre les cinq groupes cibles, les BS et les systèmes de concours n’est pas direct
et de nombreux acteurs jouent un rôle intermédiaire non négligeable. Les voici :
– Les organisateurs de Salons au plan national et international où sont à la fois présentes
les BS et les organisateurs de concours.
– Les agents recruteurs, intermédiaires rémunérés à la commission, qui au plan
international recrutent des étudiants pour les systèmes de concours ou les procédures
spécifiques mises en place par les BS.
De façon transverse, il faut ici mentionner une série d’acteurs de la communication dont le rôle
est très important dans les processus de choix des candidats aux BS :
– Les médias nationaux et internationaux, tant traditionnels, visuels que Web. Les
journalistes spécialisés dans le secteur de l’éducation ont en effet un rôle essentiel de
prescripteur au travers des rédactionnels produits au fil de l’année comme au travers des
classements qui influencent tous les acteurs de l’écosystème. Les classements ont pour
les médias un double intérêt. D’une part, ils doublent les ventes au numéro des
magazines, d’autre part, ils génèrent un flux d’annonces publicitaires des BS très
conséquent.
– Les agences de relations presse. Ces agences jouent un rôle de contact entre les BS et
les journalistes. Leur existence se justifie par le double service qu’elles rendent. Aux BS,
elle permettent des contacts rapides et facilités avec les journalistes du secteur pour
obtenir des rendez-vous ou diffuser des communiqués de presse. Aux journalistes en
recherche de témoignages d’étudiants ou de professeurs, dans des délais de rédaction
toujours très courts, les agences de relations presse apportent les contacts réactifs au sein
des BS.
– Les agences de classement. On ignore en effet que tous les classements qui requièrent
une expertise particulière et un travail très conséquent ne sont pas toujours produits par
les journaux eux-mêmes et leurs journalistes. En soi, cette externalisation peut se
comprendre en termes de ressources et compétences spécifiques requises.
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– Acteur le plus récent de l’écosystème d’affaires, les réseaux sociaux spécialisés dans les
BS jouent un rôle très important dans la population des candidats et peuvent, au moment
de l’arbitrage des candidats entre différentes écoles, être un acteur d’influence. Les
forums sont des lieux d’expression donnant lieu à la diffusion d’informations les plus
diverses.
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La nature académique des BS les met en relation avec des acteurs délivrant visas (État, CEFDG)
et accréditations (EFMD, AACSB, AMBA). Ces organismes, auxquels les BS adhèrent et
participent à travers diverses activités (séminaires, colloques, etc.), sont périodiquement évalués
selon des méthodologies visant à garantir et à améliorer la qualité du fonctionnement des écoles.
À proximité des professeurs des BS et des associations académiques, on peut souligner le rôle
des éditeurs d’ouvrages (manuels, livres de cas, ouvrages de recherche) qui contribuent à la
visibilité des enseignants et des institutions via leurs publications.
Dernier groupe d’acteurs économiques de l’écosystème d’affaires des BS, les chambres de
commerce et d’industrie, les entreprises et les collectivités locales sont des parties prenantes
ayant un rôle clé dans la dynamique de l’ESA des BS.
Les chambres de commerce et d’industrie ont joué un rôle historique dans la création des BS
françaises qui ont longtemps été des services de ces collectivités qui les finançaient en partie.
Les entreprises sont en relations multiples avec les BS. Cela constitue d’ailleurs un élément
d’identité du fonctionnement des BS françaises. Qu’il s’agisse de la pédagogie, des chaires de
recherche, des stages, de l’emploi, du financement, de la gouvernance, les entreprises sont
omniprésentes au sein des BS.
Tous ces acteurs sont en interaction et en interdépendance multiple au sein de l’écosystème.
C’est précisément l’intérêt de ce type d’analyse que de mettre en exergue ces interdépendances
qui sont porteuses de bouleversement lorsqu’un des éléments du système évolue.
Les acteurs de l’écosystème d’affaires des BS
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Les collectités locales, ville, communautés urbaines, départements, régions, constituent des
acteurs qui à la fois contribuent au développement des BS et en profitent très largement sans que
les impacts en soient toujours pleinement appréhendés(21). En effet, d’une part, elles peuvent
contribuer aux financements des infrastructures immobilières ou d’actions de fonctionnement,
mais, d’autre part, elles tirent profit du développement des BS tant sur le plan financier,
qu’économique en termes d’emplois et de création d’entreprises, d’innovation, d’image, etc.
Questions
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D’après S. Ben Letaifa, M. Kalika, Les fusions, réponses à la crise
des Business Schools ? Application du modèle de l’ÉcoSystème
d’Affaires en France, EGM, FNEGE, 2012.
1. Regroupez les acteurs de l’écosystème d’affaires (ESA) en trois catégories, selon le
niveau d’interaction (cœur de métier, entreprise élargie et écosystème).
2. Quelle est la dynamique actuelle de cet ESA ? Quelles en sont les évolutions majeures ?
3. Selon vous, les fusions entre Business Schools s’expliquent-elles par la dynamique de
l’ESA ?
Chapitre 4
Les stratégies business
Les compétences clés à acquérir :
• Repérer les principaux éléments qui conditionnent la performance, leur intérêt et leurs limites dans un
domaine d’activité stratégique.
• Connaître les facteurs de la performance (cycle de vie, expérience, leadership et compétences), leurs
intérêts et leurs limites.
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• Proposer des stratégies correspondant à un business.
• Analyser les avantages et les limites de chaque stratégie.
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• Situer une stratégie dans la boussole stratégique prix-valeur.
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• Comprendre la stratégie Océan Bleu et la longue traîne.
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• Identifier un secteur en situation d’hypercompétition.
L’analyse stratégique d’un domaine d’activité, tant dans sa phase de diagnostic que de propositions,
fait référence aux facteurs de performance éclairés par de nombreuses études qui ont à la fois
permis de structurer la phase de diagnostic et d’orienter les prises de décision stratégique au sein
de chaque DAS. L’examen de ces stratégies business, également dénommées « stratégies
d’activité » ou encore « stratégies de DAS »(22), précède logiquement la présentation des stratégies
génériques associées.
La finalité ultime du management stratégique est de permettre à une entreprise de choisir et de
mettre en œuvre, dans chaque DAS, une stratégie qui lui permette d’acquérir un avantage compétitif
source de profit. En général, une entreprise possède un avantage compétitif quand elle crée plus de
valeur économique que ses concurrents. La valeur économique peut s’appréhender comme la
différence entre la valeur créée pour les clients et les coûts supportés. La supériorité d’une
entreprise sur une dimension de la concurrence ne devient un avantage concurrentiel que si le client
attribue de la valeur à cette supériorité. Il est stérile d’être meilleur que les rivaux sur un aspect de
la stratégie si les clients y sont indifférents ou s’ils ne perçoivent pas l’aspect différenciation.
I. Les facteurs de performance dans une activité
Avec les outils d’analyse ci-dessous, nous tenterons de déterminer, au total, les points d’appui pour
ranger les domaines d’activité stratégique au regard des facteurs supposés influencer la
performance. Le préalable est, par conséquent, de se prononcer sur les éléments conditionnant
la performance : un domaine d’activité stratégique bien « classé » sur ces éléments sera dans une
position enviable, à maintenir ; un domaine mal classé se trouvera dans une situation difficile qu’il
conviendra sans doute d’abandonner. Ce sont ces relations fondamentales (supposées ?) entre
divers éléments et la performance que nous allons décrire.
Quels sont les facteurs de performance qu’il convient aujourd’hui d’identifier dans un domaine
d’activité stratégique ? Nous en retenons cinq qui nous semblent incontournables pour comprendre
les stratégies choisies par les entreprises. Les quatre premiers sont spécifiques alors que le dernier
est plus général :
• la maîtrise du cycle de vie de l’activité, c’est-à-dire la gestion de la relation entre les ventes
et le temps ;
• l’accumulation de l’expérience qui permet de réduire les coûts unitaires ;
• la position de leader en termes de part de marché, synonyme de rentabilité ;
• l’innovation qui permet de créer un avantage concurrentiel générateur de performance ;
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• la mobilisation des compétences de l’entreprise, par exemple la maîtrise du temps et la
maîtrise de la qualité.
By
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Figure 4.1. Les facteurs de performance
A. Le cycle de vie : la relation ventes-temps
Le concept de cycle de vie, emprunté au domaine du marketing, met en relation l’évolution des
ventes ou de la demande dans un secteur avec le temps. Le cycle de vie ne fait qu’appliquer aux
domaines de la stratégie de l’entreprise la notion de vieillissement, en distinguant les diverses
phases qui vont de la naissance à la mort. On reconnaît généralement quatre phases : le lancement
(également désigné comme phase d’émergence ou d’introduction), la croissance, la maturité, le
déclin.
1. Présentation du cycle de vie d’un DAS
Les phases peuvent se distinguer séquentiellement par le taux de croissance des ventes :
– moins de 10 % dans la phase de lancement ;
– supérieur à 10 % dans la phase de croissance ;
– à nouveau inférieur à 10 % en phase de maturité ;
– négatif en phase de déclin.
Figure 4.2. Les quatre phases du cycle de vie
Dans la phase de lancement, l’activité étant nouvelle, les produits encore mal distribués, la
demande démarre lentement ; dans la phase de croissance, le marché s’élargit du fait de la
familiarisation des consommateurs, de la communication et de la distribution améliorée ; le marché
arrive ensuite à saturation, la concurrence est forte du fait de l’arrivée de concurrents et les ventes
stagnent ; enfin, le marché se lasse, des innovations apparaissent et le déclin de l’activité
vieillissante s’amorce.
2. L’identification des phases
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Les indicateurs significatifs de la gestion varient en fonction de la phase du cycle dans laquelle se
trouve l’activité. Même si les situations varient d’une activité à l’autre, il est possible d’indiquer
les grandes tendances suivantes (tableau 4.1).
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Tableau 4.1. Les indicateurs et phases du cycle de vie
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Lancement Croissance Maturité
Résultat
négatif ou nul
Coût de revient unitaire
Prix de vente
Marge unitaire
Liquidités
Endettement
élevé
élevé
négative
fort besoin
élevé
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Part de marché
forte, tendance
à l’accélération
faible
Croissance du marché
Déclin
exponentielle
faible
négative
forte
positif,
en croissance
en diminution
en diminution
positive
équilibre
moyen
forte
élevé,
en stabilisation
faible
en diminution
positive
excédent
nul
faible
faible
en hausse
en hausse
en diminution
équilibre
nul
Mettant en relation les ventes avec le temps, le concept de cycle de vie n’explique rien d’autre que
le phénomène d’apprentissage (lancement), d’engouement (croissance), de lassitude (maturité) et de
vieillissement (déclin). Son pouvoir explicatif est donc limité.
On notera par ailleurs que le cycle de vie des secteurs et le cycle de vie des technologies sont liés
car, d’une part, le cycle de vie du secteur est conditionné par le cycle de vie que connaissent les
technologies et, d’autre part, les choix technologiques de l’entreprise sont influencés par la phase
dans laquelle se trouve le secteur sur lequel elle intervient. C’est parce qu’une technologie se
banalise qu’un secteur se met à décliner (remplacé par une autre activité reposant sur une
technologie nouvelle). C’est parce que le secteur de la sidérurgie traditionnelle est en période de
déclin que les entreprises ne lui font pas porter d’importants programmes de recherche et
d’investissements.
Ainsi, une technologie déterminée connaît un cycle de vie qui lui-même commande et est commandé
par le cycle de vie du secteur.
Les périodes de lancement et de croissance d’une activité sont caractérisées, entre autres, par une
relative incertitude technologique. Le choix pour l’entreprise est soit d’essayer d’être parmi les
premiers entrants sur le secteur si elle estime qu’elle pourra y acquérir une place forte et durable
(en image, en courbe d’expérience, en puissance de marché), soit d’attendre pour imiter, si elle juge
que les bastions élevés par les innovateurs seront fragiles et aisés à conquérir à moindre coût. Lors
des phases de maturité et de déclin, lorsque les principales innovations du produit ont vu le jour,
que les marchés sont stabilisés, que les technologies requises sont normées (sauf pour ce qui est des
innovations de procédé), les firmes jouent la carte de la gestion astucieuse de la fin de cycle en
tentant de préserver les marges et, si c’est possible, en ouvrant des micro-niches susceptibles de
retarder la fin du cycle.
D’une activité à l’autre, la durée des phases va différer (figure 4.3).
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Figure 4.3. Le cycle de vie de l’activité
By
D’après J.-Cl. TARONDEAU et Ch. HUTTIN, Dictionnaire de stratégie d’entreprise,
Vuibert, 2e édition, 2006, p. 57.
De plus, rien n’indique que les produits passent nécessairement par les quatre phases. En pratique,
les formes de cycle de vie sont très nombreuses.
3. L’utilité du cycle de vie
En pratique, à quoi sert donc le concept de cycle de vie ? Quatre arguments méritent d’être avancés.
a. L’adaptation des décisions
Le cycle de vie permet tout d’abord aux responsables d’adapter leurs actions en fonction des
phases (tableau 4.2). En effet, selon la phase du cycle de vie dans laquelle ils se trouvent, les
actions stratégiques et opérationnelles différeront.
Tableau 4.2. Le cycle de vie et les actions stratégiques ou opérationnelles
Lancement Croissance
Stratégie type
Fonction clé
expansion par
développement
création du marché
R&D
production
puis marketing
mise au point
du produit
Marketing
publicité,
promotion,
vendeurs à
la commission
Production
mise au point
des méthodes,
sous-traitance
Logistique
externalisée
internalisée
Contrôle
définition
des standards et
calcul des coûts
recherche de
productivité
formation
de l’encadrement
supérieur
recrutement,
heures
supplémentaires,
formation des
personnels de
production
Personnel
Déclin
rentabilisation
retrait
marketing
et distribution
contrôle de gestion
démarrage du
produit suivant
développement de arrêt
variantes
des recherches
distribution très
large, vendeurs
salariés,
communication de
marque
internalisation de
la production en
grandes séries,
investissement,
standardisation
différenciation
concurrentielle,
promotion,
amélioration du
service
distribution
sélective,
augmentation des
prix, arrêt des
promotions
sous-traitance,
réduction des
délocalisation,
coûts, procédures
suivi des stocks,
de routine, petites
liquidation des
séries
équipements
réduction des
suivi des stocks de
stocks de produits
produits finis
finis
analyse des coûts
analyse de la
cachés et décision
valeur
d’arrêt
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Recherche et
développement
Maturité
cercles de
productivité et de transfert ou départ
qualité
b. L’action sur le cycle de vie du DAS
Ensuite, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, la connaissance du cycle de vie permet de
contrarier le déroulement du cycle de vie (figure 4.4). En effet, quel responsable d’activité ne
souhaite pas l’éternité pour les domaines dont il a la charge ? Ses actions viseront donc à :
– raccourcir la phase d’introduction (A) ;
– accélérer et prolonger le processus de croissance (B) ;
– allonger le plus possible la phase de maturité (C) ; ou relancer le produit en lui donnant une
deuxième jeunesse (D) ;
– retarder et ralentir le déclin (E).
Figure 4.4. Les actions visant à contrarier le cycle de vie « normal »
c. La synchronisation des activités
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Le cycle de vie conduit enfin à coordonner les développements des différentes activités et à passer
d’une gestion de domaine à une gestion de portefeuille d’activités. Pendant la phase de croissance
de l’activité 1, les recherches et la mise au point de l’activité 2 seront effectuées. L’activité 2 sera
en croissance dans la phase de maturité de l’activité 1 et se trouvera en maturité lorsque l’activité 1
entamera son déclin (figure 4.5).
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Figure 4.5. La coordination des cycles de vie des activités
d. Le choix des DAS à fort taux de croissance
La rentabilité étant liée au taux de croissance du secteur, l’entreprise a intérêt à investir dans les
DAS dont les taux de croissance sont les plus forts (figure 4.6).
Figure 4.6. Le taux de croissance du marché et la rentabilité
Comme d’habitude, cette liaison compte des exceptions. Personne ne nie l’intérêt pour une
entreprise d’exercer son activité dans un secteur en croissance : les cosmétiques valent mieux que
le BTP, les tablettes que les ordinateurs portables. Mais, au-delà de cette réalité, on connaît des
entreprises qui sont peu rentables dans des secteurs en croissance (SAP pour les logiciels intégrés)
et des entreprises rentables dans des secteurs mûrs. Le lien n’est donc pas aussi évident qu’il peut
le sembler à première vue. Il convient par conséquent d’admettre qu’il existe des zones de non-
profit dans lesquelles la croissance est plutôt destructrice de valeur que créatrice de profit. Le
conseil est d’éviter ces zones à tout prix.
Exemples
Si Uber (VTC) est peu rentable dans un secteur qui, lui, croît fortement, JCDecaux est
extrêmement rentable bien que le secteur ait atteint un haut degré de maturité.
4. Un ou des cycles de vie ?
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Lorsque le concept de cycle de vie est utilisé, il convient, pour éviter les confusions, de bien
préciser à quoi l’on fait référence. En effet, en matière stratégique comme en marketing, le concept
de cycle de vie peut s’appliquer :
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Le problème peut être compliqué si l’on introduit la distinction entre ventes et demande.
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En stratégie, le niveau de raisonnement à retenir est, nous semble-t-il, celui du domaine d’activité
stratégique, c’est-à-dire que l’on doit privilégier la demande se rapportant à un couple produitmarché. Le concept de cycle de vie, en dépit de son caractère déterministe et simplificateur, doit
être connu du manager, ne serait-ce que pour tenter de le contrarier à son profit.
B. La droite d’expérience
1. La relation expérience-coût unitaire
L’observation empirique de l’évolution décroissante des coûts des produits dans le domaine
industriel a donné naissance au concept de droite ou courbe d’expérience. Cette relation a une
grande importance sur les stratégies des entreprises.
a. La présentation de la relation
La loi d’expérience stipule que le coût unitaire de la valeur ajoutée d’un produit homogène, mesuré
en unités monétaires constantes, diminue d’un pourcentage fixe et prévisible chaque fois que la
production cumulée double. En clair, plus une entreprise a fabriqué de produits, plus ses coûts sont
compétitifs.
En pratique, voyons les effets d’expérience pour les produits A et B dont les coûts unitaires
évoluent ainsi (figure 4.7) :
Figure 4.7. Le coût unitaire et l’expérience
À chaque doublement de la quantité produite, le coût unitaire diminue de 30 % pour le produit A et
de 20 % pour le produit B. On dira que le produit A possède une pente d’expérience de 70 %, alors
que le produit B a une pente de 80 %.
La représentation graphique donne une courbe décroissante qui devient une droite sur un repère
logarithmique.
b. Les observations empiriques
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Il a été observé que la plupart des courbes d’expérience avaient une pente comprise entre 70 % et
80 %. Une revue de 190 études a montré que les pentes d’expérience étaient de 88 %
pour les voitures, 85 % pour les appareils de télévision en couleurs, 80 % pour l’acier, 50 à 60 %
pour les semi-conducteurs.
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c. Les conditions de vérification de la loi d’expérience
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La relation établie entre l’expérience et les coûts unitaires est essentielle pour l’analyse stratégique
et on comprend l’intérêt qu’elle a suscité. Il convient cependant de préciser les conditions de
vérification de cette relation :
• le terme d’expérience désigne le volume cumulé de la production depuis l’origine du produit
et non sa production annuelle. L’expérience croît même si la production annuelle stagne ou
diminue ;
• la loi d’expérience résulte d’observations statistiques vérifiées dans certains secteurs mais
pas dans tous ; la relation entre l’expérience et le coût unitaire n’est pas automatique. Les
coûts ne diminuent que si les managers ont la volonté de les faire baisser. Il s’agit donc
d’une « loi » volontariste, c’est-à-dire potentielle ;
• l’effet d’expérience ne joue que sur les coûts de la valeur ajoutée (prix de vente moins
charges externes), c’est-à-dire sur ceux sur lesquels l’entreprise exerce un contrôle direct ;
il s’agit des coûts de production, de distribution, d’administration interne à l’entreprise ;
• les coûts sont appréhendés en monnaie constante, de façon que l’inflation ne masque pas le
phénomène ;
• l’effet d’expérience est plus fort au début du cycle de vie, lorsque l’accumulation de la
production est la plus conséquente ;
• une droite d’expérience s’applique à une technologie précise, un changement technique
modifie l’intensité de la relation entre coûts et production cumulée.
On observera ainsi que toute lecture trop « mécanique » de l’effet d’expérience risque de conduire
à des désillusions : le phénomène ne trouve sa raison d’être que sous certaines conditions ; il
convient de les conserver présentes à l’esprit.
d. Les causes de l’expérience
Au-delà du constat empirique d’une relation décroissante entre les coûts unitaires et l’expérience, il
convient de s’interroger sur son origine. Trois phénomènes entre lesquels la distinction n’est pas
toujours aisée expliquent la baisse des coûts :
• L’effet de l’apprentissage. Lié au temps, il se traduit par des économies engendrées par
l’amélioration du savoir-faire de l’entreprise. Cet effet d’apprentissage peut prendre
plusieurs formes :
– la répétition et l’amélioration de l’expertise individuelle des salariés du fait de l’expérience
acquise au fil de la production accumulée ;
– l’amélioration des procédés de fabrication et des processus de traitement administratif, des
circuits de circulation de l’information à mesure que les problèmes apparaissent et qu’une
solution leur est apportée ;
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– la simplification des produits, les aspects superflus ou coûteux étant progressivement
supprimés ou standardisés.
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• L’effet des économies d’échelle, ou effet de volume. Il correspond à la réduction des coûts
unitaires observés lorsque le coût de l’investissement augmente moins proportionnellement
que ses capacités. Ainsi, en matière industrielle, le coût d’un équipement ne croît pas
proportionnellement à ses capacités : le coût par unité produite diminue donc. Le même
phénomène se vérifie dans les domaines administratifs et commerciaux. Les effets d’échelle
se subdivisent en deux grandes catégories :
– l’étalement des charges fixes sur des quantités produites plus importantes ;
– la diminution des frais variables unitaires du fait d’un recours à de meilleurs procédés grâce
à la taille des installations.
• L’effet de l’innovation ou du progrès technique. Il résulte de la recherche et permet de
produire à des coûts moindres. Lorsque l’innovation est importante, il faut considérer que
l’entreprise va, en fait, changer de courbe d’expérience, la relation entre la production
cumulée et les coûts étant bouleversée. L’entreprise réussit alors en « bondissant » d’une
courbe d’expérience à une autre en maîtrisant l’évolution technologique.
L’expérience appelle différentes stratégies
Selon la nature de l’effet d’expérience, les suggestions stratégiques diffèrent. On pourrait
formuler les conseils suivants : accumulez de la production, si l’effet d’apprentissage est
dominant ; accumulez de la capacité de production, si l’effet d’économie d’échelle l’emporte ;
investissez en recherche, si l’effet d’innovation est premier.
e. Les conséquences stratégiques de l’expérience
Les implications stratégiques de la droite d’expérience résident dans la création d’un avantage
concurrentiel en termes de coût, au bénéfice de l’entreprise qui possède la production cumulée la
plus forte, c’est-à-dire en pratique celle qui a la plus forte part de marché. Cet avantage joue dans
un domaine d’activité où les firmes en concurrence utilisent les mêmes technologies de production.
Les préconisations tirées de la courbe d’expérience sont les suivantes :
• l’entreprise qui a la production cumulée la plus élevée possède les coûts unitaires les plus
faibles ;
• l’entreprise qui souhaite se développer doit descendre sur la courbe d’expérience plus
rapidement que ses concurrents et acquérir ainsi un avantage-coût déterminant ;
• l’acquisition de cet atout concurrentiel en termes de coût doit se faire dès le lancement de
l’activité lorsque les effets d’expérience sont les plus forts ;
• l’acquisition de l’expérience implique une augmentation de la part de marché relative qui
reposera sur une politique de prix agressive, elle-même anticipant souvent une baisse des
coûts.
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C’est cette dernière situation qu’illustre la figure 4.8 ; l’entreprise pratique le prix P1 qui
correspond à un niveau d’expérience anticipé E1 auquel elle produit au coût C1 qui lui confère la
marge P1 – C1. Elle peut, lorsqu’elle a atteint le niveau d’expérience E2, maintenir le niveau P1
plutôt que de le baisser. Cela lui permet de réaliser de confortables marges mais présente
l’inconvénient de rendre le secteur attractif pour les concurrents potentiels. Si la concurrence est
menaçante (niveau E2), elle pourra baisser ses prix. C’est ce que le BCG appelle « pratiquer une
ombrelle de prix ».
On comprend bien que les situations stratégiques des entreprises seront fondamentalement
différentes selon leur position sur la droite d’expérience (figure 4.9). Prenons le cas de trois
entreprises concurrentes A, B, C, utilisant la même technologie de production et situées à des
niveaux d’expérience différents. Nous supposons qu’un prix de marché s’impose aux trois firmes.
Figure 4.8. L’expérience et la politique de prix
Figure 4.9. L’expérience et les positions concurrentielles
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La situation et les alternatives stratégiques des trois concurrents peuvent être résumées par le
tableau 4.3.
Tableau 4.3. Les alternatives stratégiques en fonction de la position sur la courbe d’expérience
Entreprise A
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• Descendre la courbe
d’expérience, mais avec
quel moyen ?
• Innover
technologiquement et
changer de droite des
coûts.
• Segmenter le marché en
se différenciant (par le
service, par exemple) et
Alternatives faire accepter aux clients
un prix supérieur. Cela
revient à être gros sur un
petit marché plutôt que
rester petit sur un gros
marché.
• Quitter le secteur avant
qu’il ne soit trop tard en
négociant son retrait avec
d’autres entreprises du
secteur (B ?).
Entreprise C
• L’entreprise C possède
l’expérience la plus
importante du secteur, ce
qui lui confère un
indéniable avantage-coût.
Non seulement elle gagne
plus que ses concurrents
sur chaque unité vendue,
mais en plus elle détient
les parts de marché les
plus élevées.
• L’entreprise C a le plus
de liberté stratégique
compte tenu de sa position
dominante. Deux
• Accumuler de
alternatives en matière de
l’expérience, gagner des
prix, et une obligation de
parts de marché, pour se
veille :
rapprocher du leader et
– politique de prix élevés
avoir une situation
qui engendre des marges
concurrentielle
très importantes et qui ne
comparable :
gêne pas les concurrents.
– par croissance interne en Les liquidités ainsi
développant une politique dégagées peuvent être
commerciale agressive ;
réinvesties dans d’autres
– par croissance externe en activités ;
rachetant une entreprise
– politique de prix
déjà implantée dans le
agressifs, consistant à
secteur (A ?).
éliminer progressivement
• Innover
les concurrents les moins
technologiquement et
performants, quitte à
changer de droite des
augmenter ensuite les prix,
coûts.
une fois le marché assaini.
• Mettre en place une veille
technologique de façon à
ne pas perdre l’avantage
concurrentiel.
• L’entreprise A se situe à
un niveau élevé de la
• L’entreprise B a acquis
courbe d’expérience où ses
une expérience suffisante
coûts unitaires sont
pour avoir un niveau de
supérieurs au prix de
coût inférieur au prix de
marché. Si elle vend au
marché. Elle est rentable,
prix de marché, elle réalise
mais dans une situation de
des pertes sur chaque unité
suiveur.
vendue. Cette position n’est
pas durable.
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Situations
Entreprise B
f. Les limites du concept d’expérience
D’une portée évidemment capitale, il faut cependant noter que la relation entre coûts unitaires et
expérience n’est pas universelle. Son intérêt est réduit ou inexistant lorsque :
• la valeur ajoutée dans le produit est réduite ;
• le produit se trouve en phase de maturité ou de déclin ;
• l’innovation technologique est très rapide et rend de facto tout avantage d’expérience
fugace, ou bien encore, l’innovation, qu’elle soit de procédé ou de produit, périme
l’ancienne formule tout en faisant subir aux coûts une hausse structurelle importante ;
• un concurrent bénéficie d’avantages sans rapport avec son expérience ;
Exemple
L’approvisionnements peut être réalisé à des conditions préférentielles ou un brevet
peut permettre à une entreprise Y de produire pour moins cher qu’une entreprise X.
• les consommateurs sont peu sensibles aux prix et que l’élasticité-prix est faible ;
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• le secteur est sensible à divers éléments de différenciation (service, qualité, etc.) autres que
le prix ;
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• la croissance de la taille de l’entreprise résultant de l’accumulation d’expérience engendre
des surcoûts organisationnels et une rigidité inadaptée à un environnement dynamique ;
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• les pouvoirs publics modifient les structures de coût (subventions, taux d’intérêt) ou les
règles de la concurrence (normes et règlements) ;
• les expériences peuvent être partagées entre plusieurs entreprises par le biais d’alliances ou
de partenariats ;
• le marché sur lequel l’entreprise possède une forte expérience disparaît.
Exemple
Les thermomètres médicaux à mercure ont été remplacés par des thermomètres
électroniques.
Tant du côté de l’innovation technique que du côté des changements de goûts des clients, se trouvent
les principaux obstacles à une stratégie tentant de se reposer durablement sur les effets
d’expérience. Pourrait-on avancer que, à long terme, l’effet d’expérience trouve sa propre limite là
où il devrait engranger le maximum d’efficacité ?
C. La position de leader et/ou l’agilité
1. La vision classique
La part de marché détenue par une entreprise constitue un facteur essentiel de la performance dans
un DAS. C’est un des nombreux résultats tirés d’une base de données constituée pendant de
nombreuses années, le PIMS (Profit Impact of Market Strategy). Cette base de données visait à
étudier les relations entre performance et décisions stratégiques au sein des DAS.
En effet, les parts de marché et la rentabilité sont positivement et fortement corrélées. Cette
relation, souvent mise en avant comme résultat essentiel du PIMS, est présentée dans le tableau
suivant (figure 4.10).
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Figure 4.10. La part de marché et la rentabilité
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Il apparaît ainsi qu’à une part de marché croissante correspond une rentabilité grandissante de
l’entreprise. Ce résultat est un évident plaidoyer pour les stratégies de conquête de parts de marché
et pour les stratégies de développement qui permettent d’asseoir un leadership.
– les économies d’échelle ;
– les effets d’expérience ;
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Plusieurs facteurs permettent de comprendre ces résultats :
– l’aversion des consommateurs pour le risque ;
– le pouvoir de négociation.
Exemple
Jack Welch, l’ancien président de General Electric, affirmait : « Si nous ne sommes
pas les premiers, nous nous retirons. »
La situation de leader peut reposer sur l’accumulation d’expérience, mais aussi sur des
investissements en qualité, sur la maîtrise d’une technologie ou sur une capacité à innover
(figure 4.11).
Figure 4.11. L’attractivité des différents segments de biens d’équipement
Les Échos / Source : Société Générale Equity Research.
2. Une vision renouvelée du leadership
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À l’instar des facteurs de performance vus précédemment, la notion de part de marché n’a pas
manqué, récemment, de faire l’objet sinon de critiques, tout au moins d’analyses plus nuancées.
Deux aspects peuvent être mis en avant.
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a. L’élargissement de la notion de leadership
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Tout en reconnaissant que le leadership fondé sur la part de marché était encore régulièrement
présent dans les discours de tous les chefs d’entreprise – il suffit pour s’en convaincre d’écouter
les déclarations à propos de leur rang mondial, européen ou français –, force est de reconnaître que
la part de marché a perdu une partie de son pouvoir explicatif. La place sur un marché révèle à
l’évidence une situation de force pour une entreprise mais elle présente un double inconvénient : le
premier est de reposer sur une définition de marché, dont on sait qu’elle peut être parfaitement
artificielle, le second est qu’elle n’offre qu’une vision partielle de la situation réelle d’une firme
dans son environnement. On y préfère aujourd’hui l’idée de mindshare(23) (degré de leadership),
plus large, qui tente de mieux repérer la place véritable qu’occupe l’entreprise. On lui attribue trois
facettes :
– la place auprès des clients, on revient ici à la part de marché ;
– la place auprès des investisseurs, qui vont apporter les sources de financement ;
– la place auprès des compétences qui marquera l’attractivité des entreprises auprès des
talents, jeunes ou moins jeunes, qui souhaiteront s’y révéler. L’importance des compétences
dans l’explication des performances confère à cette facette un aspect tout particulier.
L’addition de ces trois analyses révèle la place véritable que l’entreprise occupe, place dont elle
peut, beaucoup mieux qu’avec sa simple part de marché, tirer profit.
b. Business Design et migration de valeur
L’idée de Business Design, ou encore de Business Model, dépasse celle de part de marché. Dans un
sens, elle la critique. Considérer que la part de marché est un indicateur de performance c’est
oublier que sur certains marchés, laminés par la pression des clients, les marges sont réduites
comme des peaux de chagrin. Dans cette perspective, il ne faut pas chercher à élargir sa part de
marché – ce qui conduirait à la mort – mais rechercher le Business Design (le modèle économique)
qui, à un moment donné, s’inscrit dans une zone de profit, c’est-à-dire dans une activité qui
engendre de la valeur pour une entreprise. La preuve de la disparition de la relation directe entre
part de marché et rentabilité est cherchée du côté des grandes entreprises qui tout en étant des
acteurs majeurs sur leur marché, ont cependant connu des difficultés financières : General Motors,
Ford, United Airlines, Kodak, Sears. De sorte que le choix d’un bon Business Design permet de
gagner de l’argent, à la limite, quelle que soit la part de marché. Et, pour en finir, les zones de profit
d’un secteur économique changent de place. On observe une migration de la valeur. L’entreprise
doit perpétuellement (tous les cinq ans ?) réinventer son Business Design pour demeurer dans la
zone de profit.
Exemple
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Coca-Cola a réalisé pendant longtemps de solides profits en vendant sa formule
chimique à des embouteilleurs qui distribuaient tout en assurant un marketing mondial.
Puis la marque a compris que la valeur changeait de place. Elle s’est donc
délibérément orientée vers la reprise de ses embouteilleurs afin de se rapprocher du
client final.
4$
Avec toutes ces considérations, on comprend bien que l’indicateur de part de marché, trop statique,
mérite d’être prolongé(24). L’agilité l’emporte sur la force comme facteur explicatif de la
performance.
By
Un modèle de profit est une architecture stratégique qui permet à une entreprise d’être rentable en
se positionnant sur un gisement de valeur. Voici quelques exemples :
– les solutions clients : General Electric, HP ;
– une pyramide de produits : Swatch, Mattel ;
– l’intermédiation : Schwab ;
– le facteur temps : Intel, Sony ;
– l’esprit d’entreprise : 3M, ABB ;
– une norme de fait : Microsoft, Oracle ;
– une marque : Coca-Cola, Nike ;
– un leadership local : Starbucks, Wal-Mart ;
– un faible coût : Southwest, Dell ;
– une part de marché relative : Procter & Gamble, Philip Morris.
D. L’innovation
Sur un plan stratégique, l’innovation constitue un facteur de performance important pour les
entreprises dans la mesure où elle constitue une source d’avantage concurrentiel. L’innovation est à
l’origine des ruptures qui bouleversent les positions relatives des entreprises en termes de part de
marché. Cela est vrai tant au plan national qu’international.
Exemple
Les positions actuelles d’Apple, de Nespresso, d’Amazon, de Google ou encore de
L’Oréal ne se comprennent qu’au travers du filtre explicatif du rôle joué par
l’innovation.
1. La diversité des formes d’innovation
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Comme le montrent les exemples cités, l’innovation est diverse dans sa nature. Le point commun
entre toutes les innovations réside dans le caractère de nouveauté de l’offre faite au marché. Mais
sur un plan stratégique, l’innovation n’a d’intérêt que si elle crée de la valeur pour le client qui
accepte d’en payer le prix. Dans de très nombreux secteurs, l’innovation est une question cruciale
liée à la survie de l’entreprise. Ainsi, Kodak, par défaut d’innovation, a perdu sa place sur le
marché des appareils photographiques ; Apple, dans le domaine des produits électroniques, des
ordinateurs et logiciels informatiques, maintient la sienne grâce à une innovation constamment
renouvelée. L’innovation se distingue de l’invention en intégrant la mise sur le marché et la
commercialisation.
By
a. La double réalité de l’innovation(25)
L’innovation est à la fois un processus (celui qui consiste à innover) et le résultat de ce processus,
c’est-à-dire le produit fini ou le service nouveau mis sur le marché. Cette distinction permet de
différencier les innovations de processus des innovations produits.
Exemples
Si Amazon a innové par rapport à la Fnac, sur le plan du processus de distribution des
produits, en revanche, les livres ou DVD livrés étaient identiques à ceux des
concurrents. Mais, en lançant son Kindle, l’entreprise réalise une innovation produite
sur le marché des liseuses. Les compagnies aériennes low cost ont, quant à elle,
innové surtout sur le processus (vente des billets en ligne) et, marginalement, sur le
produit. Il en est de même pour Free.
b. La double origine de l’innovation
L’innovation trouve à la fois une origine interne dans la recherche et une origine plutôt externe
induite par l’étude du marché, des attentes et des besoins des consommateurs.
Le premier type, dit technology driven ou technologie push, est le résultat des investissements faits
par les entreprises en recherche fondamentale, en invention et en développement. Cette stratégie est
illustrée par les forts investissements faits par les entreprises en recherche (3 % à 10 % de leur
chiffre d’affaires) dans les secteurs de l’informatique, du numérique, dans l’industrie de la santé ou
encore de l’automobile, par exemple.
Figure 4.12. Les origines de l’innovation
Le second type, dit market driven ou market pull, repose sur l’idée que seul ce qui répond aux
attentes du marché peut réussir. Sans appropriation de l’innovation par le marché, pas de stratégie
gagnante. Cette approche fait également la part belle au rôle de l’usage des produits par les
consommateurs. Dans ces entreprises (alimentaires, cosmétiques) les études de marché sont
essentielles et constituent un vecteur d’innovation.
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Les deux approches ne sont pas exclusives.
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Exemple
By
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Chez L’Oréal, la recherche, caractérisée par un très fort taux de dépôt de brevets, et le
marketing constituent les deux activités prioritaires de la chaîne de valeur. L’entreprise
investit à la fois en amont et en aval. Ce qui est atypique, c’est la manière dont elle
parvient à associer et à faire travailler ensemble, à la fois chercheurs et marketeurs :
dès que les chercheurs identifient, très en amont, une source d’innovation, les
responsables marketing sont associés. Il s’agit là d’une compétence organisationnelle
de coordination ancrée dans la culture de l’entreprise.
c. L’innovation-rupture et l’innovation incrémentale
L’innovation peut-être distinguée selon qu’elle introduit une rupture ou selon qu’elle est
incrémentale. La distinction entre les deux repose sur l’importance du changement. La première est
fondée sur un changement complet, radical de technologie, de modèle d’affaires et de produit tandis
que la seconde est progressive, incrémentale.
Exemple
Le passage de la photographie argentique au numérique, ou encore de la téléphonie
analogique à la téléphonie numérique, constitue un exemple d’innovations de rupture.
En revanche, le changement de format d’un magazine ou une nouvelle version d’un
logiciel relève de l’innovation progressive.
d. L’innovation fondée sur le modèle d’affaires soutenant la stratégie
La presse gratuite et les sites Internet financés par la publicité où le client apparent n’est pas le
payeur constituent des innovations qui portent essentiellement sur le modèle d’affaires. La réussite
de la stratégie repose alors sur la viabilité de ce modèle. Une innovation peut donc porter sur des
dimensions distinctes (et non limitées) et être, pour chacune d’entre elles, source d’une plus ou
moins grande nouveauté.
L’étoile de l’innovation (figure 4.13) distingue cinq dimensions dans l’innovation :
– la technologie. Il s’agit, par exemple, des automobiles électriques ;
– le produit dans tous ses aspects (nom, design, conditionnement, fonctionnalités, etc.) ;
– le processus de réalisation mais aussi de distribution. Ce peut être la distribution en ligne de
livres rares ;
– le client ;
– le modèle d’affaires, le Business Model.
By
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Figure 4.13. L’étoile de l’innovation
Exemple
Les montres de la marque Swatch illustrent bien que l’innovation peut porter sur ces
différentes dimensions : innovation sur le nom, le design, le produit, le réseau de
distribution, la technologie, etc.
e. L’innovation Top-down et Bottom-up
Contrairement à ce que l’on pense généralement, l’innovation n’est pas dans les entreprises –
notamment les grandes –, le monopole de la direction générale ou des services de R & D. Les
travaux des sociologues de l’organisation, dont Norbert Alter, montrent que l’innovation résulte
d’un processus souvent inattendu et jamais programmable, de mouvements peu ordonnés, qui
reposent sur la transgression des règles et des normes. L’innovation est non seulement la résultante
des services de recherche mais aussi du fonctionnement quotidien de l’entreprise, de ses erreurs et
de ses échecs. L’innovation est, en ce sens, une activité banale, voire « ordinaire »(26).
Exemples
Les fameuses Bêtises de Cambrai sont nées, selon la légende, d’une erreur de
manipulation d’un apprenti. Ce cas est loin d’être unique dans le domaine culinaire. La
création de la première montre Swatch est également édifiante puisqu’elle n’était pas
programmée. Elle ne relevait donc pas d’une stratégie délibérée d’innovation, d’un
plan réfléchi ou d’une vision fulgurante.(27)
2. La courbe en S de la diffusion de l’innovation
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On identifie généralement trois phases dans la diffusion d’une innovation. Dans la première période
d’apprentissage du marché, plus ou moins longue, le nombre d’adopteurs (les first ou early
adopters, technophiles, veulent être les premiers à acheter et adopter le produit) est limité ; dans la
deuxième phase, un développement exponentiel se produit et la diffusion de l’innovation se
généralise très rapidement. Le rythme important de croissance qui caractérise cette phase pose des
problèmes sérieux sur le plan de la production et des services supports qui doivent « suivre » le
développement de la demande ; enfin, la troisième phase est classiquement une phase de maturité.
On peut faire le parallèle entre cette courbe en S et le cycle de vie des produits ou des domaines
d’activités stratégiques (DAS).
By
Exemple
4$
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Ce phénomène s’observe parfaitement sur les applications de réseaux sociaux sur Internet.
Facebook a connu une première phase de relative confidentialité sur les campus
américains, puis son utilisation a explosé par effet de bouche à oreille et de réseaux au
plan mondial. Actuellement, on peut considérer que l’application, au sens classique,
atteint la phase de saturation et que de nouvelles fonctionnalités sont nécessaires pour
satisfaire les clients.
Figure 4.14. La courbe en S de diffusion de l’innovation
La durée des phases est variable selon les innovations. Elle peut être de quelques semaines sur les
applications de réseaux sociaux ou de plusieurs années comme pour les machines à laver la
vaisselle ou l’e-learning.
Exemple
Les innovations de rupture foudroient le marché ancien en un temps record. Le modèle
de l’innovation ne comporte que deux segments : les testeurs et la majorité du marché.
Seules des stratégies audacieuses de réponse ultrarapide permettent aux anciens
acteurs d’éviter la mort subite. Garmin et TomTom ont disparu avec l’arrivée des
applications gratuites de navigation(28).
3. La stratégie de premier entrant ou la stratégie du suiveur
La bataille juridique mondiale qui oppose Apple, créateur de l’iPhone, et Samsung accusé d’avoir
copié ses brevets en produisant le Smartphone Galaxy illustre bien le dilemme qui oppose les
stratégies de first mover et de suiveur (de copieur, dans le cas évoqué).
Les deux stratégies possèdent des avantages comme des inconvénients.
First Mover
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Tableau 4.4. La stratégie de first mover et la stratégie de suiveur
By
Avantages
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Effet d’image de l’innovateur auprès
des consommateurs.
Attractivité des ressources rares,
notamment humaines.
Effet d’expérience et économie
d’échelle quand le marché croît.
Création de barrières à l’entrée pour
les suiveurs.
Coûts internes de l’innovation.
Coûts de diffusion de l’innovation
dans le public (communication).
Risques importants liés à l’incertitude
quant à l’acceptation de l’innovation
par le marché.
Inconvénients
Suiveur
Bénéfice de l’expérience tirée des
erreurs et succès du first mover.
Bénéfice du développement du marché
dont il n’a pas financé le
développement.
Coût de développement plus faible du
fait de l’imitation.
Barrières à l’entrée.
Absence d’effet d’innovation sur
l’image.
Retard dans les processus
d’apprentissage et d’innovation.
4. Les conditions organisationnelles de l’innovation
Pour qu’une entreprise soit innovante, différentes conditions doivent être réunies : il faut bien
évidemment des ressources financières pour financer la recherche et des ressources
humaines, notamment des ingénieurs, mais on néglige souvent les conditions organisationnelles de
l’innovation notamment, en ce qui concerne la structure et la culture de l’entreprise (chapitre 7).
Sur le plan structurel, une structure de type « organique » est généralement recommandée :
– décentralisation de la décision ;
– organigramme plat ;
– transversalité de la circulation de l’information ;
– travail en équipe ;
– bureaucratie peu développée.
Sur le plan culturel, elle implique :
– le droit à l’erreur ;
– une communication orale et une culture de l’informel particulièrement développées ;
– une valorisation de l’innovation ;
– une grande liberté laissée aux équipes.
Exemple
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Les entreprises du numérique (Apple, Google) sont fréquemment mises en avant pour
leur organisation et culture innovatrices. Google a ainsi mis en place une organisation
du temps pour ses ingénieurs qui peuvent travailler une journée par semaine en toute
liberté sur leur projet.
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Figure 4.15. Les conditions d’une stratégie d’innovation efficace
Ces éléments sont importants à prendre en compte car si l’existence de ressources financières et
humaines constitue la condition nécessaire de l’innovation, elle ne saurait être suffisante. Il s’agit là
en fait d’une question d’alignement stratégique : une entreprise avec une stratégie qui repose sur
l’innovation doit aligner sa structure et sa culture.
Exemple
Dans le cas de Renault, doté d’un centre de recherche exceptionnel (Technocentre) qui
regroupe plusieurs milliers d’ingénieurs et de chercheurs, la problématique de
l’innovation se pose probablement davantage sur le plan organisationnel.
L’innovation est de moins en moins une question traitée au sein de l’entreprise et de plus en plus
dans le cadre d’un écosystème d’affaires. Alors que la R&D a longtemps été gérée en interne, les
entreprises sont de plus en plus nombreuses aujourd’hui à nouer des partenariats pour développer
leur potentiel d’innovation. Ainsi, selon une étude menée par IBM(29) dans 64 pays, 53 % des
entreprises collaborent avec d’autres entreprises sur des projets d’innovation et elles sont les plus
innovantes. La compétence clé devient alors aussi la capacité à développer une transversalité intraentreprise (R & D/production/marketing) et interentreprises entre des partenaires. La gestion
alternée de tels projets d’innovation par les partenaires constitue un facteur clé de succès. De
manière encore plus large, il est possible de faire appel à des fournisseurs, à des clients, à des
experts, voire au grand public. On parle alors d’open innovation, de crowdsourcing.
Notons enfin qu’il convient que la stratégie d’innovation soit en cohérence avec la stratégie
business du domaine d’activité stratégique et qu’elle renforce le positionnement choisi. Pour les
stratégies low cost, l’innovation porte essentiellement sur la réduction des coûts qui permet la
baisse des prix. Pour les stratégies de différenciation, l’innovation pourra porter sur tous les
aspects de l’offre, susceptibles de créer ou de renforcer l’innovation (service, communication,
fonctionnalités du produit, etc.).
Tableau 4.5. Quelques exemples de stratégies
Stratégie d’innovation
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Stratégie
business
Réduction des coûts par numérisation des
processus
Différenciation
Innovation technologique
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B for Bank
Renault (voiture
électrique)
LCL
Innovation de service au client
Innovation portant à la fois sur le design
Best seller (boussole
(avantage valeur) et sur le processus de
Ikea
stratégique)
fabrication (avantage de coût)
Innovation sur les fonctionnalités des sites
Long tail (longue traîne)
Amazon
Internet
Océan Bleu
Innovation de conception de la taille de l’avion Airbus A380
By
Concentration
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Low cost
Exemples
E. La mobilisation des compétences de l’entreprise
Dans un DAS, la performance peut aussi résulter de la maîtrise de compétences particulières.
Après avoir rappelé les fondements de cette approche, nous étudierons deux cas particuliers de
compétences : la maîtrise du temps et la maîtrise de la qualité.
1. Les fondements du modèle Resource Based Management
Ce modèle, ou cette idée pour dire les choses plus simplement, a déjà été abordé en fin de
chapitre 3. Son ambition est grande, puisqu’il ne vise pas moins – selon ses défenseurs – qu’à
unifier toutes les perspectives qui foisonnent autour de la notion de stratégie. Comme nous l’avons
déjà vu, il repose essentiellement sur un accent résolument placé sur l’aspect interne de la firme au
détriment de l’analyse de l’environnement. Le modèle dénie toute valeur à une démonstration reliant
l’avantage concurrentiel à une position dominante, position elle-même assise sur un marché offrant
beaucoup d’attraits. La critique consiste à affirmer que la vision d’une entreprise détentrice d’un
portefeuille de couples produits / marchés (perspective extérieure) est erronée car elle s’applique à
un moment précis d’une histoire (aujourd’hui) qui par définition est dynamique. Tout au contraire,
l’avantage concurrentiel d’une firme serait dans sa capacité à détenir, valoriser et conserver des
ressources que les concurrents ne possèdent pas (perspective interne). C’est bien le sens du
mouvement qui est inversé. On passe d’une logique externe / interne (en fonction de la nature de
l’environnement, développons telle ou telle ressource) à une logique interne/externe (voyons sur
quels marchés il sera possible de tirer le meilleur parti des compétences existantes). On remarque
que le modèle repose sur des hypothèses assez précises telles que : le présent, en termes de marché,
n’a que peu d’importance pour éclairer l’avenir, les entreprises ne s’adaptent pas de manière
évolutive à un environnement qu’elles ont au préalable analysé ; c’est l’environnement et son
évolution qui justifient ou non, après coup, le choix d’une stratégie ; l’incertitude est maîtresse.
a. La définition des compétences
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Les compétences sont des ensembles de savoirs et de savoir-faire qui vont des connaissances
précises possédées par un individu, à des maîtrises particulières dans des fonctions de gestion (en
recherche/développement, en marketing, etc.) et enfin à la maîtrise de processus interfonctionnels,
donc parfaitement transversaux (la qualité, la motivation du personnel, le service client). Les
compétences détenues peuvent ou non apporter un avantage concurrentiel à la firme. Pour que ce
soit le cas, six conditions doivent être réunies :
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• la valeur : la compétence doit offrir une valeur à l’organisation en lui permettant de mener
des actions que les autres ne peuvent entreprendre de façon identique ;
• la rareté : la compétence ne doit pas être directement à la disposition de tous ;
• la non-imitation : les concurrents ne peuvent imiter la compétence ;
• la longévité : la compétence doit placer l’entreprise dans une bonne situation sur une durée
longue ;
• la non-substitution : s’il est possible de substituer une compétence alternative à celle que
l’entreprise détient, alors la première compétence ne vaut rien ;
• l’appropriation : les résultats engendrés par la compétence doivent pouvoir faire l’objet
d’une appropriation par l’entreprise.
Exemples
L’OFUP a fait reposer son développement sur une compétence particulière : la
connaissance du milieu étudiant. La stratégie de l’afficheur JCDecaux est fondée sur la
maîtrise d’une compétence relationnelle de négociation avec les collectivités.
b. Les implications stratégiques
L’avantage concurrentiel de l’entreprise ne trouvant pas sa source dans les caractéristiques d’un
environnement mais dans la qualité des compétences maîtrisées, le diagnostic commence par
l’interne avec un audit approfondi des compétences. Ce n’est pas chose aisée car les compétences
qui procurent un avantage ne sont pas toujours facilement repérables et mesurables. Ensuite vient
l’externe. Mais ici, contrairement aux prescriptions de l’intensité concurrentielle de Porter, on ne
détermine pas de manière objective l’intérêt faible ou fort d’un secteur, on mesure les compétences
qui, pour la firme et pour elle seulement, ont de bonnes chances de devenir un avantage
concurrentiel en fonction des données de l’environnement. L’analyse externe n’est présente que pour
vérifier le regard porté sur les compétences.
La question qui se pose pour une entreprise ayant constaté un déficit de compétences est de définir
comment en assurer l’intégration de nouvelles. Ces compétences peuvent être fonctionnelles
(technologiques, financières, marketing, etc.) ou managériales.
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Les entreprises disposent de trois orientations pour accéder aux compétences qui leur font
défaut(30) : le développement, l’acquisition, l’alliance. La première alternative stratégique est
interne, alors que les suivantes sont externes ; elles ne sont pas exclusives les unes des autres et
sont combinées par les entreprises. Pour choisir entre ces trois possibilités, quatre critères sont pris
en compte par les managers : le délai (important aujourd’hui, dans une perspective de réactivité), le
coût, la maîtrise par l’entreprise (sa capacité à s’approprier la compétence) et enfin la réversibilité
(ce que l’entreprise peut faire en cas d’échec).
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Tableau 4.6. Une comparaison des modes d’intégration de nouvelles compétences
D’après V. CLAUDE-GAUDILLAT
• Le développement : le développement en interne par l’entreprise de nouvelles compétences
peut être long et coûteux, notamment si ces compétences ne s’inscrivent pas dans le sentier
de développement passé de l’entreprise. En cas d’insuccès, la réversibilité des
investissements faits est réduite. En revanche, cette solution permet une grande maîtrise des
compétences développées, leur appropriation par l’entreprise étant particulièrement forte.
Citons le cas d’une entreprise de services qui, consciente de la faiblesse de son système
d’information et de son caractère désormais stratégique, a choisi le développement interne
d’un ERP plutôt que le recours aux solutions disponibles sur le marché.
• L’alliance : c’est un mode d’intégration de nouvelles compétences rapide et le coût peut en
être limité, comparativement aux deux autres alternatives. Le succès dépend de la capacité
de l’entreprise à maîtriser rapidement les contraintes de l’alliance. La réversibilité de la
décision est élevée et dépend des conditions de sortie de l’alliance. L’alliance est, par
exemple, fréquemment utilisée dans le secteur automobile pour acquérir des compétences
techniques ou bien pour assurer la maîtrise rapide de compétences sur de nouveaux marchés
(l’alliance Renault-Nissan).
• L’acquisition : le coût de l’acquisition externe de nouvelles compétences est souvent très
élevé, de nombreux acteurs du secteur étant demandeurs, comme nous l’a montré le secteur
des télécoms. Mais ce coût peut être compensé par le temps économisé, les délais
d’acquisition pouvant être très rapides. Compte tenu de la chronocompétition stratégique
que se livrent les entreprises, cet avantage est essentiel, le surcoût supporté par l’acquéreur
devant être compensé par le temps gagné. Mais la maîtrise des nouvelles compétences peut
être moindre qu’avec le développement interne. La possibilité de cession en cas d’échec est
probablement plus forte et donc la réversibilité plus grande. Lorsque Rossignol (fabricant
de skis) a voulu développer ses compétences dans le domaine des chaussures de ski, il l’a
fait par acquisition d’une entreprise existante.
2. La compétence « maîtrise du temps »
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Il appartient encore aux experts du BCG d’avoir mis l’accent sur la source de performance qui
pouvait se trouver dans la maîtrise du temps. Rien ne sert d’être puissant, il faut en plus être
capable d’observer, de comprendre vite les souhaits des clients, de choisir rapidement une réponse
adaptée et enfin de mettre en œuvre la proposition dans les meilleurs délais. Voilà ce qu’est la
maîtrise du temps. Elle est cependant relative. Il n’est pas obligatoirement nécessaire d’être le
premier (essuyer les plâtres n’est pas rentable à tous les coups !) mais de faire une offre adaptée
avant que les concurrents aient pu réagir.
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Exemples
By
De nombreuses entreprises sortent victorieuses de la time-based competition. Quand
Renault faisait émerger, avec l’Espace, le marché des monospaces en Europe, Darty
asseyait son développement sur l’idée originale – à l’époque – d’un service aprèsvente sans faute.
Pour devenir maître du temps, il faut retenir délibérément trois orientations :
• mettre en place un système de création de valeur flexible et réactif : les délais engendrés
par les contraintes des procédures, par les soucis de qualité, par les difficultés structurelles
doivent être minimisés ;
• offrir un meilleur délai à ses clients permet de justifier un prix plus élevé : tout l’art consiste
à faire valoir aux clients les avantages qu’ils retirent d’une réponse rapide à leurs besoins ;
• apprendre à surprendre les concurrents car ceux-ci peuvent également se lancer dans la
concurrence par le temps.
La chronocompétition
Dans leur ouvrage It’s not the big that eat the small... It’s the fast that eat the slow, les auteurs(31)
suggèrent quatre orientations majeures pour gagner la chronocompétition :
1. Réfléchir vite.
2. Décider vite.
3. Être présent sur le marché plus rapidement que les concurrents.
4. Maintenir la rapidité.
Finalement, le temps est un accélérateur des autres sources de performance : des coûts réduits c’est
bien ; des coûts bas avant les autres, c’est mieux ; une qualité sans défaut c’est bien, obtenir le
célèbre Malcolm Baldrige Quality Award le premier, c’est mieux.
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Les entreprises sont ainsi conduites à tout mettre en œuvre pour mieux maîtriser le temps et réduire
leurs délais de réaction. L’élaboration de systèmes d’information mondiaux dans les grands groupes
grâce aux technologies d’Internet et d’intranet, la constitution d’équipes pluriculturelles au sein
desquelles le métissage aide puissamment à réagir vite sont, par exemple, des points d’appui
indispensables aujourd’hui pour avoir une chance de sortir victorieusement de la
chronocompétition.
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Cette maîtrise du temps peut constituer une source d’avantage concurrentiel sur deux plans :
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• Celui de la chronocompétition opérationnelle : organiser la production en « juste-àtemps », innover avant les autres, répondre plus vite que les concurrents à une demande de
devis, à un appel d’offre, livrer plus rapidement, être plus réactif face aux questions des
clients, répondre aux courriels en moins de 24 heures, etc.
• Celui de la chronocompétition stratégique : innover avant les autres, infléchir ou changer
rapidement de stratégie à la suite d’une rupture technologique ou de l’arrivée d’un nouvel
entrant, etc.
Dans le premier cas, ce sont les processus opérationnels qui sont en cause, alors que dans le
second, c’est la capacité de la direction générale à se remettre en cause qui est testée.
Selon les DAS, les exigences en matière de réactivité sont différentes, même si l’on observe une
tendance globale à l’accélération.
En croisant les exigences de réactivité opérationnelle et stratégique, on peut situer chaque secteur
auquel l’entreprise est confrontée dans la matrice de réactivité sectorielle ci-après.
Dans le cas des groupes diversifiés, l’entreprise se devra de vérifier qu’elle maîtrise bien les
compétences de réactivité correspondant aux exigences de chaque DAS.
La compétition à l’heure du digital
1. Énorme pression sur les prix et les marges.
2. Les concurrents émergent de partout.
3. Le gagnant remporte toute la mise.
4. La victoire des modèles plug and play.
5. Grande pénurie des talents nécessaires.
6. Convergence mondiale de la demande et de l’offre.
7. Naissance et disparition à haute vitesse des business models(32).
3. La maîtrise de la qualité
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Sur le long terme, le facteur le plus important affectant la performance d’un domaine d’activité
stratégique est la qualité relative des produits ou des services (figure 4.16). Ce résultat du PIMS,
trop rarement cité, est d’une grande importance. Il justifie les stratégies reposant sur des politiques
de qualité.
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Figure 4.16. La qualité relative et la rentabilité
La relation entre qualité et rentabilité peut être expliquée par :
– la fidélité plus grande des clients ;
– les achats répétés ;
– la moindre vulnérabilité des produits et services de qualité aux guerres des prix.
On sait donc que la qualité est une variable stratégique dont le poids est décisif sur les marchés où
la concurrence s’aiguise. Dans de nombreuses branches (automobile, électronique, hi-fi,
photographie, etc.), des politiques de domination mondiale sont mises en œuvre qui s’appuient
certes sur des avantages de coûts, mais qui se fondent plus encore sur une qualité élevée recherchée
par les acheteurs éventuels.
La notion élargie de qualité
La qualité, dans une perspective de domination stratégique, ne correspond pas à la simple absence
de défaut. Selon le Bureau des temps élémentaires (BTE), la qualité d’un produit – donc du service
qu’il procure – se définit comme son aptitude à satisfaire les besoins des utilisateurs. Entre autres,
le prix est une performance du produit comme valeur d’acquisition d’un service. Ce qui signifie que
la satisfaction du client est compatible avec la rentabilité et le développement de la firme.
Le concept contemporain de qualité prend en compte deux dimensions :
– la satisfaction du client ;
– la diminution ou la stabilisation des coûts engagés pour obtenir cette satisfaction.
La qualité est donc l’affaire de tous et de chacun dans la firme. Elle est le résultat d’un travail
toujours recommencé, d’un contrôle rigoureux et d’une véritable traque des coûts de non-qualité.
La question de la qualité se pose de façon inédite et avec une acuité particulière sur Internet.
Exemple
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La qualité du service Amazon.com ne se mesure pas seulement au travers de la qualité
du site Internet mais aussi, et surtout, par la qualité de la logistique mise en œuvre
pour satisfaire les commandes.
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Le contrôle de la qualité
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Le contrôle est plus ou moins largement pratiqué selon la conception, étroite ou élargie, de la
qualité :
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– le contrôle-constat consiste à vérifier a posteriori, au stade de la fabrication, la conformité
de certains éléments du produit par rapport à des normes internes ou externes. On utilise
généralement des méthodes statistiques, les sondages par exemple, pour mener à bien cette
tâche et pour éliminer les rebuts ;
– le contrôle-assistance permet d’assurer, grâce à un service dédié, la liaison entre les
responsables de la conception et de la fabrication du produit (bureaux d’études, des
méthodes par exemple) et les gestionnaires commerciaux. Il s’agit alors de corriger des
anomalies dont se plaignent les clients ;
– le contrôle-conseil a priori ne consiste plus en opérations rétrospectives mais, au contraire,
en opérations prospectives.
On tente d’apprécier les attentes de qualité exprimées par les consommateurs et de convertir ces
caractéristiques qualitatives en paramètres mesurables et contrôlables tout au long du processus de
conception et de production du produit.
La démarche qualité dans la filière bovine
– Respect du bien-être animal.
– Traçabilité des animaux.
– Pas d’utilisation de farine animale.
– Sélection des meilleurs morceaux par des « maîtres-bouchers ».
– Absence de traces de viande de cheval.
– Certification des sites par leur conformité à la famille des normes ISO 9000.
– Accréditation internationale (AFAQ).
– Sécurité alimentaire (mise à disposition d’un numéro vert).
Le TQC (Total Quality Control)
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Conception
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Le TQC, terme qui a connu un grand succès au cours des dernières années, prolonge et systématise
les tentatives précédentes. Selon son promoteur, Ishakawa, le TQC résulte de la participation active
de l’ensemble du personnel de l’entreprise et non plus seulement des spécialistes. Il ne se limite
pas aux opérations que nous venons de décrire, mais il consiste à rechercher en permanence à
optimiser la qualité, le coût de revient et les délais pour répondre aux attentes des clients.
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Un véritable « culte de la qualité » doit présider à la naissance d’un produit nouveau, comme
d’ailleurs à la production-distribution de la gamme actuelle.
Un tel culte s’exprime concrètement par l’élaboration d’un contrat d’« assurance-qualité » qui a
pour objet de maintenir toutes les activités de la firme sous la pression constante des désirs de la
clientèle.
Mise en œuvre
Garantir la qualité consistera, par exemple, à rédiger un manuel de qualité qui décrit les
spécifications techniques et les procédures mises en œuvre. Celles-ci serviront de référence pour le
suivi des produits et pour le contrôle de la qualité. On écrit ce qu’il faut faire, on informe, on garde
la preuve de ce que l’on a fait. En un mot, on construit la « confiance ».
La compétence de tout le personnel est améliorée par la formation. Quant à sa motivation, elle est
entraînée par une participation aux décisions, particulièrement à l’intérieur des cercles de qualité
où chacun peut valoriser ses aptitudes.
On aboutit alors à un véritable système de gestion de la qualité qui a pour objet :
– de déceler systématiquement les causes des erreurs observées ;
– de mettre en œuvre les actions correctrices dans tous les domaines et toutes les fonctions ;
– d’informer des résultats obtenus, en publiant des tableaux de bord de la qualité, qui visent à
motiver le personnel et à pourchasser les coûts de non-qualité.
Même si les cercles de qualité, qui ont constitué en leur temps la base de la pyramide de cette
démarche, ont aujourd’hui pris des rides, il demeure que la recherche de la qualité reste une action
de toujours. Valeo en fait une de ses orientations stratégiques (aux côtés de présence mondiale, de
technologie avancée et de coût compétitif).
La méthode « six sigma »
Elle tire son appellation de la statistique : une qualité de niveau « six sigma » (six écarts types)
donne un niveau de perfection de 99,9997 (3 défauts par million !). Elle a été mise au point par
Motorola dans les années 1980 mais c’est en 1996 que sa notoriété éclate, lorsque Jack Welch,
alors Chief Executive Officer (CEO) de General Electric, la met en œuvre. La réussite est telle que
General Electric annonce avoir fait des milliards de dollars d’économies grâce à elle. La méthode
s’inscrit dans la tradition du Total Quality Management (TQM), mais elle se fait fort de la surpasser
en insistant sur six thèmes spécifiques(33) :
– l’accent est résolument mis sur le client ;
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– la gestion est subordonnée aux données et aux faits ;
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– tout découle de la gestion des processus et de leur capacité à susciter la performance ;
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– un management proactif et pas seulement réactif ;
– l’abolition des frontières incitant à la collaboration entre tous ;
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– la recherche de la perfection, et aussi la tolérance de l’échec.
La mise en œuvre s’opère à partir du modèle du DMAIC : define, measure, analyse, improve,
control.
Plus précisément, un problème est d’abord défini et quantifié, puis les données sont collectées pour
clarifier la question ; les outils analytiques sont utilisés pour rechercher les causes des difficultés ;
une solution est identifiée, puis mise en œuvre, et enfin les activités améliorées sont soumises à un
contrôle afin d’éviter le retour des erreurs.
La méthode « six sigma » constitue une réelle avancée par rapport au TQM, mais elle ne doit pas se
substituer à la nécessité (plus large) d’analyser l’entreprise (enfin !) comme un enchevêtrement de
processus en abandonnant la vision traditionnelle des fonctions. Pour ce faire, il propose un tableau
(tableau 4.7) afin de bien marquer la différence.
Tableau 4.7. L’entreprise traditionnelle – L’entreprise « processus »
Entreprise
traditionnelle
Entreprise
« processus »
Fonction
Processus
Département
Limitée
Équipe
Large
Centre de l’intérêt
Étroites
Supérieur hiérarchique
Globales
Client
Performance
Rôle du manager
Activity-based
Superviser
Results-based
Coach
Rôle central
Culture
Responsable fonctionnel
Responsable des processus
Conflit
Collaboration
Idée centrale
Unité de travail
Description des activités
Mesures
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Il apparaît qu’aujourd’hui, dans l’entreprise, tout tourne autour des processus : la mise en place du
Supply Chain Management, les fusions et acquisitions, la mondialisation, l’e-business, les tableaux
de bord prospectifs, l’objectif de l’entreprise sous forme d’EVA.
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Il convient toutefois de demeurer attentif à la généralisation du management par les processus. Si la
mondialisation théorique est largement avancée, si l’intérêt clair est largement perçu par tous
(hausse de la satisfaction des clients, amélioration de la qualité des produits et services), le chemin
est encore long jusqu’à la réalité opérationnelle.
La diminution des coûts de non-qualité
L’appréciation de la non-qualité a pour objet :
– de faire prendre conscience à tout le personnel de l’enjeu de la politique de qualité ;
– de fournir des éléments chiffrés pour mieux remédier aux mauvais fonctionnements.
L’ASQ (American Society for Quality) distingue quatre catégories de coûts :
– les coûts de prévention comprennent le budget de la fonction de qualité, les coûts de
formation, les investissements engagés pour réduire le nombre d’anomalies, etc. ;
– les coûts d’évaluation correspondent aux charges engagées pour vérifier la conformité des
produits, les coûts de réception par exemple ;
– les coûts des anomalies internes englobent tous les coûts des défauts détectés dans
l’entreprise avant que les produits soient livrés : rebuts, déclassements, retouches, pertes,
réparations, etc. ;
– les coûts des anomalies externes s’appliquent à tous les coûts des produits livrés et qui ne
répondent pas aux attentes de la clientèle : réclamations, garantie, service après-vente,
responsabilité civile et pénale, etc.
Pour calculer ces coûts de non-qualité, de nombreuses sources de données s’offrent aux
responsables : comptabilité générale, comptabilité analytique, mais plus encore statistiques
provenant des différents services. Même si les calculs semblent lourds, la chasse aux coûts de nonqualité est utile, car le chemin est long qui conduit vers l’idéal du « zéro défaut ». Mais comment
faire passer toutes ces options du décideur à l’exécutant, même si ce dernier participe au choix ?
Il faut souligner, en conclusion, l’enjeu réel de ces formes de management par la qualité. Les
entreprises sont passées d’un management de la qualité à un management par la qualité. On pourrait
croire que le management par la qualité s’accompagne de moins de contrôle. En fait, l’autonomie
dans le travail, la motivation, l’autocontrôle et le contrôle fonctionnel se sont substitués au contrôle
hiérarchique. Au travers de la gestion de qualité, les structures, les mécanismes de coordination et
d’animation ont été modifiés.
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Figure 4.17. Des ressources et compétences à l’avantage concurrentiel
R. GRANT, Contemporary Analysis, Blackwell, 8e édition, 2013.
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Une fois le diagnostic effectué, il reste à définir les orientations stratégiques. On aura compris que
le développement ne peut s’opérer que pas à pas, à partir d’un métier de base : l’entreprise se
développe en recherchant des synergies entre activités, autour du cœur des compétences possédées.
Cela montre bien que deux entreprises différentes ne portent pas le même jugement sur l’intérêt d’un
marché déterminé ou d’une orientation particulière.
Exemple
Une entreprise qui domine bien les effets d’expérience et le savoir-faire de production
s’orientera vers une stratégie de volume alors qu’une firme maîtrisant mieux la
flexibilité, les aspects intangibles (réputation, image) se tournera plutôt vers une
stratégie de différenciation.
On peut résumer les facteurs de performance dans les DAS et leurs implications stratégiques ainsi
(figure 4.18).
By
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Figure 4.18. Les facteurs de performance et les implications stratégiques
II. Les stratégies business
Nous abordons successivement les stratégies génériques dans un secteur, la classification de Porter,
la boussole stratégique prix-valeur, la stratégie Océan Bleu, puis le rôle de la technologie, la
stratégie de la longue traîne et le type d’industrie.
A. Les stratégies génériques
À l’intérieur d’une activité, les orientations stratégiques génériques sont réduites à deux : soit
l’entreprise recherche des économies de coûts avec une volonté de volume, soit elle tente de se
différencier par rapport à l’offre de ses concurrents. C’est ce que nous verrons avant de présenter
la célèbre typologie de Porter qui décrit trois stratégies possibles.
1. La stratégie low cost
Un excellent moyen pour dominer les concurrents consiste à produire à un coût inférieur. Pour cela,
il est indispensable de disposer d’une part de marché non négligeable afin de bénéficier des lois
d’apprentissage, mais aussi de posséder une organisation sans faille. Les coûts inutiles sont
pourchassés, les meilleures sources d’approvisionnement recherchées, les investissements dans le
matériel le plus moderne pratiqués. En un mot, l’entreprise mène une politique active
d’amélioration de la productivité. C’est également vrai dans toutes les orientations mais plus
particulièrement ici puisque la réussite repose sur les gains de coûts. À cette option on ajoutera le
poids de l’innovation, qu’elle soit de procédé ou de produit, pour faire diminuer les coûts. On
donne souvent l’exemple de la montre Swatch qui, en dehors de son marketing mix performant,
compte 51 composants alors que pour une montre « normale », le nombre correspondant est de près
de 100. Voilà une voie retenue par de nombreuses firmes dans l’automobile, l’électroménager,
l’électronique. L’évolution du prix des calculatrices l’atteste.
Exemple
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Des entreprises comme Bic sont considérées comme des archétypes de stratégies low
cost qui ne sont pas exemptes de dangers. Il suffit qu’une révolution technologique
annihile en un instant tous les bienfaits de l’expérience passée pour que l’entreprise se
retrouve très exposée ; ou encore que le prix d’une matière première indispensable
augmente brutalement et alors le produit n’est plus compétitif au regard de ses
concurrents.
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On peut résumer les caractéristiques, les implications organisationnelles et les risques de la
stratégie low cost dans le tableau 4.8. Nous insistons sur le lien qui existe entre les caractéristiques
de la stratégie générique et les implications organisationnelles. Une stratégie implique une
organisation particulière.
Caractéristiques
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Tableau 4.8. La stratégie low cost
• Recherche permanente de coûts
faibles.
• Investissements importants en
production de masse.
• Simplicité des processus de
fabrication.
• Effet d’expérience.
• Économies d’échelle.
• Communication de masse.
• Distribution très large.
• Internationalisation.
Implications
organisationnelles
• Définition claire des
responsabilités.
• Direction par objectifs.
• Objectifs quantitatifs précis.
• Contrôle de gestion très
développé et orienté vers la
surveillance des coûts.
• Analyse de la valeur et audit
des coûts fréquents.
Risques
• Saturation du marché.
• Obsolescence de l’outil de
production.
• Perte de l’avantage
concurrentiel du fait du progrès
technique des concurrents.
• Concurrence de pays à coût
de main-d’œuvre plus faible.
• Perte de la capacité
d’innovation technologique du
fait de l’obsession des coûts.
• Image de mauvaise qualité
chez les clients
Il faut en fait comprendre que la réussite de cette stratégie repose sur l’interdépendance de
nombreux facteurs qui se renforcent les uns les autres. C’est le cercle « vertueux » de la stratégie
low cost (figure 4.19). Les risques apparaissent si un des facteurs n’agit plus dans le sens de la
réduction des coûts.
Figure 4.19. Le « cercle vertueux » de la stratégie low cost
Il ne faut cependant pas assimiler toute recherche de coûts plus faibles à une stratégie low cost
(tableau 4.9).
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Tableau 4.9. Deux actions différentes portant sur les coûts
Action de réduction des coûts
• Ne concerne que certaines entreprises.
• Stratégie générique.
• Recherche permanente de réduction des coûts.
• Les baisses de coûts sont répercutées sur les
prix de vente.
• Concerne toutes les entreprises.
• Action ponctuelle.
• Apparaît surtout en période de crise.
• Les baisses de coûts permettent de reconstituer
les marges.
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Stratégie low cost
La maîtrise de l’évolution des coûts de revient, voire la légitime volonté de simple réduction des
coûts sont des préoccupations de toute entreprise, dans toute circonstance, et ne doivent pas être
confondues avec la stratégie générique de low cost qui, elle, aborde le problème des orientations
concurrentielles de long terme.
2. La stratégie de différenciation
Elle consiste en une distinction du produit ou du service offert par la firme qui vise à créer quelque
chose qui soit perçu comme unique par l’ensemble du secteur. L’entreprise réussit ainsi à se
constituer, sur son marché, un monopole de fait qui la met à l’abri des attaques des concurrents. Le
produit, par sa conception, son image, les services qu’il rend, est tel qu’il ne connaît aucun
concurrent direct. Les clients sont fidèles. La part de marché n’est pas nécessairement très élevée
mais tenue fermement. Toute la question ici est celle du différentiel de prix que l’entreprise est
capable de faire supporter à ses clients. La différenciation apporte une valeur supplémentaire à
l’acheteur, valeur fonctionnelle ou valeur psychologique (attrait d’une marque) et celui-ci accepte
de supporter un prix plus élevé que celui offert par les entreprises du même secteur qui
poursuivaient une stratégie de coût. La réussite passe ainsi par un équilibre heureux entre
l’accroissement du coût engendré par la recherche du facteur d’unicité et la perception par le client
de la valeur correspondante (figure 4.20).
Figure 4.20. La balance de la différenciation
Si l’entreprise met en œuvre une procédure sérieuse pour faire valoir une différenciation faiblement
perçue, elle se mine. Si elle réussit à comprimer les coûts d’un avantage ressenti comme
exceptionnel par le client, elle prospère.
Nous sommes en pleine logique de marketing. Le client achète des « valeurs » et, pour cela, il est
prêt à payer, mais il compare en permanence en conservant un œil fixé vers le produit simplifié à
bas prix. Pour que la différenciation réussisse, le différentiel de prix doit pouvoir se justifier de
manière durable :
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– le client reconnaît la valeur supplémentaire apportée au produit ;
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– l’entreprise (dans le cadre de sa différenciation) poursuit elle-même une politique de
compression de ses coûts pour maintenir un écart constant avec les produits simples (ou
alors elle renforce son facteur de différenciation).
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On mesure toute la difficulté de cette politique si le client n’est pas véritablement intéressé par le
facteur de différenciation et n’accepte pas de payer le surprix. Le spécialiste du produit simplifié
réussit à améliorer son offre tarifaire et le différentiel de prix devient insupportable. Le client
panache ses achats entre le produit simplifié et le produit différencié.
Voilà autant de situations lourdes de conséquences négatives pour le tenant de la stratégie de
différenciation.
Exemples
• On reconnaît les boutiques Zara à leur agencement et à l’ambiance du magasin.
• Les jeans Diesel, pour se différencier, ont conçu des publicités humoristiques et
décalées mettant en scène de fausses stars dont les frasques étaient évidemment
inventées.
Les facteurs de différenciation sont nombreux mais on peut, sans prétendre à l’exhaustivité, en citer
quelques-uns (tableau 4.10).
Tableau 4.10. Quelques exemples de facteurs de différenciation
Facteurs de
différenciation
Illustrations
• Circuit de distribution.
• Mode de vente.
• Darty, communication axée sur le service après-vente.
• Bang & Olufsen, appareils hi-fi.
• Tupperware, boîtes en plastique distribuées
uniquement à domicile.
• Éditions Atlas, CD, DVD, vendus dans les bureaux de
tabac.
• Cacharel, textile, parfum.
• Nespresso, les capsules de café.
• Sony en hi-fi, L’Oréal en cosmétique.
• Fauchon, traiteur.
• Label Max Havelaar.
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• Marque.
• Conditionnement.
• Innovation.
• Qualité, hygiène des produits.
• Commerce équitable.
• Facom, outillage garanti à vie.
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• Fiabilité technique du produit.
• Service (avant, pendant, après la
vente).
• Esthétique des produits.
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Tentons, comme précédemment, de présenter les caractéristiques, les implications
organisationnelles et les risques de la stratégie de différenciation par un tableau (tableau 4.11).
Caractéristiques
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Tableau 4.11. La stratégie de différenciation
Implications
organisationnelles
Risques
• Incapacité à limiter le surcoût
dû à la différenciation.
• Coordination importante des • Imitation par des concurrents
• Intuition et créativité.
activités R & D et marketing. situés dans des pays à coûts
• Capacités d’innovation.
• Capacité d’attirer et de retenir faibles.
• Capacités commerciales.
les compétences clés.
• Banalisation du facteur de
• Circuit de distribution associé
• Structure souple.
différenciation.
et coopératif.
• Animation orientée vers des • Perte d’intérêt du facteur de
• Image de marque forte.
objectifs qualitatifs.
différenciation aux yeux des
consommateurs.
• Contrefaçons.
Notons que le développement de la tendance no name reposant sur la critique des produits à
marque, ainsi que l’essor important des marques de distributeurs dans la grande distribution ont
parfois remis en cause certaines stratégies de différenciation des industriels.
B. La classification de Porter
Selon Porter, pour un DAS donné, trois grandes familles de stratégies sont concevables
(tableau 4.12). Chacune d’elle est exclusive des deux autres, car toute recherche d’une voie
médiane serait vouée à l’échec.
Tableau 4.12. Les stratégies génériques
Les deux premières stratégies génériques proposées par Porter sont celles que nous venons de
décrire. Il en ajoute une troisième, en opposant, au sein de la différenciation, la volonté stratégique
de s’adresser à tout le secteur d’une part (il l’appelle également différenciation) et à un segment
particulier d’autre part ; cette dernière prend le nom de stratégie de concentration.
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L’entreprise s’attaque à un segment précis : un groupe de consommateurs ou un groupe de produits.
La recherche d’une cible unique lui permet de bénéficier des avantages soit de la domination des
coûts, soit de la différenciation, soit des deux en même temps. Il est évident que, dans ces cas, la
part de marché ne saurait être très élevée. Les risques sont identiques à ceux déjà évoqués, mais il
faut y ajouter la possibilité pour un concurrent de découvrir des sous-segments dans la cible de
départ ; la seule limite est le nombre des consommateurs y figurant.
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Cette stratégie de concentration est, pour Porter, souvent choisie par des PME qui n’ont ni les
moyens, ni la volonté de s’attaquer à l’ensemble du secteur. On trouve des illustrations dans le
secteur des services, par exemple les coursiers qui se limitent à une ville (Paris Paname Courses, à
Paris).
Reprenons, pour la stratégie de concentration, notre tableau habituel (tableau 4.13).
Tableau 4.13. La stratégie de concentration
Caractéristiques
• Concentration sur un groupe de
clients, un segment de gamme, un
marché géographique.
• Service particulier fourni à la
cible.
• Parts de marché limitées.
Implications
organisationnelles
• Structure orientée vers la
cible.
• Culture de service.
• Souplesse interne pour
satisfaire les clients.
• Capacité d’adaptation des
produits au besoin des clients.
Risques
• La cible est trop petite pour
être rentable.
• Les firmes dominantes
attaquent la cible stratégique.
• Les coûts du service
deviennent prohibitifs.
• Les attentes de la cible se
banalisent.
• Un concurrent segmente la
cible visée.
Pour Porter, entre les trois stratégies génériques développées au sein d’un secteur, domination
globale par les coûts, différenciation et concentration, il est clair que l’entreprise se doit de choisir,
sinon « l’enlisement dans la voie moyenne » menace l’entreprise. Il n’est pas possible, au sein d’un
même DAS, de mener des stratégies dont les exigences en termes d’organisation sont antinomiques.
Une entreprise ne peut pas, au risque de perdre son identité et ses facteurs de compétences,
poursuivre à la fois une stratégie de différenciation synonyme de sélectivité, de sur mesure, et se
lancer dans une stratégie de production de masse. En pratique, les tentations sont nombreuses, mais
les passages à l’acte se traduisent généralement par des échecs. Au sein d’un même DAS, ces
stratégies doivent être considérées comme exclusives les unes des autres.
Exemple
L’opposition entre low cost et différenciation peut être nette et l’absence de véritable
choix se traduire par des rentabilités moindres (figure 4.21).
By
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Figure 4.21. L’enlisement dans la voie moyenne
C. La boussole stratégique prix-valeur
L’opposition entre stratégies reposant sur des prix bas (inspirées des logiques de volume et de
coûts bas) et les stratégies de différenciation (fondées sur l’innovation, la technologie, la qualité,
l’image, etc.) mérite d’être dépassée pour comprendre les stratégies d’entreprises comme Dell,
Ikea, pour ne citer que deux exemples. En effet, ces entreprises peuvent désormais, en raison de la
compétition intense, faire reposer leur stratégie simultanément sur la différenciation et des prix bas.
En fait, l’analyse des stratégies des entreprises suivies dans un DAS peut s’effectuer simultanément
selon deux critères :
– Quelle est la valeur perçue de l’offre produits/services par rapport aux concurrents ? La
qualité, le service après-vente, l’image de marque, l’innovation, etc., de l’offre sont-ils
perçus comme supérieurs, équivalents, inférieurs à ceux des concurrents ?
– Quels sont les prix par rapport aux compétiteurs ? Sont-ils comparables ? Plus élevés, plus
bas ?
Il est important de souligner que sur ces deux dimensions, ce qui prime ce n’est pas tant la valeur ou
le prix, que la valeur relative et le prix relatif perçus par les clients. En matière stratégique et
dans un environnement concurrentiel, seule la comparaison avec les compétiteurs compte : une
qualité élevée ne crée pas de valeur si tous les concurrents ont la même !
L’analyse des stratégies business peut alors se faire à l’aide de la boussole stratégique prix-valeur
(figure 4.22 et tableau 4.14) qui distingue neuf alternatives stratégiques en fonction de l’axe
dominant du positionnement par rapport aux concurrents.
Pour chacune de ces stratégies, demeure la question de la compatibilité des orientations
stratégiques et de leur déploiement interne en termes d’organisation et d’animation des hommes.
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Figure 4.22. La boussole stratégique prix-valeur
Tableau 4.14. Les neuf alternatives stratégiques
1. Best-seller
Valeur +
Prix –
2. Low cost
Valeur –
Prix –
3. Premium
Valeur +
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Caractéristiques
L’entreprise offre à la fois une valeur supérieure et un prix plus
compétitif que celui des concurrents, c’est la situation idéale car l’on
combine les avantages d’une différenciation par le design (Ikea), par la
qualité, par la fabrication à la demande (Dell) et des prix plus bas du fait
des volumes et d’une maîtrise des fonctions clés de la chaîne de la
valeur.
L’entreprise propose un prix plus faible que celui des concurrents avec
une offre produits ou services dont la valeur apparaît clairement aux
clients comme étant plus faible. Dans le transport aérien, c’est la
stratégie choisie par les compagnies (EasyJet, Ryanair) appelées « low
cost » dans lesquelles le service est minimal et les conditions de confort
spartiates. Dans la distribution, les « hard discounters » se caractérisent
par des gammes de produits étroites, des produits très bon marché, des
magasins sobres (Leaderprice, Lidl). Les journaux gratuits (Métro)
rentrent dans cette catégorie. Le volume est caractéristique de cette
stratégie.
Cette stratégie associe différenciation par le haut, création de valeur aux
yeux des clients avec une politique de prix supérieurs acceptée par le
marché. La création de valeur peut venir de la technologie (montres
By
Stratégies
Prix +
Breitling), de la valeur immatérielle de la marque (Dior) pour les
industries du luxe, de la créativité (Bvlgari en bijouterie).
By
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Cette stratégie repose sur une valeur offerte supérieure à celle des
compétiteurs pour un prix équivalent à la moyenne de ce qui est
généralement proposé par les concurrents. Dans l’automobile la maîtrise
de la qualité par les constructeurs japonais (Toyota) leur a permis de
proposer des modèles de meilleure qualité à des prix comparables à ceux
des constructeurs américains ou européens. Dans un marché du livre où
4. Guerre de la valeur
le prix minimun est fixé par la loi, Amazon.fr pratique cette stratégie et
investit dans le service client. Decathlon fait de même dans le secteur
Valeur +
sportif.
Prix =
La stratégie de niche ou de focalisation souvent conduite par les PME est
un cas particulier de la guerre de la valeur car l’entreprise cible un
segment auquel elle offre une proximité plus grande, un service plus
étendu pour un prix comparable. Si le prix est supérieur au niveau du
marché elle se rapproche de la stratégie « Premium » et renforce le
risque de voir arriver les concurrents.
Pour le standard de qualité du marché, l’entreprise propose des prix qui
sont inférieurs à ceux des concurrents. Cette stratégie, pour être pérenne,
5. Guerre des prix
doit reposer sur une structure de coûts plus faible due aux volumes, ou à
l’externalisation de certaines parties de la chaîne de la valeur. Dans la
Valeur =
grande distribution, c’est la stratégie des hypermarchés Leclerc. C’était
Prix –
la stratégie de Darty avant que cette entreprise ne communique sur le
service.
Cette situation associe une valeur moyenne pour le marché et un niveau
6. Surprix non justifié
de prix supérieur à ceux des concurrents. Cette situation est difficilement
tenable dans un environnement concurrentiel. Les fabricants de produits
Valeur =
textiles européens n’ayant pas délocalisé leur production se retrouvent
Prix +
dans cette situation.
Pour un prix comparable à celui du marché, l’entreprise offre moins aux
7. Déficit de valeur
clients probablement pour accroître ses marges ou du fait d’une structure
de coûts non maîtrisés. La compagnie aérienne Swiss Air (aujourd’hui
Valeur –
Swiss) a suivi cette stratégie qui l’a conduite à l’échec et à être reprise
Prix =
par Lufthansa.
À défaut de se trouver en position monopolistique protégée par les
8. Cul-de-sac
pouvoirs publics, on imagine mal qu’une entreprise puisse poursuivre
cette stratégie. La compagnie maritime publique reliant la Corse et le
Valeur –
continent en a constitué un bel exemple.
Prix +
9. Enlisement
Cette stratégie consiste à ne pas choisir une stratégie... et à se retrouver
sans avantage comparatif face aux concurrents. Dans cette situation,
Valeur =
l’avenir est très limité.
Prix =
D. La stratégie Océan Bleu
L’idée de ne pas opposer stratégie de différenciation avec stratégie de coût, et de combiner les
avantages de prix et de valeur présents dans la boussole stratégique, se retrouve dans la stratégie
Océan Bleu(34). Pour ses promoteurs, Océan Bleu consiste à créer un nouvel espace stratégique,
plutôt que d’entrer en lice avec les concurrents directs, ce qu’ils dénomment Océan Rouge. L’idée
centrale de la stratégie Océan Bleu est de sortir du périmètre actuel de la concurrence (faire
reposer sa stratégie sur d’autres facteurs clés de succès) pour créer un nouvel espace stratégique
reposant sur une logique innovation-valeur, génératrice de valeur pour les clients et pour
l’entreprise. Il s’agit en général de mener de front la réduction de coûts et l’augmentation de valeur
pour l’acheteur. Les deux stratégies Océan Rouge ou Océan Bleu sont résumées dans le
tableau 4.15.
Tableau 4.15. Les stratégies Océan Rouge et Océan Bleu
Stratégie Océan Rouge
Stratégie Océan Bleu
Créer un nouvel espace stratégique
Mettre la concurrence hors jeu
Créer une nouvelle demande par une offre
créatrice
Concilier avantage de valeur et de prix
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Agir dans le périmètre stratégique existant
Gagner des parts de marché sur les concurrents
Répondre à la demande existante
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Arbitrer entre valeur et coût
D’après W. CHAN KIM, R. MAUBORGNE.
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La définition d’une stratégie Océan Bleu suppose de répondre à quatre questions relatives aux
critères, et aux caractéristiques produits-services qui créent véritablement de la valeur pour le
client :
• Quelles caractéristiques acceptées par les compétiteurs du secteur doivent être exclues ? Il
s’agit d’éléments de l’offre actuelle du secteur qui ne créent pas de valeur.
• Quelles caractéristiques doivent être atténuées par rapport aux pratiques actuelles du
secteur ? Il s’agit d’aspects du produit ou du service que l’on ne peut pas supprimer, mais
dont la portée et le coût peuvent être réduits.
• Quelles caractéristiques doivent être renforcées par rapport aux pratiques actuelles du
secteur ? C’est le cas inverse à la situation précédente.
• Quelles caractéristiques absentes actuellement du secteur peuvent être créées ? Il s’agit là de
se différencier par des éléments nouveaux.
Exemples
Sur le marché du vin, au plan international, on peut comprendre comment le producteur
australien Casella a imposé ses produits (yellow tail) dans un nouvel espace
stratégique sur un marché pourtant mature et encombré. Cette stratégie totalement
innovante a engendré une véritable success story.
Dans un autre secteur, la stratégie d’Airbus avec l’A380, face à la gamme Boeing,
représente une stratégie Océan Bleu qui consiste à changer complètement le périmètre
du marché en offrant aux compagnies aériennes un avion très gros porteur (500 places)
face à une offre traditionnelle d’avions disposant de 350 places. L’innovation est à la
fois technologique et commerciale.
Enfin, dans le secteur morose du cirque et des spectacles, les dirigeants du Cirque du
soleil ont complètement repensé l’offre traditionnelle tant sur le plan du contenu que
du positionnement des prix.
By
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Tableau 4.16. Les caractéristiques de la stratégie Océan Bleu appliqué à Casella
EXCLURE
Terminologie œnologique : suppression des
RENFORCER
multiples labels, origines que le marché ne
Avantage prix : positionnement médian entre les
perçoit pas. Pas de référence aux châteaux et
vins chers et les bons marchés.
vignobles.
Implication distributeurs détaillants : actions de
Publicité média : suppression de la publicité sur merchandising offensive.
les supports.
ATTÉNUER
Nombre de références : uniquement un
CRÉER
chardonnay blanc et un syrah rouge.
Image différente du vin : plus ludique,
Prestige vignoble : pas de référence à un
décontractée, accessible ; cf. le site
vignoble, uniquement référence à « Australian www.yellowtailwine.com.
wine ».
D’après W. CHAN KIM et R. MAUBORGNE.
E. La relation technologie-stratégie business(35)
1. Technologie et stratégie de différenciation
La stratégie de différenciation consiste à faire accepter au client de payer un différentiel de prix
justifié par le caractère unique d’une offre. Le caractère unique peut reposer sur de nombreux
éléments tels que l’image ou une qualité supérieure mais, très généralement, le facteur de
différenciation résulte d’une innovation. Une entreprise propose un produit innovant dans son
aspect, dans ses caractéristiques fonctionnelles, dans son conditionnement, etc. L’innovation est
alors au cœur du processus de différenciation. Il est évident que la réussite de cette stratégie passe
par la double réussite déjà évoquée.
D’abord, l’innovation doit être perçue comme telle par le consommateur. On se souvient d’une
lessive qui avait découvert un agent lavant beaucoup plus puissant que ceux existant sur le marché
mais dont elle n’a jamais pu véritablement tirer les bienfaits car elle n’a pas pu, ou pas su,
démontrer à ses clients l’intérêt d’une lessive ultra-compacte.
Ensuite, l’innovation doit ne pas pouvoir être copiée par les concurrents (sinon tous versent dans
une stratégie de volume avec l’initiateur qui a seul supporté les coûts de recherche) ; il est
important de la « défendre » et pour ce faire deux solutions sont envisageables. La première est de
la rendre publique en déposant un brevet ; la seconde est de la maintenir discrète jusqu’au jour où
un concurrent la découvre.
Exemples
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On peut citer de belles réussites comme celles, dans le textile, de Gore avec le
Goretex et de DuPont avec le Lycra. Gore « surfe » sur une vague de succès grâce à la
généralisation des utilisations de son textile miracle : parfaitement imperméable et
autorisant la transpiration. DuPont a insufflé une quasi-mode vestimentaire grâce au
Lycra, extensible et résistant. Dans les deux cas, les concurrents s’échinent à courir
derrière l’innovateur.
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Au-delà des stratégies de différenciation faisant appel à l’innovation, on relèvera que certaines
entreprises ont inversé l’ordre des propositions et font de l’innovation la base même de leur
stratégie, qui entre donc dans le champ de la différenciation. Peut-on citer ici Citroën dans
l’automobile, Dim dans le collant, Potain dans la grue ?
2. La stratégie de la longue traîne (long tail)
Selon l’expression de Chris Anderson(36), journaliste et auteur américain spécialiste de l’économie
d’Internet et de la gratuité, qui s’inspire de la dispersion des ventes observées dans les séries
statistiques, la longue traîne ou long tail remet en cause la domination des modèles économiques
reposant sur les gros volumes et le leadership. L’auteur indique que des produits qui font l’objet
d’une demande et de vente réduites peuvent, ensemble, représenter une part de marché importante
comparable à celle des produits leader. Le canal de distribution que constitue Internet joue un rôle
déterminant qui rend ce modèle viable. Le principe de la stratégie de la longue traîne consiste à
privilégier de petits volumes sur un grand nombre de références, plutôt que de gros volumes sur un
petit nombre de produits.
Exemples
Les stratégies de distribution de Chapitre, site spécialisé dans les livres rares,
d’Amazon, d’eBay ou encore des sites de téléchargement de musique peuvent reposer
sur des ventes unitaires faibles de très nombreux articles.
La stratégie de la longue traîne permet de transformer, grâce à la technologie Internet, de très
nombreuses niches en un marché de masse. Si la vente de livres rares ou épuisés est peu rentable en
librairie au regard des frais fixes associés (location du point de vente, frais de personnels, coûts
de stockage) conséquents, en mettant en ligne, pour un marché mondial, un très grand nombre
de références rares la stratégie devient pertinente.
Figure 4.23. La stratégie de la longue traîne
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Les acteurs de la longue traîne sont de trois types (tableau 4.17).
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Tableau 4.17. Les acteurs de la longue traîne
Business
Fabricants d’outils
Agrégateurs
Filtres
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Démocratisation de la production
Démocratisation de la distribution
Connexion entre l’offre et la demande
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Forces
Exemples
Éditeurs de logiciels
Amazon, eBay, iTunes, Netflix
Google, blogs
C. ANDERSON, The long tail, p. 57.
Réduire les coûts en neuf règles
Pour les agrégateurs dont le rôle est déterminant dans la stratégie de la longue traîne, Chris
Anderson suggère neuf règles de réduction de coûts rendues possible par Internet.
Règle 1. Développer les stocks centralisés ou virtuels. Dans la distribution, la question des
stocks est un enjeu majeur du fait de leur coût de détention. Multiplier les stocks de livres dans
des centaines de magasins de détail n’est pas toujours une solution adéquate. Un stock central est
une option, mais une nouvelle réponse apparaît au travers des stocks virtuels, les stocks de
différents magasins ou entrepôts étant virtuellement centralisés et totalement accessibles en ligne.
C’est le système mis en place par Chapitre.com qui fédère virtuellement les stocks de centaines
de libraires indépendants.
Règle 2. Crowdsourcing. Reporter une partie de la chaîne de la valeur en aval et mettre le client
à contribution. C’est ce que font Wikipedia, eBay ou encore Amazon, en mettant à contribution
les consommateurs dans le fonctionnement des sites.
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Règle 3. Multiplier les canaux de distribution. Tous les clients ne souhaitant pas acheter sur
Internet, certaines entreprises développent des stratégies multicanaux, le Web étant complété par
des points de vente physiques.
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Règle 4. Multiplier l’offre produit. Alors qu’auparavant un livre ne se vendait qu’au format
papier, on voit apparaître des versions numériques et même, selon les modèles, des ventes au
chapitre, à l’exemple des morceaux d’albums de musique.
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Règle 5. Multiplier les prix. La multiplication des enchères, des canaux de distribution, des
modèles où le prix est fixé en fonction de la disponibilité conduit, pour un même produit, à
afficher des prix différents.
Règle 6. Partager l’information. La généralisation des systèmes d’information en temps réel
permet de diffuser aux consommateurs toutes les informations sur les ventes et la disponibilité
des produits.
Règle 7. Penser « et » plutôt que « ou ». Dans un environnement où les linéaires et le nombre de
références présentées sont limités, le raisonnement des managers repose sur la sélection des
produits présentés. Dans un contexte où l’offre présentée via le Net est potentiellement illimitée,
la largeur de l’offre devient un atout.
Règle 8. Faire confiance au marché pour faire la sélection. Dans un magasin traditionnel, le
commerçant doit faire le choix des produits présentés. On line, il n’est pas nécessaire de
préfiltrer les références ; les coûts de présentation des produits étant marginaux, il suffit de
proposer et de laisser le marché faire la sélection.
Règle 9. Comprendre le pouvoir du « gratuit ». Les modèles Google ou Skype reposent sur
l’attrait de la gratuité qui crée du trafic et permet ensuite, soit des recettes indirectes de
publicité, soit la vente de services complémentaires.
3. Les stratégies collaboratives digitales
Au plan économique, on observe une nouvelle forme de stratégie particulièrement innovante dans
toute une série de secteurs de service (transports, locations, ventes en ligne, etc.) : les stratégies
collaboratives digitales. Celles-ci caractérisent aussi bien une entreprise comme Uber, que Airbnb,
Leboncoin ou BlaBlaCar(37). Quels sont les points communs de ces stratégies qui concernent
respectivement le transport par chauffeur privé, la location de chambres ou d’appartements dans
190 pays, les petites annonces ou le covoiturage ? Elles reposent tout à la fois sur la digitalisation
des processus et sur le caractère collaboratif de la production du service :
• Digitalisation. Ces entreprises ont mis aussi bien les technologies de l’information et de la
communication (TIC) que le système d’information au cœur de leur modèle stratégique.
Qu’il s’agisse d’applications mobiles (Uber, Airbnb) ou de sites Internet (Leboncoin),
toutes ces entreprises appartiennent à l’économie numérique. Les TIC constituent la source
de leur avantage concurrentiel. Ils représentent également la structure interne de leur
fonctionnement, où tous les processus et fonctions sont numérisés. Toutes les fonctionnalités
de la géolocalisation sont mobilisées pour offrir un service adapté en temps réel.
• Caractère collaboratif. Ces entreprises sont collaboratives sur deux plans :
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– D’une part, en amont, elles ont substitué à la traditionnelle hiérarchie interne aux
entreprises, des relations partenariales avec des fournisseurs indépendants : les
chauffeurs de Uber et les loueurs d’appartement de Airbnb sont indépendants
juridiquement des plates-formes numériques citées. L’externalisation des activités de
la chaîne de la valeur, qui ne concourt pas à la création de l’avantage concurrentiel, est
la règle.
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– D’autre part, en aval, ces entreprises font participer les clients au fonctionnement du
système parce que ceux-ci contribuent en temps réel à l’évaluation des services par
des systèmes de notation numérisés et généralisés.
Ces stratégies collaboratives digitales s’inscrivent dans une logique de rupture permise par les TIC
et de changement complet de business model par rapport aux acteurs des secteurs traditionnels. Ce
phénomène se traduit par des frictions avec les parties prenantes (pouvoirs publics, concurrents).
Ces entreprises, par nature innovantes, mettent en œuvre des stratégies de développement
agressives au plan international.
III. L’hypercompétition
A. Qu’est-ce que l’hypercompétition ?
La dynamique concurrentielle actuelle se caractérise par ce que l’on nomme communément
l’hypercompétition. D’Aveni a identifié quatre facteurs qui provoquent l’hypercompétition au sein
d’une industrie :
– la demande des consommateurs ;
– les savoirs ;
– le déclin des barrières à l’entrée ;
– la fréquence croissante des alliances entre firmes.
L’hypercompétition s’oppose à la compétition statique. La différence entre ces deux contextes est
essentielle sur le plan des stratégies induites et des organisations mises en œuvre.
Le monde d’aujourd’hui a rendu les marchés infiniment plus concurrentiels qu’ils ne l’étaient il y a
10 ou 15 ans : les délais de réaction se sont réduits, les clients sont surinformés, la quasi-totalité
des marchés a été déréglementée. La conséquence est lourde en ce qui concerne les avantages
concurrentiels : autant il était possible naguère de mettre en œuvre une stratégie pour bénéficier
d’un atout sur les concurrents durant un certain laps de temps, autant à présent les avantages ne
peuvent être que temporaires et doivent, de ce fait, être gérés de manière dynamique. Cela
n’implique pas que l’on soit passé d’une situation statique bienheureuse à un état de dynamisme
redoutable, mais tout simplement que les conditions d’évolution se sont brutalement accélérées.
L’état d’esprit doit changer. Le succès de l’entreprise ne reposera plus sur sa capacité à se
positionner dans une situation avantageuse dont elle retirera des bienfaits mais dans son aptitude à
élaborer une « architecture stratégique » (le terme est de Prahalad et Hamel) lui permettant de
précéder et contrer ses concurrents à tout instant et sur le long terme.
Tableau 4.18. La compétition statique et l’hypercompétition
Environnement dynamique et instable
Changement permanent de technologie aux
différents stades de la chaîne de valeur
Nouvelles formes de compétition sur la valeur
créée pour le client
Frontières entre DAS floues
Distinction floue entre stratégies business et
corporate
Avantage compétitif éphémère, remis en cause
en permanence
Flexibilité dynamique, « continuous morphing »
Dépréciation rapide des actifs, création de
nouvelles ressources et compétences
spécifiques, capacités dynamiques
Innovation permanente
Agilité stratégique
Flexibilité organisationnelle
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Environnement relativement stable
Hypercompétition
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Compétition statique
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Compétition sur les prix et les coûts
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Technologie stable
Frontières entre DAS stables
Distinction claire entre stratégies business et
corporate
Avantage compétitif durable
Barrières à l’entrée, effet d’expérience
Actifs stratégiques durables
Peu d’innovation
Stabilité stratégique
Organisation relativement stable
D’après L. G. Thomas, « The two faces of Competition : Dynamic Resourcefulness and the
Hypercompetition Shift », Organization Science, juin 1996.
B. La recherche d’avantages concurrentiels
Le temps acquiert une position centrale dans la stratégie, car il est capital :
– d’être le premier pour pouvoir imposer son rythme aux concurrents ;
– de répondre rapidement aux clients afin de leur faire payer la valeur supplémentaire ainsi
apportée.
La maîtrise du temps (chronocompétition) devient le tout premier facteur de succès de
l’intégration : pour vaincre le temps, l’organisation s’adapte, la stratégie se décide, les hommes se
mobilisent.
Au-delà de la toute-puissance du chronomètre, le cadre des champs de bataille explose. Les lieux
traditionnels de lutte concurrentielle gagnent en instabilité, ce qui impose aux entreprises une
mobilité et une réactivité de tous les instants :
Le champ du positionnement qualité/coût connaît une succession de guerres de prix, puis de qualité,
pour parvenir à un point de « valeur ultime » où les profits ne peuvent être restaurés qu’en créant de
nouvelles sources de différenciation.
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• Le champ du savoir-faire appelle des luttes sans fin entre l’innovateur et les imitateurs ; le
premier fuit en avant et essaie de se protéger, les autres s’ingénient à contourner les
obstacles pour éviter les frais de recherche trop lourds.
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• Le champ des territoires oppose les occupants et les assaillants ; ceux qui tiennent la position
élèvent des barrières à l’entrée mais les autres tentent de pénétrer dans des interstices du
marché où ils seront jugés peu dangereux ; tout s’achève par une mondialisation des
territoires.
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• Le champ de la puissance financière : l’entreprise puissante fortifie sa position en cassant les
prix et en communiquant lourdement, mais les petites firmes s’entendent ou survivent dans
des niches de telle sorte qu’elles constitueront toujours une menace.
Cette grille de lecture de la concurrence montre que toute situation est précaire et que l’entreprise
doit perpétuellement repenser ses stratégies (figure 4.24).
Figure 4.24. La recherche des avantages concurrentiels
G. HAMEL et C. K. PRAMALAD, La conquête du futur, InterÉditions, 1995, p. 24.
C. Le continuous morphing
Ce contexte d’hypercompétition a conduit à proposer un modèle de l’évolution permanente de
l’entreprise à partir d’une étude approfondie de l’entreprise Yahoo.
Les changements de marché et les modifications intervenant dans le jeu compétitif entre les
entreprises remettent en cause les fondements de l’avantage compétitif. L’entreprise réagit par un
continuous morphing c’est-à-dire par un processus de modification permanente de son activité, de
ses ressources et compétences, de sa structure et de sa stratégie. Ce processus est alimenté par le
développement de capacités dynamiques et de flexibilité stratégique. Les capacités dynamiques,
c’est-à-dire la capacité de l’entreprise à intégrer les ressources et les compétences pour définir un
nouvel avantage concurrentiel, jouent un rôle clé dans l’évolution. La flexibilité stratégique traduit
la capacité à changer de stratégie rapidement à partir des nouvelles ressources et compétences
mobilisées. Se produisent alors une migration compétitive d’un champ à un autre et l’apparition
d’un nouvel avantage compétitif éphémère. Le cas de Google atteste le rythme et l’importance des
changements continus qui peuvent se faire uniquement au sein d’une organisation flexible.
D. Les axes d’exploitation de ressources
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Il faut donc exploiter ses ressources au mieux sans se jeter trop avidement vers des choix de
produits et de marché qui seront obsolètes lorsqu’ils seront mis en œuvre. Cinq chemins non
exclusifs conduisent à une exploitation intelligente des moyens disponibles : bien se concentrer sur
les objectifs stratégiques, accumuler plus efficacement les ressources, associer plusieurs types de
ressources, conserver les ressources lorsque c’est possible, et enfin récupérer les ressources le
plus rapidement possible (figure 4.25).
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Figure 4.25. La relation entre continuous morphing et avantage compétitif
Les nouveaux secrets de l’excellence reposent sur les piliers de l’hypercompétition (d’Aveni) :
– satisfaire au mieux les intérêts en jeu (ceux des actionnaires notamment) ;
– pratiquer l’anticipation stratégique en reconnaissant les contours futurs des besoins des
clients ;
– favoriser la rapidité d’action ;
– surprendre ses concurrents pour gêner leur réaction ;
– perturber les règles de la concurrence en faisant des offres novatrices ;
– signaler son intention stratégique pour brouiller la vision des concurrents tout en restant
secret sur les moyens mis en œuvre ;
– organiser des poussées stratégiques simultanées et successives en attaquant sur plusieurs
fronts.
D’après http://www.google.com/corporate/timeline
* développeur
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Tableau 4.19. Une illustration du continuous morphing : Google
Figure 4.26. Les axes d’exploitation des ressources
D’après G. HAMEL et C. K. PRAMALAD, op. cit., p. 185-186.
Gary Hamel propose un modèle d’entreprise reposant sur quatre composantes principales, trois
composantes passerelles et quatre facteurs sous-jacents (figure 4.27). La compétition se joue
aujourd’hui beaucoup plus sur le modèle d’entreprise que, comme naguère, sur les marchés et les
produits.
Figure 4.27. Une démarche globale
1. Les composantes principales
Les principales composantes sont au nombre de quatre :
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• L’axe stratégique décrit en somme ce qui permet à l’entreprise de vivre, une sorte de
business model.
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• Les ressources stratégiques (c’est l’aspect interne) liées entre elles par la passerelle
« configuration » indiquant comment l’entreprise combine et conjugue ses savoirs, ses
objectifs, ses processus.
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• L’interface clients, sur laquelle reposera toute la relation vers le marché, liée à l’axe
stratégique par la passerelle « bénéfices clients » décrivant ce qui est offert aux clients.
• Le réseau de valeurs est très proche de la chaîne de la valeurs du même nom lié aux
ressources stratégiques par la passerelle « frontières » ; c’est le Supply Chain Management.
2. Les facteurs sous-jacents
Ce sont essentiellement :
• L’efficacité. Elle consiste à offrir aux clients un réel avantage.
• La spécificité. Il s’agit d’être le seul à proposer cet avantage.
• La cohérence. Chaque aspect dépend de tous les autres.
• L’accélération du profit. Il convient de faire en sorte que la situation de l’entreprise soit
meilleure que la moyenne.
Les quatre règles non négociables selon P. Drucker(38)
1. Les trois familles de postulats de la logique de l’entreprise (l’environnement – c’est-à-dire la
société, les structures, le marché et le client –, la mission spécifique et les compétences clés)
doivent coïncider avec la réalité.
2. Ces trois postulats doivent être en harmonie.
3. Pour porter ses fruits, la logique d’entreprise doit être connue et comprise par tous à
l’intérieur.
4. La logique d’entreprise doit être sans cesse remise sur la sellette.
Incantations conjoncturelles ou traits marquants qui éclaireront à jamais le panorama des luttes
de demain ? Nul ne peut répondre avec certitude à cette question. Il demeure que beaucoup se
plaisent à faire leur cette boutade : le futur n’est plus ce qu’il était.
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Le trait le plus marquant est l’incertitude. Les consultants de McKinsey estiment que les entreprises
sont confrontées à quatre niveaux d’incertitude : l’avenir relativement clair, l’avenir en alternatives
(quelques scénarios peuvent être prévus), l’avenir en éventail (impossible de prévoir un scénario
plus qu’un autre), l’avenir imprévisible. Confrontée à ces diverses situations, l’entreprise peut :
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– tenter de façonner l’avenir (par exemple, Kodak a voulu imposer son standard dans la
photographie numérique) ;
– s’adapter à l’avenir : on considère que les évolutions futures sont acquises ;
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– ménager l’avenir : préparer des positions pour être capable d’intervenir avant les autres en
fonction des évolutions observées. On voit bien ici que la planification classique perd ses
balises.
Le Business Model
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Le Business Model (BM), également dénommé Business Design, modèle d’affaires ou modèle
d’entreprise, décrit la formule stratégique mise en œuvre par une firme pour « gagner de
l’argent ». L’expression ne doit pas être confondue avec celle de Business Plan qui signifie
« comment gagner de l’argent ». Nous nous situons ici dans le pourquoi. La question est
d’importance puisque le Business Model repose sur des choix d’activité, sur l’organisation de la
chaîne de valeur, les modalités de mise en œuvre des ressources et compétences, les choix des
partenaires et donc des frontières de l’entreprise, la façon dont elle apporte de la valeur aux
clients. C’est bien l’ensemble des décisions stratégiques qui dessine l’architecture du Business
Model. Le défi majeur est qu’aucun Business Model n’est stable. Un tel modèle est appelé à se
transformer en raison de l’évolution des contextes, et notamment de l’arrivée de concurrents qui
s’ingénient à copier – parfois en mieux –, ce qui était jusqu’ici performant. La distribution
classique d’appareils électroménagers par des magasins se trouve confrontée à une nécessité de
changement de BM. La presse écrite, la pharmacie (lorsqu’elle est trop dépendante de produits
princeps), les grands hypermarchés, les chaînes de télévision généralistes et bien d’autres encore
s’interrogent aujourd’hui sur la nécessité de faire évoluer leur Business Model.
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Les entreprises, voire les organisations, diffèrent profondément les unes des autres. La
compréhension de la raison de l’existence d’un ensemble est essentielle avant même le diagnostic
stratégique. Les modèles d’affaires de Vinci, de BlaBlaCar, de WWF ou encore de la SNCF sont
bien différents. Alex Osterwalder et Yves Pigneur ont suggéré une analyse d’un business model en
neuf éléments. D’abord utilisé pour prouver la pertinence du modèle d’une entreprise en création,
le Business Model Canvas est très à même de faciliter l’illustration de la question « Pourquoi une
entreprise gagne-t-elle de l’argent ? ».
Les neuf éléments du Business Model Canvas sont :
• Mes partenaires : qui pour m’aider à baisser mes coûts, à générer plus de valeur, à prendre
contact avec mes clients ? quelles sont les possibilités de synergies ?
• Mes activités : production/services, vente/promotion, administration.
• Mes ressources : compétences, actifs, mes besoins pour délivrer mon offre.
• Mon offre : qu’est-ce que je propose ? quels bénéfices pour les clients en fonction de leur
système de valeur (coûts, temps, énergie, bien-être, etc.) ?
• Ma relation client : les objectifs des clients (conquête, fidélisation, enrichissement,
engagement)
• Mes canaux de distribution : où et comment délivrer des informations et faire aimer,
simplifier l'acte d’achat, fournir mes services, suivre l'utilisation, assurer la satisfaction ?
• Mes segments client : qui aider ? quels sont les vides ? quelles sont les expériences
clients ? qui est décisionnaire ? qui paie ?
• Ma structure des coûts : les coûts générés (temps, argent, énergie) et la façon d’optimiser
leur contribution par rapport à mes propositions de valeur.
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• Mes sources de revenus : quelles sont les valeurs pour lesquelles les autres sont prêts à
payer ? combien ? comment ? quelles sont les autres possibilités de flux de revenus ?
comment optimiser la contribution de chacun des flux au revenu total ?
Mini-cas 1 : l’offre low cost d’Air France
Air France renforce son offre low cost. La compagnie française, dont la filiale Transavia
propose déjà des vols à bas coûts vers des destinations touristiques, annonce aujourd’hui le
lancement d’une nouvelle offre sous son propre nom. Cette offre modifie la classe Economy sur
58 vols courts et moyen-courriers. Selon les informations du Parisien, cette classe sera
désormais scindée en deux variantes : la classe éco Classic – similaire à l’ancienne Economy –
et la classe éco Mini, qui est environ 20 euros moins chère. Son prix de départ : 49 euros, pour
environ 40 allers simples au départ des aéroports d’Orly, de Marseille, Toulouse et Nice. Autres
exemples de destinations à 49 euros : Marseille-Prague, Orly-Montpellier ou Toulouse-Berlin.
Une dizaine d’autres vols sont vendus à 79 euros, comme le Marseille-Marrakech.
Optimiser la compétitivité
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L’offre, qui devrait concerner environ 10 % du volume des vols concernés, nécessitera tout de
même quelques concessions de la part du passager. Le billet, par exemple, ne sera ni modifiable
ni remboursable, et ne permettra pas de cumuler des miles, ces points qui permettent d’obtenir
des réductions et billets gratuits. Le passager devra également attendre d’être arrivé à l’aéroport
afin de choisir sa place, sans pouvoir la sélectionner à l’avance sur Internet. Enfin, à l’instar des
compagnies easyJet ou Ryanair, il ne devra être muni que d’un bagage « cabine » de 12 kg : tout
bagage en soute sera facturé 15 euros.
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L’objectif de la compagnie française – qui poursuit son plan d’économies de 2 milliards d’euros
d’ici à 2015 – est clair : optimiser sa compétitivité et reconquérir les parts de marchés perdues
au profit des compagnies low cost qui ne cessent de gagner du terrain. Le nombre de destinations
concernées pourrait augmenter avant fin 2013.
Q. Périnel, « Air France détaille son offre low cost », Le Figaro,
7 janvier 2013.
Questions
1. Quelle est historiquement la stratégie business d’Air France ? Justifiez votre réponse et
illustrez-la par des exemples concrets.
2. La création de la nouvelle politique tarifaire est-elle une décision marketing ou une
décision stratégique ?
3. Selon vous, pourquoi cette décision a-t-elle été prise ?
4. Y a-t-il un risque d’enlisement dans la voie moyenne ? Pourquoi ?
Mini-cas 2 : Decathlon et l’innovation
Depuis une quinzaine d’années, l’enseigne nordiste s’est organisée pour concevoir des produits
sportifs simples, innovants et à prix abordable. Question d’image... et de rentabilité.
Pour comprendre la manière dont fonctionne l’innovation chez Decathlon, il suffit de se rendre à
Villeneuve-d’Ascq (Nord), de trouver une place sur le parking de Decathlon Campus, puis
d’entrer dans l’un des plus grands magasins de sport d’Europe. Enfin, il faut se faufiler jusqu’à
la porte discrète tapie au fond du rayon cycles.
Derrière, on découvre un autre magasin. Avec la même moquette verte au sol, les mêmes rails
métalliques au plafond, ceux qui subsistent de l’ancienne usine Bull qui occupait naguère les
lieux. Seule différence, les centaines de personnes qui circulent ne sont ni des clients ni des
vendeurs, mais les concepteurs des produits qui viendront bientôt garnir les allées de Campus,
de l’autre côté du mur.
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Oxylane, la maison mère de Decathlon, mise tout sur l’innovation depuis le début des années
2000. « L’objectif, c’est la montée en gamme de nos produits. C’est plus intéressant en termes de
marge, et cela permet de limiter les dépenses publicitaires », explique-t-on au siège d’Oxylane.
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Les premiers tee-shirts Decathlon datent de 1986. Aujourd’hui, plus de 60 % des ventes sont
faites avec des produits maison. Chaque année, 2 800 nouveautés arrivent en rayon, soit 10 % de
l’inventaire.
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Il faudra attendre 2006 et l’arrivée de la tente « deux secondes » – 8 millions d’exemplaires
écoulés – pour que la créativité de l’enseigne saute aux yeux du grand public. « Ils sont très
malins dans l’innovation, très justes dans le rapport qualité-prix, estime Delphine Mathez,
consultante chez Roland Berger. Ils ont aussi la taille nécessaire pour se le permettre. »
C’est Vincent Leenhardt, le directeur de l’innovation d’Oxylane, qui joue le chef d’orchestre.
« C’est un processus d’innovation qu’il faut installer par des personnes innovantes », affirme
celui qui veille à l’articulation – complexe –, entre les différentes entités d’Oxylane :
21 marques « passion » et 12 « marques composants ». Les premières se réfèrent aux univers
sportifs : Kipsta pour le football, Inesis pour le tennis et le golf, ou B’twin pour les cycles. Les
secondes correspondent à des briques technologiques : le travail sur l’étanchéité des textiles
(Novadry), ou celui sur la high-tech (Geonaute). Enfin, Oxylane Research réunit 50 scientifiques
chargés de la recherche fondamentale, dans la thermodynamique, la physiologie, etc. En 2011,
36 brevets ont été déposés par leurs soins dans un portefeuille qui en contient presque 900. Ces
chercheurs travaillent pour toutes les marques du groupe. « Soit elles demandent de l’aide, soit
nous allons leur proposer quelque chose. Notre rôle c’est de partager et de transférer les
connaissances entre les différentes composantes », souligne M. Lennhardt.
Ce dernier n’hésite pas à aller chercher les compétences à l’extérieur. Pour mettre au point une
caméra amovible pouvant filmer à 360 degrés, Geonaute a fait appel à Giroptic, société lilloise
experte en vision panoramique. « Ils nous ont beaucoup appris sur l’apsect industriel, mais ils
fonctionnent en mode start-up », constate Richard Ollier, son fondateur. Autre exemple, pour un
cadenas à vélo, B’twin s’est inspiré des méthodes... de quelques voleurs, rebaptisés pour
l’occasion « partenaires techniques ».
Tout ce petit monde dispose sur place d’un atelier de prototypage, qui permet de fabrique des
« monstres » en moins de 24 heures. Les « tests de torture » sont un autre passage obligé. Chaque
produit fait l’objet d’au moins dix prototypes, et de beaucoup plus de tests, dans des machines
inventées sur place, comme le simulateur de pluie et de vent, caché dans les entrailles de
« Campus ». « C’est cette exigence de sécurité et de qualité qui m’a le plus frappé en découvrant
Oxylane », souligne Olivier Bernasson, patron de Pecheur.com, un site racheté par les Nordistes
en 2010.
Rien ne vaut les essais grandeur nature et la proximité avec les clients. Pour inventer un bouée,
le chef de produit Tribord a pris l’eau 300 fois. Son bureau est à deux pas de la plage landaise
d’Hendaye (Pyrénées-Atlantique). Tout comme Quechua (montagne) est installé à Sallanches, en
Haute-Savoie. Le chef de projet de Startech, l’arc avec des flèches à ventouses, a lui testé le
packaging de son produit dans un magasin, pour « valider le choix et surtout se réconforter ».
Ce dernier a pu confronter son bébé à ceux de ses collègues, le 15 novembre 2012, lors des
Oxylane Innovation Awards. Une grande fête au Zentith de Lille. Pendant deux heures, les
équipes de conception ont défilé sur scène devant 3 000 spectateurs.
Questions
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« Innover, c’est faire un produit astucieux, accorder la technique et le beau pour faciliter la vie
des sportifs, prêchait alors Yves Claude, le directeur général d’Oxylane. C’est plus compliqué
d’innover sur des produits peu chers ! » Au final, l’équipe qui a conçu une besace se
transformant d’un geste en sac à dos a raflé la mise. Il sera en vente en mars pour moins de
40 euros.
J. Dupont-Calbo, Le Monde Économie, 5 mars 2013.
1. Quel est l’avantage concurrentiel de Decathlon ?
2. La stratégie de production de l’entreprise privilégie-t-elle l’intégration ou
l’externalisation ?
3. Quelles sont les compétences et les ressources mobilisées au service de la stratégie
business ?
Chapitre 5
Les stratégies corporate
Les compétences clés à acquérir :
• Repérer les différentes options stratégiques au plan corporate : spécialisation, diversification,
intégration, internationalisation.
• Apprécier les effets sur la gestion de la firme.
• Connaître toutes les options possibles pour se développer ou, au contraire, se désengager.
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• Prendre la mesure de l’importance de la stratégie d’internationalisation dans une économie
mondialisée.
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• Apprécier les objectifs poursuivis par l’internationalisation de l’entreprise.
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La question des stratégies corporate et de la gestion du portefeuille d’activités se pose à toutes les
entreprises. Même les entreprises qui ne se développent que sur un seul DAS s’interrogent sur
l’opportunité de se diversifier et d’élargir ainsi leur portefeuille d’activités. Toutefois, la gestion
des portefeuilles d’activités concerne au premier chef les grandes entreprises qui comptent des
dizaines de DAS. Faut-il poursuivre le développement en dehors du (des) métier(s) d’origine ?
Convient-il de s’intégrer verticalement, d’organiser son développement sur le plan international ?
Autant de questions qui préoccupent les dirigeants d’entreprise. Ce ne sont pas les seuls à raisonner
aujourd’hui en termes de portefeuille d’activités. D’aucuns considéraient, voilà quelques années,
que les outils et concepts d’analyse des portefeuilles d’activités étaient désuets. C’était sans
compter avec le rôle grandissant des actionnaires minoritaires et la recherche croissante de la
valeur par les fonds d’investissement.
Introduction
Au fil des pages précédentes, nous avons rencontré de nombreux cas où les responsables désiraient
faire croître leur entreprise. Si l’on se remémore la démarche stratégique, la question de
l’élaboration du « mix » stratégique se résume en un double choix : soit l’option pour une activité
unique, à savoir la spécialisation, soit l’option pour des activités multiples, à savoir l’intégration
verticale ou la diversification. Du fait de la mondialisation des marchés, ces stratégies font de plus
en plus souvent l’objet d’une internationalisation (figure 5.1).
Figure 5.1. Les orientations stratégiques corporate
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Il va de soi que lorsque les entreprises mettent en œuvre des stratégies interindustrielles, elles
doivent aussi, dans chaque DAS, définir une stratégie intra-industrielle. C’est ici que la stratégie
corporate rejoint la stratégie business. La stratégie corporate vise le P-DG et son COMEX, le CEO.
La stratégie business s’adresse aux responsables de division, mais ceux-ci appartiennent tous à la
même entreprise, au même groupe. Les divisions sont les acteurs d’un certain rang, le siège est le
décideur suprême.
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Les orientations que les dirigeants donnent à la marche des entreprises dépendent de leur
compréhension du monde extérieur, de leur volonté, mais aussi des grands mouvements qui animent
l’histoire économique. Ainsi, pendant la première moitié du vingtième siècle, a-t-on observé que
les grandes firmes prenaient une place de plus en plus importante, tandis que les PME tendaient à
reculer. Pendant les années glorieuses, de 1950 à 1970, la tendance s’est accentuée : la grande
dimension devenant un idéal managérial recommandé parce que l’opinion la désignait comme un
impératif industriel. La petite taille était considérée comme la survivante d’un archaïsme ou d’un
régime qu’il fallait dépasser. Le modèle d’une gestion progressiste se concrétisait dans l’image de
la firme qui bénéficie, grâce à sa grande taille, des avantages de réduction de coûts et qui gère un
portefeuille de domaines d’activités stratégiques copieux et disparate. Les crises économiques ont
fait redécouvrir les qualités propres aux petites entreprises qui, entre autres, créent des emplois et
innovent, alors que les grands groupes suppriment des postes de travail et restent souvent plus
timorés en matière d’innovation.
L’étendue du portefeuille stratégique devient moins prisée par les managers que la spécialisation
sur ce que l’entreprise sait faire. Cette nouvelle direction conduit à une réduction des tailles, une
réduction du nombre des activités, voire des fonctions. Dans un monde qui se globalise, on verra
par exemple telle entreprise européenne confier sa comptabilité à une entreprise d’informatique
indienne. En contrepartie, des stratégies nouvelles apparaissent (partenariat, intrapreneuriat,
essaimage, etc.). Il résulte de ces circonstances nouvelles qu’un enchevêtrement de possibilités
s’offre aux stratèges.
I. La spécialisation
La spécialisation est reconnue depuis Ricardo comme la condition majeure du succès économique,
pas seulement sur le plan de la macroéconomie internationale, mais aussi en ce qui concerne
l’entreprise, car on constate souvent que cette dernière devient moins compétitive que ses
fournisseurs et/ou que ses clients, lorsque ses activités s’étendent abusivement en aval ou en amont.
Quelques précisions s’imposent.
A. Définition
La spécialisation est une orientation simple qui consiste à axer les efforts de la firme sur un marché
et sur un même type de produit. Souvent, il s’agit de la seule possibilité offerte à une petite
entreprise qui devra son succès soit à un avantage en matière de coûts, soit à une différenciation des
attributs du produit ou des services fournis.
La spécialisation s’oppose à la diversification. Mais cette opposition n’est pas binaire, elle relève
plus d’un continuum qui va des entreprises totalement spécialisées qui ne fabriquent (cas désormais
assez rare) qu’un seul produit pour un seul marché à celles qui sont très diversifiées et qui
interviennent sur de très nombreux marchés avec des produits et services très divers.
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La spécialisation peut se définir en termes de compétences. L’opposition entre spécialisation et
diversification s’opérait traditionnellement en termes de produits et de marchés. On raisonne
désormais en termes de métiers et de compétences, car c’est là que se situent les causes de succès
ou d’échec. L’entreprise spécialisée est celle qui concentre son activité et ses ressources sur un
métier défini comme un ensemble homogène de compétences. L’entreprise se diversifie quand elle
doit mobiliser des compétences nouvelles.
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L’entreprise spécialisée est présente sur un seul DAS et va, dans ce DAS, choisir une des stratégies
génériques exposées dans le chapitre 4.
B. Les caractéristiques
En termes de cycle de vie, la stratégie de spécialisation se rencontre plutôt dans les phases de
lancement et de croissance. C’est en effet au cours de ces phases que la concentration des
compétences et des ressources sur une seule activité est la plus nécessaire et la plus efficace. Dans
les phases de maturité et de déclin, la stratégie de spécialisation ne permet plus d’assurer à
l’entreprise la croissance du chiffre d’affaires et devient plus risquée.
Les voies de développement de l’entreprise spécialisée dans son
DAS
L’entreprise spécialisée peut, pour se développer dans son DAS, opter soit pour un
développement géographique, soit pour un développement commercial par élargissement des
gammes. Il ne s’agit pas ici de diversification. Le métier demeure le même :
– Sur le plan géographique, l’entreprise peut étendre sa zone de clientèle. C’est ainsi que
des transporteurs locaux ont étendu leur zone de chalandise au territoire national, sans
changer de métier. De la même façon, la création de zones économiques de libre-échange
et la standardisation des attentes des clients et des consommateurs conduisent des
entreprises françaises à fournir plusieurs pays européens tout en restant dans le même
DAS. L’extension de zone géographique n’est pas une diversification, si le métier de
l’entreprise demeure globalement identique.
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– Sur le plan commercial, l’entreprise spécialisée peut élargir ses gammes de produits,
enrichir son catalogue de produits connexes. La PME agro-alimentaire qui complète sa
production de brioches par des gâteaux quatre-quarts demeure spécialisée. Il en est de
même du distributeur de produits médicaux qui ajoute à son catalogue du matériel
orthopédique.
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La spécialisation peut néanmoins masquer une diversification rampante. Par exemple une simple
extension géographique conduit progressivement à gérer des circuits de distribution nouveaux pour
l’entreprise et des clients aux attentes différentes ou encore l’ajout de nouveaux produits aux
productions et aux catalogues de distribution nécessite l’acquisition de savoir-faire et de
compétences nouvelles. L’entreprise se sera alors diversifiée sans s’en rendre compte. La réussite
dépendra de sa capacité d’apprentissage de compétences qu’elle ne maîtrisait pas jusque là.
Exemple
Un éditeur connaissant parfaitement le circuit de distribution par les librairies
traditionnelles décide, pensant que les méthodes sont très voisines, de distribuer ses
ouvrages dans les grandes surfaces. Il pense mener une opération de spécialisation. En
fait, il se rend compte que les contraintes de livraison, les processus de paiement, les
habitudes de négociation des prix et les méthodes de communication sont autant
d’éléments radicalement nouveaux : il est entré de plain-pied dans une opération de
diversification !
Pour terminer, nous pouvons résumer les points positifs et négatifs d’une stratégie de spécialisation
(tableau 5.1).
Tableau 5.1. Un bilan de la stratégie de spécialisation
Avantages
Inconvénients
• Stimule les effets de l’expérience : avantage de
coûts.
• Facilite la prise de conscience de l’avantage
sur lequel s’élabore la stratégie compétitive de
la firme.
• Risque de miser sur un DAS en déclin.
• Évite la dispersion des ressources et simplifie • Engendre une culture refermée sur elle-même.
la gestion.
• Limite la flexibilité stratégique.
• Assure un développement plus aisément
maîtrisable autour d’un métier.
• Crée une identité homogène et une culture forte.
• Image externe claire.
II. La diversification
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La deuxième orientation pousse l’entreprise à investir dans des activités et/ou des marchés
hétérogènes. Son portefeuille d’activités s’enrichit de nouveaux DAS.
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Exemple
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Google, à son activité initiale de moteur de recherche, va ajouter deux DAS :
l’intelligence artificielle et l’allongement de la vie humaine.
A. La définition de la diversification
La diversification s’oppose à la spécialisation qui consiste, pour l’entreprise, à demeurer dans un
domaine d’activité stratégique. Lorsqu’une entreprise s’éloigne de son domaine d’activité
stratégique, elle est supposée se diversifier. En pratique, le terme de diversification recouvre des
réalités très différentes. Ainsi, on parle souvent à tort de diversification lorsque :
– Nestlé lance une barre chocolatée pour une nouvelle cible ; en fait, c’est une diversification
exclusivement marketing ;
– Danone rachète une nouvelle eau minérale.
Ces exemples montrent que l’opposition spécialisation/diversification, loin d’être dichotomique,
doit être abordée au travers d’un continuum. En effet, dans certains cas, la nouvelle activité est très
voisine des activités actuelles et seules changent quelques variables techniques et/ou marketing.
Dans d’autres cas, le marché n’est pas le même, la technologie est fondamentalement différente.
En fait, l’importance de la diversification doit être appréciée au regard du changement de métier
résultant de la nouvelle activité (figure 5.2).
Figure 5.2. Le continuum spécialisation-diversification
Lorsque le changement est limité, on peut parler de diversification au sens marketing du terme. En
revanche, quand le changement de métier requiert l’apprentissage de très nombreuses nouvelles
compétences, il faut parler de diversification stratégique. On oppose également la diversification
liée (dans un secteur qui présente un lien avec l’activité principale) et la diversification non liée
(dans un domaine sans aucun lien avec l’activité principale).
Plus le changement de métier est important, plus les compétences à acquérir sont nombreuses, plus
les spécificités du nouveau domaine sont grandes du fait de la « distance » entre l’ancien et le
nouveau métier, plus le temps d’apprentissage sera conséquent. Les risques pris par l’entreprise qui
se diversifie sont probablement d’autant plus importants qu’elle s’éloigne de son métier d’origine
(tableau 5.2). Il est cependant vrai que l’entreprise spécialisée sur un secteur en déclin court
également des risques.
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Tableau 5.2. Les caractéristiques opposées des stratégies de spécialisation et de diversification
La diversification peut se représenter par une « étoile » (figure 5.3). On mesure l’ampleur de la
diversification par la distance qui sépare le nouveau métier de l’ancien sur les différentes
dimensions du métier. Si l’on considère que le métier d’une entreprise se définit par une série de
compétences : client, produit, technologique, distribution, géographique, réglementaire, culturelle,
communication, etc., plus l’étoile sera large, plus l’entreprise s’éloignera de son métier ou de ses
métiers.
Figure 5.3. L’étoile de la diversification
B. Les motifs de diversification
Les raisons qui conduisent les entreprises à se diversifier sont nombreuses et souvent
complémentaires. Il faut de prime abord noter que les entreprises qui se diversifient peuvent être
dans des situations économiques fort différentes.
Soit elles sont en bonne santé et la diversification se situe dans une perspective de croissance, elle
traduit la mise en œuvre d’une stratégie de développement ; soit elles sont en difficulté, et dans ce
cas la diversification vise au redressement. Il est clair que les chances de succès ne seront pas les
mêmes (tableau 5.3).
Tableau 5.3. Le contexte de diversification
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Au-delà du contexte dans lequel se situe l’entreprise, on peut plus précisément identifier neuf motifs
de diversification (tableau 5.4).
Tableau 5.4. Les motifs de diversification
Motifs
de la diversification
Illustrations
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• Répartition des risques.
1. Gestion du portefeuille
• Investissement vers des DAS plus rentables ou plus dynamiques.
d’activités
• Compensation du déclin d’un DAS.
• Compensation de la saisonnalité d’un DAS.
• Techniques : l’entreprise valorise dans un autre secteur ses
2. Valorisation de compétences brevets ou un savoir-faire spécifique.
distinctives
• Commerciales : l’entreprise valorise son image sur un autre
marché.
3. Recherche de synergies
• Sur toutes les fonctions de l’entreprise.
• Financières : l’entreprise se diversifie pour placer ses excédents
issus de DAS « vaches à lait ».
4. Investissement de
• Humaines : l’entreprise se diversifie pour utiliser des effectifs
ressources excédentaires
devenus excédentaires.
• Techniques : l’entreprise se diversifie pour « faire tourner » un
outil de production devenu surdimensionné.
• Intégration amont ou aval afin d’acquérir un avantage
concurrentiel (sécurité d’approvisionnement ou de débouché) ou
5. Constitution d’avantages
volonté de réduire le pouvoir de négociation d’un fournisseur ou
concurrentiels
d’un client.
• Rachat d’un fournisseur ou d’un client d’un concurrent, pour le
contourner.
• Rachat dans des conditions avantageuses de fournisseurs, clients,
6. Saisie d’opportunités
entreprises voisines.
• Mégalomanie de dirigeants grisés par un succès dans le DAS
7. Ressorts psychologiques
d’origine.
des dirigeants
• Caractère valorisant des diversifications pour des cadres de
direction.
• Rachat d’un fournisseur unique en difficulté ou d’un client en
8. Obligations
faillite
• Investissement dans les médias pour développer son pouvoir
9. Pouvoir
d’influence.
On retrouve, en matière de diversification, la notion classique de synergie résumée par la formule
2 + 2 = 5. Ces synergies ou complémentarités peuvent être de plusieurs natures. Des illustrations en
sont données dans la tableau 5.5.
Tableau 5.5. Quelques exemples de facteurs de synergie
Facteurs de
synergie
• Image de marque,
communication
• Production
• Logistique
• Système d’information
• Organisation
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• Distribution
• Complémentarité d’achat des services (voyage et hôtellerie).
• Une même force de vente commercialise les deux produits (skis et
raquettes de tennis).
• Un nouveau produit bénéficie de la renommée d’un produit existant
(parfums Jean Paul Gaultier).
• Un produit est fabriqué avec les résidus d’un autre, ou sur les mêmes
équipements.
• Une nouvelle activité bénéficie de la logistique existante (flotte de
camions).
• La gestion de la nouvelle activité bénéficie du système d’information
existant (le système de réservation aérienne est utilisé pour les
réservations hôtelières).
• La même structure organisationnelle sert aux différentes activités.
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C. Les axes de diversification
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• Marketing
Illustrations
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Produire ou vendre dans de nouveaux DAS implique de s’engager dans des activités nouvelles plus
ou moins coûteuses, plus ou moins risquées. Les différentes voies envisageables peuvent être
regroupées à partir de la grille d’Ansoff (tableau 5.6).
Tableau 5.6. Les trois types de diversification
Chaque diversification correspond à un axe de croissance. Une opération de diversification proche
du métier d’origine de l’entreprise est appelée une diversification liée. Elle est non liée dans le cas
contraire.
1. La stratégie de diversification produit
Elle permet à l’entreprise de croître grâce à la vente de nouveaux produits sur le marché.
Une telle stratégie peut être réalisée grâce à deux tactiques :
– lancer purement et simplement un nouveau produit ;
– changer les caractéristiques, les attributs superficiels du produit.
Exemple
On augmente la taille de l’article ; ou bien, au contraire, on le rend plus petit, plus
maniable (une clé USB de 64 gigas qui complète une gamme s’arrêtant jusque là à
16 gigas). Le terme de diversification est dans ce cas quelque peu abusif.
Tableau 5.7. Les avantages et les inconvénients d’une stratégie de diversification produit
Avantages
Inconvénients
Il faut financer des stocks plus importants.
Des difficultés de coordination surviennent.
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Certains produits risquent de concurrencer
d’autres biens de la gamme.
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La gamme des produits offerts s’élargit.
Du côté de la production, certaines économies
peuvent être réalisées en utilisant des
installations ou des services communs, en
standardisant des pièces, en produisant des
éléments s’adaptant à l’un ou à l’autre produit.
Du côté des ventes, si le réseau de distribution
est unique, la réalisation de gains de synergie est
à peu près certaine.
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2. La stratégie de diversification marché
– une expansion régionale ;
– une expansion nationale ;
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Elle ne concerne que les produits actuels, mais on les met en vente sur de nouveaux marchés. Les
tactiques qui résultent de ce choix peuvent prendre les formes suivantes :
– une expansion internationale ;
– l’utilisation d’un nouveau canal de distribution : la vente par correspondance, par exemple ;
– l’exploitation d’un autre segment de clientèle, etc. ;
– Decathlon se lance dans la vente par correspondance ;
– une chaîne d’hôtels ajoute la clientèle des voyages organisés à ses clients habituels ;
– les vêtements Camaïeu ouvrent des magasins en Indonésie, en Malaisie à Singapour.
Tableau 5.8. Les avantages et les inconvénients d’une stratégie de diversification marché
Avantages
Inconvénients
L’entreprise échappe aux aléas qui résultent de
l’exploitation d’un portefeuille de clients trop
étroit.
Les frais commerciaux supplémentaires
entraînés par la conquête de nouveaux marchés –
à l’exportation par exemple – sont souvent
élevés ; ils peuvent mettre en péril l’équilibre
financier de l’entreprise.
La production se développe et le bénéfice des
lois d’apprentissage se fait sentir : les coûts
moyens unitaires diminuent.
L’entreprise est confrontée à de nouveaux
marchés qu’elle ne connaît pas.
3. La stratégie de diversification totale
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Elle suppose le développement simultané de produits nouveaux et de marchés nouveaux. Telle a été
la stratégie de l’entreprise nord-américaine General Electric qui intervient dans des domaines aussi
divers que les services financiers, les générateurs d’énergie, les produits industriels, les moteurs
d’avion, l’électroménager, les médias, le plastique, l’imagerie médicale.
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Exemples
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• Thalès est présent dans l’aéronautique, la défense, l’espace et les transports.
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• L’entreprise canadienne Bombardier intervient dans l’aéronautique, le
ferroviaire, les motoneiges et les scooters de mer.
• À partir des métiers du polyester et du bois qu’elle domine, Beneteau s’engage
dans la production de matériels publicitaires et d’aménagement immobilier, tel
le chalet mobile (accessoirement il évite la saisonnalité du secteur de la
plaisance).
On peut évidemment compliquer le schéma à l’envi (tableau 5.9).
Tableau 5.9. Les différentes stratégies de diversification totale
Quels sont les risques de succès, d’échecs associés à ces différentes stratégies de diversification ?
On observe en fait que les risques d’une stratégie de diversification dépendent de l’ampleur des
compétences à acquérir. Ainsi, la diversification produit est généralement moins risquée que la
diversification marché. L’explication est simple : il est plus facile d’acquérir les compétences pour
maîtriser un nouveau produit que celles pour pénétrer un nouveau marché dont on ignore tout. Les
compétences techniques liées au produit ou service seraient plus facilement mobilisables (soustraitance, licence, alliance, etc.) que les compétences marché. Dans cette optique, bien évidemment
la diversification totale est la plus risquée.
Tableau 5.10. Les compétences à acquérir et les risques
La diversification totale est aujourd’hui considérée comme aventureuse par les marchés financiers.
Les bourses du monde entier préfèrent les entreprises bien centrées sur leur métier ou celles qui se
sont démembrées pour faire vivre des entités distinctes correspondant aux diverses activités : c’est
la technique du split off.
Exemple
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Ne parle-t-on pas de discount congloméral, c’est-à-dire de décote boursière que les marchés font
subir aux entreprises encore tentées par la diversification ? On estime ce discount à 20 ou 25 %.
Cette idée est forte. Elle pourrait se résumer en disant que les investisseurs préfèrent juger par euxmêmes de l’intérêt d’un portefeuille diversifié plutôt que de voir les entreprises assurer cette
diversification à leur place. Il en va tout autrement des diversifications plus modestes, par
extension de gamme ou de marché, afin de bénéficier de gains de synergie certains. Ces stratégieslà sont bien acceptées par les marchés financiers.
En quelques années, la marque Philips s’est recentrée sur les métiers de la santé et du
bien-être. Elle a vu sa rentabilité s’améliorer.
La lecture des cours de la bourse révèle ce phénomène. Lorsque les dirigeants d’une entreprise
annoncent une diversification, le cours risque de brutalement chuter, si les analystes la jugent trop
éloignée du pôle de compétences central. Mais la valeur de l’action peut, à l’inverse, monter si les
mêmes analystes considèrent la diversification comme un développement prudent.
Exemples
Thalès, entreprise présente dans l’aéronautique, la défense, l’espace et les transports
est estimée trop diversifiée par les analystes financiers. Mais, à l’inverse, Apple,
jugée trop spécialisée sur l’iPhone et l’iPad, connaît une mauvaise année boursière
alors qu’Amazon, qui élargit son offre, est la coqueluche des traders.
Tableau 5.11. Un bilan de la stratégie de diversification
Avantages
Inconvénients
• Ampleur des investissements.
• Réduction du risque.
• Dispersion des ressources, des compétences.
• Création de richesse par synergie.
• Manque d’unité entre les différentes activités.
• Amélioration de la structure du portefeuille des • Difficulté pour les dirigeants de connaître et de
DAS.
maîtriser leurs différentes divisions.
• Développement de nouvelles compétences.
• Obstacles à la sortie.
• Plus grande flexibilité stratégique.
• Perte d’identité, affaiblissement de la culture.
• Image vis-à-vis des marchés financiers.
D. Le balancier stratégique
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Si l’on dépasse l’actualité du moment, on peut dire que dans une grande entreprise, la spécialisation
est rare sur une longue période. La firme est conduite à se diversifier et/ou à intégrer certaines de
ses activités. Toutefois, il serait vain de penser que toutes les activités d’une branche sont
maîtrisables à l’infini. Aussi observe-t-on, surtout en période de conjoncture difficile, des
manœuvres de repli vers des activités où la firme possède de réelles capacités. On parle alors de
stratégies de recentrage qui prennent généralement trois formes :
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• Le recentrage sur le métier vise à sélectionner les technologies maîtrisées grâce auxquelles
la firme possède un avantage compétitif. Pour accentuer les efforts positifs de la
spécialisation, la firme entamera des transactions avec des partenaires, en tentant d’imposer
à ces derniers des accords contractuels privilégiés (sous-traitance ou distribution
exclusive).
• Le recentrage sur la mission est davantage lié au souci de marketing qu’à la technologie. Le
problème consiste à définir le besoin à satisfaire de manière à proposer une palette de biens
et de services complémentaires propres à lui répondre. L’analyse de cette mission servira à
définir une identité pour la firme et à bâtir une image auprès du public.
Exemple
Yahoo, recentré sur la technologie et le mobile, a vu son cours de la Bourse se
redresser, avant qu’il ne redescende aux enfers.
• Le recentrage géographique est lié à l’insécurité dans certains pays.
Exemple
Carrefour s’est retiré de l’Indonésie après une série d’attentats.
C’est en fait un mouvement de balancier stratégique que l’on observe (figure 5.4).
Figure 5.4. Le balancier stratégique
En somme, on peut considérer que, pour les grands groupes, la spécialisation correspond à
l’exploitation de paniers d’activité fondés sur la maîtrise de savoir-faire déterminants, la firme
externalisant les activités jugées non essentielles.
On comprend aisément les avantages fournis par la spécialisation, qui se révèle plus facile, plus
rapide à mener et moins dangereuse que toute autre stratégie.
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Toutefois, le risque n’est jamais définitivement éliminé, puisque l’entreprise concentre ses efforts et
ses ressources sur un domaine. Un événement survient, une mutation technologique par exemple, et
voilà notre firme ruinée.
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Enfin, la spécialisation des hommes et des techniques peut parfois entraîner des rigidités
sclérosantes qui brident toute capacité d’adaptation.
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III. L’intégration verticale
Une troisième orientation consiste à prendre place verticalement soit vers l’amont du domaine
d’activité stratégique actuel, soit vers l’aval (figure 5.5). La stratégie d’intégration peut être
considérée comme une forme particulière de diversification dans la filière.
Les problèmes nouveaux qui se posent sont assez différents selon que l’intégration a lieu vers
l’amont ou vers l’aval. Dans le premier cas, l’opération revient à se substituer à un fournisseur
(Renault décide de fabriquer des phares). Mais, dans le second, l’entreprise se retrouve
concurrente de ses propres clients (Lafarge produit des maisons préfabriquées).
Figure 5.5. Les deux formes d’intégration verticale
Exemples
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Dormeuil, d’abord fabricant de lainages haut de gamme, a commencé par prendre pied
dans la confection en produisant une ligne de vêtements puis décidé d’ouvrir des
boutiques. Leroy Merlin, chaîne de bricolage, se lance dans la livraison et le montage
à domicile. Apple se sépare de ses revendeurs et opère de plus en plus exclusivement
par le canal des Apple stores.
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À ceci, il faut ajouter que l’intégration risque de poser des problèmes techniques ou humains
insurmontables. Dans une entreprise, il existe un savoir-faire, une expérience technique accumulée
qui fait que, à un moment donné, elle est capable de dominer une technologie déterminée. Changer
de métier peut ruiner cet avantage.
Les motifs d’une telle politique sont nombreux. Ils sont financiers, technologiques et stratégiques
(tableau 5.12).
Tableau 5.12. Les motifs d’intégration
Motifs financiers
Motifs
technologiques
Motifs stratégiques
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• Diminution du pouvoir de
négociation des fournisseurs
ou des clients
• Accroissement de la taille de
l’entreprise.
• Possibilité de jouer avec les
• Appropriation des marges
• Acquisition des technologies prix de cession interne.
bénéficiaires des fournisseurs
amont et / ou aval.
• Élévation des barrières à
et / ou des clients.
• Amélioration de la maîtrise l’entrée pour d’éventuels
• Baisse des coûts de contrôle et
de la qualité.
nouveaux entrants.
de coordination.
• Simplification des process de • Sécurité des
• Baisse du coût des stocks
fabrication.
approvisionnements ou des
amont et / ou aval.
débouchés (marchés captifs).
• Meilleure adéquation entre les
aptitudes de la firme et les
facteurs de réussite sur le
marché (pour l’intégration
aval).
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L’analyse des 5 + 1 forces de Porter peut conduire à la mise en évidence d’un pouvoir de
négociation d’un fournisseur ou d’un client jugé excessif qui conduit l’entreprise à mettre en œuvre
une stratégie d’intégration amont ou aval pour y mettre fin.
On peut résumer les avantages et les inconvénients d’une stratégie d’intégration (tableau 5.13).
Au cours des décennies passées, les entreprises ont plutôt eu tendance à aller dans le sens de
l’intégration aval. Cette manœuvre stratégique permet en effet aux entreprises, notamment
industrielles, de se rapprocher du client final. Dans un environnement changeant où les exigences
des marchés sont fluctuantes, mieux vaut être plus proche des consommateurs. C’est ce qui explique
que de nombreux producteurs aient créé leur propre réseau de distribution. Ne s’intègrent en amont
que les entreprises cherchant à s’assurer un approvisionnement régulier en matière première (ou en
composants), ou celles qui doivent s’approprier une technologie amont. C’est le cas dans le
domaine des TIC où les grands acteurs s’intègrent en amont par croissance externe pour maîtriser
des technologies émergentes.
Tableau 5.13. Un bilan de l’intrégration
Avantages
Inconvénients
• Diversification des activités.
• Découverte de marchés nouveaux plus
rentables.
• Élévation de barrières anticoncurrentielles.
• Diminution des risques.
• Réalisation d’économies (essentiellement de
coûts de transaction).
• Élargissement de l’information.
• Accroissement du pouvoir sur le marché.
• Approvisionnements et débouchés captifs.
• Besoins d’investissements très lourds.
• Assèchement des ressources.
• Frein au développement du métier de base de
l’entreprise.
• Dispersion.
• Réduction de la flexibilité.
• Multiplication d’obstacles à la sortie.
• Difficulté de coordination.
• Perte de l’identité, dilution de la culture
d’entreprise.
Exemples
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Cisco rachète la société Meraki pour permettre à sa base de clients de taille moyenne
d’accéder aux solutions cloud. Microsoft achète Skype, leader mondial de la
téléphonie par Internet, pour se rapprocher de ses clients.
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Actuellement, les pénuries sur les marchés des matières premières conduisent les entreprises à
développer, à nouveau, des stratégies d’intégration amont.
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Pour conclure sur la question du choix stratégique corporate qui oppose spécialisation et
diversification, on peut résumer le dilemme auquel les dirigeants se trouvent confrontés :
• Rester spécialisé, bénéficier des avantages d’économies d’échelle, d’expérience, de
concentration des ressources, mais courir le risque du déclin du DAS unique sur lequel
l’entreprise est positionnée.
• Se diversifier, bénéficier des avantages de la répartition des risques liés au cycle de vie des
DAS, mais courir le risque du changement de métier, de la non-maîtrise des compétences et
de la dispersion des ressources. Une fois de plus, le manager doit gérer un équilibre
(figure 5.6).
Figure 5.6. L’équilibre des risques entre spécialisation et diversification
IV. L’internationalisation
L’internationalisation, cette stratégie de développement à l’étranger, hors de la région ou de l’État
d’origine de l’entreprise, a constitué depuis des siècles, une voie stratégique prometteuse et
risquée. Recherche particulière du développement des marchés, selon la classification d’Ansoff, la
mondialisation contemporaine met le monde entier présent dans les entreprises et oblige les
managers de toutes les firmes, les grandes comme les petites, à s’internationaliser.
Plus qu’un choix parmi d’autres, l’internationalisation, qui conduit à accroître l’engagement des
entreprises dans des opérations multinationales, devient le passage obligé, où se rencontrent toutes
sortes d’organisations : des groupes géants tels General Electric, IBM ou Facebook, mais aussi des
PME, voire des TPE, qui exportent leurs produits et s’approvisionnent auprès de fournisseurs
lointains. Contrainte existentielle, l’internationalisation prend des formes multiples, depuis
l’exportation jusqu’à la globalisation de la stratégie. Elle concerne aussi bien les stratégies
business que les stratégies corporate.
Si la mondialisation pousse inéluctablement l’entreprise à s’internationaliser, cette orientation n’est
pas seulement un destin, c’est de plus en plus souvent un choix délibéré et conscient.
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A. De la mondialisation à la globalisation
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1. Le processus
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Le phénomène de mondialisation n’est pas neuf. Marco Polo, comme les grands marchands
de Gênes et de Venise, furent les premiers champions du « commerce au loin », selon l’expression
de l’historien Fernand Braudel. La mondialisation va prendre son essor avec la Révolution
industrielle et les aventures coloniales. Au cours de cette première phase du phénomène, qui
s’étend jusqu’au milieu du XXe siècle, les échanges de marchandises, de capitaux et de personnes
s’accélèrent d’un pays à l’autre mais aussi entre les continents.
À partir de 1950 se produit une véritable révolution : de nombreuses entreprises américaines puis
européennes deviennent transnationales. Elles franchissent les frontières et commencent à se
délocaliser, puis à externaliser certaines activités, conservant dans leur giron ce qu’elles savent
faire et se séparant de ce que d’autres peuvent produire à moindre coût.
La nouvelle mondialisation, baptisée « globalisation » dans le monde anglo-saxon, débute à la fin
des années 1970. À partir de 1980, elle accélère, change de nature sous l’impulsion de multiples
facteurs et ne se limite plus seulement aux pays occidentaux pour atteindre les entreprises des pays
en développement.
Notons un point de vocabulaire : comme la plupart des spécialistes, en France, nous parlerons
plutôt d’« internationalisation », s’agissant d’opérations menées par l’entreprise hors de ses
frontières. En revanche, nous réserverons le terme de globalisation pour toute stratégie coordonnée
dans de nombreux pays.
2. Les moteurs de la globalisation
Des mutations d’envergure se produisent :
• Des mutations idéologiques : au moment où le système communiste s’effondre, le
libéralisme, voire l’ultra libéralisme, s’affirme avec force. Il prend essentiellement
naissance dans les pays occidentaux qui au même moment s’efforcent de promouvoir leurs
valeurs : les droits de l’homme, assortis de la démocratie sur le plan politique et du libreéchange en matière économique. D’où la création, après celle de l’Europe élargie, de vaste
zones commerciales, telles le Mercosur (Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay), le NAFTA
(États-Unis, Canada, Mexique), ou l’ASEAN (Indonésie, Malaisie, Philippines, Thaïlande,
Brunei, Vietnam, Laos, Cambodge) et le SAFTA (Pakistan, Inde, Sri Lanka, Bangladesh,
Népal, Bhutan, Maldives).
• Des mutations technologiques : dans tous les domaines les progrès se multiplient, mais les
avancées les plus fondamentales ont consisté en la création du réseau Internet et en
l’émergence continue de TIC.
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• Des innovations financières : grâce à la généralisation des 3D (dérèglementation,
décloisonnement, désintermédiation), se produit un séisme d’ordre financier. Les frontières
entre marchés nationaux et supranationaux s’effacent, tandis que se développent les grands
réseaux boursiers qui fonctionnent 24 heures sur 24, tous les jours de la semaine. De
nouveaux produits financiers facilitent la collecte de l’épargne et permettent aux agents de
diversifier leurs opérations, tout en se protégeant mieux contre les risques. De puissantes
banques remplacent les intermédiaires indépendants.
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• Des innovations managériales : les techniques de production flexibles permettent de baisser
les coûts de production, de faciliter l’adaptation des produits à des besoins divers et de
diminuer la durée des cycles de fabrication.
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• L’apparition de nouveaux marchés géants au moment où certains pays en voie de
développement enregistrent une expansion vigoureuse, notamment les BRICS (Brésil,
Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).
De ces changements résultent trois évolutions de grande portée qui contribuent à modifier les
stratégies des entreprises :
• La mondialisation de la demande. Une clientèle potentielle mondialisée apparaît. Elle est
constituée par ces foules de consommateurs de toutes nationalités qui, de Paris à Brasilia ou
à Tokyo, achètent les produits des marques mondialisées dans les mêmes circuits de
distribution. Une telle homogénéisation de la demande ne concerne pas seulement les
produits de consommation courante. Elle touche aussi les consommateurs de produits
industriels, les fabricants de composants électroniques ou encore les acheteurs de pièces
pour l’aéronautique. Ainsi, Zodiac vend ses pièces à Airbus, à Boeing, à Dassault, à
Bombardier et à Embraer.
Exemples
L’explosion d’Amazon, pour ce qui est du commerce en ligne, ou encore l’implantation
de cafés Starbucks à Paris, Casablanca ou Pékin entraînent une homogénéisation des
comportements d’achat. Les mêmes segments de clientèle émergent par conséquent sur
tous les continents.
• La mondialisation de l’offre. La révolution des transports et des communications aide les
entreprises à répartir leurs activités sur un plan mondial. Les managers disposent donc des
moyens de penser et d’agir à un niveau mondial. Ils élaborent des stratégies globalisées,
relatives à leur présence dans tel ou tel lieu, sur la base d’alliances ou de transferts de
technologies.
• La mondialisation de la concurrence. Les concurrents eux aussi adoptent des stratégies
mondialisées. L’entreprise les affronte par conséquent sur les mêmes marchés et elle doit se
doter d’avantages concurrentiels globalisés pour les égaler et les dépasser sur de nouveaux
marchés.
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Figure 5.7. Les moteurs de la globalisation
B. Les finalités de l’internationalisation
Si nous reprenons ici ce terme de finalité, utilisé dès le début de l’ouvrage, c’est parce que ce mot
renvoie au fond à la motivation de l’action stratégique. Au-delà de la quête de buts généraux
(rentabilité, croissance, etc.) déjà étudiés, nous examinerons les raisons profondes qui incitent les
managers à s’engager dans des aventures lointaines exigeant le déploiement de compétences
appropriées.
1. Les facteurs d’internationalisation
L’expression « facteurs d’internationalisation » fréquemment employée désigne les motifs, les
raisons qui incitent les dirigeants à s’installer au loin. Dans le cadre d’une recherche tout à fait
classique de développement, quatre séries de facteurs poussent les managers à regarder au-delà des
frontières étroites du territoire national :
• Une demande élargie. Les nouveaux marchés internationaux sont d’autant plus alléchants
que se produit au fil du temps une convergence des besoins et que les mêmes segments de
clientèle se rencontrent ici ou là. Ainsi, une classe moyenne/supérieure émerge partout dans
le monde. Malgré des écarts de revenus et des différences culturelles, un Brésilien et un
Indien tous deux formés en Californie ont des réactions comparables en matière
d’innovations informatiques ou de produits pharmaceutiques.
• Une baisse des coûts. Elle résulte des économies potentielles réalisables, qu’il s’agisse
d’économies d’échelle ou de bénéfices tirés des effets de l’expérience. À ces deux raisons,
on ajoutera les économies possibles dues à la localisation (baisse des coûts de la maind’œuvre ou des transports notamment).
Exemples
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Nike s’installe en Asie du Sud-Est pour fabriquer ses produits à des coûts moins
élevés que ses concurrents. United Fruit possède des milliers d’hectares de plantations
de fruits en Amérique du Sud et en Amérique centrale. La production intensive
pratiquée permet de baisser fortement les coûts de production.
By
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• Des armes contre la concurrence. Celle-ci redoublant d’intensité au niveau mondial, elle
incite les managers à rechercher inlassablement de nouvelles sources d’avantages
concurrentiels partout dans le monde (meilleurs partenaires pour produire ou pour
distribuer leurs produits, par exemple).
• Des environnements politiques ou législatifs favorables. Certains responsables politiques
incitent les entreprises étrangères à s’installer chez eux en pratiquant, comme l’Irlande, le
dumping fiscal.
Ces facteurs procurent à l’entreprise qui s’internationalise une série d’avantages concurrentiels.
Des avantages de localisation, comme on vient de le constater, mais aussi des avantages
organisationnels qui permettent de réduire les coûts de transaction, de développer l’emploi des
compétences, de réaliser des économies d’échelle ou d’obtenir des gains d’expérience ou de
synergie, enfin d’élargir ses réseaux (clients, fournisseurs, partenaires, etc.).
Exemple
L’entreprise coréenne Samsung s’est implantée, dans les années 1980, dans la
SiliconValley en vue de s’initier à l’informatique à un moment où l’entreprise ne
produisait que des postes de radio. Sur place, les managers coréens ont appris à
maîtriser de nouvelles technologies. Ils ont noué des liens avec les universités
américaines pour recruter, le moment venu, des informaticiens et des chercheurs.
Soulignons que les incitations à se mondialiser ne se limitent pas à la production de biens
matériels. Elles touchent aussi les vastes domaines des services.
L’offshoring et l’internationalisation des services(39)
Délocaliser des activités tertiaires qui n’appartiennent pas au cœur du métier, la logistique ou la
comptabilité, devient fréquent. L’offshoring consiste à faire réaliser à l’étranger des services qui
seront consommés ailleurs que dans le lieu de la production du service. Plusieurs activités sont
concernées par cette pratique : l’informatique, les services après-vente, la réalisation de
logiciels, la banque, les assurances, l’audiovisuel, etc.
Pour remédier à une panne de Livebox ou de matériel chez Orange, chacun de nous a déjà eu des
contacts, plus ou moins fructueux d’ailleurs, avec un de ces centres d’appel installés dans des
pays où le coût de la main-d’œuvre est bas.
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L’offshoring exige le plus souvent une proximité (near shore) culturelle et linguistique entre les
pays partenaires : les pays anglo-saxons avec l’Inde ; la France avec le Maghreb. Notons à ce
sujet que le Maroc envisage de créer, à Casablanca, le site Casashore qui rivaliserait avec les
implantations indiennes.
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L’onshoring (offshoring à domicile) consiste à employer dans l’entreprise du personnel
originaire des pays étrangers où se pratique l’offshoring aux conditions de ces pays.
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Ces pratiques sont parfois critiquées en raison des discriminations qu’elles entraînent et des
dépendances qu’elles suscitent entre les partenaires.
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Un certain nombre de dirigeants de secteurs high-tech ont compris qu’au-delà de la recherche
d’avantages particuliers, c’est l’internationalisation elle-même qui, dès la naissance d’une
entreprise ou d’un projet de développement à l’intérieur d’une entreprise existante, est un passage
obligé. On parle donc, dans cette perspective, d’entreprises born global et de « global
entrepreneurs », dont le monde est la cible. Ces managers placent d’entrée de jeu leur stratégie dans
un cadre mondial. Parmi celles-ci, on trouve, par exemple, des start-up spécialisées dans les
nanotechnologies ou encore dans du matériel médical très perfectionné.
2. Les compétences nécessaires
La réussite de l’internationalisation repose sur de nombreuses conditions :
• Les compétences des dirigeants. En effet, l’équipe de direction ne peut manquer
d’ouverture sur le monde et de curiosité pour réussir ses opérations. Ses responsables
doivent aussi posséder une résistance aux risques supérieure à celle exigée pour la conduite
d’opérations courantes.
• Une bonne maîtrise de l’information. L’engagement hors des bases nationales suppose la
collecte d’une masse d’informations politiques, économiques, sociales, technologiques,
financières.
• Une intelligence de la complexité. Les informations sur les marchés étrangers ne sont pas
seulement nombreuses, elles sont souvent confuses, partielles et compliquées à déchiffrer.
• Des connaissances étendues. Pour procéder aux opérations courantes avec des partenaires
étrangers, il convient de maîtriser un certain nombre de langues, mais il est aussi opportun
de connaître les caractéristiques culturelles des personnes avec lesquelles on est conduit à
négocier.
L’internationalisation est de plus en plus complexe du fait de la diversité de l’espace économique
mondialisé. À cette difficulté s’ajoute l’obligation de prendre en compte une multitude de variables,
lorsqu’on élabore un plan stratégique. L’internationalisation suppose donc l’acquisition progressive
de nombreuses compétences : des connaissances solides bien sûr, mais aussi des qualités morales,
de l’initiative, de la curiosité, de l’ouverture d’esprit. En outre, la croissance à l’international
impose la recherche d’une compétence précieuse : la flexibilité, dont les besoins vont croissant
avec la complexité des opérations.
Tableau 5.14. Les compétences à l’international
Un portefeuille de compétences
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Les valeurs d’ouverture au monde des dirigeants L’intelligence de la complexité
La maîtrise de l’information
Des connaissances étendues
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C. Les stratégies d’internationalisation(40)
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Le terme de processus, que l’on utilise fort souvent en management, convient particulièrement à
l’internationalisation des entreprises, dont les managers doivent, tout à la fois, renforcer leur
avantage concurrentiel et coordonner leurs actions. Trois types de décisions commandent la
stratégie : où ? quoi ? comment ?
Il s’agit plus précisément :
• De déterminer la localisation.
• De se décider relativement à l’alternative de standardisation ou d’adaptation locale.
• De choisir un des modes possibles d’internationalisation.
1. La stratégie de localisation
Les managers, quelles que soient les branches d’activité et la taille des entreprises dans lesquelles
ils exercent leur métier, ne peuvent être présents sur tous les marchés, sur tous les continents, pas
même dans tous les pays réputés les plus attractifs. L’examen de plusieurs critères aide à prendre
des décisions.
a. La proximité géographique et culturelle
Certains pays sont proches non seulement en distance, mais aussi par les mœurs, le droit, la langue
et le niveau de vie. C’est donc dans ces lieux que l’on commence à vendre, voire à s’implanter.
Parfois, le poids des coûts de transport constitue aussi un argument pour localiser les centres de
production près des clients.
b. Les barrières à l’entrée
Elles ne sont pas seulement douanières mais dépendent plus subtilement de la nature des normes
sanitaires ou techniques.
c. La maîtrise du marketing
Dans certains pays, les comportements sont comparables. Les clients peuvent alors être facilement
identifiés et fidélisés. De même, la connaissance des circuits de distribution peut constituer un
argument pour s’implanter à l’étranger.
d. Les risques
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L’internationalisation est ambiguë en termes de risque encouru par l’entreprise. D’un côté, elle le
diminue ; d’un autre, elle l’augmente. Elle le diminue parce qu’elle répartit les aléas sur plusieurs
marchés et parce qu’elle procure un supplément de vente. Mais, par ailleurs, elle l’augmente, car
l’ouverture au loin entraîne de nouveaux dangers.
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Tableau 5.15. Les risques liés à l’internationalisation
Parmi les risques importants, il en est deux dont le poids est considérable :
• Le risque économique. Il résulte tout d’abord de la fluctuation des taux de change. Il affecte
aussi bien les échanges commerciaux (exportations et importations) que les opérations
financières de l’entreprise (emprunts et investissement), mais à ce risque monétaire
s’ajoutent d’autres dangers économiques : l’arrivée de nouveaux concurrents, les
modifications des circuits de distribution, les changements des consommateurs, etc.
Exemples
• Les assembleurs automobiles ont diminué leurs investissements dans les pays
émergents d’Amérique du Sud qui connaissent une croissance médiocre en
2015.
• Toujours en 2015, Thalès a remis à un terme indéterminé des programmes
prévus au Brésil.
• Le risque politique. Il a pour origine l’incidence des troubles et des bouleversements dont la
prévision est difficile dans un monde en mouvement. Nombreuses sont les conséquences de
ces aléas. C’est une filiale que l’on perd en Libye, c’est une créance impayée au Mexique,
c’est la rupture abusive d’un contrat en Malaisie, c’est le blocage des capitaux en Birmanie,
etc.
Il existe de nombreuses méthodes d’évaluation et de gestion du risque pour des pays donnés. Les
plus simples consistent à évaluer plusieurs critères déterminants en recourant à un calcul de notes
pondérées. D’autres méthodes utilisent l’analyse des données et visent à établir des scenarii pour
ensuite classer les pays en fonction des risques qu’ils présentent.
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La sensibilité des entreprises au risque-pays varie selon leur taille. Les PME ne sont pas
nécessairement les plus fragiles car les grands groupes suscitent, dans les pays où ils sont
implantés, des envies et des jalousies à la mesure de leur pouvoir.
Tableau 5.16. Une évaluation des risques-pays par la méthode des scores pondérés
Pays A
3
4
12
6
18
2
5
10
6
12
2
4
8
2
4
3
3
9
4
12
1
6
6
8
8
1
7
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|
7
7
7
7
$!
7
5
5
8
8
6
6
2
8
16
4
8
1
5
5
7
7
3
7
21
5
15
1
8
8
2
2
2
6
12
5
10
1
8
8
3
3
1
1
4$
– Stabilité politique,
risque terroriste
– Attitude à l’égard des
investissements étrangers
– Possibilité de transfert
des bénéfices
– Tendances aux
nationalisations
– Difficultés
administratives
– Respect des contrats
– Existence d’un droit des
affaires
– Moyens de transferts
– Qualité des
communications
– Confiance envers le
partenaire
– Taux de croissance
économique du pays
– Inflation
– Possibilité de convertir
la monnaie locale en
devises fortes
– Coût du crédit
Coefficient
Note
Note
1
de
Note
Note pondérée
pondérée
pondération
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Critères
1371
1. A obtient la meilleure note. Il présente moins de risques que B.
Total
Pays B
117
Enfin, l’intensité du risque varie selon la nature de la transaction : les gros contrats de vente
d’équipements industriels, une centrale nucléaire par exemple, semblent plus exposés aux aléas
politiques que la simple exportation ou l’ouverture d’une filiale de vente, car l’enjeu économique
est plus important et le délai de réalisation plus long.
Exemple
Areva a renoncé à construire des usines de composants lourds ailleurs qu’en France.
Une fois les risques mieux cernés, il est judicieux d’étudier les clientèles possibles afin de repérer
des groupes possédant, d’un pays à l’autre, des caractéristiques communes.
2. Le dilemme : adaptation ou standardisation ?
Les stratégies oscillent entre deux extrêmes :
• L’adaptation de la stratégie aux exigences de chaque marché étranger sélectionné afin de se
rapprocher au mieux du consommateur. C’est l’affirmation actuelle de Coca-Cola qui,
soucieux de se démarquer de son image de marque arrogante et globale, joue le « Think
global, act local » (tout en insérant chaque action locale dans une réflexion globale, bien
évidemment).
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• La standardisation, ou globalisation au moyen de laquelle on tente d’offrir un produit
uniformisé sur tous les marchés visés, en vue de profiter des économies d’échelle
techniques ou bien entendu commerciales. Certes, la seconde stratégie, la standardisation,
est séduisante, parce que moins onéreuse et moins compliquée. Toutefois, son emploi est
limité par certaines contraintes. La sagesse incite alors à mettre en application la célèbre
formule : « think global, act local », c’est-à-dire un peu de mondialisation, mais également
un effort de customisation.
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a. Les limites à la standardisation
Les difficultés inhérentes à ce choix sont observables non seulement hors de l’entreprise, mais aussi
en son sein :
Les contraintes externes
Voilà quelques années, de nombreux spécialistes américains de marketing pensaient que les
produits élaborés dans une firme texane devaient convenir aussi bien aux habitants de Dallas qu’aux
consommateurs du reste du monde. En effet, l’idéologie de l’époque postulait : « World is a
village ». Cependant, depuis plus de trente ans, l’examen des faits oblige les managers à douter
d’une telle universalité. Nombreux sont en effet les produits qui réussissent une percée sur tel
marché national et qui échouent ailleurs.
Exemple
Les apéritifs anisés (pastis, ouzo, anisettes), tellement prisés en Europe
méditerranéenne, déplaisent en Allemagne à cause de leur goût et de leur couleur qui
rappelle aux clients d’outre-Rhin un précipité chimique.
Trois catégories d’obstacles empêchent le développement de la standardisation :
– les obstacles économiques ;
– les obstacles culturels ;
– les obstacles juridiques.
Même sur un plan plus restreint que la terre entière, la standardisation est parfois refusée. On a
longtemps pensé, par exemple, qu’un euro-marketing dans le domaine des produits alimentaires
allait banaliser les politiques commerciales. Or on peut constater que cette simplification est
difficile à réaliser. Certes, d’une part les goûts changent d’une province à l’autre (il n’est pas sûr
qu’un Alsacien appréciera la cuisine sicilienne) mais, d’autre part, les formules de distribution
varient d’un pays à un autre.
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En Allemagne, à côté des grandes surfaces traditionnelles imitant le modèle américain, se sont
développés des hard discounters qui pratiquent des prix très bas sans accompagnement de service.
En Italie et en Espagne, le commerce traditionnel reste la formule dominante : le consommateur
méditerranéen, bien que relativement moins riche que celui d’Europe du Nord, préfère les contacts
personnels avec un commerçant familier que la fréquentation de magasins anonymes qui proposent
des premiers prix attractifs.
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Exemples
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Coca-Cola Company, société propriétaire de la marque et du savoir-faire, élabore à
Atlanta les principes du marketing mondial mais Coca-Cola Entreprise, à Paris, a toute
latitude pour organiser la rencontre avec les consommateurs par les canaux les plus
adaptés à ce marché particulier. À l’inverse, le territoire de communication de
Gillette, la jeunesse et l’homme universel, est décliné dans le monde entier.
Les contraintes internes
On relève généralement deux difficultés freinant la standardisation.
Souvent, des engagements préalables pris à l’étranger, avec des distributeurs par exemple,
empêchent d’appliquer la même politique ici et là. Mais, plus souvent encore, les problèmes
surgissent sur le plan de l’organisation.
En effet, la standardisation suppose, pour entraîner des économies d’échelle, une relative
centralisation des décisions, processus qui, lui-même, risque d’entrer en conflit avec la souplesse,
donc avec la décentralisation nécessaire à l’adaptation à des marchés locaux.
Le dépassement du dilemme adaptation/standardisation : des différenciations spécifiques
Le dogmatisme, qui a parfois prévalu au cours des vingt dernières années en faveur de l’une ou de
l’autre branche de l’alternative, n’est plus de saison. On sait que des modifications stratégiques
mineures s’imposent. Elles ne touchent pas seulement le marketing-mix de l’entreprise, mais aussi
la gestion des ressources humaines. Ainsi, le style de commandement, qui s’exerce chez Renault au
Maroc diffère de celui pratiqué dans les sites de production roumains.
Figure 5.8. La demande d’un produit dans divers pays
3. Les modalités de l’internationalisation
Elles sont nombreuses, parce qu’elles dépendent de multiples déterminants. Pour nous en tenir à
l’essentiel, nous distinguerons trois modalités stratégiques :
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– les stratégies d’exportations directes ou indirectes et qui dépassent par leur complexité le
simple développement de marché ;
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– les investissements directs réalisés sur des marchés extérieurs pour y vendre, voire pour y
produire ;
– les partenariats d’ordre divers réalisés avec des firmes étrangères.
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Pour mieux repérer les différentes modalités, il est possible de décrire l’internationalisation comme
un processus qui partirait du plus simple pour aller vers le plus complexe.
En réalité, le choix d’une des phases ne correspond pas aux moments successifs de ce sentier. Il
dépend d’une multitude de facteurs propres à l’entreprise ou à l’environnement comme :
– la taille de l’entreprise ;
– l’expérience et volonté des managers ;
– les disponibilités financières ;
– la taille du marché visé ;
– les risques encourus ;
– l’existence de partenaires compétents, etc.
Soulignons aussi que ces stratégies se combinent généralement au gré de l’expansion du groupe.
Figure 5.9. Le processus d’internationalisation
Exemple
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Renault produit déjà des véhicules au Maroc et s’apprête à en produire en Algérie,
mais le constructeur ne possède que des filiales de vente en Tunisie ou au MoyenOrient.
By
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$!
Il existe aussi des facteurs culturels ou même politique qui différencient les stratégies des firmes
appartenant à divers États-nations. C’est ainsi que les entreprises françaises, au cours de ces
dernières années ont souvent préféré les implantations à long terme entraînant des délocalisations à
l’étranger, tandis que les managers allemands privilégient les relations commerciales, telles les
alliances stratégiques ou la fragmentation des chaînes de valeur.
D. La mise en œuvre de l’internationalisation
L’internationalisation augmente la complexité de l’animation, du contrôle et de la structure des
entreprises, surtout dans le cas des firmes globalisées.
1. L’animation et le management interculturel
L’une des principales difficultés rencontrées par les dirigeants au moment de la conception et, plus
encore, au moment de la mise en œuvre d’une stratégie d’internationalisation, est liée à la diversité
des cultures des personnes concernées par l’opération (clients, fournisseurs, personnel local,
managers expatriés et ensemble des partenaires).
Pour s’adapter à ces différences, les gestionnaires ont pris conscience qu’ils ne pouvaient pas plus
plaquer un style de direction unique que mettre tous les clients et les fournisseurs sur le même plan.
Le management interculturel a pour objet d’étudier les particularités propres à des groupes de
collaborateurs de cultures différentes. Il s’agit, sur la base de telles connaissances, de sensibiliser
les cadres expatriés ou les managers plurinationaux aux spécificités qu’ils rencontrent.
Ce serait une illusion de croire que l’on pourrait trouver des solutions communes s’appliquant ici
ou là. Un Californien, un Égyptien ou un Chinois ne partagent pas la même vision du monde. La
seule solution, dans les grandes entreprises, où l’on cherche à trouver un leadership aussi motivant
que possible pour tous, consiste à rechercher un style de management qui ne se fonde pas sur la
diversité des cultures, mais sur des valeurs managériales partagées. L’idéal consisterait donc à
trouver de vastes plages communes entre les diverses cultures régionales et la culture de
l’entreprise.
Ce problème est complexe. La convergence des cultures est loin d’être réalisée dans un monde où
l’on évoque plus souvent le choc des civilisations que leur coexistence harmonieuse.
Figure 5.10. Les frontières entre la culture d’entreprise et les cultures régionales
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2. Le contrôle
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Il s’exerce aussi bien au plan des risques courus qu’à celui des gains obtenus.
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a. Le contrôle des facteurs négatifs
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La complexité du management international renforce la difficulté de contrôler le processus
stratégique. Pourtant, une telle évaluation est nécessaire car le désinvestissement international,
c’est-à-dire l’abandon d’une activité à l’étranger, devient de plus en plus fréquent à mesure que la
mondialisation étend ses réseaux. Depuis le ralentissement de la croissance mondiale à partir
de 2010, la montée des risques financiers dus au surendettement de certains pays en Europe du Sud
et l’augmentation des risques politiques dans le monde arabo-musulman, les entreprises
internationalisées sont incitées à prendre en compte un possible désengagement impliquant une
revente de leurs actifs dans les moins mauvaises conditions. Parfois l’opportunisme – l’espoir de
réaliser une plus-value, par exemple – motive également le choix.
Les erreurs stratégiques ont essentiellement pour cause :
– une appréciation défectueuse des risques et des coûts ;
– une dégradation imprévisible de l’environnement international.
Ces sources d’erreurs qui – notons-le – existent déjà dans le cadre de la gestion nationale
présentent des effets démultipliés à l’international. Il convient par conséquent de renforcer le
contrôle de ces diverses causes de biais stratégiques. Mais les erreurs peuvent aussi, dans certains
cas, se traduire par de bonnes surprises, qu’il convient de mieux cerner grâce à un contrôle accru.
Tableau 5.17. Les facteurs négatifs à contrôler
Sous-estimations des coûts et
Fluctuations de
risques
l’environnement international
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• Coût caché d’accès au marché (nécessité de
verser des pots-de-vin).
• Concurrence plus vive (entreprises
informelles).
• Coûts d’exploitation plus élevés (maind’œuvre peu productive).
• Coûts logistiques plus élevés que prévu
• Changement politique : risque-pays.
(transport, communication).
• Modifications réglementaires.
• Sous-information sur le marché local (données
• Fluctuations des taux de change.
inexistantes ou fausses).
• Partenariats douteux (partenaires
inexpérimentés, peu fiables).
• Comportement des consommateurs difficile à
cerner.
• Contraintes d’équipement collectif.
• Concurrence différée des partenaires.
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b. Le contrôle des facteurs positifs
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Si l’internationalisation réussit, tous les éléments contribuant au succès en bénéficient. Il est donc
judicieux d’appliquer le contrôle aux facteurs de succès. Quels que soient les obstacles rencontrés
pour contrôler le déroulement du processus d’internationalisation, il est nécessaire de consacrer
des efforts permanents à cet exercice. Si les perspectives de gains sont attrayantes, les risques
restent à la mesure de l’ampleur des projets.
Tableau 5.18. Les facteurs positifs à contrôler
3. Les structures
Les types de structures sont très variables selon la taille et l’engagement international de
l’entreprise. Nous retrouverons cette question dans le chapitre 7.
Bartlett et Goshal ont établi une classification des firmes internationalisées qui permet de
comprendre que l’écart est immense entre une entreprise nationale, très ouverte à l’étranger et une
entreprise globale qui a perdu sa nationalité.
Tableau 5.19. La typologie de Bartlett et Goshal
D’après BARTLETT Ch.-A. et GOSHAL G., Le managemenet sans frontières, Éditions
d’Organisation, 1991.
a. Entreprise internationale
• Coordination globale faible.
• Réactivité locale faible :
– globalisation du marché limitée ;
– présence à l’étranger modeste ;
– filiales locales gérées en direct par le DG de la maison mère.
Exemples : éditeurs, entreprises de tailles moyennes du secteur de l’agro-alimentaire, etc.
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b. Entreprise multinationale
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• Coordination globale faible.
– multidomestique ou multilocale ;
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• Réactivité locale forte :
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– filiales locales ayant une autonomie de ressources et d’adaptation aux caractéristiques
locales ;
– coordination globale limitée, remontée d’informations, contrôle financier.
Exemples : Amazon, Unilever, Nestlé.
c. Entreprise globale
• Coordination globale forte.
• Réactivité locale faible :
– globalisation de marché forte ;
– structure intégrée au plan mondial par produit ;
– économies d’échelles, transferts ressources et compétences entre pays ;
– systèmes de planification et de contrôle sophistiqués ;
– pas de coordination locale des différentes unités.
Exemple : Airbus.
d. Entreprise glocale
• Coordination globale forte.
• Réactivité locale forte :
– indépendance des unités locales sources de ressources et compétences pour l’ensemble du
groupe ;
– unités locales spécialisées et constituant des centres d’excellence ;
– maison mère assurant la coordination par la culture, les processus ;
– fonctionnement en réseau.
Exemples : ABB, 3M, Dell.
Les firmes internationales se rencontrent dans l’industrie cimentière, les globales dans les semiconducteurs, les multinationales dans l’audit et la consultation, les transnationales dans l’industrie
pharmaceutique.
4. La firme globale
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Le terme « firme globale »(41) s’applique aux firmes globales et glocales, immergées dans le
processus de globalisation et qui réforment leur management en vue d’un objectif
d’internationalisation généralisée. La poursuite de ce but de globalisation vise à améliorer, sur tous
les plans, la compétitivité (efficience + efficacité) de l’entreprise par le développement de toutes
ses activités aux quatre coins du monde. Le terme développement, tel que nous l’utilisons ici, est
certes ambigu. Il concerne aussi bien la recherche d’un nouveau débouché (Danone s’implante en
Malaisie) que le souci d’améliorer l’avantage concurrentiel tout au long de la chaîne de la valeur
(les entreprises chinoises recherchent à leur tour des sous-traitants en Asie du Sud et en Afrique),
afin de diminuer le coût de revient ou bien encore acquérir des compétences nouvelles en unissant,
comme le font Renault et Nissan, la recherche et développement. Pareil objectif de recherche de
compétitivité supplémentaire par l’internationalisation touche toutes les fonctions de l’entreprise :
direction générale, recherche et développement, marketing, production, finance, ressources
humaines, etc. Il imprègne les choix stratégiques, entraîne des transformations organisationnelles et
une « financiarisation » des stratégies.
a. Les choix stratégiques
On le sait : aussi bien le niveau corporate que le niveau business de la stratégie sont concernés.
Ainsi, sur le plan corporate, la spécialisation, la diversification, la recherche de partenaires sont
souvent fondées sur une considération touchant à l’international.
Exemple
Si General Motors s’associe avec Fiat, c’est entre autres parce que le grand
constructeur italien est bien implanté sur les marchés d’Europe de l’Est qui s’ouvrent
ainsi aux Américains.
Sur le plan de la business stratégie, intervient le fameux débat qui oppose les tenants de la
standardisation du DAS aux défenseurs de l’adaptation aux exigences de segments de marchés
disparates. On a remarqué précédemment que la solution vers laquelle penchent de nouveau les
spécialistes est plus nuancée que ne le sont les deux branches extrêmes de l’alternative : « Think
global, act local ! », préconisent-ils. C’est une stratégie « glocale ».
Tableau 5.20. Les implications du précepte Think global, act local
Think global
Objectifs
Segmentation
Produit
Act local
• Réaliser des économies d’échelle,
Prendre en compte les différences
d’apprentissage, de recherche.
culturelles, sociales, économiques,
• Abaisser tous les coûts de R et D, de
juridiques de chaque marché.
production, de marketing.
Identifier d’un pays à un autre des
Viser le même segment.
segments homogènes.
Adapter les éléments du marketing mix
(la marque, le conditionnement, la
Concevoir un produit international.
distribution, le prix, la
communication).
Exemples
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Plus précisément, les gammes de produits constituant le DAS seront produites de manière
standardisée, mais elles seront adaptées pour tout ce qui touche les principales variables du
marketing : marque, conditionnement, image de marque, canaux de distribution, prix, méthodes de
communication, etc., de manière à prendre en compte les différences culturelles, sociales et
économiques de chaque marché.
« Nos marques ont une dimension universelle mais sont capables de s’adapter à une
demande locale », relève Jean-Paul Agon, P-DG de L’Oréal. Ainsi, la marque
Maybelline est à l’origine du Colossal Kajal indien, sorte de khôl surpuissant. À
l’inverse, un développement local peut se révéler une opportunité mondiale : Garnier
a par exemple lancé depuis l’Inde sa ligne pour hommes, aujourd’hui commercialisée
dans le monde entier.
Indistinctement donc, les stratégies corporate ou business sont traversées par l’intention d’effectuer
la production, la recherche et d’assurer la commercialisation en tout lieu où se présente une
occasion fructueuse.
Exemple
La stratégie du groupe AXA est fondée sur le principe : « Penser globalement, agir
localement ».
Ce qui veut dire que « tout est décentralisé... » afin de concilier taille et efficacité sur
le terrain « ... sauf » certaines fonctions qui relèvent de la responsabilité du groupe :
– la planification, le reporting, l’allocation des fonds propres et les décisions
d’acquisitions ;
– la politique informatique ;
– la philosophie des ressources humaines ;
– l’usage de la marque Axa et l’image du groupe.
b. Les modifications organisationnelles
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Il convient d’adapter la structure et le mode d’animation à l’ouverture globale. Celle-ci exige une
centralisation des décisions stratégiques. Il faut en effet qu’un cerveau décide des orientations
générales, coordonne les activités et prenne les décisions financières avec célérité. En revanche, la
mise en œuvre des stratégies par des équipes internationales réparties dans le monde s’effectue
dans un cadre d’autant plus décentralisé que les filiales de la firme travaillent avec des partenaires
locaux autonomes. On en vient alors à chercher à constituer des réseaux tels ceux que l’on rencontre
dans les secteurs de l’automobile, de l’aéronautique, de l’électronique et du textile. La firme-réseau
est organisée sous la direction d’une entreprise leader et comprend plusieurs niveaux de
participants.
Figure 5.11. La firme globale en réseau
Les grands groupes ne sont plus les seuls à poursuivre des stratégies globalisées. Des entreprises
moyennes, voire des petites, s’orientent vers pareil choix stratégique. Ainsi voit-on fleurir des
alliances coopératives à l’échelle mondiale. Le choix d’un « bon » partenaire étranger en vue de
créer une joint-venture performante devient alors le principal facteur clé du succès.
c. La financiarisation de la firme globale
La globalisation entraîne de lourds investissements et, par suite, d’importants besoins en
financement. La globalisation s’accompagne donc toujours d’une dimension financière, des firmes
très internationalisées devenant des opérateurs majeurs sur les marchés financiers. Chaque
entreprise globale organise la circulation de ses propres fonds, dans un marché interne, afin de
localiser les profits ou de financer des investissements directs dans tel pays de son choix. En un
mot, l’entreprise globale se financiarise par opportunités internes ou par nécessités externes, de
manière à attirer des capitaux étrangers. Dès lors, la stratégie financière se confond avec la
stratégie générale. De fait, la firme mondialisée peut vouloir, à tout moment, mobiliser des capitaux
pour intervenir sur les marchés financiers, pour se couvrir contre les risques de change et de taux
d’intérêt, pour diminuer le risque, à l’aide de nouveaux produits financiers sur les marchés dérivés.
Une telle activité financière mondialisée des entreprises globales engendre des conséquences sur la
santé des économies nationales. Celles-ci deviennent en effet tributaires des jeux spéculatifs sur les
marchés internationaux des capitaux. En raison de la dérégulation, les États ne peuvent plus
contrôler les opérations des managers globalisés, incités à produire toujours plus de valeur pour
leurs partenaires. On en vient donc à penser qu’il serait judicieux, sur le plan macroéconomique, de
réglementer à nouveau les mouvements de capitaux internationaux ou d’imposer les opérations
financières internationales à caractère trop spéculatif. Toutefois, grâce à Internet, des solutions plus
légères favorisent la globalisation.
Tableau 5.21. Un bilan de l’internationalisation
Inconvénients
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Avantages
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• Découverte de nouveaux débouchés.
• Abaissement des barrières protectionnistes.
• Prolongation du cycle de vie du produit sur
différents marchés.
• Diminution des coûts d’approvisionnement.
• Diminution des coûts de production.
• Économie de coûts (d’échelle,
d’apprentissage).
• Augmentation des risques :
– politiques,
– économiques,
– financiers.
• Éloignement géographique et culturel du pays
d’origine.
• Obligation d’adaptation des produits et de
leurs stratégies aux différents marchés.
• Augmentation des coûts de marketing.
• Risque de perte de technologie.
• Difficulté de gestion et complexité
organisationnelle.
5. Le netchising
On désigne par ce terme l’emploi des nouvelles technologies dans le but de faciliter le déploiement
d’activités au loin, sans passer par la possession de filiales, d’usines ou de magasins. On évite
ainsi des coûts de transaction, d’installation, de transfert d’actifs et même d’expatriation de
collaborateurs. En revanche, par ce moyen, on développe à l’étranger les compétences basées dans
le pays d’origine. Bref, le netchising (Coca-Cola, par exemple), se concentre sur ses compétences
clés et laisse aux « netchisés » étrangers le soin de s’occuper de l’emballage, des unités, des
approvisionnements ou des relations avec les parties prenantes sans entrer dans le capital des
partenaires.
L’entreprise japonaise NEC a diminué ses coûts de stock de 30 %, amélioré la productivité des
approvisionnements de 20 % et diminué ses délais de commande de 15 % grâce au netchising.
Le jugement du marché
En somme, aujourd’hui, toutes les stratégies possibles ne rencontrent pas une adhésion identique.
Le regard porté sur le cours boursier, les dirigeants suivent avec anxiété les états d’âme de la
poignée d’analystes dans le monde qui font et défont les capitalisations boursières. Utiliser un
mot tabou du moment, c’est risquer d’entrer dans une spirale négative d’information : plus on
explique, plus les sceptiques invitent à faire baisser le cours. Tout au contraire, jouer de la corde
magique à la mode de l’instant, c’est bénéficier d’une spirale positive d’information : quoique
les dirigeants annoncent, le cours s’envole !
Pour Aneel Karnani, le marché porte des jugements sur les choix stratégiques :
• La diversification dans les activités nouvelles : l’actionnaire gère lui-même les risques de
son portefeuille. Le recentrage est impératif. En conséquence, le conglomérat ne plaît
plus.
• L’intégration verticale : tolérée si elle s’oriente vers l’aval parce qu’elle rapproche
l’entreprise de son client. Suspecte vers l’amont ; il faut lui préférer l’externalisation.
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• La diversification dans les activités connexes : elle n’est guère appréciée car les espoirs
de synergie ont été, dans le passé, infiniment plus nombreux que les synergies avérées.
En revanche, si la synergie est patente : pourquoi pas ?
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• L’extension géographique : elle est jugée excellente ; le monde n’a pas de frontières et il
existe tant de pays émergents qui finiront par devenir de puissants marchés potentiels.
Toutefois, la nécessaire adaptation locale sera mieux perçue qu’une globalisation
extrême.
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• La pénétration : elle demeure la panacée, mais doit s’accompagner d’une forte créativité
commerciale. On ne gagne pas sans effort des parts de marché auprès des clients actuels.
En résumé, les voies de développement de l’entreprise au plan corporate peuvent se résumer en
trois choix illustrés par la figure 5.12.
Il est clair que pour chacun des choix la réponse n’est pas binaire mais qu’elle se situe dans un
continuum :
• Spécialisation versus diversification : soit l’entreprise opte pour un portefeuille d’activités
centré sur un DAS, soit elle multiplie des activités plus ou moins éloignées.
• Intégration versus externalisation : soit l’entreprise intègre les activités de la chaîne de la
valeur en amont (approvisionnement, fabrication de composants, etc.), en aval (distribution,
logistique, etc.), soit elle fait le choix de les externaliser.
• National versus international : la pression de la mondialisation des marchés conduit les
entreprises à s’interroger sur la viabilité de leur stratégie nationale et à se développer sur
des régions internationales (Europe, Moyen-Orient, Asie, etc.) ou à viser une couverture
mondiale des marchés.
Figure 5.12. Les axes stratégiques corporate
Mini-cas 1 : la diversification selon Clément Faugier
Le groupe ardéchois se lance dans les purées de fruits et légumes surgelés. Il espère ainsi se
mettre à l’abri des aléas d’une activité jusqu’ici monoproduit.
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Célèbre pour ses marrons glacés et ses crèmes de marrons, Clément Faugier fait son entrée dans
les potagers. Plus de 130 ans après sa création, la société ardéchoise, la filiale du groupe
Boiron, va se lancer courant 2013 dans la commercialisation de purées de fruits et légumes
surgelés (abricots, myrtilles, framboises, fraises, potirons, petits pois, choux-fleurs...).
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L’initiative fait suite à une première expérience réussie, la fabrication du Marpom’s, mélange de
crème de marrons et de purée de pommes.
Ces nouveaux produits seront fabriqués par Boiron Surgélation – l’autre filiale du groupe – et
vendus sous la forme de galets portionnables de 1 à 1 000 kilos auprès de la restauration hors
foyer et des industriels de l’agroalimentaire.
À l’abri des aléas
À cinq ans, l’objectif est d’atteindre une production annuelle de 5 000 tonnes et un complément
de ventes de l’ordre de 5 millions d’euros. En élargissant ainsi le champ d’action de sa marque
au-delà du marron, la société privadoise répond à un double souci : offrir de nouveaux
débouchés à sa société sœur Boiron Surgélation, basée à Donzère (Drôme), dont la capacité de
10 000 tonnes est largement sous-utilisée, et se mettre à l’abri des aléas d’une activité jusqu’ici
monoproduit. « Depuis cinq à six ans, les récoltes de châtaignes sont déficitaires en raison des
conditions climatiques. Nous ne voulons pas courir le risque d’une rupture
d’approvisionnement », souligne Jean-David Boiron, son jeune président.
Le marron Clément Faugier fait toutefois recette, avec 6 000 tonnes de marrons glacés et crèmes
de marrons produites chaque année, et des ventes de marrons en hausse de 2 % à 3 % par an,
grâce au lancement régulier de nouveaux produits et concepts. La marque ardéchoise, qui
emploie 70 salariés permanents et 50 saisonniers à l’international, peut aussi compter sur de
fortes marges de progression à l’international.
Présente dans plus de 80 pays, elle y réalise déjà 15 % de son chiffre d’affaires (20,5 millions
en 2011) et vise plus du double dans cinq ans au terme d’une redéfinition complète de sa
stratégie.
P. Vercesi, « Après la crème de marrons Clément Faugier mise sur
les fruits et légumes », Les Échos, 29 novembre 2012.
Questions
1. Quelle est la nature de la diversification entreprise par la société Clément Faugier ?
2. Selon vous, s’agit-il d’une diversification à risque ?
Mini-cas 2 : une diversification à double tranchant
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Guy Cotten a une histoire centrée sur un métier : la marque de vêtements fondée en 1965 à
Concarneau est spécialiste des vêtements marins.
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Guy Cotten a commencé sa vie professionnelle en étant représentant. « Je suis arrivé dans le
vêtement par accident », aime-t-il à rappeler. En effet, le week-end, pour arrondir ses fins de
mois, il vend des cirés aux marins concarnois qui partent au thon au large de l’Afrique. À leur
retour, les vêtements étaient dans un piteux état et Françoise, son épouse, qui travaillait à la
voilerie Le Rose de Concarneau, devait les recoudre et les renforcer en ajoutant des
empiècements. Le bouche-à-oreille fonctionne et les clients se multiplient, d’où la publicité :
« On est si bien dedans quand il fait mauvais dehors ».
Françoise et Guy ouvrent alors en 1965 leur boutique-atelier dans un garage, avec machines à
coudre, à souder, à coller et à couper. Quelques milliers de cirés plus tard, elles seront 25 dans
l’atelier. Puis trop à l’étroit, l’entreprise se délocalise à Trégun en 1971, à trois kilomètres.
Dans le sillage des voileux
Dans les années 1965-1970, les écoles de voile se créent et connaissent une véritable explosion.
Il n’existait alors sur le marché que des vestes à boutons pressions ou des vareuses qui s’enfilent
par la tête. Rien de bien pratique ! Au centre nautique de Rosbras, le fondateur et animateur,
Yvon Hemery, s’étonne : « Comment se fait-il que personne n’ait pensé à réaliser un vêtement
qui aurait l’étanchéité de la vareuse et les avantages pratiques d’une veste ? » Guy Cotten est
interpellé en ces termes... Quelques jours après, les stagiaires du centre testent les premières
vestes cirées alliant double patte Velcro et glissière !... La veste Rosbras est née.
Le principe de la veste à glissière et double patte Velcro lancé par la société est aujourd’hui
courant. On rencontre même des copies ou des réalisations frisant la contrefaçon (au point qu’il
est envisagé des actions en justice). La gamme s’étoffe et les produits se modèlent à la demande.
À partir de 1976, la multiplication des grandes courses au large, le véritable engouement pour la
mer et le début des partenariats avec les grands noms de la voile accélèrent le succès. C’est le
lancement de la veste de « Nav » qui vient compléter la grande gamme des cirés (30 articles).
Cette veste au grand col fourré a été expédiée par milliers dans tous les coins de France et
d’Europe. Le gilet « Skipper », une merveille de confort, a lui aussi marqué de son empreinte.
Largement recherché par la clientèle, il a suscité plusieurs vagues de plagiats, puisque seize ont
été dénombrés.
Une gamme élargie
La gamme s’est progressivement élargie. Elle compte près de 200 modèles de différentes
couleurs mais toujours avec une « coupe maison » ergonomique, stylée et confortable à partir de
tissu trois couches traitées portant le logo du petit bonhomme jaune dessiné par Le Quenec.
L’entreprise familiale compte quelque 300 salariés. Depuis quelques années, Guy Cotten, 67 ans,
a passé les rênes de l’entreprise à sa fille Nadine. Il s’est quant à lui intéressé à la sécurité en
mer et a mis au point des cottes de travail dotées de bretelles autogonflables homologuées.
L’entreprise dispose dorénavant de quatre gammes distinctes.
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La gamme « Yachting et sports d’eau » est le reflet de la longue relation que la marque a
entretenue dans le milieu du yachting. Ce lien privilégié remonte à 1966 quand les clubs de voile
du sud de la Bretagne se sont équipés du fameux ciré jaune : l’authentique veste Rosbras.
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Guy Cotten était alors précurseur dans le vêtement créé pour « faire de la voile » ! Légère, la
veste Rosbras, caractérisée par sa double patte à scratchs et sa fermeture à glissière, était bien
plus pratique que les vareuses du moment. Depuis, au fil des courses transocéaniques, la gamme
s’est étoffée avec des tenues encore plus techniques, plébiscitées par les grands skippers comme
Roland Jourdain, Marc Guillemot, Jean Le Cam, Yann Elies, Éric Drouglazet ou, plus
récemment, François Gabart.
Aujourd’hui encore, la Société Guy Cotten dispose d’un sérieux atout : elle possède en France un
atelier de conception. Elle maîtrise donc à la fois la production, la fabrication et les réparations
de ses vêtements. Ce fait est suffisamment rare sur le marché pour être souligné. Fabricant
français, Guy Cotten offre des vêtements haut de gamme inédits en tissu respirant Dremtech +
adaptés à toutes les activités nautiques dans un esprit de proximité et de haute technicité. Le
service après- vente est lui aussi garanti.
La gamme « Loisirs-ville » est destinée aux amoureux de la vie au grand air qu’ils soient
hommes, femmes ou enfants. À plus de quarante-cinq ans, la société Guy Cotten atteint une belle
maturité : non seulement elle conforte sa présence sur le segment « enfant » sous la marque Kid
Cotten mais elle développe aussi sa gamme « femme » par des formes appuyées, des matières
élégantes et, enfin, par toute une ligne de toile en coton composée de pantalons, de shorts, de tshirts, de polos ou encore de chemises.
La gamme « Pêche-industrie » dégage à l’instar de la marque, bâtie sur le granit breton, une
identité bien trempée. En 1964, la conquête des mers débute par les ports de pêche. C’est
l’époque des cirés lourds, peu confortables et vraiment peu solides, en coton enduit. La marque
lance alors un ciré jaune en nylon enduit, beaucoup plus résistant et vraiment plus léger ! En
moins de quatre ans, tous les ports bretons ont opté pour les cirés Guy Cotten. Aujourd’hui,
l’entreprise est leader mondial sur ce marché.
Enfin, la gamme « Agriculture-entreprise » est sans nul doute l’une des plus innovantes dans le
milieu marin. Elle fait également partie de celles qui ont le plus fait pour améliorer le confort et
la sécurité du marin, maîtres mots de Guy Cotten. En effet, la marque est spécialisée dans la
protection des personnes au travail depuis plus de quarante-cinq ans. Elle conçoit des vêtements
qui habillent tous ceux dont le métier exige une réelle protection. La technique de soudure haute
fréquence ets utilisée pour étancher les coutures des vêtements de protection contre les
intempéries. C’est la solution la plus efficace et la plus fiable. De la conception du produit à
l’outil pour le fabriquer, tout est réalisé dans les usines Guy Cotten. Simplicité et solidité sont
plébiscitées pour les vêtements de protection. La marque attache par conséquent une grande
importance à ces deux éléments.
D’après www.guycotten.com
Questions
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1. Quelles sont les possibilités d’avenir pour l’entreprise Guy Cotten ? Pour quelles
raisons ? Quels types de diversification pourriez-vous recommander à la marque ?
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2. Quels en seraient les avantages et les inconvénients ?
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3. Selon vous, quelle est la solution la plus envisageable ?
Mini-cas 3 : le trop-plein de diversification
Présente dans l’aéronautique, la défense, l’espace et les transports, Thales, entreprise de
67 000 salariés, opère dans de nombreux domaines. Trop peut-être ?
Qu’y a-t-il de commun entre le tableau de bord d’un Airbus, un satellite de télécommunications,
un feu de signalisation ferroviaire, un sonar, un radar, un véhicule blindé et un film vidéo à bord
d’un avion ? Réponse : Thales. Tous ces équipements figurent en effet dans le catalogue à la
Prévert des activités du groupe français d’électronique et de défense.
Né en décembre 2000 du regroupement de Thomson-CSF avec le britannique Racal, ce fleuron
industriel de 13 milliards d’euros de chiffre d’affaires emploie plus de 67 000 salariés dans
56 pays. Cependant, sa notoriété auprès du grand public n’a jamais approché celle de l’inventeur
du théorème du même nom. C’est pourtant grâce aux radars développés par Thales que deux
avions sur trois dans le monde peuvent décoller et atterrir. Dix-huit des 20 premières banques
mondiales utilisent les systèmes sécurisés de Thales pour leurs transactions. Les militaires
français et de plusieurs autres armées communiquent aussi grâce à des radios Thales. La plus
grande constellation de satellites de télécommunications, Iridium, porte également sa marque.
Sans parler des nombreux composants électroniques ultrasophistiqués cachés sous le capot des
blindés, des sous-marins, des missiles... Ces concurrents s’appellent EADS, Finmeccanica,
Boeing, Northrop Grumman, Lockheed Martin dans la défense, les satellites et la cybersécurité,
Siemens et Alstom dans les transports ou encore Panasonic dans la vidéo.
Cependant, cette diversification s’est accompagnée de plusieurs centaines de millions de pertes
en 2009 et 2010. Luc Vigneron a dû tailler dans le vif pour revenir aux bénéfices en 2011. Mais
les questions stratégiques relatives à la dispersion des activités sont restées en plan. « Thales,
dans sa forme actuelle, ne correspond plus au marché », estime un expert du secteur. « Il faut
rebattre les cartes, regrouper certaines activités comme l’avionique avec Safran, pour constituer
de véritables champions européens. »
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B. Trevidic, « Un industriel très, voire trop, diversifié », Les
Échos, 20 décembre 2012.
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Questions
1. Tentez d’expliquer les raisons et le processus qui ont conduit Thales à offrir à un
portefeuille d’activités aussi large.
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2. Cette diversification à outrance est-elle, selon vous, un handicap ?
3. Quelles actions stratégiques proposeriez-vous, en tant que consultant externe, à JeanBernard Lévy, P-DG de Thales ?
Chapitre 6
La mise en œuvre de la stratégie
Les compétences clés à acquérir :
• Tenir compte des difficultés de mise en œuvre des stratégies.
• Comparer les intérêts respectifs des stratégies de croissance interne et externe.
• Appréhender l’intérêt des stratégies d’externalisation.
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• Évaluer la faisabilité des choix stratégiques.
• Élucider les orientations nouvelles (partenariat, coopération, réseaux).
• Établir un business plan.
• Établir un tableau de bord prospectif.
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• Vérifier l’alignement managérial.
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• Saisir l’importance de l’entrepreneuriat.
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• Apprécier les effets de ces stratégies de partenariat et repérer les conditions de leur réussite.
Après avoir analysé les grandes orientations stratégiques, nous allons à présent étudier toute la
variété de leur mise en œuvre. Chacune des orientations stratégiques retenues, que ce soit au plan
business ou corporate appelle des choix en matière d’application. Faut-il étendre les activités ou
réduire la voilure ? agir seul ou mener les opérations en partenariat ? recourir à ses propres
ressources ou tenter d’acquérir des compétences déjà développées par d’autres ? installer les
compétences assurant le développement à l’intérieur de son propre périmètre ou préférer
externaliser des fonctions ou des métiers ? Ce sont autant de questions qui traduisent les choix
stratégiques en leur donnant, selon les cas, des allures fort différentes.
I. Les stratégies de développement
On distingue généralement deux types de croissance qui s’appliquent aussi bien aux stratégies de
business intra-industrielles (volume, différenciation, focalisation, prix-valeur) qu’aux stratégies
corporate de portefeuille d’activités (spécialisation, diversification, intégration).
De la même façon, une stratégie de développement international peut être conduite par croissance
interne ou externe.
On observe généralement une chronologie dans les modalités de croissance, l’entreprise
connaissant d’abord une croissance interne pour ensuite se développer à l’externe. Mais des contreexemples existent ; ainsi, dans le secteur des services informatiques, on a vu des entreprises de
petite taille croître très rapidement par croissance externe.
Figure 6.1. Les deux types de croissance
A. La croissance interne
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Également appelée croissance organique, elle consiste en la création par l’entreprise d’une
capacité nouvelle. Il s’agit souvent d’une capacité de production (la chaîne d’assemblage du
Boeing 787), mais elle peut être d’une autre nature : capacité de recherche (création d’un
laboratoire de bio-ingénierie chez Merck) ou capacité de commercialisation (ouverture d’une
filiale de vente par Peugeot au Japon). L’innovation se trouve au cœur de la croissance organique
(innovation produit, innovation services).
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Exemples
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Lorsque Gillette passe de deux à quatre lames pour son rasoir, c’est de l’innovation.
Lorsque Nestlé vend des cafetières pour assurer le succès de Nespresso, c’est encore
de l’innovation. Bien évidemment, l’entreprise n’élabore pas elle-même tous les
éléments de sa croissance. Elle acquiert généralement les machines auprès de
fournisseurs extérieurs mais conçoit et réalise leur groupement en un ensemble
productif (une usine) dont il convient d’acquérir le terrain et les bâtiments.
La croissance interne entraîne donc généralement un paiement sous forme de liquidités. Il est alors
nécessaire que la firme possède des ressources monétaires ou qu’elle parvienne à convaincre son
banquier de la pertinence de sa stratégie. Si tel n’est pas le cas, on recourt au second type.
Tableau 6.1. Un bilan de la croissance interne
Avantages
• Développement progressif, donc mieux
maîtrisable.
• Valorisation de l’expérience acquise.
• Culture d’entreprise renforcée.
• Image de bâtisseur.
Inconvénients
• Lenteur de la croissance.
• Risque de réactivité plus grande de la
concurrence.
• Risque de sclérose.
• Difficulté du financement.
B. La croissance externe
Le processus de croissance externe implique une relation entre plusieurs entreprises et entraîne un
transfert d’actifs existants d’un acteur vers un autre. Il s’agit en effet du regroupement intégral ou
partiel de deux ou plusieurs entreprises.
1. Les modalités de regroupement
Les modalités de regroupement s’analysent selon deux types de procédures juridiques et
financières.
a. Les procédures juridiques
La fusion est l’opération par laquelle deux ou plusieurs entreprises (A, B...) réunissent leurs actifs
pour créer une société nouvelle C (figure 6.2).
Exemple
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Lafarge et le groupe suisse Holcim ont fusionné en 2015. Le nouveau groupe s’appelle
LafargeHolcim.
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Figure 6.2. Le mécanisme de la fusion
L’absorption consiste en la réunion d’entreprises d’inégales dimensions : l’une des sociétés (la
société absorbante : A) absorbe l’autre (la société absorbée : B) qui disparaît. Les actionnaires de
cette dernière reçoivent en contrepartie les titres nouvellement émis par A (figure 6.3).
Exemples
Nokia achète Alcatel-Lucent. General Electric achète une partie de Alstom.
Figure 6.3. Le mécanisme de l’absorption
L’apport partiel d’actif : une société A apporte à une société B une partie homogène de ses actifs
en échange de titres nouveaux de cette dernière (figure 6.4). Cette situation se rencontre surtout dans
le cadre de restructurations d’entreprises conduisant à un recentrage sur les métiers de base.
Exemple
La société Montupet, spécialisée dans les pièces de plusieurs natures pour les
automobiles, cède son activité fabrication de roues à la Société française de roues.
Figure 6.4. L’apport partiel d’actifs
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La typologie des fusions selon Solving International
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– Le type « soustraction » : deux entreprises s’allient pour diminuer l’offre afin de soutenir
le prix dans un secteur surcapacitaire.
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– Le type « addition » : les entreprises fusionnent pour marier deux dynamiques de
développement complémentaires.
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– Le type « multiplication » : les entreprises se marient pour faire bénéficier chacune des
atouts spécifiques de l’autre.
– Le type « division » : la fusion permet à chacune de mieux répartir certaines charges
(recherche par exemple) pour étoffer les marges. Elle aide à se concentrer sur certaines
activités (la distribution, par exemple).
b. Les procédures financières
C’est au travers de ces procédures que la croissance sera mise en œuvre. On peut distinguer quatre
types.
• La négociation bi/ou multilatérale : c’est une forme de négociation directe que l’on
rencontre lorsque la société qui fait l’objet de l’acquisition n’est pas cotée en Bourse, et/ou
lorsque le capital est concentré entre les mains d’un ou de plusieurs porteurs connus. La
démarche est alors la suivante : approche du partenaire, audit-diagnostic et évaluation de la
société, projet d’accord, protocole d’accord et signature.
• Le ramassage boursier : cela concerne les sociétés dont le capital est très dispersé dans le
public. La société A, qui souhaite prendre le contrôle de la société B, se porte acquéreur
quotidiennement de titres de la société B et se constitue peu à peu une minorité de contrôle.
• L’offre publique d’achat (OPA) : la société A s’adresse publiquement aux actionnaires de la
société B pour leur proposer le rachat d’une quantité déterminée de titres, à un cours garanti
(supérieur à la cotation au jour de l’offre), en espèces, durant une période de un à trois
mois, à condition que le nombre d’actions fixé soit atteint à la date de la clôture.
• L’offre publique d’échange (OPE) : le principe est le même que celui de l’OPA, mais
l’acquéreur propose ses propres titres (actions, obligations, obligations convertibles
nouvellement émises) en échange de ceux de l’entreprise dont il souhaite prendre le
contrôle.
2. Les avantages et les conditions de réussite de la stratégie de croissance
externe
Parmi les avantages, nous pouvons noter :
– la rapidité d’action : elle permet effectivement d’être présent très rapidement sur un nouveau
marché, ou avec un nouveau produit ;
– la possibilité de contourner les barrières à l’entrée dans la nouvelle activité et les réactions
des concurrents déjà en place ;
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– la réalisation d’économies d’échelle.
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– la maîtrise d’un savoir-faire : l’entreprise qui rachète bénéficie en effet de l’expérience, de
la compétence et éventuellement des brevets de l’entreprise déjà en place ;
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Quelle que soit l’origine de la démarche de croissance externe (volonté permanente de l’équipe
dirigeante ou opportunité), celle-ci ne peut réussir qu’à condition que l’analyse en amont soit bien
exécutée, pertinente et de qualité, et permette de constater la compatibilité avec la stratégie de
l’entreprise, sa structure et sa culture. Sinon gare aux déboires !
Exemple
Les compagnies American Airlines et US Airways ont annoncé leur fusion dans le
cadre d’un accord donnant naissance à la première compagnie aérienne mondiale.
Dans ce domaine, comme dans bien d’autres, les effets des stratégies choisies sont très divers.
Certaines époques ont connu des vagues de fusion retentissantes ; à d’autres moments, la plus
grande méfiance est de mise devant la boulimie des présidents de sociétés assoiffés de grandeur. Il
est très délicat de juger la réussite d’une fusion sur le court terme : le prix payé dépend du cours
boursier de la cible, la monnaie utilisée pour l’achat correspond au cours de l’acquéreur. Une
bonne affaire au départ, peut se révéler désastreuse quelque temps après, ou inversement. Les
réussites tiennent à plusieurs facteurs :
• Une motivation de rentabilité. Influencées par l’activisme des fonds d’investissement, les
entreprises cotées en Bourse doivent mettre au premier rang de leurs objectifs la
valorisation de l’investissement de leurs actionnaires. Les acquisitions nouvelles restent
proches des activités de base des acquéreurs. Les arguments vagues du type « atteindre une
taille critique » ou encore « bénéficier de gains de synergie » ne suffisent plus pour
convaincre les opérateurs. Il faut des objectifs clairs (par exemple, la consolidation de deux
entreprises d’une même activité : rachat de Motorola par Google) et la promesse d’une
rentabilité alléchante.
• Le mode de financement. Les actionnaires n’acceptent plus les opérations qui diluent leur
pouvoir. C’est ainsi que l’on préfère financer les achats à partir des ressources propres,
voire en recourant à l’emprunt, en cas de baisse des taux d’intérêt, plutôt qu’en émettant des
titres qui augmentent le nombre d’actionnaires.
Les décisions de fusion devraient être précédées d’un diagnostic préalable de faisabilité et de
compatibilité sur les plans :
– de l’organisation ;
– de la culture ;
– des systèmes d’information ;
– des systèmes industriels.
Tableau 6.2. Un bilan de la croissance externe
Inconvénients
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Avantages
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• Rapidité du montage.
• Faibles réactions des concurrents.
• N’augmente pas l’offre globale.
• Possibilité de diversification.
• Emploi du levier financier.
• Facilité de financement.
• Risque de synergie négative.
• Incertitudes sur le prix de l’entreprise rachetée.
• Inadaptation de la cible aux objectifs stratégiques.
• Difficulté d’intégrer l’entreprise rachetée dans le groupe.
• Incompatibilité d’organisation, de culture, de système
d’information.
• Culture d’entreprise menacée.
• Image de raider, d’opportuniste.
Une telle démarche éviterait les nombreux échecs observés. La prééminence de la dimension
financière occulte fréquemment ces aspects, souvent considérés comme secondaires. D’où les
nombreuses contre-performances :
– chute du chiffre d’affaires ;
– destruction de la valeur boursière ;
– baisse de la productivité ;
– suppression d’emplois.
Les difficultés d’intégration des groupes concernés ne sont pas seules responsables des échecs.
L’appétit démesuré des fonds d’investissement, qui ignorent les dimensions culturelles et humaines
des opérations qu’ils engagent, provoque de nombreux effondrements parmi les organisations
bancales.
Les fusions : tout sauf un long fleuve tranquille !
La fusion EADS-BAE avait été minutieusement préparée dans le plus grand secret par des
équipes réduites des deux groupes. Tout était prévu : les modalités juridiques, l’évolution de
l’actionnariat, les nouveaux projets, les économies d’échelle, la désignation du futur numéro un,
très logiquement Tom Enders, patron du groupe majoritaire, à savoir EADS. Soudain, en
quelques jours, tout se grippe : Londres, Berlin et Paris ne parviennent pas à se mettre d’accord.
Ce projet majeur de fusion à l’échelle européenne tombe à l’eau à l’issue des trois phases
préparatoires.
1. La préparation
C’est souvent une banque d’affaires qui est à l’origine de l’opération. Elle constate qu’une firme
est à vendre ou à marier, qu’une autre est acheteuse. Reste à convaincre les dirigeants d’adopter
le projet.
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2. La négociation
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3. La due diligence
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Les dirigeants se rencontrent dans le plus grand secret. Ils ont déjà en main les évaluations
concoctées par leurs banques d’affaires. C’est à ce stade que doit se décider qui des deux
dirigera le nouveau groupe et quelle stratégie il suivra.
La firme acheteuse désigne alors des experts qui ont accès à la data room, lieu où la firme
achetée met à leur disposition une masse de dossiers confidentiels qu’ils peuvent uniquement
consulter.
Mais, une fois la fusion décidée, plusieurs phases critiques se profilent...
4. L’annonce
Il faut séduire la Bourse et convaincre les investisseurs que le projet va les enrichir. La
conférence de presse et, surtout, la première réaction des marchés financiers sont déterminantes.
5. Les cent jours
C’est le délai pendant lequel l’opération financière se boucle, le partage des places dirigeantes
se fait, les suppressions d’effectifs se déterminent. C’est pendant cette période que se joue le
succès de l’opération.
6. Les trois ans
On sait maintenant si la fusion a été un succès (intégration réussie des deux équipes dirigeantes,
augmentation des ventes) ou un échec (luttes de clans, stagnation du chiffre d’affaires). Or, selon
les consultants, trois fusions sur cinq ne créent pas de valeur pour les actionnaires. Il faut donc
attendre la sanction de la Bourse.
II. Les stratégies de désengagement
Le désengagement, encore nommé « dégagement » ou « désinvestissement stratégique », désigne la
stratégie qui réduit le périmètre, dans le but d’affecter les ressources dégagées à de meilleurs
emplois (figure 6.5).
Plusieurs raisons motivent ce choix :
– la rentabilité insuffisante de l’entreprise ;
– le réaménagement du portefeuille d’activités, lorsque certains DAS se situent dans des zones
d’abandon ;
– la nécessité de réalimenter la trésorerie ;
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– l’action des pouvoirs publics, lorsque ces derniers interviennent en vue de faire cesser une
position de domination exagérée qui bride le libre jeu de la concurrence ;
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– le désir de se recentrer sur le métier de la firme, etc.
Exemples
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Motorola cède l’activité équipement de réseau à Nokia-Siemens. Peugeot vend Gefco
sa filiale dans le transport.
Le désengagement peut être réalisé de deux manières :
– par l’abandon pur et simple ;
– par l’externalisation. Dans ce dernier cas, il concerne souvent des fonctions jugées non
stratégiques.
Figure 6.5. Le désengagement
A. L’abandon
Cette stratégie consiste à sortir d’un DAS. Plus précisément, on cesse la production et la vente d’un
produit jusqu’alors exploité et, le cas échéant, on le cède à un repreneur.
Tableau 6.3. Le bilan d’une stratégie de décroissance interne
Avantages
Inconvénients
Perte de chiffre d’affaires sans réduction
corrélative des charges fixes
Dépeuplement ou précarisation d’une région
Concentration des gammes et réduction des coûts allant à l’encontre de l’objectif de performance
durable
Détérioration de l’image de l’entreprise
Recentrage sur le cœur de métier
La décroissance externe peut constituer une alternative à la décroissance interne. Dans ce cas,
l’entreprise tente de vendre à un repreneur éventuel le DAS et les actifs qui permettent sa
fabrication. Elle négocie alors en parallèle le maintien du personnel par l’acquéreur.
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Exemples
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• Engie tente de céder ses centrales au charbon pour investir dans les
technologies émergentes et le digital.
• Siemens intègre ses activités de santé dans une nouvelle entité pour mieux
répondre aux besoins du marché et vend son électroménager à Bosch.
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• Alstom cède à General Electric toute son activité énergie.
• Nokia vend à Microsoft sa division Terminaux.
B. L’externalisation
L’externalisation consiste à confier (faire faire) à une autre entreprise une partie de la chaîne de
valeur. L’externalisation n’est pas assimilable à la délocalisation qui consiste à transférer une
partie des activités sur un autre site, généralement à l’étranger.
Tableau 6.4. L’externalisation et la délocalisation
1. Les raisons de l’externalisation
L’entreprise conserve l’exploitation du DAS en continuant à concevoir et / ou à assembler les
composants, et / ou à vendre les produits. Cependant, certaines tâches sont confiées à une ou
plusieurs firmes partenaires : la fabrication des composants par exemple.
Exemple
Dans le nord de l’Italie, et dans certains secteurs, l’activité industrielle est organisée
en « districts géographiques » au sein desquels une multitude de petites entreprises,
très spécialisées, sont toutes sous-traitantes et donneurs d’ordres pour articuler des
filières très performantes : mécanique autour de Nodine, confection à Carpi, carreaux
de céramique à Sassuolo.
Cette stratégie suppose une réorganisation de l’entreprise, puisque bon nombre d’opérations sont
sous-traitées.
Exemple
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Boeing transfère à de nombreuses entreprises sous-traitantes la quasi-totalité de la
fabrication des parties du 787. L’entreprise se spécialise dans l’ingénierie en
maintenant sa maîtrise sur le savoir et les processus.
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Toutes ces actions peuvent être rapprochées des mesures d’outsourcing, d’externalisation des
fonctions de soutien logistique (informatique, comptabilité, entretien, voire gestion du personnel et
vente). La logique est semblable : concentrer les forces de l’entreprise sur son cœur de
compétences et signer des contrats avec d’autres pour assurer le complément.
Chez Renault
Il y a quarante ans, 25 % des pièces d’une 4L provenaient des sous-traitants. Actuellement, 80 %
des pièces d’une Laguna sont fabriquées à l’extérieur. Les constructeurs automobiles ne
construisent plus : ils deviennent des assembleurs. À la limite, ils pourraient devenir un simple
bureau d’études dont l’activité de base consisterait à concevoir de nouveaux modèles. Ce n’est
d’ailleurs pas un hasard si Renault a utilisé le slogan « créateur d’automobiles ».
La question de l’externalisation est d’actualité. Après l’entretien, le gardiennage ou la restauration,
ce sont aujourd’hui la comptabilité, l’informatique, les centres d’appels ou encore la gestion des
parcs automobiles qui font l’objet d’une externalisation. On appelle offshoring cette délocalisation
d’activités tertiaires vers des pays où le coût de la main-d’œuvre est bas. Si l’offshoring permet
de réaliser des économies, il présente aussi l’inconvénient d’engendrer des coûts de transaction et
de coordination avec des consommateurs éloignés du centre de production du service. Qui n’a
jamais désespéré de remédier à une panne avec l’assistance de l’employé d’un centre d’appels
lointain ?
Figure 6.6. Les vagues successives d’externalisations
On peut résumer le raisonnement suivi au travers de deux questions essentielles :
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• La fonction concernée est-elle considérée comme stratégique ? Est-elle essentielle pour la
mise en œuvre de la stratégie de l’entreprise au regard des facteurs clés de succès dans le
secteur ? La réponse sera sans ambiguïté négative pour ce qui est de la restauration au sein
d’un groupe. En revanche, elle sera plus ambiguë pour des activités de transport dans les
services logistiques.
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• L’externalisation de cette fonction va-t-elle entraîner une perte de compétences pour
l’entreprise, un transfert éventuel à des sous-traitants, voire à des concurrents ? Ce peut être
le cas dans le domaine technologique (technique de miniaturisation) ou marketing
(connaissance d’un marché).
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Figure 6.7. L’algorithme de l’externalisation
Mondialisation et externalisation, un couple qui ne va pas de soi
Une analyse publiée par des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT)(42) réfute
l’idée selon laquelle la concurrence mondiale imposerait un modèle unique d’organisation
économique des entreprises. Selon eux, la mondialisation ne condamne aucun secteur à la
disparition dans les économies avancées, ni en Europe, ni aux États-Unis. Trois mutations
profondes s’observent depuis dix ans dans l’environnement des entreprises :
– la libéralisation des échanges de marchandises et de capitaux ;
– la révolution des technologies de l’information et de la communication qui permet de
numériser l’interface entre conception, fabrication des composants, fabrication des
produits et distribution ; ainsi ces fonctions peuvent être implantées sur différents sites.
C’est ce que l’on appelle la modularisation des processus de fabrication ;
– la création d’importants bassins de personnels qualifiés, d’ingénieurs dans des pays à
salaires faibles (Inde, Chine, etc.).
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Ces facteurs accroissent la pression concurrentielle mais créent également des opportunités de
reconfiguration des entreprises.
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Certaines entreprises décident de sous-traiter et de délocaliser toute leur fabrication (par
exemple, Texas instrument à Taïwan), tandis que d’autres, comme Intel, fabriquent encore leurs
propres puces électroniques en interne. Samsung ou Sony conservent l’essentiel de leur
production dans leurs usines alors que Dell contrôle la définition du produit et sa distribution
mais sous-traite et externalise toutes les autres fonctions. Il en est de même si l’on compare Zara,
qui ne délocalise pas, à Lacoste ou à H&M qui externalisent.
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La mondialisation n’impose donc pas une stratégie unique. Dans un même secteur, pour un même
produit, de multiples choix peuvent se défendre. Ils sont influencés par les compétences
techniques et humaines des entreprises, par leur histoire.
2. Les modalités de l’externalisation
Les principales modalités sont au nombre de six :
• La sous-traitance par laquelle le donneur d’ordres confie à son partenaire une tâche définie
avec précision.
• La fourniture spéciale qui correspond à la situation où le partenaire fournit des éléments
respectant des contraintes, mais dont il conserve la propriété industrielle.
• La fourniture banale qui s’en tient à la cession de prestations normalisées.
• La cotraitance, cas où les deux partenaires assurent en commun la production d’un bien.
• La commission, cas où un partenaire assure une fonction : la vente, l’achat, l’affacturage, par
exemple, le partenaire étant rémunéré par une commission.
• La concession, la licence, la franchise qui permettent d’accroître les ventes, sans trop
investir.
Tableau 6.5. Un bilan de l’externalisation
Avantages
Inconvénients
Elle provoque une large ouverture sur
l’environnement.
Elle augmente la rentabilité, puisque l’on se
consacre aux seules tâches bien maîtrisées et que
l’on transforme des charges fixes en charges
variables.
Elle fait dépendre l’entreprise de ses
fournisseurs.
Elle pose des problèmes de sécurité des
approvisionnements, de confidentialité, de
défauts de qualité.
Elle engendre des difficultés avec les salariés
qui risquent de perdre leur emploi. Il convient
alors de trouver des solutions pour résoudre ces
problèmes (reconversion, incitation à la création
d’entreprise, etc.).
Elle prépare des accords de partenariat.
Elle permet de se concentrer sur les savoir-faire
fondamentaux de l’entreprise.
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3. Une recette miracle ?
Exemples
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Après quelques années d’expérience, l’externalisation apparaît souvent moins fructueuse que ne
l’espéraient ses promoteurs. Ils rêvaient en effet d’une entreprise virtuelle, limitée au rôle
d’interface entre de multiples corps de métier réunis par un projet commun. Or, l’externalisation
devient dangereuse lorsqu’elle touche les fonctions les plus vitales de l’entreprise.
Danone a réintroduit en son sein la logistique concédée à des techniciens extérieurs.
Pour l’entreprise, la préparation et la livraison rapide des commandes de produits
frais ont une valeur stratégique. De même, Novotel a repris à son compte le nettoyage
des chambres.
L’externalisation engendre une dépendance dangereuse. Les constructeurs automobiles ont tremblé
lorsqu’ils ont appris que General Motors envisageait de racheter Valeo. La qualité ne suit pas
toujours. Bien que la sous-traitance du nettoyage coûte 20 % de moins à Novotel que l’emploi
direct du personnel, la propreté des chambres, mieux contrôlée, est apparue pour les dirigeants de
la chaîne comme un investissement rentable à terme.
Des coûts cachés (hidden costs) peuvent également se révéler (élaboration de cahier des charges
minutieux, suivi des prestataires, coût de rupture des contrats, etc.).
Exemple
Dans l’infogérance informatique, l’entreprise cliente perd son savoir-faire.
Sur le plan social, il est difficile de gérer une population de « privilégiés », employés par
l’entreprise et une foule de personnels à statut précaire.
Pour pallier ces limites, certaines entreprises internalisent à nouveau ou filialisent une activité.
C’est ainsi que le service d’entretien de la RATP propose d’assurer la maintenance des escaliers
mécaniques auprès des grands magasins ou des banques.
Exemple
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Figure 6.8. Le balancier externalisation-internalisation
By
Boeing et Airbus revoient à la baisse leur politique d’externalisation de la production
à la suite des incidents intervenus sur les batteries au lithium du Dreamliner.
III. Les stratégies de partenariat
Les accords de coopération interentreprises connaissent un grand essor. Les spécialistes se sont
beaucoup intéressés à cette option stratégique pour trois raisons principales :
• Parce qu’elle permet aux petites entreprises de résister aux grands groupes.
• Parce qu’elle est une bonne solution pour affronter la complexité croissante et la
globalisation des marchés.
• Parce qu’elle conduit à des interrogations théoriques qui ne manquent pas de susciter
l’étonnement des chercheurs (où se situent les frontières de l’entreprise ? L’entreprise
patrimoniale traditionnelle existe-t-elle encore réellement ? Si oui, sera-t-elle remplacée
par des entreprises virtuelles, c’est-à-dire par des groupements éphémères ?).
Quels sont les principaux traits de ces organisations nouvelles ? Le partenariat peut prendre deux
formes différentes :
• Les accords de coopération, qui peuvent prendre la forme d’accords commerciaux ou
d’accords de développement de nouveaux produits.
Exemples
BMW renforce son alliance avec Toyota pour fabriquer une future voiture sportive
commune, le moteur électrique, la pile à combustible. Volvo s’allie à l’entreprise
chinoise Dongfeng pour devenir le leader mondial du poids lourd.
• Les groupements d’intérêt économique (GIE) dont l’objectif peut être de confier une partie
des fonctions classiques à des sociétés extérieures. Des outils nouveaux sont alors apparus :
l’essaimage pour l’organisation, le capital-risque pour le financement par exemple, etc.
L’intérêt est de rester centré sur son savoir-faire, de garder une certaine souplesse de
structure et une capacité de réaction rapide, de dégager une rentabilité élevée grâce aux
besoins limités en fonds propres.
Exemple
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Soixante-quatorze éleveurs laitiers indépendants, basés dans les départements de
l’Aveyron, du Cantal et du Lot, produisant 20 millions de litres par an, ont annoncé la
création d’un GIE. Souhaitant rester indépendants pour assurer la commercialisation
de leur lait, ils ont créé leur propre marque, L’Éleveur occitan, et développé des
produits spécifiques (une mozarella haut de gamme, du cantal AOP, de la crème...).
By
Ces nouvelles formes d’organisation sont comparables à un jeu de construction dont les pièces, les
entreprises partenaires d’un moment, plus ou moins spécialisées, sont utilisables dans d’autres
circonstances, pour des projets nouveaux. Les observateurs soulignent que ce mode de liaison entre
les entreprises présente deux qualités organisationnelles que l’on considère souvent comme
contradictoires : la forme des firmes mécanistes, où le déroulement des tâches est prévu et
contrôlé avec rigueur, et la vertu des entreprises organiques, qui sont capables de s’adapter avec
souplesse, comme des êtres vivants, aux conditions changeantes. En outre, on constate que le
partage du travail et d’un certain nombre de coûts fixes entre des entreprises partenaires mais
indépendantes est fort efficient. De fait, chacune d’entre elles recherchant son propre intérêt, on
peut envisager qu’il en résulte, par effet de synergie, un produit global supérieur à la somme des
effets recherchés par chacune des entreprises. Ces organisations sont apparues dans des secteurs
d’activités très divers.
Exemples
Le textile, l’informatique, le design, le bâtiment et le cinéma sont particulièrement
concernés car ce sont des branches caractérisées par une forte incertitude, une vive
concurrence et donc un risque élevé de faible rentabilité des investissements. En effet,
les séries produites sont courtes et l’on ne peut guère profiter du bienfait de la
taylorisation, de la production de masse ou des effets fructueux des lois
d’apprentissage.
A. Les caractéristiques des partenariats
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Tandis que certains grands groupes se recentrent sur leur métier, on voit apparaître des groupements
d’entreprises qui semblent bien adaptés aux conditions économiques de ce nouveau siècle. En effet,
ils mêlent les avantages des petites entreprises (recherche de l’innovation, flexibilité, motivation
par l’exercice plus large de la responsabilité, etc.) à ceux des grandes firmes (économies d’échelle,
pouvoir sur le marché, capacités financières, etc.).
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Exemple
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Les clusters, pôles de compétitivité ou d’excellence, sont des groupements
d’entreprises petites et moyennes qui, sur un territoire donné, s’allient avec des
centres de recherche pour lancer des projets innovants. Il en va ainsi de system@tic,
créé en 2005 en Île-de-France. Ce pôle dédié aux systèmes complexes et aux
technologies de l’information et de la communication (TIC) regroupe plus de
600 acteurs de l’innovation et intervient sur quatre marchés applicatifs (télécoms ;
automobile et transport ; sécurité et défense ; outils de conception et de développement
de systèmes).
Il n’est pas toujours aisé d’élaborer une typologie de phénomènes qui, par nature, sont multifacettes.
Garette et Dussauge nous proposent deux grandes familles d’alliances dont les risques et les modes
de gestion diffèrent.
1. Les alliances entre entreprises non concurrentes
Les joint-ventures de multinationalisation lient une entreprise locale à une multinationale.
Exemple
Renault s’allie à l’entreprise locale Oyak, qui maîtrise bien l’environnement social et
économique national pour créer une usine de montage en Turquie.
Les partenariats verticaux associent des entreprises présentes à deux stades d’une filière.
Exemple
Les marques Apple et Facebook signent une alliance pour insérer dans les appareils
de la première une application aisée vers les réseaux sociaux.
Des accords intersectoriels rassemblent des entreprises œuvrant dans des secteurs connexes.
Exemple
Procter & Gamble (chips salées) et Coca-Cola et s’allient : l’un donne soif, l’autre
l’apaise.
2. Les alliances entre entreprises concurrentes
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Exemple
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Les alliances de co-intégration permettent aux entreprises de s’allier pour fabriquer un produit qui
intégrera ensuite le processus de chacune.
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PSA et General Motors s’unissent pour développer une plate-forme commune à partir
de laquelle seront produites certaines voitures des deux marques.
Grâce aux alliances de pseudo-concentration, les entreprises fabriquent et commercialisent un
produit qui devient commun.
Exemple
PSA et BMW vont produire ensemble des moteurs hybrides.
Les alliances complémentaires permettent à deux entreprises de mener une activité en mariant des
compétences complémentaires.
Exemple
Diageo et Moët-Hennessy, qui disposent de portefeuilles complémentaires, s’allient
pour la distribution de champagne dans de nombreux pays.
B. Les raisons des partenariats
Nombre de motifs peuvent pousser à conclure des partenariats. Nous citerons ici les principales.
1. L’efficience économique
Les partenariats, la mise en réseau d’entreprises entraînent des avantages de coût. Passer un contrat
de sous-traitance conduit par exemple à la transformation de frais fixes (salaires, loyers) en frais
variables réduits (le prix payé aux sous-traitants). On peut généraliser cet exemple en posant le
principe suivant : une organisation en partenariat doit permettre de baisser le coût d’une activité en
dessous du niveau qu’atteindraient les solutions dispersées.
2. La concurrence
Pour remédier à l’extension de la concurrence, qui ne consiste plus seulement à s’arracher, entre
rivaux, des clients, mais qui s’étend à toutes les manœuvres technologiques, financières, de gestion
des ressources humaines, nécessaires en vue d’acquérir des ressources et des compétences, une
entreprise isolée, même de grande taille, est démunie. Le partenariat augmente les compétences
pour faire face, à plusieurs, aux difficultés nouvelles.
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3. La mondialisation
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La mondialisation des économies étend le besoin en ressources et compétences nécessaires à
l’entreprise. Le phénomène renforce la concurrence, mais ouvre aussi des possibilités nouvelles
pour trouver des clients, des fournisseurs, des sous-traitants, des partenaires nouveaux. Même les
plus grandes firmes isolées sont dépassées devant ce foisonnement qu’elles ne peuvent maîtriser.
En outre, l’extension des marchés entraîne des exigences de mobilité géographique, de flexibilité
organisationnelle, de rapidité de réponse, auxquelles ne peuvent guère répondre les entreprises
traditionnelles trop rigides, trop hiérarchisées. Ajoutons que les frontières restent difficiles à
franchir et que, pour avoir accès à des marchés étrangers, plus ou moins habilement protégés, il
convient de trouver des partenaires locaux.
4. La techno-science
L’accélération du flux de productions scientifiques transformables en produits/services nouveaux
est telle que l’isolement bride l’innovation. La R & D pousse l’investigation dans des domaines à la
fois plus étendus (l’espace, les biotechnologies, par exemple) et plus spécialisés. Cette activité
nécessaire coûte cher aux firmes, ce qui entraîne le désir et souvent l’obligation de partager les
investissements avec d’autres.
5. L’apprentissage
Les partenariats élargissent l’horizon d’une entreprise. Ils sont à l’origine d’acquisitions de
compétences qui ne sont pas définies dans les contrats d’alliance, mais qui se diffusent par
proximité.
6. Les enjeux et les risques
L’importance des enjeux et des risques financiers, par exemple dans la recherche fondamentale ou
dans des projets dont l’importance est source de risques énormes, conduit les entreprises à s’allier.
Figure 6.9. Les principales motivations à l’origine des partenariats
C. Les conditions de réussite des partenariats
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Lorsqu’un dirigeant d’entreprise prend la décision d’étendre ses activités, non plus isolément, mais
au terme d’une alliance, un pas est franchi. Les objectifs et les moyens doivent, en effet, être
modifiés, car ils ne sont plus adaptés. En d’autres termes, la stratégie subit une mutation, car elle
doit s’adapter aux ambitions et à la volonté des partenaires. Des difficultés nouvelles, impliquant
des stratégies spécifiques (figure 6.10), peuvent alors voir le jour.
1. Des risques de conflit à ne pas négliger
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Même si les intentions des différentes parties de coopérer en bonne intelligence sont partagées, il
peut arriver cependant, au fil du temps, que des obstacles surgissent, affectant plus ou moins
intensément les partenaires. Ainsi observe-t-on que certaines entreprises prennent du recul,
s’éloignent et mettent l’alliance en péril.
Figure 6.10. Le management d’un partenariat
Un tel risque de conflit entre les objectifs et les intérêts augmente non seulement en fonction de la
durée du partenariat, mais aussi proportionnellement, à la distance géographique ou à l’éloignement
culturel qui séparent les partenaires. Il convient de n’intervenir en commun que sur des territoires et
dans des horizons de temps maîtrisables. En outre, il faut éviter de s’engager dans des voies trop
rigides, lorsque l’environnement recèle des possibilités de changement inattendues. À ce risque de
divergence de politiques s’ajoutent d’autres possibilités de heurts. Ceux-ci proviennent de ce que
l’on nomme l’opportunisme des participants. Ce comportement qui consiste à tirer pour soi, et non
plus pour la collectivité, le meilleur parti peut cacher le désir de piller, à son propre profit, les
ressources ou les innovations d’un partenaire que l’on ruinera. Il convient d’être prudent,
particulièrement en matière de partage de technologies, afin de ne pas introduire les concurrents au
sein de l’entreprise. Quel que soit l’objet du partenariat, il est sage de fixer juridiquement le
domaine d’intervention de chaque partenaire.
Exemple
Les possibilités de concurrence à l’intérieur de la coopération doivent être abordées
de front afin d’éviter les feintes des coopérants.
2. Une relation à équilibrer
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Une dernière catégorie de risque consiste en la domination progressive d’une entreprise sur ses
partenaires. Un tel exercice de volonté de puissance aboutit soit à la rupture de la coalition, soit à
l’absorption d’un ou de plusieurs partenaires plus chétifs par le plus puissant. D’une manière
générale, il paraît opportun que les firmes qui souhaitent coopérer soient de dimension comparable,
l’efficacité et la longévité de l’alliance étant tributaires du maintien relatif d’égalité des coopérants
au sein du réseau. On a ainsi observé que la confiance et, plus étrangement, la flexibilité, sont plus
fréquemment réalisées quand les investissements des deux partenaires sont homogènes en quantité
et qualité.
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Exemple
L’alliance commerciale Sky Team (Air France-KLM, Delta Airlines, Korean Air,
CSA, Alitalia, Aeromexico, Aeroflot et China Southern, Vietnam Airlines) est née de
la fusion des programmes de fidélisation des voyageurs.
D. Le management d’un partenariat
Comme les fusions-acquisitions, les partenariats ne sont pas assurés du succès. Nombreux sont les
projets qui échouent. Il paraît donc opportun de chercher à améliorer la gestion de l’alliance.
Cinq étapes peuvent être distinguées.
1. La préparation de l’alliance
Elle suppose de définir avec clarté les objectifs poursuivis, car le partenariat n’est qu’une voie
possible. Parmi les diverses possibilités de développement, il s’agit à cette phase de peser les
avantages réels et les inconvénients de chaque solution envisageable. Si le partenariat est retenu, il
convient de définir les relations qu’on souhaite entretenir avec les partenaires :
– durée de l’alliance ;
– type de partenaires recherchés ;
– place des partenaires dans l’alliance.
2. La recherche des partenaires et la négociation
Nombreuses sont les méthodes employées : relations amicales, contacts personnels, prospection au
sein des syndicats professionnels, voyages d’études, etc. La confiance reste un critère déterminant
de la sélection.
Dans le choix d’un partenaire les critères suivants méritent d’être étudiés :
– la capacité de chacun à contribuer aux objectifs de l’autre ;
– la compatibilité des partenaires ;
– l’implication de chacun.
Une fois que les partenaires sont choisis, on précise avec soin les attentes de chacun, les points de
conflit, en veillant à impliquer les directions générales dans le projet (figure 6.11).
3. La formalisation de l’alliance
Il est toujours prudent de fixer avec précision le contenu de l’accord, notamment :
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– les objectifs ;
– la nature des tâches imparties à chacun ;
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– les ressources et compétences apportées par chacun ;
– le partage des résultats ;
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– la résolution des litiges ;
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– les contrôles périodiques de fonctionnement ;
– les modalités de renégociation de l’alliance.
Figure 6.11. Le management d’un partenariat
4. La gestion opérationnelle
La conduite d’un partenariat s’apparente à la gestion d’un processus collectif qui pose des
problèmes de coopération, d’équilibre de pouvoir, d’organisation, d’opportunisme. Il serait vain de
vouloir formaliser un tel fonctionnement. Toutefois, il est recommandé de veiller aux conditions
suivantes :
– l’évaluation régulière des résultats rapportés aux objectifs ;
– la définition de structures transverses, de type projet, entre les deux partenaires ;
– la mise en place d’un système de communication aux partenaires des informations sur le
réseau ;
– le choix attentif des personnels qui travaillent dans l’alliance.
Tableau 6.6. Un bilan du développement des activités en partenariat
Avantages
Inconvénients
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• Danger de l’opportunisme des partenaires.
• Luttes sourdes pour le leadership.
• Difficulté d’évaluer les gains.
• Coûts élevés de la coordination.
• Conflits entre partenaires.
• Émergence de partenaires dominateurs.
• Obstacles constitués par les différentes
cultures d’entreprise.
• Incompatibilité organisationnelle.
• Difficulté de fixer les frontières de
l’entreprise.
• Coût de rupture du partenariat.
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• Diminution des coûts de transaction et des
coûts d’organisation.
• Diminution des risques (technologiques,
financiers, commerciaux, etc.).
• Découverte de nouveaux débouchés.
• Apprentissage managérial accéléré grâce à
l’expérience des autres.
• Élévation de barrières à l’entrée.
• Bénéfice des effets d’échelle.
• Accroissement du pouvoir sur les fournisseurs
et sur les clients.
• Avantages compétitifs supplémentaires.
• Rentes relationnelles diverses (exemple :
meilleurs rapports avec les pouvoirs publics).
• Augmentation de la sécurité des partenaires par
renforcement mutuel.
5. L’évaluation du partenariat
L’évaluation d’un partenariat doit se faire sur quatre plans :
– les résultats des projets et activités de l’alliance ;
– les effets (passés et futurs) de l’alliance sur les partenaires ;
– la qualité de la relation entre partenaires ;
– l’issue de l’alliance.
E. Alliance ou fusion ?
La question du choix de l’alliance ou de la fusion se pose concrètement aux entreprises, comme l’a
montré l’alliance Renault-Nissan.
L’alliance est bien sûr la seule option quand il n’est pas possible d’acquérir le partenaire cible,
notamment du fait de réglementations d’autorité de régulation des marchés.
Tableau 6.7. Une comparaison de l’alliance et de la fusion
Alliance >> Fusion
Fusion >> Alliance
• Synergies limitées
• Réversibilité
• Risque de perte de client réduit
• Peu de problèmes d’évaluation
• Non-intégration d’actifs indésirables
• Apprentissage progressif
• Autonomie des partenaires
• Unicité de pilotage
• Intégration plus forte
• Coûts de coordination réduits
• Synergies
• Image plus claire
• Pérennité
L’alliance est en outre préférée à la fusion lorsque :
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– les synergies potentielles étant réduites par rapport à la taille des entreprises, un
rapprochement global n’est pas justifié et serait coûteux ;
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– l’opération concernée étant limitée dans le temps, un rapprochement peu réversible comme
la fusion n’est pas opportun ;
By
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– la fusion ferait perdre des clients au cas où les partenaires se situent à des stades différents
d’une même filière, le fournisseur étant susceptible de perdre des clients concurrents du
partenaire-client ;
– l’entreprise cible est délicate à évaluer du fait d’une asymétrie informationnelle sur la vraie
valeur des actifs ;
– l’entreprise cible est considérée comme difficilement intégrable du fait d’actifs enchevêtrés
dans des actifs indésirables (non intéressants ou ayant une mauvaise image) ;
– les partenaires souhaitent privilégier une prise de connaissance progressive et moins risquée
de l’autre ;
– l’autonomie des entreprises ne peut être remise en cause pour diverses raisons, notamment
culturelles.
Quand préférer l’alliance à l’acquisition ?
La règle des 4 I prévaut :
– infaisabilité : il n’y a sur les marchés aucune entreprise à acquérir (ou un achat est interdit
par la législation) ;
– investissements possibles : pour maintenir sa flexibilité, l’entreprise a toujours la
possibilité, ultérieurement, d’investir elle-même ;
– « indigestibilité » : l’absorption d’une autre entreprise apparaît trop difficile sur les plans
technique et culturel ;
– information asymétrique : il convient de préserver des informations de part et d’autre,
lesquelles seraient inévitablement mises sur la table en cas d’acquisition.
La fusion présente plusieurs avantages :
– la création d’une structure juridique unique, alors que l’alliance impose le maintien des
structures existantes et la création d’une structure de pilotage du partenariat ;
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– l’intégration plus forte des entreprises existantes dans un ensemble nouveau ;
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– la réduction des coûts de coordination future ;
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– des synergies organisationnelles, marketing et industrielles plus fortes ;
– une image externe plus claire sur le plan commercial mais aussi pour les marchés
financiers ;
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– une pérennité plus grande du fait du caractère irréversible de la fusion.
Exemples
Les avantages respectifs des deux alternatives expliquent que dans le cas de BNP et
Paribas, une fusion ait eu lieu, alors que, dans le cas Renault-Nissan, c’est l’alliance
qui ait été choisie. Le succès de cette alliance a incité Air France à opter pour une
organisation identique avec KLM.
IV. La mise en œuvre opérationnelle de la stratégie
La définition et le choix des options stratégiques constituent une phase, évidemment essentielle, du
processus stratégique. Ceci étant, il serait vain de considérer qu’il suffit de définir les choix
stratégiques pour qu’ils soient effectivement mis en œuvre. Ce serait ignorer la réalité du
fonctionnement des entreprises et des organisations que de le croire. La mise en œuvre
opérationnelle suppose trois étapes.
A. La vérification de la faisabilité des choix stratégiques
Nous avons vu que les choix stratégiques résultaient tant du diagnostic interne que de l’analyse
externe. Les managers ont donc intégré les contraintes auxquelles ils sont confrontés. Celles-ci
conditionnent le succès de leurs décisions. Il nous semble particulièrement utile, avant que les
décisions stratégiques ne soient définitivement arrêtées, de s’assurer de leur faisabilité. La
figure 6.12 privilégie les dimensions internes de la faisabilité et s’inscrit dans une perspective de
cohérence entre, d’une part, les compétences et les ressources de l’entreprise et, d’autre part, ses
choix. Il est en effet particulièrement important de valider la faisabilité organisationnelle,
culturelle, commerciale, technologique mais aussi financière, des orientations choisies.
Il va de soi que si l’analyse conduit au constat d’une faisabilité sur l’un des critères considérés
comme essentiels par la direction, le choix stratégique est susceptible d’être remis en cause.
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Figure 6.12. La mise en œuvre opérationnelle
• Organisationnelle
• Culturelle
• Technologique
• Commerciale
• Financière
• Etc.
Forte
Moyenne
Faible Conclusion
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Faisabilité
stratégique
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Tableau 6.8. La faisabilité stratégique
B. L’établissement du business plan
Le business plan est un document de synthèse qui présente le projet et dont l’objectif est de
convaincre les interlocuteurs de sa pertinence et sa qualité. Le business plan doit mettre en
évidence la pertinence commerciale, la cohérence des mesures et la faisabilité financière du projet.
1. Les différents business plans
Tableau 6.9. Les déclinaisons des business plans
Objet
Rédacteur
Lancement d’une nouvelle activité. Chef de projet
Destinataires
Lancement d’un nouveau produit.
Chef de produit
Création d’une entreprise.
Création d’un point de vente,
d’une franchise.
Chef d’entreprise
Direction générale, comité stratégique
Direction marketing
Direction de division
Banquiers, partenaires
Franchisé
Franchiseur, banquier
Innovation technologique.
Créateur
Direction de la recherche
Financeurs publics
a. Les qualités d’un business plan
Les business plans diffèrent selon leur objectif, mais ils doivent partager les qualités suivantes :
• Synthèse : quelques pages, les détails étant renvoyés en annexe.
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• Clarté : les présentations sous la forme de tableaux et de graphiques sont privilégiées pour
convaincre les différents interlocuteurs.
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• Cohérence : les données financières doivent être cohérentes entre elles et en accord avec les
données du marché.
• Chiffrage : les différentes hypothèses (notamment de marché) sont chiffrées.
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b. Le contenu du business plan
Bien que non normalisé, le business plan compte généralement les dix rubriques suivantes :
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1. Présentation générale du projet : idées, contexte, motivation principale.
2. Présentation des acteurs : les hommes, leur profil, leur expérience (important dans les cas de
création d’entreprise).
3. Activité ou produit : ses caractéristiques, son positionnement, la cible.
4. Marché : demande (taille, tendance, caractéristiques, etc.), chiffrage en volume, offre,
concurrence.
5. Distribution : canaux choisis.
6. Communication : budget, supports.
7. Juridique : choix des structures juridiques, protection (brevets).
8. Partenaires : liste et rôle des partenaires associés au projet.
9. Planning de mise en œuvre : les dates clés, un PERT.
10. Financier :
Plan de financement au démarrage
Compte de résultat prévisionnel sur trois ans
Plan de trésorerie sur douze mois
Il va de soi que le contenu du business plan doit être adapté au projet.
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L’orientation stratégique envisagée (poursuite d’une stratégie déjà engagée, implantation à
l’étranger, lancement d’une nouvelle activité, partenariat avec un concurrent, etc.) doit, autant que
possible, faire l’objet d’un compte de résultat prévisionnel sur trois ou cinq ans. Les rubriques du
compte de résultat dépendent de l’activité de l’entreprise et de l’organisation de sa comptabilité
analytique. La difficulté réside surtout dans l’élaboration des prévisions du chiffre d’affaires. Si
l’activité possède un historique, il est utile de rappeler les objectifs et réalisations de l’année
précédente. Il convient, dans cette phase, de ne pas oublier que la surévaluation ou la sousévaluation des produits et des charges peuvent aussi résulter des stratégies des acteurs qui
souhaitent se prémunir contre les aléas d’un avenir à l’évidence incertain.
Le business plan d’un créateur d’entreprise
Prenons le cas d’une créatrice de vêtements pour enfants, Mme Audran, qui souhaite s’installer à
Paris à son compte. Afin de prouver la pertinence, la faisabilité et la viabilité de son projet et
d’obtenir un crédit, elle doit remettre un business plan à sa banque. Celui-ci doit notamment
aborder les aspects suivants :
– juridique : nom de l’entreprise, forme juridique ;
– marketing : analyse des clients, analyse des concurrents, politique de prix ;
– commercial : offre (services et/ou produits), cibles, positionnement, plan d’action ;
– gestion des ressources humaines : effectif, recrutement, politique salariale ;
– logistique : approvisionnements, achats et distribution ;
– financier : compte de résultat, trésorerie, plan de financement, bilan.
Dans son business plan, Mme Audran n’aura pas à aborder de manière approfondie l’ensemble
de ces points. Future gérante d’une société sans employé, elle n’est que peu concernée par la
gestion des ressources humaines. Elle pourra néanmoins mettre en avant les aspects suivants :
– juridique : le choix de la forme juridique de son entreprise peut avoir de fortes
conséquences sur l’engagement de son patrimoine personnel en cas de faillite. La SARL
est généralement recommandée ;
– marketing / commercial : après avoir décrit le fonctionnement du marché, il sera
important pour Mme Audran de faire ressortir son positionnement de PME et sa cible
(les mamans cadres et citadines). Elle devra faire valoir et démontrer l’intérêt de ce
positionnement par rapport à une demande croissante. Elle devra clarifier ses besoins en
fonds de roulement. Elle ne devra pas non plus omettre de préciser son offre (originalité
par rapport à la concurrence), diffusion (Internet et boutique-atelier), sa polyvalence et
ses capacités d’adaptation (créations originales et réalisations sur mesure, selon la
demande).
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– financier : Mme Audran devra particulièrement se focaliser sur le plan d’investissement
(montant de l’apport personnel). C’est en effet un des facteurs conditionnant l’obtention
d’un prêt. Elle devra également pouvoir montrer une gestion de trésorerie positive, sur la
première année notamment. Les problèmes de trésorerie font en effet partie des
principales causes de faillite des jeunes sociétés.
By
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$!
Lors de son entretien avec son banquier, Mme Audran pourra s’appuyer sur plusieurs arguments
pour justifier l’intérêt de son projet. Elle pourra tout d’abord mettre en avant la viabilité de son
entreprise par rapport au secteur et au type de clientèle. À Paris, les petits créateurs ont la cote.
La diffusion partielle de ses créations dans des boutiques de la capitale réduira d’autant son
besoin en fonds de roulement. Enfin, Mme Audran pourra également faire valoir son expérience
dans le secteur de la confection. Celle-ci lui a permis d’acquérir une parfaite connaissance des
besoins des clients, des mécanismes de fonctionnement d’une PMI et des circuits de diffusion.
Elle a pu, à cette occasion, développer un solide réseau de clients et de fournisseurs potentiels.
Elle pourra, par exemple, obtenir des remises plus conséquentes sur les coupons de tissu. Ses
compétences lui permettent en outre de proposer des outils de simulation en ligne qui faciliteront
les ventes à distance (province et étranger).
Là encore, si les résultats prévisionnels ne sont pas satisfaisants au regard des critères de
rentabilité de l’entreprise, les décisions peuvent être remises en cause.
Tableau 6.10. Le plan de financement
Année n Année n + 1 Année n + 2
Besoins
• Frais d’établissement
• Investissement
• Remboursement crédit
• Besoin en FDR
Ressources
• Capitaux propres
• Emprunts
• Autofinancement
Écart
Tableau 6.11. Le compte de résultat prévisionnel
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Chiffre d’affaires
Marge brute (%)
Charges variables (%)
Marge sur coûts variables
(%)
Marge sur coûts variables
(valeur)
Personnel
Marketing
Finance
Autres charges
Amortissements
Charges de structure
Produits accessoires
Résultat/Charges
directes
Résultat d’exploitation
Résultat financier
Résultat exceptionnel
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Réalisé Réalisé Objectifs Objectifs Objectifs
n–1
n
n+1
n+2
n+3
Tableau 6.12. Le plan de trésorerie mensuel
Janvier Février Mars Avril Mai
...
Encaissement
• Exploitation
• Hors exploitation
Décaissement
• Exploitation
• Hors exploitation
Solde
2. La définition des responsabilités de mise en œuvre
Cette ultime phase du processus stratégique est en pratique trop souvent négligée.
La traduction opérationnelle
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Le diagnostic interne, surtout quand il est fonctionnel, aborde très fréquemment des questions
d’ordre opérationnel. On ne dira jamais assez combien les aspects stratégique et opérationnel
doivent être d’une part dissociés soigneusement (pour ne pas faire tomber l’analyse du futur dans
la myopie oppressante du court terme) et d’autre part examinés ensemble (pour lier les actions
qui résultent d’un diagnostic d’ensemble). On pourra à cette fin proposer la grille qui suit
(tableau 6.13).
Tableau 6.13. Un exemple de diagnostic et de propositions opérationnelles
Fonctions
Faiblesses
et critères
mise en place
d’un système de
remontée
directeur commercial 15 000 €
d’informations
par la force de
vente
demander une
responsable
proposition dans
6 000 €
communication
une agence
formation en
interne par
société
spécialisée
DRH
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• Finance
Crédit client
manque de
maîtrise du
téléphone et des
réponses par
courriel
très supérieur à
la durée moyenne
du secteur
ramener la durée
à 25 jours en
directeur financier
moyenne
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• Personnel
Groupe chargé
de l’accueil
vieillot
25 000 €
12 mois
2 mois
7 mois
à
12 mois
déterminer
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• Organisation
absence totale
Existe-t-il une
veille marché ?
• Commercial
Logo
Actions Responsables Coût Délai
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De nombreux choix stratégiques ne sont pas effectivement mis en œuvre tout simplement du fait
d’une insuffisante définition des responsabilités et des allocations des ressources. En matière
stratégique, le style incantatoire n’est pas synonyme d’efficacité. Il faut clairement préciser qui fait
quoi, avec quels moyens et dans quels délais : QQOQCC (Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ?
Combien ? Voir le tableau 6.14).
Tableau 6.14. Les moyens de mise en œuvre
Décisions
Moyens Moyens Moyens
Responsables
Échéanc
stratégiques
financiers humains matériels
Lancement de la
gamme X.
Implantation aux
États-Unis.
Accord de licence
en Chine.
Etc.
3. Le tableau de bord prospectif
Une proposition de système de management stratégique global nous vient du domaine du contrôle de
gestion : le balanced scorecard ou tableau de bord prospectif(43) (figure 6.13).
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Figure 6.13. Le tableau de bord prospectif, un cadre stratégique pour l’action
By
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Quatre phases s’enchaînent. La première consiste à clarifier l’intention stratégique et à la traduire
en objectifs. L’accent est mis autant sur les indicateurs financiers que sur les données non
financières (par exemple, les processus qui sont la source de la performance). La tâche de
clarification peut révéler des absences de consensus marquées entre les dirigeants. La deuxième
étape incite à communiquer les objectifs et les indicateurs en interne pour que chacun y adhère le
mieux possible. La troisième phase du mouvement entre dans le concret de la fixation d’objectifs
avec des échéances. Le chemin devient précis. L’articulation avec le contrôle de gestion, voire le
contrôle budgétaire, s’opère à ce niveau. Enfin, la dernière étape permet un suivi « intelligent » de
la démarche, rend l’entreprise apprenante, lui permet, d’abord, dans un processus de rétroaction en
simple boucle, d’adapter ses actions pour que les objectifs soient atteints et, ensuite, dans un
processus en double boucle, au sens de Argyris et Schön, l’incite à adapter ses objectifs aux
modifications de l’environnement.
Le tableau de bord prospectif, par sa généralité et la diversité des indicateurs retenus, a pris toute
sa place dans la panoplie des instruments de pilotage stratégique. La renommée des auteurs, acquise
en leur qualité d’initiateurs d’un nouveau contrôle de gestion, renforce le poids de l’outil.
Exemple
Dans une société de transport routier, de nouveaux indicateurs ont été mis en place. Ils
sont organisés autour de quatre pôles :
• Un pôle client
– Nombre de nouveaux clients du mois par rapport au nombre total de clients.
– Nombre de clients perdus par rapport au nombre total de clients.
– Un indicateur de satisfaction clients construit à partir d’un questionnaire.
• Un pôle processus
– Nombre de nouveaux services proposés aux clients.
– Nombre de litiges par rapport au nombre de transports effectués.
– Nombre de retards par rapport au nombre de livraisons.
• Un pôle organisationnel
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– Ratio de couverture des postes clés.
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– Ratio de manquants : nombre de documents arrivant incomplets par rapport au
nombre de documents transmis.
• Un pôle financier
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– Ratio de conducteurs full.
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– Croissance du chiffre d’affaires.
– ROCE (retour sur capitaux employés).
– Variation des frais financiers.
– Charges indirectes par rapport au chiffre d’affaires.
C. MENDOZA et R. ZRIHEN, « Du balanced scorecard au
tableau de pilotage », Expansion Management Review,
décembre 1999.
Kaplan et Norton formulent dix recommandations pour mettre en œuvre un système efficace de
tableau de bord prospectif :
– Traduisez la stratégie en termes opérationnels.
– Mettez en cohérence objectifs généraux de l’entreprise et objectifs décentralisés.
– Faites de la stratégie le travail quotidien de chacun en fixant des objectifs personnels liés
aux systèmes de primes.
– Impliquez le personnel.
– Faites de la stratégie un processus continu.
– Montrez votre leadership pour forcer le changement.
– Prenez toutes vos décisions en fonction de leur cohérence avec la stratégie.
– Choisissez les bons indicateurs.
– N’étouffez pas la créativité.
– Ne déléguez pas le pilotage du tableau de bord.
Cette liste montre toute la force que le tableau de bord prospectif peut engendrer dans l’entreprise à
partir du moment où sont fortement présentes les idées de « balanced », c’est-à-dire d’équilibrage
entre tous les acteurs (dirigeants, salariés, fournisseurs, clients, etc.) et de « cartes » par DAS,
celles-ci étant destinées à stimuler chacun y compris jusqu’à l’attribution d’un bonus fondé sur des
indicateurs globaux.
4. L’alignement managérial
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Exemple
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Henderson et Venkatraman(44) suggèrent que le développement de la stratégie et des systèmes
d’information doit être cohérent. C’est ce qu’ils appellent l’alignement managérial (FIT) entre la
stratégie de l’entreprise et celle des systèmes d’information. Cela signifie que non seulement
les décisions d’investissement en technologie de l’information (TIC) doivent être en phase avec les
choix stratégiques, mais aussi que les orientations stratégiques doivent intégrer les potentialités des
TIC, notamment en termes de création d’avantage concurrentiel.
By
Le développement d’une stratégie de flux tendu et de livraison en 24 heures dans un
réseau de distribution implique bien évidemment des investissements conséquents en
équipement des points de vente et en réseau.
On comprend bien que la nécessité de cohérence dépasse la stratégie et les TIC, et intègre
les autres facettes du management telles que les structures, les processus de gestion mais aussi
les systèmes d’animation, notamment la culture de l’entreprise. Toutefois, cette recherche de
cohérence n’est pas simple.
Exemple
Une grande firme de services aux entreprises, organisée en réseau, où les agences
constituent une constellation de PME autonomes, avec leur directeur d’agence,
véritable patron d’unité, ayant « son » personnel et considérant que les clients
« appartiennent » à l’agence. Cette entreprise, dans le cadre d’une stratégie de
différenciation par rapport à la concurrence, et de façon à intégrer son système
d’information à celui de ses grands comptes, décide de se doter d’un logiciel intégré
de gestion (ERP) permettant d’uniformiser tous les processus administratifs et
notamment un accès des clients à ses bases de ressources humaines. L’entreprise doit
faire évoluer ses structures, ses processus de gestion, ses habitudes mais aussi sa
culture managériale !
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Dans le dernier exemple, il est clair que le problème ne se pose pas uniquement en termes de
systèmes d’information. Il s’agit aussi d’assurer la cohérence non seulement entre stratégie et TIC,
mais aussi entre TIC et structure, TIC et culture managériale et, enfin, entre TIC et compétences car,
en l’occurrence, les responsables d’agence vont devoir faire évoluer leur métier.
Exemple
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La performance durable d’une entreprise repose probablement sur cette capacité à mettre en
cohérence (aligner) les différents aspects du management.
By
L’Oréal apparaît comme une entreprise où la stratégie d’innovation est en cohérence
avec la structure floue et une culture centrée sur des comportements
entrepreneuriaux(45).
Figure 6.14. Le processus d’alignement managérial
Dans une perspective de diagnostic d’entreprise, il est important, pour déterminer son potentiel de
développement et sa véritable valeur, de porter un jugement sur le degré d’alignement managérial.
En effet, une entreprise qui définit une stratégie et qui ne met pas en cohérence ses systèmes
d’information, son organisation, ses processus et ses systèmes d’animation risque fort de gaspiller
des ressources et de voir ses projets échouer. À titre d’illustration, le tableau 6.15 permet de mieux
cerner la réalité de la réflexion de l’entreprise en matière d’alignement managérial.
On ne saurait trop insister sur l’importance des éléments d’animation des hommes abordés dans le
chapitre 7 et sur la nécessité de faire évoluer les pratiques et cultures managériales en matière de
TIC notamment. Cela implique généralement qu’au-delà des investissements matériels en TIC,
l’entreprise prévoie des investissements en formation permettant de faire évoluer les usages, les
pratiques et les mentalités.
Tableau 6.15. Un diagnostic de l’alignement managérial
Degré d’alignement
managérial
Faible
Fort
By
4$
$!
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Le plan stratégique de l’entreprise comporte un volet
consacré aux implications de la stratégie en matière de
TIC.
La stratégie a été définie en tenant compte de l’impact des
TIC sur l’avantage concurrentiel.
Le directeur informatique fait partie du comité de direction
ou du comité stratégique.
La structure est définie en tenant compte des choix
stratégiques.
Une réflexion portant sur l’impact des TIC sur les modes
de fonctionnement interne et sur les activités des managers
a été engagée.
Un plan de formation aux TIC a été prévu.
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
Mini-cas 1 : la mise en œuvre du business plan
Le métier de chauffagiste amène à réaliser une large gamme d’interventions. La première d’entre
elles consiste en l’installation d’appareils sanitaires (réfection de salles d’eau, ajout de
colonnes, intervention sur les réseaux sanitaires ou thermiques, etc.). La deuxième gamme
d’interventions recouvre le dépannage (réparation de fuites ou d’appareils défectueux, résolution
de pannes). Enfin, la dernière gamme correspond à l’entretien (ramonage, détartrage, etc.).
L’exercice de ce métier impose la maîtrise de différentes compétences, que ce soit en matière de
plomberie, d’électricité ou encore de maçonnerie. Dans le cadre de l’installation, notamment
thermique, les chauffagistes doivent par ailleurs posséder différentes accréditations. La première
est délivrée par Qualigaz. Elle concerne la pose d’appareil thermique à gaz et le travail sur des
conduits de fumée. La deuxième, obtenue en CAP de chauffagiste, est une certification de la
capacité à travailler sur les réseaux électriques.
Structure du marché et intervenants
Le marché de l’installation, du dépannage et de l’entretien d’appareils thermiques se répartit
entre deux types d’acteurs majeurs : les petites et moyennes industries (PMI) de moins de 10
salariés et les petites et moyennes entreprises (PME) d’environ 100 salariés. Les premières
interviennent principalement auprès des particuliers. Elles sont généralement spécialisées soit
dans l’entretien et le dépannage des appareils thermiques, soit dans l’installation complète des
réseaux thermiques. Ce type de clientèle leur permet de limiter les investissements dans l’achat
de matériel lourd et de recevoir les règlements des clients quasi au comptant. Les secondes
gèrent généralement les gros chantiers dans le secteur du BTP. Elles travaillent directement avec
des organismes tels que les HLM et les architectes responsables des gros projets. Du fait de
l’ampleur des chantiers à mener et des délais dans les règlements, elles ont des besoins
conséquents en fonds de roulement et en trésorerie.
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Ces sociétés comptent principalement deux types de prestataires. Elles travaillent tout d’abord
avec les banques de financement dans le cadre des installations d’appareils thermiques comme,
par exemple, Pétrofigaz. Elles font par ailleurs bien évidemment appel à plusieurs fournisseurs
généralement spécialistes d’une marque en particulier (De Dietrich, Feroli ou encore
Friquelmilat, dans le domaine des chaudières).
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Schéma récapitulatif des activités et intervenants
Le projet de création d’entreprise
M. Jean, employé dans une société de la région, décide de se mettre à son propre compte sans
associé ou salarié. Chauffagiste depuis plus de dix ans dans la région de Fontainebleau, il a
travaillé pour trois PMI différentes. Cela lui a permis d’intervenir sur des matériels de marques
différentes. Il a complété sa formation initiale (CAP chauffagiste) et obtenu des accréditations
dans la pose de gaz et les interventions sur les conduits de fumée. Au cours de ces années, il
s’est toujours distingué par la qualité et la rigueur de son travail auprès des clients de la société.
Client depuis plus de sept ans de la banque Fidelia, il décide de constituer un business plan en
vue de l’obtention d’un crédit pour la création de sa société. Un entretien chez un expertcomptable de la région lui a permis de récupérer quelques informations sur le système des
financements octroyés par les banques d’une part et des informations comptables à fournir
d’autre part. Celui-ci lui a expliqué que, dans son cas, les banquiers étaient très attentifs à la
situation bancaire du créateur d’entreprise, au secteur d’activité dans lequel il souhaite s’insérer
et à la connaissance qu’il peut en avoir. Il lui a rappelé que les prêts étaient réalisés à hauteur de
80 % du matériel, sur des périodes de cinq ans généralement pour des taux d’emprunt de l’ordre
de 4 % à 5 % hors frais de dossier. Ce prêt peut être complété par un emprunt CE PME dans les
deux ans suivant l’obtention du crédit auprès de la banque principale. Le montant est compris
entre 3 000 euros et 8 000 euros, pour un taux d’emprunt de 3,50 % hors frais de dossier. Il peut
servir à financer le matériel mais également le fonds de roulement.
Pour la réalisation de l’une des parties de son business plan, M. Jean a réuni plusieurs
informations comptables rassemblées dans le tableau ci-après :
Postes
Descriptions
Installation d’une chaudière à 9 909 €, et quatre contrats
d’entretien à 660 € unitaire.
Il faut compter 3 659 € pour l’installation d’une chaudière et 15 €
pour un contrat d’entretien.
Établi à 2601€, pince à emboîture à 2 481 €, coupe-tube à 92 €,
scie à 24 €, enrouleur à 21 €, testeur à 77 €, clé à 45 €, meule à
20 €, mèche à 75 €.
Voiture de société à 3 000 €, poste roller-flamme à 997 €,
Achat du matériel amorti
cintreuse 1 051 €, perceuse Hilti à 914 €, perforateur hilti à
nécessaire à la création
1 300 €, mèche à 762 €, ordinateur à 2 286 €, imprimante à
de l’entreprise
609 €.
Téléphone 183 €, fournitures de bureau 23 €, petit outillage 64 €,
Charges courantes par mois énergie 23 €, loyer 122 €, entretien matériel 213 €, assurances
191 €, publicité 198 €, frais de mission 534 €.
Charges exceptionnelles sur Frais d’enregistrement de la société 1 256 € à la création, expertl’année
comptable 1 524 € en fin d’année.
Charges salariales par mois Estimation de 3 506 €.
Apport personnel en début
15 245 €.
de création
Informations relatives aux
Emprunt à la banque pour un montant de 4 500 € sur 3 ans. Taux
charges financières
d’emprunt : 6 %.
NB : tous les montants communiqués dans ce tableau sont HT.
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Chiffre d’affaires
prévisionnel par mois
Achats marchandises lors
des différentes interventions
Achat du matériel non amorti
nécessaire à la création de
l’entreprise
Questions
1. D’une manière générale, quand est-il nécessaire de réaliser un business plan ? À qui
peut-il s’adresser et quels sont les objectifs principaux d’un tel document ?
2. M. Jean souhaite remettre un business plan à sa banque en vue de l’obtention d’un crédit
pour la création de son entreprise. Quels sont les différents aspects qu’il devra aborder
dans ce document ? Par ailleurs, quels arguments pourra-t-il mettre en avant le jour de
son entretien afin de convaincre son banquier ?
3. À partir des évaluations faites par M. Jean, dressez le compte de résultat sur la première
année, en n’omettant pas les dotations aux amortissements (amortissement linéaire sur
5 ans) et les charges financières.
Mini-cas 2 : La nouvelle organisation décentralisée de
Carrefour
Profondément perturbé par le management à l’anglo-saxonne de la précédente direction,
Carrefour France se met en ordre de marche. La nouvelle organisation sera annoncée courant
mars.
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Une fois réglé le recentrage géographique, Georges Plassat affirmant ce jeudi qu’il n’y aurait pas
de nouvelles cessions d’actifs à l’étranger – même s’il y a des pays dans lesquels il y a des
options stratégiques à prendre, a-t-il dit (la Pologne et la Turquie sont régulièrement cités par les
observateurs) –, Carrefour France fait plus que jamais figure de priorité pour le P-DG du numéro
deux mondial de la distribution.
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« Si les recettes du passé avaient marché, on n’en serait pas là », a-t-il lancé, en affirmant qu’en
France « il est incontournable de faire des changements ». Ceux-ci devraient être connus assez
rapidement puisque Georges Plassat a indiqué qu’une nouvelle organisation de la filiale
française, première contributrice au chiffre d’affaires et au résultat du groupe, sera annoncée
dans le courant de ce mois de mars.
Le client « au cœur de notre mode de pensée »
D’ores et déjà, une chose est sûre, celle-ci sera fondée sur un principe de « décentralisation bien
pensée, bien comprise », et bien dosée, a affirmé le patron de Carrefour. « La décentralisation
n’est pas négociable et les anciennes méthodes doivent évoluer. Aujourd’hui, on doit avant tout
penser client et (le) remettre au cœur de notre mode de pensée », a-t-il insisté. Il a notamment
laissé entendre que l’organisation séparant les hypermarchés en trois catégories (petits, moyens
et grands) serait abandonnée, au profit d’une organisation en « bassin » avec une approche multicanal.
Entraîner les personnels, renforcer la diversité des ressources humaines, faire évoluer les
organisations dans ces trois secteurs clefs que sont la logistique, les systèmes d’information et la
gestion de l’offre : tels sont les chantiers sur lesquels travaillent Noël Prioux, le directeur
exécutif de Carrefour France et ses équipes.
Une autre politique de rémunération
Mais qui dit décentralisation dit aussi une politique de rémunération différente, prenant en
compte les nouvelles responsabilités des cadres, et notamment des directeurs de magasins. Sur
ce point, Georges Plassat a précisé que les systèmes d’incitation (« incentive ») étaient en train
d’être revus. C’est déjà fait pour les patrons de pays et en cours au niveau des cadres de la
société. Cependant, a remarqué le P-DG du groupe, « on ne peut pas correctement intéresser à la
performance sur des critères qualitatifs si les moyens disponibles dans les magasins ne sont pas
là ».
Comme pour les autres chantiers destinés à redresser le géant de la distribution, Georges Plassat
a rappelé que son plan s’étalait sur trois ans, en appelant « à la discipline et à la patience ». Les
syndicats, eux, sont vent debout contre la baisse de la participation en 2012 et demandent des
comptes.
A. Bourdet, « Carrefour prépare une nouvelle organisation
décentralisée », Les Échos, 7 mars 2013.
Questions
1. Quelles sont les raisons qui motivent la réorganisation ?
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2. En quoi la réorganisation est-elle alignée avec la nouvelle stratégie de Carrefour ?
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3. Sur quels principes la réorganisation repose-t-elle ?
Chapitre 7
Le déploiement organisationnel
Les compétences clés à acquérir :
• Connaître les grandes formes de structures.
• Repérer les principaux facteurs qui déterminent l’adoption d’une structure plutôt qu’une autre.
• Envisager les rapports fondamentaux entre la structure et la stratégie.
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• Savoir pourquoi la décentralisation tient une place centrale dans les entreprises et dans la théorie des
organisations.
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• Comprendre pourquoi les structures de nombreuses entreprises évoluent vers des organisations en
projet et en réseau.
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• Comprendre les principes sur lesquels sont fondées toutes les théories relatives à l’animation des
hommes dans les entreprises.
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• Identifier les différents styles de direction et en apprécier les effets sur les performances de
l’entreprise.
En tant que force ordonnatrice, la direction générale a pour tâche de modeler l’architecture globale
de l’entreprise et de fixer des règles communes à tous les acteurs. Elle dispose d’un pouvoir pour
diriger les collaborateurs tout en s’efforçant d’éveiller chez eux un véritable dynamisme. C’est
pourquoi l’autorité dans l’entreprise perd son caractère disciplinaire pour se transformer en
animation de personnes. L’application satisfaisante d’une stratégie implique l’adhésion du plus
grand nombre des acteurs. Après avoir souligné les difficultés de mise en œuvre de la stratégie,
nous verrons quels choix organisationnels sont pertinents puis nous mettrons l’accent sur la
mobilisation nécessaire des équipes avant de conclure sur les formes que le processus
organisationnel peut prendre.
I. Les difficultés du déploiement
L’analyse des orientations stratégiques a pu laisser entendre que les choix des entreprises étaient
« purs » au sens où un diagnostic porté sur un domaine d’activité impliquait un choix et un seul.
La plupart du temps, il n’en est rien : tout diagnostic doit être passé au crible des possibilités
pratiques d’application. Ainsi, une volonté générale de spécialisation pourra prendre de
nombreuses allures : renforcement exclusif d’une gamme, montée en puissance avec des
investissements en communication de l’ensemble des produits du domaine, élagage de certaines
branches et renforcement d’autres, etc. De même, le poids du passé (l’activité résulte-t-elle d’une
ancienne acquisition ou constituait-elle le cœur de l’activité d’origine ?) et le degré de maturité du
secteur dans lequel l’activité s’intègre auront de l’importance dans les choix opérés.
Reprenons les trois grandes familles d’éléments qui viennent obérer la « simplicité » des choix
stratégiques effectués, tant au niveau des DAS que du portefeuille d’activités.
A. Les contraintes
Il peut advenir que les technologies soient plus difficiles que prévu à développer, que les sources
d’approvisionnement en matière de bonne qualité fassent défaut ou encore que des concurrents,
jusque-là indépendants, se soient alliés.
Exemples
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Le groupe PSA s’est allié avec BMW en matière de moteurs hybrides et avec General
Motors pour construire une plate-forme commune. De même, Renault s’est adjoint
Nissan et Mercedes. La marque au losange fournit à Mercedes des moteurs 3 et
4 cylindres, en échange de quoi Mercedes lui fournit des moteurs 5 et 6 cylindres.
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Dans toutes ces situations, un nouveau diagnostic doit être mené car la situation concurrentielle a
changé.
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Comme nous l’avons déjà exposé, le processus stratégique est rétroactif : la mise en œuvre a toutes
les chances d’enclencher un nouveau diagnostic de la situation. Mais, au-delà de cette idée
générale, il convient ici de bien percevoir l’idée selon laquelle d’immenses et réelles difficultés
naissent au moment où la décision stratégique est prise. Un double défi apparaît alors :
– traduire dans les plans par fonctions les décisions prises et réaliser le mieux possible
l’allocation des ressources qui permettra la mise en œuvre. Les conséquences sont
financières (Où et comment investir ? Comment se financer ?), humaines (Qui embaucher ?),
commerciales, matérielles (Quelles acquisitions réaliser ?) ;
– informer, inciter et faire adhérer tous les acteurs de la mise en œuvre pour qu’ils acceptent
les décisions prises et agissent dans le sens voulu.
Le premier défi trouve sa réponse dans la qualité de la gestion courante relevant des diverses
fonctions, le second a trait aux questions de structure, d’information, de style de leadership.
De nombreuses dissonances peuvent intervenir entre les cinq grandes facettes de la stratégie de
l’entreprise. Ces cinq facettes sont le fondement de l’avantage concurrentiel, la compétence
distinctive, la stratégie affichée par l’entreprise, l’action stratégique réelle et l’environnement.
Retenons surtout ici l’écart possible (fréquent) entre la stratégie officielle telle qu’elle est voulue
par l’équipe dirigeante et l’action stratégique effectivement pratiquée.
Il demeure que, pendant toute la démarche mise en œuvre par le stratège, celui-ci rencontre quatre
écueils :
• Vis-à-vis de son diagnostic : le stratège dispose d’une expérience, d’habitudes, de styles
cognitifs, qui peuvent aisément le pousser à oublier une variable majeure, à se perdre dans
un détail inutile.
• Vis-à-vis de l’entreprise : le milieu dans lequel le stratège agit est vivant ; il est fait
d’acteurs divers qui peuvent s’ingénier à perturber une vision a priori claire.
• Vis-à-vis de l’information : l’excès est aussi dangereux que la pénurie, tout mono-éclairage
(trop d’interne ou trop d’externe, trop de quantitatif ou trop de qualitatif) est porteur
d’erreurs.
• Vis-à-vis du temps et de l’argent : nous avons vu que la gestion de l’urgence réclame des
conduites spécifiques.
B. Le poids du passé
Exemple
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L’attachement des dirigeants à certaines activités est plus ou moins fort. Ainsi, une activité en
situation critique peut donner lieu, selon le cas, soit à une stratégie de redressement nécessitant de
lourds investissements, soit à un désir de moissonner à très court terme. Dans un autre cas, lorsque
la situation de l’activité est excellente, on peut assister à plusieurs sortes de réactions : proactives
qui cherchent à toujours aller de l’avant en creusant encore les écarts (cas d’Apple aujourd’hui), ou
seulement réactives qui attendent de découvrir l’intention des concurrents pour agir.
Apple constitue un cas emblématique d’une entreprise guidée par son histoire. Née
dans le concept de friendly user et se développant par innovation radicale régulière,
Apple se trouve dans un chemin de développement tracé par son histoire. C’est un
immense avantage qui peut devenir un redoutable inconvénient si un modèle donne des
signes de défaillance.
C. La maturité du secteur
Elle est bien évidemment prise en compte dans le diagnostic mais, ici encore, selon les cas, les
entreprises réagiront différemment. Lorsque le secteur est en phase de lancement, certains vont se
précipiter pour « innover », d’autres attendront quelque peu pour « copier » ; d’autres encore
laisseront les standards techniques se stabiliser pour intervenir. Dans un secteur en déclin, une
entreprise peut vouloir privilégier la paix sociale du groupe et ne pas désinvestir, une autre peut
recentrer brutalement ses activités.
D. Et aujourd’hui ?
Naturellement, on s’interroge avec beaucoup de gravité pour savoir si la notion de stratégie s’est
modifiée avec les événements des dernières années : éclatement de la bulle Internet, retour à la
« nouvelle économie réelle », climat international conflictuel, crise des subprimes et crise
financière puis économique, crise des pays émergents, chute des prix du pétrole. Les réponses
proposées sont résolument positives : oui, quelque chose a changé. L’ancienne stratégie, qui
consistait à s’appuyer sur ses compétences fondamentales pour déterminer les marchés dans
lesquels l’entreprise pourrait se déployer encore mieux, a vécu. La stratégie est devenue simple,
organisationnelle et temporelle. Elle est simple car, pour dominer les changements brutaux, amples
et les situations incertaines, il suffit de se fixer quelques règles de base pour mettre en œuvre un ou
deux processus stratégiques. C’est le back to basics. Elle est organisationnelle car on met l’accent
plus sur l’application, la mise en œuvre, que sur le choix. L’important – à la limite – n’est pas
d’avoir une bonne stratégie mais d’avoir choisi la meilleure équipe pour la réaliser. L’organisation
est elle-même une stratégie. Elle est temporaire car plus rien n’est durable. On sait que l’on ignore
combien de temps un avantage concurrentiel résistera. La bonne stratégie à un moment donné sera la
combinaison des petites évolutions (qui interviennent fréquemment) concernant la technologie, la
marque, les marchés, la production, etc., de changements plus importants (ils seront moins
fréquents) et enfin de bouleversements radicaux qui sont beaucoup plus rares.
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Les pertes de repères font dire que la stratégie entre dans le cadre du théâtre d’improvisation. Plus
rien n’est jamais planifié à l’avance. L’entreprise se donne un thème général (cibler les marchés
émergents par exemple), dans un théâtre d’opération original (surtout pas le marché actuel), définit
des acteurs qui acceptent de ne pas être dans le rôle habituel, recherche un public (les clients mais
aussi les fournisseurs, les investisseurs, le personnel, etc.) et s’engage, sans savoir véritablement
où elle va, en élaborant des versions successives de l’histoire dont elle ne connaît pas a priori la
forme.
II. Les choix organisationnels
Une organisation interne d’entreprise résulte bien sûr de son histoire, de son activité, des hommes
qui la composent. Mais en pratique, le manager est confronté à cinq choix fondamentaux lorsqu’il
définit une structure ; ces choix seront successivement abordés (figure 7.1) :
• Comment spécialiser le travail ?
• Où situer l’autorité ?
• Jusqu’où faut-il décentraliser ?
• Comment coordonner ?
• Quel équilibre trouver entre différenciation et intégration organisationnelles ?
Figure 7.1. Structures : les cinq choix fondamentaux
A. La spécialisation du travail
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Il est nécessaire, dans une structure, de spécialiser les opérations dès que les tâches se répètent et
qu’une seule personne ne suffit pas pour y faire face. La spécialisation des tâches a une traduction
horizontale (spécialisation fonctionnelle) et une traduction verticale (nombre de niveaux
hiérarchiques).
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1. La spécialisation horizontale du travail
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La spécialisation des tâches se justifie par des considérations économiques. On considère
généralement que la spécialisation est synonyme de productivité. En effet, plusieurs avantages sont
associés à la spécialisation des tâches. Mais, attention, les spécialistes de l’organisation savent
qu’elle ne présente pas que des attraits.
2. La spécialisation verticale du travail et l’éventail de subordination
Sur un plan arithmétique, à effectif constant, le nombre de niveaux hiérarchiques d’une organisation
dépend de l’éventail de subordination de chaque chef, c’est-à-dire du nombre de collaborateurs que
chacun supervise.
La tendance actuelle des entreprises est à la réduction du nombre de niveaux hiérarchiques, pour
des raisons d’économies de coûts comme par souci de développer la réactivité de l’organisation.
Les niveaux intermédiaires (le middle management) jouent cependant un rôle essentiel dans la
communication des orientations stratégiques.
Exemple
La Société Générale élague son organisation pour gagner en efficacité en passant de
cinq métiers à trois. La banque regroupe ainsi dans un seul pôle la banque de détail et
les services financiers à l’étranger et crée un nouveau pôle qui chapeaute la banque
d’investissement ainsi que la banque privée et la gestion d’actifs.
B. La répartition de l’autorité
L’autorité est le pouvoir de commander c’est-à-dire de contraindre, d’obliger, de diriger, bref de
donner des ordres. Elle trouve sa source dans le statut de celui ou celle qui l’exerce, mais
également dans les connaissances possédées ou encore dans une forme de charisme (autorité
personnelle).
Les diverses modalités de répartition de l’autorité se fondent sur des principes distincts qui
s’opposent mais qui parfois aussi se combinent. Quatre types sont identifiés.
1. L’autorité hiérarchique
C’est la première forme d’autorité à laquelle on peut penser : chaque subordonné ne dépend que
d’un seul chef, c’est l’application de la ligne hiérarchique. On assiste à un empilage de
responsabilités très cloisonnées.
Les avantages sont évidents ; la plus grande clarté règne dans l’organisation. Discipline et contrôle
sont facilités par la recherche en cascade des responsabilités. La coordination et la communication
sont les points faibles d’une telle construction.
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2. L’autorité fonctionnelle
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Taylor fut le défenseur de l’autorité dans la spécialité, également appelée autorité fonctionnelle.
Pour être efficace, il convient d’être spécialisé ; c’est vrai de l’ouvrier à son poste de travail, mais
cela s’applique aussi à l’encadrement.
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Chacun ne dispose pas d’une autorité générale, mais d’une autorité dans sa spécialité. Plusieurs
générations après Taylor, ce principe d’autorité est toujours de grande actualité : la recherche d’une
flexibilité généralisée dans l’entreprise et d’une parfaite réactivité incite à donner le pouvoir à
l’acteur le plus compétent pour un problème déterminé, à un moment donné, sur un lieu précis. La
rapidité décisionnelle s’améliore, l’autorité s’exerce plus efficacement.
3. L’autorité hiérarchico-fonctionnelle
Les deux schémas précédents révélant des limites, il paraît judicieux de tenter de les combiner. Le
principe est celui de la double ligne d’autorité : staff and line. Une ligne dispose d’une autorité
générale, hiérarchique (line : pouvoir de commandement), une autre dispose d’autorité dans la
spécialité (staff : pouvoir d’expertise, de conseil). Unité de commandement et autorité dans la
spécialité ne sont pas antinomiques, si on donne à la seconde l’acception d’influence, d’ascendant.
On trouve alors dans l’entreprise deux catégories d’individus, qui constituent les deux lignes. La
ligne hiérarchique est celle des décideurs, elle est composée des opérationnels ; parmi ceux-ci
règne une unité de commandement très nette. La ligne de conseil est formée des fonctionnels qui
étudient, proposent, suggèrent, mais ne décident pas. Tel est le royaume des états-majors : conseil
en marketing, auditeurs, responsables de la prévision, de la planification, conseils en recherche
opérationnelle.
Parfois, en pratique, un responsable cumule une double casquette : hiérarchique, pour une partie de
son activité (son service) ; fonctionnelle, pour une autre. Les lignes, de cette façon, s’interpénètrent.
À force de réduire les hiérarchies, d’accumuler les tâches de cadres toujours moins nombreux, il
était logique d’assister à une telle abolition des frontières entre les deux lignes.
L’avantage du procédé est très net. Lorsqu’une organisation dépasse une certaine taille et un degré
de complexité donné, il n’est pas commode d’avoir deux lignes de responsabilités bien
individualisées. Certains cadres au sein de la ligne hiérarchique possèdent un bon niveau
d’expertise sur un sujet donné et, dans ce cas, ils disposent d’une autorité hiérarchique sur leurs
équipes et d’une autorité fonctionnelle sur tous ceux à qui ils donnent des conseils. Les
inconvénients résident dans tous les dangers de perversion du système, essentiellement dus aux
mauvaises relations entre les opérationnels et les fonctionnels. Des conflits latents menacent en
raison des objectifs divergents de chacune des deux catégories d’acteurs.
Exemple
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Dans la grande distribution, un propriétaire de magasin (autorité hiérarchique sur
toutes les personnes dans son magasin) est chef de file d’une catégorie de produits et a
une autorité de conseil sur tous les acheteurs des autres magasins pour le produit en
question. Les spécialistes sont établis, mais leur autorité se restreint à un pouvoir de
conseil, d’expertise.
Exemple
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Certaines entreprises choisissent de confier également aux spécialistes une complète autorité
fonctionnelle. Dans ce cas, le responsable fonctionnel possédera sur les services opérationnels une
autorité limitée à son domaine d’expertise.
Certains directeurs des ressources humaines possèdent une autorité fonctionnelle en
matière de licenciement, ce qui signifie qu’un directeur de production ne pourra pas
prendre une telle décision.
4. L’autorité éclatée
Les conditions d’exercice de l’autorité se transforment, car le niveau de formation des employés
devient plus élevé et l’aspiration à l’autonomie plus grande. En outre, les nouvelles technologies de
l’information et de la communication se perfectionnent, tandis que se renforcent les délocalisations
devenues planétaires. Il en résulte un profond besoin de modifier l’art de décider, d’animer, de
motiver tous les groupes d’acteurs composant une firme.
Les modèles anciens sont dépassés. Les organisations sont morcelées ; elles présentent divers
centres. Les structures de chacun d’entre eux sont plus plates, plus lisses, plus motivantes mais en
même temps plus exigeantes pour l’individu, plus stressantes et donc plus menaçantes.
C. La décentralisation
Nous avons constaté qu’existent, dans les entreprises différents niveaux hiérarchiques, car, pour des
raisons d’efficacité, une direction générale dont les capacités sont limitées ne peut pas conserver
tout le pouvoir. La complexité, la spécialisation des tâches imposent un premier partage de
l’autorité. À ces premières raisons s’ajoute un autre motif : l’attribution du pouvoir à des degrés
divers, c’est-à-dire la décentralisation qui stimule les initiatives des collaborateurs et développe
leur goût des responsabilités, bref qui constitue un puissant facteur de motivation.
On retrouve ici la logique de la différenciation entre les orientations stratégiques business (au sein
d’une division) et les orientations stratégiques corporate (l’entreprise, le groupe dans son
ensemble).
1. Les définitions et les caractéristiques
La décentralisation est une notion complexe. Elle doit être entendue comme la division du travail de
direction. Elle ne se confond pas avec la délégation (confier à un subordonné un objectif précis et
les moyens d’y parvenir).
Une entreprise est décentralisée si le pouvoir de décision de la direction générale est réparti.
Plusieurs formes de décentralisation peuvent être distinguées :
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• La décentralisation verticale. Elle est caractérisée par une dispersion du pouvoir formel
vers le bas de la ligne hiérarchique. C’est aussi la forme la plus banale.
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• La décentralisation horizontale. Le pouvoir de décision quitte la ligne hiérarchique et est
recueilli par les fonctionnels. Ainsi, la ligne hiérarchique ne dispose plus seule du pouvoir
de décision.
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• La décentralisation sélective. Certaines décisions (finance) sont prises par la direction,
d’autres (production) par la ligne hiérarchique.
• La décentralisation globale. Un niveau déterminé de la hiérarchie s’occupe de l’ensemble
des décisions, cette solution constituant d’ailleurs un cas limite.
Il appartient à la direction générale de déterminer quelle(s) est (sont) la (ou les) forme(s)
de décentralisation qui convient (conviennent) le mieux. Des contraintes existent. On assiste,
de manière générale, à une forte centralisation des fonctions de support.
Exemple
Si les analystes disposent de certains pouvoirs verticalement, l’entreprise est
centralisée car les experts ne sont en contact qu’avec la direction. Ce peut être le cas
des services partagés. Dans les entreprises disposant de plusieurs divisions ou de
plusieurs sites, une bonne méthode pour mettre en œuvre des économies d’échelle
dans les fonctions de support consiste à créer un centre de services partagés. Ce centre
dédié au contrôle de gestion, à l’informatique ou encore aux analyses juridiques
regroupe des experts de haut niveau qui prennent des décisions ou formulent des
propositions.
2. Les raisons et les conséquences
Un certain degré de décentralisation s’impose d’abord pour des raisons négatives : la centralisation
absolue porte en elle-même des limites évidentes et appelle la division du pouvoir. Mais la
décentralisation présente aussi des avantages non négligeables. D’abord, elle améliore la qualité
des décisions prises, en évitant de longs circuits de transmission d’informations. Ensuite, la
décentralisation constitue un puissant élément de motivation. Les individus estiment qu’ils peuvent
mieux dominer leur métier ; leurs responsabilités sont plus étendues. En pratique, le choix effectué
par les dirigeants consiste à comparer les atouts respectifs de la décentralisation et de la
centralisation (tableau 7.1).
Tableau 7.1. Décentralisation et centralisation : les avantages respectifs
Décentralisation
Centralisation
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1. Confère une perspective globale aux
décisions prises.
2. Facilite la cohérence des décisions prises
dans les services.
3. Permet de réagir vite sans consultation des
services.
4. Renforce l’uniformisation des politiques et
des pratiques de gestion.
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1. Améliore la qualité des décisions par leur
adaptation au contexte.
2. Permet une réactivité plus forte grâce à un
circuit d’information plus court.
3. Facilite l’adaptation à un marché, à une
situation locale.
4. Autorise des expériences locales et limite
ainsi les risques.
5. Développe la motivation des cadres et des
personnels.
6. Renforce l’identification des équipes au
service.
7. Accroît la stimulation interpersonnelle et
inter-service.
8. Limite les risques de perte d’un homme clé.
9. Développe l’aptitude au management global.
10. Libère la direction générale pour les
questions stratégiques.
• Constitue un facteur de différenciation
organisationnelle.
5. Évite la duplication des fonctions.
6. Autorise le recrutement de cadres spécialisés
de haut niveau.
7. Valorise les cadres détenteurs d’un pouvoir
centralisé.
8. Facilite la coordination entre les services.
9. Facilite le contrôle.
10. Réduit les risques liés à la confidentialité de
l’information.
• Constitue un facteur d’intégration
organisationnelle.
Il est essentiel de relever que la décentralisation ne se décrète pas sans préparation et sans un étude
des différents facteurs (tableau 7.2).
Tableau 7.2. Les facteurs de décentralisation et de centralisation
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Exemple
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Elle ne peut déployer tous ses effets que si elle est précédée puis accompagnée de diverses actions.
La première consiste à former le personnel. Plus les cadres et les employés sont qualifiés, plus la
décentralisation a des chances de réussir. Ensuite, il est impératif de mettre en place des procédures
très strictes de contrôle. La décentralisation ne va pas sans une vérification du respect des
méthodes et des résultats. L’inverse est d’ailleurs vrai : une forte centralisation implique moins de
contrôle.
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Danone, tant sous l’autorité du patron fondateur qu’actuellement, a toujours centralisé
le stratégique et décentralisé l’opérationnel.
D. La coordination
Plus une entreprise est importante, plus la spécialisation est forte ; plus l’autorité y est éclatée, plus
les problèmes de coordination se posent avec une acuité particulière. Les questions de coordination
sont particulièrement importantes. La mauvaise coordination entre services se traduit par des
dysfonctionnements coûteux. C’est probablement aujourd’hui la source majeure des
dysfonctionnements organisationnels.
1. Les mécanismes de la coordination
La coordination a pour objet d’ajuster les éléments de la structure, aussi bien horizontalement que
verticalement. Comme une force vitale, la coordination maintient ensemble les diverses parties et
les différents acteurs de la firme.
Selon Mintzberg, trois mécanismes caractérisent la coordination.
a. L’ajustement mutuel
Puisque la décision est généralement collective, puisque l’exécution suppose aussi l’intervention de
plusieurs personnes, il convient que les intéressés se consultent et fassent l’effort de s’adapter les
uns aux autres, par le moyen d’une communication généralement informelle. On échange des savoirfaire sous contrôle de la hiérarchie. Pratiquement, l’ajustement mutuel se traduit par des contacts
directs (téléphone, rencontre, courrier électronique, etc.). Il est efficace si les personnes concernées
ont la volonté de trouver une solution.
Lorsque la coordination par ajustement mutuel ne fonctionne pas, on a recours à la supervision
directe.
b. La supervision directe
Elle s’exerce dans le cadre de rapports hiérarchiques. Le supérieur donne des ordres, des
instructions aux subordonnés et il vérifie l’accomplissement du travail. C’est dans un tel cadre que
la fonction de contrôle s’exerce, qui, nous l’avons constaté, se développe lorsque la direction
générale partage son pouvoir avec ses collaborateurs (décentralisation). Si la hiérarchie est trop
fréquemment sollicitée, elle est débordée. Le besoin de standardisation apparaît.
c. La standardisation du travail
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Ce mécanisme intervient lorsqu’il s’agit de rationaliser l’organisation du travail. La standardisation
est le fait des services fonctionnels, de la technostructure, du siège. Quatre modes de
standardisation sont observables et jouent un rôle de coordination :
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• La standardisation des procédés vise à préciser et à programmer le contenu des tâches
(normes techniques). Exemple : le manuel de procédure dans un service production ou dans
un service administratif.
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• La standardisation des résultats a pour but de définir avec soin les caractéristiques d’un
produit (cahier des charges) ou le niveau des performances à atteindre (élaboration d’un
système d’objectifs). Exemple : la fixation du taux de rebut dans divers ateliers.
• La standardisation des qualifications consiste à énumérer les savoir-faire nécessaires pour
exécuter un travail (profil de poste). Exemple : la définition précise des profils de
formation requis.
• La standardisation des normes, des valeurs édictées pour l’ensemble de l’organisation,
chaque membre de l’organisation travaillant à partir d’un ensemble commun de données ou
de croyances.
Exemple
La création d’universités d’entreprise ou de chartes visent à la diffusion d’une culture,
de valeurs communes.
Au fur et à mesure de la croissance de l’entreprise, les différents modes se succèdent. Dans la
petite entreprise ou au sein d’un groupe de taille modeste, l’ajustement mutuel est efficace. Quand
les arbitrages sont nécessaires, quand l’allocation des ressources l’impose, la supervision directe
est mobilisée. La croissance des effectifs, la répétitivité des tâches et des problèmes à résoudre
conduisent à utiliser les différentes formes de la standardisation. Mais confrontés à des situations
exceptionnelles, les managers sont contraints de revenir à l’ajustement mutuel.
Figure 7.2. La succession des mécanismes de coordination
2. Les comités
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La coordination peut se faire soit de façon présentielle, soit de façon distante. La tendance actuelle,
qui s’appuie sur les outils collaboratifs et partagés, est à la coordination à distance. L’ajustement
mutuel se fait de façon complémentaire par courrier électronique et par téléphone dans les équipes
virtuelles ou éclatées. Les ordres des managers (la supervision directe) sont communiqués par
courriers électroniques ou à l’occasion de conférences téléphoniques, de visioconférences ou de
« webinaires » (conférences en ligne). Les modes de standardisation (procédures, résultats à
atteindre, formation des personnels, valeurs) sont de plus en plus fréquemment disponibles sur
l’intranet de l’entreprise. De même, la transmission des valeurs se fait dans les grandes entreprises
au travers de visioconférences mondiales, dont les morceaux choisis sont ensuite mis en ligne sur
l’intranet.
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Lorsque la complexité ou l’urgence d’un problème fait que celui-ci est difficilement soluble par une
des cellules de la structure habituelle, la question est confiée à un comité (un « groupe de travail »).
C’est bien évidemment le cas lors de la définition des orientations stratégiques. Dans les
entreprises, les comités sont souvent fort nombreux et variés. Certains ont des compositions très
précises avec président, rapporteur, secrétaire ; d’autres rassemblent simplement ceux qui sont
concernés par le problème étudié. Les uns sont permanents et se réunissent à période fixe pour
traiter la question qui leur a été attribuée : comité de direction, comité de sécurité, comité
de développement. Les autres sont temporaires et cessent lorsque leur objectif est atteint :
comité de lancement d’un produit, comité de préparation d’une inauguration, comité de résolution
d’un conflit. On peut encore opposer les comités selon leur rôle, qui va de la simple information à
la décision en passant par la consultation. Le fonctionnement et les difficultés diffèrent dans chaque
cas.
Le travail en groupe est un excellent facteur de coordination. Les informations circulent mieux et
plus rapidement ; les conséquences des décisions de l’un sont immédiatement connues de tous ; les
risques de conflits sont éliminés avant leur apparition. La pratique doit cependant en être prudente
et modérée. Le comité a facilement tendance à engendrer, chez les participants, un sentiment de
frustration dû à une sensation d’inefficacité. Au surplus, une véritable dynamique de groupe risque
de perturber le fonctionnement d’un comité. C’est pourquoi les réunions doivent être soigneusement
préparées, et leur composition définie avec rigueur pour éviter les écueils traditionnellement
constatés (tableau 7.4).
Tableau 7.3. Les comités
Avantages
Inconvénients
• Favorise la circulation de l’information.
• Constitue un excellent moyen de coordination
directe.
• Évite et permet de régler les conflits.
• Confère une vue plus large aux problèmes
étudiés.
• Permet une créativité plus grande.
• Consomme beaucoup de temps.
• Coûte en organisation et en fonctionnement.
• Risque de frustrer les non-participants.
• Risque de frustrer les participants si le comité
est inefficace.
• Privilégie les solutions conformistes plutôt
qu’innovatrices.
• Développe l’implication des participants,
• Risque de manipulation du groupe par un
l’acceptation et la mise en œuvre des décisions
leader non représentatif.
prises.
Tableau 7.4. Réunions : les critiques des managers et les solutions
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• Mal préparées,
ordre du jour flou.
• Débutent en retard,
trop longues,
ne finissent pas à l’heure.
• Évaluer le coût de chaque réunion, ne les organiser que lorsque les
autres moyens de coordination sont inefficaces.
• Calculer le coût de la réunion et l’imputer en comptabilité analytique
au service qui l’organise.
• Adresser avant la réunion un ordre du jour précisant ce qui doit être
préparé par chacun, prévoir des supports visuels de présentation.
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• Trop nombreuses,
souvent inutiles.
Recommandations
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Critiques
• Fixer sur la convocation un horaire précis de début et une durée
réaliste (1 heure à 1 heure 30).
• Désigner un rapporteur de la réunion chargé de diffuser par courrier
électronique le compte rendu de la réunion dans les 24 heures,
précisant ce que chacun doit faire ainsi que les échéances.
• Participants mal choisis. • N’inviter que les participants concernés.
• Pas de compte rendu,
pas de suivi.
3. Les agents coordinateurs
Au sein de la structure, des postes sont réservés à des responsables dont la tâche est d’assurer une
coordination entre les fonctions et les services. Sans autorité sur la ligne hiérarchique, ces cadres
fonctionnels conseillent, mettent en présence et ont souvent une responsabilité très précise,
contrairement aux fonctionnels purs.
Exemples
Le responsable de l’« industrialisation », dans une entreprise produisant en série des
téléphones, se voit confier la lourde tâche d’assurer la coordination entre le
laboratoire qui réalise des prototypes et la fabrication qui doit les transformer en
produits standard.
Le chef de produit dans une entreprise de cosmétiques a la responsabilité directe du
chiffre d’affaires réalisé et, dans cette perspective, assure la jonction entre les études
de marché, la publicité, la promotion, l’administration des ventes, les merchandisers.
Le directeur de projet, dans l’industrie automobile, qui dispose pleinement (ou
partiellement) de la responsabilité de la mise en place puis de l’animation de toutes
les instances de coordination mobilisées par le lancement d’un nouveau modèle.
4. Les systèmes d’information
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Les systèmes d’information, et particulièrement les ERP (Enterprise Resource Planning) ou
progiciels de gestion intégrés (PGI), dont sont dotées les grandes entreprises constituent un puissant
facteur de coordination et d’intégration.
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À partir d’une base de données unique, donc génératrice d’une puissante intégration
informationnelle, toutes les fonctions, et ceci dans les sites du monde entier, construisent leur suivi
de gestion grâce à des modules compatibles. Les éléments de choix des décisions, le contrôle, le
reporting s’inscrivent dans des cadres homogènes. Le langage s’unifie.
By
Les réseaux intranet, pour ce qui est de la communication, agissent dans le même sens. Une base de
données centrale permet à chacun de puiser, en temps réel, la bonne information auprès du bon
émetteur. Les codes s’harmonisent, les comportements se retrouvent, la culture se transmet. La
coordination se renforce. Les réseaux sociaux internes constituent une parfaite illustration de ces
possibilités.
E. L’équilibre différenciation-intégration organisationnelles
Spécialiser les tâches, diviser le travail, décentraliser les décisions, c’est introduire de la
différenciation (au sens organisationnel) et développer des forces centrifuges qui conduisent à
l’éclatement de l’entreprise et à la perte de son identité. Ces tendances qui remettent en cause
l’unité de l’entreprise doivent être compensées par des mécanismes d’intégration.
1. La différenciation
À partir du moment où l’on regroupe certaines activités, les personnes qui en ont la charge en
deviennent progressivement des spécialistes. Le fait de fractionner les activités au sein d’une
organisation induit nécessairement l’apparition de comportements et fonctionnements spécifiques à
l’unité. C’est ce que l’on appelle les effets de « différenciation organisationnelle ».
Figure 7.3. La différenciation organisationnelle
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a. Les causes de la différenciation organisationnelle
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Les objectifs
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Trois causes de la différenciation méritent d’être développées :
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Dans une organisation, chaque service doit atteindre des objectifs qui lui sont spécifiques et qui
orientent son activité. On comprend aisément qu’à chaque type d’objectif correspondent des
préoccupations, une organisation et des fonctionnements différents.
L’environnement
Chaque service est confronté à un environnement qui lui est propre et qui possède des
caractéristiques spécifiques. Ces caractéristiques peuvent s’exprimer de différentes façons, en
termes d’incertitude, de normalisation. Il apparaît naturel que du seul fait des acteurs auxquels le
service est confronté, des effets de différenciation voient le jour.
L’activité
Le comportement des individus et le fonctionnement des services sont influencés par la nature
même de l’activité du service. On ne traite pas de la même façon, d’une part, la conception d’une
campagne publicitaire et, d’autre part, la préparation des documents comptables annuels.
b. Les manifestations de la différenciation
La différenciation interservices apparaît concrètement sous diverses formes. Certaines sont
relatives au comportement des individus ; d’autres, à l’organisation des services :
La différenciation des comportements des individus
Les différences de comportements individuels se manifestent à des niveaux aussi variés que :
– le langage. Il est aisément vérifiable que les langages utilisés dans les différents services
varient ;
– les référentiels. Les références conceptuelles, c’est-à-dire les schémas cognitifs utilisés par
les responsables pour raisonner et pour résoudre leurs problèmes, varient d’un homme à
l’autre, d’un service à l’autre. Cela s’explique à la fois par les formations différentes
(formation d’ingénieur, de manager, de commercial, de contrôleur de gestion, etc.) et par la
nature des objectifs prioritaires que chaque responsable doit atteindre ;
– les horizons temporels. Selon les départements de l’entreprise, les hommes raisonnent à des
échéances différentes. L’horizon temporel précise l’échéance dominante à laquelle les
individus réfléchissent et selon laquelle ils décident ;
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– les valeurs. D’un service à l’autre, les valeurs auxquelles les personnels sont implicitement
ou explicitement attachés différent. Dans certains cas, le respect des règles, l’honnêteté, la
ponctualité, la maîtrise des délais apparaissent comme étant primordiaux, alors que dans
d’autres cas, seul le résultat est primé, quels que soient les moyens mis en œuvre ;
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– les tenues vestimentaires. Dans les entreprises qui ne pratiquent pas l’uniforme, on relève
des différences notables dans les tenues vestimentaires d’un service à l’autre.
La différenciation de l’organisation des services
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La différenciation de l’organisation interne propre à chaque service peut se manifester sous tous
les aspects du management. Les méthodes de travail, la formalisation des relations, les modalités de
répartition des responsabilités, le recours à des procédures, les méthodes de contrôle vont souvent
varier de façon notable d’un service à un autre.
La forme structurelle change au sein d’une même organisation.
Exemple
La standardisation est plus fréquente dans des services de sécurité, où les procédures
sont nombreuses, que dans la recherche ou la création publicitaire du fait de la nature
de l’activité.
La formalisation est très forte dans un service de contrôle ou d’audit, alors qu’elle est moindre
dans un service des ventes.
c. Les conséquences de la différenciation
La différenciation organisationnelle a un impact notable sur le fonctionnement quotidien de
l’organisation. Ces conséquences sont ambivalentes, car elles sont à la fois positives et négatives.
Sans différenciation organisationnelle, les services ne pourraient pas atteindre les objectifs qui leur
sont assignés. Ils seraient inadaptés à leur environnement et aux spécificités de leur activité. La
différenciation constitue donc une nécessité au service de l’adaptation de chaque entité de
l’organisation à ses contraintes propres.
Cependant, en développant des fonctionnements spécifiques à chaque service, en favorisant
les différences comportementales des individus, la différenciation provoque une balkanisation de
l’entreprise. Chaque service, en sécrétant ses propres langages, méthodes, organisations, valeurs,
etc., a tendance à se refermer sur lui-même et à s’éloigner des autres services. Il en résulte
inévitablement des difficultés de communication. La différenciation est donc une cause
d’incompréhensions et de conflits entre les services. Lorsque les objectifs, les langages, les
modèles conceptuels sont différents, voire antinomiques, très vite apparaissent des conflits entre les
personnes, et le besoin d’intégration se fait sentir.
2. L’intégration organisationnelle
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L’intégration est nécessaire pour maintenir unité et cohérence dans le fonctionnement
de l’entreprise. Elle permet de prendre en compte le caractère transversal des relations entre
services.
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Le terme d’intégration est plus large que celui de coordination. La coordination fait référence au
mécanisme formel permettant de rendre cohérentes et de synchroniser les actions des services.
L’intégration est plus large dans la mesure où elle prend en compte le comportement des individus
et leur volonté de coopérer afin de résoudre les conflits interservices tout en défendant les intérêts
globaux de l’entreprise.
Les mécanismes d’intégration sont nombreux et complémentaires.
On ne peut, pour terminer, que souligner le rôle essentiel que jouent aujourd’hui les TIC sur le plan
de l’intégration organisationnelle. Elles interviennent de façon transversale en rendant l’information
disponible, en la transmettant en temps réel, indépendamment des localisations géographiques.
Les choix organisationnels que nous avons présentés trouvent leur logique de fonctionnement
efficace dans la recherche d’une habile combinaison entre la différenciation et l’intégration.
Dès lors que plus d’une personne accomplit les tâches d’encadrement dans une entreprise, la
nécessité de division des tâches s’impose ; aussitôt, le corollaire, le besoin de coordination
apparaît. Trop diviser c’est sans doute responsabiliser et motiver, mais qu’en est-il alors de la
nécessaire unité ?
Trop coordonner, c’est évidemment assurer une bonne intégration, mais qu’en est-il de la
différenciation stimulante et source d’innovation créatrice ? La direction générale a pour rôle
essentiel d’assurer l’équilibre de la « balance organisationnelle » représentée dans la figure 7.4.
Nous sommes ici au cœur de la double logique organisationnelle, au centre du plus profond débat.
L’art du management consiste, entre autres prouesses, à définir le bon dosage entre, d’une part la
différenciation qui stimule, dynamise, ouvre les portes de la responsabilité, et d’autre part
l’intégration qui raffermit, recentre, montre la voie de l’unité.
Figure 7.4. La balance organisationnelle
III. Les configurations structurelles
A. Les composantes de l’organisation
L’organisation peut être schématisée par une ligne hiérarchique décomposée de haut en bas en trois
parties :
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– le sommet stratégique qui fait en sorte que l’organisation remplisse la mission de façon
efficace et qu’elle serve les besoins de ceux qui la contrôlent ou qui ont sur elle du
pouvoir ; c’est à ce niveau que se définissent les orientations stratégiques ;
– la ligne hiérarchique : de la direction générale à la maîtrise ;
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– le centre opérationnel chargé d’accomplir le travail de production.
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La ligne de conseil se compose de la technostructure qui aide l’organisation en standardisant les
procédures et des fonctions logistiques qui offrent des supports au centre opérationnel.
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Cette représentation graphique de base témoigne en fait de deux préoccupations de Mintzberg : les
modes d’ajustement et les modes de standardisation. Elle reprécise, une fois encore, la notion
d’organisation qui est la somme totale de la façon dont on divise le travail et dont on coordonne les
tâches qui résultent de cette division. Comme le précise par ailleurs Mintzberg, c’est le deuxième
aspect qui en fait pose problème.
Dans la pratique, chacune des cinq composantes de l’organisation essaye de tirer cette dernière
dans la direction qui est la plus favorable à ses intérêts :
– le sommet stratégique est, avant tout, guidé par des considérations d’ordre entrepreneurial ;
– la ligne hiérarchique promeut la construction d’une bureaucratie divisionnalisée ;
– le centre opérationnel défend des intérêts en termes de professionnalisation ;
– la logistique, composée des fonctionnels de soutien, préfère l’adhocratie où ce sont des
professionnels qui constituent la partie clé de l’organisation ;
– la technostructure, préoccupée essentiellement par l’efficacité et qui milite par conséquent
pour l’établissement d’une bureaucratie mécaniste, où la standardisation – mission de la
technostructure – constitue le mécanisme essentiel de coordination de l’organisation.
L’organisation apparaît ainsi comme soumise à des forces qui l’écartèlent. C’est ce constat qui fait
dire à Mintzberg que, dès lors, toute organisation présente des tendances à l’éclatement.
B. Les configurations de Mintzberg
Pour Mintzberg l’organisation des entreprises peut se résumer en six grands types de
configuration.
Figure 7.5. L’organisation selon Mintzberg
Elles se distinguent principalement par les mécanismes de coordination et correspondent à des
facteurs de contingence (âge et taille de l’entreprise, technologie, environnement) différents :
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• La configuration simple est naturellement adoptée par les petites entreprises où le patron est
à la fois le leader, le propriétaire et le manager. Ces structures se distinguent par leur
caractère informel (l’organigramme y est rare), le commandement direct, et souvent la nonorganisation. La centralisation va de pair avec la réactivité et la stratégie entrepreneuriale
est le fait du dirigeant.
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• La configuration mécaniste, également dénommée bureaucratie industrielle, se rencontre
dans les grandes entreprises industrielles (usines de production) et de services (restauration
rapide) où les tâches sont répétitives. Le travail y est rationalisé, les procédures très
nombreuses, la spécialisation des tâches forte (pouvant aller jusqu’au travail à la chaîne).
Les services appliquent aujourd’hui ce type d’organisation hérité de l’organisation
scientifique du travail.
• La configuration professionnelle ou bureaucratie professionnelle est présente dans les
hôpitaux, les universités ou encore les entreprises de service où l’activité repose sur le
professionnalisme des « producteurs » (les médecins, les professeurs, les expertscomptables, etc. Ils détiennent le pouvoir et impriment leur marque à toute l’organisation).
• La configuration divisionnelle se rencontre dans les grands groupes multi-activités
diversifiés. La décentralisation y est la règle et la coordination repose sur la standardisation
des résultats (la dernière ligne du compte de résultat, chaque division étant un centre de
profit). L’intégration y est assurée par les procédures et par un système de planification et
de contrôle (notamment budgétaire) omniprésent.
• La configuration adhocratique est une organisation adaptable selon les besoins et les
contraintes liées à la tâche à accomplir. Une telle structure convient bien à la conduite
d’activités uniques, non récurrentes, organisées par projet. Les activités complexes des
secteurs des industries spatiales, de l’aéronautique ou des cabinets de consultants sont
menées à bien dans ce type de structure.
• La configuration missionnaire se caractérise par l’omniprésence d’une idéologie commune
à l’ensemble de ses membres. Les valeurs partagées, la culture, l’adhésion à la mission
fondatrice, constituent le mécanisme de coordination majeur et le moteur interne du
fonctionnement de ces organisations.
Exemple
Les coopératives ouvrières de production, les associations, les kibboutz reposent sur
ces principes qui s’adaptent bien à de petites organisations. Quand ces institutions
grandissent, elles se subdivisent en unités autonomes. En dépit de leur taille, ces
organisations sont en fait très rigides du fait de la stabilité des croyances et de leur
appropriation par les membres.
C. Les facteurs de contingence des configurations
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Figure 7.6. Les facteurs influençant la structure organisationnelle
1. L’influence de la stratégie
Le lien entre stratégie et structure relève du bon sens. C’est tout l’objet de ce chapitre.
Une étude célèbre de Alfred Chandler de grandes firmes américaines distingue deux phases dans
l’histoire de chaque entreprise, ce qui permet de formaliser cette relation.
La première phase consiste, en vertu du principe taylorien de spécialisation, à diviser le travail
par fonctions (de production, commerciale, financière, etc.), une telle organisation – la forme en U
(forme unitaire) – convenant parfaitement tant que l’entreprise est spécialisée et se cantonne à
vendre des produits proches les uns des autres sur des marchés peu différents.
Cependant, une fois passé ce stade, lorsque la firme se développe, exploitant plusieurs gammes de
produits sur divers marchés, on constate que les dirigeants adoptent généralement une structure par
divisions : la forme en M (multidivisionnelle). Chaque division correspond soit à une activité (un
DAS), soit à une ligne de produits, soit à une région, soit encore à un même type de clientèle. Par
conséquent, chacune de ces nouvelles cellules doit assumer les fonctions de production, de vente et
de recherche qui correspondent à son domaine propre. La direction générale se consacre à la tâche
d’allocation des ressources financières entre les divisions et au rôle de coordinateur. À une
structure d’autorité très centralisée dans la première phase fonctionnelle a succédé un pouvoir de
gestion périphérique décentralisé dans les divisions ; seul le contrôle reste l’apanage du pouvoir
central dans la seconde phase (figure 7.7).
Figure 7.7. L’influence de la stratégie sur la structure
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2. L’influence de l’environnement
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L’influence de l’environnement a été mise en évidence empiriquement à partir d’une vingtaine
d’entreprises britanniques.
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Deux types de structures aux caractéristiques très différentes ont été identifiés par Burns et Stalker
(figure 7.8) :
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• une structure qualifiée de « mécanique » où la spécialisation des tâches est forte, les règles
formalisées de façon stricte, la hiérarchie longue et respectée, les décisions centralisées et
le contrôle autoritaire.
• une structure en tout point opposée, qualifiée d’« organique », où les définitions des
tâches sont peu précises, les échanges d’information fréquents, la hiérarchie limitée et
souple, les prises de décision décentralisées.
Figure 7.8. L’influence de l’environnement sur la structure
Il a été observé que les entreprises dotées d’une structure mécanique étaient plutôt confrontées à
des environnements stables, où l’innovation technologique et le rythme d’évolution des marchés
étaient faibles. En revanche, les entreprises possédant une structure organique devaient faire face à
des environnements beaucoup plus instables. Il est ainsi apparu que les entreprises adaptaient leur
organisation aux caractéristiques de leur environnement. On comprend ainsi pourquoi les
administrations ont une structure mécaniste et les start-up une structure organique.
3. L’influence de la taille
Il suffirait de revenir sur la description des quatre types de structure évoqués pour se rendre
compte que les entreprises, au cours de leur développement, connaissent des formes structurelles
plus ou moins adéquates. La petite entreprise commence avec une structure personnalisée. Le
groupe d’individus est alors suffisamment réduit pour que les liaisons nécessaires s’établissent
directement avec efficacité. Puis l’entreprise grandit, et le directeur ne peut plus assurer
l’intégralité du travail de coordination ; il embauche un responsable des ventes et un directeur de
fabrication ; une structure fonctionnelle centralisée naît alors. L’entreprise franchit un troisième
stade et voit ses activités se diversifier ; une certaine autonomie doit être laissée aux diverses
branches, c’est une structure divisionnelle. Enfin, l’entreprise met en place une structure matricielle
pour trouver à la fois la flexibilité, la spécialisation ou la gestion efficace des projets.
Cette analyse ne devrait pas être aussi tranchée ; on trouve presque toutes les formes de structure
dans des organisations de tailles les plus diverses mais une association logique taille-structure est
fréquemment constatée.
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Dans une perspective de diagnostic stratégique et organisationnel, à un moment donné de la vie
d’une entreprise, il convient donc que sa structure soit bien adaptée à sa taille.
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Schématiquement, trois cas peuvent être distingués (figure 7.9) :
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• L’organisation s’adapte correctement au développement de la taille de l’entreprise.
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• L’organisation a cessé de suivre l’évolution de la taille et l’on observe un écart de sousorganisation. C’est le cas des entreprises qui ont grandi sans modifier les moyens
organisationnels. Cet écart de sous-organisation peut être la cause de graves crises de
fonctionnement que l’on appelle les crises administratives de croissance.
• L’organisation est surdéveloppée par rapport à la taille de l’entreprise et un écart de surorganisation est présent. Il peut avoir deux origines :
– soit l’entreprise a anticipé un développement et a investi en organisation ;
– soit l’entreprise a réduit ses activités, par exemple dans le cadre d’une stratégie de
recentrage sur son métier d’origine, et l’organisation n’a pas été réduite en conséquence.
Figure 7.9. L’adaptation de l’organisation à la taille des entreprises
Exemple
Une entreprise comme Amazon, qui a grandi très rapidement, souffre, selon son
dirigeant J. Bezos, d’un écart de sous-organisation. L’entreprise est en effet passée, en
très peu de temps, du livre au CD, au DVD et enfin aux liseuses et au commerce de
fichiers électroniques pour devenir le premier e-commerçant du monde. Elle doit donc
adapter en continu son organisation à ces nouvelles dimensions.
4. L’impact des TIC sur l’organisation
Les TIC ont incontestablement un impact sur l’organisation des entreprises. Mais les effets ne sont
pas systématiques.
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Sur le niveau de prise des décisions, on observe que les TIC, dans le cadre du e-procurement,
permettent à la fois de centraliser des décisions de choix de fournisseurs ou de références, et de
décentraliser les commandes effectives dans chaque service. Dans le domaine commercial, la
centralisation des règles peut être accrue, mais la décision finale peut être prise par des
commerciaux nomades. En matière de e-formation, les salariés peuvent avoir une autonomie plus
large de décision sur leur programme de formation.
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Sur la standardisation de l’organisation, c’est-à-dire l’importance des règles et des procédures, il
est très clair que les TIC ont un effet normatif et constituent un puissant vecteur d’organisation et de
diffusion des procédures. C’est d’ailleurs pour cette raison que leur introduction et leur diffusion se
font parfois avec difficulté.
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Sur le plan de la flexibilité de l’entreprise, là encore l’effet peut être double :
– Les TIC permettent à l’entreprise d’adapter en temps réel sa production et sa logistique,
de gagner en réactivité.
Exemple
Le concept d’entreprise agile, cher à Microsoft, implique de posséder trois sortes de
talents qui se fertilisent les uns les autres : la maîtrise parfaite des TIC, des équipes
mobilisées sous tension permanente et des processus de décision performants.
Flexibilité, réactivité, capacité à agir vite et agilité sont les maîtres mots, l’entrepise
devant se transformer en continu pour s’adapter aux conditions de marché.
– Mais les TIC, par le développement des procédures qu’elles impliquent, constituent aussi un
facteur de stabilité et de rigidité. En outre, les choix faits par l’entreprise en matière de
système d’information sont financièrement lourds et structurants. Que se passe-t-il quand
l’entreprise change de stratégie et que ses systèmes d’information deviennent inadaptés ?
C’est toute la question de l’alignement managérial qui est posée.
L’alignement managérial (ou stratégique)
Il consiste à veiller à la plus parfaite cohérence entre les structures organisationnelles et
l’architecture des systèmes d’information utilisés. Plus généralement, l’alignement insiste sur la
cohérence entre les fonctions de support, les décisions et les moyens de mise en œuvre. Cela
revient, en quelque sorte, à souligner que le chemin est bien long entre l’analyse stratégique, les
décisions qui en découlent, la mise en œuvre des décisions et la performance qui doit,
logiquement, en découler.
5. L’influence de la culture
Ce terme de culture doit être entendu de façon large.
Exemple
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Au niveau national, la culture désigne un système de valeurs, des idéaux partagés par
les habitants.
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L’influence de la culture sur les structures varie grandement d’un pays à l’autre (tableau 7.5).
Contrôle
de l’incertitude
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Tableau 7.5. La relation cultures-structures
Distance hiérarchique
Forte
Faible
Bureaucratie impersonnelle
Bureaucratie hiérarchisée
Fort
(Allemagne, Europe
(France, pays latins)
centrale)
Famille (pays arabes,
Adhocratie (GrandeFaible
Afrique, Inde, Asie)
Bretagne, pays nordiques)
Selon Hofstede, quatre traits caractérisent les cultures diverses. Ils peuvent se combiner pour
composer une sorte de psychologie collective, à laquelle doivent s’adapter les organisations. Ce
sont les suivants :
• Le degré d’individualisme : dans chaque société, les individus entretiennent des relations
plus ou moins étroites. Plus un pays est riche, plus l’individualisme est marqué.
• La distance hiérarchique : chaque société s’accommode différemment des inégalités
individuelles ; les unes les acceptent, les autres s’efforcent de les ordonner.
• Le contrôle de l’incertitude : lorsque les personnes sont éduquées de façon à accepter
l’incertitude, le contrôle est faible ; il est fort lorsque la société crée des institutions
assurant la sécurité individuelle.
• La masculinité/féminité : une société « masculine » accentue la division sociale des sexes,
elle valorise la domination et la réussite individuelle. Une société « féminine » minimise
une telle division et accorde ses faveurs à la modestie, à l’entraide, à la qualité de la vie.
Existe-t-il un management européen ?
Il n’est pas tenable d’affirmer qu’il existe un modèle universel de management. Chacun sait que
selon les entreprises, leur histoire, leur volonté, la localisation, des différences notables sont
palpables pour ce qui est des grands principes du management : vision temporelle, répartition de
l’autorité, modalités de décision, perspectives, etc. Peut-on estimer que les entreprises d’origine
européenne se retrouvent autour de quelques idées qui les différencieraient de leurs consœurs
nord-américaines ou asiatiques ? Nombreux sont ceux qui répondent positivement à cette
interrogation en faisant valoir que le management européen présente les caractéristiques
suivantes :
– une préoccupation plus marquée pour la prise en compte de l’homme et la responsabilité
sociale de l’entreprise ;
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– une relation plus proche avec les autorités gouvernementales dans les États ;
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– une ouverture au monde accentuée.
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– un sens développé de l’interculturel et le respect de la diversité ;
A. L’organigramme
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IV. Les structures dans la pratique
C’est une représentation graphique, plus ou moins détaillée, de la structure de l’entreprise.
Sommaires dans certains cas, les tracés d’organigrammes ne se limitent pas, lorsqu’ils sont plus
complets, à la représentation des rapports entre les personnes ou entre les services, mais ils font
apparaître les noms des responsables avec leurs fonctions et la nature des liaisons.
Un organigramme n’existe pas dans toutes les entreprises. Et pourtant, c’est un excellent outil de
diagnostic qui révèle maintes anomalies et permet de rectifier des structures peu cohérentes.
Il demeure que l’organigramme retrace une structure formelle à un instant donné, il donne donc une
vision normative de l’entreprise : ce qu’elle devrait être et peut-être pas ce qu’elle est dans la
réalité. Derrière la structure formelle se profile une structure informelle.
Certaines liaisons prévues n’existent pas dans les faits, souvent pour incompatibilité de caractères.
Inversement, un contact non prévu peut s’avérer parfaitement réel en raison d’affinités liant deux
personnes.
Exemple
Un lien étroit non indiqué dans l’organigramme peut s’instaurer entre le directeur
général et un jeune cadre, s’ils sont tous deux issus de la même université ou école.
Or la vie effective de l’entreprise se trouve dans cette structure informelle. Le décalage entre
structure formelle et structure informelle ne présente aucun danger, s’il ne nuit pas à la bonne
marche de la firme. Dans le cas contraire, il revient à la direction de tenter de faire coïncider les
deux structures.
Sans doute trouvons-nous ici la seconde balance organisationnelle à laquelle les dirigeants doivent
porter une attention extrême. Le formalisme de la structure tend à engendrer une bonne fiabilité car
les procédures sont écrites, standardisées, respectées à la lettre. Le caractère informel d’une
structure tend, au contraire, à mettre de la souplesse dans l’organisation en permettant d’adapter au
cas par cas les décisions. Si la balance est trop fortement déséquilibrée dans un sens ou dans
l’autre, de graves dysfonctionnements peuvent survenir. Un compromis dynamique est à rechercher.
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Tableau 7.6. Les intérêts et les limites des organigrammes
Intérêts
Limites
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• Image partielle de l’organisation (les relations
• Traduction de la stratégie.
informelles n’y figurent pas).
• Clarification de la répartition des
• Image partiale de l’organisation (les relations
responsabilités.
verticales sont privilégiées).
• Formalisation des rattachements hiérarchiques. • Image traditionnelle de l’organisation (la
• Valorisation de la structure formelle.
transversalité, l’orientation client y figurent
• Moyen d’information interne des nouveaux
rarement).
arrivants
• Renforce la rigidité.
• Moyen d’information externe des partenaires. • Suscite les rivalités interpersonnelles
et interservices.
L’organigramme peut révéler sans fard des choix stratégiques. Le passage d’une structure métiers à
une organisation par zones géographiques traduit la volonté de se rapprocher des marchés. C’est
pourquoi de nombreuses entreprises conservent leurs organigrammes de manière très discrète.
B. Les structures types
1. La structure personnalisée ou entrepreneuriale
Cette structure est de loin la plus simple. La direction joue le rôle capital en instaurant des liens
avec l’ensemble du personnel.
Les procédures et les liaisons sont peu formalisées, la coordination n’est pas réellement nécessaire,
le champ d’intervention de chacun reste imprécis ; tous les problèmes sont réglés par le directeur et
les relations personnelles sont privilégiées. La mise en œuvre d’une stratégie n’est naturellement
pas absente dans ces entreprises. Cette structure s’observe dans les petites entreprises, les
magasins de détail, les cabinets-conseils, les start-up, etc.
L’avantage qu’elle représente est double : flexibilité et motivation. Rien n’étant formalisé, et la
coordination relevant d’une seule personne, l’entreprise s’adapte facilement à tous les changements
ou menaces. Le personnel est motivé par un climat de confiance et personnalisé. Les problèmes
rencontrés sont ceux que toute institution connaît lorsqu’elle est animée par un « hommeorchestre ». Celui-ci désire tout faire et, inévitablement, il commet des erreurs. Les
dysfonctionnements risquent de compenser le faible coût de cette structure.
Tableau 7.7. Un bilan de la structure personnalisée
Avantages
Inconvénients
• Flexibilité et réactivité de l’organisation.
• Motivation du personnel.
• Peu coûteuse.
• Dirigeant débordé.
• Manque de cadres compétents.
• Risque d’écart de sous-organisation.
2. La structure fonctionnelle centralisée ou la forme en U
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D’une manière générale, le terme de fonction désigne le rôle propre joué par un organe (un outil)
dans un ensemble dont les parties sont interdépendantes, comme dans un être vivant ou dans une
machine. En gestion, la fonction correspond à une activité homogène particulière (commerciale,
technique, financière, de personnel, etc.) contribuant à la vie totale de la firme. Les diverses
fonctions de l’entreprise sont utilisées comme critères de découpage structurel et la coordination
intervient au sommet.
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On rassemble au sein de divers services toutes les personnes investies d’une même fonction – les
commerciaux, par exemple –, ou bien ceux qui, dans le cadre de leur activité, possèdent et mettent
en œuvre les mêmes connaissances – les comptables, par exemple.
Les contacts directs cèdent le pas aux procédures et à la formalisation ; les notes de service
remplacent les ordres verbaux. Chacun occupe une position précise. Communication et décisions
suivent une ligne hiérarchique sans faille. Qui dit procédure formelle dit aussi contrôle afin de
vérifier le respect des procédures. Les conseils et les contrôleurs jouent un rôle essentiel : les
premiers édictent les normes, les seconds surveillent leur application correcte. Les conflits divers
entre les fonctions ne trouvent leurs solutions qu’au niveau de la direction générale. Cette structure
convient bien lorsqu’une firme s’en tient à des activités routinières et peu différenciées lorsqu’elle
met en œuvre une stratégie concentrée sur une seule activité (un seul DAS). D’où l’appellation de
structure en U (pour unitary) qui a été utilisée. Dans ce cas, l’entreprise bénéficie à plein de la
régulation rigoureuse du système, mais procédure, contrôle, rigidité font que les aspects humains
sont peu pris en compte.
Tableau 7.8. Un bilan de la structure fonctionnelle
Avantages
Inconvénients
• Centralisation trop accentuée.
• Ralentissement des décisions.
• Trop forte identification à la fonction et oubli
des intérêts de l’entreprise.
• Direction générale débordée par les litiges
et conflits interfonctions qui remontent.
• Spécialisation par fonction.
• Amélioration de la productivité.
• Adaptée aux entreprises monoactivité.
• Simplicité de fonctionnement.
3. La structure divisionnelle décentralisée ou la forme multidivisionnelle en M
On remédie aux défauts du modèle par fonctions en privilégiant la recherche de résultats. Ce critère
de « résultat » est large : il s’applique aussi bien à un produit spécifique, à un marché déterminé ou
à une clientèle particulière.
On regroupe sous un même ensemble nommé « divisions », les personnes responsables d’un
produit, d’un marché ou d’un type de clientèle, la direction générale (le siège) assurant la
coordination et la direction de l’ensemble.
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À l’intérieur de chaque division, on retrouve fréquemment une structure fonctionnelle centralisée.
L’essentiel de la coordination intervient dans le cadre des divisions ; celles-ci disposent d’une
marge de manœuvre étendue ; leurs objectifs, fixés par le siège, sont de nature globale (profit,
marge contributive, rentabilité des capitaux). La direction générale se contente, a posteriori, de
mesurer le degré de réalisation des objectifs et d’octroyer les moyens financiers (investissements)
en fonction d’une stratégie sectorielle d’ensemble : se renforcer sur tel domaine, abandonner une
branche morte, regrouper deux activités complémentaires. Chaque division est considérée comme
un centre de profit c’est-à-dire une entité, jugée sur son résultat, à laquelle des charges et des
produits sont affectés.
Cette forme structurelle s’explique parce que, à partir d’une certaine taille, les domaines
d’intervention de la direction générale se multiplient, la complexité s’accroît, il devient alors
impensable de maintenir une centralisation par fonctions. Une grande autonomie est accordée à des
divisions ; ceci explique le succès de cette structure dans les grandes entreprises. Chaque DAS ou
pôle d’activité correspond à une division.
Et pourtant, ce mode d’organisation apparaît fragile, toujours prêt à se transformer soit en une
structure centralisée, soit en une collection d’entreprises indépendantes.
Tableau 7.9. L’importance du siège dans les structures divisionnelles
Effectifs au siège réduits
(quelques dizaines)
Peu de services rattachés à la DG, uniquement
stratégie, contrôle, finance, etc.
Le centre définit les objectifs et contrôle les
résultats.
Le contrôle est essentiellement financier.
Autonomie de décision très large des unités
périphériques.
Risque d’éclatement et de balkanisation.
Effectifs importants
(plusieurs centaines)
Toutes les fonctions sont présentes au siège :
ressources humaines, production, marketing,
informatique, etc.
Le centre définit aussi de nombreuses
procédures dans tous les domaines.
Le contrôle porte aussi sur tout le management.
Intégration forte des divisions sur les différents
domaines fonctionnels.
Risque de fonctionnement interne très lourd.
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Le siège et la gouvernance centrale apportent aux diverses divisions à la fois des éléments positifs
(des ressources financières, une harmonisation, une mise en cohérence, des expertises spécifiques)
et – parfois – des désagréments (bureaucratie tâtillonne, reporting trop fréquent...).
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Tableau 7.10. Un bilan de la structure divisionnelle
Inconvénients
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Avantages
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• Responsabilisation des dirigeants en fonction
des résultats à atteindre.
• Multiplie les rôles et les compétences.
• Libère la direction générale des questions
• Structure coûteuse.
opérationnelles.
• Danger d’éclatement de l’organisation.
• Facilite la mise en œuvre des stratégies de
portefeuille (investissement/désinvestissement).
Il faut par ailleurs noter que cette structure par division facilite les opérations de désinvestissement.
La structure en holding
C’est une forme extrême de structure divisionnelle. La holding est une entreprise de type M dont
le siège est réduit à sa plus simple expression. La direction générale gère avant tout un
portefeuille d’actions détenues dans différentes firmes. Son rôle principal consiste à acheter et à
vendre des participations dans des filiales au gré d’opportunités diverses, les fluctuations
boursières par exemple. Cependant, cette direction générale s’abstient, dans la plupart des cas,
d’engagement managérial dans la vie des filiales dont elle détient un taux de possession variable.
Une telle entreprise, dont la souplesse constitue la première des qualités, est peu capable
d’imposer une ligne directrice aux filiales.
C. Les structures transversales
1. La forme matricielle
Sa vocation est de combiner les avantages de plusieurs types de spécialisation et de coordination.
Elle doit permettre, en principe, d’effacer les inconvénients des structures fonctionnelles et
divisionnelles pour n’en conserver que les points positifs. Le principe consiste à maintenir tous les
découpages et à les superposer.
Les membres de l’organisation sont repérés par des « coordonnées ». Une abscisse marque leur
appartenance à un département, à une fonction. Une ordonnée indique à quels projets, à quelles
tâches, à quels clients ils consacrent leur activité. Cette structure se rencontre, par exemple, dans
les agences de publicité (une équipe travaille sur un budget) ou dans certaines entreprises de biens
de consommation (les chefs de produits ont pour rôle, et responsabilité, de gérer un produit ou une
gamme et ils sollicitent les différents départements à cet effet). Cette organisation est donc adaptée
au changement. Elle est naturellement présente dans les firmes multinationales où des découpages
d’abord par fonctions, puis par métiers (divisions) et par zones géographiques sont fréquents. Un
manager se voit ainsi contraint de se rapporter à trois endroits différents de la structure.
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Figure 7.10. La structure matricielle
Si tout fonctionne bien, nous retrouvons ici le double bénéfice de départements spécialisés, donc
compétents, et de divisions capables d’assurer la coordination, donc laissant à la direction générale
tout le temps de se consacrer à sa véritable mission. Cependant, dans de nombreux cas, les poids
respectifs accordés aux différentes structures ne sont pas équivalents. Si les métiers ou les régions
gouvernent tout, la structure devient divisionnelle ; si les fonctions ont le pouvoir, la structure est
plutôt fonctionnelle. En outre, ce mode d’organisation trop mouvant engendre des conflits et oblige
les collaborateurs à vivre parfois dans l’ambiguïté, car ils ne savent pas toujours clairement de qui
ils dépendent.
Ces structures bidimensionnelles (voire tridimensionnelles ou quadridimensionnelles :
fonction/résultat/zone géographique/marque) sont de plus en plus fréquentes dans les grandes
entreprises confrontées à des marchés mondiaux.
Figure 7.11. Un exemple de structure matricielle : Thales
Tableau 7.11. Un bilan de la structure matricielle
Inconvénients
• Flexibilité structurelle.
• Combinaison de plusieurs structures.
• Adaptée aux grandes entreprises multi-activités
et multimarchés.
• Double ou triple dépendance des subordonnés.
• Intervention d’une même personne sur
plusieurs projets.
• Engendre le stress et les conflits.
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Avantages
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2. La gestion de projet
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Depuis toujours, les entreprises ont des projets, à savoir une représentation d’un état que l’on pense
atteindre, cette idée préalable entraînant, à un moment donné, la mise en œuvre de moyens propres
à réaliser la vision initiale. Il peut s’agir de projets :
– de lancement de produits ou services nouveaux ;
– d’amélioration de la qualité ;
– de réduction des coûts (Lean Management) ou des délais ;
– d’informatisation ou de numérisation des processus ;
– de réorganisation, etc.
Ces projets ont en commun d’impliquer différents services et de requérir une forte coordination
entre ceux-ci. La mise en œuvre des choix stratégiques en constitue un parfait exemple.
a. La nature de la gestion de projet
La mise en place d’une gestion et d’une équipe de projet s’effectue lorsque les conditions suivantes
sont réunies :
– la nouveauté de l’opération : celle-ci sort de l’ordinaire, elle ne peut pas être intégrée dans
les pratiques courantes ;
– une coopération de plusieurs départements ou de plusieurs intervenants extérieurs à
l’entreprise, les uns et les autres pouvant travailler de manière séquentielle ou simultanée ;
– la réduction des risques : l’envergure de l’opération gérée par projet entraîne des
incertitudes financières, commerciales, technologiques, etc. Le nouveau mode de
management doit être en mesure de repérer et d’atténuer les dangers connus par
l’organisation ;
– de stricts délais à respecter : lorsque les phases intermédiaires sont nombreuses entre un
début et une fin fermement fixés, seule une planification rigoureuse assurera le respect des
programmes et des budgets.
b. L’évolution des procédures de gestion de projet
Les spécialistes ont mis au point des méthodes et surtout de nouveaux processus de traitement des
opérations. La démarche préconisée peut être décrite selon les séquences suivantes (figure 7.12).
Cette méthode rigoureuse est assurément prudente. Elle suppose une longue préparation afin de ne
pas déstabiliser l’organisation. Cependant, elle ne parvient pas toujours aux résultats escomptés.
C’est ainsi qu’on estime que les coûts des grands projets ont été souvent dépassés de 40 % par
rapport aux budgets prévus.
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Les configurations structurelles évoluent, on réclame plus de flexibilité, plus de vitesse de réaction,
plus de variété. Les spécialistes du management mettent l’accent sur de nouvelles variables de
compétitivité :
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– sur le temps : pratique de la chronocompétition (time-based competition) qui procure un
avantage (des barrières à l’entrée) sur les « suiveurs » ;
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– sur la virtualité : parce qu’il devient impossible qu’une même entreprise puisse répondre à
la fragmentation de la demande et à l’éparpillement du produit, il devient nécessaire de
nouer des alliances éphémères (des entreprises virtuelles) dans une perspective de
chronocompétition, avec des partenaires qui apportent des ressources complémentaires, en
vue de réaliser un projet particulier ;
– sur l’exigence de qualité : remontée vers l’amont de la démarche de qualité totale, le
Quality Function Deployment (QFD).
Ces nouvelles conditions entraînent d’autres contraintes en matière de gestion de projet
(figure 7.12). Il s’agira essentiellement de mieux évaluer les risques, d’amenuiser les coûts et de
comprimer les délais. De plus, on introduit un degré supplémentaire dans la gestion de projet. On
ne raisonne plus par projet, mais par portefeuille de projets (gestion par projets). La planification
devient plus compliquée, car elle ne s’effectue plus en une fois, comme nous l’avons vu au début du
projet, à partir de la définition des objectifs, elle s’opère par cascades (verticales, à l’intérieur de
l’organisation) et par vagues (horizontales, dans le temps).
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Figure 7.12. Le processus de gestion de projet
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c. Les conséquences sur la structure
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Si un projet – et a fortiori plusieurs projets – mettant en jeu plusieurs départements, sinon plusieurs
firmes partenaires, est lancé, il est patent que l’organisation fonctionnelle traditionnelle n’est alors
plus adaptée. Une configuration matricielle – on emploie davantage l’expression : fonctionnement
ou management transversal – est généralement adoptée. Elle se superpose à l’organisation verticale
de la départementalisation classique par fonctions ou par métiers. Plusieurs figures sont
envisageables depuis les plus simples (structure avec coordination de projet) jusqu’aux plus
compliquées (structure avec direction de projet : figures 7.13 et 7.14).
Figure 7.13. La structure de coordination de projet
Figure 7.14. La structure de direction de projet
d. Les conséquences sur le leadership
On sait qu’une structure transversale occasionne de nombreux malentendus et / ou conflits entre les
acteurs du projet. Il est donc prudent de s’efforcer d’atténuer les risques de tension et plus
largement de mauvais fonctionnement.
Quelques recommandations peuvent être faites, par exemple :
– désigner, dès le début, un responsable (le « patron ») ;
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– ce responsable doit présenter des qualités de « généraliste », plus que de spécialiste ;
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– son pouvoir doit être délimité avec soin et fixé avec précision, particulièrement en ce qui
concerne ses rapports avec les responsables fonctionnels.
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Dans le cas où coexistent de multiples projets, il convient d’éviter les conflits entre les projets.
Pour cela, il est judicieux :
– de s’interroger sur le « poids » relatif des chefs de projets ;
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– de distinguer les projets vitaux, ceux dont dépend la survie immédiate de l’entreprise, des
projets intermédiaires qui visent à étendre la gamme de projets de la firme, et les projets
stratégiques capables d’assurer le développement à long terme. Les deux dernières
catégories ne doivent pas être sacrifiées à la nécessité de la première ;
– enfin, de mettre en place des structures de conciliation et d’arbitrage, par exemple en
instaurant la réunion de comités périodiques.
En définitive, un projet aboutit à une situation ambiguë. Il peut engendrer du stress et des conflits
entre les participants, mais il peut aussi les mobiliser et les rassembler autour d’un but commun,
autour d’occasions de se dépasser (émulation) et de relations plus intenses. Le chef de projet doit
présenter des qualités pour éviter les risques de mauvais fonctionnement et, au contraire, susciter
une ambiance favorable à la mobilisation de tous.
L’open innovation, le crowdsourcing sont utilisés selon un mode projet. La méthode consiste à
mobiliser via Internet des acteurs les plus divers du monde entier (experts, clients, fournisseurs,
tout particulier désireux d’apporter une contribution) afin de faire émerger les solutions du futur en
matière de produits, de services, de concepts.
V. Vers de nouvelles structures
A. Les structures agiles
Les modifications dans les firmes, conduisent à des interrogations : sommes-nous à la veille de
ruptures par rapport aux modèles bureaucratiques traditionnels ? Ou bien les transformations
organisationnelles actuelles ne sont-elles que la résultante d’une évolution qui ne présente pas le
caractère de nouveauté totale ? Certains doutent de la validité de la seconde hypothèse et penchent
pour la première, à savoir l’avènement d’un modèle « post-bureaucratique », ou « postmoderne ».
On parle déjà de firmes « agiles » (nouvelles) lorsqu’on évoque les structures venant remplacer
l’organisation multidivisionnelle. Ces nouvelles structures bouleversent les bases de la
bureaucratie qui est fondée sur trois principes : la hiérarchie des compétences en tant que mode de
régulation, la définition rationnelle des postes axée sur la spécialisation, la nécessité d’assurer une
coordination étroite. Or, de nos jours, les spécialistes mettent l’accent sur d’autres conditions :
l’adoption de structures plates, donc la réduction des niveaux hiérarchiques ; la dispersion dans
l’organisation des personnes aptes à prendre des décisions, la détention d’informations à des
niveaux présentant une meilleure garantie d’efficacité que la position hiérarchique dans
l’organigramme ; le développement de cellules entrepreneuriales dans une grande organisation afin
de reconstituer au sein de celle-ci une constellation de PME flexibles ; la valorisation du
management participatif, etc.
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La question se résume à une prise de position sur le caractère réellement novateur des structures
connues aujourd’hui. De nombreuses voix reconnaissent les changements réels (transformations
socio-techniques évidentes : amélioration de la qualité et de la diversité des produits offerts, gains
de productivité, préoccupation de flexibilité et modification des frontières de l’entreprise, accords,
alliances, externalisations nombreuses) mais penchent plutôt vers une hybridation des formules
anciennes que vers de véritables innovations, même si certains évoquent l’avènement de
l’organisation virtuelle.
Tableau 7.12. Les caractéristiques des nouvelles organisations
Mondialisation, globalisation, innovation, parties prenantes
Contexte
actives
Réactivité, intégration de structures mondiales différenciées
Exigences
et multiculturelles
Organigramme plat, décentralisation, frontières internes et
Caractéristiques
externes floues, transversalité de l’organisation, plasticité des
structures
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Technologie de l’information et Rôle central des systèmes d’information, organisation
numérique, extranet intégrant les partenaires amont et aval
de la communication
Travail par projet, à distance
Développement permanent des compétences
Organisation du travail
Intrapreneurship
Autocontrôle
Réseau
Modèle d’organisation
Externalisation des activités jugées non stratégiques
Stratégie
Partenariat, alliance
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B. L’organisation virtuelle
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C’est une organisation « en blanc ». Elle revient à faire disparaître l’architecture de la structure
formelle. Elle aboutit à une absence de barrières verticales et horizontales. Une telle
« organisation-fantôme » résulte d’une révolution voulue par les dirigeants, car même les liens
hiérarchiques traditionnels sont abolis. Le fonctionnement de telles organisations s’effectue par la
collaboration d’équipes multidisciplinaires, qui restent autonomes, prennent les décisions et
rendent compte de leurs résultats à une direction générale dont le rôle consiste à animer plus qu’à
diriger leurs entreprises.
Même si le besoin d’adaptation rapide à un environnement mondialisé tend à l’avènement de
l’organisation sans frontière, les spécialistes ne continuent pas moins de s’interroger sur les
principes qui président à la recherche d’un ordre sous-jacent, car les entreprises ne résisteraient
pas à l’anarchie totale. Des règles s’imposent toujours.
C. L’organisation en réseau
Devant la complexité entraînée par la globalisation, on a vu qu’une réponse consistait en la
recherche de partenaires. Dès lors, les organisations bureaucratiques traditionnelles, fonctionnelles,
divisionnelles ou matricielles ne conviennent guère à de pareilles stratégies.
En revanche, on voit apparaître des réseaux entre différentes unités ; entre le siège, les services
centraux, les filiales nationales, les filiales internationales et différents partenaires : clients,
fournisseurs, laboratoires privés, concurrents eux-mêmes. L’entreprise réseau gagne ainsi en
flexibilité ce qu’elle risque de perdre en homogénéité.
Le réseau est un mode d’organisation non hiérarchique et les relations sont caractérisées par leur
caractère coopératif. Pour fonctionner, le réseau doit reposer sur la confiance et l’existence de
valeurs et normes partagées et la complémentarité entre les ressources ainsi que sur les
compétences dont disposent ses membres.
Qu’est-ce qu’un réseau ?
Le réseau est formé d’éléments reliés les uns aux autres. En management, un réseau est constitué
par un ensemble d’organisations (entreprises, collectivités territoriales, villes, individus, etc.)
qui, tout en gardant leurs individualités et leurs caractéristiques propres, forment une supraorganisation à la poursuite d’un objectif commun.
Les interactions entre les éléments du réseau ignorent, en principe, la hiérarchie même lorsqu’il
existe un centre de l’organisation qui pilote l’accomplissement d’un projet profitable à chacun
des éléments. La souplesse exigée permet d’ajuster le nombre de participants aux exigences de la
gestion efficace du projet. Le réseau peut être constitué :
– à l’externe : de fournisseurs, de sous-traitants, d’anciens employés (outsourcing) ;
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– à l’interne : de salariés ou d’équipes provenant des différents services.
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Le réseau semble l’organisation la mieux appropriée à la gestion de projets, à la recherche de la
transversalité, même si les modes, fréquentes en management, ont exagéré ses aptitudes.
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La complémentarité entre les membres du réseau peut reposer sur leur spécialisation, chacun
développant ses compétences dans un champ concurrentiel particulier. Cette complémentarité peut
être verticale (différents stades de la filière) ou horizontale (géographique, métier). Dans d’autres
cas, les membres du réseau ne sont pas spécialisés et partagent leurs ressources (machines,
personnel dans le textile).
L’interdépendance entre leurs membres est un des facteurs de constitution et de pérennité des
réseaux. Ceux-ci nécessitent pour fonctionner des organisations collégiales, coopératives, non
hiérarchiques.
En pratique les réseaux se caractérisent par des structures allégées, une prise de décision
collégiale, des unités périphériques souples et en contact avec les clients. L’autonomie donnée aux
structures périphériques leur permet d’être innovantes.
Certains vont même plus avant : le principe du marché, à l’intérieur de la firme, remplacerait
le fondement bureaucratique. Plus précisément, on organiserait l’entreprise en un ensemble de
centres de profit, qui devraient se comporter comme autant de firmes autonomes. Chacun de ces
centre nouerait, avec ses partenaires, des relations de type commercial, la direction se chargeant
de définir les orientations stratégiques, de gérer l’infrastructure, c’est-à-dire le contrôle, la
communication et la promotion de l’esprit entrepreneurial.
Pour d’autres auteurs enfin, ni la bureaucratie, ni le marché interne ne constituent les meilleurs
principes de régulation de l’organisation, mais l’un et l’autre doivent être remplacés par les valeurs
et les normes, autrement dit par la culture.
Dans un clan, le principe d’autorité, propre à une bureaucratie traditionnelle, est réduit, puisque
l’adhésion de chacun est fondée sur un ensemble de valeurs partagées.
En définitive, on peut admettre qu’existent quatre solutions aux problèmes d’organisation :
– la solution bureaucratique, par l’emploi des règles et de procédures ;
– la solution par le marché : en faisant appel à des mécanismes d’échanges régulés par des
prix ;
– le réseau qui repose sur la confiance et la coopération ;
– le clan, qui suscite un attachement fort, quasi passionné, des uns aux autres.
Dans les entreprises modernes, ces quatre possibilités de régulation coexistent à des degrés divers.
Ceux-ci dépendent des caractéristiques de l’environnement, des technologies mises en œuvre, de
l’évolution des mentalités, etc.
Plusieurs structures sont nécessaires
D. Plus de démocratie ?
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Selon John Kotter(46), confrontées à la complexité de l’environnement, les entreprises se doivent
de mettre en place non pas une structure, mais deux. La première, hiérarchique, modernisée, avec
des projets et des task forces, est à même de gérer les sujets habituels. La seconde, en réseau,
fondée sur le volontariat et la désobéissance, se préoccupe des défis stratégiques.
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On peut considérer, de plus, que les tendances récentes favorisent la prise de décision par un plus
grand nombre d’agents – d’intrapreneurs –, puisque, si l’on considère les divers modes
d’organisation, on voit descendre l’intelligence stratégique tout au long de la ligne hiérarchique.
Si cette tendance se confirmait, on verrait la stratégie émerger de l’ensemble de l’organisation et ne
plus être édictée au sommet, la direction générale se bornant à susciter l’innovation et à
sélectionner les options les plus fructueuses. Mais ces prophéties sont trop souvent contredites par
la réalité. En effet, au cours des crises comme celles que nous vivons actuellement, la peur du
licenciement abolit ces principes ; le stress pénètre alors les membres de l’organisation, reléguant
dans l’oubli les illusions édéniques.
Figure 7.15. La démocratisation de l’intelligence stratégique
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Aujourd’hui, les organigrammes des entreprises présentent une nette tendance à se « vider »
(beaucoup de fonctions, naguère intégrées, sont sous-traitées) et à se tasser (le nombre de niveaux
hiérarchiques diminue). Il est fréquent de ne connaître dans les grands groupes que quatre niveaux
entre le responsable opérationnel et le P-DG. Pour réussir ce « management minceur » (Lean
Management) encore convient-il de former les acteurs qui, auparavant, disposaient du bouclier
représenté par une imposante chaîne hiérarchique et qui doivent, à présent, décider seuls. Leurs
responsabilités s’étendent en conséquence : c’est l’empowerment.
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Dans la pratique, les déclarations des entreprises reposent toujours sur les mêmes clichés :
réactivité, adaptation au terrain, meilleur service au client.
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E. Structure, stratégie et performance
En considérant la structure au sens large, nous pouvons à présent tenter de donner des réponses
précises aux questions portant sur les rapports entre l’organisation et la performance.
1. Les six composantes essentielles de la structure
Toute structure compte plusieurs composantes essentielles :
– la forme structurelle ;
– la standardisation ;
– la formalisation ;
– la décentralisation ;
– la planification ;
– le contrôle.
Or aucune de celles-ci ne peut être considérée comme le facteur décisif d’accroissement des
performances de l’entreprise. En d’autres termes, il serait vain d’espérer améliorer la performance
en agissant en priorité sur l’une des six composantes, fût-ce sur la décentralisation comme on l’a
longtemps préconisé. Il convient en revanche de savoir tenir compte de la taille de l’entreprise et
de son environnement pour ajuster la structure au contexte.
Voici confirmées les positions énoncées par les tenants de la théorie de la contingence, à savoir : la
structure ne constitue qu’un facteur parmi d’autres, influant sur les performances.
Toutefois, certains profils organisationnels sont associés à une plus grande efficacité. Ainsi, dans
les petites entreprises, des structures bureaucratiques (centralisées, formalisées, standardisées) se
révèlent souvent très favorables à la performance. En revanche, dans de plus grandes, la
standardisation et la décentralisation sont liées à l’efficacité supplémentaire recherchée.
La structure organisationnelle d’une entreprise n’est donc jamais figée. Les évolutions tant internes
qu’environnementales, ou encore les revirements de la volonté stratégique, trouvent leurs
traductions dans l’organigramme.
2. Les maîtres mots de l’analyse organisationnelle
Ce sont la réactivité et la transversalité.
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La réactivité est la caractéristique qui rend l’entreprise capable d’adapter en permanence
sa structure organisationnelle, ainsi que ses procédures de décision, aux modifications de
l’environnement. C’est parmi les entreprises dotées de cette capacité que se retrouvent les plus
performantes.
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Exemples
By
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Microsoft décidant de commercialiser sa suite Office par abonnement, Monéo
investissant le marché des tickets-restaurant à coups d’offres dématérialisées, Amazon
lançant sa propre liseuse Kindle, ou encore Auchan ouvrant ses drives à marche forcée
sont autant d’illustrations de la réactivité des entreprises actuelles.
Mais la réactivité ne se décrète pas ; elle se gagne pas à pas après une lutte sans merci contre les
freins naturels de toute organisation.
La transversalité signe « normalement » la fin de la vision fayolienne de l’entreprise. Instantanéité
et simultanéité prennent le pas sur la logique séquentielle des opérations. Pour bénéficier de gains
de synergie, pour accélérer le time to market entre l’idée de produit et sa commercialisation, pour
sortir victorieux de la lutte concurrentielle, l’entreprise pratique le reengineering (accent sur les
processus de management et non sur les fonctions) et choisit de recourir à la gestion de projet : une
équipe polyvalente est placée hors hiérarchie (mais avec du pouvoir) pendant un temps déterminé
afin de mener un projet à terme.
Un processus a pour caractéristique de mettre en cause plusieurs fonctions de l’entreprise.
Exemple
Le processus des ventes fait intervenir la fonction approvisionnement, la fonction
études de marché, la fonction commerciale, la fonction comptabilité (émission et
recouvrement de la facture).
L’accent placé sur la transversalité consiste à organiser l’entreprise de telle sorte que les fonctions
soient au service de la bonne gestion des processus.
Aujourd’hui, les structures sont chahutées par un autre phénomène : celui de la mise en réseau. À
force de constater que les entreprises d’une certaine taille allaient à leur perte parce qu’elles
étaient incapables de réagir vite, d’être suffisamment flexibles pour s’adapter à un avenir mouvant,
de diffuser correctement l’information en leur sein, on en est venu à concevoir l’entreprise comme
un réseau de cellules (intrapreneuriat). Entre les cellules, les échanges s’opèrent par contrat. Les
responsables des cellules deviennent de vrais pilotes qui doivent montrer des qualités d’animateurs
et de formateurs. Tout cela conduit à une grande délégation et à une hyperinformation.
Accessoirement, chaque cellule, devenue « autonome », peut être mise en compétition avec d’autres
rendant les mêmes services mais en dehors de l’entreprise. La pression est maximale !
VI. La mobilisation des équipes
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La mise en œuvre des orientations stratégiques réclame la plus parfaite adhésion de l’ensemble des
acteurs. L’information circule mieux, les circuits de prise de décision et l’autorité sont plus
flexibles, les structures et l’organisation connaissent une animation plus vigoureuse. Les modalités
de commandement entrent mieux en action.
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A. Les styles de direction et leurs déterminants
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Le style de direction définit la façon dont les managers exercent leur autorité sur leurs
collaborateurs.
By
La question se pose de savoir quels sont les éléments qui conditionneront le choix d’un style plutôt
que d’un autre. Or, tout bien considéré, on ne peut nier que le mode d’exercice du pouvoir,
despotique ou au contraire démocratique à des degrés divers, dépend à la fois de ceux qui
commandent et de ceux qui obéissent.
1. La distinction entre manager et leader(47)
Les deux termes recouvrent des réalités différentes. Le manager dispose d’un pouvoir légitime,
formel pour exercer une responsabilité. Son pouvoir d’influence est lié à son autorité formelle. Le
leader, en plus de cette position formelle, dispose du charisme, de l’enthousiasme, de l’énergie qui
permettent d’influencer et de mobiliser une équipe voire toute une entreprise. Steve Jobs, pour
Apple, fut non seulement un manager mais également un leader, voire un leader avant d’être un
manager. Les leaders ont plus à voir avec les artistes, les créatifs qu’avec les managers et ils
diffèrent par leurs motivations, leurs histoires personnelles, leurs psychologies, et la façon dont ils
pensent et agissent. Alors que les managers sont plus orientés vers la rationalité et le contrôle, les
leaders ont une culture entrepreneuriale, sont actifs plutôt que réactifs, préfèrent le risque au
compromis.
Les organisations ont bien évidemment besoin à la fois de managers et de leaders selon les tâches à
effectuer, leurs situations, mais aussi les périodes de leur histoire.
Tableau 7.13. Le manager et le leader
Le manager
Le leader
Administre
Demande comment et quand
Se focalise sur les systèmes
Fait les choses bien
Maintient
Compte sur le contrôle
Se situe à court terme
Accepte le statu quo
Fixe le résultat
Imite
Reproduit l’existant
Innove
Demande quoi et pourquoi
Se focalise sur les personnes
Fait les bonnes choses
Développe
Inspire la confiance
Se situe à long terme
Remet en question le statu quo
Regarde l’horizon
Crée
Développe l’originalité
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D’après W. G. Bennis
2. L’influence de la personnalité des dirigeants
By
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Il y a deux façons de traiter du commandement de l’entreprise. La première consiste à élucider la
notion en pointant l’attention sur les compétences générales en gestion nécessaires pour exercer le
pouvoir. La seconde, celle qui nous intéresse ici, concentre l’observation sur le titulaire du
commandement. Or, cette deuxième voie est beaucoup moins pratique que la première. Il existe bien
des monographies sur le comportement du chef, mais l’on craint toujours de succomber à la naïveté
ou à la platitude des recettes concernant la « meilleure » façon d’exercer le commandement.
Il faut avouer que les tentatives d’explications caractérologiques sont décevantes parce que peu
explicatives des phénomènes psychologiques qui justifieraient le choix d’un style de
commandement. On constate des faits, sans plus. On observe, par exemple, que lorsqu’un nouveau
directeur est nommé, les subordonnés se mettent généralement à l’unisson des traits de caractère du
nouveau venu. Au fond, le sujet est trop riche, et l’exercice même du pouvoir nous dérobe, de toute
sa masse, les vertus individuelles nécessaires au commandement.
3. L’influence de l’orientation des dirigeants
Blake et Mouton, partant de cette idée d’observation, ont proposé ce qu’ils ont appelé une grille
managériale (figure 7.16).
Cinq styles de direction sont définis en fonction de deux axes qui sont « l’importance accordée par
la direction aux tâches à exécuter » et « l’importance accordée par la direction aux personnes
travaillant dans l’entreprise ».
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Figure 7.16. La grille managériale
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Le style de direction (1, 1) est évidemment à éviter car source de conflits, mais il serait faux de
penser que le style de direction (9, 9) est le plus efficace dans toutes les circonstances,
contrairement à ce qu’indiquent Blake et Mouton ; le style (1, 9) convient bien dans une agence de
publicité, le style (9, 1) dans un service comptable. Le style de direction (5, 5) recherche une voie
moyenne. On ne peut pas, en effet, ignorer les attentes des collaborateurs.
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4. L’influence des motivations des subordonnés
Maslow a montré que le comportement d’une personne était commandé par le niveau de ses besoins
non encore satisfaits. Dans ce sens, la motivation qui pousse un individu à agir dans l’entreprise
doit être connue si l’on veut utiliser à son égard un style de direction adéquat. Maslow a proposé sa
célèbre pyramide des besoins (figure 7.17).
Nous pouvons en déduire, par exemple, que les membres d’un club sportif viennent y assouvir un
besoin d’estime alors que les ouvriers spécialisés d’une chaîne de montage en automobiles
recherchent un simple besoin de sécurité.
Figure 7.17. La pyramide des besoins et les réponses de l’organisation
Les conduites seront très différentes dans l’un et l’autre cas, et il en est de même pour le style de
direction recommandé : souple, informel, participatif dans le club sportif ; rigide, standardisé et
autoritaire dans la fabrique d’automobiles.
5. L’influence de la personnalité des subordonnés
Pour McGregor, les individus se rangent en deux classes, répondant à deux « théories »
représentatives de leur personnalité (tableau 7.14) :
– « théorie X » : ceux relevant de cette catégorie sont dépourvus d’ambition, refusent les
initiatives, n’aiment pas leur travail, ont des objectifs personnels différents de ceux de
l’entreprise, recherchent la sécurité dans un travail répétitif ;
– « théorie Y » : ces personnes acceptent les efforts, font preuve d’ambition et d’imagination,
sont dynamiques.
Il n’y a derrière ces deux « théories » aucun sous-entendu péjoratif, mais simplement un constat :
les actifs ne se ressemblent pas et, dans une entreprise, dans un service, dans un bureau, les deux
catégories se rencontrent.
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Tableau 7.14. Les postulats de McGregor
« Théorie X »
3. Style de direction
4. Aptitude au changement
5. Conception de l’homme
6. Implication dans le travail
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• Activité
• Réalisation de soi
• Rémunération
• Plaisir du travail en équipe
• Sens du défi
• Crainte des sanctions
• Responsable
• Relation père-enfants
• Autonome
• Directif
• Participatif
• Contrôlé
• Autocontrôlé
• Adhésion
• Résistance systématique
• Enthousiasme
• Prédéterminée par l’enfance • En évolution permanente
• Limitée à la réalisation de ce • Forte en raison d’une volonté
qui est demandée
de comprendre et de créer
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2. Motivation au travail
• Passivité
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1. Préférence naturelle
« Théorie Y »
On a déjà compris que les styles de direction efficaces sont différents dans chaque cas : autoritaire
et impersonnel pour les X ; souple, pour les Y. La difficulté se situe dans le fait que, par exemple,
dans un même service, les X cohabitent avec les Y, alors qu’on ne peut imaginer deux systèmes de
direction différents pour une même unité.
On connaît les caractéristiques de la génération Y(48) (les personnes nées dans les années 1980 et
1990). Leurs besoins et leurs attentes sont différents de ceux de leurs aînés. Nourris par les TIC,
soucieux de leur développement personnel et de l’atteinte d’un bon équilibre entre métier et loisirs,
ils adhèrent aux objectifs de l’entreprise mais de façon d’abord rationnelle (« je donne, tu donnes,
je reçois, tu reçois ») avant d’être affective. Les styles de direction s’adaptent par force à ces
exigences.
Que dire de la génération Z (les personnes nées à la fin des années 1990 ou au début des années
2000, les digital natives) ? Encore plus difficile à appréhender que son aînée, elle tente de marier
des contrastes. Elle est résolument individualiste et engagée, en quête de valeurs et consciente des
blocages de la société. Elle est également surinformée : c’est la génération des réseaux sociaux et
du Web 2.0. Son arrivée dans l’entreprise pose de nombreuses interrogations sur les moyens à
mettre en œuvre pour la mobiliser et mettre à profit les nouvelles compétences qu’elle a
développées.
6. L’influence des facteurs de satisfaction
En définitive, si autant d’éléments déterminent le choix d’un mode de commandement, la question
finale que l’on peut se poser, à ce stade, est de savoir s’il existe un style de direction idéal.
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Ainsi Herzberg, s’est rendu compte que la satisfaction n’était pas le contraire de l’insatisfaction.
Pour les cadres, il existe des facteurs dits de maintenance (salaire, bonnes conditions de travail),
qui, s’ils ne sont pas présents, entraînent une forte insatisfaction mais qui, s’ils sont assurés, ne
suscitent pas pour autant une satisfaction. Il faut que d’autres facteurs, les facteurs de motivation
(responsabilité étendue, possibilités d’avancement, travail attrayant), interviennent pour qu’alors la
satisfaction augmente. Ainsi, il ne sert à rien d’améliorer les conditions de travail pour motiver ;
toutefois, leur détérioration risquerait d’entraîner des départs de l’entreprise (figure 7.18).
By
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Figure 7.18. La théorie d’Herzberg
De sa théorie, Herzberg tire des implications pratiques très importantes et largement diffusées dans
les entreprises industrielles et de services. Il conclut que la motivation du personnel ne peut
résulter que d’une action réelle et profonde sur l’organisation des tâches. Il élimine d’emblée
l’élargissement des tâches qui consiste à regrouper des tâches sans intérêts (0 + 0 = 0 !) et propose
des principes d’actions, des conditions de réalisation d’une action d’enrichissement du travail et
indique les résultats que l’on peut en attendre.
B. Un style de direction idéal ?
La réponse se trouve déjà dans le point précédent. Le style de direction doit s’adapter aux
motivations des personnes, à leurs traits de caractère, à la nature des tâches à effectuer. Sur cet
ensemble se superposent les ambitions et la personnalité du dirigeant.
On peut d’ailleurs se demander si, à un moment donné, dans une entreprise, il existe un style de
direction tranché ou si, au contraire, à partir d’un principe général, se met en place toute une variété
de styles en fonction des domaines, des personnes et, pourquoi pas, des saisons ou des cycles
lunaires.
1. Le continuum des styles de direction
La figure 7.19 proposée par Tannenbaum et Schmidt, fait ressortir des cas plausibles depuis le
despotisme absolu du chef jusqu’à la liberté d’action totale accordée aux subordonnés. Il est
d’ailleurs difficile de porter un jugement de valeur sur chaque possibilité, dont l’efficacité dépend
elle-même de conditions diverses.
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Figure 7.19. Le continuum des styles de direction
Mais peut-on s’en tenir à une analyse aussi prudente ?
Non, admettent Tannenbaum et Schmidt qui reconnaissent aujourd’hui que leur modèle est ancien et
qu’il convient de le corriger.
Les éléments nouveaux à prendre en compte leur semblent :
– l’importance accordée à l’interdépendance entreprise-environnement ;
– le fait que les dirigeants voient leur pouvoir discuté et même parfois entamé par d’autres
groupes de participants à la vie de l’entreprise. Certaines théories contemporaines
s’efforcent, du reste, de rendre compte de ces données nouvelles.
2. Le choix d’un style de direction
En pratique, dans une entreprise, le choix d’un style de direction relève de trois séries d’influence
(figure 7.20) :
– le leader ;
– les subordonnés ;
– le contexte.
Figure 7.20. Le choix d’un style de direction
Reconnaissons que la question se posera toujours. Les difficultés rencontrées par la direction pour
motiver le personnel se retrouvent bien fréquemment, et les observateurs sont perpétuellement à la
recherche de méthodes plus efficaces.
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Le cabinet Bain estime quant à lui que le bon dirigeant est celui qui sait s’adapter aux
circonstances. La personnalité importe peu. Ce qui compte n’est pas d’avoir du « caractère » mais
d’être capable de recourir au mode de direction le plus efficace. Cinq types de dirigeants sont
présentés :
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– le leader-expert qui fait reposer sa direction sur son savoir-faire ;
– le leader-stratège qui donne les grandes orientations ;
By
– le leader-rénovateur, adepte du changement permanent ;
– le leader-coach, véritable meneur d’hommes ;
– le leader contrôleur, l’œil rivé sur les procédures et les performances.
Le coaching, un concept qui fait recette
Actuellement, le leader-coach bénéficie d’un engouement particulier. Certains y verront
l’influence des pratiques utilisées dans les sports d’équipe et très médiatisées. Le coaching
consiste à obtenir le meilleur d’une personne dans des circonstances déterminées. Certains en
ont même fait leur profession. Les grands (ou les moins grands) patrons recourent aujourd’hui,
comme les sportifs, à une aide extérieure qui leur sert de reflet, de stimulant, d’accompagnateur,
de regard bienveillant et motivant pour prendre confiance en eux-mêmes. Le coaché peut ensuite
communiquer la méthode à ses collaborateurs : écoute, compréhension, propositions pour que
chacun donne le meilleur de lui-même, au service de l’entreprise.
Un style de direction pouvant, idéalement, satisfaire à toutes les contraintes que nous venons
d’évoquer demeure donc à inventer. C’est bien pourquoi l’on cherche toujours, avec des réussites
diverses, l’oiseau rare.
C. La culture d’entreprise
En recherchant des facteurs susceptibles d’animer les équipes dans l’entreprise, on en vient
naturellement à s’interroger sur le rôle que peut jouer la culture.
Pour l’anthropologue, le terme de culture est devenu synonyme de civilisation, au sens de
l’ensemble des traits, des mœurs, des attitudes qui caractérisent un peuple et structurent sa
personnalité. Or on suppose que se constitue, dans l’entreprise, une véritable culture (Corporate
Culture) qui se révélera, au fil du temps, plus ou moins favorable à la volonté de changement et
d’adaptation. Les entreprises affichent leur culture et leurs valeurs.
En pratique, le terme de culture est utilisé sur différents plans.
Il convient de toujours préciser à quelle culture il est fait référence, sachant cependant que les
influences se combinent :
– la culture individuelle d’une personne est liée à ses origines, à sa religion, à son éducation,
etc. ;
– la culture d’un métier, d’un service, d’une fonction, d’une équipe, d’un groupe de personnes
se caractérise par une technicité ou une formation ;
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– la culture d’entreprise varie énormément selon les valeurs du groupe ou de la marque ;
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Exemple
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La culture de Airbnb est distincte de celle d’Accor.
– la culture varie énormément selon le secteur d’activité. On peut ainsi opposer le secteur de
la sidérurgie à celui des nouvelles technologies ;
– la culture d’un groupe de pays, d’un pays ou d’une région qui peut avoir sa propre identité.
1. Les composantes de la culture
Elles sont fort nombreuses (figure 7.21).
Figure 7.21. Les composantes de la culture
a. Les valeurs
Ce sont les idées et les croyances que les membres de l’entreprise ont en commun et qui guident
leurs comportements.
Exemple
Chez General Electric, on affirme que le progrès est le produit le plus important.
Exprimées ou non dites, ces valeurs n’en restent pas moins une cause essentielle de la réussite
d’une firme, parce qu’elles modèlent la stratégie, le style de direction ou les relations entre les
services et les hommes. Parfois, ces idées se transforment en normes qui forment un véritable credo
d’entreprise.
b. Les mythes
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Il s’agit des anecdotes, des histoires que l’on raconte à propos de la fondation de l’entreprise, ou
de ses succès, de tels mythes ayant pour fonction d’entretenir et de véhiculer des valeurs
essentielles et stimulantes.
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Exemple
c. Les symboles
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L’histoire du patron d’entreprise qui renonce à entrer au siège social sans son badge
révèle l’importance du respect des règles.
Ce sont les signes chargés d’un sens, liés de manière plus ou moins directe aux valeurs
fondamentales. Ainsi les vêtements arrivent-ils à exprimer des idées ou des attitudes qui prévalent
dans l’entreprise.
Exemple
Chez Apple aux États-Unis, le tee-shirt se porte avec ostentation, pour montrer que
l’on faisait fi des traditions sclérosantes.
d. Les rites
On désigne, par cette expression, des activités banales, mais systématiques qui ont pour effet :
– de développer le sentiment d’appartenance des hommes à l’entreprise ;
– de valoriser certains événements mettant en relief les idées les plus importantes ;
– de fixer en quelque sorte cette culture qui se constitue.
e. Les héros
La mythologie de l’entreprise connaît des personnages fabuleux, des demi-dieux, des
« champions ». Il peut s’agir des fondateurs mais aussi d’employés plus modestes qui se révèlent un
jour héros d’une situation donnée.
Au fond, de tels modèles, à l’intérieur aussi bien qu’à l’extérieur de l’entreprise, expriment un
besoin d’héroïsme et de valorisation d’actions souvent banales. Devenus normes et performances,
ils motivent le personnel car ils proposent une galerie d’actes exemplaires et de vies illustres.
f. Le réseau culturel
Différent des canaux d’information officiels, ce système, occulte, a pour fonction de renforcer les
valeurs et de trouver des soutiens. Les rumeurs chuchotées représentent, par exemple, un bon moyen
de faire circuler les informations constitutives de la culture. Mais il convient d’être attentif à tous
les biais possibles. La question se pose donc de savoir comment l’on peut se doter d’une culture
adéquate.
2. La culture se gère-t-elle ?
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Au fond, la question de la maîtrise de la culture de l’entreprise ressemble à celle de l’image
du produit. De même que tout individu effectue spontanément une représentation mentale, consciente
ou inconsciente d’un bien, de même s’amoncellent dans l’entreprise des idées, des valeurs, une
histoire, des représentations, des images, etc., qui constituent la culture. Or, dans les deux cas, le
travail du responsable consiste soit à composer une image convenable du produit, soit à modeler
une culture propice à l’adoption des orientations qu’il souhaite prendre.
By
Concernant la culture, certains proposent des méthodes d’intervention directe. C’est ainsi que
l’entreprise devrait tout d’abord trouver son héros qui transformerait le système de valeurs en
credo. Puis, notre « champion » élu, par la vertu de l’exemple, montrerait la voie à suivre.
Parallèlement, on chercherait à créer un réseau culturel destiné à faire circuler les mythes, tandis
que s’instaureraient les rites officiels. Enfin, d’autres demi-dieux seraient désignés pour amplifier
l’action.
On admet aisément l’intention d’une telle démarche, mais on imagine aussi combien rapidement on
risquerait de sombrer dans le ridicule, si l’on voulait forcer un phénomène mal connu en
caricaturant sa manifestation.
D. Le processus stratégique
L’entreprise est un organisme vivant et la mise en œuvre des orientations stratégiques, voire les
modalités de choix, s’opèrent au fil du temps et mobilisent de nombreux acteurs.
1. L’élaboration de la stratégie
Opérer des choix, arbitrer entre des options multiples relève d’un processus complexe que les
entreprises mettent patiemment en action. Il s’agit de surmonter des objectifs apparemment
contradictoires.
– agir rapidement mais sans précipitation ;
– atteindre les objectifs en respectant plusieurs contraintes ;
– s’appuyer sur les ressources internes tout étant éclairé par les tendances traversant
l’environnement ;
– respecter les volontés de la gouvernance sans négliger les préoccupations des autres acteurs.
Tout est envisageable, rien n’est interdit tant les entreprises et leurs contextes sont différents. Une
distinction classique oppose les méthodes relevant de la volonté quasi instantanée de celle résultant
d’une démarche pas à pas.
2. Le poids de la volonté
Dans un monde de liberté la volonté, la détermination guident les décideurs. Ouvrir un nouveau
marché en Amérique latine, construire une usine en Afrique du Nord, se séparer d’une activité
déclinante, acheter un fournisseur d’équipements indispensable à la fabrication constituent autant de
décisions qui résultent d’une analyse pertinente, d’un engagement résolu et donc entrant dans le
registre de la pure volonté.
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L’instantanéité entre le diagnostic et le choix n’est pas obligatoirement de mise, mais ce sont
prioritairement les outils du diagnostic stratégique et leur mise en cohérence avec les objectifs
affichés qui commandent le choix.
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3. Le jeu des contraintes
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Plus précisément l’orientation est prise d’abord en raison des considérations internes (la volonté du
dirigeant, les ressources et compétences disponibles) ou prioritairement en fonction des éléments
externes (arrivée d’un nouveau concurrent, fermeture d’un marché).
Au désir de liberté s’oppose l’existence de contraintes multiples engendrant, pour l’entreprise, la
nécessité de mener l’élaboration de sa stratégie avec une méthode pas à pas. La stratégie est
émergente, elle se construit, acquiert sa cohérence au fil du temps. Les décisions s’enchaînent,
parfois l’entreprise louvoie, tâtonne, mais la vision d’ensemble demeure.
Une contrainte se trouve dans l’histoire de l’entreprise. Même si, philosophiquement, seul le futur
importe, il demeure que l’avenir est en grande partie commandé par le passé et le présent. Les
orientations stratégiques d’avant limitent l’espace de choix d’aujourd’hui. L’Oréal est mondialisé
depuis des décennies ; rien ne peut contraindre l’entreprise à réorienter cette stratégie. HewlettPackard est né avec les ordinateurs, même si le marché est difficile, l’abandon de la branche
« métier historique » s’avère douloureux.
La structure interne, l’organisation constituent une seconde famille de contraintes. Il a été beaucoup
exprimé que la structure s’adaptait à la stratégie mais l’opinion inverse ne pas doit être négligée. La
puissance des divisions correspondant à divers unités de luxe de LVMH imposent – dans une
certaine mesure –, d’aller toujours de l’avant dans ces domaines. Les patrons des divisions ont
comme objectifs assignés de développer leurs ventes, leur périmètre et les profits dégagés.
L’investissement supplémentaire dans les orientations choisies dans le passé va de soi.
Une formule connue – la dépendance de sentier –, (path dependency) résume à merveille ces idées.
Une entreprise inscrit son existence dans une trajectoire, un sentier stratégique. Le chemin emprunté
dans le passé limite et donc oriente les choix de demain.
En conclusion, peut-on imaginer que l’entreprise selon ses souhaits peut délibérément opter pour
une nature de préoccupation ou une autre ? Rien n’est moins sûr. Le BCG(49) met l’accent sur la
nécessité d’adapter l’élaboration de la stratégie aux caractéristiques de l’environnement. Celles-ci
reposent sur deux axes : la capacité qu’ont les acteurs à influencer la structure du marché, d’une
part ; la nature plus ou moins prévisible du futur, de l’autre. Quatre formes d’environnement,
appelant des orientations différentes, sont distinguées.
Tableau 7.15. Les quatre formes d’environnement stratégique
4. La faisabilité de la stratégie
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L’impératif de ne mettre en œuvre que les orientations pédagogiques souhaitables et faisables
relève de l’évidence. Les orientations tant business que corporate sont, a priori, passées par le
filtre de la faisabilité. Toutefois, il est utile de rappeler les grands alignements absolument
nécessaires.
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a. Les objectifs
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L’identité de l’entreprise (missions, vocations, buts) est à cet égard sollicitée. À la première étape
de la mise en œuvre l’entreprise peut se rendre compte qu’un choix est incohérent ave son registre
identitaire. On conviendra qu’une telle situation aurait pu être largement anticipée, mais il n’est
jamais inutile de procéder ici à une remontée, parfois salutaire, à ce niveau.
b. La faisabilité financière
Mener une stratégie implique des ressources financières et appelle un retour sur investissement
prévisionnel. Négliger l’un comme l’autre serait coupable, d’autant plus que des changements de
gouvernance peuvent intervenir tout au long du processus et alors les contraintes du Return on
investment (ROI) minimum requis évoluent.
c. L’acceptabilité par les acteurs
En interne, il serait préférable d’évoquer la « réserve » plutôt que la « non-acceptabilité » car
les acteurs ne disposent pas de droit à critiquer les choix. L’accent est ici mis sur le poids, positif
ou négatif que peuvent porter les managers face à un choix stratégique à l’égard duquel ils sont
enthousiastes ou partagés. Pour ce qui est de l’externe, les annonces des choix stratégiques
appellent des réactions des marchés financiers, de la presse, des pouvoirs publics, voire des
clients, des fournisseurs, des partenaires. Là également des expressions favorables encouragent à
une mise en œuvre rapide et très marquée ; des retours critiques peuvent engendrer un retrait, un
délai et, pourquoi pas, un changement d’orientation.
d. Les ressources et les compétences requises
La mise en œuvre de la stratégie impose des ressources (brevets, technologie, terrains,
équipements) disponibles, de même que des compétences (savoir-faire, maîtrise des règles,
connaissances des langages). Sans cela, c’est l’aventure avec le risque de tellement peiner dans le
déploiement qu’elle se solde par un échec.
5. Les acteurs
Il serait aisé de dire que le choix de la stratégie et sa mise en œuvre appartiennent à toutes et à tous
dans l’entreprise. Cette affirmation est tout à la fois vraie et fausse. Elle est vraie car la stratégie se
définissant comme un changement, l’impact est généralisé. Mais elle est erronée car la plupart des
acteurs sont d’abord mobilisés par l’opérationnel.
a. Les dirigeants
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Le choix stratégique et l’impulsion pour la mise en œuvre leur appartient. Ce sont eux qui sont
responsables des performances devant la gouvernance et ils ont donc pour mission de mener
l’entreprise vers les espaces procurant les résultats les plus flatteurs. Ces dirigeants s’expriment
devant la presse et les marchés financiers. Souvent médiatiques, mais ce n’est pas une obligation,
ils tiennent le devant de la scène tant la personnalisation des organisations est manifeste.
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b. Les experts
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L’entreprise peut compter une cellule, un service, un département chargé de la stratégie du
développement. Leur tâche est de préparer le processus, de nourrir l’utilisation des outils, de
veiller au respect du timing, d’élaborer les outils de « socialisation » des choix stratégiques à tous
les niveaux.
c. Les conseils et consultants
Le recours aux cabinets spécialisés (BCG, McKinsey, A.T. Kearney), les pratiques de coaching des
dirigeants sont des pratiques courantes qui évitent l’isolement du décideur en lui apportant à la fois
un reflet de ses propres idées et une irrigation au moyen d’informations venant de l’extérieur.
d. Le middle management
Son rôle essentiel est de transmettre l’information dans les deux sens, en veillant à ne pas déformer
les messages tout en les adaptant aux divers auditoires.
Mini-cas 1 : la fiabilité, une affaire d’organisation
Cette étude de cas, basée sur l’exemple du pilotage dans le secteur aérien, décrit les procédures
et tâches à suivre pour la préparation d’un vol puis l’étude des interactions entre les membres de
l’équipage et entre les pilotes et l’environnement technologique, lors du pilotage de l’avion. Elle
est issue d’échanges avec un commandant de bord.
Un avion, c’est trois millions de pièces assemblées qui volent en même temps. Il existe un
programme analytique de maintenance (préventive et corrective) et de révision périodique et
planifiée en fonction des heures de vol, du nombre de cycles de pressurisation, de l’âge de
l’avion et du nombre d’atterrissages.
Des avions et des pilotes à suivre de près
Dans le cadre de la maintenance préventive, interviennent des changements programmés de
certaines pièces essentielles (vieillissement). Des contrôles sont effectués par les services
officiels de la Direction générale de l’aviation civile – DGAC (Veritas). Avant d’être mis en
ligne, l’avion doit satisfaire aux tests de la certification pour recevoir un certificat de
navigabilité (CDN), document qui autorise sa mise en ligne. Dans l’utilisation opérationnelle
journalière des avions, une visite courante est effectuée de façon périodique par les personnels
agréés. Cela consiste en des contrôles journaliers, bi-journaliers, hebdomadaires (CJ, C2J, CS).
Ceci définit tout un programme de vérification en opérations, écrit point par point, à l’instar des
guides d’action des pilotes que constituent les check lists.
Une formation solide
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L’opérateur humain, « pièce » importante de la « machinerie », doit être fiable au même titre que
toute pièce mécanique. Il devra donc être contrôlé régulièrement de manière préventive. Les
pilotes passent bi-annuellement, à ce titre, une visite médicale approfondie. Ce contrôle
important permet de valider annuellement la licence autorisant le pilote à exercer sa profession.
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Pour maîtriser des systèmes complexes, pour être prêt à affronter un environnement incertain,
potentiellement hostile, des formations conséquentes sont indispensables pour les pilotes.
Outre l’ensemble des brevets et licences fondamentales pour la profession, obtenues après
plusieurs années de formation générale (parties théoriques au sol, nombreuses heures de
simulateur puis vols selon des programmes définis très précisément), tout pilote doit obtenir une
qualification spécifique à chaque type d’avion (B737, B747, A320 A330, A380...). L’adaptation
pour un nouvel avion requiert alors une formation au sol (cours et simulateur) et en vol
(adaptation en ligne). La durée est variable selon le type d’avion, l’expérience professionnelle
du pilote ainsi que selon les caractéristiques des réseaux exploités et des aéroports desservis.
De même, le passage de la fonction d’officier pilote de ligne (appelé aussi copilote) à la
fonction de commandant de bord est associé à un ensemble de stages. Les stages d’information
sont des modules de visite des différents services pour comprendre et maîtriser leurs rôles. Les
formations sont liées au rôle du commandant de bord proprement dit par rapport à sa fonction de
leader, de décideur. C’est aussi l’occasion d’une révision globale des connaissances techniques
et humaines réalisée à l’occasion d’une qualification sur un nouvel avion. (Le plus souvent, un
pilote long courrier passe commandant de bord sur un avion moyen courrier).
Le maintien des compétences est associé à des conférences et des contrôles. Les conférences
portent sur la sécurité / sauvetage, les techniques avions, les mises à jour des doctrines
compagnie... Des contrôles en simulateur et en vol sont effectués trois fois par an par des
instructeurs agréés. Les qualités techniques et humaines des pilotes sont jugées à cette occasion
en situation réelle. Cette structure de contrôle est aussi une obligation réglementaire qui permet
de valider la licence du pilote, d’année en année.
Nous avons vu comment le pilote acquiert la maîtrise initiale d’un nouveau type d’avion. Nous
avons vu aussi que l’équipage technique (commandant de bord, officier pilote de ligne) suit des
séminaires de révision et de formation ainsi que des contrôles réguliers.
Une préparation qui tient la route
Elle consiste notamment pour l’équipage à prendre connaissance des informations concernant la
situation météorologique précise (au départ, pendant le trajet et à destination), l’état de l’avion
(particularités fonctionnelles), le chargement (fret dangereux, consigne de traitement, personnes
sur civière, présence de VIP) et, enfin, l’infrastructure (particularités aéroportuaires,
installations radio-électriques, moyens de secours...).
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Les atterrissages constituent un exemple de préparation préliminaire demandée au pilote. En
effet, certains aéroports conservent des particularités que le pilote doit connaître. Les aéroports
sont alors classés en trois niveaux. Le premier niveau implique pour le pilote la consultation de
la fiche de terrain (95 % des cas). Le second niveau nécessite la visualisation d’une cassette
vidéo attirant l’attention du pilote sur certaines spécificités. Par exemple, l’aéroport de Sofia
(Bulgarie) comporte un terrain très montagneux proche des pistes et nécessite un contrôle aérien
particulier (altitude calculée en mètre au lieu d’en pieds).
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Le troisième niveau correspond aux aéroports hors norme : c’est le cas de Hong Kong où l’axe
de procédure est différent de l’axe de la piste et oblige à un virage bas, au dessus du centreville. La procédure implique un vol de reconnaissance obligatoire (simulateur ou vol
accompagné sur place).
La route sera choisie en tenant compte de la sécurité, de l’économie (temps de vol,
consommation de carburant, taxes suivant l’espace aérien traversé) et, enfin, du confort du vol.
La quantité de carburant à définir sera au final déterminée par le commandant de bord, sachant
qu’il existe un nombre de contraintes réglementaires qui amène à une valeur minimale.
Les cockpits de verre ou glass cockpits
Ils incluent une nouvelle présentation des planches de bord avec des Electronic Flight
Information System (EFIS). La représentation de la trajectoire et des systèmes de l’avion est plus
synthétique et soulage le travail de représentation de l’environnement. Par exemple, la
représentation de la trajectoire apparaît plus homogène et centralisée au lieu d’un ensemble de
divers autres paramètres disséminés sur la planche de bord. Les informations synthétiques sont
alors intégrées sur un seul écran et prêtes à aider au diagnostic ; elles sont plus proches du
pilote, plus naturelles. L’interface entre le monde extérieur et le pilote est transparente. Par
exemple, un écran présentera un disjoncteur et un interrupteur avec un dessin symbolique du
système (circuit allumé en vert, circuit éteint en rouge).
Le cockpit apparaît comme un système de cognition collective (collecte, stockage, traitement et
récupération des connaissances, formé par le réseau des systèmes cognitifs individuels et des
artefacts).
Mais les glass cockpits peuvent aussi présenter certaines limites. L’écran est interactif, très
captivant. La modélisation complexe de l’environnement semble se suffire à elle-même ; peut
même surpasser la réalité. Pour le cabinet Dedale (1993), « On retrouve alors les dangers d’un
cockpit ‘‘égocentré’’ : chacun travaille dans son coin, sans s’occuper de ce que fait l’autre. Cette
attitude pourrait être favorisée par les glass cockpits s’il y a diminution des communications
extra-verbales. L’accès individuel et indépendant à toutes les fonctions du Flight Management
System (FMS : ordinateur embarqué constituant une aide précieuse au travail d’optimisation du
vol) pourrait entraîner un équipage avec deux pilotes travaillant séparément en parallèles (Two
parallel one man crew) ». Ce type de cockpit conduit facilement à une mauvaise synergie.
La préparation du poste d’un avion
Elle est développée point par point dans un manuel d’exploitation. Tout est prédéfini, découpé
phase par phase. Chaque action est prévue d’avance et doit se dérouler conformément à un
canevas rigoureux qui est associé à chaque type d’avion et défini pour chaque phase de vol.
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Ces canevas constituent des guides d’action dont la bonne réalisation est facilitée par la position
physique de chacun des instruments dans le poste de pilotage. En effet, la trajectoire de la main
du pilote qui réalise son guide d’action, décrit toujours un parcours auquel on peut attribuer une
représentation arbitraire qui a l’avantage d’être mnémonique, d’où son efficacité. Le cas
particulier de la mise en route initiale de tous les circuits de l’avion (appelé « prise en compte
de l’avion ») est généralement associé pour les avions en équipage à deux (commandant de bord,
officier pilote de ligne) à un chemin de parcours nommé de manière imagée « la grande boucle ».
By
De manière générale, cette structure de travail est précisée dans ce manuel pour l’intégralité de
la gestion du vol, pour tous les paramètres pouvant intervenir depuis les règles d’acquisition des
informations pour le vol du jour jusqu’à la clôture de ce même vol (visite de prévol, préparation
du poste, mise en route, après-mise en route, roulage, décollage, montée initiale, montée,
croisière, descente, approche, remise des gaz, atterrissage, après-atterrissage, arrivée au
parking, stationnement prolongé). Elle est étendue jusqu’aux méthodes d’utilisation des différents
systèmes de l’avion, dont la philosophie d’exploitation est précisée.
Redondance et sécurité
La redondance est utilisée pour réduire les effets négatifs de la complexité et des couplages
serrés. Cette notion est associée à la sécurité et à la fiabilité. Elle prend de nombreuses formes
comme la multiplication ou le chevauchement des décisions (overlap).
Cela peut être la duplication, la multiplication pour éviter la défaillance technique ou humaine
(le stockage de la connaissance, du traitement de l’information est dupliqué chez le commandant
de bord et le copilote). Le cockpit intègre des instruments en double, voire en triple : par
exemple trois altimètres, trois radios, trois circuits hydrauliques, des commandes en automatique
ou en manuel...). Pour cette raison également, aucun avion de ligne ne dispose d’un seul réacteur.
À quelques rares exceptions près, il est en effet interdit d’exploiter un aéronef monomoteur pour
le transport public de passager. Tout ceci est associé à la notion de fail safe qui n’admet pas
d’impasse dans le cadre de la conception d’outil exploité dans un domaine où la sécurité prime.
On peut aussi parler du contrôle mutuel des actions importantes en situation dite d’urgencesecours. Les check lists à effectuer sont réalisées en contrôle mutuel entre le commandant de
bord et le pilote (cross check). Ainsi, une erreur éventuelle peut être détectée et corrigée avant
même d’apparaître. Il est démontré que, si pour chacun, la probabilité de faire une erreur est de
1/10, en cas de contrôle réciproque les probabilités ne s’ajoutent pas mais se multiplient. Ainsi,
la probabilité n’est pas 2/10 mais 1/100.
Le cross check est aussi appliqué de manière systématique en condition normale pour toute
action ou autorisation importante. Donnons l’exemple de l’obligation réglementaire qui est faite
de répéter tous les points clés des clearances de vol dans le cadre de la communication entre le
contrôle aérien et les pilotes.
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Les redondances existent aussi puisque le commandant de bord et le copilote sont multifonction.
Le pilotage, les télécommunications, la mécanique peuvent aussi bien relever de l’un ou de
l’autre. La trajectoire (pilotage, navigation) est la fonction appartenant en priorité au pilote
désigné comme « pilote en fonction » pour l’étape en cours. Les télécommunications et la
mécanique sont traitées par le pilote dit non en fonction. (À noter que si des mécaniciens sont
présents comme dans le 747.100, 747.200, etc., la mécanique sera du ressort principal du
mécanicien navigant). En revanche, le commandement appartient uniquement au commandant de
bord dans tous les cas (hiérarchie organisationnelle).
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La situation idéale est représentée par le cockpit synergique. Ce type de cockpit ne s’établit pas
de façon spontanée. Il demande des efforts et il obéit à des règles qu’il faut faire respecter. Il est
d’abord nécessaire de créer une atmosphère favorisant les échanges et effaçant les barrières. Le
cockpit synergique se construit et s’entretient. Le leader (commandant de bord) crée des projets
d’action communs avec ses partenaires (officier pilote de ligne, mécanicien). Il accepte les
critiques et éventuellement de revoir ses choix. Avant de prendre sa décision, il recueille les
informations autour de lui. Il anticipe, laisse travailler et participer les autres. C’est un leader
très convivial qui s’efforce de détendre le groupe. Il a des jugements qui ne portent pas sur les
personnes mais sur les faits. Le leader d’un cockpit synergique doit savoir varier son style de
commandement en fonction du moment, de la situation et des acteurs. L’autorité moins marquée
en situation normale est plus forte en situation chargée et / ou anormale.
Stabilité des fonctions et évitement des routines dans les équipages
La gestion d’un cockpit cherche à éliminer les divergences par rapport aux normes et aux
standards de la compagnie aérienne et des instances internationales. Le personnel doit éviter
toutes déviations possibles : il n’y a pas de place pour l’invention, l’improvisation. Il faut
éliminer le subjectif humain. La place du commandant de bord est, par exemple, toujours à
gauche ; celle du copilote, à droite. Les uniformes codés rappellent visuellement qui est le
commandant de bord et qui est l’officier pilote.
Contrairement à ce que pense l’homme de la rue, les équipages, la plupart du temps, ne se
connaissent pas. Ceci renforce la sécurité puisque ce mécanisme évite les routines. Cela est
rendu possible eu égard au nombre élevé de personnels. Même si les personnels navigants
techniques (PNT) sont habilités par type d’avion, les équipages sont rarement constitués
plusieurs fois de suite à l’identique. Il existe aussi une volonté de s’éloigner de tout cockpit
particulier (mari-femme, père-fils...). En effet, une certaine intimité, complicité sur le plan privé
ou affectif, pourrait favoriser l’oubli de certaines règles simples (ainsi on ne vérifie pas ce que
l’autre fait, car on a une totale confiance). On retrouve alors un cockpit « laisser-faire ». La
synergie d’un tel cockpit n’est pas bonne. De la même façon, un cockpit particulier (binôme
instructeur-stagiaire encore peu confirmé) peut amener certaines déviations par rapport aux
procédures exigées. On sait aussi qu’en situation de stress intense, l’individu a tendance à
régresser vers des comportements primaires. Weick le rappelle dans le désastre de Tenerife où
le commandant de bord se permet à tord de ne pas prendre en compte les remarques du copilote.
Ce dernier reste alors passif en partie parce que le commandant de bord a été dans un passé
récent son instructeur. On retrouve alors un cockpit autocratique : le chef se situe hors du groupe,
il impose de l’extérieur les buts, les moyens et l’organisation. Il n’informe pas de la suite, il ne
fait pas partager son projet d’action. C’est uniquement à la fin qu’il fait des remarques, plutôt
globales et donc, peu pédagogiques. Son moyen d’action sur les autres, c’est l’ordre sans
prendre en compte l’avis des autres.
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On peut souligner qu’une façon efficace d’éviter une certaine routine consiste également en la
gestion de la “nouveauté” : en effet, elle permet de casser les habitudes. Par exemple, il serait
déraisonnable de demander à un pilote d’effectuer sa carrière sur un nombre réduit de type
d’avion, voire sur un seul. Les changements de type d’avion tous les trois à six ans, avec une
nouvelle qualification pour cet avion, contribuent ainsi fortement à obliger au respect des
procédures et au maintien des compétences.
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D’après V. Guilloux, « Exemple du pilotage dans le réseau aérien »,
in M. Kalika, J.-P. Helfer, J. Orsoni, Management. Cas et
applications, Vuibert, 3e édition, 2010.
Questions
1. À l’aide des éléments sur le pilotage aérien, comment définiriez-vous les organisations à
haute fiabilité ?
2. Pourquoi parler de « cognition située » dans une organisation telle qu’un cockpit ?
3. Comment définiriez-vous la mémoire organisationnelle ?
Mini-cas 2 : La relation stratégie-structure chez Danone
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Questions
1. Caractérisez la structure du groupe Danone.
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2. Quels sont les avantages et les inconvénients d’une telle structure ?
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3. L’organigramme vous renseigne-t-il sur la stratégie poursuivie par le groupe ? Identifiez
les axes stratégiques de Danone.
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4. D’une manière générale, quelle relation pouvez-vous établir entre la stratégie et la
structure d’une entreprise ?
Chapitre 8
Le changement stratégique
Les compétences clés à acquérir :
• Identifier les sources du changement dans l’entreprise.
• Connaître les étapes du changement pour mettre en œuvre la stratégie.
• Qualifier le changement stratégique que l’entreprise doit mettre en place.
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• Analyser le contexte du changement stratégique.
• Décrire les forces en présence et les actions susceptibles de faciliter le changement.
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• Mesurer l’importance et les incertitudes des changements dans l’entreprise.
• Comprendre toutes les difficultés qu’il faut surmonter pour réussir un changement organisationnel.
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• Repérer la phase de développement dans laquelle une entreprise se situe.
• Mettre en place une action de changement.
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• Définir la notion d’entreprise apprenante.
Les choix stratégiques et organisationnels ne sont rien sans la maîtrise des processus de changement
et d’apprentissage. Nous commencerons par aborder la question du changement dans l’organisation
pour nous intéresser ensuite aux conditions de l’apprentissage organisationnel.
I. Le changement organisationnel
Peu de mots peuvent se targuer d’avoir fait une aussi belle carrière : le changement est devenu le
principal attribut de la modernité dans un monde qui n’a de cesse d’évoluer au gré d’une histoire
accélérée. Les organisations(50) n’échappent pas à cette force d’entraînement. Mais qu’est-ce que le
changement ? C’est l’acte par lequel cette organisation se modifie, ou est modifiée, dans quelquesuns de ses caractères. Le changement aboutit à une transformation, subie ou voulue par les
acteurs. De fait, il ne se passe pas un jour sans que des changements minimes interviennent.
Exemple
L’arrivée d’un nouveau vendeur plus dynamique, la perte d’un client qui annule une
commande ou encore l’annonce de la ruine d’une banque dans un pays émergent
peuvent être perçus comme des changements minimes ou notables selon le point de vue
des acteurs concernés.
D’autres changements présentent néanmoins une plus grande ampleur.
Exemple
Un changement d’équipe dirigeante par exemple chez Carrefour ou chez Accor,
l’adoption d’une nouvelle structure ou encore le rachat d’un concurrent sont toujours
perçus comme des changements importants.
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Pour comprendre le changement organisationnel, nous en abordons successivement les sources, les
étapes et le contexte. Puis nous présentons les typologies du changement, son acceptation
et les modalités de son pilotage. L’évolution de l’organisation, au travers de son cycle de vie, est
enfin retracée. Si les occasions de changements minimes foisonnent dans la vie de l’entreprise, les
transformations radicales restent cependant rares. Commençons par examiner pourquoi les firmes
ne changent pas autant qu’on pourrait le supposer.
A. Les sources du changement
Sur le plan stratégique, le changement peut avoir des causes externes et internes. Ces deux éléments
sont complémentaires et non exclusifs, les acteurs internes à l’entreprise pouvant reprendre à leur
compte les changements intervenus dans l’environnement.
Tableau 8.1. Les sources externes du changement
Facette de
l’environnement
source...
Écologique
Culturelle
Sociologique
Économique
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Juridique et réglementaire
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Technologique
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Démographique
La politique de libéralisation économique et d’ouverture aux
capitaux étrangers dans un pays émergent influent sur les
choix d’implantation internationaux des multinationales.
Les menaces terroristes créent de nouveaux marchés dans
les domaines de la sécurité dans lesquels certaines
entreprises investissent.
Le vieillissement de la population conduit Toyota à
développer une gamme de voitures pour les seniors.
L’obésité croissante suscite la création d’activités de remise
en forme.
L’émergence des technologies 4G de télécommunication
mobile conduit les opérateurs à développer des contenus.
La réglementation sur les 35 heures en France a conduit des
entreprises de main-d’œuvre à délocaliser leur production à
l’étranger.
Le réchauffement de la planète et l’épuisement des
ressources pétrolières suscitent des investissements dans les
énergies renouvelables.
Le développement de l’application des préceptes de la
Charia conduit une banque à créer une branche
« islamique ».
La recomposition des structures familiales (familles monoparentales et familles recomposées) pousse les constructeurs
immobiliers à reconfigurer leur offre d’appartements et de
maisons.
Le taux de croissance de la Chine et de l’Inde conduit de
nombreuses firmes à y investir.
By
Politique
... de changement de stratégie
(exemples)
1. Les sources externes du changement de stratégie sont liées aux mutations qui interviennent dans
l’environnement des entreprises. Chacune des multiples facettes de l’environnement(51) peut
provoquer un changement de stratégie. Ces changements intervenant dans l’environnement peuvent
susciter des réactions des concurrents plus agiles et réactifs, celles-ci provoquant à leur tour un
changement de stratégie de l’entreprise.
2. Les sources internes du changement de stratégie sont liées aux hommes, aux résultats de
l’entreprise et aux changements technologiques.
• Les hommes sont les acteurs des changements de stratégie. Ce sont eux qui perçoivent les
modifications issues de l’environnement et des actions des compétiteurs et qui suscitent les
changements au sein de l’entreprise.
Les dirigeants sont par nature les acteurs primordiaux du changement stratégique. C’est l’une de
leur principale mission que de veiller à la pertinence de la stratégie de l’entreprise. L’accélération
des rythmes des changements fait des managers des acteurs clés du changement de l’entreprise.
Leurs décisions peuvent être influencées :
– par des considérations liées à l’environnement ;
– par des convictions ou des intérêts qui leurs sont propres. Il convient là de souligner le rôle
des stratégies personnelles des dirigeants, les opérations de fusion ou de LBO témoignent en
effet de l’importance de cette dimension dans la compréhension des stratégies décidées par
les entreprises ;
– par des biais cognitifs. En effet, l’environnement et la situation de l’entreprise sont perçus au
travers de filtres cognitifs qui peuvent masquer, déformer, retarder la perception de
l’environnement. Mais les dirigeants ne sont pas les seuls acteurs du changement.
Les intrapreneurs, qui sont des membres de l’entreprise pouvant se faire les champions d’une
innovation ou d’un nouveau projet, constituent également des moteurs des changements stratégiques.
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• La situation de l’entreprise et notamment ses résultats financiers, ses parts de marché sont
un déclencheur important de changement stratégique. Lorsque les résultats de l’entreprise se
dégradent, les dirigeants sont conduits à s’interroger sur la stratégie et à défaut la pression
des actionnaires les y contraint. On observe d’ailleurs que la mauvaise situation de
l’entreprise peut conduire à un changement de dirigeants qui ont pour mission de changer la
stratégie et sa mise en œuvre.
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• Un changement technologique, une innovation scientifique majeure peuvent créer un
contexte propice à un changement de stratégie. L’innovation technologique de Michelin dans
le domaine des pneus pour poids lourds conduit l’entreprise à faire évoluer sa stratégie.
Figure 8.1. Les sources du changement de stratégie
B. Les étapes du changement
Dans les entreprises, on associe souvent le changement à sa seule partie visible, c’est-à-dire le jour
où le P-DG annonce le changement de stratégie. En fait, le changement stratégique comme tout
changement, est un processus.
Kurt Lewin propose de décrire le processus de changement en trois étapes :
• Le dégel correspond à la prise de conscience par les acteurs de l’entreprise (dirigeants,
actionnaires, managers, etc.) de la nécessité de changer. Le statu quo est ébranlé. C’est une
phase de maturation.
• Le mouvement traduit la mise en œuvre du changement au sein de l’entreprise et se
caractérise par une instabilité forte, intermédiaire entre deux phases de stabilité. Cette
phase constitue une rupture, un déracinement par rapport à la situation précédente.
• Le regel marque l’ancrage du changement au plan du fonctionnement quotidien de
l’entreprise, le retour à une nouvelle situation stable et à son enracinement.
La phase d’enracinement est la plus délicate car elle nécessite de transformer en routines les
nouveaux modes de fonctionnement de l’entreprise concernée. Or, si l’attention de la direction est
naturellement portée sur les deux premières phases, la dernière est bien souvent oubliée (en fait, on
ne sait pas bien comment faire !).
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Figure 8.2. Les trois phases du changement
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Dans le même temps, les routines restent essentielles : tout ne change pas. Les travaux de
Vandengeon-Desrumez sur le processus de changement distinguent les actions dans les trois phases
en fonction de la nature du changement, prescrit ou construit (figure 8.3). Le rôle des acteurs est en
effet variable selon les phases et selon que le changement est :
• prescrit, délibéré, de type haut → bas. Le leader joue un rôle central de visionnaire et son
charisme constitue un moteur de la mise en œuvre du changement stratégique ;
• construit, émergent et de type bas → haut. Le leader ne dispose pas d’une vision claire
et il mobilise des groupes d’acteurs, notamment la hiérarchie intermédiaire, qui vont
concevoir et mettre en place le changement. Dans cette perspective chère au sociologue
français N. Alter(52), l’innovation émerge de la réflexion des groupes et est ensuite reprise
par la direction qui l’institutionnalise.
Mais dans le contexte d’hypercompétition qui caractérise certains secteurs, dans un environnement
dont les dirigeants ne cessent de décrire l’instabilité et l’accélération du rythme des changements, il
faut considérer que le retour à une situation stable est illusoire. Pour nombre d’entreprises,
l’instabilité devient la règle et la stabilité l’exception ! Le changement ne fait que suivre le
changement...
Figure 8.3. Les types et phases de changement
C. Le contexte du changement stratégique
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Selon les entreprises, le contexte du changement stratégique diffère. Peut-on comparer le contexte
stratégique d’un Google aux États-Unis avec celui d’EDF en France, celui d’une PME dirigée par
son fondateur en Irlande et celui d’un groupe international implanté dans 30 pays, comptant des
dizaines de milliers de personnes ? À l’évidence non.
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Pour comprendre le contexte stratégique du changement il convient d’analyser à la fois les aspects
externes et internes du changement. Cette analyse doit prendre en compte les situations, c’est-à-dire
les faits (une nouvelle réglementation, une innovation technologique, une perte financière, etc.), le
rôle des différentes catégories d’acteurs concernés par le changement, les capacités
organisationnelles de changement.
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L’analyse de la situation de l’environnement conditionne l’urgence et l’importance du
changement :
– L’évolution démographique réduit-elle notre marché à l’horizon de cinq ans ?
– L’application d’une réglementation internationale impose-t-elle une évolution stratégique à
l’horizon de 10 ans ?
– Un boycott des produits par un pays étranger impose-t-il une réorientation immédiate de
notre stratégie commerciale ?
– Notre principal concurrent vient-il de rompre avec sa stratégie passée ?
L’analyse de la situation de l’entreprise conditionne aussi l’urgence et l’importance du
changement :
– Fait-on face à une lente érosion de nos parts de marché ?
– Le bénéfice par action a-t-il régressé de 15 % ?
– L’entreprise a-t-elle émis un « profit warning » ?
– Le résultat net est-il passé de bénéficiaire à déficitaire brutalement ?
L’analyse des acteurs externes nous renseigne sur la pression qu’ils font peser sur la direction de
l’entreprise pour qu’elle décide de changer de stratégie :
– Un fonds de pension déconseille-t-il l’achat des titres de l’entreprise ?
– Des actionnaires minoritaires manifestent-ils leur mécontentement ?
– Les pouvoirs publics font-ils pression sur l’entreprise ?
L’analyse des acteurs internes nous renseigne sur leur attitude et indique la faisabilité
organisationnelle du changement :
– Un nouveau dirigeant vient-il d’être nommé et peut-il profiter d’un « état de grâce » ?
– Les cadres soutiennent-ils les projets de changement ?
– Comment réagit le personnel ?
– Quelle est l’attitude des syndicats ?
L’analyse des capacités organisationnelles de changement porte sur la structure et la culture de
l’entreprise.
– La structure est-elle bureaucratique, caractérisée par des règles écrites immuables et un
avancement des personnels à l’ancienneté ?
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– Les cultures du pays, du secteur, de l’entreprise sont-elles marquées par l’inertie, la
vénération du passé, le respect de la tradition ou par la remise en cause, la mise en avant de
la compétition et des capacités d’adaptation ?
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L’ensemble de ces analyses permet de décider de l’urgence du changement, de son ampleur, mais
aussi de sa faisabilité. Sa mise en œuvre requiert une analyse des forces en présence.
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Tableau 8.2. L’analyse du contexte de changement stratégique
Analyse du contexte externe
Synthèse de l’appréciation
Quelle est l’urgence du changement ?
• Facettes de l’environnement politique,
Très faible
Très forte
démographique, technologique, juridique, etc.
Quelle est l’importance du changement ?
• Actions des concurrents
Très faible
Très forte
• Actionnaires :
– Noyau dur
– Fonds de pension
Quelle est la pression exercée par les acteurs
– Minoritaires
externes ?
• Parties prenantes :
Très faible
Très forte
– Pouvoirs publics
– ONG
• Médias
Analyse du contexte interne
Synthèse de l’appréciation
Quelle est l’urgence du changement ?
• Situation économique
Très faible
Très forte
• Situation financière
Quelle est l’importance du changement ?
Très faible
Très forte
• Acteurs internes :
– Dirigeants ?
Quelle est l’attitude des différentes catégories
– Cadres ?
d’acteurs ?
– Personnels ?
Très défavorable
Très favorable
– Syndicats ?
– Différents services ?
• Capacités organisationnelles de changement
– Structure :
Petite/grande?
Mécaniste/organique ?
Quelle est la faisabilité organisationnelle du
Hiérarchique/par projet ?
changement ?
Centralisée/décentralisée ?
Très faible
Très forte
– Culture :
Passéiste/moderne ?
Monolithique/diverse ?
Flexible/rigide ?
D. Les forces en présence
L’analyse du contexte permet de situer le décor dans lequel le changement se déroule. Il convient,
pour préciser l’analyse, de se poser les questions suivantes :
• Quels sont les acteurs en présence ?
• Sont-ils favorables ou défavorables au changement ?
• Quelle est l’importance de leur pouvoir ?
Les résultats de cette analyse peuvent être représentés dans la figure 8.4 qui permet d’identifier
quatre catégories d’acteurs. Ainsi, dans l’exemple d’un projet de construction d’une usine de
fabrication aux États-Unis, les catégories d’acteurs étaient les suivantes :
Les moteurs du changement sont favorables et ont un pouvoir pour le mener à bien ; dans notre
exemple, la direction, les cadres, et à un degré moindre, la maîtrise.
Les freins au changement sont défavorables, ont un pouvoir d’opposition ; dans notre exemple le
syndicat Y, et à un degré moindre, le syndicat X.
Les soutiens au changement sont favorables au changement, mais n’ont pas un pouvoir d’action
très fort ; ici, les actionnaires et la presse économique.
Les ralentisseurs du changement sont défavorables au changement sans disposer d’une latitude
d’action très importante ; ici, il s’agit d’une collectivité locale et d’une association.
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Au-delà de l’analyse statique de la situation des acteurs, il faut chercher à comprendre la logique
de chaque catégorie d’acteurs de façon à en tenir compte, afin de tenter d’infléchir, de faire évoluer
la position des « freins » et des « ralentisseurs ». Il convient pour ce faire d’analyser les
résistances au changement et les conditions de l’acceptation du changement.
By
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Figure 8.4. Les quatre catégories d’acteurs du changement stratégique
E. Une typologie des changements
Dans une entreprise, il est utile de distinguer les changements selon leur rythme et leur importance.
1. Le rythme du changement
Le changement peut être :
• Progressif. De nature incrémentale, il est mis en œuvre pas à pas, par étapes successives
ancrées dans l’existant et le fait changer en douceur. Ce changement est susceptible
d’emporter l’adhésion, le soutien des acteurs et en conséquence d’être moins traumatisant.
Exemple
La fusion entre le Crédit Agricole et le Crédit Lyonnais, deux grandes banques, semble
s’être déroulée de manière progressive.
• Rapide. Il est mis en place sans transition, brutalement, de façon radicale, du jour au
lendemain.
Exemple
Le groupe Axa, qui s’est beaucoup développé par croissance externe, est connu pour
mettre en œuvre sans délai l’intégration des entreprises absorbées.
2. L’importance du changement
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Le changement peut être :
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Exemple
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• Mineur. Il porte sur une partie seulement de la stratégie de l’entreprise, de ses systèmes et
processus. Dans ce cas, l’entreprise est globalement en phase avec ses environnements,
mais certains aspects méritent d’être mieux mis en cohérence.
L’Oréal a remplacé dans certains pays, notamment au Liban, ses agents de distribution
indépendants par des filiales intégrées.
• Majeur. Il remet alors en cause les fondamentaux de l’entreprise, sa stratégie, son
organisation.
Exemple
Pfizer, avec le déplacement vers les pays émergents, la fin de l’État-providence
support de la R & D, la perte de poids des blockbusters, etc., revoit l’ensemble de son
Business Model.
3. Les types de changements stratégiques
Le croisement du rythme et de l’importance permet d’identifier quatre cas de changements
stratégiques :
• La révolution stratégique combine un changement radical et une mutation de la stratégie
d’une entreprise mis en place sans délai. Canon a abandonné la fabrication des appareils
photos argentiques.
• L’évolution stratégique est un changement de grande importance qui rompt avec la stratégie
passée, mais qui est mis en œuvre progressivement. La stratégie de Renault en matière de
construction de véhicules à motorisation propre, prévue sur trois ans, s’inscrit clairement
dans cette perspective.
• La correction stratégique est un changement mineur mais qui est mis en œuvre très
rapidement. Le Club Méditerranée, qui décide de renouer avec un positionnement haut de
gamme au travers du slogan « Quand l’esprit Club Med rencontre le luxe », en constitue une
illustration.
• L’adaptation stratégique consiste à implémenter progressivement un changement stratégique
mineur. La stratégie des acteurs de la restauration rapide visant à diminuer les quantités de
matière grasse et de sucre dans les menus s’inscrit dans cette logique
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Figure 8.5. La matrice des changements stratégiques
Le choix entre changement progressif et rapide, d’une part, et changement mineur ou majeur d’autre
part, dépend de nombreux facteurs liés au contexte du changement.
Exemple
Parmi les facteurs contextuels, on peut notamment retenir la situation économique et
financière de l’entreprise, l’urgence perçue de la situation, le style de direction des
dirigeants, la culture de l’entreprise, les stratégies des acteurs.
Il faut ici noter que tous ces facteurs peuvent faire l’objet de perceptions différentes et
d’éventuelles manipulations.
Exemple
Pour faire apparaître un changement drastique et rapide comme nécessaire, une
direction peut être tentée de noircir la situation, « de charger la barque », notamment
en constituant largement des provisions pour risques, afin de faire apparaître une
situation financière très dégradée.
La comparaison du pilotage du changement par C. Ghosn, P-DG de Nissan et de Renault, permet de
comprendre l’importance du contexte. Le même homme, dans le même secteur, a choisi deux mises
en œuvre du changement compte tenu du contexte. L’arbitrage entre les quatre alternatives de
changement stratégique dépendra donc de l’analyse approfondie du contexte du changement.
Tableau 8.3. Le pilotage du changement par Carlos Ghosn
C. Ghosn P-DG de
Nissan
Contexte culturel
Changement
stratégique
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Situation
de l’entreprise
Celui qui a redressé Nissan avec
« Cost-killer »
efficacité, rapidement, sans
ménagement.
Résultats dégradés mais
Quasi-faillite
bénéficiaires, perte de part de
marché.
Entreprise japonaise, culture de
Ancienne entreprise nationale, poids
groupe, attachement fort du
des syndicats important, culture
personnel à l’entreprise Nissan,
française attachée aux avantages
capacité d’adhésion aux objectifs. acquis.
Évolution : stratégie de croissance
Révolution : plan de restructuration
permettant une meilleure utilisation
drastique de Nissan impliquant
de l’outil et la création de nouveaux
fermeture d’usines, licenciements,
modèles ; pas de fermetures de sites,
etc.
pas de décision brutale.
By
Style de direction
perçu à l’arrivée
C. Ghosn P-DG de
Renault
F. L’acceptation du changement
Pour comprendre l’acceptation du changement de stratégie, au sein d’une entreprise ou d’une
organisation, il faut à la fois analyser les freins au changement sur un plan général et, plus
spécifiquement, ce que l’on appelle les « résistances au changement ».
1. Les freins au changement
Les obstacles au changement de stratégie sont aussi nombreux que les occasions. Pour discerner les
premiers, classons-les en quelques catégories simples.
a. L’équilibre des forces et les oscillations continues
Observons une entreprise, Renault par exemple. Chaque jour, il se passe des événements à
l’intérieur (l’embauche d’un collaborateur, un spécialiste du marché chinois) et à l’extérieur (la
signature d’un contrat de coopération avec un sous-traitant : Valeo). Ces deux événements que l’on
peut classer arbitrairement en événements interne et externe entraînent eux aussi des modifications
dans d’autres firmes : chez Faurecia, d’où provient le cadre qui connaît la Chine et qu’il convient
de remplacer ; chez Valeo, qui va devoir mettre en place une nouvelle chaîne de montage en
partenariat avec un associé coréen. De proche en proche, un vaste environnement va être ébranlé
par deux événements qui, comme des boules de billard s’entrechoquant, conduisent à une
disposition nouvelle des billes sur la table. Mais cette disposition nouvelle, au fond, ressemble à la
précédente : le nombre de boules est identique et il est peu important qu’une boule rouge ait
remplacé une blanche. L’observateur distrait ne s’en apercevra même pas. En d’autres termes, la
multiplicité des mini-changements aboutit à ce que, globalement, leurs effets s’annulent, comme
les forces équivalentes des champions de bras de fer rendent immobiles les deux avant-bras,
pendant un certain temps tout au moins.
b. L’interdépendance des intérêts et les freins personnels
Exemple
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Dans l’entreprise, certaines forces poussent au changement stratégique, d’autres le freinent. Certes,
des oscillations minimes se produisent tous les jours – nous l’avons constaté – mais le camp des
progressistes qui s’oppose à celui des conservateurs ne l’emporte que rarement pour déclencher
une modification profonde. En effet, le changement brutal risquerait d’entraîner un bouleversement
des intérêts, des avantages, des rôles auxquels sont attachés les progressistes comme les
conservateurs. Or, les motifs individuels de résistance à tout changement sont nombreux.
La routine, le poids du vécu, la peur de la nouveauté ou encore la crainte de voir les
avantages acquis remis en cause peuvent rendre les individus réfractaires au
changement.
Toutes ces raisons renforcent l’impression selon laquelle une entreprise ne connaît que des
oscillations continues et quasi-quotidiennes autour d’un point d’équilibre qui lui-même ne change
que très rarement.
Figure 8.6. Les freins individuels au changement
c. Le poids de l’organisation initiale
Dans toutes les entreprises, les fondateurs ont constitué un système de rôles et de tâches lorsqu’ils
ont lancé leur affaire. C’est la spécialisation. Ils y ont, en outre, mis en place des procédures
d’intégration pour assurer l’unité de l’action. Ces choix ont modelé la vocation, la structure, la
répartition du pouvoir, la culture de la firme, sa stratégie. Bref, une configuration lourde s’est
constituée et tend à se maintenir parce qu’elle contient en elle toutes les motivations de l’action
initiale, toute l’intention du dirigeant fondateur. Bien entendu, cette configuration faite de routines se
transforme sur le plan structurel, sur celui de la répartition du pouvoir et de la culture, mais
lentement, difficilement, car l’impression du modèle de départ bride le changement stratégique.
d. Les biais cognitifs
La capacité de réaction stratégique des organisations est fréquemment freinée par une mauvaise
perception ou une interprétation erronée des signaux de l’environnement ou encore par des
décisions lentes ou mal mises en œuvre.
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Exemples
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Blackberry a manqué le virage stratégique des écrans tactiles. Microsoft est passé à
côté de l’émergence des réseaux sociaux.
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Figure 8.7. Les freins à la réactivité stratégique de l’organisation
En résumé, des forces de cohésion interne d’origines diverses (structurelles, culturelles,
relationnelles) aboutissent à ce fait : en dépit de l’opinion courante et de la volonté affichée de
leurs dirigeants, les entreprises changent moins de stratégie que l’on pourrait s’y attendre, bien
qu’elles y soient contraintes.
Il est possible d’aller au-delà de ce constat en observant que le changement, dans l’organisation, est
infiniment plus complexe qu’on ne le croit. La religion du nécessaire changement brutal et
permanent bute sur l’idée selon laquelle elle repose sur une seule sorte de changement : le
changement dramatique, révolutionnaire résultant de modifications soudaines du champ
concurrentiel. À ses côtés, existent le changement « organique », beaucoup plus lent, trouvant son
origine en interne et aboutissant à un simple rajeunissement de l’entreprise, et le changement
« systématique », dû à la volonté normale de toute entreprise de s’améliorer en continu, et
débouchant sur des réformes, importantes certes mais non révolutionnaires.
2. L’analyse des résistances au changement
Les sociologues français, notamment M. Crozier et E. Friedberg, ont montré que les phénomènes de
résistance au changement n’avaient rien de pathologique, qu’ils étaient normaux. En effet, on
considère souvent à tort le changement stratégique comme intrinsèquement bon (sinon pourquoi le
mettrait-on en œuvre ?) et tous ceux qui ne sont pas d’accord sont fréquemment perçus comme des
acteurs du passé qui ne comprennent rien aux véritables enjeux. C’est sans compter avec ce que
l’on appelle les stratégies des acteurs et les phénomènes d’inertie, que cette dernière soit
psychologique (individuelle) ou sociologique (de groupe). Le changement stratégique introduit par
définition une modification de la situation des acteurs et il est compréhensible que ceux-ci
s’interrogent, s’inquiètent de l’impact qu’il aura sur leur position personnelle. Comme nous l’avons
vu ci-avant, le changement peut en effet susciter plusieurs types de craintes.
Exemple
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La perte d’avantages acquis, la modification de routines, d’habitudes ou encore de
repères de régularité et de confort sont autant de sources d’angoisse.
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Le rôle du manager dans cette perspective consiste donc à identifier :
– les acteurs internes, mais aussi éventuellement externes, concernés par le changement ;
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– les conséquences négatives et positives, individuelles et collectives, du changement sur
chaque catégorie d’acteurs ;
– les possibilités d’action des acteurs concernés ;
– les actions managériales susceptibles de limiter les effets négatifs du changement.
Plusieurs types d’actions peuvent tenter de limiter les résistances au changement stratégique, étant
entendu que le travail de compréhension préalable est essentiel au « déminage » des situations. Ces
actions, qui peuvent être complémentaires, doivent être abordées dans une perspective contingente
et doivent être adaptées au contexte. Il est enfin essentiel de distinguer les actions en fonction de
leur temporalité par rapport au changement.
Tableau 8.4. Un exemple d’analyse des résistances au changement (cas du regroupement de
deux réseaux commerciaux)
Responsables
régionaux
Formation
Explication
du nouveau système
de commissionnement
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Commerciaux
Modification des
territoires
Aucune
commerciaux, mutations
Mauvaise volonté
Introduction de
dans l’utilisation
nouveaux outils de
des nouveaux outils
management de la force Motivation moindre
de vente et de contrôle Risque de dénigrement
de l’entreprise
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Acteurs
Actions
Actions
Conséquences
possibles des
possibles des
du changement
managers pour
acteurs
pour les
affaiblir ce qui
pour freiner
acteurs
freine
le changement
le changement
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En pratique, le choix des actions de conduite du changement stratégique dépendra de trois
catégories de facteurs :
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– l’urgence et l’ampleur du changement ;
– les caractéristiques organisationnelles de l’entreprise (structure bureaucratique / organique,
culture réactive / fossilisée) ;
– le style de direction (participatif ou autoritaire) dominant dans l’entreprise et le style
personnel du patron ;
– la balance entre le coût des actions et les risques de blocage, certaines actions (dialogues,
travaux de groupes, formation, etc.) pouvant être coûteuses dans l’absolu, mais moins
onéreuses qu’un blocage de l’organisation par une grève, par exemple.
G. Piloter le changement
Nous avons observé que de nombreux freins s’opposent à la volonté de changement stratégique
ressentie par les managers. Quand une entreprise comme La Poste change de stratégie en matière
bancaire ou en termes d’exploitation de son réseau de points de vente, un vrai pilotage du
changement est requis. Un grand nombre de paramètres, non contrôlables dans leur ensemble,
interfèrent et contrarient les projets.
Cependant, on doit tenter ici de rassembler les principales conditions qui favorisent l’acceptation et
la réalisation du changement (tableau 8.5). Ces facteurs ne garantissent pas la réussite, mais
constituent un climat favorable aux transformations souhaitées. Ensuite, par souci pédagogique,
nous évoquerons les écueils à éviter.
Tableau 8.5. Quelques pistes d’actions facilitant l’acceptation du changement
Temporalité Actions
Illustrations
Entretiens individuels et
attentifs d’acteurs clés.
Écoute
Réunions de groupes de
managers et du personnel sur
la situation stratégique de
l’entreprise : réflexions et
propositions.
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|
Travaux de
Avant
groupe
le changement :
dégel, maturation
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Mobilisation des réseaux
internes et externes à
l’entreprise pour assurer les
soutiens.
Prise en compte de
revendications de groupes
d’acteurs.
Alliance avec les parties
prenantes.
La définition d’un vrai projet
suffisamment ambitieux et
réaliste pour mobiliser les
acteurs et les conduire à
dépasser leurs intérêts
personnels.
Diffusion large et rapide de
messages expliquant les
raisons et les conséquences du
changement : diffusion de
courriels par la direction
générale, visioconférence
mondiale dans les grandes
entreprises.
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Réseaux
Négociation
Ambition
Au moment du
changement :
mouvement,
déracinement
Information
Intérêts / limites
Création d’un climat de
confiance.
Enrichissement de la
réflexion.
Risque de diffusion
d’informations
confidentielles.
Développe l’implication des
acteurs. Long, coûteux.
Risque de voir émerger des
solutions traditionnelles.
Aisé au niveau direction ou
dans les PMI, plus difficile
dans les grands groupes.
Très utile.
Développe la circulation des
rumeurs.
Limite les résistances de
groupe et les risques de
blocages.
Augmente le coût du
changement.
La mobilisation se crée par
l’action.
Peu efficace si ce changement
intervient après d’autres
ayant échoué.
Évite les rumeurs.
Limite les malentendus.
Livre une image de
transparence.
Efficace seulement si
confiance préalable du
personnel.
Pas d’échange.
Permet de répondre aux
questions et de lever les
ambiguïtés.
S’impose dans les situations
d’urgence et de crise.
Permet l’appropriation par
les acteurs des conséquences
du changement.
Évite le flou et l’incertitude.
Implique les acteurs dans la
mise en œuvre.
Institutionnalise le
changement.
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|
Chat avec les dirigeants.
Communication Conventions d’entreprise
réunissant tous (ou les
principaux) acteurs.
Utilisation de l’autorité
hiérarchique, du charisme du
Direction
leader pour imposer le
changement.
Séminaires de formation de
groupe de personnels
expliquant les conséquences
Formation
concrètes du changement et les
conditions de sa mise en
œuvre.
Adaptation des procédures,
des processus, des routines,
Après l’annonce
de l’organigramme.
du changement :
Création d’équipes projets de
Adaptation de
mise en œuvre.
regel,
l’organisation
Création d’acteurs relais,
enracinement
d’équipes mobilisatrices.
Création de communautés de
pratiques.
Soutien psychologique
individuel.
Soutien
Aide au reclassement.
individuel
Formation spécifique de mise
à niveau.
Limite les effets individuels
négatifs du changement.
Figure 8.8. Le choix des actions de conduite du changement
1. Les conditions de la réussite
a. Un processus de planification stratégique souple
Le processus fondé sur l’apprentissage (process view) est préférable à l’approche traditionnelle
« moyens-fins (goal view) ». En effet, dans un environnement mouvant, les responsables n’ont pas
intérêt à choisir pour cible des objectifs figés, il convient plutôt d’avancer l’idée d’un futur désiré,
défini seulement dans ses grandes lignes, sans spécification de détail. Un tel scénario guide
l’action, mais il n’est pas fixé obstinément. Au contraire, il est modifié à la suite d’essais et
d’erreurs. La gestion du changement dépend donc de la capacité d’apprentissage de la firme.
Exemple
Google a su apprendre de ses erreurs. Les Google Glass n’ont pas obtenu les effets
escomptés. Les efforts de commercialisation ont par conséquent été atténués.
b. Des structures adaptées
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La structure fonctionnelle hiérarchique ne favorise pas l’apprentissage ni le changement puisque,
dans cette configuration, tout est prévu par un concepteur rationnel et omnipotent : lorsque la
complexité s’accroît, le piège bureaucratique se referme, l’organisation se montre incapable
d’apprendre.
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En revanche, les structures divisionnelles ou matricielles, les organisations par projets, parce
qu’elles préfèrent le résultat aux procédures, favorisent les processus d’apprentissage. Accor a
adopté ce type de structure.
c. Une culture de l’erreur acceptée
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Un bon nombre de gestionnaires considèrent encore l’erreur comme une faute honteuse. Or l’erreur
est inévitable. Il convient donc de reconnaître ce fait pour affronter le mal et pour y remédier.
L’erreur est « normale », il faut la considérer avec sérénité puisqu’on peut la dépasser.
Exemple
La culture de l’erreur chez L’Oréal facilite le changement stratégique.
d. Un style de direction neuf
Le changement provoque des inquiétudes et engendre souvent un stress qui paralyse tous les
membres de l’organisation. Il convient donc de rechercher, et de trouver si possible, ce difficile
équilibre entre un leadership qui mobilise et qui, en même temps, rassure les hommes de la firme.
La nomination du nouveau P-DG d’Orange, après une crise interne, s’était inscrite dans cette
logique.
e. L’ouverture
Les relations diverses que l’entreprise entretient avec d’autres composantes de la société, avec la
recherche, avec l’école, avec des organisations étrangères, par exemple, constituent des stimulants
aux changements. Toutefois, il est nécessaire que ces occasions soient vécues par des membres de
l’entreprise comme des expériences valorisantes, des opportunités d’apprentissage. Microsoft a
adopté cette perspective.
Les possibilités de piloter les changements stratégiques dans l’entreprise, même si elles paraissent
limitées, existent. Les recettes toutes faites sont vaines. Mais il convient d’orienter toutes les
dimensions de la firme : sa structure, sa culture, son style de direction, son apprentissage.
2. Les écueils à éviter
Une action de changement stratégique est rarement couronnée d’un succès total, de même elle n’est
pas non plus vouée à un échec absolu. Pour que la balance penche du bon côté, voici quelques
erreurs qu’il convient d’éviter :
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• Ne pas créer un sentiment d’urgence assez fort. Si, au cours de la première étape, une
sorte de dramatisation n’est pas orchestrée, les tendances conservatrices risquent de
l’emporter. Il est capital de faire valoir que le non-changement sera plus pénalisant pour
tous que le changement. À cet égard, des faits majeurs tels que la perte d’un gros client, une
période lourdement déficitaire peuvent se révéler salutaires.
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• S’engager sans le soutien d’une équipe puissante et proche de la direction. Un projet doit
être piloté par une équipe soudée et suffisamment nombreuse (relativement à la taille de
l’organisation). Ici, il n’est pas nécessaire (car impossible) de vouloir à tout prix
convaincre l’ensemble d’un comité exécutif, par exemple, mais il faut s’assurer du soutien
des personnes qui seront des avocats. Ceux qui occupent des « nœuds relationnels » sont
tout désignés.
• Ne pas offrir d’objectif suffisamment clair. Sans une vision claire d’un avenir précis et
aisément communicable, le danger est grand de voir surgir beaucoup de réserves. Personne
n’est enclin à s’approprier des objectifs complexes et flous.
• Négliger le rôle d’une politique de communication. Tous les canaux doivent être utilisés
pour expliquer et faire adhérer. C’est d’autant plus vrai que le changement annoncé implique
des sacrifices à court terme pour certains. De même, chacun prendra garde à ne pas agir sur
le moment dans un jeu qui pourrait paraître contraire au changement. Le risque de perte de
crédibilité surviendrait.
• Ne pas éliminer les principaux freins au changement. Les freins trouvent leur origine dans
les structures, dans le style d’animation, dans les systèmes de rémunération. Les obstacles
repérés doivent être levés. Si une personne d’un rang élevé apparaît réfractaire au
changement, il conviendra de s’en séparer.
• Tarder à faire connaître les premiers résultats. Les premiers signaux positifs doivent être
soigneusement mis en exergue, tant la résistance peut facilement anesthésier les
enthousiasmes du début. Offrir des résultats palpables dans un délai raisonnable est un gage
de réussite à long terme.
• Entamer trop rapidement le chant de la victoire. Même si c’est tentant, le dirigeant doit se
garder d’annoncer que le rivage est atteint, alors que seules quelques étapes positives ont
été franchies. Le risque est de voir la tension se réduire, les efforts s’atténuer et la volonté
de changement s’arrêter, puis disparaître.
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• Ne pas ancrer le changement dans la culture interne. Les normes et les valeurs doivent
impérativement prendre le relais de la volonté. C’est lorsque le changement se repère dans
la culture que l’objectif est atteint. De même, sur une longue période, les hommes passent,
les responsabilités changent. Les successions et les promotions doivent être décidées dans
la logique du changement.
Le reengineering
Le changement de stratégie implique ou s’accompagne fréquemment d’un reengineering.
Par exemple, on peut facilement imaginer que la création de lignes low cost par Air France, et
plus récemment par la SNCF, s’est accompagnée d’une démarche de ce type.
Le reengineering fut le terme choisi pour désigner l’ensemble des actions d’adaptation
structurelle des entreprises aux conditions économiques présentes. Hamer et Champy le
définissent ainsi :
« Le reengineering est une remise en cause fondamentale et une redéfinition radicale des
processus opérationnels pour obtenir des gains spectaculaires dans les performances critiques
que constituent aujourd’hui les coûts, la qualité, le service et la rapidité. »
Néanmoins, le reengineering ne fait pas toujours recette. Voici les principaux écueils à éviter :
• Tenter d’améliorer un processus au lieu de le changer.
• Ne pas se concentrer sur les processus opérationnels.
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• S’intéresser uniquement au remodelage des processus.
• Négliger les valeurs et les convictions des individus.
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• Accepter un compromis portant sur des résultats mineurs.
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• Abandonner trop vite.
• Fixer des limites a priori à la définition du problème et à l’envergure du reengineering.
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• Laisser la culture d’entreprise et les attitudes des dirigeants empêcher le démarrage du
reengineering.
• Essayer de déclencher le reengineering à partir de la base.
• Désigner, pour conduire le reengineering, quelqu’un qui ne le comprend pas.
• Rechigner sur les ressources dévolues au reengineering.
• Noyer le reengineering dans un trop-plein d’activités.
• Dissiper l’énergie de l’entreprise sur une multitude de projets de reengineering.
• Tenter un reengineering alors que le P-DG est proche de la retraite.
• Ne pas être capable de faire la différence entre le reengineering et les autres programmes
d’amélioration.
• S’attacher exclusivement aux concepts.
• Tenter de réaliser un reengineering sans déplaire à quiconque.
• Battre en retraite devant les résistances soulevées par le reengineering.
• Faire traîner l’effort en longueur.
En résumé, on peut retenir la nécessité de :
– faire admettre l’obligation du changement ;
– communiquer une vision générale du changement de stratégie ;
– créer une vision opérationnelle du changement ;
– intégrer le changement de stratégie et la gestion des ressources humaines.
H. Le cycle de vie des organisations
Les organisations en général, et les entreprises en particulier, ne connaissent pas d’évolution
linéaire. Le changement stratégique et organisationnel se produit au terme d’une alternance de
phases constituées :
– de périodes de continuité pendant lesquelles les forces internes ou la dynamique externe ne
peuvent pas briser la tendance à l’homogénéité ;
– de moments de ruptures périodiques où le système explose.
1. Les phases de la croissance de Greiner
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Le modèle de Greiner suppose que les phases de croissance sont suivies de crises et le schéma de
Mintzberg introduit les configurations organisationnelles dans l’évolution. Les changements de
stratégie et les changements d’organisation sont de fait intimement liés.
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Lorsque l’entreprise vieillit, elle voit augmenter sa taille et elle traverse différentes phases
d’évolution où les changements sont progressifs. Ces phases d’évolution sont caractérisées par un
style de management dominant qui permet la croissance. Mais ce management devient inadapté,
atteint ses limites, et provoque une crise dont l’entreprise sort en adoptant un nouveau management :
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• Phase 1 : créativité. Le fondateur, un entrepreneur souvent peu passionné par les tâches
managériales, s’investit totalement dans la conception et la vente des nouveaux produits. La
communication est informelle et l’organisation inexistante. Mais la croissance de l’activité
requiert de la méthode, des procédures. C’est la crise de leadership qui peut être fatale et
dont l’entreprise ne sort qu’en intégrant un nouveau manager capable d’introduire des
techniques de management.
• Phase 2 : direction. Elle se caractérise par une organisation hiérarchique fonctionnelle, une
spécialisation des tâches, des systèmes de contrôle, une communication plus formelle.
Quand l’entreprise continue sa croissance, le caractère très centralisé de cette organisation
devient la source de la crise d’autonomie à laquelle beaucoup d’entreprises répondent en
mettant en place une décentralisation des responsabilités.
• Phase 3 : décentralisation. Elle se traduit par l’adoption d’une structure décentralisée où
les responsables d’usines et de marchés gagnent en autonomie ; des centres de profit sont
créés, la direction générale pratique une gestion par exception, et s’occupe plus de
stratégies d’acquisitions que de management opérationnel. Cette décentralisation et
l’autonomie grandissante prise par les unités conduisent l’entreprise à une grave crise de
contrôle dont l’entreprise peut se sortir par la coordination.
• Phase 4 : coordination. Elle implique la mise en œuvre de systèmes formels de planification
et de contrôle, un renforcement des services fonctionnels d’état-major coordonnant et
contrôlant les activités décentralisées, une centralisation des systèmes d’information, un
contrôle des activités reposant sur le retour sur investissement. Ces systèmes permettent le
développement de l’entreprise mais suscitent aussi un manque de confiance, des rivalités
entre le siège (staff) et les services opérationnels (line). Les systèmes formels de
coordination sont générateurs de procédures, de rigidité, et conduisent à une crise de
bureaucratie.
• Phase 5 : collaboration. Elle repose sur une approche plus flexible et plus humaine du
management qui implique de multiples équipes transversales orientées projet, une réduction
des équipes du siège, une structure matricielle, des systèmes de contrôle formels plus légers
jouant un rôle de facilitateurs, des systèmes d’information en temps réel, des programmes de
formation orientés vers les aptitudes comportementales. Ces pratiques, que l’on observe
aujourd’hui dans les grandes entreprises internationales, peuvent provoquer une crise de
saturation psychologique due à la pression du management et au stress dans des groupes de
très grande taille. Une réponse à cette crise réside peut-être dans une phase
d’externationalisation d’activités, de fonctionnement en réseau, d’alliance, etc.
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Figure 8.9. L’âge de l’organisation
Il est clair que la durée des phases est variable selon les secteurs (leur rythme de développement),
selon les entreprises et que ce modèle, comme tout modèle d’ailleurs, ne peut prétendre s’appliquer
à toutes les entreprises.
Par ailleurs, les changements de phase, les « révolutions », s’accompagnent souvent d’un
changement de dirigeant.
2. Les six phases de Mintzberg
Mintzberg a tenté de présenter un modèle synthétique de ce phénomène de cycle de vie des
organisations en précisant quelle configuration structurelle caractérisait les étapes.
Figure 8.10. Le cycle de vie des organisations
Selon cet auteur, six phases se succèdent :
• La formation. C’est une période pendant laquelle le chef d’entreprise fondateur joue le rôle
fondamental d’animateur. On observe à ce stade une structure de type entrepreneurial.
• Le développement. Trois types de changements sont envisageables à ce moment :
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– si l’entreprise-organisation est composée de membres qualifiés, elle doit adopter une
configuration adhocratique qui convient le mieux à des équipes managériales compétentes ;
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– si le fondateur est encore très actif, la configuration missionnaire est justifiée, puisque son
charisme continue avec succès d’animer le corps social ;
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– si de nouveaux acteurs externes, de nouveaux propriétaires par exemple, interviennent ; si la
croissance entraîne un renforcement de la formalisation, il convient alors d’adopter une
configuration bureaucratique.
• La maturité. L’organisation a vieilli, la taille a augmenté. Cette étape est celle de la stabilité
qui se manifeste par :
– les configurations missionnaire et bureaucratique qui ont l’une et l’autre tendance à se
prolonger en un système clos où les objectifs stratégiques sont l’enjeu de conflits entre le
sommet stratégique, la ligne stratégique et la technostructure qui obligent à une
décentralisation des décisions sans grande possibilité d’intervention de la part d’acteurs
externes, fussent-ils les propriétaires ;
– une configuration adhocratique qui contrôle plus fermement son environnement – par
exemple lorsqu’elle fidélise ses clients – et qui évolue vers une structure professionnelle,
dans laquelle les participants disposent d’une large marge de manœuvre en raison de la
décentralisation mise en place. Le système d’objectifs est peu intégré ; les conflits se
multiplient, le sommet stratégique se bornant à allouer les ressources et à réguler les
oppositions entre les autres parties prenantes.
• Le déclin. les conflits deviennent plus rudes et conduisent l’entreprise à sa disparition.
Néanmoins on peut tenter, bien que difficilement, d’atténuer la tendance fatale.
• La revitalisation. Il s’agit, pour soigner l’organisation, de trouver des remèdes qui agissent
efficacement de l’intérieur. Par exemple :
– une politique de gestion des ressources humaines plus active (intéressement, direction
participative par objectifs, horaires à la carte, etc.) ;
– moins de formalisation associée à une recherche de développement des relations
interpersonnelles ;
– un aplatissement de la structure, etc.
Les propositions sont nombreuses pour tenter d’enrayer un tel déclin. Cependant, il convient de
veiller à ce que l’introduction de ces mesures n’engendre pas de tensions supplémentaires.
• Le retournement de tendance. il est comparable à une révolution, une restructuration en
profondeur provoquée par un risque grave, une faillite ou une absorption par exemple. Dans
ce cas, de nouvelles « aurores » peuvent se lever : un leader charismatique peut donner un
élan inattendu, une structure bureaucratique usée peut, à la suite d’un reengineering, passer à
une configuration adhocratique mieux adaptée, l’entreprise peut modifier sa stratégie de
fond en comble (nouveaux marchés, nouveaux produits, etc.).
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Le modèle de Mintzberg présente un intérêt pour mieux saisir le changement organisationnel. Il
convient cependant de remarquer que la durée de chaque phase n’est pas prévisible. Il importe
aussi de souligner que, si la vie d’une entreprise est constituée d’une alternance de phases, cette
évolution n’implique pas que l’étape postérieure sera « meilleure » que l’étape antérieure. Il faut
encore que l’organisation réussisse le passage.
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Figure 8.11. La finalité du Knowledge Management
II. L’apprentissage organisationnel
On a vu que l’information est assimilable à une connaissance qui enrichit la représentation du réel
du gestionnaire et, de ce fait, réduit l’incertitude. Si l’on considère l’entreprise comme un système
ouvert sur l’environnement, de celui-ci proviendront des informations nouvelles au fur et à mesure
des changements qu’il subit. Mais ces connaissances nouvelles modifieront aussi la vision du
monde des managers et les inciteront à prendre des décisions mieux instruites pour agir sur le
milieu extérieur.
On peut ainsi regarder l’entreprise comme un être social capable d’accumuler des connaissances,
de les interpréter, de les garder en mémoire ; bref, comme une organisation engagée dans un
processus d’apprentissage. Cet apprentissage est essentiel sur le plan stratégique, sans lui, le risque
d’erreur stratégique est majeur.
Le management des connaissances est devenu, depuis quelques années, un sujet de préoccupation
majeure des chefs d’entreprises et des chercheurs en sciences de gestion. La cause première de
cette orientation provient de la quête permanente du « Graal » managérial, à savoir l’acquisition
d’un avantage compétitif permettant de triompher d’une multitude de concurrents de plus en plus
combatifs et avides. Or c’est l’innovation permanente qui constitue la clé d’accès au trésor. Détenir
seul une technologie ne garantit pas la réussite d’une firme. La science et la technique évoluent trop
vite et une technologie fructueuse aujourd’hui sera dépassée demain. D’où l’intérêt porté à la
capacité d’étendre continûment le stock des connaissances engrangées dans l’organisation.
L’innovation permanente dans tous les domaines dépend d’une telle aptitude.
A. La nécessité de l’apprentissage organisationnel
(Organizational Learning)
Les termes d’apprentissage organisationnel et d’organisation apprenante reçoivent un intérêt majeur
tant dans les milieux professionnels(53), où ils donnent lieu à des séminaires de formation, que dans
les sphères académiques. Trois facteurs expliquent cet engouement :
• Les changements de plus en plus rapides imposés par l’environnement obligent les
entreprises à remettre en cause leur fonctionnement et à s’interroger sur les moyens
d’acquérir (rapidement, réactivité oblige !) de nouveaux modes d’apprentissage.
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• La place des compétences et ressources internes dans l’explication de la compétitivité
des entreprises les conduit à approfondir le mécanisme de création, de diffusion et de
mémorisation de leurs savoirs.
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• Les politiques de licenciement massif inspirées du lean management ont eu comme effet
(non prévu) la perte des compétences acquises au fil des années par les salariés. Cela a
provoqué une prise de conscience du caractère intangible et volatil de certaines
compétences et de la nécessité de s’intéresser à leur mémorisation.
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Figure 8.12. L’importance de l’apprentissage organisationnel
L’acquisition de connaissances nouvelles fait évoluer la culture de l’entreprise ; elle remodèle son
identité et conduit les gestionnaires confrontés à une même difficulté à agir autrement.
Exemple
Les dirigeants de Total, confrontés aux errances des politiques africaines, envisageront
avec moins de réserve de s’implanter dans la région caspienne quand l’occasion se
présentera.
On entendra donc par apprentissage organisationnel la modification stable faisant suite à la
perception et à la résolution d’un problème.
Exemple
De la même façon, les équipes dirigeantes de Renault ont « appris » de l’échec de la
fusion avec Volvo pour la conduite de l’alliance avec Nissan.
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Figure 8.13. Les déclencheurs de l’apprentissage organisationnel
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B. L’entreprise apprenante (Learning Organization)
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Des rapports entre l’organisation et son environnement résultent trois catégories de flux
d’informations :
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– des informations qui ont pour origine les transactions effectives entre l’entreprise et ses
partenaires (ventes, achats, relevés bancaires, contrats, etc.) ;
– des informations qui proviennent de l’environnement, par exemple des signaux émis par le
système de contrôle ou des intentions d’achat formulées par des clients ;
– des informations émises par l’entreprise en direction de ses partenaires (publication de
documents comptables ou publicité).
Avant de décider de changer de stratégie, les gestionnaires ont à comprendre : ils doivent
sélectionner les informations pertinentes, les analyser, les interpréter, autrement dit, ils doivent
cerner le problème qui se pose à eux.
S’agissant d’un apprentissage par et pour l’organisation, le processus cognitif est décomposable en
deux phases : sur le plan des individus tout d’abord, puis sur le plan de la collectivité que forme
l’entreprise.
1. Le processus cognitif individuel
Comment acquiert-on des connaissances ? Pour répondre à cette question, les spécialistes des
sciences cognitives élaborent des schémas que l’on peut représenter sous la forme générale donnée
par la figure 8.14.
Figure 8.14. Le processus cognitif
2. Le processus cognitif collectif : les représentations partagées
Chacun d’entre nous percevant et interprétant les stimuli de l’environnement selon ses propres
acquis ou sa propre vision du monde, on risque de compter autant de représentations du réel que de
gestionnaires. Tout le problème, pour l’organisation, si l’on veut obtenir une vue cohérente de
l’environnement, consiste alors à rendre aussi large que possible la représentation partagée.
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Pour parvenir à cette fin, il existe essentiellement deux moyens.
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a. L’observation dirigée
Exemple
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Pour un bon nombre d’événements ou d’objets, on met en place une grille de lecture collective qui a
pour but d’harmoniser les représentations individuelles et de fournir ainsi une vision homogène.
Dans un fonds d’investissement, les directeurs de business units disposent d’une
« situation mensuelle » qui prend en compte le chiffre d’affaires, le résultat, les stocks
et les taux de marge.
Chacun possède donc les mêmes instruments de lecture des faits.
Figure 8.15. La représentation partagée
b. La coordination
Si les moyens de l’observation dirigée conviennent pour des événements répétitifs, il n’en va pas
de même quand surgissent des problèmes nouveaux. La solution la plus couramment adoptée
consiste alors à réunir les gestionnaires concernés afin qu’ils s’entretiennent des difficultés et qu’ils
envisagent une solution.
Exemple
La répétition de mauvais résultats, dans un domaine d’activité stratégique, conduit à
une coordination au sein de la direction du fonds d’investissement qui peut décider de
faire appel à un cabinet de consultants pour effectuer un diagnostic stratégique.
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En définitive, il est vital que l’organisation acquière des informations pour comprendre les
modifications de l’environnement et pour répondre à ses sollicitations. Mais il est aussi
recommandé d’éviter de mettre en place un processus d’acquisition d’information lourd et coûteux
pour chaque opération. Autrement dit, il convient de se doter d’une mémoire.
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C. Le rôle de la mémoire dans la vie de l’organisation
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1. La mémoire organisationnelle
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Les organisations, les entreprises ne sont généralement pas éphémères ; leurs vies s’étalent dans le
temps. Au fur et à mesure que s’enrichit leur expérience, elles emmagasinent de la connaissance.
On définira ce concept comme un système de traitement de l’information qui aide à l’acquérir, à la
stocker et à la retrouver au moment opportun.
La mémoire organisationnelle est double. Elle peut en effet porter sur des événements.
Exemple
L’apparition de nouveaux fournisseurs en Asie du Sud-Est est une information de type
événementiel.
Elle peut aussi porter sur des modèles qui expliquent pourquoi telle décision convient face à tel
problème et qui apportent une solution.
Exemple
Le choix d’une stratégie de retrait d’un DAS se fait en fonction de modèles.
2. Le recours à la mémoire organisationnelle et ses limites
Le stockage de l’information dans la mémoire de l’organisation est fort utile pour tous les
problèmes qui se posent de manière identique. Si la solution ancienne a convenu, il suffit
simplement de la répéter. Pour les problèmes analogues et non pas identiques, la solution ancienne
est encore utilisable au prix d’une légère adaptation.
En outre, l’expérience acquise et retenue aide souvent à perfectionner les procédures de résolution
face à un problème nouveau, mais proche de certains déjà résolus.
Enfin, l’apprentissage et le stockage en mémoire apparaissent comme un dispositif qui améliore
l’efficience de l’organisation. Il est donc judicieux de chercher à perfectionner :
– la formalisation ainsi que l’harmonisation des procédures, et les résultats ;
– leur archivage ;
– le développement d’une mémoire collective chez les individus.
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D. Les types d’apprentissage
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Toutefois, les problèmes posés aux organisations sont rarement répétitifs. En matière stratégique, ils
ne le sont même jamais. Il ne faudrait pas s’illusionner sur les capacités de la mémoire de
l’organisation. Certes, elle est utile, mais jusqu’à un certain point seulement. Au-delà de ce seuil,
elle conduirait à promouvoir la routine et à diminuer l’effort d’innovation.
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1. L’apprentissage cognitif et comportemental
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On oppose fréquemment sur le plan stratégique et organisationnel :
• l’apprentissage cognitif, qui se traduit par une modification des perceptions, des
représentations, des modèles de raisonnement, en pratique la façon dont on perçoit
l’environnement et l’entreprise ;
• l’apprentissage comportemental, qui repose sur un changement des procédures, des
routines organisationnelles, en pratique les méthodes de travail et de fonctionnement de
l’organisation.
L’apprentissage cognitif est considéré comme précédant l’apprentissage comportemental, dans la
mesure où le changement de perception serait la condition nécessaire au changement de
comportement. En fait, les perspectives cognitives et comportementales de l’apprentissage sont plus
interdépendantes que séquentielles. Dans une entreprise, le manager décide en fonction de ses
perceptions, mais apprend aussi à partir des conséquences de ses actions et expérimentations. Il
existe donc une interaction entre les aspects cognitifs et comportementaux de l’apprentissage. Ces
modes d’apprentissage concernent directement le diagnostic et les décisions stratégiques.
Figure 8.16. L’apprentissage organisationnel, un double processus
2. L’apprentissage à simple et à double boucle
L’apprentissage à simple boucle correspond à une modification mineure, de court terme qui se
déroule dans le cadre des règles existantes. C’est un apprentissage d’amélioration qui ne remet pas
en cause les modèles de raisonnement. Le lancement d’une promotion ponctuelle dans le cadre de la
stratégie existante entre dans ce cadre.
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L’apprentissage à double boucle suppose une modification des modèles de raisonnement, des
cadres d’interprétation. On ne va pas agir sur la politique de prix à court terme, mais on va remettre
en cause le positionnement stratégique. Il s’agit là d’un apprentissage plus stratégique, qui constitue
une rupture par rapport aux savoirs existants dans l’entreprise. Il y a là création de connaissances et
source potentielle d’avantages concurrentiels pour l’entreprise apprenante.
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Cette distinction ne doit pas laisser penser que ces deux types d’apprentissage sont antinomiques.
Ils peuvent apparaître complémentaires dans le temps.
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Tableau 8.6. Des apprentissages différents
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Apprentissage à simple boucle Apprentissage à double boucle
Modèles existants.
Adaptation du comportement.
Opérationnel.
Routinier.
Comment ?
Améliore l’existant.
Contexte stable.
Renforce l’organisation existante.
Nouveaux modèles mentaux.
Changement cognitif.
Stratégique.
Non routinier.
Pourquoi ?
Source d’avantage concurrentiel.
Contexte instable, ambigu.
Suscite le changement d’organisation.
Figure 8.17. Des apprentissages complémentaires
3. L’apprentissage individuel et organisationnel
L’apprentissage peut s’opérer à plusieurs niveaux au sein d’une entreprise.
Il peut être le fait d’un individu qui acquiert des connaissances ou des savoir-faire. Le suivi de
programmes de formation externe à l’entreprise entre dans cette perspective.
Un groupe de personnes au sein d’un service, d’un département peut participer à des séminaires de
développement.
Enfin, la direction de l’entreprise peut viser à créer une culture interne qui favorise l’apprentissage
et permet la capitalisation de ses compétences fondamentales.
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Figure 8.18. Les différents niveaux d’apprentissage dans l’entreprise
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Ces trois niveaux d’apprentissage sont en pratique complémentaires. L’apprentissage individuel
nourrit l’apprentissage du groupe et réciproquement. Lorsque ces apprentissages reposent sur
des procédures, ils caractérisent l’entreprise et non plus seulement les individus qui les mettent en
œuvre. L’entreprise apprenante repose sur une spirale d’acquisition des connaissances.
4. La spirale d’acquisition des connaissances
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Pour Nonaka, la connaissance débute toujours au plan de l’individu. Si l’on distingue les
connaissances tacites des connaissances explicites, quatre modes de base de création des
connaissances fonctionnent en interaction dynamique dans l’ordre suivant :
• Du tacite au tacite. Un individu transmet directement à un autre son savoir, par
l’observation, l’imitation, ou la pratique ; c’est la socialisation qui repose sur le partage
d’expérience et l’interaction. Cette socialisation est un moyen limité de création de
connaissances car ces dernières ne sont pas explicitées.
• Du tacite à l’explicite. Les savoirs personnels et tacites sont formalisés, explicités, rendus
transmissibles à toute l’organisation. Cette externalisation, résultat de l’interaction du
tacite et de l’explicite, est génératrice d’une puissante création de connaissances. C’est
précisément dans cet échange entre tacite et explicite que les entreprises japonaises
excellent.
• De l’explicite à l’explicite. Le regroupement et l’association de connaissances explicites au
sein de manuels et de bases de données créent des connaissances par combinaison, par
synthèse et catégorisation qui facilitent leur utilisation.
• De l’explicite au tacite. Quand les salariés utilisent les connaissances explicites, les
consignes, et qu’ils les appliquent à de nouveaux cas, c’est l’internalisation qui en traduit
alors l’appropriation.
Les phases d’externalisation et d’internalisation sont les étapes clés de la spirale des
connaissances.
Figure 8.19. Le modèle de création des connaissances
E. Les conditions de l’apprentissage organisationnel
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Si l’on considère que l’apprentissage organisationnel constitue, au travers des connaissances et des
compétences qu’il permet de créer, un atout face à la concurrence, la question essentielle est de
savoir quelles sont les conditions qui facilitent sa mise en œuvre. Il est possible d’identifier des
déterminants externes et internes. Il s’agit là d’un véritable enjeu stratégique surtout dans les
secteurs où l’innovation est forte.
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Tableau 8.7. Les conditions favorisant l’apprentissage organisationnel
Conditions
• Environnements ni trop stables, ni trop instables.
• Perceptions des managers primant sur les caractéristiques objectives.
externes
• Structures décentralisées, participatives.
• Structures plates.
• Gestion par projet.
Conditions
• Flexibilité organisationnelle.
internes
• Large diffusion des informations formelles et informelles sur les
apprentissages antérieurs.
• Implication et vision de la direction générale.
Nonaka et Takeuchi identifient sept lignes directrices qui permettent à un praticien de développer un
programme de création de connaissances et d’apprentissage organisationnel :
• Créer une vision de connaissances. La direction générale doit fournir aux membres de
l’organisation une carte mentale du monde et une direction quant au type de connaissances
qui doivent être recherchées et créées. C’est là une intention stratégique.
• Développer un équipage de connaissances. La création de connaissances repose sur des
individus qu’il convient d’attirer et de garder dans l’entreprise. L’hétérogénéité des profils
est considérée comme un atout.
• Créer un champ d’interactions à haute densité sur la ligne de front. Pour ces auteurs, la
création de la connaissance passe par la transformation de connaissances tacites
(perceptions, idées, etc.) en connaissances explicites (langage formel et systématique). Il
faut donc que l’entreprise soit un lieu d’interactions fréquentes et intenses entre les membres
de l’équipage. Il peut s’agir à la fois d’équipes multifonctionnelles, de réunions de groupe,
de séminaires externes ou de réorganisation des bureaux pour supprimer les cloisons.
• S’appuyer sur le processus de développement de nouveaux produits. Le processus de
création de nouveaux produits est le mécanisme central de création de nouvelles
connaissances organisationnelles. Ce processus doit être géré par une équipe projet.
• Adopter un management milieu, haut, bas. La création de connaissances organisationnelles
résulte souvent de crises ou de situations d’urgence. On parle ici de chaos créatif : ce chaos
est lié à l’écart entre les objectifs internes porteurs de défis fixés par la direction et les
capacités actuelles de l’entreprise. Selon ces auteurs, une façon efficace de traiter ce chaos
consiste à confier aux cadres intermédiaires le soin de gérer le décalage entre la vision de
la direction et les réalités auxquelles les employés sont confrontés.
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• Passer à une « organisation hypertexte ». Une organisation apprenante doit être capable
d’« acquérir, accumuler, exploiter, créer continuellement et de façon dynamique de
nouvelles connaissances et de les recatégoriser et recontextualiser stratégiquement ».
L’organisation hypertexte repose simultanément sur trois niveaux ou couches
organisationnelles : la hiérarchie est la structure la plus efficiente pour l’acquisition,
l’accumulation et l’exploitation des connaissances ; la structure par projet est la plus
efficace pour créer de nouvelles connaissances. La recatégorisation et la recontextualisation
de ces connaissances nécessitent un troisième niveau appelé base de connaissances.
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• Construire un réseau de connaissances avec le monde extérieur. La création de
connaissances suppose une ouverture sur l’environnement et notamment sur les clients dont
il faut capter les images mentales.
Figure 8.20. L’organisation hypertexte
I. NONAKA et N. KONNO, « Knowledge Based Organization », Business Review, vol. 41,
no 1, 1993.
Mini-cas 1 : la stratégie de redressement de Carrefour
« Peut-on regreffer la tête d’un canard ? C’est toute la question et je crois que oui ! » Georges
Plassat aime les métaphores. Depuis le mois de mai, le nouveau P-DG de Carrefour a entrepris
de ranimer le volatile étêté qu’est devenu le deuxième distributeur mondial. Les résultats
présentés ce jeudi 30 août sont les premiers signes d’espoir : les ventes ont affiché une hausse de
0,9 % au premier semestre. Mais la rémission durera au moins trois ans, selon son diagnostic. En
France, les hypermarchés Carrefour ont accusé un recul de 6 % de leurs ventes au deuxième
trimestre et, selon Kantar Worldpanel, ils ne cessent de perdre des parts de marché – plus de un
point en un an – au profit de E. Leclerc. De Carrefour Planet, le concept qui devait réenchanter
l’hypermarché, à Dia, le hard discounteur vendu pour pouvoir se désendetter, le leader français a
couru dans toutes les directions. Il n’en a désormais plus qu’une seule : revenir à son savoirfaire de commerçant. « Faire simple », dit son P-DG, qui met aux oubliettes tout le discours
marketing de son prédécesseur.
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Revenir aux fondamentaux
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Cette simplification consiste d’abord à redonner de l’autonomie aux directeurs des magasins.
Résultat : 500 à 600 postes administratifs vont être supprimés dans les sièges du groupe en
France. Le nouveau patron de Carrefour entend aussi « faire la chasse au gaspi » dans tous les
recoins du groupe. Pour refaire son retard face à la concurrence, l’enseigne a instauré une
garantie « prix le plus bas » sur des centaines de produits, et accélère le développement des
drives, ces points de retrait des courses achetées en ligne. Mais Georges Plassat connaît
suffisamment les marchés financiers pour se risquer à donner des objectifs chiffrés. Ce qui ne
l’empêche pas de trancher. Si Carrefour n’est pas leader dans un pays, il coupe. Fin août, le PDG a ainsi annoncé la fermeture de ses deux magasins à Singapour. Une première.
« La direction de Carrefour ne parlait plus qu’aux analystes depuis dix ans, Georges Plassat
s’adresse aux clients », remarque Delphine Mathez, senior partner au cabinet de conseil en
stratégie Roland Berger. Malgré cette attention portée à la communauté financière, la
capitalisation est passée de 37 à 11 milliards d’euros depuis 2007 et l’arrivée dans le capital du
groupe Arnault et du fonds d’investissement Colony. À présent, Carrefour veut se concentrer sur
son métier, savoir acheter et vendre. « 100 % dédiés au commerce, 100 % dédiés au client »,
affirmait Noël Prioux, un pur produit de l’enseigne, après sa nomination en tant que directeur
exécutif France l’an dernier. Une politique confirmée depuis par Georges Plassat. « Les hypers
ne se managent pas du siège, explique Noël Prioux. Si vous connaissez quelqu’un qui peut
prendre des décisions pour le million de clients qui nous fréquente tous les jours, présentez-lemoi, je l’embaucherai. » L’exact contre-pied de la politique de leurs prédécesseurs, qui avaient
centralisé et truffé le siège de consultants, du marketing aux achats. Une inflation de cerveaux,
comme dit le nouveau patron, qui éloignait les dirigeants de la réalité du terrain, là où se joue la
bataille contre E. Leclerc, Auchan et Casino.
Impliquer les managers
Pour revenir aux fondamentaux du commerce, les directeurs de magasin ont maintenant plus
d’autonomie. Les achats se faisaient au niveau des régions ? Ils sont désormais la responsabilité
de chaque grande surface. « Avoir les moyens de négocier localement permet d’être plus rapide
et plus efficace, explique Gildas Aitamer, analyste à Planet Retail. C’est ce qui fait la force
des centres E. Leclerc, par exemple. » Si un concurrent baisse ses prix, lance une promotion, un
chef de rayon peut désormais riposter immédiatement. « Nous avons à présent de bien meilleurs
produits, assure le responsable des fruits et légumes d’un hypermarché d’Île-de-France. Nous
pouvons les choisir, alors qu’avant il fallait seulement les écouler. » Pour des magasins mieux
fournis et plus agréables, les audits sur l’hygiène se sont également multipliés, révèle un salarié.
Garantir les prix bas
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Donner plus de pouvoir aux managers des hypermarchés revient à en enlever à ceux des
directions centrales, dont le nombre de salariés avait explosé. « Aujourd’hui, il n’y a plus assez
de travail pour tout le monde au siège, relève Thierry Faraut, délégué CFE-CGC de Carrefour. Il
y a de moins en moins d’échelons intermédiaires. » Le premier employeur privé de France
(110 000 salariés) a donc annoncé, fin août, la suppression de 500 à 600 postes administratifs.
Du côté du management, les départs avaient débuté bien avant : José Carlos Gonzalez-Hurtado,
le directeur commercial, et Patrick Rouvillois, le directeur marketing, ont ainsi été remerciés en
mai et ne seront pas remplacés. La priorité est clairement donnée aux magasins. Selon les
syndicats, le siège et les entrepôts représenteraient 2,5 % du chiffre d’affaires en France. Un
handicap face aux groupements d’indépendants comme Leclerc et Système U. Plus légers et
réactifs, ils font montre d’un formidable dynamisme ces dernières années, grâce à une politique
commerciale avisée. Avec la fin de la loi Galland et des marges arrière indues, les prix bas sont
redevenus le nerf de la guerre.
Carrefour l’avait presque oublié. Fini, donc, les promotions à tout-va qui déconcertent les clients
et brouillent son image. Fin janvier, le groupe a lancé sa garantie « prix le plus bas » sur 500
produits de marques nationales faciles à comparer. Du chocolat en poudre Nesquik aux rasoirs
Gillette en passant par la bière Heineken, l’enseigne promet de rembourser deux fois la
différence si l’on trouve moins cher ailleurs. « Il faut revenir dans la course. Les prix bas seront
une constante, pas une variable d’ajustement », affirme Georges Plassat. Une allusion directe à
Leclerc, qui s’applique à être le moins cher et le martèle avec efficacité. Selon une étude du
cabinet OC&C Strategy Consultants, les clients de l’enseigne bretonne perçoivent ses prix
comme moins élevés qu’ils ne le sont en réalité ; Carrefour, à l’inverse, est ressenti comme plus
cher de 2,2 % que ce qu’indiquent ses étiquettes. Une image-prix défavorable qu’il faut
améliorer au plus vite.
En mai, l’enseigne a lancé l’opération « prix le plus bas » sur les carburants. De quoi marquer
les esprits sans risquer de perdre des sommes folles, tant les remboursements se révèlent
compliqués et rares et tant les différences de prix entre les distributeurs sont limitées. « C’est un
élément crucial de la perception de nos prix », confirme Pierre-Jean Sivignon, le directeur
financier du groupe. Plus marquant encore que la « garantie prix les plus bas » déployée en cette
rentrée sur les fournitures scolaires. Mais la cohérence du discours commence à produire son
effet, assure Georges Plassat, sans fournir de chiffres.
Clarifier la communication
La reconquête des consommateurs, dont le pouvoir d’achat s’effrite, passe aussi par le
développement des drives. Le concept – commander ses courses sur Internet, aller les récupérer
au magasin – fait un malheur en France. Alors que ses concurrents se sont engouffrés dans cette
voie, Carrefour était resté sur le bas-côté. Carrefour rattrape son retard avec 67 points de
livraison ouverts au deuxième trimestre, ce qui porte leur nombre à 125, tandis que Leclerc en
est à plus de 200. « Carrefour est obligé de se mettre au niveau de ses rivaux, même si la
rentabilité du drive n’est pas encore évidente », remarque Gildas Aitamer. Car si les prix sont
les mêmes qu’en magasin, ce sont les salariés qui font le « travail » du client en préparant ses
courses. Et ce type de distribution ne favorise guère les fameux achats d’impulsion qui font les
profits des hypermarchés. Il faudra trouver des économies ailleurs. Dans la publicité, par
exemple.
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Le nouveau P-DG a quelques idées sur la question. « On investit une masse d’argent
considérable pour expliquer qu’on peut, quand on est chauve, se sécher les cheveux avec un
séchoir à 9 euros, se moquait-il en juin lors de l’assemblée générale des actionnaires. Mettons
beaucoup de cet argent, superficiellement utilisé aujourd’hui, au service de nos magasins et de
nos collaborateurs. » Estimé à 1 milliard d’euros par Les Échos en 2009, quand Publias l’a
récupéré, le budget publicitaire pourrait être rogné.
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L’année dernière, selon le cabinet d’études Kantar Media, l’inventeur des hypers a été le
troisième plus gros annonceur dans l’Hexagone, avec des dépenses en hausse de 23 %, sans pour
autant enrayer la baisse des parts de marché et des recettes : la réalité dans les rayons n’était pas
aussi riante que dans la publicité. À l’inverse, Leclerc, septième plus gros acheteur d’espace,
avait augmenté ses dépenses de 8,6 % et son chiffre d’affaires d’autant. Son avantage ? Sa
communication n’a pas varié depuis trois décennies, quand Carrefour passait de
l’incompréhensible panel de consommateurs, avec un sceau sur les produits façon « testé et
approuvé par les clients », à ses promotions saisonnières, sans oublier son éphémère ligne bleue
qui devait accélérer le passage en caisse. L’enseigne n’a plus qu’un slogan : « Les prix bas, la
confiance en plus ». Reste à garder le cap, car la confiance ne s’achète pas, elle se construit dans
la durée.
S. Briand, « La vraie stratégie de Georges Plassat pour redresser
Carrefour », Challenges, 6 septembre 2012.
Questions
1. Quelles sont les causes du changement stratégique au sein du groupe Carrefour ?
2. Quels sont les acteurs de ce changement stratégique ? Quels sont leur pouvoir et leur
attitude ?
3. Comment le changement stratégique est-il mis en œuvre ?
Mini-cas 2 : le comité exécutif d’Orange, pièce maîtresse
de la stratégie
Trois ans après sa prise de fonctions comme PDG de France Télécom, Stéphane Richard fait le
tri dans sa garde rapprochée. Il fait passer le comité exécutif de 14 à 12 membres, le rajeunit et
le féminise. En 2010, le P-DG avait fait entrer du sang neuf au « comex », avec Pierre Louette, le
secrétaire général, Bruno Mettling, le DRH, et l’ex-ministre de la Culture Christine Albanel. Il y
avait également promu une femme, Delphine Ernotte, propulsée à la tête des activités en France.
Stéphane Richard continue sur cette lancée en nommant une autre jeune femme, Béatrice
Mandine, directrice de la communication et en la faisant entrer au comité exécutif. Récemment
distinguée par l’étude annuelle VcomV, elle remplace Xavier Couture, qui quitte le groupe pour
des raisons de convenance personnelle.
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Une petite révolution
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Mais le conciliant Stéphane Richard montre aussi qu’il est capable de faire des choix. En effet,
deux « barons » du groupe sortent du comité exécutif. Il s’agit de Jean-Paul Cottet (marketing,
innovation, nouvelles activités de croissance) et de Jean-Philippe Vanot (qualité, responsabilité
sociale d’entreprise). Ce dernier devrait prendre sa retraite dans quelques mois. Quant à JeanPaul Cottet, son rôle est éclipsé par l’ascension de Vivek Badrinath. Cet ingénieur de 43 ans,
passé par Thomson en Inde, est promu directeur général adjoint – comme le secrétaire général, la
directrice France et le DRH. Il devient le patron d’un pôle élargi « innovation, technologie,
expérience client ». Concrètement, l’ex-directeur d’Orange Business Services (OBS) reprend la
tête du réseau. Thierry Bonhomme, jusqu’àprésent en charge des réseaux et de la R&D, dirigera
à son tour l’activité entreprise. Vivek Badrinath prend également la main sur le système
d’information et sur les terminaux. Il va superviser l’ensemble de la chaîne de l’innovation, des
laboratoires jusqu’au marketing, alors qu’à présent elle était éclatée en chapelles. Cette petite
révolution est le signe que le plan Nova Plus, engagé en 2010 pour rationaliser la R&D,
commence à porter ses fruits après des démarrages difficiles. En créant le technocentre, l’exPDG Didier Lombard avait voulu donner un coup de fouet à l’innovation face à la « noblesse »
de la R&D, incarnée par les chercheurs et les ingénieurs des Orange Labs. Le technocentre avait
vocation à mêler recherche, développement et marketing. Dans les faits, les « grands » pays ont
préféré développer leurs projets séparément. Et la dernière version de la Livebox est sortie avec
deux ans de retard. « Vivek Badrinath a pour mission de remettre l’innovation et la R&D en
marche. Pour casser les baronnies, les Orange Labs, le technocentre et les ingénieurs réseaux ont
été regroupés sous sa coupe », note une source interne. Une bonne partie du futur de l’opérateur
dépend désormais de lui.
En remaniant sa garde-rapprochée, Stéphane Richard, qui avait été affecté par des rumeurs de
départ au début de l’année, affiche aussi son envie de poursuivre sa mission à la tête de
l’opérateur.
G. de Calignon et S. Godeluck, « Stéphane Richard resserre le
comité exécutif d’Orange », Les Échos, 21 mars 2013.
Questions
1. Dans quelle phase du changement stratégique l’entreprise Orange se situe-t-elle ?
2. Quel est l’obstacle majeur qui mine le changement stratégique ?
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3. En quoi la décision de resserrer le comité exécutif concerne-t-elle le changement
stratégique de l’entreprise ?
Cas de synthèse
L’Oréal vaut bien une charte
La mission du groupe
Depuis plus d’un siècle, L’Oréal se consacre à un seul et unique métier : la beauté. Il s’agit d’un
métier riche de sens puisqu’il permet à chacun d’exprimer sa personnalité, de prendre confiance en
lui et de s’ouvrir aux autres.
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Le profil général du groupe
• Un siècle d’expertise cosmétique.
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• 25 milliards d’euros : chiffre d’affaires consolidé en 2015.
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• 32 marques mondiales(54).
• 78 000 collaborateurs.
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• 130 pays.
• 501 brevets déposés en 2014.
Le comité de direction est composé des personnes suivantes :
• Jean-Paul Agon, P-DG de L’Oréal.
• Laurent Attal, vice-président directeur général recherche et innovation.
• Barbara Lavernos, directrice générale des opérations.
• Nicolas Hiéronimus, directeur général des divisions sélectives.
• Marc Menesguen, directeur général division produits grand public.
• Brigitte Liberman, directrice générale de la division cosmétique active.
• Christian Mulliez, vice-président directeur général administration et finances.
• Alexandre Popoff, directeur général de la zone Europe de l’Est.
• Jochen Zaumseil, directeur général de la zone Europe de l’Ouest.
• Frédéric Rozé, directeur général zone Amériques.
• Geoff Skingsley, directeur général de la zone Afrique / Moyen-Orient.
• An Verhulst-Santos, directrice générale de la division des produits professionnels L’Oréal.
• Jérôme Tixier, directeur général des relations humaines, conseiller du président.
• Alexis Perakis-Valat, directeur général zone Asie / Pacifique.
• Lubomira Rochet, Chief Digital Officer.
La beauté est un langage
L’Oréal s’est donné pour mission d’offrir à toutes les femmes et à tous les hommes de la planète le
meilleur de l’innovation cosmétique en termes de qualité, d’efficacité et de sécurité, en répondant à
l’infinie diversité des besoins et des envies de beauté à travers le monde.
La beauté est universelle
Depuis sa création par un chercheur, le groupe repousse les frontières de la connaissance. Sa
recherche unique lui permet d’explorer sans cesse de nouveaux territoires et d’inventer les produits
de l’avenir, en s’inspirant des rituels de beauté du monde entier.
La beauté est une science
Faciliter l’accès à des produits qui contribuent au bien-être, mobiliser les forces d’innovation pour
préserver la beauté de la planète, accompagner les communautés qui l’entourent sont autant de défis
ainsi que de sources d’inspiration et de créativité pour L’Oréal.
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La beauté est un engagement
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En s’appuyant sur la diversité de ses équipes, la richesse et la complémentarité de son portefeuille
de marques, L’Oréal a fait de l’universalisation de la beauté son projet pour les années à venir.
L’Oréal au service de la beauté pour tous
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« Les valeurs fondatrices de notre Société – telles que le respect, l’intégrité, l’excellence – ne sont
pas seulement des mots. Elles constituent la réalité de notre quotidien et doivent s’incarner chaque
jour dans notre comportement. Les leaders mondiaux de demain seront les entreprises qui auront
intégré l’éthique dans leurs plans stratégiques comme dans leurs pratiques quotidiennes des
affaires », affirme Jean-Paul Agon, P-DG du groupe.
Et d’ajouter : « Notre stratégie de leadership est fondée sur un investissement permanent dans notre
recherche et développement ; elle permet à nos marques de proposer des produits innovants,
hautement efficaces, pratiques et agréables à utiliser, dans le respect des normes de qualité et
d’innocuité les plus élevées. Nous visons l’excellence et n’hésitons pas à nous remettre
continuellement en cause et à reconsidérer notre façon de travailler. Nous accordons une grande
valeur à l’honnêteté et à la clarté : nos publicités sont fondées sur des performances avérées,
prouvées par des données scientifiques. Nous bâtissons des relations solides et durables avec nos
clients et nos fournisseurs, fondées sur la confiance et l’intérêt mutuels. Nous agissons avec
intégrité : nous respectons les lois des pays où nous avons une activité ainsi que les pratiques de
bonne gouvernance. Nous respectons des normes comptables et de reporting élevées et nous
soutenons la lutte contre la corruption. Nous assurons à nos actionnaires une rentabilité à long terme
en protégeant et en faisant le meilleur usage des actifs de l’entreprise. »
La charte éthique made in L’Oréal
« Notre charte éthique est le document de référence de l’éthique chez L’Oréal. Elle aide les
collaborateurs à intégrer l’esprit L’Oréal dans leur travail au quotidien. La charte éthique s’adresse
à tous les salariés du groupe et de ses filiales dans le monde. Elle concerne également tous les
mandataires sociaux et les membres des comités exécutifs et de direction. Chaque collaborateur en
reçoit personnellement un exemplaire », précise-t-on chez L’Oréal.
Ce document de référence a été publié pour la première fois en 2000. Il a été mis à jour en 2007,
avec l’aide de collaborateurs issus de vint-deux pays, réunis dans des groupes de travail
internationaux en Asie, en Europe, en Amérique du Nord et en Amérique latine. Il a ensuite été
validé par chaque « patron de pays », directeur des ressources humaines et conseil juridique local
pour assurer son applicabilité dans chaque aire géographique. Pour souligner son importance, le PDG de L’Oréal a signé son avant-propos et le comité exécutif au complet a signé son introduction.
La charte éthique est régulièrement revue, dans un souci d’amélioration. Les collaborateurs sont
d’ailleurs encouragés à soumettre leurs remarques. Le « patron de pays » est garant du respect de la
charte dans son aire géographique.
Les diversités : une priorité
La diversité est une valeur fondatrice pour L’Oréal : de la composition des équipes aux produits
développés, L’Oréal place depuis toujours la diversité au cœur de ses préoccupations.
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La philosophie de L’Oréal consiste à :
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• Refléter dans ses équipes et à tous les échelons, la diversité des origines (nationalités,
origines ethniques, culturelles ou sociales) de ses clients, en cohérence avec ses bassins
d’emploi.
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• Favoriser la mixité au sein des équipes : renforcer l’accès des femmes aux postes à
responsabilité, favoriser la mixité dans les fonctions aujourd’hui trop sexuées (marketing,
industrie...) et assurer l’égalité salariale entre les hommes et les femmes.
• Favoriser l’emploi des personnes handicapées.
• Valoriser l’expérience pour anticiper l’allongement de la durée de la vie professionnelle.
• Développer une culture managériale inclusive, respectueuse de tous.
La « matrice diversités » de L’Oréal
Les initiatives de L’Oréal s’articulent autour de six dimensions prioritaires et de cinq leviers
d’action auxquels viennent s’ajouter l’action sur l’écosytème ainsi que la mesure et le pilotage de la
politique.
Le site du développement durable chez L’Oréal
Questions
www.loreal.fr.
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Toutes les informations concernant les enjeux, politiques et initiatives du groupe en matière de
responsabilité sociale et sociétale sont présentées sur le site http://www.loreal.fr/developpementdurable. Cet espace présente le développement durable en marche chez L’Oréal et offre une
actualité sans cesse renouvelée. Des fiches techniques, basées sur les indicateurs de la Global
Reporting Initiative (GRI), détaillent notamment les pratiques et résultats chiffrés du groupe.
By
1. Le concept de RSE s’applique-t-il à L’Oréal ?
2. La stratégie vous semble-t-elle alignée sur la mission ?
3. Comment caractériseriez-vous l’organisation de L’Oréal ?
4. Quel est le rôle de la culture dans le fonctionnement de l’organisation ?
5. L’organisation et la culture sont-elles alignées avec la stratégie ?
6. Comment définiriez-vous la stratégie de L’Oréal à la fois sur les plans business et
corporate ?
7. En termes de mode de croissance, la stratégie est-elle interne ou externe ?
8. La charte éthique peut-elle influencer le comportement des managers ? Si oui, comment ?
9. Pourquoi l’entreprise L’Oréal met-elle en avant la valeur de diversité ?
10. Quelle est la stratégie internationale de L’Oréal ? Comment situeriez-vous L’Oréal sur la
matrice de Bartlett et Ghoshal ?
Dossier
L’entrepreneuriat et le management des petites
entreprises
Les compétences clés à acquérir :
• Prendre la mesure d’un mode particulier de management : l’entrepreneuriat.
• Exposer les différentes définitions de la petite entreprise.
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• Comprendre son rôle dans le tissu industriel et social.
• Connaître les caractéristiques essentielles des petites entreprises.
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• Tracer les grandes voies autorisant un meilleur développement de ces entreprises.
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Pendant longtemps, le monde des petites entreprises est resté un continent inexploré parce que
négligé par les pouvoirs. Et voilà que depuis quelques années ces firmes font l’objet d’une grande
sollicitude : même pour les gestionnaires, « Small is beautiful ».
Les petites entreprises sont fort difficiles à définir en raison de leur hétérogénéité. On utilise
souvent les termes de PME ou PMI et, caractérisant ces organisations par les effectifs employés, on
fixe leur limite à 200 voire à 500 salariés. Toutefois, il existe bien des différences entre
l’entreprise artisanale où n’opèrent que le patron et un ou deux ouvriers et la moyenne entreprise
industrielle de 400 employés qui s’apparente davantage à une grande firme qu’à un artisan. C’est
pourquoi nous avons choisi de nous passer de l’adjectif « moyenne » pour ne parler que de la
« petite entreprise » par opposition à la « grande firme ».
Ce dossier ne doit pas faire oublier les célèbres entreprises de taille intermédiaire (ETI). Elles
sont mises en exergue lorsqu’il s’agit de comparer l’émergence du tissu industriel de notre voisin
allemand avec celui, moins vigoureux, que nous connaissons de ce côté du Rhin.
Introduction
A. Les caractéristiques managériales de la petite entreprise (PE)
À des degrés divers, on observe les traits suivants :
• Si la limite ne pose pas de difficulté vers le bas, certains commerçants artisans travaillant
seuls, en revanche la frontière est imprécise vers le haut. Certaines nomenclatures mettent
un terme à 200 employés, d’autres vont jusqu’à 500.
• L’organisation est simple. Dans une structure personnalisée – on l’a constaté – le travail
s’effectue par contact direct et ajustement mutuel.
• La structure est centralisée. Toutes les décisions sont prises par le patron.
• La spécialisation est faible, qu’il s’agisse de celle des employés ou de celle des
équipements.
• La stratégie apparaît peu formalisée parce que, souvent, les décisions ont pour origine
l’intuition.
• Le système d’information externe reste simpliste. Par exemple, les études de marché sont
rares et la veille technologique reste limitée.
B. Les championnes du XXIe siècle
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Nombreux sont ceux parmi les gestionnaires, les économistes ou même les hommes politiques qui
parent les petites entreprises de toutes les vertus et les promettent à un avenir florissant, puisque
certains n’hésitent pas à avancer que la grande firme est aujourd’hui condamnée.
Trois vertus sont généralement reconnues aux petites organisations :
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• La flexibilité qui permet de s’adapter aux changements les plus divers, voire les plus
inattendus.
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• La proximité signifie que l’entreprise de petite dimension entretient avec ses partenaires
proches des relations plus soutenues, plus morales, plus conviviales, en un mot plus
humaines que la grande organisation bureaucratique déconnectée des réalités locales et dont
les dirigeants n’obéissent qu’à la pure rationalité économique.
• Enfin, les petites entreprises constituent dans le monde contemporain le meilleur moteur de
développement. Dans les pays développés, elles seules créent des emplois, surtout dans les
régions périphériques. Dans les pays en développement, elles contribuent à former un tissu
économique plus solide que les grands groupes étrangers qui s’en tiennent aux exportations
de matières premières et à l’importation de quelques produits périmés ailleurs.
Les petites entreprises ont donc besoin d’un management approprié.
I. L’entrepreneuriat
On a vu, tout au long des chapitres précédents, que les managers des grandes entreprises
disposaient d’un arsenal d’outils perfectionnés et d’armes puissantes pour mettre en œuvre un
management stratégique efficace. Toutefois, ces instruments sont souvent trop lourds ou trop coûteux
pour gérer de petites unités comme les TPE réunissant moins de dix collaborateurs ou même des
structures constituées de vingt à trente employés. L’entrepreneuriat remédie à ce défaut. On définira
ce terme d’entrepreneuriat tout simplement comme le management propre aux petites entreprises.
Ce management est, tout à la fois, stratégique et opérationnel car, dans de petites unités, la
distinction entre ces deux aspects est difficile à établir. L’entrepreneuriat suppose ainsi que celui
qui le pratique possède des qualités très particulières.
A. L’entrepreneur, héros de l’entrepreneuriat
Les économistes ont élaboré la figure d’un personnage de légende : l’entrepreneur. C’est lui qui
apporte les capitaux, ou une partie des capitaux nécessaires pour faire fonctionner l’entreprise. Il
amène aussi ses compétences. Il combine ingénieusement les moyens techniques et financiers. Il
dirige les collaborateurs et organise l’entreprise. Sa stratégie est tendue vers un seul objectif :
réaliser le maximum de profit qu’il réalise en innovant continuellement.
On ajoute que ce héros doit être animé par l’esprit d’entreprise, c’est -à dire par la passion de
s’engager dans une aventure et de conduire une entreprise dont le succès n’est jamais assuré. Cette
incertitude inhérente au fait d’entreprendre implique que, comme pour tout héros, celui qui court
une telle aventure est un preneur de risques, très motivé par ses engagements. Toujours à l’affût de
nouveautés, il aime et recherche les défis.
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B. Les PIC et les CAP
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Toutes ces qualités ne sont bien évidemment pas présentes dans un seul individu de manière
identique. Il y a de nombreux types d’entrepreneurs, qui possèdent à des degrés divers les vertus
précédemment exposées.
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P.-A. Julien et M. Marchesnay ont présenté une classification basée sur la logique de l’action(55).
Selon ces auteurs, trois grandes aspirations motivent les entrepreneurs :
– la pérennité ou le souci de durer ;
– l’indépendance ou la volonté d’être autonome ;
– la croissance assimilable à un fort désir de puissance.
À partir de ces désirs, deux logiques d’action sont mises en évidence :
• Une logique d’action patrimoniale : l’entrepreneur PIC
C’est le cas d’un chef d’entreprise qui vise en priorité la Pérennité, l’Indépendance et la
Croissance. Un tel comportement est plus fréquemment répandu dans les affaires familiales, où les
dirigeants marquent une préférence pour l’investissement « en dur » (des bâtiments ou des terrains)
plutôt que pour l’investissement immatériel (formation ou communication) parce que tous ces PIC
visent à accumuler des biens matériels.
• Une logique d’action entrepreneuriale : l’entrepreneur CAP
Ce sont des chefs d’entreprise qui préfèrent valoriser leurs capitaux plutôt que d’accumuler. Ils
poursuivent une Croissance forte, recherchent l’Autonomie de décision et ne sont guère préoccupés
par la Pérennité de leur entreprise. Le CAP, tel le fondateur d’une start-up, se complaît dans un
climat agité et, si possible, porteur d’une forte expansion. Il préfère les investissements immatériels
ou encore la R & D.
L’esprit d’entreprise est plus ou moins répandu dans une population donnée.
Exemple
Les Vénitiens de la Renaissance, qui organisaient des échanges fructueux mais
aventureux avec l’Orient, étaient particulièrement bien dotés en la matière.
De nos jours, la plupart des États s’efforcent de promouvoir, avec plus ou moins de bonheur, des
politiques qui ont pour objet la stimulation de l’entrepreneuriat. Dans les régions, ils font même
assaut d’incitations financières, matérielles ou de stages de formation pour soutenir la création, le
développement ou la reprise de petites entreprises. Celles-ci connaissent certes une nouvelle
vigueur, mais n’en demeurent pas moins des êtres fragiles.
II. La fragilité des petites entreprises
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Comme les êtres vivants, les petites entreprises sont mortelles. Certes, depuis les années 1970, il
en naît plus qu’il n’en meurt. Toutefois, leur taux de mortalité infantile est impressionnant. Environ
60% d’entre elles ne dépassent pas le cap des huit ans, le pourcentage de disparition étant plus
élevé dans les premières années qu’après cinq ou six ans d’existence. Quelles sont donc les causes
de ces maux qui peuvent conduire, dans bien des cas, à la disparition ?
A. Les faiblesses managériales du chef d’entreprise
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Nous venons de constater que la littérature économique et managériale classique présentait une
figure idéalisée de l’entrepreneur. C’est ainsi qu’il devrait remplir trois fonctions à la perfection,
puisqu’il est capable de connaître l’optimum par le calcul différentiel qu’il pratique
inconsciemment :
• L’entrepreneur est un capitaliste qui rassemble des capitaux au coût le moins élevé en vue de
tirer un profit maximum servant à récompenser les risques courus.
• C’est un manager qui mobilise des facteurs de production (du matériel, des hommes, de
l’information, des technologies) et les combine de manière optimale.
• C’est un innovateur qui, rompant avec la tradition, crée de nouvelles richesses ou de
nouveaux emplois.
Or, observons la réalité. Bien rares sont les patrons de petites entreprises, comme d’ailleurs les
dirigeants des grandes, qui réunissent toutes les qualités et toutes les aptitudes pour remplir ces
trois fonctions. Ce ne sont pas des preneurs de risque (risk takers), comme le décrit la théorie mais
des hommes, somme toute assez prudents, pour ne pas dire timorés. Du reste, les banquiers
éconduisent les créateurs d’entreprise ou les petits patrons trop portés sur la prise de risque, les
prêteurs n’appréciant que les « risques mesurés ».
Trois facteurs négatifs affectent la gestion des dirigeants des petites entreprises :
• Les objectifs poursuivis par ces pseudo-héros sont plus frileux que ceux analysés par la
théorie économique classique. Ils ne cherchent ni à réaliser le maximum de profit ni à
rendre maximale la valeur de l’entreprise, comme le postulent les tenants de la théorie
financière. Ils ne cherchent pas davantage à affirmer leur volonté de puissance au fil d’une
poursuite continuelle de la croissance, comme l’imaginent les zélateurs des théories
managériales. Non, les patrons des petites entreprises, plus souvent PIC que CAP, sont plus
modestes : ils visent généralement la pérennité, la survie de leur affaire ou encore une
autonomie confortable. Ils ressemblent plus à un père de famille vieillissant qu’à un
conquérant de ces nouveaux empires que forment les parts d’un marché mondialisé.
• Le chef d’entreprise possède rarement une formation complète en management. En général, il
a acquis une compétence technique qui lui semble suffisante pour réussir. Quant à la gestion,
elle lui paraît secondaire. D’ailleurs, il la limite au domaine de la comptabilité qu’il soustraite à un expert-comptable, afin de respecter les obligations de la loi. Le créateur
d’entreprise suit parfois un stage d’initiation à la gestion mais, une fois l’affaire démarrée,
il n’a ni le temps ni l’envie, de poursuivre sa formation générale.
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• Enfin, le chef de la petite entreprise est continuellement soumis à la pression des urgences et
il ne consacre que peu de temps à la réflexion à plus long terme.
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B. Un management erratique de la petite entreprise
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Tout au long de cet ouvrage, nous avons présenté le management comme l’art de prendre des
décisions informées et rationnelles réduisant l’incertitude, grâce à des démarches méthodiques et à
des outils scientifiques. En outre, il a été suggéré qu’il était opportun d’adopter un style de décision
qui permette de faire participer les collaborateurs à la prise de décision.
Or, chaque élément de ces qualités propres à la gestion contemporaine n’est pas entièrement présent
dans les petites entreprises. Trois défauts caractérisent le plus souvent leur gestion :
• Un manque chronique d’information tout d’abord. Parce qu’il ne possède pas la connaissance
des sources de données, parce qu’il n’a pas les moyens d’acquérir systématiquement une
vaste information, parce que ses connaissances en informatique sont trop étroites, le patron
d’une petite entreprise se trouve en état permanent de myopie face à l’environnement,
particulièrement en ce qui concerne les dimensions du marketing, qu’il s’agisse du choix
des nouveaux débouchés ou de la sélection d’un nouveau segment de clientèle, par exemple.
• Il résulte de cette pauvreté informationnelle des choix incertains et parfois peu cohérents.
• Enfin, les propriétaires-dirigeants retiennent l’information qu’ils possèdent et ne font guère
participer leurs employés à la vie de la firme. On trouve donc dans ces organisations des
employés assez satisfaits de leur sort parce que leurs tâches sont plus variées que dans une
multinationale riche de procédures, mais incapables d’initiative lorsqu’il conviendrait d’en
prendre.
C. La déficience financière structurelle
Les bilans des petites entreprises s’opposent à ceux des grandes firmes par le poids plus élevé
qu’occupe le court terme. Chez les premières, le « bas de bilan » pèse plus lourd que dans les
grandes firmes. Les actifs circulants sont relativement copieux, à l’image des dettes à court terme
du passif. Une telle situation est due, tout à la fois, aux réticences des banquiers à accorder aux
petites entreprises des prêts à long terme, mais aussi au comportement des petits patrons qui, par
souci d’indépendance, refusent l’endettement à long terme. Cette particularité financière des petites
entreprises, où les liquidités sont relativement plus faibles que dans les grands groupes, entraîne
des difficultés de trésorerie fréquentes.
Comment, dès lors, donner plus de vigueur à ces petites organisations ?
III. Le diagnostic stratégique dans les petites entreprises
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Nous venons de mettre l’accent sur les spécificités essentielles des petites entreprises. Il en résulte
que le management de ces firmes particulières ne peut ressembler point par point à la pratique
stratégique et organisationnelle des grandes et des moyennes organisations. Nous soulignerons les
principales singularités d’un diagnostic managérial propre aux petites organisations, avant de
proposer des grilles d’analyse susceptibles d’aider le chef d’entreprise au cours du processus de
décision.
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A. Les dimensions du diagnostic managérial
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Un postulat erroné, selon lequel le management stratégique n’existe pas ou pire encore est inutile
dans les petites entreprises, doit être dénoncé. Le chef d’entreprise, quel que soit le statut de la
firme (artisanal, TPE, PE), possède une vue préalable sur le devenir de l’organisation dans un
avenir relativement éloigné. Toutefois, cette projection, ou plutôt cette intention, que porte le
manager n’est pas rédigée, formalisée comme elle l’est dans une grande entreprise.
Lorsqu’on fait l’effort de comprendre le contenu et l’articulation de telle ou telle intention
stratégique, en dépit des difficultés rencontrées pour la faire formuler, on trouve toujours le même
contenu de pensée, que l’on peut résumer en cinq questions :
– les fins dernières : qu’espère-t-on en s’engageant dans cette affaire et en la faisant prospérer,
compte tenu de notre expérience et de nos aspirations ?
– l’environnement : l’état du milieu externe dans lequel on évolue (la concurrence, le marché
potentiel, les sources d’approvisionnement, etc.) permet-il de juger que le but que l’on
souhaite atteindre est réaliste ?
– les moyens : la composition des équipements, des ressources financières et humaines, des
compétences, des informations nécessaires pour parvenir au but est-elle suffisante et
adaptée aux fins poursuivies ?
– les orientations : sur quelle voie doit-on s’engager pour atteindre les fins dernières ou plus
particulièrement les objectifs ?
– l’organisation : quelle structure, quelle répartition des tâches, doit-on adopter pour conduire
les opérations au terme désiré ?
Un tel schéma de réflexion peut être représenté de la manière suivante.
Figure 1. Le pentagone stratégique de la PE
On constate qu’il correspond, de manière simplifiée et synthétique, au schéma d’analyse stratégique
et organisationnel présenté précédemment.
Ce modèle appelle les commentaires suivants :
1. Les fins dernières
On souhaite signifier, par cette expression, que l’entreprise ne peut manquer d’avoir conscience de
trois dimensions :
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– le métier : ses capacités, son expérience, son « know how », son aptitude à s’adapter et à
bien gérer ses affaires,
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– la mission : les besoins qu’elle est capable de combler auprès de tel ou tel segment de
clientèle,
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– les objectifs poursuivis : ils sont, on le sait, multiples. Mais, s’agissant des petites
entreprises, la rentabilité que l’on considère comme une contrainte incontournable doit
constituer la condition de réalisation des trois grandes familles d’objectifs : la pérennité,
l’indépendance etl a croissance.
Figure 2. Les fins dernières de la PE
2. L’environnement
À la différence d’une grande firme capable de modeler le milieu où elle évolue, la petite entreprise
ne peut guère que s’adapter aux caractères de l’environnement, surtout au contexte concurrentiel et
aux attentes de la clientèle. Dépendant également de la politique menée par les institutions locales,
les chefs d’entreprise sont dans l’obligation de suivre les orientations prises par les décideurs
proches, les représentants de l’État et des collectivités territoriales.
3. Les moyens
Il est évident que ce dont le chef d’entreprise dispose pour s’adapter à son environnement et pour
réaliser ses objectifs suppose d’être inventorié avec soin, qu’il s’agisse de moyens financiers,
technologiques ou informationnels.
4. Les orientations stratégiques
Ces orientations adoptées par le manager et la petite firme sont, elles aussi, conditionnées par le jeu
des forces économiques. L’existence de la petite entreprise, sa capacité de survie dépendent avant
tout des choix de marketing judicieux. Tout d’abord il s’agit de résoudre le problème de
segmentation, à savoir la sélection d’une cible de clientèle tout à la fois suffisamment large pour
nourrir une activité rentable mais aussi quelque peu ignorée jusqu’à présent par la concurrence,
autrement dit une niche. Ensuite il convient, s’il existe néanmoins des rivaux réels ou possibles,
de choisir le créneau qui permettra de se différencier de ses concurrents. C’est le positionnement.
5. L’organisation
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Elle dépend de son dirigeant, des objectifs qu’il poursuit. Elle est aussi tributaire des caractères de
l’environnement. Nous avons en effet constaté précédemment que la structure de la firme était
dépendante des facteurs de contingence.
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Exemples
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Plus l’environnement est instable ou turbulent, plus la structure doit être souple ou
flexible. De même, le style de direction dépendra du caractère du patron, de celui du
dirigeant, de l’activité ou des particularités de la culture locale.
B. Des grilles d’analyse pour prendre une décision
Outre les caractéristiques propres aux décisions stratégiques que nous venons d’étudier, les petites
entreprises connaissent une courbe de vie dont il est nécessaire de distinguer les étapes car, à
chacune des phases, correspondent des opérations et, partant, des décisions qui leur sont propres.
Figure 3. La courbe de vie d’une PE
P.-A. Julien et M. Marchesnay proposent de regrouper ces six étapes en trois phases clés dont
chacune intègre des opérations spécifiques (jeunesse, âge adulte, vieillesse).
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Le tableau 1 rassemble toutes ces données dans une grille d’opérations qui, à chaque moment,
entraîne des décisions spécifiques selon les circonstances. Les spécificités de la décision
financière correspondant à chaque phase y sont indiquées.
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Tout ce travail d’analyse et de prise de décision permettra à quelques rares élues de devenir
moyennes, puis grandes. Un bon nombre de petites firmes resteront dans cet état, tandis que
disparaîtront les moins robustes et les moins chanceuses. Même si la démarche entrepreneuriale est
souvent exaltante, la trajectoire managériale de la petite entreprise est semée d’embûches
périlleuses.
Tableau 1. La vie de la PE et ses principales décisions
Phase clé
Étape Étude du projet
Durée
Jusqu’à 2 ans
Caractéristique
stratégique
– Études de faisabilité
– business plan
Jeunesse
Lancement
Démarrage
1 à 6 mois
6 mois à 5 ans
– Mise en œuvre du plan
– Décisions à long terme
– Mobilisation active
(jusqu’à 5 ans)
– Contrôle
– Idées de « produits » à
exploiter
– Recherche de cibles de
clientèle
– Recherche de créneaux
– Études de faisabilité :
. technique
Choix :
. marketing
– des locaux
. financière
– d’équipements
– Définir les tâches
– Les attribuer au
personnel
– Mise en place d’une
structure
Phase clé
Étape
Croissance
2 ans
Caractéristique
stratégique
Maîtriser le
développement :
changement de taille,
d’activité, de structure
Opérations
By
Maturité
Quelques mois
Indéfinie autant que
possible
Évaluer le rachat
possible par le nouveau
propriétaire
Se maintenir et / ou
croître
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Durée
Âge adulte
Reprise
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Structure
financière
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Opérations
. humaine
– d’associés éventuels
– Définir le
. juridique
– de formule de
fonctionnement
– Rencontre avec les
produit/service
opérationnel des services
stakeholders :
– de financement
et des hommes
. prêteurs
– de statut juridique
– Choisir les outils de
. associés
– de collaborateurs
gestions appropriés :
. clients
(recrutement)
. tableaux de bord
. fournisseurs
. système d’information
. collectivités
. outils de contrôle
territoriales
. outils de prévision
– Mise en œuvre du
business plan
– Négociation avec les
stakeholders
Dette à court terme : les fournisseurs, la famille du dirigeant
Dette à long terme : emprunts bancaires très faibles
Fonds propres : économies du dirigeant (80 %), subventions (20 %)
– Perfectionner les outils
de :
. veille stratégique
. gestion opérationnelle
– Évaluer de nouvelles
– Évaluer le prix de
– Se décider sur :
opportunités :
rachat de la firme par des
. l’acceptation de la
. analyse de portefeuille méthodes financières
croissance
de DAS
– Juger l’état de santé de
. son refus
. analyser les
l’entreprise
– Améliorer le style de
compétences techniques, – Décider de l’achat ou
direction
marketing, financières,
de rejeter
– Si la croissance est
humaines
– Évaluer de nouvelles
admise, alors :
– Évaluer et choisir de
opportunités
. étudier les voies
nouvelles voies
– Évaluer et choisir de
possibles
stratégiques
nouvelles stratégies
. les mettre en œuvre
– Modifier la structure si – Modifier la structure si
besoin est
besoin est
– Procéder aux réformes
de structure éventuelle
(structure personnalisée
→ structure fonctionnelle
ou transversale)
Structure
financière
Dette à court terme : fournisseurs, emprunt bancaire
Dette à long terme : « leasing », participation des collectivités
Fonds propres : apport initial, incorporation de réserves, augmentation
éventuelle du capital
Phase clé
Durée
Étapes
De quelques mois à 2 ans
Désengagement
Cession
– Vente de la firme
– Organisation de la
transmission
Abandon d’un DAS
Disparition
Abandon d’activités
Fermeture
– Calcul des
– Désinvestissement
coûts/avantages des
– Calculer :
progressif
opérations suivantes :
. la valeur de vente
– Gestion quotidienne
– désinvestissement
. le coût de transmission prudente
(vente de locaux ou
– Rechercher des
– Calculer le coût de
matériel)
repreneurs
l’abandon
– non-remplacement des . choix des repreneurs
– Évaluer les coûts
équipements obsolètes
. préparer les repreneurs psychologiques et
– recentrage des activités
sociaux
Dette à court terme : fournisseurs, quelques emprunts de trésorerie
Dettes à long terme : en forte diminution (désinvestissement)
Fonds propres : apports + réserves qui diminuent
Structure
financière
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Opérations
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Caractéristique
stratégique
Vieillesse
IV. Des remèdes pour les petites entreprises
L’examen des faiblesses natives des petites entreprises conduit à envisager trois types de
prescriptions. Les premières concernent l’amélioration des compétences des chefs d’entreprise, les
deuxièmes touchent aux mesures susceptibles d’atténuer les difficultés financières, enfin les
troisièmes portent sur l’orientation stratégique que, collectivement, peuvent adopter les dirigeants
au moment où l’économie se mondialise.
A. L’amélioration des compétences managériales des décideurs
Il convient d’organiser des stages de formation adaptés aux contraintes qui pèsent sur ces hommes ;
en connaissant bien les étapes de la vie de ces petites entreprises on peut mettre en place des
programmes adéquats. Cette dernière exigence suppose d’étendre et de multiplier les recherches
universitaires relatives à ces organisations, car le domaine des petites entreprises constitue un
territoire encore mal connu. Et ce serait une erreur que de vouloir transposer les connaissances
acquises dans les grandes firmes pour gérer les petites. Les différences entre les unes et les autres
ne sont pas seulement de degré, mais plus profondément de nature.
B. Une nécessaire adaptation du financement
Pour remédier au mal financier chronique (coût trop élevé du financement, manque de liquidité),
plusieurs remèdes sont envisageables.
À nouveau, la formation est nécessaire, afin d’apprendre aux créateurs d’entreprise et aux patrons
déjà confirmés que le fonds de roulement se gère au rythme de la croissance et qu’un tel modelage
du bilan est tout simplement une condition de survie.
La création d’entreprise
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Une action auprès des banques, conduite par les pouvoirs publics, peut aussi être menée. En effet,
les institutions prêteuses doivent jouer plus qu’elles ne le font un rôle de conseiller auprès de leurs
clients. Sur un plan managérial, il est plus important de se préoccuper du bon équilibre entre le
besoin en fonds de roulement et le fonds de roulement que de réunir de riches cautions. Enfin, les
pouvoirs institutionnels (politiques, régionaux, professionnels, etc.) ne doivent pas hésiter à
susciter la création de sociétés de capital-risque qui proposent aux dirigeants des petites
entreprises des modalités de financement autres que des prises de capital, auxquelles les patrons
restent fondamentalement hostiles.
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La création d’entreprise est l’acte fondateur de l’entrepreneuriat.
On distingue trois types de création :
– la création absolue. L’entreprise et l’entrepreneur n’ont pas de prédécesseurs ;
– la création périphérique. Une entité nouvelle, juridiquement autonome, est créée, mais
elle dépend économiquement d’une autre institution, c’est le cas d’une filiale ou d’une
franchise ;
– la reprise. L’entreprise ancienne subsiste, seul le propriétaire change.
Si l’entrepreneuriat constitue une activité créatrice stimulante, mais c’est aussi un jeu
dangereux : plus de la moitié des entreprises créées disparaissent avant l’âge de cinq ans.
Certains entrepreneurs défaillants reprendront des initiatives de création, d’autres, hélas, seront
ruinés. Il importe donc d’étudier avec soin le processus entrepreneurial.
Les modalités de la création d’entreprise
L’émergence de l’idée
L’envie d’entreprendre se trouve chez des personnes expérimentées qui désirent changer leur vie
professionnelle, comme chez des jeunes gens ou des demandeurs d’emploi souhaitant trouver une
activité. Ce sont ceux qui possèdent déjà des compétences affirmées et de l’expérience qui ont le
plus de chance de réussir. Des organismes publics soutiennent certaines initiatives techniques,
par exemple l’ANVAR (Agence nationale pour la valorisation de la recherche), tandis que se
créent des centres de formation, des incubateurs de projets, destinés à transmettre les
connaissances et à soutenir le créateur.
L’élaboration du projet
L’idée initiale, aussi novatrice soit-elle en apparence, doit trouver un débouché solvable.
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Le processus entrepreneurial
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L’étude commerciale vise donc, à ce stade, à trouver et à mesurer les capacités de la niche où
l’entrepreneur aura le plus de chance de réussir. Sur ces bases, l’étude technique et financière a
pour objet d’évaluer les besoins en matériels, en hommes et en investissements. Le plan de
financement est particulièrement complexe à établir puisque l’entrepreneur, outre son apport,
doit orienter sa prospection vers les aides publiques multiples et paperassières, et vers les
apports éventuels des sociétés de capital-risque.
Enfin, l’étude juridique (statut fiscalité) vient clore ce travail de préparation minutieuse, qui est
rassemblé dans un business plan. Pareille synthèse a pour objet de mettre en lumière les résultats
prévisionnels sur une période suffisamment longue (3 à 5 ans) dans le but d’allécher les
investisseurs potentiels ou tout simplement pour rassurer le banquier.
Le démarrage de l’activité
Il suppose un engagement total du créateur qui doit par lui-même pratiquer tous les métiers : la
production, le commercial, la finance et bien entendu le management stratégique qu’exige
l’activité poursuivie.
Il convient de saisir toutes les opportunités, aussi bien en aval en gagnant de nouveaux clients
qu’en amont avec des partenaires possibles. En effet, la réussite des partenariats provient
souvent de l’existence de réseaux. L’émergence de ceux-ci est favorisée par le regroupement des
TPE nouvellement créées dans des structures appropriées : les pépinières d’entreprises, parfois
rassemblées à proximité des centres de recherche dans des technopôles. Devant les risques
courus par l’entrepreneur, il est nécessaire de mettre en œuvre tous les moyens pour faire de
l’entrepreneuriat durable.
Les grandes firmes ont un rôle à jouer dans un tel processus créatif. Elles peuvent encourager un
de leurs salariés à créer, par essaimage, une activité destinée à être externalisée. Elles peuvent
aussi proposer à des créateurs en puissance de développer un projet dormant. Par exemple,
Danone proposera de créer des marques de boissons identitaires (du chouchen en Bretagne, du
cidre de ferme en Normandie) à des jeunes diplômés en gestion. Cette formule se rapproche de
l’intrapreneuriat, qui a pour but de stimuler, à l’intérieur de l’entreprise, toutes les initiatives
créatrices des collaborateurs.
Le capital risque (Venture Capital) au service des start-up
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Le terme désigne un mode de financement de jeunes entreprises qui présentent des projets à fort
potentiel, particulièrement dans le domaine des TIC. Des investisseurs (business angels) se
réunissent pour proposer à des entrepreneurs du capital et de l’assistance en management. Leurs
réseaux de relations et de compétences proposent une aide précieuse aux créateurs. On distingue
plusieurs phases dans le processus de développement. Il s’accompagne de besoins de
financement particuliers :
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– le capital d’amorçage (seed capital) a pour but de financer les études jusqu’au business
plan ;
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– le capital de lancement a pour objet de lancer la firme (start-up) jusqu’à ce qu’elle
atteigne un premier niveau d’activité viable ;
– au bout de deux ou trois ans, l’entreprise (second stage) éprouve de nouveaux besoins
pour couvrir le besoin en fonds de roulement qu’engendre sa croissance. On fait alors
appel à de nouveaux financements (expansion capital).
V. Les orientations stratégiques à l’heure de la mondialisation
Tout le système économique, à l’échelle mondiale, se réorganise sous l’effet des bouleversements
multiples, qu’il s’agisse des crises successives, des progrès technologiques, du développement des
moyens de transport et de télécommunication ou encore de la mutation des modes de production et
de commercialisation qui conduisent à la mondialisation progressive des échanges.
Il en résulte une recomposition du tissu économique et plus particulièrement une tendance à la
« miniaturisation » de ses composantes. Toutefois, ce dernier phénomène, loin d’être le résultat
d’un affaiblissement des grandes entreprises est, au contraire, provoqué par les stratégies mises en
place par les puissants groupes pour adapter leurs activités aux nouvelles conditions qu’ils ont euxmêmes créées. Ces stratégies, on l’a souligné précédemment, se fondent sur l’idée d’externalisation
d’activités. Elles consistent, pour les grandes firmes, à transférer une partie de leurs activités vers
d’autres acteurs (sous-traitance).
Exemple
Des petites entreprises peuvent être prêtes à accepter de réaliser certaines tâches pour
le compte d’autres organisations. Elles sont souvent mieux à même de les accomplir
de façon efficace.
La mise en réseau, au sens de maillage des activités, joue un rôle essentiel dans ces stratégies, et
par conséquent dans le processus de mondialisation de l’économie. Dans pratiquement tous les
secteurs d’activités, on assiste en fait, depuis quelques années, à la mise en œuvre de telles
stratégies. Elles aboutissent à réduire les grandes firmes et à leur substituer des réseaux de petites
entreprises organisées autour d’elles mais dirigées par elles.
Quel avenir est alors possible pour les petites entreprises ?
On peut les classer en deux catégories :
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– celles qui ont su ou pu s’intégrer à une stratégie d’externalisation des grandes firmes. Elles
ont, en principe, de meilleures chances de survie et de développement que les secondes, car
leur partenariat avec de grandes firmes en fait des acteurs de la mondialisation ;
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– les autres, en revanche, sont exclues du processus de globalisation et en deviennent les
victimes potentielles. Une voie de salut existe cependant pour ces malheureuses, la seule
probablement, celle de la mise en réseau de leurs activités. Ces tissus stratégiques leur
permettent de faire collectivement ce qui leur est interdit à titre individuel : atteindre la
capacité stratégique nécessaire et rejoindre ainsi le club des élèves mondialisés.
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Quels que soient les progrès du phénomène de mondialisation, des besoins spécifiques subsistent
tandis que de nouveaux apparaissent ; la satisfaction des uns et des autres fera l’objet de marchés
étroits et donc non mondialisés. De petites entreprises, à la vocation et aux capacités purement
locales, sont mieux à même de survivre dans ces niches que les firmes mondialisées, mais à deux
conditions :
– spécialiser leurs activités dans la production de biens ou de services répondant à ce type de
besoins spécifiques ;
– trouver un débouché suffisant à proximité de leur lieu d’implantation.
La mise en œuvre des stratégies de participation à la mondialisation (le satellite ou le conquérant)
se heurte aux obstacles structurels propres aux petites entreprises que nous avons évoqués
précédemment. Ceci explique pourquoi, bien que potentiellement mondialisables, peu d’entre elles
sont effectivement mondialisées. Élaborer un plan stratégique d’envergure exige de la part des
dirigeants un ensemble de qualités entrepreneuriales, de compétences et de moyens que très peu
d’entre eux sont à même de réunir.
Il leur faut, en effet, pouvoir prendre conscience de la nécessité d’un tel projet, avoir la volonté de
s’y engager, et posséder la culture managériale nécessaire pour concevoir la stratégie et la mener à
bien.
La formation au management a encore de beaux jours devant elle.
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Tableau 2. Les stratégies des PE
Glossaire
Acquisition. Mode de croissance d’une entreprise par lequel cette dernière absorbe une autre firme.
La recherche de synergie constitue la principale raison d’une telle opération.
Adéquation stratégique (Strategic Fit). État de relations complémentaires entre plusieurs DAS à
l’intérieur d’un portefeuille (fit) qui engendre, en principe, un avantage concurrentiel. Notion
proche de la synergie.
Adhocratie. Organisation adaptable, innovatrice, coordonnée par ajustement mutuel.
Agenda partagé. Application informatique d’un intranet permettant la mise en ligne des agendas
des membres d’une entreprise et facilitant, par exemple la fixation automatique de réunions.
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Ajustement mutuel. Mécanisme de coordination reposant sur le contact direct, souvent informel,
entre les membres de l’entreprise.
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Alignement managérial. Cohérence entre les différentes composantes du management : stratégie,
systèmes d’information, structures, système d’animation, contrôle.
By
Alliances stratégiques. Accords de coopérations conclus entre firmes potentiellement concurrentes
qui conservent leur indépendance et s’entendent pour gérer un projet commun.
Anticipation. Capacité de prévoir des évolutions de l’environnement, leurs conséquences sur
l’entreprise et de prendre des décisions en conséquence.
Apprentissage (Learning). Phénomène qui laisse à penser que les firmes apprennent en accumulant
des savoirs, par répétition des mêmes activités. Pareille répétition susciterait une diminution des
coûts donc engendrerait un avantage concurrentiel.
Apprentissage individuel. Acquisition de compétences par une personne.
Architecture stratégique. Carte du futur élaborée en terme de ressources qui créent des ressources
nouvelles. Plus concrètement, partage de savoirs en vue d’élaborer des produits nouveaux.
Apprentissage organisationnel. Processus par lequel les membres de l’entreprise accumulent des
connaissances, développent leur capacité à les interpréter et à les mémoriser.
Attrait du marché. Pouvoir d’attirance exercé par un marché. Il ne se limite pas au taux de
croissance mais prend en compte d’autres variables, par exemple la taille, le prix, la concurrence,
la profitabilité et la maturité, les capacités de différenciations, etc., dont on évalue le score sous
forme d’une moyenne pondérée.
Audit stratégique. Évaluation a posteriori de la stratégie. Opération destinée soit à mieux
comprendre la position concurrentielle de l’entreprise, soit à améliorer le processus de décision.
Autorité fonctionnelle. Autorité s’exerçant en dehors de la ligne hiérarchique et reposant sur les
compétences spécialisées.
Autorité hiérarchique. Autorité s’exerçant dans le cadre d’une ligne hiérarchique.
Autorités de régulation. Instances (ART, CSA, etc.) spécifiques à certains secteurs
(télécommunications, audiovisuel, énergie...) intervenant pour limiter les effets du libre jeu de la
concurrence.
Avantage compétitif (avantage concurrentiel). S’observe quand une entreprise crée plus de
valeur économique que ses concurrents dans un DAS. La valeur économique est la différence entre
la valeur perçue par les clients et les coûts, généralement mesurer par le profit. L’avantage
compétitif est le résultat d’une meilleure maîtrise des ressources et compétences, d’une meilleure
stratégie, d’une implémentation de la stratégie plus efficace.
Avantage compétitif durable. Se maintient dans le temps car les sources de l’avantage compétitif
sont difficilement imitables par les concurrents.
Avantage compétitif éphémère. Dans un contexte d’hypercompétition, les avantages compétitifs
sont de plus en plus éphémères du fait de la disparition des barrières à l’entrée et de la remise en
cause permanente des champs de compétition entre entreprises.
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Balance organisationnelle. Équilibre entre différenciation et intégration organisationnelle.
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Balancier stratégique. Aller-retour dans les stratégies de portefeuille d’activités consistant à
passer d’une stratégie de spécialisation à une stratégie de diversification, pour revenir, après avoir
subi de mauvais résultats, à une spécialisation.
Barrières à l’entrée. Voir Obstacles à l’entrée.
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Benchmarking. Comparaison des modes de fonctionnement de l’entreprise aux pratiques d’autres
entreprises (en dehors ou dans le secteur) considérées comme constituant des références
d’excellence.
Biais cognitifs. Déformation de la perception de la réalité imputable aux cartes cognitives et aux
schémas mentaux du manager résultant de sa formation, de son expérience et de ses succès / échecs.
Boussole stratégique. Outil permettant de situer une stratégie business sur deux axes : celui de la
valeur perçue relative par rapport à la concurrence ainsi que celui du prix relatif par rapport à cette
même concurrence.
Bureaucratie. Mode d’organisation reposant sur la standardisation, la formalisation, la
centralisation et la spécialisation.
Business ethics. Voir Éthique d’entreprise. Les Anglo-Saxons, à la différence des Français,
n’emploient pas le terme de morale et s’en tiennent à l’éthique (ethics). Les notions de « Business
ethics » et de « Corporate ethics » revêtent le même sens et peuvent être confondues.
Business plan. Document de synthèse présentant une stratégie ou un projet et dont l’objectif est de
convaincre les interlocuteurs de sa pertinence et de sa qualité.
Capacités dynamiques. Aptitudes des managers à intégrer des ressources, à les reconfigurer, à en
rechercher de nouvelles, à mobiliser des compétences de façon à faire face aux exigences
renouvelées de l’environnement.
Carte cognitive. Représentation des relations de causalité perçue par des décideurs. Exemple : un
livre invendu chez un libraire engendre des coûts de logistique supplémentaires chez l’éditeur. De
tels schémas postulent que des décisions ne s’appuient pas sur des faits pour décider, mais sur des
croyances.
Centre de profit. Entité autonome d’une organisation dont le responsable est jugé sur le solde de
son compte de résultat.
Chaîne de valeur. Analyse des sources de l’avantage concurrentiel ou des faiblesses au sein des
activités principales et de soutien de l’entreprise.
Changement. Réponse des managers aux pressions multiples et évolutives de l’environnement.
Plus récemment, modification apportée à la firme à la suite d’un reenginering.
Chronocompétition. Création d’un avantage concurrentiel reposant sur la maîtrise du temps au plan
opérationnel ou stratégique.
Clan. Mode d’organisation où l’adhésion de chacun repose sur un ensemble de valeurs partagées.
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Comité. Mécanisme de coordination horizontale par opposition à la hiérarchie (mécanisme
d’intégration verticale).
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Compétences. Capacités à déployer des ressources pour atteindre un objectif ; elles reposent sur
les processus organisationnels de l’entreprise et peuvent constituer un avantage concurrentiel.
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Compétences de base. Apprentissage collectif de la manière de coordonner diverses compétences
de production et d’intégrer de multiples courants technologiques. Ces compétences, également
appelées « compétences fondamentales », sont composées de quatre facteurs : les savoirs, les
systèmes techniques, les systèmes de management, les valeurs et normes.
Compétitivité. État d’une entreprise capable d’affronter avec succès les concurrents grâce à la
création d’avantages concurrentiels.
Concentration. Synonyme de stratégie de niche. L’entreprise vise une cible étroite qui ignore les
concurrents. Voir Focalisation.
Contingence. Désigne des éléments imprévisibles qui ne sont pas marqués par la nécessité.
Continuous morphing. Dans un contexte d’hypercompétition, processus de modification
permanente de l’activité, des ressources et compétences, de la structure et de la stratégie, alimenté
par le développement de capacités dynamiques et de la flexibilité stratégique.
Contrôle. Ultime étape du processus de management consistant à comparer les objectifs et les
résultats.
Coopération. Synonyme de partenariat ou alliance stratégique, à savoir : accords liant deux ou
plusieurs firmes qui mettent en commun des ressources et compétences en vue d’atteindre un but
commun.
Coordination. Mode de collaboration réalisé entre des services et des individus de l’entreprise.
Elle rend cohérentes et synchronise les actions des services. La hiérarchie constitue une forme de
coordination verticale, mais cette collaboration nécessaire est plutôt assurée par des relations
horizontales, sous forme de comités, par exemple.
Coordination distancielle. Utilise les TIC (technologies de l’information et de la communication)
telles que la messagerie électronique, les visioconférences, les réunions téléphoniques, les
intranets. S’oppose à la coordination présentielle, qui repose sur la présence effective des
participants.
Corporate ethics. Voir Business ethics. Les deux termes sont employés sans distinction.
Corporate Social Responsability. Vision d’une entreprise qui se donne (à laquelle on attribue ?)
dans ses préoccupations une dimension large, étendue aux aspects environnementaux et à l’insertion
dans la société.
Courbe en S de la diffusion de l’innovation. Représentation graphique du processus de diffusion
d’une innovation identifiant trois phases : la phase d’apprentissage, la phase d’explosion et la
phase de maturité.
Coût de transfert. Coût supporté par un client quand il change de fournisseur. Les coûts de
transfert constituent une barrière à l’entrée dans un secteur.
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Croissance externe. Stratégie de développement reposant sur l’acquisition par l’entreprise de
capacités existantes par absorption, fusion, acquisition.
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Croissance interne. Stratégie de développement reposant sur la création par l’entreprise de
capacité nouvelles, par investissement et recrutement de personnel.
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CRM. (Custumer Relationship Management) Application informatique prenant en charge la
planification, l’organisation et le contrôle des activités avant et après vente.
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Culture organisationnelle. Ensemble cohérent de postulats fondamentaux qu’un groupe donné s’est
inventé, a découvert ou a développé en apprenant à affronter les problèmes afférents à l’adaptation
externe ou à l’intégration interne.
Culture stratégique. État d’esprit caractérisant une entreprise capable d’anticiper, de décider et de
mobiliser.
Customisation. Stratégie consistant à personnaliser les produits ou services en fonction des
caractéristiques du client.
Cycle de vie. Notion visant à représenter une succession de phases qui rappellent les étapes de la
vie. L’évolution est généralement composée de cinq phases : la gestation, la naissance, la
croissance, la maturité et le déclin.
Décentralisation. Mode d’orientation d’une firme qui repose sur une division du travail de
direction. Une décision est décentralisée lorsque des personnes, situées à des niveaux hiérarchiques
plus ou moins élevés, doivent effectuer seules des choix.
Décision programmée. Choix répétitif et routinier pour lequel on dispose d’une procédure
appropriée.
Décision stratégique. Processus par lequel la direction générale modifie l’orientation à long terme
des activités de l’entreprise.
Dégel (ou maturation). Première étape du changement correspondant à la prise de conscience par
les acteurs de la nécessité de changer.
Délocalisation. Transfert d’activités vers des pays bénéficiant d’un avantage compétitif en raison
de coûts plus bas, de compétences technologiques ou de perspectives de développement
commercial.
Delphi (méthode). Technique de prévision fréquemment utilisée dans les sciences du management.
Elle consiste à faire effectuer des prévisions par un groupe structuré d’experts. Réalisées sur la
base de questionnaires successifs, ces prévisions sont généralement plus fiables que celles
effectuées par des individus isolés ou par des groupes non structurés. Cette méthode projective vise
à identifier des convergences d’opinion et à dégager un consensus.
Déracinement. Deuxième étape du changement, rupture par rapport à la situation précédente, qui
traduit la mise en œuvre du changement.
Déréglementation. Réduction ou suppression des interventions publiques dans la vie des
entreprises. Exemple : suppression de contrôle des prix ou ouverture qui permet à toutes les
entreprises d’avoir accès à ce qui était avant un monopole.
Dérégulation. Synonyme de déréglementation.
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Désengagement. Stratégie corporate consistant à désinvestir dans un domaine d’activité afin
d’affecter les ressources à de meilleurs emplois.
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Désinvestissement. Stratégie consistant à arrêter l’exploitation d’un DAS.
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Développement durable. Développement qui satisfait les besoins de la génération actuelle sans
priver les générations futures de la possibilité de satisfaire leurs propres besoins. Il repose sur le
respect des droits de l’homme, l’interdiction du travail forcé et du travail des enfants, le
développement d’une politique environnementale. Certaines entreprises font de ce principe une
stratégie.
Diagnostic fonctionnel. Diagnostic reposant sur l’étude des forces et des faiblesses des fonctions
et des processus de l’entreprise.
Diamant de Porter. Métaphore permettant de mesurer « l’éclat », l’attractivité d’un pays ou d’une
région pour les entreprises désireuses de s’y implanter.
Différenciation. Stratégie consistant à rechercher un avantage compétitif autre que le prix. Elle
permet de dégager des profits supérieurs à ceux de la moyenne du secteur d’activité.
Différenciation organisationnelle. Conséquence de la spécialisation du travail sur les plans du
comportement des individus et de l’organisation des services.
Direction par objectif (DPO). Méthode de management par laquelle un responsable de poste se
voit attribuer, par la direction générale, des objectifs qu’il doit atteindre.
Direction participative par objectif (DPPO). Objectifs négociés entre la direction générale et le
responsable du poste.
Diversification. Stratégie corporate consistant à mobiliser ses ressources dans plusieurs domaines
d’activité.
Domaine d’activité stratégique (DAS). Ensemble d’activités homogènes menées par une
entreprise et dont les caractéristiques concurrentielles proches font qu’elles doivent subir un
diagnostic stratégique unique en vue de la définition d’une stratégie.
Downsizing. Dégraissage, c’est-à-dire réduction du nombre d’employés dans une entreprise dans le
but d’améliorer la productivité et de réduire les coûts. Le downsizing est souvent la conséquence
d’un reenginering. Il risque d’entraîner des effets négatifs auprès du personnel (perte de confiance,
démotivation) comme dans l’environnement externe (image négative de la firme).
Écart stratégique. Différence entre l’objectif (ce qui est visé) et la prévision résultant de la simple
extrapolation du passé.
Économie collaborative. Ensemble d’activités qui visent à produire de l’activité en commun. Elle
s’appuie sur une organisation plus horizontale que verticale. Elle consiste à mutualiser des biens
(covoiturage), des espaces (colocation), des outils (imprimantes 3D) ou encore des capitaux
(crowdfunding). Elle doit son développement à l’utilisation de TIC permettant d’améliorer la
créativité collective et la productivité.
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Économie de champ. Ensemble des gains engendrés par le partage dans une même firme des
moyens communs entre des activités différentes. Par exemple, le même service de R & D travaillant
pour plusieurs divisions.
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Économie d’échelle. Diminution des coûts résultant de l’étalement des charges fixes sur des
volumes plus importants (effet de série).
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Économie numérique. Regroupe le secteur des activités liées au numérique (télécommunication,
audiovisuel, logiciel, Internet, réseaux informatiques, etc.).
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Écosystème d’affaires (ESA). Communauté économique composée d’organisations et d’individus
en interaction qui produisent des biens et des services. Les membres de l’ESA sont les fournisseurs,
les producteurs, les concurrents et les autres parties prenantes intéressées.
Effet de levier. Effet positif ou négatif de l’endettement sur les résultats financiers d’une firme. Si
le prix des capitaux empruntés est faible, plus l’entreprise s’endette, plus sa rentabilité financière
est bonne lorsque les investissements sont judicieux.
Effets d’expérience. Diminution des coûts résultant de l’amélioration des procédés due aux effets
d’apprentissage.
E-learning. Intégration des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans les
processus de formation.
Enlisement dans la voie moyenne. Idée selon laquelle une entreprise qui cherche à suivre
plusieurs stratégies aux exigences contradictoires est moins performante.
Enracinement. Voir Regel.
Entrant potentiel. Entreprise susceptible d’entrer dans le secteur et dont la venue est le cas
échéant freinée par les obstacles à l’entrée.
Entrepreneur. Personnage mythique des théories économiques, dont il est le héros. Il possède
quatre caractéristiques : il apporte des capitaux, il organise l’entreprise, la dirige et, saisissant des
opportunités, il apporte quelque chose de neuf (l’innovation). Les managers possèdent rarement
toutes ces caractéristiques, ils ne sont généralement pas des apporteurs de capitaux au sens strict,
ils ne sont d’ailleurs pas davantage des innovateurs permanents.
Entrepreneuriat (Entrepreneurship). Aptitude d’un individu à prendre des risques et à engager
ses ressources et ses compétences en vue de s’investir dans une aventure : la création d’une
entreprise.
Entreprise virtuelle. Entreprise qui réduit son degré d’intégration verticale jusqu’à la limite où
elle perdrait son identité. Grâce aux progrès des TIC, de nombreuses tâches sont effectués par des
partenaires qui rendent l’entreprise virtuelle plus agile donc plus réactive.
ERP (Enterprise Resource Planning). Progiciel de gestion intégré (PGI) constituant un puissant
facteur d’intégration organisationnelle.
Esprit d’entreprise. Aptitude d’une personne (l’entrepreneur), voire d’un groupe social, à investir
des capitaux et à s’investir dans une entreprise. L’entrepreneuriat en est la forme moderne.
Essaimage. Stratégie consistant, souvent pour une grande entreprise, à favoriser le départ de ses
salariés en les soutenant dans une démarche de création d’entreprise. Cette stratégie (spin-off)
s’inscrit dans une double perspective de réduction durable d’effectif et d’externalisation.
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Éthique d’entreprise. Voir Business ethics. Ensemble de règles de conduite admises par la
communauté des gestionnaires, en vue de réaliser certaines fins.
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Étoile de la diversification. Représentation graphique des compétences requises pour se
diversifier dans un nouveau domaine d’activité stratégique
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Étoile sectorielle. Représentation graphique de l’intensité concurrentielle et de l’influence
respective du pouvoir de négociation des fournisseurs, des clients, des menaces des substituts et
des nouveaux entrants et de la rivalité entre les firmes présentes.
Éventail de subordination. Nombre de personnes rattachées à un supérieur hiérarchique.
Externalisation. Stratégie consistant à confier à des partenaires certaines tâches d’un domaine
d’activité.
Facteurs clés de succès (FCS). Caractéristiques que l’entreprise doit maîtriser pour s’imposer
dans un secteur.
Faisabilité stratégique. Vérification de la cohérence interne des décisions stratégiques par rapport
aux ressources et aux compétences de l’entreprise et de leur cohérence externe par rapport aux
attentes du marché.
Filtre cognitif. Déformation de la perception des événements par les managers résultant de leur
culture, leur formation, l’histoire de l’entreprise, etc.
Finalisation. Voir Processus de finalisation.
First mover. Stratégie consistant à être le premier à innover sur un marché par opposition aux
suiveurs.
Flexibilité. Aptitude d’une entreprise à s’adapter rapidement, économiquement et quasiment
automatiquement aux fluctuations attendues de l’environnement.
Focalisation. Stratégie de niche qui consiste à repérer un segment étroit de clientèle et à acquérir,
en s’adressant à cette cible, un avantage concurrentiel soit grâce à une domination par les coûts,
soit au terme d’une différenciation.
Forces de l’entreprise. Ensemble d’avantages comparatifs de la firme qui assurent sa domination
sur les concurrents ; on les oppose aux faiblesses qui désignent l’ensemble des avantages de la
concurrence.
Formalisation. Recours à l’écrit pour la définition des rôles et la communication.
Fusion-acquisition. Opération par laquelle plusieurs entreprises mettent en commun leur patrimoine
pour ne former qu’une seule firme.
Globalisation. Imbrication des stratégies des firmes et des politiques économiques nationales,
voire macro-régionales (UE, ALENA, etc.) dans un marché mondial.
Gouvernance. Mode de gouvernement de l’entreprise qui met l’accent sur les relations
préférentielles soit avec les stakeholders, soit avec les shareholders. On opposera alors une vision
partenariale (premier cas) à une vision actionariale (second cas).
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Gouvernance d’entreprise. Structures, procédures, pratiques qui précisent le fonctionnement des
organes de direction de l’entreprise de façon à ce que soient préservés les intérêts de toutes les
parties prenantes.
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Groupe stratégique. Entreprises en concurrence et proches les unes des autres car partageant des
positionnements stratégiques voisins.
Hiérarchie. Définition des relations verticales entre les supérieurs et les subordonnés.
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Holding. Société mère qui contrôle plusieurs filiales.
Hypercompétition. Environnement concurrentiel caractérisé par un haut degré d’incertitude, par
des changements brutaux et importants.
Identité. Représentation que les collaborateurs et les stakeholders d’une firme se font d’une
organisation.
Idiosyncrasie. Disposition personnelle à réagir à l’action d’un événement.
Impartition. Partenariat entre plusieurs entreprises dont certaines décident de faire faire aux autres
ce qu’elles faisaient auparavant.
Incrémentalisme. Stratégie menée pas à pas en acceptant les retours et les détours plutôt que de
vouloir atteindre directement les objectifs.
Industrie. Ensemble d’entreprises présentes sur le même DAS.
Information. Élément de connaissance diminuant l’incertitude où se trouve le décideur. C’est donc
une ressource qui procure un avantage concurrentiel. L’entreprise la détient sans la partager.
Innovation. Mise en œuvre d’inventions, de découvertes scientifiques qui se concrétisent par des
produits ou services nouveaux, par des procédés techniques ou processus pour améliorer
l’accomplissement d’une tâche ou la réalisation d’un objectif.
Innovation technology driver (ou technology push). Résultat des investissements réalisés par les
entreprises en recherche fondamentale, en invention et en développement.
Innovation market driven (ou market pull). Résultat de la réponse aux attentes du marché.
Intégration. Stratégie consistant à développer le portefeuille d’activités vers les fournisseurs
(intégration amont) ou vers les distributeurs et clients (intégration aval).
Intégration organisationnelle. Mécanismes permettant de maintenir l’unité et la cohérence interne
de l’entreprise et de compenser les effets de différenciation.
Intelligence économique. Activités coordonnées de recherche, traitement, diffusion des
informations sur l’environnement susceptibles d’impliquer des changements stratégiques et
opérationnels de l’entreprise.
Intensité concurrentielle. Modèle dit des « 5+1 forces » de Porter qui mesure la vigueur ou le
caractère atone de la compétition à l’intérieur d’un secteur, d’un DAS particulier.
Intention stratégique. État mental désignant les aspirations stratégiques des dirigeants d’une
entreprise. Elle dépend d’une vision stratégique préalable.
Internationalisation. Opération qui vise à étendre les activités de l’entreprise « au loin ».
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Intrapreneuriat ou intrapreneurship. Forme d’entrepreneuriat interne favorisée par la direction
générale qui diversifie ses activités.
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Joint-venture. Association, au sein d’une structure juridique, d’une entreprise avec un partenaire
étranger facilitant la réalisation d’un projet industriel et / ou commercial commun, par la mise en
commun de ressources et de compétences complémentaires. Elle est fréquemment utilisée dans les
pays présentant de fortes barrières à l’entrée.
Knowledge Management. Gestion des connaissances dans l’entreprise destinée à adapter la
stratégie à un environnement tumultueux.
LBO (Leverage Buy Out). Opération par laquelle une ou plusieurs entreprises en acquièrent un
autre au terme d’un fort endettement. Le nom « leverage » suggère qu’un effet bénéfique de levier
est recherché.
Leader. Personne disposant d’un pouvoir formel et du charisme personnel lui permettant
d’influencer et de mobiliser une équipe, voire une entreprise.
Leadership. Style de direction qui peut aller du plus despotique au plus démocratique.
Lean Management. Méthode (en français, « management minceur »), prisée des entreprises en
période de crise et mise en œuvre par les consultants, qui vise à réduire tous les coûts de
fonctionnement de l’ensemble des activités de la chaîne de valeur.
Learning Mix. Politique visant à étendre les connaissances et à les partager dans l’entreprise.
Learning Organization. Organisation dont les dirigeants visent à étoffer et à gérer les
connaissances en vue d’innover en permanence.
Légitimité. État par lequel une entreprise est considérée comme légitime, c’est-à-dire admissible,
permise, voire utile, par la société.
Ligne hiérarchique. Représentation des différents niveaux séparant la direction générale des
opérationnels.
Longue traîne (long tail). Stratégie reposant sur la distribution en ligne de gammes extrêmement
larges de produits vendus en petites quantités.
Low cost. Stratégie qui consiste à obtenir un avantage concurrentiel grâce à des coûts inférieurs à
ceux des rivaux.
Management. Ensemble des décisions de stratégie et d’organisation. Le processus de management
est alimenté par le système d’information et suit les phases de finalisation, organisation, animation,
contrôle.
Management européen. Management reposant sur une préoccupation plus marquée pour la prise
en compte de l’environnement, de l’homme et de la responsabilité sociale de l’entreprise, plus
sensible aux autorités gouvernementales, plus tolérant aux diversités culturelles, plus ouvert que le
management d’inspiration nord-américaine.
Management opérationnel. Ensemble des tâches consistant à exploiter à court terme le potentiel
de développement créé dans le cadre de la stratégie.
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Management par les processus. Façon de gérer qui consiste à mettre l’accent plus sur la qualité
du processus qui conduit au résultat que sur le résultat lui-même. Il s’agit d’une philosophie du
pilotage de la performance qui vise à l’amélioration de la qualité et à la diminution des coûts.
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Management stratégique. Ensemble des tâches relevant de la direction générale, qui ont pour
objectifs de fixer à l’entreprise les voies de son développement futur tout en lui donnant les moyens
organisationnels d’y parvenir.
Maturation. Voir Dégel.
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Matrice de portefeuille d’activités. Représentation graphique des domaines d’activités de
l’entreprise reposant sur les deux dimensions atouts de l’entreprise et attraits de l’environnement.
Mémoire organisationnelle. Stock de connaissances acquises de l’entreprise et retenue en vue
d’une utilisation ultérieure. Elle réside dans les mémoires individuelles et dans des procédures
formalisées.
Mimétisme managérial. Comportement consistant à prendre des décisions par imitation de ce que
font des entreprises de référence ou en fonction des modes managériales.
Mobilisation. Actions managériales consistant à susciter l’adhésion et l’implication des membres
de l’entreprise à ses finalités.
Modularisation (ou fragmentation) de la chaîne de valeur. Cette expression décrit les
possibilités techniques et organisationnelles permettant de fragmenter un système de production.
Les différentes étapes de la chaîne de la valeur sont ainsi assurées par différentes entreprises
indépendantes.
Morale des affaires. Voir Éthique d’entreprise. Bien que certains philosophes aient parfois
distingué les deux termes, le mot « morale » (issu du latin) revêt le même sens que le mot
« éthique » (issu du grec) dans l’univers des gestionnaires. Ainsi, les expressions « morale des
affaires » et « éthique d’entreprise » sont employées indistinctement.
Netchising. Moyen de développement international, proche du franchising. Il consiste à utiliser les
techniques d’information modernes pour développer à l’étranger des activités sans passer par leur
possession. On les concède à des partenaires.
Niche. Portion de marché limitée. Une entreprise adopte une stratégie de niche lorsqu’elle ne
possède ni ressources ni compétences suffisantes pour occuper avec succès un marché plus large.
Obstacles à l’entrée (barrières à l’entrée). Freins limitant la venue d’une entreprise dans un
secteur ; par exemple, les coûts de transfert, les effets d’expérience, les économies d’échelle du
secteur.
Océan Bleu. Stratégie consistant à créer un nouvel espace stratégique.
Offre publique d’achat (OPA). Opération par laquelle une entreprise annonce publiquement aux
actionnaires d’une autre entreprise qu’elle souhaite acquérir leurs titres pendant un certain délai et
à un prix donné, généralement supérieur à la valeur boursière. Lors d’une OPA dite hostile,
l’acquéreur ne consulte pas les dirigeants de l’entreprise visée. Elle reste amicale quand les
entreprises coopèrent en vue de l’opération.
Offre publique d’échange (OPE). Opération qui ressemble à l’OPA, mais où la transaction
s’effectue par l’achat de titres et non par rachat.
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Offshoring. Concept qui consiste à faire réaliser à l’international des services qui seront
consommés ailleurs que dans le lieu de production. Plusieurs activités sont concernées :
l’informatique, le SAV, l’audiovisuel, les activités bancaires ou d’assurance, etc. Le onshoring
(offshoring à domicile) consiste à employer dans l’entreprise du personnel originaire des pays où
se pratique le offshoring aux conditions de ces pays.
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Organisation apprenante. L’entreprise acquiert et mémorise des connaissances qui enrichissent sa
vision stratégique et réduisent l’incertitude.
Organisation virtuelle. Forme de « non-organisation » qui résulte de la disparition, voulue par les
dirigeants, des liens verticaux et horizontaux de la structure formelle.
Pacte mondial (Global Compact). C’est une initiative internationale lancée en 2000 par Kofi
Annan, le Secrétaire général des Nations unies. Le pacte vise à rassembler des entreprises et des
organismes des Nations unies dans le but de promouvoir la responsabilité civique des entreprises.
Parties prenantes (stakeholders). Acteurs de la vie de l’entreprise qui ne sont pas directement
impliqués dans sa gestion, que l’on oppose aux actionnaires (shareholders). Certaines définitions
larges des parties prenantes intègrent l’ensemble des acteurs de la vie de l’entreprise (salariés,
fournisseurs, distributeurs, groupes de pressions, etc.).
Planification. Ensemble d’actions qui consiste à concevoir un futur désiré et les moyens pour y
parvenir ; instrument d’action, de motivation, de cohérence.
Plate-forme technologique. Ensemble de compétences métier et de capacités organisationnelles
dont la combinaison assure la compétitivité de l’entreprise et sur laquelle prennent appui les
différentes activités de son portefeuille.
Politique générale. Mère de la stratégie : orientation à long terme des activités de l’entreprise.
Portefeuille d’activités. Ensemble des domaines d’activités de l’entreprise (DAS ou SBU) entre
lesquels l’entreprise arbitre au fil du temps.
Positionnement stratégique. Position qu’une entreprise entend occuper au sein d’un ensemble de
facteurs clés de succès. Les entreprises choisissant le même positionnement stratégique constituent
un groupe stratégique.
Processus de finalisation. Définition des différentes catégories de finalités de l’entreprise –
vision, mission, objectif, stratégie, plan, budgets – et des orientations que l’entreprise entend
suivre.
Processus d’animation des hommes. Mécanismes de gestion de ressources humaines suscitant
l’adhésion des personnes aux finalités et aux modes d’organisation de l’entreprise.
Processus d’organisation. Définition des mécanismes de gouvernance de l’entreprise, des
structures, des mécanismes de coordination, des organigrammes, des procédures.
Processus de contrôle. Vérification de la cohérence entre objectifs et résultats, du respect des
principes d’organisation et définition des mesures correctives.
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Processus stratégique. Ensemble des décisions et d’actions à caractère stratégique organisé dans
le temps. La maîtrise de ces processus confère un avantage compétitif durable.
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Profil concurrentiel. Représentation graphique des forces et faiblesses de l’entreprise par rapport
à celles des principaux concurrents.
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Profil de compétences. Représentation graphique des forces et faiblesses de l’entreprise.
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Profit impact of market strategy (PIMS). Base de données comprenant 4 000 segments
stratégiques utilisés pour étudier les conditions de réalisation de performances. Ainsi, il y aurait un
lien entre la détention d’une forte part de marché et l’obtention d’une bonne rentabilité des capitaux
investis par exemple.
Projet. Mode d’organisation éphémère de services ou d’entreprises différents conçu en vue
d’atteindre des objectifs. Le management par projet est pratiqué avec succès dans diverses
entreprises automobiles et aéronautiques. Il débouche sur une organisation transversale des firmes
concernées.
Réactivité organisationnelle. Vitesse avec laquelle une entreprise réagit à un changement
d’environnement.
Recentrage. Stratégie consistant à se désengager de certains DAS considérés comme ne faisant
plus partie du cœur de métier de l’entreprise.
Reengineering. Remise en cause fondamentale et redéfinition radicale des processus opérationnels
pour obtenir des gains spectaculaires en termes de coût, de qualité, de réactivité.
Regel (enracinement). Troisième étape du changement qui marque l’ancrage du changement dans
le fonctionnement de l’entreprise.
Réseau. Mode d’organisation non hiérarchique où les relations sont caractérisées par leur
caractère coopératif.
Responsabilité sociale de l’entreprise (RSE). Concept qui désigne l’intégration volontaire, par
les responsables d’entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leur stratégie.
Ressources. Actifs stratégiques, tangibles ou intangibles, de nature immatérielle, humaine,
financière, physique, pouvant constituer la source d’un avantage concurrentiel.
Resource Based Management (RBM). Approche du management stratégique de l’entreprise
privilégiant l’explication des avantages concurrentiels par les compétences et les ressources que
l’entreprise maîtrise.
Return on equity (ROE). C’est le rendement des actions.
R & D. Travaux de recherche effectués, généralement dans un service particulier, en vue
d’accroître le stock de connaissances technoscientifiques dont on développe les applications.
Réversibilité. Caractéristique des décisions opérationnelles qui peuvent être aisément remises en
cause en cas d’erreur ou d’échec, à la différence des décisions stratégiques considérées comme
irréversibles ou difficilement réversibles.
Risque. Conscience d’un danger futur dont l’apparition n’est pas certaine mais possible.
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Savoir organisationnel. Ensemble de connaissances et de croyances collectives partagées par les
membres d’une entreprise. Ces savoirs et leur mise en œuvre forment la base des compétences.
Certains savoirs sont tacites. On ne peut les communiquer par le langage, mais ils se transmettent
par la pratique. D’autres savoirs sont dits explicites, car ils peuvent être exprimés donc formalisés.
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Scénario/Scenarii. Vision de l’évolution de l’environnement qui repose sur des hypothèses faites
sur les tendances que vont suivre quelques variables clés caractérisant le secteur.
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Segmentation stratégique. Découpage de l’entreprise en unités homogènes appelées domaine
d’activité stratégique (DAS) ou strategic business unit (SBU) sur les plans interne et externe, sur
lesquels un diagnostic sera effectué et des propositions stratégiques formulées.
Spécialisation. Stratégie corporate consistant à concentrer ses ressources dans un domaine
d’activité.
SPECTRED. Diagnostic externe de l’entreprise intégrant les aspects Sociaux, Politiques,
Économiques, Culturels, Technologiques, Réglementaires, Écologiques, Démographiques.
Staff and line. État major (staff) et ligne opérationnelle (line).
Stakeholders. Les parties prenantes, au sens littéral ce sont des « dépositaires d’enjeux ». Il s’agit
de l’ensemble des publics externes et internes à l’entreprise concernés par les décisions prises par
celle-ci.
Standardisation. Mécanisme de coordination reposant sur la définition de procédures.
Start-up. Petite entreprise en phase de lancement, engagée dans un domaine d’activité nouveau,
telles les TIC.
Stratégie. Ensemble de décisions de long terme prises par l’entreprise pour atteindre ses objectifs
compte tenu de ses ressources et de ses environnements.
Stratégie business. Choix stratégiques effectués au sein d’un domaine d’activité stratégique (DAS
ou SBU).
Stratégie corporate. Choix stratégiques concernant l’ensemble de l’entreprise et portant sur la
gestion du portefeuille d’activités.
Stratégie de croissance. Stratégie visant à développer l’activité de l’entreprise par croissance
interne ou externe.
Stratégie de différenciation. Stratégie de domaine (business) reposant sur un avantage
concurrentiel perçu comme étant unique par l’ensemble du marché.
Stratégie de diversification. Stratégie consistant à multiplier les activités de l’entreprise dans des
domaines d’activités impliquant la maîtrise de compétences correspondant à des métiers différents.
Stratégie low cost. Stratégie de domaine (business) reposant sur un avantage concurrentiel de
coûts faibles.
Stratégie de l’acteur. Les finalités personnelles des membres de l’entreprise (dirigeants, cadres,
personnels) qui influencent leur comportement et leur décision.
Stratégie de recentrage. Stratégie visant à abandonner des activités et à concentrer ses ressources
sur un nombre limité de métiers dont les compétences sont maîtrisées.
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Strategy as Pratice (SaP). Perspective s’intéressant aux pratiques d’élaboration, de formulation et
de mise en œuvre de la stratégie afin de réaliser le changement. L’accent est mis sur les processus
pratiques et les activités quotidiennes de la vie des organisations.
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Stress. État de tension physique et psychologique qu’une personne ressent lorsqu’elle est
confrontée à des événements inattendus et qu’elle juge importants. Les entreprises doivent maintenir
un bon équilibre entre la mise sous tension qui motive les ressources humaines et l’excès d’une
telle tension qui produit des dégâts psychologiques.
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Structure « agile ». Organisation caractérisée par un organigramme plat, la décentralisation, des
frontières internes et externes floues, la transversalité de l’organisation.
Structure divisionnelle. Organisation de groupes diversifiés ou chaque division autonome
correspond à un centre de profit auquel des objectifs de résultats sont fixés.
Structure informelle. Elle diffère de la structure prévue (formelle) et n’est pas représentée dans
l’organigramme. Il s’agit d’une organisation de l’entreprise qui résulte des comportements des
individus. Elle remet en cause l’équilibre voulu des pouvoirs et peut remédier aussi aux
insuffisantes des structures formelles.
Structure matricielle. Organisation résultant du croisement, dans la même entreprise, de la
structure fonctionnelle et de la structure divisionnelle. Elle profite en principe des avantages des
deux autres et s’efforce de gommer les inconvénients. Elle préfigure les structures par projet.
Structure mécaniste. Organisation où la spécialisation, la standardisation, la formalisation sont
fortes.
Structure missionnaire. Organisation reposant sur une standardisation des normes et des valeurs et
un leader charismatique.
Structure professionnelle. Organisation reposant sur la compétence des opérationnels et la
standardisation des qualifications.
Structure simple. Organisation de nature entrepreneuriale reposant sur la supervision directe où la
spécialisation et la formalisation sont faibles.
Supervision directe. Mécanisme de coordination entre plusieurs membres de l’entreprises reposant
sur l’autorité hiérarchique de leur supérieur.
Supply Chain Management (SCM). Système de gestion de la chaîne logistique intégrant
l’ensemble des procédures et applications informatiques permettant de gérer la totalité des flux
d’informations et des flux physiques entre les différents acteurs, fournisseurs, producteurs,
distributeurs d’un produit ou d’un service.
SWOT. Processus stratégique décrit par quatre auteurs : Learned, Christensen, Andrews et Guth,
d’où l’acronyme parfois employé de LCAG. La planification s’exécute en deux temps. À la
détection des forces (Strengths) et puis à celles des faiblesses (Weaknesses) menée à la suite d’une
analyse interne, succède l’identification des opportunités (Opportunities) et des menaces (Threats)
résultant d’une analyse de l’environnement. Sur l’examen de ces bases, on effectue les choix
stratégiques.
Synergie. Effets de complémentarité entre deux activités (DAS) au sein d’un même portefeuille
d’activités, souvent représentés par la formule 2 + 2 = 5.
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Système d’information. Ensemble des ressources humaines et matérielles permettant la collecte, le
traitement, la diffusion, le stockage des informations nécessaires aux décisions et au fonctionnement
de l’entreprise.
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Technoscience. Ensemble des activités de recherches fondamentales et appliquées qui débouchent
sur des applications techniques exploitables.
By
Technostructure. Services d’étude, d’analyse et de conseil générateurs de procédures internes et
de standardisation.
Trajectoire stratégique. Évolution dans le temps des choix et des évolutions stratégiques. Elle
peut être déterminée par des causes externes (exogènes) et / ou par des conditions internes
(endogènes). On oppose les mauvaises trajectoires (les vicieuses) aux bonnes (les vertueuses).
Transversalité. Organisation qui traverse les différentes fonctions et coordonne les activités
débouchant sur l’aboutissement d’un projet.
Valeur (management par la). Processus de management stratégique fondé sur la recherche de la
valeur boursière la plus élevée pour la firme.
Valeurs des dirigeants. Un chef d’entreprise ou une équipe dirigeante a acquis des connaissances,
s’est forgé une éthique, bref possède une « vision du monde », des valeurs qui ne manquent pas
d’influencer les choix stratégiques.
Veille stratégique. Procédures de collecte de l’information sur les concurrents, les partenaires, les
acteurs des marchés.
Vision stratégique. Consiste à reconstruire une architecture stratégique de l’entreprise en projetant
ses anticipations de l’évolution de l’environnement. La vision est un outil de mobilisation et de
communication interne et externe.
Vocation. Rôle que les dirigeants veulent faire jouer à l’entreprise.
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Table des figures
Figure 1.1. Les facteurs d’influence sur le management des entreprises
Figure 1.2. Le pendule des perspectives d’analyse
Figure 1.3. Les deux facettes du management
Figure 1.4. La distinction entre management stratégique et management opérationnel
Figure 1.5. Une comparaison des caractéristiques des deux décisions
Figure 1.6. La relation management/performance
Figure 1.7. Le processus de management
|\/
|
Figure 1.8. La culture stratégique
Figure 1.9. Le management stratégique
4$
Figure 1.11. Le processus de décision
$!
Figure 1.10. Les fonctions du décideur
Figure 1.12. Les principaux facteurs influençant la perception de la qualité de la décision
By
Figure 2.1. Les principes du modèle LCAG
Figure 2.2. La vision, caractéristiques et fonctions
Figure 2.3. Un exemple de carte cognitive
Figure 2.4. Les différentes formes de planification
Figure 2.5. La démarche stratégique
Figure 2.6. L’écart stratégique
Figure 2.7. Les dimensions déduites et construites
Figure 2.8. La décision stratégique
Figure 2.9. Le contrôle stratégique
Figure 2.10. La démarche stratégique
Figure 2.11. Le non-contrôle stratégique : causes et conséquences
Figure 2.12. La détection des surprises
Figure 2.13. Les finalités de l’entreprise
Figure 2.14. Les parties prenantes ou stakeholders
Figure 2.15. Les finalités externes et les finalités internes
Figure 2.16. Les quatre modèles de gouvernance
Figure 2.17. Les trois piliers du développement durable
Figure 2.18. Un exemple de mise en œuvre de la RSE chez Pernod Ricard : une plate-forme dédiée,
pour une plus grande lisibilité de la stratégie
Figure 2.19. Le système d’objectifs
Figure 2.20. Les coalitions internes et externes
Figure 2.21. Les contraintes stratégiques
Figure 3.1. Les séquences diagnostic-décision stratégique
Figure 3.2. Le double diagnostic stratégique
Figure 3.3. Le choix d’une unité d’analyse
Figure 3.4. La nécessité de la segmentation stratégique : l’exemple d’une industrie du secteur de la
mécanique
Figure 3.5. Les trois critères du segment stratégique
Figure 3.6. La segmentation stratégique appliquée au secteur du levage et des grues
|\/
|
Figure 3.7. La réflexion stratégique appliquée à l’entreprise Lafarge
$!
Figure 3.8. Le degré d’urgence et l’externalisation du diagnostic
4$
Figure 3.9. Les axes du diagnostic de l’environnement
Figure 3.10. Les multiples facettes de l’environnement (SPECTRED)
By
Figure 3.11. L’analyse SPECTRED du groupe McDonald’s
Figure 3.12. Les quatre rubriques du diagnostic externe
Figure 3.13. Un exemple de carte des groupes stratégiques
Figure 3.14. Les techniques de collecte de l’information sur les concurrents
Figure 3.15. Les six forces commandant l’intensité concurrentielle et la rentabilité d’un secteur
Figure 3.16. L’étoile sectorielle : deux exemples différenciés (secteurs A et B)
Figure 3.17. L’écosystème d’affaires (ESA)
Figure 3.18. Modèle de filière (exemple d’assainissement de l’eau)
Figure 3.19. L’identification des facteurs clés de succès (FCS)
Figure 3.20. Un exemple de maîtrise des FCS dans le secteur de la restauration professionnelle
Figure 3.21. Le cycle de vie et les FCS
Figure 3.22. Les fonctions et processus à diagnostiquer
Figure 3.23. Une représentation du profil de compétence
Figure 3.24. Le profil concurrentiel et le profil idéal
Figure 3.25. La chaîne de valeur type
Figure 3.26. La reconfiguration sectorielle des chaînes de valeur
Figure 3.27. La structure commune gérant le système d’information de trois banques
Figure 3.28. Exemple simplifié d’analyse de la chaîne de la valeur
Figure 3.29. Des TIC omniprésentes dans la chaîne de valeur
Figure 3.30. L’analyse par les ressources et les compétences
Figure 3.31. Les compétences de base appliquées à une entreprise de e-commerce
Figure 3.32. Les TIC, des ressources stratégiques
Figure 3.33. Les cinq niveaux de reconfiguration provoqués par les TIC
Figure 3.34. Le diagnostic financier et le diagnostic stratégique
Figure 3.35. Une grille de synthèse du diagnostic et des propositions stratégiques
Figure 3.36. Du diagnostic générique à la matrice de portefeuille d’activités
Figure 3.37. La matrice générique
Figure 3.38. Un exemple de matrice BCG
Figure 3.39. La matrice BCG : le financement des DAS
|\/
|
Figure 3.40. Le calcul des scores dans la matrice McKinsey
$!
Figure 3.41. Les zones de la matrice McKinsey
Figure 3.43. Le balancier du diagnostic
4$
Figure 3.42. Les styles stratégiques selon les environnements
Figure 3.44. Les trois axes de l’analyse stratégique
By
Figure 3.45. Les stratégies business et corporate
Figure 4.1. Les facteurs de performance
Figure 4.2. Les quatre phases du cycle de vie
Figure 4.3. Le cycle de vie de l’activité
Figure 4.4. Les actions visant à contrarier le cycle de vie « normal »
Figure 4.5. La coordination des cycles de vie des activités
Figure 4.6. Le taux de croissance du marché et la rentabilité
Figure 4.7. Le coût unitaire et l’expérience
Figure 4.8. L’expérience et la politique de prix
Figure 4.9. L’expérience et les positions concurrentielles
Figure 4.10. La part de marché et la rentabilité
Figure 4.11. L’attractivité des différents segments de biens d’équipement
Figure 4.12. Les origines de l’innovation
Figure 4.13. L’étoile de l’innovation
Figure 4.14. La courbe en S de diffusion de l’innovation
Figure 4.15. Les conditions d’une stratégie d’innovation efficace
Figure 4.16. La qualité relative et la rentabilité
Figure 4.17. Des ressources et compétences à l’avantage concurrentiel
Figure 4.18. Les facteurs de performance et les implications stratégiques
Figure 4.19. Le « cercle vertueux » de la stratégie low cost
Figure 4.20. La balance de la différenciation
Figure 4.21. L’enlisement dans la voie moyenne
Figure 4.22. La boussole stratégique prix-valeur
Figure 4.23. La stratégie de la longue traîne
Figure 4.24. La recherche des avantages concurrentiels
Figure 4.25. La relation entre continuous morphing et avantage compétitif
Figure 4.26. Les axes d’exploitation des ressources
Figure 4.27. Une démarche globale
|\/
|
Figure 5.1. Les orientations stratégiques corporate
Figure 5.2. Le continuum spécialisation-diversification
4$
Figure 5.4. Le balancier stratégique
$!
Figure 5.3. L’étoile de la diversification
Figure 5.5. Les deux formes d’intégration verticale
By
Figure 5.6. L’équilibre des risques entre spécialisation et diversification
Figure 5.7. Les moteurs de la globalisation
Figure 5.8. La demande d’un produit dans divers pays
Figure 5.9. Le processus d’internationalisation
Figure 5.10. Les frontières entre la culture d’entreprise et les cultures régionales
Figure 5.11. La firme globale en réseau
Figure 5.12. Les axes stratégiques corporate
Figure 6.1. Les deux types de croissance
Figure 6.2. Le mécanisme de la fusion
Figure 6.3. Le mécanisme de l’absorption
Figure 6.4. L’apport partiel d’actifs
Figure 6.5. Le désengagement
Figure 6.6. Les vagues successives d’externalisations
Figure 6.7. L’algorithme de l’externalisation
Figure 6.8. Le balancier externalisation-internalisation
Figure 6.9. Les principales motivations à l’origine des partenariats
Figure 6.10. Le management d’un partenariat
Figure 6.11. Le management d’un partenariat
Figure 6.12. La mise en œuvre opérationnelle
Figure 6.13. Le tableau de bord prospectif, un cadre stratégique pour l’action
Figure 6.14. Le processus d’alignement managérial
Figure 7.1. Structures : les cinq choix fondamentaux
Figure 7.2. La succession des mécanismes de coordination
Figure 7.3. La différenciation organisationnelle
Figure 7.4. La balance organisationnelle
Figure 7.5. L’organisation selon Mintzberg
Figure 7.6. Les facteurs influençant la structure organisationnelle
Figure 7.7. L’influence de la stratégie sur la structure
|\/
|
Figure 7.8. L’influence de l’environnement sur la structure
Figure 7.9. L’adaptation de l’organisation à la taille des entreprises
$!
Figure 7.10. La structure matricielle
4$
Figure 7.11. Un exemple de structure matricielle : Thales
Figure 7.12. Le processus de gestion de projet
By
Figure 7.13. La structure de coordination de projet
Figure 7.14. La structure de direction de projet
Figure 7.15. La démocratisation de l’intelligence stratégique
Figure 7.16. La grille managériale
Figure 7.17. La pyramide des besoins et les réponses de l’organisation
Figure 7.18. La théorie d’Herzberg
Figure 7.19. Le continuum des styles de direction
Figure 7.20. Le choix d’un style de direction
Figure 7.21. Les composantes de la culture
Figure 8.1. Les sources du changement de stratégie
Figure 8.2. Les trois phases du changement
Figure 8.3. Les types et phases de changement
Figure 8.4. Les quatre catégories d’acteurs du changement stratégique
Figure 8.5. La matrice des changements stratégiques
Figure 8.6. Les freins individuels au changement
Figure 8.7. Les freins à la réactivité stratégique de l’organisation
Figure 8.8. Le choix des actions de conduite du changement
Figure 8.9. L’âge de l’organisation
Figure 8.10. Le cycle de vie des organisations
Figure 8.11. La finalité du Knowledge Management
Figure 8.12. L’importance de l’apprentissage organisationnel
Figure 8.13. Les déclencheurs de l’apprentissage organisationnel
Figure 8.14. Le processus cognitif
Figure 8.15. La représentation partagée
Figure 8.16. L’apprentissage organisationnel, un double processus
Figure 8.17. Des apprentissages complémentaires
Figure 8.18. Les différents niveaux d’apprentissage dans l’entreprise
Figure 8.19. Le modèle de création des connaissances
|\/
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Figure 8.20. L’organisation hypertexte
Figure 1. Le pentagone stratégique de la PE
4$
By
Figure 3. La courbe de vie d’une PE
$!
Figure 2. Les fins dernières de la PE
Index des thèmes
By
4$
$!
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|
Absorption, 1, 2, 3, 4
Accords intersectoriels, 1
Acquisition, 1
Acteurs, 1, 2, 3
Acteurs externes, 1
Acteurs internes, 1
Action, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,
28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49
Adaptation stratégique, 1
Adhocratie, 1
Affaires, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16
Agent coordonnateur, 1
Ajustement mutuel, 1, 2
Alignement managérial, 1
Alignement stratégique, 1
Alliances, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21
complémentaires, 1
de co-intégration, 1
de pseudo-concentration, 1
Alternative stratégique, 1, 2
Ampleur du changement, 1
Analyse
de la concurrence, 1, 2
financière, 1, 2
organisationnelle, 1
stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
Animation, 1, 2, 3
Anticipation, 1, 2, 3, 4
Apport partiel d’actif, 1
Apprentissage, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43
individuel, 1
organisationnel, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Appropriation, 1
Aptitude au changement, 1
Autonomie, 1, 2
By
4$
$!
|\/
|
Autorité
dans la spécialité, 1, 2, 3
éclatée, 1
fonctionnelle, 1, 2, 3, 4
hiérarchico-fonctionnelle, 1
hiérarchique, 1
Autorités de régulation, 1
Avantage compétitif, 1
Avantage concurrentiel, 1
Avantages organisationnels, 1
Back to basics, 1
Balance organisationnelle, 1, 2
Balanced scorecard, 1
Balancier stratégique, 1, 2
Barrières à la sortie, 1, 2
Barrières à l’entrée, 1, 2, 3, 4
Barrières anticoncurrentielles, 1
BCG, 1
Benchmarking, 1, 2
Boussole stratégique prix-valeur, 1
budget, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Bureaucratie, 1
Bureaucratiques, 1
Business Design, 1
Business Model, 1, 2
Business plan, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15
Business Strategy, 1, 2, 3
Buts, 1
Capacités dynamiques, 1
Capacités organisationnelles, 1
Carte cognitive, 1, 2, 3
Centralisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
Centre de profit, 1
Centre d’activité stratégique (CAS), 1
Chaîne de valeur, 1, 2, 3
Changement, 1
construit, 1
délibéré, 1
émergent, 1
entreprise apprenante, 1
politique, 1
prescrit, 1
stratégique, 1
Chiffre d’affaires, 1
By
4$
$!
|\/
|
Choix stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20
Chronocompétition, 1, 2, 3, 4
Cinq forces, 1, 2, 3, 4
clan, 1
Collecte de l’information, 1
Comité, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16
Commission, 1
Communication, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
Compatibilité, 1
Compétence, 1, 2, 3, 4
de base, 1, 2
stratégique, 1
transversale, 1, 2, 3
Compétition, 1
Compétitivité, 1
Concentration, 1, 2, 3, 4, 5
Concession, 1
Concurrence, 1, 2
Configuration adhocratique, 1
Configuration divisionnelle, 1
Configuration mécaniste, 1
Configuration missionnaire, 1
Configuration professionnelle, 1
Configuration simple, 1
Contexte du changement, 1
Contingence, 1
Continuous morphing, 1, 2
Contrôle, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51
budgétaire, 1
de l’incertitude, 1
Coopération, 1, 2
Coordination, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33
Core of competencies, 1
Corporate, 1
Corporate Culture, 1
Corporate Policy, 1
Corporate Social Responsability, 1, 2
Correction stratégique, 1
Cotraitance, 1
Coûts cachés, 1, 2
Coûts de coordination, 1
Coûts de transaction, 1
By
4$
$!
|\/
|
Coûts de transfert, 1, 2, 3
Crainte de la riposte, 1
Créateur d’entreprise, 1
Création de valeurs, 1
Créativité, 1
Crise, 1
Critère, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26
d’évaluation, 1, 2
CRM, 1
Croissance, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37
externe, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
interne, 1, 2, 3, 4, 5
Croissance organique, 1
Culture, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27
de l’entreprise, 1, 2, 3, 4
stratégique, 1, 2
Customisation, 1
Cycle de vie, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25
de l’activité, 1
des organisations, 1
des technologies, 1
DAS, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,
28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52
Décentralisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22
globale, 1
horizontale, 1
sélective, 1
verticale, 1
Décision, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78,
79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 89
administrative, 1, 2
centralisée, 1
individuelle, 1
opérationnelle, 1, 2
stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
tactique, 1
Déclin, 1, 2
Dégel, 1, 2
Degré d’individualisme, 1
Degré d’intégration, 1
Délocalisation, 1
26,
25,
By
4$
$!
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Demande, 1
Démarche stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15
Déracinement, 1, 2
Déréglementation, 1
Dérégulation, 1
Désengagement, 1, 2, 3
Désinvestissement, 1
Développement, 1
Développement durable, 1
Diagnostic, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46
de l’offre, 1
externe, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23
fonctionnel, 1
interne, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25
stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
Diamant de Porter, 1, 2
Différenciation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24,
26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48
organisationnelle, 1, 2, 3
Dilemme, 1, 2, 3, 4, 5
Direction, 1
par objectif (DPO), 1
participative par objectif (DPPO), 1
Distance hiérarchique, 1
Diversification, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24,
26, 27, 28, 29, 30
de croissance, 1
de redressement, 1
marché, 1
produit, 1
totale, 1
DMAIC, 1
Domaine d’activité stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29
Domination, 1, 2, 3, 4
Downsizing, 1
Droite d’expérience, 1, 2, 3, 4
Dynamique concurrentielle, 1
E-management, 1
Écart stratégique, 1, 2, 3, 4
Écologie, 1
Économie de champ, 1
Économies d’échelle, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
25,
21,
By
4$
$!
|\/
|
Effet de levier, 1
Effets d’expérience, 1
Efficience, 1
Empowerment, 1
enlisement dans la voie moyenne, 1
Enracinement, 1, 2
Entrants potentiels, 1, 2
Entrepreneuriat, 1, 2
Entreprise apprenante, 1
Entreprise globale, 1, 2
Entreprise internationale, 1
Entreprise multinationale, 1
Entreprise transnationale, 1
Entreprise virtuelle, 1
Équilibre différenciation-intégration, 1
ERP (Enterprise Resource Planning), 1, 2, 3
ESA, 1, 2, 3, 4
Essaimage, 1
Éthique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
Évaluation, 1
Éventail de subordination, 1
Évolution stratégique, 1
Excellence, 1, 2
Expérience, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64
Explicite, 1
Exploitation, 1
Exploration, 1
Externalisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16
Extranet, 1
Facteur
clé de succès, 1, 2, 3
de motivation, 1, 2, 3
de performance, 1, 2, 3, 4
de production, 1, 2
Facteurs
de satisfaction, 1
Facteurs clés de succès (FCS), 1
Faiblesses, 1, 2
Faire faire, 1
Faisabilité, 1, 2, 3, 4
faisabilité stratégique, 1
Filtre cognitif, 1
By
4$
$!
|\/
|
Finalisation, 1, 2, 3
Financement, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18
Financiarisation, 1, 2
Firme globale, 1
Firmes « agiles », 1, 2
Fit, 1, 2, 3
Flexibilité, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15
stratégique, 1
Focalisation, 1, 2
Forces, 1, 2, 3
Formalisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
Formation, 1
Forme
en M, 1
en U, 1, 2
matricielle, 1
Fourniture spéciale, 1
Franchise, 1
Frontière, 1
Fusion, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
Fusions-acquisitions, 1
Gestion de projet, 1
Gestion prospective, 1
Globalisation, 1, 2
Gouvernance, 1
Grille managériale, 1
Groupements d’intérêt économique, 1
Groupes stratégiques, 1, 2
Héros, 1, 2, 3, 4
Hidden costs, 1
Hiérarchie, 1
Holding, 1, 2
Horizons temporels, 1
Hypercompétition, 1, 2, 3, 4
Idiosyncrasie, 1
Impartition, 1
Implementation, 1
Implications stratégiques, 1, 2, 3, 4
Importance du changement, 1, 2
Incrémentalisme, 1
Industrie, 1
Inertie, 1
Information, 1
By
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$!
|\/
|
Innovation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30
Institutionnalisation, 1
Intégration, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24
verticale, 1, 2
Intelligence économique, 1, 2
Intelligence stratégique, 1
Intensité concurrentielle, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Intensité de la concurrence, 1
Intention stratégique, 1, 2
Internalisation, 1, 2
Internationalisation, 1, 2, 3, 4
Interrelations stratégiques, 1
Intrapreneur, 1, 2
Intrapreneurship, 1
Joint-venture, 1, 2, 3, 4
Knowledge Management, 1
Knowledge workers, 1
LBO, 1
Leader, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22
Leadership, 1, 2, 3, 4
Lean Management, 1, 2
Licence, 1
Logistique, 1, 2, 3, 4, 5, 6
Low cost, 1, 2, 3
Maîtrise du temps, 1
Malcolm Baldrige Quality Award, 1
Management, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34
européen, 1
interculturel, 1
opérationnel, 1, 2
transversal, 1
management européen, 1
Manager, 1, 2
Marché
pertinent, 1
Masculinité/féminité, 1
Matrice, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20
BCG, 1, 2, 3, 4
de portefeuille d’activités, 1
générique, 1, 2, 3, 4
McKinsey, 1
Maturation, 1, 2
26, 27,
By
4$
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|\/
|
Maturité, 1
du secteur, 1, 2
Mécanistes, 1
Mémoire organisationnelle, 1, 2
Menace, 1, 2
de nouveaux entrants, 1
Méthodes de prévision, 1
Métier, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
28, 29, 30, 31, 32, 33, 34
Migration de valeur, 1
Mindshare, 1
Mission, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
Mobilisation, 1, 2, 3, 4, 5
Modèle
IMC, 1
LCAG, 1
Mondialisation, 1, 2, 3, 4
Morale, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22
Motivation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19
Mouvement, 1
Mythes, 1, 2, 3
Négociation, 1, 2, 3, 4, 5
pouvoir (de), 1, 2, 3
Non-imitation, 1
Non-substitution, 1
Objectifs, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50,
53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76
internes, 1
Obstacles à l’entrée, 1, 2
One best way, 1, 2
OPA, 1, 2
OPE, 1
Opportunités, 1, 2, 3
Organigramme, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
Organisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23,
26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49,
52, 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75,
78, 79, 80
apprenante, 1
hypertexte, 1, 2
numérique, 1
Orientation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
25, 26,
51, 52,
24, 25,
50, 51,
76, 77,
By
4$
$!
|\/
|
Outsourcing, 1, 2
Part de marché, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22
relative, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
Partenariat, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25
vertical, 1
Parties prenantes, 1
Pentagone stratégique, 1
Performance, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30
durable, 1
Personnalité, 1
Perspective, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23
externe, 1
interne, 1
PERT, 1
Perte de l’identité, 1
Philosophie, 1
PIMS, 1, 2, 3
Planification, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30, 31
douce, 1
stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Planning gap, 1, 2
Plans opérationnels, 1
PME, 1
Poids mort, 1, 2, 3
Portefeuille, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
de compétences, 1
de projets, 1
d’activités, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20
Position, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16
concurrentielle, 1, 2, 3, 4, 5, 6
Positionnement stratégique, 1
Potentiel, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
Pouvoirs publics, 1, 2, 3, 4, 5
Prévision, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
Procédures
financières, 1, 2
Processus de contrôle, 1
Processus de finalisation, 1
Processus d’animation des hommes, 1
Processus d’organisation, 1
Processus stratégique, 1
Productivité, 1
By
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|
Produits substituables, 1
Profil, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
concurrentiel, 1, 2
de compétence, 1
Project manager, 1
Projet d’entreprise, 1, 2
Qualité, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,
28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53,
54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72
relative, 1, 2
Ramassage boursier, 1
Rareté, 1
Rationalité, 1
Réactivité, 1, 2, 3, 4
Recentrage, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Réduction des coûts, 1
Reengineering, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
Regel, 1, 2
Regroupement, 1, 2, 3, 4
Relevant market, 1
Rentabilité économique, 1
Repérage concurrentiel, 1
Réseau, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27
culturel, 1, 2
Résistance au changement, 1, 2
Responsabilité, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22
Ressorts psychologiques des dirigeants, 1
Ressources, 1, 2, 3, 4
financières, 1
humaines, 1
immatérielles, 1
physiques, 1
stratégiques, 1
Réversibilité, 1, 2, 3
Revitalisation, 1
Révolution stratégique, 1
Risque, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24
d’exploitation, 1
financier, 1
Rites, 1, 2
Rivalité, 1
Rotation des clients, 1
Rotation des fournisseurs, 1
Rotation des stocks, 1
By
4$
$!
|\/
|
Routine, 1
RSE, 1
Rythme du changement, 1
Savoir organisationnel, 1
Scenarii, 1
Segmentation, 1, 2, 3
marketing, 1
stratégique, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18
Sentiers stratégiques, 1
Situation stratégique, 1
Six sigma, 1
Soft Management, 1
Sous-traitance, 1, 2
Spécialisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30
des tâches, 1, 2, 3, 4, 5
horizontale, 1
verticale, 1
SPECTRED, 1
Spirale d’acquisition de connaissances, 1
Split off, 1
Staff and line, 1
Standardisation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
des normes, 1
des procédés de travail, 1
des qualifications, 1
des résultats, 1
du travail, 1
Stimulation, 1
Strategic intent, 1
Strategic planning, 1
Stratégie, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78,
79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103,
104, 105, 106, 107, 108, 109, 110, 111, 112, 113, 114, 115, 116, 117, 118, 119, 120, 121, 122, 123,
124, 125, 126, 127, 128, 129, 130, 131, 132, 133, 134, 135, 136, 137, 138, 139, 140, 141, 142,
143, 144, 145, 146, 147, 148, 149, 150, 151, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 158, 159, 160, 161,
162, 163, 164, 165, 166, 167
construite, 1
de croissance, 1, 2
de diversification, 1
de recentrage, 1
de rupture, 1
By
4$
$!
|\/
|
déduite, 1
générique, 1, 2, 3
low cost
stratégie business, 1
stratégie corporate, 1
stratégie de différenciation, 1
stratégie low cost, 1
Strategy as Pratice, 1
Strategy Canvas, 1
Structure, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78,
79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95
bureaucratique, 1, 2
centralisée, 1
des coûts, 1
divisionnelle, 1
divisionnelle décentralisée ou forme en M, 1
fonctionnelle, 1
fonctionnelle centralisée, 1, 2
fonctionnelle centralisée en U, 1, 2
formelle, 1
informelle, 1, 2
matricielle, 1
mécanique, 1
mécaniste, 1
missionnaire, 1
organique, 1
personnalisée, 1, 2
professionnelle, 1
simple, 1
transversale, 1
structures agiles, 1
Style de direction, 1, 2, 3, 4, 5, 6
Supervision directe, 1, 2
Supply Chain Management, 1, 2, 3
Surprises stratégiques, 1
SWOT, 1, 2, 3, 4
Symboles, 1
Synergie, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19
Système, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21
d’information, 1, 2, 3, 4, 5
d’objectifs, 1, 2
Tableau de bord concurrentiel, 1
By
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Tableau de bord prospectif, 1
Tacite, 1
Taille, 1, 2
Taille critique, 1
Taux de croissance, 1, 2
Techno-science, 1
Technologie, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41
Théorie, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
de la contingence, 1
X, 1
Y, 1
Think, 1
TIC, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Time to market, 1
Time-based competition, 1, 2
Total Quality Control, 1
Total Quality Management, 1
Trajectoire stratégique, 1
Transversalité, 1, 2, 3, 4, 5
Typologie des changements, 1
Urgence, 1
du changement, 1, 2, 3
Vache à lait, 1, 2
Valeur ajoutée, 1
Valeurs, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,
28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35
Valorisation, 1, 2, 3, 4
de compétences, 1
Vedette, 1, 2, 3, 4, 5
Veille concurrentielle, 1
Veille sociétale, 1
Veille stratégique, 1, 2, 3
Virtualité, 1
Vision, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,
28, 29, 30
normative, 1
stratégique, 1, 2, 3, 4
Vocation, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Volume, 1
By
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A.T. Kearney, 1
ABB, 1, 2, 3
Accor, 1, 2, 3, 4
Aeroflot, 1
Aeromexico, 1
Air France, 1, 2, 3
Airbnb, 1
Airbus, 1, 2, 3, 4, 5, 6
Alitalia, 1
Amazon, 1, 2, 3, 4, 5
American Airlines, 1
American Telephone and Telegraph Company, 1
Apple, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
ARTE, 1
Arthur D. Little
ASQC, 1
Auchan, 1
Axa, 1, 2
BAE, 1
Bain, 1
BCG, 1, 2
Bell System, 1
Beneteau, 1
Benetton, 1
Bêtises de Cambrai, 1
Bic, 1
Blackberry, 1
BMW, 1, 2
BNP-Paribas, 1
Boeing, 1
Bombardier, 1, 2
Boston Consulting Group (BCG), 1
Breitling, 1
Bureau des temps élémentaires (BTE), 1
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Index des entreprises, des produits, des instituts et
des marques
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By
Burger King, 1
Bvlgari, 1
Canal+, 1
Canon, 1
Carrefour, 1, 2, 3, 4, 5
Chanel, 1
Chez Clément, 1
China Southern, 1
Citroën, 1
Club Med, 1
Coca-Cola, 1, 2, 3, 4, 5
Corse-Composite, 1
Crédit Agricole, 1
Crédit Lyonnais, 1
CSA, 1
Danone, 1, 2, 3, 4, 5
Darty, 1, 2, 3
Dassault, 1
Daucy, 1
Decathlon, 1, 2
Dell, 1, 2, 3, 4, 5, 6
Delta Airlines, 1
Diageo, 1
Dim, 1
Dior, 1
Dormeuil, 1
DuPont de Nemours, 1, 2, 3
Dyson, 1
EADS, 1
EasyJet, 1
EDF, 1
Embraer, 1
Espace, 1
Facebook, 1, 2
Faurecia, 1
Fiat, 1
Ford, 1, 2, 3
France 5, 1
France 2, 1
France 3, 1
Free, 1, 2
General Dynamics, 1
General Electric, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
General Motors, 1, 2, 3, 4, 5
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$!
4$
By
Gillette, 1
Google, 1, 2
Gore, 1, 2
Hertz, 1
Hippopotamus, 1
H&M, 1
HP, 1
Huawei, 1
Hugo Boss, 1
IBM, 1
Ikea, 1, 2
Intel, 1, 2
JCDecaux, 1
Jean Paul Gaultier, 1
KLM, 1, 2
Kmart, 1
Kodak, 1, 2
Korean Air, 1
Lacoste, 1
Lafarge, 1, 2, 3
Leaderprice, 1
Leclerc, 1
Leroy Merlin, 1
Lidl, 1
LVMH, 1
L’Oréal, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
M6, 1
Mattel, 1
McDonald’s, 1, 2, 3
McKinsey, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Mercedes, 1
Mercer, 1
Merck, 1
Métro, 1
MG Technologies, 1
Michelin, 1
Microsoft, 1, 2, 3, 4, 5
Moët-Hennessy, 1
Motorola, 1, 2
Nestlé, 1, 2, 3, 4, 5
Nike, 1, 2
Nissan, 1, 2
Nokia-Siemens, 1
Novotel, 1, 2
By
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OFUP, 1
Olympus, 1
Oracle, 1
Orange, 1
Oyak, 1
Paris Paname Courses, 1
Pepsi Cola, 1
Pernod Ricard, 1
Pfizer, 1
Philip Morris, 1
Pizza Hut, 1
Pizza Pino, 1
Potain, 1
Procter & Gamble, 1, 2
PSA, 1, 2, 3
Quick, 1
RATP, 1
Renault-Nissan, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
Rossignol, 1
Ryanair, 1
Samsung, 1, 2
SAP, 1
Schwab, 1
Sears, 1
Shell, 1
Siemens, 1
Sky Team, 1
SNCF, 1
Société Générale, 1
Society for organizational learning, 1
Solving International, 1
Sony, 1, 2, 3, 4
Southwest, 1
Starbucks, 1, 2
Swatch, 1, 2, 3, 4
Swiss Air, 1
Texas Instrument, 1, 2
TF1, 1
Total, 1
Toyota, 1, 2
3M, 1, 2
Uber, 1, 2
Unilever, 1
United Airlines, 1
By
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United Fruit, 1
US Airways, 1
Valeo, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Vinci, 1
Vistaprint, 1
Volvo, 1
Wal-Mart, 1
Xerox, 1
Yahoo !, 1, 2
Zara, 1
Zodiac, 1
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4$
By
Alter, 1, 2, 3
Andersen, 1
Andrews, 1
Ansoff, 1, 2, 3, 4, 5
Argyris, 1
Aveni (d’), 1, 2
Bartlett, 1
Blake, 1, 2
Broustail, 1
Brown, 1
Burgelman, 1
Burns, 1
Champy, 1
Chandler, 1, 2
Christensen, 1
Crozier, 1
Drucker, 1, 2, 3
Dussauge, 1, 2
Fréry, 1
Friedberg, 1
Garette, 1
Godet, 1
Goshal, 1
Greiner, 1, 2
Grove, 1
Guth, 1
Hamel, 1, 2, 3
Hammer, 1
Herzberg, 1, 2
Ishakawa, 1
Kahneman, 1, 2
Kaplan, 1, 2
Karani, 1
Learned, 1
Lewin, 1
Marchesnay, 1
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Index des auteurs cités
By
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Martinet, 1
Maslow, 1, 2
McGregor, 1
Mintzberg, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
Moore, 1
Morita, 1
Mouton, 1, 2
Nonaka, 1, 2
Norton, 1, 2
Ohmae, 1, 2
Peters, 1, 2
Porter, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18
Prahalad, 1, 2, 3
Ramanantsoa, 1
Ricardo, 1
Schmidt, 1, 2
Schön, 1
Simon, 1, 2, 3, 4, 5, 6
Stalker, 1
Takeuchi, 1
Tannenbaum, 1, 2
Taylor, 1, 2, 3, 4
Thiétart, 1, 2, 3, 4
Vail, 1
Vandengeon-Desrumez, 1
Venkatraman, 1, 2
Welch, 1, 2
1) www.vuibert.fr
2) Voir, à ce sujet, l’essai de SAUVAJOL-RIALLAND C., Infobésité. Comprendre et maîtriser la déferlante d’informations,
Vuibert, 2013.
3) CLEGG S. et al., Strategy, Theory & Practice, Sage, 2012.
4) Kahneman D., Système 1, Système 2, les deux vitesses de la pensée, Flammarion, 2012.
5) Op. cit. p. 366.
6) La formule est empruntée à ENLART S. et LAROCHE H., « Nous en avons assez du “Yakafokon” managérial ! », Les Échos,
10 décembre 2012.
7) Roger L. Martin, « Le grand mensonge de la planification stratégique », Harvard Business Review, février-mars 2016.
8) ATTALI J., La Crise et après ?, Fayard, 2008.
9) Voir SOBCZAK A., Responsabilité globale, Vuibert, 2011.
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10) Le terme d’éthique est généralement donné dans ce domaine comme synonyme de morale, c’est-à-dire comme science ou
comme art de diriger sa conduite. Les Américains confondent souvent business ethics et corporate ethics, de la même façon qu’on
utilise en France indifféremment les expressions « morale d’entreprise » ou « morale des affaires ».
12) http://www.transparency.org/
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11) L’expression « rationalisatrice » signifie ici que l’on justifie les décisions prises avec des arguments aussi forts que possible après
avoir effectué les choix. Alors que la séquence « rationnelle » (cas 1) définit la situation dans laquelle l’analyse préalable (diagnostic)
et la volonté d’atteindre un but (objectif) conditionnent la décision.
By
13) BEN LETAIFA S. (2014), « Dans quel contexte s’exerce la stratégie ? », in Encyclopédie de la stratégie, TANNERY,
MARTINET, HAFSI, DENIS (éd.), Vuibert.
14) MOORE J. F., The Death of Competition : Leadership and Strategy in the Age of Business Ecosystems, Harper Business,
1996.
15) D’après GRANT R. M., Contemporary Strategy Analysis, Blackwell Publishing, 2012.
16) BARNEY J. B. et HESTERLEY W. S., Strategic Management and Competitive Advantage, Pearson Prentice Hall, 4e édition,
2012.
17) Par TIC, nous entendons les technologies Internet et leurs applications dans l’entreprise au travers des intranets et des
extranets, les technologies de téléphonie mobile, les technologies sans fil, mais aussi des technologies de télécommunication comme la
visioconférence.
18) REEVES M., LOVE C., TILLMANNS Ph., « Votre stratégie a besoin d’une stratégie », Harvard Business Review, juin-juillet
2014.
19) REEVES M., LOVE C., TILLMANNS Ph., « Votre stratégie a besoin d’une stratégie », Harvard Business Review, juin-juillet
2014.
20) Dans les PME ou les entreprises à monoactivité, ces deux plans sont confondus.
21) Voir Business School Impact Score, FNEGE, 2012.
22) Il faut souligner que les stratégies business se déclinent tant au plan national qu’au plan international (chapitre 5).
23) L’idée vient du Cabinet Mercer Management Consulting.
24) Le concept de continuous morphing se situe dans cette perspective.
25) Voir FERNEZ-WALCH S., ROMON F., Management de l’innovation, de la stratégie aux projets, Vuibert, 3e édition, 2013.
26) ALTER N., L’Innovation ordinaire, PUF, 4e édition, 2013.
27) GAREL G., MOCK E., La Fabrique de l’innovation, Dunod, 2012, p. 23.
28) Larry DOWNES et Paul NUNES, « La rupture version bigbang », Harvard Business Review, juin-juillet 2015.
29) Citée par BATTILANA J., Le Monde, 12 mars 2013.
30) CLAUDE-GAUDILLAT V., « Industrie émergente et acquisition de compétences : déterminants du comportement stratégique
des entreprises », in DOSTALER I., LAROCHE H. et BOIRAL O., Perspectives en management stratégique, Éditions EMS, 2002.
31) JENNINGS J. et HAUGHTON L., It’s not the BIG that eat the small... It’s the fast that eat the slow, Harper Business, 2002.
32) MCKINSEY QUARTERLY, mai 2014.
33) PANDE P. G. et al., The Six Sigma Way, McGraw Hill, 2e édition, 2013.
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34) CHAN KIM W., MAUBORGNE R., Stratégie Océan Bleu, 2e édition, Pearson, 2015.
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35) On consultera DUSSAUGE P. et RAMANANTSOA B., Technologie et Stratégie d’entreprise, McGraw Hill, 1987 ;
BROUSTAIL J. et FRÉRY M., Le Management stratégique de l’innovation, Dalloz, 1993.
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36) ANDERSON C., La Longue Traîne, trad. Brigitte Vadé, Michel Le Séac’h, Pearson, 2009, 2e édition, 320 pages.
37) www.uber.com ; www.airbnb.fr ; www.leboncoin.fr/ ; www.blablacar.fr.
By
38) DRUCKER P., Structures et changements, Village Mondial, 1996.
39) AUTISSIER D., BENSEBAA F. et BOUDIER F., L’Atlas du management, Eyrolles, 2012.
40) Voir HERTRICH S., MAYRHOFER U., KALIKA M., « Cas Danone : un leader mondial de l’industrie agro-alimentaire »,
CCMP, 2011.
41) L’expression « firme globale » est ici entendu dans une acception plus large que celle retenue par Bartlett et Goshal.
42) BERGER S., Made in monde, Le Seuil, 2013.
43) KAPLAN R. S. et NORTON D. P., Le Tableau de bord prospectif, Éditions d’Organisation, 2003.
44) VENKATRAMAN N., Architecting the Networked Society, Boston University School of Management, 2011.
45) Voir le cas « L’Oréal », BLANCHOT F., KALIKA M., www.ccmp.fr.
46) Harvard Business Review, février-mars 2014.
47) Maurice Thévenet, Le Leadership pour le leader.
48) MORLEY C. et al., La Génération Y dans l’entreprise, Pearson, 2012.
49) Voir REEVES M., LOVE C., TILLMANNS P., «Your strategy needs a strategy», Harvard Business Review, octobre 2012.
50) Voir BIA FIGUEIREDO M., KALIKA M., « La gestion du changement organisationnel : bâtir une culture de la sécurité de
l’information », CCMP, 2012.
51) Voir la méthode SPECTRED dans le chapitre 3.
52) ALTER N., L’Innovation ordinaire, PUF, 4e édition, 2013.
53) Voir, à ce sujet, The Society for Organizational Learning (https://www.solonline.org/).
54) Ces marques réalisent un chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 millions d’euros.
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55) JULIEN P.-A. et MARCHESNAY M., L’Entrepreneuriat, Economica, 2011.
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