Alain Touraine [1978], les mouvements sociaux sont, par définition, une composante
singulière et importante de la participation politique.
De son côté, Touraine (1973 : 361-363) énonce trois principes qui prennent sens dans l’action
historique située : « Je définis un mouvement social comme la combinaison d’un principe
d’identité, d’un principe d’opposition et d’un principe de totalité, et considéré plus largement,
comme un acteur d’un champ d’action historique. » Le principe d’identité fait référence à la
définition consciente de l’acteur par lui- même. Celui d’opposition, lui, renvoie directement à
notre couple dominations/résistances : un mouvement social émerge en réaction à un
adversaire et son organisation implique la nécessité de nommer un tel adversaire, voire de le
faire surgir. Touraine souligne que la pratique politique d’opposition-résistance, typiquement
incarnée par le mouvement social, est régulièrement entraînée à emprunter le langage de
l’adversaire (dominateur et organisé) dans l’optique d’interventions politiques efficaces.
Enfin, le principe de totalité est lié à l’enjeu global (total) de la domination dans le champ
d’action historique, c’est-à-dire les rapports de force tels qu’ils existent à un moment donné et
dont les acteurs se disputent la domination.
Étudier les objets, la nature et la forme des mouvements sociaux aide à connaitre une société
et les changements qui la concernent. Comme l’as notamment montré le sociologie français
Alain Touraine, les mouvements sociaux possèdent des caractéristiques communes qui
permettent de les définir :(Barbusse B, Glaymann D,
2005, P 274)
➢ Ils sont portés par des objets des groupes spécifiques, ce qui donne une identité à
chaque mouvement (ouvrier, syndical, féministe, écologiste, altermondialiste, etc.) et
permet à ceux qui y participent de s’y reconnaitre, voire d’y construire d’une part de
leur propre identité.
➢ Ils s’opposent à un adversaire assez précisément désigné, ce qui traduit parallèlement
les intérêts qu’ils défendent et ceux qu’ils combattent : on distinguera ainsi un
mouvement anticapitaliste, anticolonialiste, anti- nucléaire ou anticonformiste.
➢ Ils proposent leur propre projet, qu’il soit global dans le cas d’un projet de société
(socialiste, autogestionnaire, libérale) ou partiel dans le cas d’une question particulière
(défense de l’égalité entre homme et femmes ou du respect de l’environnement).
L’analyse d’Alain Touraine
Touraine se démarque du courant de « mobilisation des ressources » dont il critique la vision
« pauvre et superficielle » des mouvements sociaux comme simples supports de
revendications matérielles. Celle-ci réduit les mobilisations à des groupes de pression, en
néglige les contenus idéologiques, les dimensions de solidarité, d’hostilité à l’adversaire. Mais
la définition du mouvement social par Touraine est aussi très particulière, au sein de
l’approche NMS. Pour lui, il y a dans chaque société un mouvement social et un seul qui soit
placé au cœur des contradictions sociales, qui incarne non une simple mobilisation, mais un
projet de changement social, de « direction de l’historicité, c’est-à-dire des modèles de
conduite à partir desquels une société produit ses pratiques ». Pour parvenir à ce statut de
mouvement social, une mobilisation doit à la fois être capable de définir clairement un
adversaire social, de se donner une identité sous la forme d’un projet qui porte la vision d’une
autre organisation sociale et non d’une simple revendication ponctuelle. Le travail de
Touraine et de ses collègues (F. Dubet, M. Wieviorka) autour des mobilisations étudiantes,
régionalistes, antinucléaires prend alors la connotation d’une quête du mouvement social apte
à prendre la relève du mouvement ouvrier. « On comprend mieux maintenant, dans ce
contexte historique, l’objectif central de notre recherche, découvrir le mouvement social qui