Telechargé par Senyon Améganvi

MAEP GAGEURE POUR LE DEVELOPPEMENT DE L AFRIQUE

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01/01/2008
LE MAEP : GAGEURE POUR LE
DEVELOPPEMENT DE L'AFRIQUE
Réflexions
Senyon AMEGANVI; Annassan AMEGANVI
Depuis 2003, un nouveau sigle vient enrichir le vocabulaire de nombreux
béninois et semant la confusion dans les esprits de ces béninois : le MAEP. Définit
comme le mécanisme africain d'évaluation par les pairs ; aujourd'hui entre les
pairs. Cet outil de contrôle assez singulier de l'Union Africaine (UA), a le même
cigle que le MAEP : Ministère de l'Agriculture de l'Elevage et de la Pêche. Ces
deux homonymes n'ont en réalité rien de commun. Ces derniers jours, le MAEP
comme outil de l'UA opère sa résurgence et fait la une de tous les média
(nationaux et internationaux). Depuis le dernier sommet de l'UA à Addis-Abeba
(Ethiopie) où le président de la république du bénin est allé présenter le rapport
du MAEP sur la gouvernance au Bénin, ce terme a été galvaudé par les
journalistes nationaux et internationaux. Au lendemain de ce sommet, la radio
France internationale (RFI) a été une des premières radios internationale a
annoncé les 1.000 milliard de FCFA que venait de gagner le Bénin par le biais du
MAEP. Relayé par les médias africains et surtout béninois, le citoyen béninois
désormais s'interroge sur cet instrument capable de faire bénéficier aux Etats
des ressources colossales. C'est dans ces questionnements, que nous voudrions
partager ici avec vous les analyses qui sont les nôtres sur le MAEP. Mais avant, il
requiert de nous, sans sous évaluer vos connaissances, vous informer de ce
qu'est le MAEP.
Le Mécanisme africain d'évaluation par les pairs, est un outil de mesure de la
gouvernance. En d'autres termes il est : « un instrument auquel les Etats
membres de l'Union Africaine ont volontairement adhéré comme mécanisme
d'autoévaluation. » [UA, NEPAD, 2003]. Il affiche comme objectifs d'encourager
l'adoption de politiques, normes et pratiques en vue de promouvoir la stabilité
politique, une croissance économique élevée, un développement durable et une
intégration économique sous régionale et continentale accélérée grâce au
partage d'expériences et au renforcement des meilleures pratiques et des
acquis. Il affiche comme principe, la crédibilité des acteurs intervenants, leur
liberté de toute influence politique, leurs compétences techniques. C'est dire
donc que le MAEP entend travailler avec des hommes et femmes reconnus pour
leur notoriété et leur attachement à la cause du développement du Continent,
sans parti pris pour les idéologies politiques.
Le MAEP, intervient dans un contexte géopolitique, économique et social
contrasté de l'Afrique. Il a été élaboré pour asseoir, non pas de nouvelles bases,
mais d'assainir celles existantes et d'aplanir les divergences de politiques et de
normes. Il apparaît à un moment où le Continent doit faire face à de nombreux
défis : l'avancée technologique ; l'énergie ; la défense stratégique du territoire ;
le logement décent ; les soins de santé primaire ; les revenus salariaux bas ; la
démographie ; les pandémies ; les guerres ; etc.
Pour ne pas rester sur les berges du fleuve de l'histoire, ou pour ne pas se
retrouver éjecter de celui-ci, il s'impose aux Etats africains de réagir et d'unir les
forces, d'harmoniser les politiques et normes. Mais comment cela pourra se faire
au regard des divergences de vision et des jeux d'acteurs autour du MAEP et du
NEPAD ? Comment pareil idéal peut être approché, dans un contexte dominé
par l'endettement exponentiel des Etats africains ? Comment enfin, l'initiative
peut-elle porter quand seulement 28 Etats sont partis au mécanisme et 06 ont
pu réussir le pari de l'évaluation jusqu'à ce jour ?
I. Les controverses autour d'un outil de développement
A. Contexte géopolitique, économique et social de l'avènement du NEPAD
1. Contexte géopolitique : la démocratie comme model de gouvernement
Après 1945, s'ouvre la période de la guerre froide. Les deux superpuissances
(Etats-Unis et URSS) s'arment massivement et s'affrontent de manières
indirectes, soucieuses de préserver et d'accroître leur zone d'influence. Chacune
d'elles va agir à travers des stratégies bien ficelées pour contrecarrer l'influence
de l'autre et les velléités d'alliance. Le soutien apporté par les deux
superpuissances à leurs alliés respectifs ne tenait pas compte du type de régime
en place, ni des valeurs prônées aujourd'hui par le système démocratique (droits
et libertés fondamentaux de la personne humaine), pourvu que ces régimes
adhèrent à leur idéologie et respectent leurs objectifs. C'est ainsi que les EtatsUnis par le truchement de la Banque mondiale et du FMI, apportent son soutien
à ses alliés stratégiques dans différentes régions du globe (Mobutu Sesse Seko
au Zaïre de1 965 à1997). Le député français Yves Tavernier dans le rapport 2000
de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur les activités et le
contrôle du FMI et de la Banque mondiale dira que leurs rôles étaient de fidéliser
la clientèle du tiers monde en faveur du monde occidentale. Après la chute du
mur de Berlin, le triomphe des USA dans cette guerre a servi de tremplin de
l'euphorie démocratique constatée dans les années 1990 dans le camp de ses
alliés. Ces derniers vont conditionner leurs aides à l'endroit des Etats Africains à
travers l'adoption du régime démocratique comme seul model de gouvernement
qui intègre la libéralisation politique et du marché. Désormais, les pays africains
ne bénéficieront des aides qu'à l'adoption de la démocratie comme mode de
gouvernement.
2. Contexte économique : Endettement de l'Afrique, les différents plans
d'ajustement structurel et l'euphorie de la mondialisation
Au lendemain de la seconde guerre mondiale (GM), le plan Marshal conçu et mis
en place par les Etats-Unis pour la reconstruction de l'Europe, a eu comme
conséquence la prolifération de l'euro dollars en Europe. Et pour éviter
l'assèchement de leur coffre-fort en or par le principe de la convertibilité, les
États- Unis ont encouragé (vers les années 1970) les banques occidentales à
prêter leur surplus aux pays du sud à des taux bien alléchant pour ces derniers.
C'était la première cause de l'endettement. Ensuite, le choc pétrolier de 1973
qui a apporté d'énormes revenus aux pays producteurs va amplifier
l'endettement des Etats du sud. D'autres parts, la récession provoquée par la
2ème GM dans les pays du nord, s'est généralisée après les chocs pétroliers (1973
- 1975) et a eu comme incidence la mévente des produits manufacturés du nord.
Pour remédier à cette situation, les Etats du nord ont proposé des prêts au Etats
du sud pour élever leur pouvoir d'achat dans le but d'écouler leurs produits.
Enfin, la dernière cause de l'endettement de l'Afrique est les financements
provenant des institutions financières internationales (banque mondiale, FMI
etc.) qui ont conçu un plan de développement pour les pays du sud :
-
Prêts aux Etats du tiers-monde
modernisation de l'industrie et de l'agriculture d'exportation
Hausse des revenus d'exportation
Remboursement de la dette et participation à) la croissance mondiale.
Selon le rapport du PNUD sur le développement mondial1 : « le poids de la dette
étouffe les budgets publics de nombreux pays en développement, et, ce bien
souvent pour rembourser le financement des projet improductifs entrepris
longtemps auparavant par des régimes autoritaires. » c'est cette triste situation
de la crise de la dette qui a amené l'Organisation de l'unité africaine (OUA) qui a
vu le jour en Mai 1963 à Addis-Abeba, à concevoir un plan de sortir de crise en
1980, dénommé le plan de Lagos (PAL). Mais ce plan fut "torpillé" par les IFI qui
en lui ont préféré les Programmes d'ajustement structurels [Millet ; 2005] (PAS2)
avec des conséquences néfastes qui restent encore visibles sur le plan social.
Selon Aminata Traoré : « l'ajustement structurel est au corps social ce que le virus
1
2
PNUD, rapport mondial sur le développement humain 2002
Le PAS comme thérapie de choc a pour but de prendre des mesures immédiates pour attirer les
capitaux étrangers et trouver des ressources pour rembourser la dette : abandon des subventions aux
produits et services de premières nécessité, réduction drastique des dépenses publics notamment les
budgets sociaux, dévaluation de la monnaie locale, taux d'intérêts élevé, développement des
exportations, ouverture totale des marchés et suppression des barrières douanières, libéralisation de
l'économie, privatisation massive des entreprises publiques, etc.
du sida est au corps humain : il le fragilise par des réformes économiques
inopportunes, à tel point que les défaillances qu'il aurait dû être en mesure de
gérer prennent des dimensions dramatiques, d'autant plus que les solutions
prônées sont externes ».[Traoré A., 2002 ]
3. Contexte social : les aléas climatiques (avancé du désert au sud du Sahara)
Le contexte géopolitique dominé par l'imposition du model démocratique et
celui du surendettement se retrouvent aggravées par un contexte social
désastreux caractérisé par :
1) la multiplicité des foyers de conflits armés due aux luttes fratricides
renforcées par des réseaux mafieux occultes à la quête de la déstabilisation des
gouvernements politiques pour l'exploitation des ressources minières ;
2) l'aggravation de la pauvreté : 340 million vivent avec moins d'un dollars
US, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans est de 140 pour 1000 ;
plus de 42 pour 100 de la population totale de l'Afrique n'a pas accès à l'eau
potable; extrême vulnérabilité de l'agriculture ; 2,5 million de morts de sida par
an... C'est ce climat morose et sombre qui a vu naître le projet du nouveau
partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD)
B. Les règles du jeu du processus de développement
L'une des principales difficultés de toute négociation est de savoir de quoi l'on
parle. Plus précisément, pour chaque partie, d'arriver à avoir le plus exactement
possible quels sont les enjeux de l'autre. [Reynaud, 2004] Et dans le cadre du
MAEP et du projet qui l'a institué c'est à dire le NEPAD, il va s'en dire que les
règles sont fonctions des intérêts des différents acteurs en présence. Dans le
processus de mise en œuvre du NEPAD, c'est d'abord les Africains puis, les
bailleurs. Pour un projet aux ambitions de développement du Contient, qui a
surtout besoin de financements colossaux, l'appui des anciens créanciers connus
sous la désignation de communauté internationale s'impose. En tout cas, de
l'avis des initiateurs de la « Nouvelle initiative africaine », la réalisation des
objectifs de développement ne saurait se faire autrement à savoir : l'annulation
de la dette publique, l'ouverture aux investissements directs étrangers, la
mobilisation des ressources et épargnes locales.
La principale règle dans le processus de développement est
la gouvernance. Quelle soit économique, politique ou des entreprises, elle
signifie : la création d'institutions politiques et juridiques sérieuses, fonctionnant
bien, considérées par les citoyens comme étant légales, les rendant autonomes
tout en leur permettant de prendre part aux prises de décisions affectant leurs
vies quotidiennes. La gouvernance se veut aussi un cadre de transparence dans
la gestion des affaires de l'Etat, un système dans lequel la responsabilité sociale,
l'obligation de rendre compte, la discipline etc. confortent ou renforcent la
confiance des investisseurs.
Les différents acteurs sont quasi acquis pour le principe de la gouvernance qui à
leurs avis constitue la corrélation évidente entre croissance et bien-être. Si le
développement s'entend comme amélioration constante du bien-être des
populations et la croissance l'amélioration constante des revenus directs et
indirects des industriels et des gouvernants, il n'y a plus alors de doute que la
gouvernance ne puisse permettre l'investissement et la rétribution équitable des
revenus aux populations en vue de leur bien-être.
C. La divergence des intérêts ou objectifs des acteurs
Mais, dans le cadre du MAEP, on dénote une divergence de point de vue,
d'appréciation de la gouvernance. Il faut le rappeler, les acteurs en présence ici
sont : les bailleurs de fonds ou partenaires stratégiques, les Etats partis au
mécanisme et les évaluateurs.
En remontant aux origines du NEPAD, avec ses ambitions d'ouverture aux
marchés privés3 devant créer les conditions d'offres offensives, on remarque que
l'outil de gouvernance qu'est le MAEP était destiné à fournir aux bailleurs la
garantie d'une bonne gestion des fonds qui seront injectés dans le
développement. Le MAEP pour les bailleurs est donc un instrument pour avoir
de la part des Africains eux-mêmes la photographie de l'Etat de la gouvernance
selon des domaines stratégiques4 (démocratie et gouvernance politique,
gouvernance et gestion économique, gouvernance des entreprises,
développement socioéconomique). Sur la base de cette photographie, ils
pourront décider d'investir ou non. Il constitue aussi un cadre propice à
l'influence néolibérale à travers l'imposition de la démocratie et des conditions
à plus d'ouverture des marchés intérieurs aux produits extérieurs. Pour les
gouvernants (Chefs d'Etats et de gouvernements) partis au mécanisme, le
processus d'évaluation assurera la conformité aux normes internationales de
3
Le NEPAD aux ambitions de développement, de décollage de l'Afrique avait puisé dans les rapports de la Banque
Mondiale (rapport Berg et autres) l'option de mobilisation des fonds nécessaires à la réalisation des projets par le
financement étranger, creusant dès lors sa propre tombe au regard des insuccès du Plan d'Actions de Lagos.
4
Face aux vifs reproches du Bénin, il a été admis que les domaines stratégiques ne sont pas exhaustifs mais des
aspects transversaux peuvent être tolérés et des ajouts opérés au choix par les pays partis au mécanisme
gestion et de gouvernance en vue de garantir l'interception des investissements
privés étrangers. Par contre pour les acteurs du processus d'évaluation
(Commissions nationales de mise en œuvre, le Panel des Eminentes
personnalités, l'équipe d'évaluation) au-delà de la connotation d'auto
flagellation que pouvait laisser transparaître le mécanisme d'autoévaluation,
c'est également une occasion pour :
1) uniformiser les politiques, les standards propices à la stabilité politique,
à la croissance économique, au développement durable ;
2) partager les expériences et renforcer les meilleures pratiques tout en
identifiant les limites et les besoins ;
3) favoriser l'apprentissage et le renforcement des capacités de décision
des Pairs à travers le dialogue et les arguments constructifs ;
4) faire l'exercice de l'abolition de l'indifférence installée par le principe de
souveraineté et de non-ingérence.
En un mot, dans sa forme actuelle, le mécanisme africain d'évaluation par les
pairs constitue le socle, moteur essentiel pour le développement de l'Afrique et
de la réalisation des objectifs du NEPAD dans sa forme revisitée et corrigée qui
prendra en compte les aspirations profondes des populations à la base.
II. Le MAEP : outil de réalisation d'un projet controversé
Après l'initiative audacieuse mais sans lendemain du Programme d'Action de
Lagos (PAL) de 1980, les Africains ont connu la « Nouvelle initiative africaine »
qui deviendra la NEPAD. Un projet de développement de l'Afrique exposé à
Lusaka (Zambie) en juillet 2001 qui devrait permettre de résoudre des défis
urgents à savoir l'éradication de la pauvreté et la promotion du développement
socioéconomique en particulier grâce à la démocratie et à la bonne gouvernance
[UA, NEPAD, 2003]. Mais c'est sans compter avec les critiques objectives de la
société civile africaine.
A. Les critiques sur le NEPAD, ses origines biaisées
Le NEPAD (New Partnership for African Development) dans sa forme actuelle est
la fusion de deux projets à savoir le Millenium African Renaissance Program
(MAP) des présidents Thabo Mbéki, Olusegun Obasanjo et Bouteflika Abdelaziz
et le Plan Oméga de Abdoulaye Wade. Le premier plan était un projet
d'indépendance
vis-à-vis du Nord et respectant les valeurs culturelles africaines (chouchoutant
les milieux panafricanistes), le second tourné vers la création d'un marché
commun africain ouvertement libéral. [Millet, Toussaint, 2002]. Les critiques du
document final rapportent que le projet de développement de l'Afrique dans sa
version fusionnée ne fait pas de part favorable aux questions à savoir :
- Quel développement veulent les Africains ?
- Comment faire valoir au mieux les atouts de l'Afrique ?
Le NEPAD s'est écarté des besoins réels de bien-être des Africains et s'est
embourbé dans des considérations de rattrapage ou de fossé à combler entre
Nord et Sud, offrir plus de chances aux Multinationales pour qu'elles créent en
Afrique les conditions offensives, ... Il accorde plus d'importances aux
infrastructures de communications (essentielles on le reconnaît) que les
désagréments que les populations vont devoir subir par leur mise en place. Le
NEPAD offre un cadre propice la globalisation et la focalisation sur la technologie
que de chances pour un changement significatif dans les rapports de forces entre
l'Afrique et le Nord.
En tant qu'œuvre des Chefs d'Etats ci-dessus cités, l'opinion civile africaine a du
mal à y croire au regard de la déclaration de l'ancien Premier Ministre anglais
Tony Blair qui affirmait en 2003 que : « C'est dans un esprit de solidarité
internationale que le gouvernement travailliste de Grande-Bretagne a ouvert la
voie à l'annulation de la dette du Tiers-monde, augmenté l'aide
proportionnellement au PIB comme aucune nation ne l'a fait, et conçu le Nepad,
nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique »[Millet, 2005]
B. Le MAEP : outil d'auto flagellation ou de renforcement de capités ?
Dans un pareil climat de suspicion sur les origines réelles du NEPAD, le doute
s'installe dans les esprits quant à l'outil de mesure de la gouvernance qu'est le
MAEP.
Dans le cas spécifique de l'évaluation du Bénin en matière de gouvernance, les
acteurs (parties prenantes) sont intervenus à plusieurs reprises sur l'utilité d'un
processus d'autoévaluation de la gouvernance d'un pays.
Même s'il est vrai que le caractère d'autoévaluation en matière de gouvernance
présente une façade d'auto flagellation, il n'en demeure pas moins vrai qu'il
permet aux parties prenantes (pouvoirs publics, secteurs privés, acteurs civils)
de faire le point sur les pratiques de gestions couronnées de succès, les
dysfonctionnements et entrevoir ensemble la mise en place de cadres ou de
stratégies d'amélioration des ratés de gestion. En d'autres termes, dans sa
philosophie de base, le MAEP offre un cadre de gouvernance concertée où les
citoyens se retrouvent écoutés, consultés sur les questions globales de
développement. Il constitue sans nul doute un outil de renforcement des
capacités des parties prenantes à opérer en synergie.
Mais tout ceci n'épargne pas le MAEP d'un avenir incertain.
III. L'avenir incertain du MAEP
Clamé et promu comme outil essentiel à l'atteinte des objectifs du NEPAD, le
MAEP est guetté par de nombreux problèmes.
A. Problèmes liés au financement de la mise en œuvre du MAEP (évaluation
et mise en œuvre du programme d'actions) et l'appropriation du
programme par les Etats partis au mécanisme
En tant qu'outil, le MAEP est prévu être financé dans sa phase active (évaluation
et autoévaluation) par les contributions financières des Etats membres de
l'union. Cela suscite une interrogation. Quand on sait que l'une des raisons du
disfonctionnement de l'UA est la non régularité des contributions, il est curieux
de se demander si ces contributions à problème suffiraient à la réalisation du
MAEP ? L'inventaire des capacités financière de l'union infirme cette thèse. Plus
encore, en prenant pour exemple l'exercice du Bénin, on s'aperçoit que la
contribution qui a été difficile a obtenir est celle de l'Etat béninois démontrant
quelque part que les apports internes des Etats partis sont souvent insuffisants
et arrivent tardivement à être mobilisé pour assurer correctement la conduite
de l'exercice.
Après la phase d'évaluation et la rédaction du programme d'actions un besoin
s'impose celui du financement. Les documents sont formels là-dessus, ce
financement viendra des partenaires au développement. Donc encore une fois,
recours sera fait pour l'endettement, l'accompagnement financier, etc.
Un autre problème, c'est l'appropriation des résultats par les gouvernements des
Etats partis au mécanisme. Si jusqu'aujourd'hui nous des feed-back positif de la
part du Ghana, la situation de conflit au Kenya et réclame que la réflexion y soit
portée.
Le Bénin a opéré un grand pas en procédant au lancement officiel du rapport et
à cette occasion, il a invité le Ghana. Quel avenir sera toutefois donné au rapport
quand l'opinion sait son exemplarité à faire de grandes études et à les disposer
à l'intelligence et à la réflexion rongeuses des rats et cafards.
Le programme d'actions issu de l'évaluation trouvera-t-il- terrain favorable dans
les programmes d'action de gouvernement ?
B. Problèmes liés à l'harmonisation de la méthodologie de la conduite du
processus et à la diffusion des expériences de gouvernance
Sur un tout autre registre, le MAEP est pisté par une autre difficulté liée cette
fois-ci à sa méthodologie et à la diffusion des expériences. Tous les acteurs
évaluateurs reconnaissent que l'opération du 12 février 20085 constitue une
première. Le processus prévu pour durer 18 mois, a été exécuté en 26 mois. Une
preuve déjà que le délai imparti n'est pas réaliste, et doit être revu par le Forum
afin de permettre aux évaluateurs d'inscrire convenablement l'exercice dans une
dynamique de participation des populations et de l'ensemble des parties
prenantes. Un cadre de partage d'expérience doit être mis en place (comme l'ont
convenu les membres des commissions ghanéenne et béninoise) lors de la visite
d'échanges de la commission ghanéenne au Bénin en Février 2006. Ce cadre de
partage et de convergence des méthodologies assurera la contextualisation des
approches méthodologies en vue de garantir la réussite des exercices futurs, en
limitant les obstacles de communication, de versement des cotes part des Etats,
etc.
Que faire alors ?
5
Il s'agit du lancement officiel du rapport au Palais des Congrès de Cotonou par le Président Dr. YAYI Boni et
Prof. Mme Marie-Angélique SAVANE
IV. Les défis de l'avenir
Avant de proposer une réponse à cette épineuse question, il me plait de rappeler
ici une citation de Frantz FANON : « Ne payons pas de tribut à l'Europe en créant
des Etats, des institutions et des sociétés qui s'en inspirent. » Nous devons cesser
de mimer l'occident, car le mimétisme étouffe les initiatives intellectuelles et
spirituelles. Nous n'avons pas l'intention de susciter chez vous un quelconque
afro-pessimisme, pas du tout. Nous sommes jeunes et nous disposons assez de
capacités pour anticiper sur un éventuel échec du MAEP. Dans ce sens comme
approche de solution à ces différentes difficultés autour du MAEP, nous
suggérons :
 une harmonisation des points de vu des parties prenantes de la vision
autour du MAEP. Ensuite une Redéfinition des stratégies des parties
prenantes, à cet effet, le gouvernement doit entant qu'acteur principal
adopter une approche de dialogue et de concertation avec les autres
acteurs de l'Etat ;
 le secteur privé africain, quant à lui doit désormais saisir la perche que lui
tend l'Etat pour mieux investir dans les projets de production, mieux
épargner afin de renforcer le partenariat Public Privé, seul gage pour un
développement endogène de l'Afrique. Car les pays africains doivent
désormais compter sur leur secteur privé au lieu de demeurer dans un
assistanat sempiternel ;
 Enfin, la société civile doit se mobiliser, se prendre en charge et cesser de
tendre les mains aux bailleurs avant d'accomplir leur devoir citoyen.
Quelqu'un disait : « qui te tient par le ventre, te tient au respect. ». Elle
peut s'inspirer des actions de la société civile des pays du nord qui
s'inscrive dans une démarche de production pour tirer les ressources
nécessaires à la réalisation de leur mission ;
 En dernier point, il urge pour les instances de l'Union de mettre en place
pour l'outil d'évaluation, notamment dans le processus de l'évaluation
périodique de la mise en œuvre du programme d'actions, un cadre ou des
mesures contraignantes ou coercitives. Ces dernières, si elles sont établies
inciteront les Etats partis au processus à respecter plus encore leurs
engagements dans la mise en œuvre des recommandations issues des avis
consultatifs des Pairs.
Conclusion
Quelle Afrique à l'heure de la mondialisation ? L'heure est aux perspectives.
L'heure est à la création de nouvelles voies inédites qui intègrent l'identité négro
africaine du continent dans toutes ses dimensions. L'Afrique doit rompre avec le
conformisme et tout complexe qui annihilent tout élan vers le développement.
Nous avons l'obligation de croire en l'Afrique et de compter sur les Africains. Le
MAEP qui est le fruit des " Africains" doit intégrer les valeurs africaines. Déjà le
principe de « non indifférence » qu'il prône est déjà un pas de géant. Mais nos
critiques et réflexions doivent participer à le parfaire. C'est le seul moyen pour
les Africains de surprendre agréablement l'humanité.
« De l'Afrique et des Africains, l'humanité s'attendra toujours à quelque
chose de nouveau. »
Ouvrages et articles de référence
1. MILLET D., 2005, L'Afrique sans dette, CADTM et Syllepse, Liège et Paris
2. EKANGA O. O., 1999, Les entrailles du porc-épic, Grasset
3. MILLET D., TOUSSAINT E., 2002, 50 questions 50 réponses sur la dette, le
FMI et la Banque mondiale, CADTM et Syllepse, Liège et Paris
4. REYNAUD J.-D., 2004, Les règles du jeu : l'action collective et la régulation
sociale, Armand Colin, Paris
5. ROBERT A.-C., 2006, L'Afrique au secours de l'Occident, Ed. de l'Atelier
6. STIGLITZ J. E., 2002, La grande désillusion, Fayard, Paris
7. TRAORE A. D., 2002, Le viol de l'imaginaire, Fayard, Paris
8. Union Africaine, 2001, Nouveau Partenariat pour le développement de
l'Afrique (NOPADA)
9. Union Africaine, NEPAD, Mécanisme Africain d'évaluation entre pairs :
documents fondamentaux
10.Union Africaine, NEPAD, Mécanisme Africain d'évaluation par les pairs :
Country self-assessment for APRM
11.ZIEGLER J., L'empire de la honte,
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