Théorie algébrique des graphes

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*Th´eorie alg´erique des graphes
Dans ce chapitre, nous ne faisons qu’esquisser quelques r´esultats mettant en ´evidence les liens
entre la th´eorie des graphes et l’alg`ebre lin´eaire (par exemple, on ´etudie le spectre des graphes
r´eguliers ou bipartis). On y pr´esente de mani`ere d´etaill´ee la th´eorie de Perron-Frobenius
(sans d´emonstration du th´eor`eme principal) avec comme application directe, l’estimation
du nombre de chemins de longueur nque l’on peut trouver dans un graphe `a composantes
connexes primitives.
Introduction : Rappels et compl´ements
Valeurs propres et vecteurs propres
Soient nNet A∈ Mn(R) .
Definition 1 – Soit λK. On dit que λest une valeur propre (en abr´eg´e : vp) de (ou
:pour)Asi, et seulement si :
X∈ Mn,1(K),(X6= 0 et AX =λX).
– Soit X∈ Mn,1(K). On dit que xest un vecteur propre (en abr´eg´e :
vp)de (ou :
pour)Asi, et seulement si :
X6= 0 et (λK, AX =λX).
Les valeurs propres et vecteurs propres sont globalement appel´es ´el´ements propres. On
appelle spectre de A, et on note SpK(A) (ou : Sp(A)) l’ensemble des valeurs propres de A.
Remark 1 Par d´efinition, un vecteur propre n’est jamais nul.
Soient nNet A∈ Mn(K) et λKon a
λSpK(A)ker (AλIn)6={0} ⇐AλIn/GLn(K)
rg (AλIn)< n
Remark 2 Soient nNet A∈ Mn(K)
A /∈ GLn(K)0SpK(A)
Les valeurs propres et vecteurs propres sont globalement appel´es ´el´ements propres. On
appelle spectre de A, et on note SpK(A)(ou : Sp(A)) l’ensemble des valeurs propres de A.
Exercise 1 Soit
A=
010
101
010
∈ M3(R).
1. D´eterminer le polynˆome caract´eristique PAde A.
2. V´erifier que Aest diagonalisable sur R.
3. La matrice Aest-elle inversible?
4. Trouver une matrice inversible Ptel que A=P DP 1.
1
Solution 1 Soit
A=
010
101
010
∈ M3(R).
1. On a PA(X) =
X1 0
1X1
0 1 X
=X(X21) + X=X(1 X2+ 1) = X(2 X2).
D’o`u Sp(A) = 0,2,2
2. On a PAest scind´e et les racines de Asont simples donc Aest diagonalisable sur R.
3. On a 0 Sp(A),donc An’est pas inversible.
4. Afin de trouver une matrice inversible Ptel que A=P DP 1, cherchons E0, E2et
E2.
On a
E0= ker A=
X=
x
y
z
∈ M3,1(R)/AX = 0
=
X=
x
y
z
∈ M3,1(R)/
y= 0
x+z= 0
y= 0
=
X=
x
y
z
∈ M3,1(R)/
y= 0
z=x
xR
=V ect(v1)
avec v1=
1
0
1
.
D’autre part,
De mˆeme
E2= ker A+2I3=
X=
x
y
z
∈ M3,1(R)/A+2I3X= 0
=
X=
x
y
z
∈ M3,1(R)/
2x+y= 0
x2y+z= 0
y2z= 0
=
X=
x
y
z
∈ M3,1(R)/
y=2x
z=x
xR
=V ect(v3)
avec v3=
1
2
1
.
2
Ainsi P=
1 1 1
022
1 1 1
et D=
0 0 0
02 0
0 0 2
avec A=P DP 1.
Soit A∈ Mn(K). L’application
RR
λ7−det (AλIn)
est un polynˆome, appel´e polynˆome caract´eristique de A, et not´e χA. Ainsi si A=
(aij )1i,jnalors
χA(λ) = det (AλIn) =
a11 λ a12 ··· a1n
a21 a22 λ··· a2n
.
.
........
.
.
an1an2ann λ
Proposition 1 Soient nN− {0,1}et A∈ Mn(K).On a :λK
χA(λ) = (1)nλn+ (1)n1tr (A)λn1+··· + det (A).
Valeurs propres d’un graphe
Soit G= (S, A) un multi-graphe non oriene dont les sommets sont ordonn´es par S=
{x1,··· , xn}. La matrice d’adjacence de Gest la matrice A(G) dont l’´el´ement [A(G)]i,j est
´egal au nombre d’arˆetes {xi, xj}pr´esentes dans A, 1 i, j n. (Pour rappel, Aest en
g´en´eral un multi-ensemble.) Il s’agit donc d’une matrice sym´etrique `a coefficients entiers
naturels. Le polynˆome caract´eristique de G, not´e χA(G), est le polynˆome caract´eristique
de sa matrice d’adjacence A(G). Par abus de langage, on parlera des valeurs propres de
G, ´etant sous-entendu qu’il s’agit des valeurs propres de A(G). On parlera donc aussi du
spectre de G. On peut remarquer que les ´el´ements de la matrice d’adjacence d’un graphe
simple appartiennent `a {0,1}et que la trace de cette matrice vaut 0.
Remark 3 En se rappelant quelques r´esultats du cours d’alg`ebre de premi`ere ann´ee, on re-
marque que la matrice d’adjacence d’un graphe non orient´e est toujours diagonalisable par
une matrice orthogonale (pour chaque valeur propre, les multiplicit´es alg´ebrique et g´eom´etrique
coincident) et que ses valeurs propres sont r´eelles.
Example 1 Soit le graphe
x1−−−x2
 
x3
Alors
A(G) =
011
101
110
3
et donc
χA(G)= det (A(G)λI3)
=
λ1 1
1λ1
1 1 λ
C1C1+C2+C3
=
λ+ 2 1 1
λ+ 2 λ1
λ+ 2 1 λ
=
λ+ 2 1 1
0λ1 0
0 0 λ1
= (λ+ 2) (λ+ 1)2
D’o`u Sp (G) = {−1,2}.
Theorem 1 Deux graphes G1et G2sont isomorphes si et seulement si ils ont, `a une per-
mutation pr`es, la mˆeme matrice d’adjacence. En d’autres termes, il existe une matrice de
permutation Ptelle que
A(G1) = P1A(G2)P.
Definition 2 Dans un graphe simple, on appelle triangle, tout triplet d’arˆetes distinctes deux
`a deux de la forme {a, b},{b, c},{c, a}(i.e., tout circuit de longueur trois form´e d’arˆetes
distinctes).
Proposition 2 Si le polynˆome caract´eristique de G= (S, A)est de la forme
χG(λ) = (1)nλn+c1(1)n1λn1+c2(λ)n2··· +cn.
alors certains coefficients de χGsont en relation directe avec G:
·c1est le nombre de boucles de G, en particulier, si Gest simple, c1= 0.
·Si Gest simple, alors (c2)est le nombre d’arˆetes de G.
·Si Gest simple, alors (c3)est le double du nombre de triangles de G.
Le premier point est imm´ediat. Le coefficient c1est la somme des ´el´ements diagonaux de
A(G). Si Gest simple, les sous-matrices diagonales 2 de A(G) de dimension 2 sont de la
forme 0 1
1 0 ou 0 0
0 0
Le coefficient c2´etant la somme des d´eterminants de ces sous-matrices ceux ci valant respec-
tivement 1 et 0, il est clair que c2=Card (A) . Pour le dernier point, on raisonne de la
mˆeme fa¸con. Les sous-matrices diagonales non nulles de A(G) de dimension 3 sont d’une
des formes suivantes (`a une permutation des lignes et des colonnes pr`es, ce qui ne change
pas la valeur du d´eterminant)
011
101
110
,
011
100
100
ou
011
101
110
Les deux premi`eres ont un d´eterminant nul et la troisi`eme a un d´eterminant ´egal `a 2. Le
coefficient c3´etant la somme des d´eterminants de ces sousmatrices et la derni`ere matrice
correspondant `a la pr´esence d’un triangle dans G, on obtient le r´esultat annonc´e.
Remark 4 On voit donc que le polynˆome caract´eristique de A(G)fournit des renseigne-
ments sur le graphe G. Cependant, deux graphes non isomorphes peuvent avoir le mˆeme
polynˆome caract´eristique. On parle alors de graphes cospectraux.
4
Graphes bipartis
Definition 3 Un graphe est dit biparti si on peut partager son ensemble de sommets en
deux parties Aet Btels qu’il n’y ait aucune arˆete entre ´el´ements de Aet aucune arˆete entre
´el´ements de B. Autrement dit, les graphes bipartis sont ceux que l’on peut colorer en utilisant
au plus deux couleurs.
Le th´eor`eme suivant, dˆu `a K¨onig en 1916, caract´erise les graphes bipartis :
Theorem 2 Un graphe est biparti si et seulement s’il ne contient pas de cycles de longueur
impaire.
Rappelons que la longueur d’un cycle est ´egale au nombre d’arˆetes qu’il contient. En parti-
culier, d’apr`es le th´eor`eme pr´ec´edent, les arbres sont des graphes bipartis.
Proposition 3 Soit G= (S, A)un graphe biparti. Si λest valeur propre de G, alors (λ)
l’est aussi. Autrement dit, le spectre d’un graphe biparti est sym´etrique par rapport `a 0.
Theorem 3 Soit G= (S, A)un multi-graphe (orient´e ou non) tel que S={x1,··· , xn}.
Pour tous i, j ∈ {1,··· , k}et pour tout n > 0,
[A(G)n]i,j
est exactement le nombre de chemins de longueur njoignant xi`a xj.
On proc`ede par r´ecurrence sur n. Le cas de base n= 1 d´ecoule de la d´efinition mˆeme de
la matrice d’adjacence. Supposons le r´esultat v´erifi´e pour n > 0 et v´erifions-le pour (n+ 1).
On a bien sˆur
[A(G)n+1]i,j =
k
X
s=1
[A(G)n]i,s[A(G)]s,j .
Par hypoth`ese de r´ecurrence,[A(G)n]i,s compte le nombre de chemins de longueur njoignant
xi`a xs. De plus, [A(G)]s,j compte le nombre d’arcs/arˆetes joignant xs`a xj. Par cons´equent,
[A(G)n]i,s[A(G)]s,j compte le nombre de chemins de longueur (n+ 1) joignant xi`a xjen
passant par xs, d’o`u la conclusion.
Th´eorie de Perron-Frobenius
La connexit´e d’un graphe se traduit par une propri´et´e imm´ediate de sa matrice d’adjacence.
On peut mˆeme, dans certains cas, obtenir des renseignements plus fins sur la longueur
des chemins joignant deux sommets quelconques d’une composante connexe. Donnons tout
d’abord deux d´efinitions concernant les matrices ‘a coefficients positifs ou nuls (faites atten-
tion dans les deux ´enonc´es `a l’ordre des quantificateurs). Nous verrons ensuite le rapport
entre ces matrices et les graphes.
Definition 4 Une matrice carr´ee A= (aij )1i,jn`a coefficients (r´eels) positifs ou nuls est
irr´eductible si pour tous i, j ∈ {1,··· , n}, il existe un entier N(i, j)0tel que
AN(i,j)i,j >0.
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