See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/351665441 Les Déterminants des Prêts Non Performants du Système Bancaire de l'UMOA Article in African Development Review · May 2021 DOI: 10.1111/1467-8268.12536 CITATIONS READS 0 103 2 authors: Tinta A. Almame Erdjouman Jean Sanou Joseph Ki-zerbo University Centre d'analyse des politiques économiques et sociales (CAPES) 9 PUBLICATIONS 40 CITATIONS 1 PUBLICATION 0 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Tinta A. Almame on 14 April 2022. The user has requested enhancement of the downloaded file. SEE PROFILE Received: 25 August 2020 | Accepted: 23 April 2021 DOI: 10.1111/1467-8268.12536 ORIGINAL ARTICLE Les Déterminants des Prêts Non Performants du Système Bancaire de l'UMOA Abdoulganiour Almame Tinta1 | Erdjouman Jean Sanou2 1 Joseph Ki‐ZERBO University, Ouagadougou, Burkina Faso 2 Macro‐économiste financier, Directeur, Département Prospective et Veille Stratégique, Centre d'Analyse des Politiques Economiques et Sociales (CAPES)/Ouagadougou, Présidence du Faso/Burkina Faso Correspondence Abdoulganiour Almame Tinta, Joseph Ki‐ZERO University, CUPK, 14 BP 74 Ouagadougou 14, Kadiogo. Email: [email protected] Résumé Cette étude examine les facteurs macroéconomiques et spécifiques qui affectent la qualité du portefeuille de crédit des banques de l'UMOA. L'étude utilise les données de la Banque mondiale, du Fonds Monétaire International, de Bankscope et les comptes de résultat et bilan de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et couvrent la période de 2000 à 2019. Régressant un modèle statique (1) et un modèle dynamique (2) en utilisant respectivement la méthode des effets fixes et la méthode des moments généralisés d'Arellano–Bover/Blundell–Bond, les résultats montrent que la croissance économique, le service de la dette payée, la situation commerciale et les taxes impactent les prêts non performants. L'incertitude des politiques a un effet néfaste à court et à long terme sur les prêts non performants, cependant amorti par la concentration bancaire. Les facteurs bancaires tels que la taille et la rentabilité participent à la réduction des prêts non performants. Cependant le taux d'intérêt, l'inefficience bancaire, le ratio des prêts et les réserves de provisions pour pertes contribuent à accroitre le volume des prêts défectueux. L'étude recommande l'amélioration de l'environnement macroéconomique, la culture de la prudence et l'efficience managériale. 1 | INTRODUCTION Le portefeuille des banques de l'Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA) est caractérisé par une augmentation des créances brutes en souffrance. En effet, les créances en souffrances ont augmenté de 1800 milliards de FCFA en 2013 à 2800 milliards de FCFA en 2018 soit une progression de 55,5% (BCEAO, 2019). Cette forte croissance en cinq ans illustre une fragilité du système bancaire. Sur la même période, le total bilan a augmenté de 20100 milliards de FCFA à 37800 milliards de FCFA1 soit une hausse de 88%. Une analyse comparative avec le taux de progression des créances en souffrances montre que l'accroissement du total bilan des banques est insuffisant pour garantir la couverture des prêts improductifs. Par ailleurs, le volume des crédits octroyés s'élevait à 11200 et 20900 milliards de FCFA, soit une part des créances en souffrance de 16% et 13% entre 2013 et 2018 contre une moyenne de 6% dans la zone Euro et 2% dans la NAFTA (North American Free Trade Agreement).2 Ces créances en souffrance affectent négativement les performances du système bancaire et résultent d'un mauvais dénouement des crédits octroyés par les banques, faisant de la gestion des prêts non performants (PNP) un problème de plus en plus important. Dans le système bancaire de la zone UMOA, le défaut de paiement est constaté après un retard de paiement excédant 90 jours. En 2018, le ratio des provisionnements par rapport aux crédits à risques s'établissait à 180%3 dans l'UMOA, ce qui soulève des inquiétudes en cas de choc endogène. Parmi les causes des créances impayées, figurent (i) l'aléa moral et la sélection adverse (Abdou, 2002) auxquels sont exposées les banques dans la distinction entre les contrats sains et ceux à risques, (ii) les mauvaises anticipations de l'activité économique, les déséquilibres 276 | © 2021 African Development Bank wileyonlinelibrary.com/journal/afdr Afr Dev Rev. 2021;33:276–287. TINTA AND SANOU | 277 macroéconomiques et les chocs systémiques perturbant les prévisions des agents (Kjosevski et al., 2019), (iii) l'incertitude de la politique économique jugée par Karadima et Louri (2020) comme le facteur amplifiant les prêts non performants dans la zone euro, (iv) et les phases de transition économique (Nkusu, 2011) où la contraction du secteur financier entraine la chute des entreprises et des pertes d'emplois rendant impossible les remboursements des créances. La détention de prêts non performants a des conséquences sur la banque et l'économie. Dans le premier cas, un prêt non remboursé conduit la banque à constituer des provisions (obligation comptable) et davantage de fonds propres (obligation réglementaire), ce qui réduit sa capacité à fournir de nouveaux prêts. Lorsque le montant des créances douteuses est trop élevé, la rentabilité de la banque diminue, ce qui peut entrainer des problèmes de survie économique et nuire à la confiance accordée par les partenaires financiers. Dans le cas extrême, la conséquence de l'accumulation des mauvais crédits est la faillite bancaire comme observé avec l'effondrement de plus de 1600 institutions de crédits aux Etats‐Unis (Martin, 1997) et dans le cas spécifique de l'UEMOA, la disparition de 27 banques et des caisses de crédit agricole dans les années 1980–1990 (Abdou, 2002). Dans le second cas, les prêts non remboursés entrainent une contraction de l'activité économique, la hausse de l'endettement et du service de la dette brute. Toutes les crises économiques majeures, à savoir la grande déflation de 1873, la dépression des années 1930 et la crise récente de 2008 ont été précédées d'une crise financière. Ainsi, au regard de toutes ses implications, quels sont les déterminants des prêts non performants des banques de l'UMOA? L'objectif de cet article est d'identifier et d'analyser les déterminants des PNP. Cette étude contribue à la littérature à plusieurs niveaux. Elle est l'une des premières dans l'UMOA à analyser les prêts non performants à travers une approche économétrique incluant les facteurs spécifiques et macroéconomiques. Elle est également la première à mettre en exergue et intégrer l'effet des chocs systémiques à travers la crise financière de 2008 et des chocs non‐systémiques tels que les conflits, l'instabilité politique ou la Covid–19 à travers l'indice d'incertitude mondial. En outre, cette étude apporte une lumière quant à l'effet de la concentration bancaire sur les prêts non performants dont l'impact dans la littérature reste controversé (Karadima & Louri, 2020; Kjosevski et al., 2019). Les résultats dérivés de cet article permettront aux banques de l'UMOA d'élaborer de meilleurs politiques visant à atténuer les créances en souffrances, assainir le système financier et donc éviter les crises. Le reste du travail est articulé comme suit: la Section 2 présente la revue de la littérature sur les facteurs déterminants des prêts non performants, la Section 3 décrit la démarche méthodologique et la Section 4 présente les principaux résultats et les éléments de discussions. La Section 5 conclut et présente les recommandations de politiques économiques. 2 | REVU E DE LA LITTÉRATURE L'analyse des déterminants des prêts non performants a fait l'objet de plusieurs travaux. Ainsi, les déterminants des prêts non performants sont attribués soit à l'environnement macroéconomique soit à des facteurs spécifiques aux banques elles‐mêmes. 2.1 | Les facteurs explicatifs des prêts non performants: les facteurs macroéconomiques La relation entre l'environnement macroéconomique et la qualité des prêts a été largement étudiée dans la littérature. Parmi les facteurs macroéconomiques, il s'agit des cycles économiques, le taux de chômage, le taux d'inflation, le taux d'intérêt réel, la masse monétaire, et le taux de change réel. Analysant les cycles, Jimenez et al. (2013) considèrent que l'évolution des prêts non performants révèle un comportement cyclique. En phase d'expansion économique, le volume des prêts non performants est faible et s'explique par le fait que les consommateurs et les entreprises détiennent suffisamment de revenus et de recettes permettant d'honorer leurs engagements. En revanche, en phase de récession, les agents économiques détenteurs de crédits bancaires, courent le risque de ne pas honorer leurs dettes et une forte accumulation des prêts non performants peut conduire à une crise bancaire. L'impact du taux de chômage sur les prêts non performants est examiné par Su (2002) dans le cas des établissements bancaires de Hong Kong entre 1995 et 2002, et Louzis et al. (2012) dans le secteur bancaire grec. Utilisant un panel à effet fixe, ils montrent que la hausse du chômage diminue le revenu des ménages et des entreprises, affectant négativement la capacité de remboursement de leur dette. La montée des crédits en souffrance dans ces pays est la conséquence directe de l'ascension du chômage. Des auteurs comme Nkusu (2011) dans la région de l'Europe Centrale, de l'Est et du Sud‐Est et Kjosevski et al. (2019) en Macédoine s'interrogent sur le rôle du taux d'inflation en utilisant des régressions panels. A partir de modèles | 278 TINTA AND SANOU en panel VAR, les deux premiers soulignent que l'inflation conduit à une érosion de la valeur réelle de remboursement. En effet, dans l'hypothèse de rigidité des salaires, une inflation élevée gêne la stabilité du système bancaire en diminuant le revenu réel des ménages. A contrario, les derniers trouvent en Macédoine une corrélation positive entre l'inflation et la qualité des prêts. La relation entre le taux d'intérêt réel et les créances douteuses est documentée par Iddrisu et Alagidede (2020) et Bofondi et Ropele (2011) en Italie. Ces auteurs montrent que la hausse du coût de l'emprunt, la nature des emprunteurs mesurée par le ratio des créances douteuses précédentes, la faible diversification des économies et les chocs agissent sur le fardeau de la dette, augmentant les PNP. 2.2 | Les facteurs explicatifs des prêts non performants: les facteurs spécifiques aux banques Plusieurs travaux empiriques ont montré que les facteurs microéconomiques propres aux banques tels que la taille de l'institution, les marges de profit, l'efficacité et l'efficience managériale, la rentabilité, les conditions de crédit, le profil de risque, et le pouvoir de marché sont des déterminants majeurs des prêts non performants (Louzis et al., 2012; Olarewaju, 2020). L'effet de la taille de la banque sur les créances douteuses est analysé par Hu et al. (2006). Selon eux, la relation négative entre les PNP et la taille des banques s'explique par le fait que les banques de grande taille ont de meilleures stratégies de gestion des risques. Elles sont plus expérimentées, détiennent un portefeuille de prêts plus important et donc des crédits plus diversifiés, ce qui diminue les risques et accroit les rendements. En revanche, les petites banques, sont exposées au problème de sélection adverse en raison du manque de compétences et d'expériences nécessaires pour évaluer efficacement la qualité des crédits. Utilisant la méthode des moments généralisés sur 110 banques commerciales, Olarewaju (2020) montre que le cout du crédit et l'adéquation du capital influencent les PNP dans les pays à revenu intermédiaire. Othmani (2020) argumente que l'efficience managériale attribuée à la gestion bancaire, l'incompétence des dirigeants en matière de contrôle des crédits et des coûts associés constituent un facteur exogène pouvant générer des dépenses supplémentaires, diminuer la performance et augmenter les risques. En effet, la performance bancaire mesurée par le ROE (Return On Equity) ou le ROA (Return On Assets) explique le comportement à risque des gestionnaires car une rentabilité bancaire élevée peut contribuer à renforcer les fonds propres afin que la banque puisse faire face à des pertes éventuelles. Boudriga et al. (2009) et Podpiera et Weill (2008), sur un échantillon de pays, examinent les déterminants des prêts non performants et l'impact de l'environnement de supervision. Ils trouvent qu'une augmentation des provisions pour pertes sur prêts indique une augmentation du risque de crédit. Les travaux récents de Kjosevski et al. (2019) et Karadima et Louri (2020) intègrent la concentration bancaire et l'incertitude de la politique économique. En appliquant une cointégration avec l'approche ARDL, Kjosevski et al. (2019) trouvent que la concentration bancaire n'a pas un effet significatif sur les créances en souffrances en Macédoine. Alternativement, en utilisant des données de panel regroupant la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne, Karadima et Louri (2020) concluent que la concentration bancaire réduit les prêts non performants et contribue à modérer l'impact positif de l'incertitude économique sur la propagation des PNP. 3 | 3.1 MÉTHOD OL OGIE | Présentation du modèle La littérature récente sur les déterminants des PNP (Boudriga et al., 2009; Dimitrios et al., 2016; Karadima & Louri, 2020; Kjosevski et al., 2019; Laxmi et al., 2018) souligne que les facteurs macroéconomiques et spécifiques aux banques sont associés aux prêts non performants par un modèle théorique de forme fonctionnelle linéaire. Utilisant des données agrégées, cette étude adopte une fonction de production Cobb–Douglas. Le modèle théorique de base est présenté comme suit: PNPi, t = f (Ai . t , Si, t ) Avec Ai . t les facteurs macroéconomiques du pays i au temps t, et Si, t les facteurs bancaires du pays i au temps t. TINTA AND | SANOU 279 Comme argumenté par Bofondi et Ropele (2011), les créances douteuses de la période précédente peuvent contribuer à alourdir l'encours des prêts de la période actuelle pour les particuliers comme pour les entreprises. Ainsi, le fardeau de la dette passée constitue un indicateur de la qualité de l'emprunteur dans l'octroi de futur prêt. Pour mettre en exergue cette relation entre la qualité des prêts et la nature des emprunteurs, deux spécifications empiriques seront considérées dans cette étude à partir du modèle théorique. Le premier modèle économétrique (1) est similaire à celui de Kjosevski et al. (2019), Dimitrios et al. (2016) et Makri et al. (2014) et repose sur l'hypothèse que la probabilité de défaut de paiement au cours d'une période n'affecte pas la probabilité de défaut de paiement de la période suivante. Autrement dit, la performance des prêts au cours d'une période n'est pas rattachée à la performance survenue au cours d'une autre période. Ainsi la spécification du modèle (1) est un panel statique. Pour identifier la qualité des emprunteurs au sein de l'UMOA et déterminer si les créances douteuses engendrent un cercle vicieux, un second modèle économétrique (2) est spécifié et incorpore la possibilité que la qualité des prêts au cours d'une période peut influencer les futurs prêts. Cette seconde spécification tient compte de la formation des anticipations des agents, la présence d'un effet de mémoire et des délais de réalisation des actions économiques. En outre, la prise en compte des prêts non performants retardés permet également de s'assurer de la robustesse des résultats. Ainsi, le second modèle (2) à l'image de Louzis et al. (2012), Messai et Jouini (2013), Ghosh (2015) et Laxmi et al. (2018) est un panel dynamique qui inclut parmi les variables explicatives les prêts non performants retardés. Les deux modèles économétriques sont présentés ci‐dessous: Modèle Statique logPNPi, t = β0 + β1 Ai . t + β2 Si, t + β3 Dt + φi + θi, t (1) logPNPi, t = β0 + γ logNPLi, t −1 + β1 Ai . t + β2 Si, t + β3 Dt + φi + +θi, t (2) Modèle Dynamique Avec i = 1,…, 8 la dimension pays et t = 2000,…, 2019 la dimension temporelle qui forment les paramètres du panel, β0 la constante, Ai . t le vecteur des 8 variables macroéconomiques (PIBi, t , INFi, t , logDPCi, t , logREMi, t , logCOVi, t , logUNEMi, t , logTAXi, t , Wi, t ), Si, t le vecteur des 7 variables bancaires (logROAi, t , INTi, t , TIi, t , logINEFi, t , logPrPi, t , logRPAi, t , CBi, t ), Dt est une variable binaire prenant la valeur 0 avant 2008 et 1 après la crise financière mondiale de 2008, β1β2 et β3 les coefficients des deux vecteurs respectifs et la crise financière, θi, t le terme d'erreur, φi l'effet spécifique associé aux banques dans chaque pays, logNPLi, t −1 la variable dépendante retardée. 4 | DONNÉES ET DÉFINITION DES V ARIABLES Cette étude analyse le cas de l'Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), composée de huit (8) pays notamment le Benin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. Pour chaque pays, les données sont annuelles et couvrent une période de 20 ans (2000–2019). Les données sur les variables macroéconomiques viennent de la Banque mondiale sauf le service de la dette, les taxes sur les produits qui proviennent du Fond Monétaire International. L'indice d'incertitude mondial est issu des travaux de Ahir et al. (2018). Les données relatives aux banques sont obtenues à partir des comptes de résultat et bilan de la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO). La concentration bancaire découle de Bankscope. Toutes les variables utilisées dans cette étude sont calculées par les auteurs à partir des données disponibles. Ainsi, cette étude utilise des données de Panel. Sur la base de l'éventail des déterminants potentiels des prêts non performants fournis par la littérature récente (Dimitrios et al., 2016; Karadima & Louri, 2020; Kjosevski et al., 2019; Laxmi et al., 2018; Louzis et al., 2012; Messai & Jouini, 2013), 8 variables macroéconomiques, 7 variables spécifiques aux banques et une variable muette sont utilisées (Tableau 1). La variable muette (D) considère l'effet de choc systémique ou exogène sur la qualité des prêts. Elle prend la valeur 0 avant la crise financière de 2008, et 1 après la crise financière de 2008 (Kjosevski et al., 2019). Les variables de contrôles macroéconomiques sont le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB), le taux d'inflation (INF), le ratio du service de la dette publique par tête (DPC), le ratio des transferts de fonds (REM), le taux de couverture (COV), le taux de chômage (UNEM), le ratio des taxes sur les produits (TAX), et l'indice d'incertitude mondial (W) défini comme la fréquence des incertitudes dans le monde en prenant en compte les attaques, les chocs économiques, les crises de la dette, les guerres, les élections et les conflits. Calculé par Ahir et al. (2018), l'indice est une appréciation dans les pays en développement de l'incertitude de la politique économique et la volatilité des marchés de capitaux. Un indice élevé est associé à une incohérence des réponses de politique, donc une menace 280 | TINTA TABLEAU 1 AND SANOU Liste des variables du modèle, signe attendu et travaux Variables Signe attendu Moyenne Travaux −1,175553 Les prêts non performants (PNP) Le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) Négatif 0,043575 Louzis et al. (2012), Nkusu (2011) Le taux d'inflation (INF) Positif 0,021611 Kjosevski et al. (2019) Le ratio du service de la dette publique par tête (DPC) Négatif 2,457595 Ghosh (2015), Dimitrios et al. (2016) Le ratio des transferts de fonds (REM) Négatif −1,492922 Olarewaju (2020) Le taux de couverture (COV) Négatif −0,159483 Akoto & Adjasi (2020), Laxmi et al. (2018) Le taux de chômage (UNEM) Positif −1,495153 Bofondi & Ropele (2011), Makri et al. (2014) Le ratio des taxes (TAX) Négatif −1,081707 Kauko (2012) L'indice d'incertitude mondial (W) Négatif 0,063415 Karadima & Louri (2020) La rentabilité des actifs (ROA) Négatif −1,921105 Louzis et al. (2012), Othmani (2020) Le taux d'intérêt débiteur réel (INT) Positif 0,025826 Jimenez et al. (2013) La taille de la banque (TI) Négatif 5,993174 Hu et al. (2006) Le ratio d'inefficience bancaire (INEF) Positif −0,748517 Laxmi et al. (2018) Le ratio des provisions pour pertes (PrP) Positif −0,944743 Podpiera & Weill (2008) Le ratio des prêts (RPA) Positif −0,278894 Ekanayake & Azeez (2015) La concentration bancaire (CB) Négatif 0,699941 Kjosevski et al. (2019), Karadima & Louri (2020) Source: Auteurs. pour les banques et l'accroissement des prêts non performants (Karadima & Louri, 2020). Les variables spécifiques aux banques sont la rentabilité des actifs (ROA) rapportant le bénéfice net au total des actifs, le taux d'intérêt débiteur réel (INT), la taille de la banque (TI) mesurée par le logarithme du total bilan, le ratio d'inefficience bancaire (INEF) mesuré par le rapport entre les charges d'exploitations et les produits d'exploitations, le ratio des provisions pour pertes (PrP) exprimant le rapport entre les provisions pour pertes sur prêts et le total des crédits octroyés, le ratio des prêts (RPA) et la concentration bancaire (CB) mesurée par l'index de Herfindahl–Hirschman et exprimant la compétitivité du secteur bancaire. Le Tableau 2 présente les statistiques sur les coefficients de corrélation entre les facteurs macroéconomiques et les facteurs spécifiques aux banques. Bien que les variables semblent corréler, cette corrélation n'est pas statistiquement significative, impliquant une présomption d'absence de corrélation sérielle et donc une utilisation de ces variables comme potentiellement explicatives. 4.1 | Procédure d'estimation Les tests de racine unitaire sont réalisés au préalable après les tests de dépendance, pour vérifier la stationnarité de chaque variable afin d'éviter des résultats fallacieux. Dans les données de panel, trois types d'estimation sont possible à savoir le modèle homogène ou sans effet, le modèle à effet fixe et le modèle à effet aléatoire. Le test de Hausman (1978) est utilisé pour sélectionner l'estimation adéquate. Sur la base des critiques des travaux précédents et la présence de l'hétéroscédasticité dans la dimension individuelle du panel, la méthode des moindres carrées faisables est adoptée pour l'estimation du modèle statique (1) pour corriger les problèmes de multicolinéarité et d'hétéroscédasticité des variables par pays et obtenir des résultats robustes. Cette méthodologie permet de corriger la matrice des covariances afin de générer des erreurs standards robustes et non corrélées. Le modèle dynamique (2) est estimé en recourant à la TINTA AND | SANOU TABLEAU 2 281 Etude de corrélation des variables macroéconomiques et bancaires Variables Macroéconomiques PNP PNP 1,000 PIB −0,220 1,000 INF 0,011 −0,053 1,000 LogDPC −0,147 −0,117 −0,135 1,000 LogREM 0,166 −0,051 −0,146 0,116 1,000 LogCOV −0,071 −0,143 −0,118 0,584 −0,270 1,000 LogUNEM 0,009 −0,149 0,012 0,387 0,209 0,322 1,000 LogTAX −0,105 0,147 −0,141 0,309 0,249 0,181 0,016 1,000 W 0,221 −0,028 −0,244 0,185 −0,129 0,259 −0,086 0,064 Variables bancaires PNP Log ROA INT TI Log INEF Log PrP Log RPA CB PNP 1,000 LogROA −0,365 1,000 INT 0,044 −0,008 1,000 TI −0,044 0,119 0,220 1,000 LogINEF 0,203 −0,287 0,208 0,476 1,000 LogPrP 0,389 −0,251 −0,267 −0,336 −0,264 1,000 LogRPA 0,207 0,289 −0,130 −0,184 −0,528 −0,024 1,000 CB −0,315 −0,247 −0,100 −0,529 0,106 0,113 −0,276 PIB INF Log DPC Log REM Log COV Log UNEM Log TAX W 1,000 1,000 Source: Calcul des auteurs à partir des données de la BCEAO, Banque Mondiale et FMI. méthode des moments généralisés d'Arellano–Bover/Blundell–Bond qui est une extension de l'estimateur d'Arrelano–Bond où les valeurs retardées et leurs transformations sont utilisées comme instruments. Cette méthode corrige le biais d'endogénéité dans les modèles de panel dynamique. L'indice d'incertitude mondial, la concentration bancaire et le choc de la crise financière de 2008 sont considérés comme variables purement institutionnelles et donc exogènes. L'estimateur d'Arellano–Bover/Blundell–Bond augmente Arellano–Bond en faisant l'hypothèse supplémentaire que la différence première des instruments n'est pas corrélée avec les effets fixes. Ce qui permet d'introduire plus d'instruments et d'améliorer la robustesse. Arellano et Bond (1991) proposent de dériver la statistique de corrélation d'ordre 1 et 2 pour tester l'autocorrélation de la régression. Si les innovations sont indépendantes et identiquement distribuées, la statistique de corrélation d'ordre 1 doit être significative et la statistique d'ordre 2 ne doit pas être significative. Par conséquent, les erreurs sont non corrélées à niveau. La validité des instruments est également examinée par le test de sur‐identification de Sargan qui pose l'hypothèse nulle que les restrictions sont valides. 4.2 | Résultats et discussions Les résultats des tests de dépendance sont présentés dans le Tableau 3, en utilisant à la fois les tests de Pesaran et de Breusch–Pagan. Tous les tests rejettent l'hypothèse nulle qui confirme une dépendance transversale. L'existence de dépendance conduit à l'utilisation de test de racine unitaire de seconde génération. Le test de Bai et Ng (2002) et celui de Moon et Perron (2004) sont respectivement employés. Le premier permet de vérifier l'existence d'une racine unitaire en dissociant les composantes individuelle et commune à l'aide d'un modèle factoriel, ce qui permet de diagnostiquer une non stationnarité bien que la variable admette une composante stationnaire importante. A l'inverse, le second considère un modèle autorégressif et teste la stationnarité de la variable sans une dissociation. Les résultats des deux tests de stationnarité sont présentés dans le Tableau 4. Pour l'ensemble des variables, l'hypothèse nulle est rejetée confirmant que toutes les variables sont stationnaires à niveau au seuil de 5% pour les deux tests. Les résultats des estimations des modèles (1) et (2) sont illustrés dans le Tableau 5. 282 | TINTA TABLEAU 3 SANOU Résultats des Tests de dépendance Breusch–Pagan LM Test AND Pesaran CD Statistic p‐value Statistic p‐value 210,50 0,021 51,862 0,030 Source: Estimations des auteurs à partir des données de la BCEAO, Banque Mondiale et FMI. 4.3 | Le modèle statique En considérant le modèle statique (1), le résultat du test de Hausman (Tableau 5) montre que la différence entre les coefficients des effets fixes et aléatoires est significative, ce qui indique que le modèle à effet fixe est préférable. 4.3.1 | Les déterminants macroéconomiques Le taux d'inflation n'est pas significatif. Ce résultat peut s'expliquer par le fait que le niveau d'inflation est relativement faible, ce qui n'affecte pas la qualité des crédits accordés par les banques. En outre, la fixité du régime de change dans l'UMOA limite les variations des prix et donc le portefeuille de consommation des ménages. Le taux de croissance du PIB est significatif et négatif, c'est‐à‐dire que la croissance économique diminue les prêts non performants dans l'UMOA. Ce résultat, similaire à Dimitrios et al. (2016) pour la Zone euro et Laxmi et al. (2018) pour le Népal, valide l'hypothèse de cette étude et confirme que la croissance améliore le climat des affaires et favorise les opportunités. Un accroissement du service de la dette dans l'UMOA se traduit par une réduction des prêts non performants. Le service de la dette payée reflète comment l'Etat assure la gestion des finances publiques de manière à dégager des ressources en capitaux. Par conséquent, une hausse du service de la dette payée traduit une amélioration dans l'assainissement des finances publiques qui favorise la hausse des crédits sur les marchés et la baisse anticipée des taux d'intérêts, réduisant les prêts douteux. TABLEAU 4 Résultats des Tests de stationnarité de deuxième génération Bai et Ng Moon et Perron Variables Statistic p‐value Statistic p‐value LogPNP −3,0232 0,0301 −3,0120 0,0314 PIB −2,0104 0,0003 −1,3111 0,0332 INF −2,3114 0,0007 −1,1423 0,0000 LogDPC −3,3212 0,0111 −1,4335 0,0133 LogREM −1,1211 0,0331 −3,3437 0,0014 LogCOV −3,4210 0,0005 −3,2312 0,0203 LogUNEM −0,3313 0,0323 −3,4122 0,0013 LogTAX −3,2333 0,0032 −1,4332 0,0324 W −3,3100 0,0033 −3,1123 0,0123 LogROA −1,1131 0,0000 TI −1,1113 0,0231 −0,3511 0,0120 INT −3,2033 0,0003 −2,3131 0,0004 LogINEF −3,3132 0,0102 −3,4112 0,0010 LogPrP −3,1101 0,0012 −1,3113 0,0322 LogRPA −3,1042 0,0020 −3,1302 0,0053 CB −1,3225 0,0373 Source: Estimations des auteurs à partir des données de la BCEAO, Banque Mondiale et FMI. TINTA AND | SANOU TABLEAU 5 283 Résultats des déterminants des prêts non performants de l'UMOA Variables Modèle Statique (1) Modèle Dynamique (2) 0,227346*** (0,076682) LogPNPt‐1 PIB −0,400339** (0,181591) −0,447112* (0,541903) INF 0,028975 (0,307896) 0,406618 (0,644325) LogDPC −0,126771*** (0,030547) −0,243158*** (0,066233) LogREM 0,092959* (0,053034) 0,117726 (0,100076) LogCOV −0,164944 (0,108477) −0,407587** (0,182247) LogUNEM −0,115853 (0,446455) 0,089210* (0,063433) LogTAX 0,155589*** (0,050529) 0,135510* (0,116665) W 0,417453*** (0,138488) 0,576264** (0,255478) LogROA −0,17129*** (0,031938) −0,3113336*** (0,066211) TI −0,44564*** (0,044775) −0,228561*** (0,074339) INT 0,919539*** (0,197567) 0,726790* (0,523244) LogINEF 0,942037*** (0,061293) 0,542375*** (0,150176) LogPrP 0,196976*** (0,036687) 0,083461* (0,072691) LogRPA 0,595450*** (0,180024) 0,238530* (0,27582) CB −0,121521 (0,077648) −0,135131 (0,159909) D 0,022435 (0,019403) 0,062952* (0,038218) Observation 112/8 108/8 R2 corrigé 0,630803 F‐statistic 9,245746*** Hausman Test 54,94*** AR (1) −2,2956** AR (2) −1,6258 Sargan Test (J‐Statistic) 132,2688 ***, ** et * représentent la significativité respectivement à un seuil de 1%, 5% et 10%. Les valeurs entre parenthèses affichent les erreurs standards robustes. Source: Estimations des auteurs à partir des données de la BCEAO, Banque Mondiale et FMI. Les transferts de fonds ont également une influence significative et positive sur les prêts non performants de l'UMOA. Ce résultat peut s'expliquer par le fait que le niveau de revenu des agents dans les pays de l'UMOA est relativement faible. Dû à cette faible capacité financière, les crédits sont difficilement octroyés par les banques ou souvent le montant accordé est insignifiant. Par conséquent, lorsque les agents bénéficient des transferts, ces fonds leur servent de couverture qu'ils utilisent dans les banques pour attester leur solvabilité et bénéficier de prêts. Dans la mesure où les transferts ne sont pas réguliers, ce comportement aboutit à une incapacité de remboursement. L'effet de la taxe est positif sur les créances douteuses. Ces résultats dans l'UMOA signifient que lorsque la politique fiscale pèse sur les banques, elle constitue indirectement une charge qui pénalise le financement de l'économie d'une part et d'autres part impacte directement à la baisse le revenu disponible des ménages et des entreprises. Il s'en suit une baisse de leur capacité de remboursement des crédits auprès des banques. L'incertitude mondiale est dévastatrice pour le système financier. Les résultats montrent clairement que l'incertitude augmentent le volume des créances en souffrances dans l'UMOA. Puisque l'incertitude est fortement corrélée à la qualité des institutions (Ogbeide & Adeboje, 2020), cette étude recommande des politiques dans le sens de l'amélioration de la qualité des institutions. Cependant, l'impact des incertitudes sur les prêts non performants est atténué en présence des facteurs bancaires concordant avec les travaux de Karadima et Louri (2020) sur la zone euro. 284 | TINTA AND SANOU 4.3.2 | Les déterminants bancaires Les variables spécifiques aux banques sont toutes significatives sauf la concentration bancaire. Une augmentation de la profitabilité du secteur bancaire baisse les prêts non performants. En effet, une augmentation de la profitabilité réduit l'incitation des banques à s'engager dans des activités de crédits jugées risquées. Les banques performantes veillent ainsi à la qualité de leur actif en minimisant les prêts douteux. Ce résultat est également trouvé par Bofondi et Ropele (2011) en Italie. Les résultats montrent un effet négatif et significatif entre la taille des banques de l'UMOA et les créances douteuses. Il ressort qu'au sein de l'UMOA, plus la banque est de grande taille et moins elle prend des risques. En outre, les grandes banques disposent de meilleures stratégies de gestion des risques et des ressources nécessaires en termes de technologie pour évaluer régulièrement la situation de leur crédit et diversifier leur portefeuille. Le taux d'intérêt est significatif et positif dans le cas de l'UMOA. Ce résultat confirme que les prêts non performants sont sensibles à la variation des taux d'intérêt. Une augmentation des taux d'intérêt augmente la difficulté d'honorer l'engagement. Ce résultat est cohérent avec ceux de Laxmi et al. (2018) au Népal et Were et Wambua (2014) au Kenya. Conformément à la théorie, les résultats de l'UMOA soutiennent que le ratio d'inefficience est positivement associé aux PNP. En effet, une hausse du ratio d'inefficience symbolise une détérioration de la gestion financière des banques et du risque de position. Elle entraine une hausse des charges bancaires et baisse l'efficacité dans le management de la banque. Une bonne gestion bancaire est donc une exigence pour réduire les créances douteuses. Louzis et al. (2012) en Grèce, et Podpiera et Weill (2008) en république Tchèque trouvent des résultats similaires. Le ratio des provisions pour pertes des banques a un effet positif sur les prêts non performants. Dans le cas des pays de l'UMOA, une augmentation du ratio des provisions traduit une anticipation des niveaux de pertes élevées et une préférence accrue pour le profit au détriment de l'aversion au risque. Afin de réduire la volatilité des résultats et renforcer leur solvabilité à moyen terme, les banques utilisent les provisions pour pertes pour signaler leur solidité financière. Ce signal détériore la qualité des prêts. Cette relation a été également établie par Messai et Jouini (2013) sur leurs travaux portant sur l'Italie, la Grèce et l'Espagne. En outre dans le contexte de l'UMOA, une augmentation du ratio des prêts entraine une augmentation des prêts non performants. Ce résultat signifie qu'une hausse des prêts équivaut à un risque de liquidité supplémentaire. Ces comportements bancaires génèrent des anticipations autoréalisatrices qui se manifestent par un grand nombre de crédits défectueux et fortement risqués, ce qui est corroboré par la théorie. Toutefois dans le cas de l'UMOA, la concentration bancaire n'a pas un effet significatif sur les prêts non performants. Cette étude lève le voile sur l'effet de la compétitivité du secteur bancaire de l'UMOA sur les crédits en souffrances et s'aligne derrière les travaux de Kjosevski et al. (2019) dans le cas de la Macédoine. Bien que n'ayant pas un effet significatif, la concentration bancaire contribue à modérer l'impact positif de l'incertitude de la politique économique sur la propagation des PNP. 4.4 | Le modèle dynamique Les résultats du modèle dynamique (2) sont présentés dans le Tableau 5. Les tests d'autocorrélation d'ordre 1 et 2 d'Arellano et Bond (1991) affichent les statistiques AR(1) significatives au seuil de 5% alors que les statistiques AR(2) ne sont pas significatives, confirmant l'hypothèse d'absence d'autocorrélation. En outre, la statistique J permettant de construire le test de Sargan n'est pas significative, authentifiant l'hypothèse nulle de validité des instruments. Par conséquent, la méthode des moments généralisés Arellano et Bover (1995) et Blundell et Bond (1998) adoptée est robuste et consistante. 4.4.1 | Les déterminants macroéconomiques Les résultats du modèle dynamique (2) sont concordants avec les analyses effectuées dans le modèle statique (1) et concluent sur la robustesse des résultats pour la croissance économique, le taux d'inflation, le service de la dette, la taxe et l'incertitude mondiale. Bien que de nombreux travaux aient discuté l'impact de la taxe sur le revenu des agents, et le poids qu'elle exerce sur l'ensemble du système financier, cette étude figure parmi les plus rares à investiguer l'effet de la TINTA AND SANOU | 285 taxe sur les prêts non performants. Au sein de l'UMOA, la politique fiscale nécessite d'être atténuée pour accroitre la capacité des agents à s'acquitter de leur dette. Également, les résultats permettent de conclure que dans un environnement dynamique, les banques sont en mesure de détecter les signaux et schémas mentaux des agents, et donc de s'ajuster à leur prédiction. De ce fait, les transferts de fonds sont sans effet sur le risque de défaut de paiement. Par ailleurs, l'impact du taux de couverture et de chômage apparaissent clairement significatifs. L'effet négatif du taux de couverture est vérifié et souligne son rôle de levier pour booster l'activité économique. Une hausse du taux de couverture traduit une amélioration commerciale en termes d'exportation, ce qui augmente la compétitivité des entreprises domestiques et stimule l'offre qui augmente la demande de travail. Il s'en suit que les emprunteurs deviennent plus solvables, réduisant les crédits improductifs. Il s'avère donc nécessaire que les gouvernements améliorent les infrastructures physiques afin de faciliter les exportations et encourager les industries. L'impact positif du taux de chômage sur les prêts non performants concorde avec les travaux de Kjosevski et al. (2019) en Macédoine, et Dimitrios et al. (2016) pour la Zone euro. 4.4.2 | Les déterminants bancaires Concernant les facteurs spécifiques aux banques, tous les coefficients sont robustes confirmant toutes les analyses effectuées. Dans l'UMOA, les banques qui enregistrent le plus de créances douteuses sont celles ayant un rendement faible. Les prêts non performants retardés sont positifs et significatifs, ce qui corrobore notre hypothèse et est similaire à celui de Laxmi et al. (2018), Ghosh (2015) et Makri et al. (2014). Il ressort donc que dans l'UMOA, une augmentation des crédits improductifs détériore le portefeuille des crédits futurs. Il y a donc un effet mémoire. En outre, si la crise financière de 2008 n'a pas eu un effet statique sur les PNP, en raison de la faible intégration des banques de l'UMOA au système financier international, elle a toutefois détérioré la qualité des crédits des banques dans le temps. L'introduction de la variable binaire est donc pertinente même si l'effet de la crise financière de 2008 est faible dans l'UMOA. 5 | CONCLUSION Cette étude examine les facteurs macroéconomiques et spécifiques aux banques qui affectent la qualité du portefeuille de crédit des banques de l'UMOA (Benin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo). L'étude utilise les données de la Banque mondiale, du Fond Monétaire International, de Bankscope et les comptes de résultat et bilan de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et couvrent la période de 2000 à 2019. Utilisant des données agrégées de panel, un modèle statique (1) et un modèle dynamique (2) sont estimés respectivement par la méthode des effets fixes et la méthode des moments généralisés d'Arellano–Bover/Blundell–Bond. Les résultats montrent que les prêts non performants ne sont pas seulement associés aux politiques économiques et monétaires de l'UMOA mais également à la gestion managériale, l'aversion aux risques, la profitabilité, la crise financière de 2008 et l'aléa moral qui sont des facteurs propres à la banque avec un effet d'amortissement de la concentration bancaire. Les estimations soutiennent que l'amélioration de l'environnement macroéconomique à travers une hausse de la croissance économique et du taux couverture, et une progression du ratio du service de la dette payée diminuent les prêts non performants par le renforcement de la capacité de remboursement des prêts par les entreprises et les ménages. Les résultats suggèrent qu'une récession économique internationale provenant d'une quelconque incertitude mondiale se traduit par une hausse des prêts improductifs. En outre dans l'UMOA, une augmentation du ratio des transferts de fonds envoyés par les migrants n'a qu'un effet temporaire sur le système bancaire. Les résultats révèlent que les taxes sont néfastes pour les banques car elles contribuent à renforcer l'incapacité des agents à honorer leur remboursement. L'imposition fiscale et l'accroissement des chômeurs fragilisent le système financier en créant davantage de transactions déficientes et inefficaces. Cette étude enseigne que les banques de l'UMOA doivent intégrer ces facteurs dans leur processus de prise de décision dans l'établissement des prêts afin de garantir la stabilité du système bancaire et compter un faible ratio de prêts non performants. Concernant les facteurs bancaires, les estimations soutiennent que la taille et la rentabilité de la banque participent à la réduction des prêts non performants. Cependant le taux d'intérêt, l'inefficience bancaire, le ratio des prêts et les réserves de provisions pour pertes contribuent à agrandir le volume des PNP. Ces résultats soulignent l'importance de 286 | TINTA AND SANOU la réglementation bancaire, les mesures prudentielles et la nécessité de veiller au respect des ratios bancaires clés. Cette étude met en lumière les facteurs managériales, institutionnels et règlementaires spécifiques aux banques qui peuvent constituer un handicap pour leur développement. Les banques de l'UMOA doivent élargir la diversification de leur portefeuille de crédits et porter un regard sur l'aversion pour le risque tout en surveillant les stratégies de prise de décision, la limitation des taux d'intérêt et asseoir la culture de la prudence. Il ressort finalement de cette étude que dans les banques de l'UMOA, les prêts non performants sont structurels. ENDNOTES 1 BCEAO, Bilans et compte de résultats 2013 et 2018. 2 Global Financial Development database, 2019. 3 BCEAO, rapport d'activité 2019. RÉFÉRENCES Abdou, R. (2002). Les déterminants de la dégradation du portefeuille des banques: une approche économétrique et factorielle appliquée au système bancaire nigérien. Notes d'Information et Statistiques, 528 Août/Septembre 2002, BCEAO.1–28. Ahir, H., Bloom, N., & Furceri, D. (2018). World uncertainty index. Stanford mimeo. Akoto, R. K., & Adjasi, C. (2020). External credit and export decision: Evidence from Nigeria. African Development Review, 32, 540–550. https://doi.org/10.1111/1467-8268.12459 Arellano, M., & Bond, S. (1991). Some tests of specification for panel data: Monte Carlo evidence and an application to employment equations. The Review of Economic Studies, 58(2), 277–297. Arellano, M., & Bover, O. (1995). Another look at the instrumental variables estimation of error‐components models. Journal of Econometrics, 68, 29–51. Bai, J., & Ng, S. (2002). Determining the number of factors in approximate factor models. Econometrica, 70(1), 191–221. Blundell, R., & Bond, S. (1998). Initial conditions and moment restrictions in dynamic panel data models. Journal of Econometrics, 87(1), 115–143. Bofondi, M., & Ropele, T. (2011). Macroeconomic determinants of bad loans: Evidence from Italian banks. Occasional Papers, 89, 5–29. Boudriga, A., Boulila, T. N., & Jellouli, S. (2009). Banking supervision and nonperforming loans: A cross‐country analysis. Journal of Financial Economic Policy, 1(4), 286–318. Dimitrios, A., Helen, L., & Mike, T. (2016). Determinants of non‐performing loans: Evidence from Euro‐area countries. Finance Research Letters, 18, 116–119. Ekanayake, E., & Azeez, A. A. (2015). Determinants of non‐performing loans in licensed commercial banks: Evidence from Sri Lanka. Asian Economic and Financial Review, 5(6), 868–882. Ghosh, A. (2015). Banking‐industry specific and regional economic determinants of non‐performing loans: Evidence from US states. Journal of Financial Stability, 20, 93–104. Hausman, J. A. (1978). Specification tests in econometrics, Econometrica, 46, 1251–1272. Honda, Y. (1985) Testing the error components model with non‐normal disturbances. Review of Economic Studies, 52, 681–690. Hu, J. L., Li, Y., & Chiu, Y. (2006). Ownership and nonperforming loans: Evidence from Taiwan's banks. The Developing Economies, 42(3), 405–420. Iddrisu, A. A., & Alagidede, I. P. (2020). Is the interest rate setting behaviour of the Bank of Ghana constrained by high debt levels? African Development Review, 32, 459–471. https://doi.org/10.1111/1467-8268.12452 Jimenez, G., Lopez, J. A., and Saurina, J. (2013). How does competition affect bank risk‐taking? Journal of Financial Stability, 9(2), 185–195. https://doi.org/10.1016/j.jfs.2013.02.004 Karadima, M., & Louri, H. (2020). Economic policy uncertainty and non‐performing loans: The moderating role of bank concentration. Finance Research Letters, 38, 101458. Kauko, K. (2012). External deficits and non‐performing loans in the recent financial crisis. Economics Letters, 115, 196–199. Kjosevski, J., Mihail, P., & Elena, N. (2019). Bank specific and macroeconomic determinants of non‐performing loans in the Republic of Macedonia: Comparative analysis of enterprise and household NPLs. Economic Research‐Ekonomska Istraživanja, 32(1), 1185–1203. https://doi.org/10.1080/1331677X.2019.1627894 Laxmi, K., Ram, K., & Shouyang, W. (2018). Macroeconomic and bank‐specific determinants of non‐performing loans: Evidence from Nepalese banking system. Journal of Central Banking Theory and Practice, 3, 111–138. Louzis, D. P., Vouldis, A. T., & Metaxas, V. L. (2012). Macroeconomic and bank‐specific determinants of non‐performing loans in Greece: A comparative study of mortgage, business and consumer loan portfolios. Journal of Banking and Finance, 36(4), 1012–1027. Makri, V., Tsagkanos, A., & Bellas, A. (2014). Determinants of non‐performing loans: The case of Eurozone. Panoeconomicus, 61(2), 193–206. Martin, D. (1997). Early warning of bank failure: A logit regression approach. Journal of Banking and Finance, 1, 249–276. Messai, A. S., & Jouini, F. (2013). Micro and macro determinants of non‐performing loans. International Journal of Economics and Financial Issues, 3(4), 852–860. TINTA AND SANOU | 287 Moon, H. R., & Perron, B. (2004). Testing for a unit root in panels with dynamic factors. Journal of Econometrics, 122, 81–126. Nkusu, M. (2011). Non‐performing loans and macrofinancial vulnerabilities in advanced economies. International Monetary Fund, 11(161), 1–27. Ogbeide, F. I., & Adeboje, O. M. (2020). Effects of financial reform on business entry in sub‐Saharan African countries: Do resource dependence and institutional quality matter? African Development Review, 32, 188–199. https://doi.org/10.1111/1467-8268.12427 Olarewaju, O. M. (2020). Investigating the factors affecting nonperforming loans in commercial banks: The case of African lower middle‐ income countries. African Development Review, 32, 744–757. https://doi.org/10.1111/1017-6772.12475 Othmani, H. (2020). Does board gender diversity matter in the banking sector? Evidence from Tunisia. African Development Review, 33, 1–11. https://doi.org/10.1111/afdr.12487 Podpiera, J., & Weill, L. (2008). Bad luck or bad management? Emerging banking market experience. Journal of Financial Stability, 4(2), 135–148. Were, M., & Wambua, J. (2014). What factors drive interest rate spread of commercial banks? Empirical evidence from Kenya. Review of Development Finance, 4(2), 73–82. How to cite this article: Tinta, A. A., & Sanou, E. J. (2021). Les Déterminants des Prêts Non Performants du Système Bancaire de l'UMOA. Afr Dev Rev. 33, 276–287. https://doi.org/10.1111/1467-8268.12536 View publication stats