Chapitre 5 : La balance des paiements et le taux de change Partie 1 : La balance de paiements : Le taux de change d’une monnaie est influencé par les entrées et les sorties de devises. Cellesci sont issues des flux entre l’économie d’un pays et le reste du monde qui sont évalués par les soldes des postes de la balance des paiements. L’ouverture des frontières économiques ainsi que la croissance des échanges internationaux rendent de plus en plus importante l’analyse des rapports économiques d’un pays avec ses partenaires. 1. La balance des paiements Les relations économiques internationales donnent lieu à un ensemble d’opérations qui portent tant sur le commerce des marchandises et des services que sur les mouvements de capitaux. Ces opérations sont retracées et inscrites dans la balance des paiements internationale. La balance des paiements est un compte statistique qui enregistre toutes les opérations commerciales, financières et monétaires intervenues entre un pays (individus, sociétés, gouvernements,…) et le reste du monde. C’est un compte de flux et non de stocks. On y trouve la variation des avoirs et des dettes d’un pays au cours d’une période donnée et non le montant de ces avoirs et dettes. Le terme résident désigne les personnes physiques, quelle que soit leur nationalité, qui ont leur domicile principal dans le pays, à l’exception des représentations diplomatiques et consulaires. Le terme de non-résident désigne les autres personnes physiques et morales. 1.1. L’utilité de la balance des paiements Les pays doivent se procurer à l’extérieur les marchandises qu’ils ne produisent pas chez eux et celles qu’ils peuvent obtenir à meilleur prix dans un autre pays. Le commerce entre les pays soulève la question de la monnaie acceptée dans les paiements et par conséquent du taux de change. SESAME BUSINESS 2021/2022 Chaque pays possède une réserve d’or et de devises ; cette réserve prend rarement la forme de billets de banque. Elle est surtout constituée d’avoirs en compte dans une banque étrangère ou dans un organisme international comme le FMI (Fonds monétaire international). Quand on achète à l’étranger le stock de devises baisse mais lorsqu’on vend à l’étranger, il augmente. Par exemple : Achat d’un micro-ordinateur américain par un résident canadien se paie en dollars américains. L’importateur doit se procurer des dollars américains pour les remettre à l’exportateur, ce qui diminue la quantité de devises américaines détenues au Canada. Le paiement d’électricité canadienne par des importateurs américains accroît la quantité de dollars américains détenus au Canada. 1.2. Principe d’enregistrement des données : La balance des paiements est un compte tenu en crédit (signe +) et débit (signe -). Toute opération entre le pays déclarant et le reste du monde donne lieu à deux inscriptions de même montant et de signe contraire. L’une traduit la nature économique de la transaction (ex : exportation ou importation de marchandises), l’autre traduit le mode de règlement de la transaction (ex : règlement par virement sur un compte bancaire). Qu’il s’agisse de flux réels, financiers ou monétaires, les flux de résident à non-résident s’inscrivent en crédit, les flux de non-résident s’inscrivent en débit. L’enregistrement des données de la balance des paiements Crédit Résidents → Non Résidents Une valeur inscrite en crédit traduit une diminution des avoirs sur l’extérieur qu’ils soient réels, financiers ou monétaires. Débit Résidents ← Non-Résidents Une valeur inscrite en débit traduit une augmentation des avoirs sur l’extérieur. SESAME BUSINESS 2021/2022 Exemples d’écriture : 1. Une entreprise résidente exporte des marchandises pour 100 millions d’euros. Ecrivez cette opération Crédit Débit Exportations et importations de marchandises 100 100 Tableau 1. Echange de compensation (millions d’euros) Cette exportation est une cession d’actifs réel, donc s’enregistre en crédit, sur la ligne « exportations et importations de marchandises ». Cette vente de biens donne lieu à un règlement qui peut prendre plusieurs formes. S’il y a échange de compensation, c’est-à-dire achats de marchandises pour une valeur égale, l’opération est enregistrée en débit. 2. Si le paiement se fait au comptant et en devises étrangères. Exportations et importations de marchandises Crédit 100 Avoirs et engagements en devises étrangères Débit 100 Tableau 2. Exportation et règlement en devises (millions d’euros) L’entreprise résidente reçoit une valeur de 100 millions d’euros sous forme de devises et les dépose dans un compte bancaire. Le pays voit donc son stock de devises étrangères augmenter de 100 millions d’euros. Cette augmentation d’avoirs est enregistrée en débit à la ligne « avoirs et engagements en devises étrangères. 3. Si l’entreprise résidente qui exporte les marchandises octroie à l’entreprise non résidente importatrice un crédit commercial, l’entreprise résidente reçoit un titre représentatif de ce crédit. Exportations et importations de marchandises Crédit 100 Crédits commerciaux Tableau 3. Exportation financée par un crédit commercial (millions d’euros). SESAME BUSINESS 2021/2022 Débit 100 Le stock de titres possédé par le pays augmente. Il y a un accroissement des avoirs possédés par le pays, sous la forme de crédits commerciaux. Cette augmentation d’avoirs est enregistrée en débit sur une ligne intitulée « crédits commerciaux ». 4. Si le crédit commercial vienne à échéance avant la fin de l’année et que l’entreprise importatrice non résidente rembourse le crédit en remettant des devises étrangères. Le remboursement du crédit commercial engendre pour l’entreprise résidente l’extinction d’une créance, détenue jusque-là sous forme d’un crédit commercial. Crédit Débit Crédits commerciaux 100 Avoirs et engagements en devises étrangères 100 Tableau 4. Remboursement d’un crédit à court terme par versement de devises étrangères (millions d’euros). Cette diminution du stock d’avoirs financiers détenus par le pays est enregistrée en crédit, comme toute diminution d’avoirs, sur la ligne « crédits commerciaux ». Le versement de devises étrangères effectué en contrepartie, vient grossir le stock de devises étrangères possédé par le pays et s’enregistre en débit sur la ligne « avoirs et engagements en devises étrangères ». 5. Si le paiement des exportations est effectué au comptant et en monnaie nationale, en l’occurrence en euros, le stock d’euros détenus par les non-résidents diminue. Exportations et importations de marchandises Crédit 100 Avoirs et engagements en devises étrangères Débit 100 Tableau 5. Exportations payées au comptant en euros (millions d’euros). Ceci est une diminution d’engagements des résidents, puisque la monnaie nationale détenue par des non-résidents est un engagement des résidents à l’égard de l’extérieur. Une diminution d’engagements est assimilée à une augmentation d’avoirs et inscrite en débit. 1.3 Les postes de la balance de paiements : Commentez la balance des paiements du Canada 2001. SESAME BUSINESS 2021/2022 Cas de la France : La banque de France et le ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie définissent la balance des paiements comme « Un document statistique présenté suivant les règles de la comptabilité en partie double qui rassemble et ordonne, dans un cadre défini, l’ensemble des opérations économiques et financières donnant lieu à transfert de propriété entre les résidents d’un pays-ou d’une zone économique- et les non résidents au cours d’une période donnée. La balance des paiements détaille ainsi la composition du compte courant et les transactions qui assurent son financement. Dans cette section, nous proposons une analyse en détail des différents postes de la balance des paiements de la zone euro. La balance des paiements retrace l’ensemble des flux entre résidents et non résidents durant une période donnée. Pour éviter de sombrer dans la complexité de la balance des paiements, il faut garder en mémoire la règle de la comptabilité en partie double. Toute transaction internationale est automatiquement enregistrée deux fois dans la balance des paiements : une fois au crédit, une autre au débit. Les flux entrants sont enregistrés au débit et se voient attribuer un signe négatif tandis que les flux sortants sont enregistrés au crédit et se voient attribuer un signe positif. Les flux économiques et financiers entre résidents et non –résidents sont répartis dans la balance des paiements en distinguant le compte courant, le compte de capital et le compte financier. 1.3.1. L’identité fondamentale de la balance des paiements : Toute transaction internationale donne lieu automatiquement à l’enregistrement de deux écritures comptables compensatoires dans la balance des paiements. C’est pourquoi, la somme du compte courant, du compte financier et du compte de capital est nécessairement nulle : Compte courant + compte financier + compte de capital = 0 (1) De cette identité comptable, on déduit également que la somme du compte courant et du compte de capital (qui correspond à la variation totale des actifs nets étrangers d’un pays, y compris les transferts d’actifs non marchands) doit nécessairement être égale à la différence entre les importations et les exportations d’actifs, soit l’opposé du compte financier. SESAME BUSINESS 2021/2022 1.3.2. Le compte courant (compte des transactions courantes) Au sein du compte courant on distingue quatre catégories : 1. Le commerce international de biens : soit les exportations et les importations. 2. Les services (y compris les dépenses effectuées lors des voyages). Les transactions liées aux exportations ou aux importations de biens et services entrent directement dans le compte de transactions courantes (compte courant). C’est le cas par exemple d’un consommateur américain qui importe du vin français. Cette transaction sera enregistrée dans la balance des paiements de la zone euro en crédit sur le compte courant. 3. Les revenus reçus des facteurs de production opérants à l’étranger : Il s’agit des salaires des résidents qui travaillent à l’étranger ainsi que des intérêts et dividendes perçus sur les entreprises qui opèrent à l’étranger. Si les revenus sont inclus dans le compte courant, c’est qu’ils représentent la contrepartie d’un service 4. Les transferts courants. En 2013, les exportations de biens et services de la zone euro atteignent plus de 2500 milliards d’euros (1940,5 + 651,5), alors que les importations se situent à environ 2300 milliards d’euros (1746,76 + 546,6). Le solde du commerce extérieur (c’est-à-dire le solde de la balance commerciale) est positif en 2013 et compense les revenus et les transferts courants qui présentent, traditionnellement, un solde déficitaire. Le tableau montre un excédent du compte courant pour la zone euro en 2013 de 221,3 milliards d’euros ce qui signifie que les paiements courants des résidents de la zone euro sont inférieurs aux paiements qu’ils reçoivent de l’étranger. C’est ainsi, car les résidents de la zone euro produisent plus qu’ils ne consomment. 1.3.3. Le compte de capital : Les transactions qui conduisent à des transferts de richesse entre pays, mais non comptabilisées précédemment, sont enregistrées dans le compte de capital. Ces mouvements internationaux d’actifs –qui sont généralement de faible ampleur- ne sont pas assimilables à ceux qui sont enregistrés dans le compte financier. Ils résultent en grande partie d’activités non marchandes ou concernent l’acquisition ou la cession d’actifs non produits, non financiers et parfois intangibles (comme les droits d’auteurs, les brevets ou les marques commerciales). SESAME BUSINESS 2021/2022 Par exemple : - - L’Etat français abandonne 1 milliard d’euros de dette que lui doit le Pakistan, la richesse de la France va diminuer d’un milliard d’euros et un débit d’un milliard va être enregistré dans le compte de capital de la zone euro. Soit un suédois qui émigre aux Pays-Bas, emportant avec lui 100 00 Millions d’actifs de son pays. Dans ce cas, 100 000 millions vont venir s’inscrire en crédit du compte de capital de la zone euro. En 2013, le compte de capital de la zone euro admet un solde positif d’un montant de 18,1 milliards d’euros. La somme du compte courant et du compte de capital représente la capacité de financement de la nation (s’il est positif comme dans le cas de 2013) ou le besoin de financement (s’il est négatif). 1.3.4. Le compte financier : Tout comme le compte courant mesure les achats et les ventes de biens et de services, le compte financier mesure les achats et les ventes d’actifs à des non résidents. Les transactions issues de l’achat et de la vente d’actifs (telles que des devises, des obligations, des actions, des terrains,…) sont comptabilisées dans le compte financier. Lorsqu’une entreprise belge rachète une société canadienne, la transaction s’inscrit en débit dans le compte financier de la balance des paiements de la zone euro. La différence entre les exportations (ventes) d’actifs financiers d’un pays et ses importations (achats) est appelée le solde du compte financier ou plus simplement le compte financier. Plusieurs postes, qui rendent compte de la variété des transactions financières internationales, composent le compte financier. On distingue d’abord les investissements étrangers (IDE) et les investissements de portefeuille. Il faut distinguer entre les investissements dont l’objectif est d’exercer, dans le cadre d’une relation durable, une influence significative sur la gestion de l’entreprise, et les investissements qui répondent à une logique de placements diversifiés, sans véritable implication dans la vie de l’entreprise. Les IDE sont des opérations destinées à contrôler plus de 10% du capital social d’une entreprise (un solde positif signifie que le flux d’IDE vers la zone euro est supérieur au flux d’IDE vers l’étranger), alors que les investissements de portefeuille sont des achats de titres (titres du marché monétaire, obligations, actions, dans la limite de 10 %). On trouve aussi les produits financiers dérivés (contrats à terme, options) qui sont des instruments de gestion des risques et les autres investissements, qui correspondent aux crédits commerciaux, aux autres prêts, etc. On trouve enfin les avoirs de réserves, qui seront détaillés plus tard. SESAME BUSINESS 2021/2022 Le compte financier a dégagé un solde positif de 246,5 milliard d’euros en 2013. Les investissements directs et de portefeuilles cumulés ont enregistré des entrées nettes de 26 milliard en 2013. Les investissements directs à l’étranger des résidents de la zone euro s’élèvent à 198,3 milliards d’euros (- sortie de capitaux), tandis que les investissements directs des non-résidents dans la zone euro sont de 81,6 milliards d’euros. S’ajoutent à cela des investissements de portefeuille en titres étrangers par les résidents pour 222,7 milliards d’euros et des investissements de portefeuille en titres de la ZE par des non-résidents à hauteur de 365 milliards d’euros. Or d’après l’identité (1), le compte financier aurait dû présenter un solde compensatoire de 239,5 milliards d’euros. Comment cette différence s’explique-t-elle, si chaque entrée créditrice est effectivement compensée par une entrée débitrice ? 1.3.5. Erreurs et omissions nettes : La balance des paiements est un document comptable constitué à partir de nombreuses sources. En pratique, il y a toujours des approximations, des erreurs de mesures faussent l’identité (1). Supposons que la France importe une cargaison de lecteurs DVD japonais, cette importation va donner lieu à un débit dans le compte courant. Ce débit sera rapporté, par exemple, par un inspecteur des douanes. Le crédit compensatoire du compte financier correspond aux nombreux règlements (par chèques, en espèces) réalisés en paiement des lecteurs de DVD. On comprend aisément qu’il est pratiquement impossible que les deux sources convergent ; Les comptables nationaux rétablissent l’équilibre en introduisant un poste rectificatif, intitulé « erreurs et omissions nettes ». En 2013, les transactions internationales non enregistrées, ou mal enregistrées, ont généré un déséquilibre comptable débiteur de 7,1 milliards d’euros pour la ZE. Il est impossible de savoir comment répartir cette erreur statistique entre les trois comptes, autrement ce ne serait plus une erreur. Les comptables nationaux considèrent les données sur le commerce de marchandises comme relativement fiables, mais il n’en est pas de même pour les services. Il est par ailleurs fort probable que le compte financier soit une source importante d’erreur, tant il s’avère difficile de suivre avec précision les transactions financières complexes entre pays. 1.3.6. Les avoirs de réserve : Les avoirs de réserve correspondent aux réserves officielles internationales des banques centrales. En 2013, les avoirs de réserve de la ZE ont augmenté de 4,3 milliards d’euros (un signe positif signifie une baisse des réserves). SESAME BUSINESS 2021/2022 Les banques centrales de tous les pays conservent des réserves officielles de change pour se prémunir contre les aléas de la conjoncture économique ; Dans le passé, les réserves officielles étaient essentiellement constituées d’or. Aujourd’hui, les réserves des banques centrales comprennent une part substantielle d’actifs financiers étrangers. Ces réserves sont principalement des actifs en dollars (des bons du Trésor américains par exemple) et dans une moindre mesure, en euros, qui sont les deux principales monnaies internationales de réserve. Les banques centrales détiennent également des actifs libellés dans leur propre monnaie (ainsi la Réserve fédérale des Etats-Unis détient des actifs en dollars ; la BCE, des actifs en euros), mais dans ce cas on ne considère pas qu’il ne s’agit de réserves internationales. Ces réserves permettent aux banques centrales d’acheter ou de vendre des actifs sur les marchés de capitaux, en contrepartie de quoi elles diminuent ou augmentent la monnaie en circulation. Lorsqu’une banque centrale achète ou vend des actifs étrangers, la transaction est enregistrée dans le compte financier de la même façon que si elle avait été menée par un particulier ; La transaction suivante est un exemple de la façon dont la banque centrale japonaise peut être amenée à acheter des actifs en euros. Un concessionnaire français importe une Honda Accor du Japon et paie le constructeur automobile avec un chèque de 20 000 E. Honda ne souhaite pas conserver cette somme en euros et la banque du Japon accepte d’échanger le chèque contre des yens japonais. Cette transaction augmente donc les réserves officielles de change de la Banque du japon de 20 000 E. Comme ces réserves en euros font partie des avoirs totaux japonais sur la France, ces derniers augmentent de 20 000 E. Cette transaction a pour conséquence une écriture créditrice de 20 000 E du compte financier de la ZE. Sa contrepartie débitrice de – 20 000 E apparaît dans le compte courant de la ZE, du fait de l’importation de la voiture. SESAME BUSINESS 2021/2022