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Histologie De La Muqueuse Buccale Et Des Maxillaires

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Histologie de la muqueuse buccale
et des maxillaires
M.-M. Auriol, Y. Le Charpentier
La muqueuse buccale est étudiée en premier lieu avec ses fonctions, son organisation anatomique et les
détails de sa structure histologique et ultrastructurale. Un court chapitre est ensuite consacré aux annexes
de la muqueuse : les glandes salivaires accessoires. Enfin sont envisagés les aspects de la muqueuse de
jonction oropharyngée ainsi que l’anatomie et l’histologie des maxillaires.
© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Muqueuse buccale ; Glandes salivaires accessoires ; Muqueuse oropharyngée ;
Histologie des maxillaires
Plan
¶ Muqueuse buccale
Fonctions
Organisation anatomique
Variations histologiques selon la topographie
Étude histologique, immunohistochimique et ultrastructurale
1
1
1
2
2
¶ Glandes salivaires accessoires
Structure
Fonctions
7
7
7
¶ Muqueuse oropharyngée
7
¶ Maxillaires
Rappel anatomique
Structure histologique
Au niveau de l’articulation temporomandibulaire
Os alvéolaire
7
7
8
8
8
■ Muqueuse buccale
C’est la muqueuse qui revêt la paroi interne des lèvres et la
cavité buccale ; elle est en continuité avec la peau à la jonction
vermillon, versant externe des lèvres. Elle se poursuit en arrière
avec la muqueuse digestive (pharynx) et respiratoire (larynx).
Elle est revêtue d’un épithélium malpighien non ou peu
kératinisé. Fait particulier, elle est perforée par les dents au
niveau des gencives et contracte ainsi une jonction étanche
avec la dent, toute modification de cette jonction étant l’amorce
des phénomènes pathologiques de parodontose.
Fonctions
Elle joue de multiples rôles [1, 2] :
• protection des tissus profonds contre les compressions et
abrasions provoquées par les forces mécaniques mises en jeu
dans la préhension des aliments et dans leur mâchage.
Protection également contre les nombreux micro-organismes
saprophytes de la cavité buccale qui deviendraient agressifs
en cas de blessure de la muqueuse ;
• fonction sensorielle assurée par de nombreux récepteurs à la
température, au tact, à la douleur disséminés dans la
muqueuse ;
• fonction gustative liée aux bourgeons du goût situés dans la
muqueuse linguale dorsale ;
Médecine buccale
• fonction de régulation thermique, très importante chez les
animaux (en particulier le chien), mais ne jouant qu’un rôle
secondaire chez l’homme.
La protection de cette muqueuse buccale est régie par le
système immunitaire local (organes lymphoïdes, lymphocytes et
plasmocytes) qui capte, par la production d’anticorps, le
matériel étranger sous forme de complexes immuns. Elle est de
plus assurée par la salive qui humidifie en permanence la
bouche et y déverse son immunoglobuline A (IgA) sécrétoire et
ses facteurs bactériostatiques (lysozyme, lactoferrine).
Organisation anatomique
On y distingue deux portions :
• le vestibule externe bordé par les lèvres et les joues ;
• la cavité buccale proprement dite, séparée du vestibule par
l’alvéole avec les dents et la gencive. En haut, la muqueuse
revêt le palais dur et le palais mou ; en bas, elle tapisse le
plancher buccal et la base de la langue ; en arrière, elle est
limitée par les piliers du voile et les amygdales qui la séparent
du pharynx.
En fait, en fonction de ses relations avec les structures
osseuses ou musculaires sous-jacentes, on y individualise
plusieurs territoires :
• les lèvres, riches en muscles striés (en particulier l’orbiculaire),
ont un versant exobuccal cutané et un versant interne
muqueux riche en glandes salivaires accessoires (siège électif
de la biopsie de ces dernières). Entre les deux, existe une zone
transitionnelle rouge, le vermillon ou zone de Klein ;
• la muqueuse jugale est séparée du muscle buccinateur par un
tissu conjonctif et adipeux abondant avec de nombreuses
glandes salivaires accessoires ;
• la langue, organe très différencié, intervient non seulement
dans la fonction du goût mais aussi dans la parole et la
mastication. La muqueuse y repose sur une musculeuse
constituée de faisceaux intercroisés en tous sens. Sur son dos,
elle présente de nombreuses papilles dont on distingue trois
variétés :
• les papilles filiformes sont dispersées sur toute la surface et
confèrent au dos de la langue son aspect râpeux ;
• les papilles fongiformes, plus grosses, sont intriquées aux
précédentes mais prédominent sur les bords de la langue ;
• les papilles caliciformes ou circumvallées, très apparentes,
sont alignées le long du sulcus terminalis ; elles forment le V
lingual et limitent le foramen cæcal ;
1
28-120-M-10 ¶ Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires
Figure 1. Muqueuse masticatrice (palais) :
kératinisation en surface ; crêtes épithéliales
s’invaginant dans un chorion dense, fibreux.
Hématéine-éosine × 40.
Figure 2. Muqueuse bordante (lèvre inférieure) : pas de crêtes épithéliales au niveau de
la basale ; chorion lâche hébergeant une
glande salivaire accessoire. Hématéine-éosine
× 160.
• les papilles foliées, situées dans la région postérieure et sur les
bords, de forme irrégulière, sont constituées de tissu lymphoïde. La muqueuse de la face ventrale de la langue, en
revanche, d’aspect lisse, est dépourvue de papilles. Elle se
poursuit avec celle du plancher buccal. Langue et plancher
sont réunis sur la ligne médiane par le frein de la langue ;
• le plancher de la bouche : la muqueuse y revêt les glandes
sublinguales. Elle présente deux saillies, les caroncules
sublinguales, qui sont obliques d’arrière en avant et dessinent
un V dont le sommet est situé sur la ligne médiane. Sur ces
saillies s’abouchent les nombreux canaux excréteurs des
glandes sublinguales ;
• les gencives : à ce niveau, la muqueuse circonscrit le collet
des dents et recouvre l’os alvéolaire auquel elle est étroitement fixée. Entre face externe de la gencive et muqueuse
jugale se creuse le sillon vestibulaire ;
• le palais dur : la muqueuse y est étroitement amarrée au tissu
conjonctif et au plan osseux sous-jacent et est sillonnée de
plis transversaux ;
• le palais mou, situé en arrière du précédent, est revêtu d’une
muqueuse mince.
Figure 3. Muqueuse spécialisée (dos de la
langue) : papille fongiforme. Hématéineéosine × 40.
Figure 4. Muqueuse du dos de la langue :
corpuscule du goût enchâssé dans l’épithélium. Hématéine-éosine × 100.
Variations histologiques selon
la topographie
La muqueuse buccale, de type malpighien, ressemble à la
peau, mais en diffère par l’absence d’annexes (bulbes pileux,
glandes sudoripares, glandes sébacées) et le petit nombre de
mélanocytes. De plus, elle tire son originalité d’une humidification permanente par la salive que sécrètent les nombreuses
glandes salivaires accessoires qui lui sont annexées et du turnover
très rapide [3] des cellules de son épithélium (25 jours au lieu de
50 à 75 jours pour l’épiderme). Notons que quelques glandes
sébacées hétérotopiques sont parfois visibles dans la lèvre
supérieure et dans la muqueuse buccale, donnant des nodules
jaunâtres appelés taches de Fordyce.
Il est classique de décrire trois types de muqueuse buccale en
fonction de sa topographie [4-6] :
• la muqueuse masticatrice qui tapisse gencives et palais dur,
aide à la compression mécanique des aliments. Kératinisée en
surface, solidement amarrée aux structures osseuses sousjacentes (palais et os alvéolaire), elle présente des crêtes
épithéliales longues s’invaginant profondément dans le tissu
conjonctif. Ce dernier est riche en fibres collagènes (Fig. 1) ;
• la muqueuse bordante, revêtant versant muqueux des lèvres,
joues, plancher et face ventrale de la langue, palais mou, est
flexible. Elle se laisse distendre par les aliments. Non kératinisée en surface, elle ne présente que des crêtes épithéliales
basales peu accusées. Son chorion, très vascularisé, est
connecté aux muscles sous-jacents par une sous-muqueuse de
texture lâche (Fig. 2) ;
• la muqueuse spécialisée, cantonnée au dos de la langue, est
kératinisée comme les muqueuses masticatrices. De plus, elle
est pourvue de papilles intervenant dans la fonction gustative :
C les papilles filiformes, élevures coniques, ont un axe
conjonctif mince, revêtu d’un épithélium très kératinisé ;
C les papilles fongiformes, en forme de champignon, sont
plus larges à leur extrémité supérieure qu’à leur base
(Fig. 3). Les crêtes basales épithéliales sont très marquées ;
2
C les papilles caliciformes, circumvallées, sont entourées à la
base par un sillon profond au fond duquel s’abouchent les
glandes salivaires accessoires séreuses de von Ebner ;
C les bourgeons du goût, supports de la fonction du goût,
sont en majeure partie situés au niveau des papilles. À titre
accessoire, on peut les rencontrer dans d’autres territoires
de la muqueuse buccale, voire dans l’oropharynx. Ces
organes, en rapport avec les terminaisons nerveuses des
différents nerfs sensitifs de la cavité buccale (nerfs glossopharyngien, intermédiaire de Wrisberg, pneumogastrique)
sont des placodes ovoïdes de structure neuroépithéliale,
invaginées dans l’épithélium (Fig. 4). Du côté du chorion,
ils sont connectés avec les terminaisons nerveuses par un
pore interne maintenu ouvert en permanence. Le corpuscule proprement dit est formé d’une vingtaine de cellules
de soutien, allongées, rondes ou ovoïdes, à juxtaposition
arciforme. Entre ces cellules circulent des fibres nerveuses
et des cellules sensorielles neuroépithéliales. Ces cellules,
allongées, traversent l’épithélium au niveau d’un pore
externe et entrent ainsi en contact avec le contenu de la
cavité buccale ;
C les papilles foliées sont formées de tissu lymphoïde à
disposition folliculaire caractéristique.
Étude histologique, immunohistochimique
et ultrastructurale
La muqueuse buccale est constituée d’un épithélium malpighien et d’un tissu conjonctif dénommé lamina propria ou
chorion. La base de l’épithélium présente des irrégularités avec
des crêtes épithéliales entourant des papilles conjonctives. Entre
Médecine buccale
Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires ¶ 28-120-M-10
Figure 5. Épithélium malpighien kératinisé
en surface (gencive) : kératinocytes polygonaux, régulièrement stratifiés, avec espaces
clairs intercellulaires renfermant des traits parallèles (épines). Hématéine-éosine × 300.
épithélium et conjonctif se situe la membrane basale, mesurant
1 à 2 µm d’épaisseur. Il n’existe pas, comme dans l’intestin, de
limite nette entre muqueuse et sous-muqueuse. Dans de nombreuses régions (joues, lèvres, palais mou), une couche de graisse
avec des glandes salivaires, des vaisseaux et des nerfs sépare la
muqueuse de l’os ou des muscles sous-jacents. Celle-ci correspond à la sous-muqueuse. Ailleurs (gencives, palais dur), cette
sous-muqueuse manque et la muqueuse est directement attachée au périoste du squelette sous-jacent. Cette attache, non
élastique, est dénommée mucopérioste. Les glandes salivaires
accessoires sont situées dans le chorion ou plus profondément.
Des nodules de tissu lymphoïde avec des cryptes bordées par un
épithélium sont dispersés dans la muqueuse buccale. Les plus
gros, postérieurs, forment les amygdales linguale, palatine et
pharyngée (ils constituent l’anneau de Waldeyer). Les plus petits
sont ubiquitaires (palais mou, face ventrale de la langue,
plancher). Tous ces organes, intervenant dans diverses réactions
immunologiques, jouent un rôle essentiel dans la lutte contre
les infections de la bouche.
Figure 6. Épithélium malpighien : présence
de cytokératine dans toute l’épaisseur de l’épithélium. Immunohistochimie. Anticorps antiKL1. Grossissement × 220.
Figure 7. Épithélium malpighien : présence de cytokératine dans les
couches basale et suprabasale. Immunohistochimie. Anticorps CAM2.
Grossissement × 220.
Épithélium
Il forme une barrière entre cavité buccale et tissus profonds.
De type malpighien, il est constitué de plusieurs couches de
cellules étroitement attachées les unes aux autres, appelées
kératinocytes.
Comme dans la peau, l’intégrité de cet épithélium est
maintenue grâce au renouvellement permanent des cellules par
l’intermédiaire des divisions mitotiques des assises profondes et
de la migration vers la surface des cellules ainsi formées qui
remplacent régulièrement les cellules vieillies et desquamées.
Ainsi peut-on distinguer dans l’épithélium une double
population de cellules : les cellules germinales, capables de se
diviser et de produire constamment de nouvelles cellules ; les
cellules en maturation qui se différencient progressivement vers
la surface. Outre ces cellules épithéliales, on trouve également
des cellules dendritiques particulières (cellules de Langerhans et
mélanocytes) ainsi que quelques cellules de Merkel.
Cellules épithéliales ou kératinocytes
Aspect histologique. Il varie selon que se produit en surface
une kératinisation ou non [7].
• Dans les zones kératinisées se superposent les couches
suivantes :
C le stratum germinatum (couche basale ou germinative)
repose sur la membrane basale. Les cellules, cubiques ou
cylindriques, ont un gros noyau très chromophile. Elles
sont disposées en une ou deux assises. Elles sont le siège de
nombreuses mitoses ;
C le stratum spinosum (ou couche squameuse) est composé
de cellules polygonales ou arrondies accrochées les unes
aux autres par des ponts linéaires correspondant aux
desmosomes (Fig. 5) ;
C le stratum granulosum (ou couche granuleuse) est formé de
cellules aplaties renfermant dans leur cytoplasme de fines
granulations de kératohyaline, colorées en violet par
l’hématoxyline ;
C le stratum corneum (ou couche kératinisée) est constitué de
fines squames acidophiles de kératine. Au sein de cette
couche persistent souvent quelques noyaux résiduels
Médecine buccale
pycnotiques, ou des espaces clairs représentant l’emplacement de noyaux dégénérés. Cet aspect caractérise la
parakératose.
• Dans les zones non kératinisées, la couche granuleuse est
absente. Les cellules conservent jusqu’en surface un noyau
rond et leur cytoplasme renferme un glycogène abondant, à
acide périodique Schiff (PAS) positif, disparaissant après
digestion par l’amylase.
Immunohistochimie. Utilisant des anticorps monoclonaux
anticytokératine, elle permet de définir le degré de différenciation des kératinocytes en fonction du type de leurs filaments
intermédiaires. Les cytokératines à poids moléculaire élevé sont
visibles dans les cellules différenciées (Fig. 6) [8]. Les cytokératines à faible poids moléculaire sont présentes dans les cellules
jeunes (Fig. 7).
Des études plus récentes avec anticorps primaires monoclonaux spécifiques (récepteurs du collagène a2 et a3, b1 intégrines) révélés par complexes marqués avidine-biotine-peroxydase
donnent des renseignements complémentaires (positivité des a2
b1 intégrines sur les cellules épithéliales basales et les couches
adjacentes, positivité des a3 b1 sur la couche basale).
Étude ultrastructurale. Les cellules germinatives sont
attachées à la membrane basale par des hémidesmosomes. Leur
cytoplasme renferme de nombreux organites communs à toute
cellule (mitochondries, lysosomes, appareil de Golgi, ribosomes,
ergastoplasme granuleux). Leur noyau est pourvu de plusieurs
nucléoles. De plus, on y observe les structures propres aux
cellules épithéliales de souche malpighienne (tonofilaments,
desmosomes).
Dans les zones kératinisées, les cellules, au fur et à mesure
qu’elles migrent en surface, s’enrichissent en tonofilaments,
groupés en faisceaux épais. Ceux-ci appartiennent à la classe des
filaments intermédiaires. Ils sont constitués de protéines
synthétisées par les ribosomes ; ils ont l’aspect de longs filaments de 8 nm de diamètre et se groupent en faisceaux de
tonofibrilles. Les desmosomes assurent la cohésion entre les
cellules (Fig. 8, 9). Dus à des modifications spécialisées des
3
28-120-M-10 ¶ Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires
Figure 8. Kératinocytes : présence de nombreux desmosomes dans les
espaces intercellulaires. Microscopie électronique à transmission × 4 500.
Figure 9. Kératinocyte : desmosomes et tonofilaments. Microscopie
électronique à transmission × 60 000.
Figure 11. Surface d’une muqueuse buccale non kératinisée : kératinocyte avec stries parallèles ou curvilignes saillantes ; sur la face inférieure,
microvillus nombreux. Microscopie électronique à balayage × 4 000.
Figure 12. Surface d’une muqueuse buccale kératinisée : stries saillantes anastomosées, circonscrivant des cavités en « nid d’abeille ». Microscopie électronique à balayage × 6 000.
de diamètre, limitées par des bords nets mais minces correspondant aux lames terminales. Leur noyau, petit, rond, central, est
peu apparent. La face supérieure de ces cellules est parcourue
par des rides (Fig. 11) tantôt parallèles aux bords cellulaires,
tantôt curvilignes. Ces rides s’anastomosent et limitent des
logettes en « nid d’abeille » lorsque survient une kératinisation
(Fig. 12). Leur face profonde est hérissée de microvillus de taille
et de répartition régulières correspondant aux desmosomes. Les
assises sous-jacentes possèdent des microvillus sur toutes leurs
faces.
Figure 10. Surface d’un épithélium kératinisé : squames opaques sans
organites ni noyau. Au-dessous, kératinocytes de la couche granuleuse
avec mottes opaques de kératohyaline. Microscopie électronique à transmission × 60 000.
membranes cellulaires, ils sont situés en regard d’un épaississement intracellulaire (plaque d’attache des tonofilaments,
constituée d’une protéine, la desmoplakine).
La couche granuleuse contient des mottes de kératohyaline
opaques aux électrons et disposées au contact des tonofilaments
(Fig. 10). De plus s’observent des corps de Odland (kératinosomes). Ces organites de petite taille (100 à 200 nm de diamètre),
ronds ou ovales, sont striés à l’intérieur et entourés d’une
membrane trilaminaire. Ils contiennent comme les lysosomes
des phosphatases acides mais également des phospholipides.
Formés dans le Golgi, ils sont extrudés dans l’espace intercellulaire où ils forment des masses lamellaires avant de se désintégrer. Ils représentent ainsi une barrière physiologique à la
pénétration d’eau dans la couche profonde de l’épithélium.
La couche cornée est constituée de plusieurs couches de
cellules kératinisées aplaties en bandes opaques (Fig. 10) avec
disparition des organites et du noyau et rupture des desmosomes, ce qui permet la desquamation cellulaire.
Dans les zones non kératinisées, les tonofilaments peu
nombreux sont disposés sans groupement en faisceaux de
tonofibrilles. Les grains de glycogène sont nombreux.
En microscopie à balayage [9-11], la surface de l’épithélium
dessine une mosaïque de cellules polyédriques de 30 à 50 nm
4
Cellules non kératinocytes
Souvent dénommées cellules claires, elles possèdent en effet
un halo clair périnucléaire. Elles correspondent en fait à trois
types cellulaires, authentifiés par la microscopie électronique et
l’histochimie : mélanocytes, cellules de Langerhans et cellules de
Merkel. De plus, on peut retrouver des lymphocytes
intraépithéliaux.
Mélanocytes. Nés de la crête neurale ectodermique, ils
migrent dans l’épithélium buccal comme dans la peau pendant
l’embryogenèse (11 e semaine). Ils sont susceptibles de se
multiplier dans certaines conditions et entraînent alors une
pigmentation endogène brunâtre [12]. Situés dans l’assise basale
de l’épithélium, ils sécrètent la mélanine, pigment brunâtre,
bien mis en évidence par les colorations argentaffines (Fontana)
en microscopie optique. En microscopie électronique, ce sont
des cellules étoilées, dendritiques qui, à l’inverse des kératinocytes, sont dépourvues de desmosomes et de tonofilaments.
Dans leur cytoplasme s’édifient, sous l’influence d’une enzyme
mélanogénétique synthétisée par les ribosomes, les prémélanosomes (grains ronds) puis les mélanosomes (ronds et striés
longitudinalement) renfermant la mélanine.
Dans des conditions pathologiques d’hyperproduction de
pigment mélanique, ce pigment se retrouve dans certains
kératinocytes et dans les cellules conjonctives (macrophages de
types mélanophages).
Cellules de Langerhans [13]. Proches parentes des macrophages, elles naissent dans la moelle osseuse et migrent dans
l’épithélium en même temps que les mélanocytes pendant la vie
embryonnaire. En microscopie optique, elles siègent surtout
Médecine buccale
Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires ¶ 28-120-M-10
Figure 13. Cellules de Langerhans dans l’épithélium buccal : positivité
de l’anticorps OKT6. Immunohistochimie × 160.
Figure 14. Cellule de Langerhans : cytoplasme clair. Microscopie électronique à transmission × 3 000.
Figure 16. Présence de collagène IV sur la lamina lucida et la paroi des
vaisseaux. Immunohistochimie. Anticorps anticollagène IV. Grossissement × 160.
Figure 17. Présence de laminine sur la lamina lucida et la paroi des vaisseaux. Immunohistochimie. Anticorps antilaminine × 150.
renferment dans leur cytoplasme des granules de catécholamines. Elles joueraient un rôle sensoriel en libérant un transmetteur aux fibres nerveuses adjacentes.
Cellules inflammatoires. Ce sont surtout des lymphocytes,
rarement des polynucléaires.
Jonction épithélium-chorion
Figure 15. Cellule de Langerhans : corps de Birbeck en « raquette » à
manche strié surmonté d’une vésicule claire. Microscopie électronique à
transmission × 60 000.
dans la région suprabasale de l’épithélium, mais sont parfois en
plein corps muqueux. Ces cellules, globuleuses, ont un cytoplasme clair, abondant et un noyau allongé. Dépourvues de
desmosomes, elles ont de multiples prolongements arborescents
qui s’insinuent entre les kératinocytes (cellules dendritiques) et
contractent des rapports avec les lymphocytes T intraépithéliaux.
L’histoenzymologie y démontre des activités adénosine
triphosphatasiques (ATPasiques) et estérasiques non spécifiques
sur la membrane cellulaire. L’étude immunohistochimique y
révèle des antigènes de surface plus spécifiques (antigène OKT6,
protéine S100, human leukocyte antigen [HLA] DR) (Fig. 13). Par
ailleurs, en microscopie électronique, ces cellules claires (Fig. 14)
renferment des organites pathognomoniques, les corps de
Birbek (bâtonnets ou raquettes à manche strié) (Fig. 15). Le rôle
immunologique de ces cellules est fondamental. Elles reconnaissent le matériel antigénique qui pénètre dans l’épithélium
et présentent cet antigène aux lymphocytes T. Ceux-ci activent
d’autres clones cellulaires (lymphocytes B et macrophages) et
mobilisent leur sous-groupe T8 cytotoxique vers la cible
antigénique. La fraction T4 de ces lymphocytes T active les
lymphocytes B qui se transforment en plasmocytes.
Cellules de Merkel. Sans doute dérivées de la crête neurale,
elles sont situées dans l’assise basale de l’épithélium. On les
observe dans la gencive et le palais [14]. Ce sont des cellules
rondes, sans prolongements dendritiques. Elles peuvent posséder quelques tonofilaments, voire quelques desmosomes. Elles
Médecine buccale
Cette zone, où les papilles conjonctives alternent avec les
crêtes épithéliales, est une zone fondamentale dans les échanges
épithélioconjonctifs. En microscopie optique, c’est une bande
amorphe faiblement PAS positive, colorée par l’argent. La
microscopie électronique a seule révélé les détails complexes de
cette lame basale (basal lamina) hautement organisée. On y
distingue :
• la lamina densa, couche de matériel granulofilamenteux de
50 nm d’épaisseur, parallèle à la membrane basale cellulaire
épithéliale, mais séparée d’elle par la lamina lucida. Elle
contient du collagène IV (Fig. 16) ;
• la lamina lucida, de 45 nm d’épaisseur, est une zone claire
avec de légères condensations en regard des hémidesmosomes
de la membrane cellulaire. Elle renferme des glycoprotéines,
en particulier de la laminine (Fig. 17) ;
• les fibrilles d’ancrage (anchoring fibrillae), houppes de petites
fibrilles, sont insérées dans la lamina densa. Elles émanent de
fibrilles collagènes qui s’entremêlent à la lamina densa pour
former une attache flexible.
Tous les échanges entre conjonctif et épithélium se font par
l’intermédiaire de cette membrane basale. Celle-ci sert d’attache
aux kératinocytes et contrôle leur différenciation et leur
renouvellement. Elle intervient également comme un filtre
sélectif. Elle peut se modifier dans diverses circonstances
pathologiques (diabète, pemphigoïde bulleuse). Sa rupture est
un facteur important dans l’invasion des cancers.
Lamina propria ou chorion
C’est le tissu conjonctif qui sert de support à l’épithélium. On
le divise en deux zones :
• superficielle (papilles associées aux crêtes épithéliales) ;
• profonde, avec arrangement des fibres collagènes en réseau.
Dans la zone superficielle, les fibres collagènes sont fines et
entourées d’anses capillaires nombreuses. Dans la zone réticulaire, les fibres collagènes sont groupées en faisceaux épais,
tendant à se disposer parallèlement à la surface.
5
28-120-M-10 ¶ Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires
Figure 18. Fibroblastes allongés au sein de fibres collagènes disposées
parallèlement. Hématéine-éosine × 160.
Figure 19. Fibroblaste et fibrilles collagènes périphériques. Coloration
argentique. Microscopie électronique à transmission × 4 000.
Figure 20. Fibroblaste : détail avec ergastoplasme granulaire abondant. Microscopie électronique à transmission × 6 000.
Ce chorion renferme des fibroblastes, des vaisseaux sanguins,
des nerfs, des fibres enchâssées dans une substance fondamentale amorphe et des cellules participant aux défenses immunitaires (lymphocytes, plasmocytes, monocytes, macrophages).
Cellules
Fibroblastes. Ce sont les cellules les plus nombreuses. Ils
élaborent à la fois la substance fondamentale et les fibrilles
collagènes. En microscopie optique, ce sont des cellules fusiformes (Fig. 18) ou étoilées avec de nombreux prolongements
cytoplasmiques parallèles aux fibres collagènes. Leur noyau
renferme un ou plusieurs nucléoles. En microscopie électronique, ils ont un appareil de synthèse très développé (ergastoplasme granulaire où s’édifient les précurseurs des fibres
collagènes, appareil de Golgi) (Fig. 19, 20). Ils possèdent des
filaments intermédiaires de vimentine et synthétisent divers
types de collagène (I, III, IV), que l’on peut caractériser par
l’emploi d’antigènes monoclonaux anticollagènes ainsi que par
la fibronectine, glycoprotéine fixée au collagène et régulant
l’organisation spatiale des cellules. En microscopie à balayage, ce
sont des cellules allongées, tapissées d’un grillage de fibres
collagènes (Fig. 21).
Le rôle des fibroblastes est fondamental pour le maintien de
l’intégrité de la muqueuse. Ils interviennent dans la cicatrisation
où ils se multiplient par division. Ils peuvent acquérir des
6
Figure 21. Fibroblaste entouré de fibres collagènes. Microscopie électronique à balayage × 3 000.
Figure 22. Vaisseaux du chorion. Phosphatases alcalines + histoenzymologie × 40.
fonctions « contractiles » (myofibroblastes avec filaments
d’actine) dans certaines cicatrisations [15] et dans certaines
hypertrophies gingivales.
Mastocytes. Ce sont de grandes cellules rondes ou ovales à
petit noyau central avec nombreux grains foncés intracytoplasmiques contenant de l’héparine et de l’histamine.
Cellules immunocompétentes diverses. Elles sont bien
étiquetées après divers marquages immunohistochimiques.
Les macrophages (ou histiocytes, phagocytes), en microscopie
optique, sont difficiles à distinguer des fibroblastes. En microscopie électronique, leur noyau est plus petit, plus dense, leur
réticulum endoplasmique moins abondant. Surtout, ils contiennent de nombreuses vésicules (lysosomes) entourées d’une
membrane qui renferment des enzymes hydrolytiques, en
particulier des phosphatases acides.
Ces cellules assurent la phagocytose des tissus nécrosés,
accroissent l’antigénicité avant présentation aux lymphocytes et
stimulent la prolifération fibroblastique dans la cicatrisation.
Deux macrophages particuliers sont parfois observés dans le
chorion de la muqueuse buccale : les mélanophages qui ingèrent des grains de mélanine extrudés des mélanocytes ; les
sidérophages qui renferment de l’hémosidérine dérivée de la
lyse des globules rouges.
À ces macrophages s’associent des lymphocytes B, des lymphocytes T et leurs sous-groupes T4 helpers et T8 cytotoxiques [16], des plasmocytes sécrétant des IgA, IgG, IgM.
Fibres et substance fondamentale
On distingue deux types de fibres collagènes et élastiques,
enrobées dans une substance fondamentale riche en protéoglycanes, acide hyaluronique, protéines dérivées du sérum. Le
collagène est essentiellement de type I avec du collagène de
type IV dans la lame basale. Les fibres élastiques sont enrobées
dans une élastine formée de glycoprotéines et de microfibrilles.
En microscopie optique, elles sont colorées par l’orcéine de
Weigert.
Vaisseaux
Ils sont entourés d’une membrane basale à travers laquelle se
font les échanges entre tissu conjonctif et cellules endothéliales.
Ils peuvent être marqués par l’anticorps antifacteur VIII et la
phosphatase alcaline (Fig. 22). Ils participent activement à la
Médecine buccale
Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires ¶ 28-120-M-10
Figure 23. Glande salivaire accessoire labiale (biopsie) : glande séromuqueuse. Hématéine-éosine × 40.
Les acini déversent leur sécrétion dans les canaux excréteurs.
Dans ceux-ci, plusieurs segments sont individualisés :
• pièce intercalaire à bordure cellulaire cubique jeune, capable
dans des conditions pathologiques de régénérer à la fois les
cellules acineuses et les cellules myoépithéliales périphériques.
Elle joue un rôle fondamental dans la régénération ;
• canal strié dont les cellules sont très riches en mitochondries
invaginées dans des replis de la membrane plasmique basale.
Cette pièce est indispensable à la concentration du flux
salivaire (transport des électrolytes du sang vers la salive et
inversement) ;
• les canaux excréteurs, intra- et extralobulaires, sont revêtus
d’un épithélium cylindrique riche en mitochondries. Au
niveau de leur abouchement dans la muqueuse, leur bordure
épithéliale devient malpighienne.
Fonctions
Figure 24. Glande salivaire accessoire linguale de type muqueux.
Hématéine-éosine × 160.
cicatrisation. Ils peuvent se multiplier sous l’influence d’un
facteur angiogénique dans certaines conditions, en particulier
dans les cancers où ils contribuent à l’édification du stroma.
Nerfs
Ils sont de type sensitif. Leurs terminaisons pénètrent dans
l’épithélium.
■ Glandes salivaires accessoires
Elles représentent les annexes de la muqueuse buccale. Grâce
à leur sécrétion salivaire continue, elles assurent l’humidification permanente de la bouche. Très nombreuses, elles se
répartissent dans toute la muqueuse, y compris sur le versant
interne des lèvres, où leur abord biopsique est facile. En
fonction de leur type de sécrétion, on les classe en trois
groupes [17, 18] :
• les glandes séreuses de von Ebner sont enchâssées dans la
partie postérieure de la langue au contact du V lingual. Leurs
canaux excréteurs s’abouchent dans le sillon qui circonscrit la
base des papilles caliciformes ;
• les glandes séromuqueuses occupent la partie antérieure de la
langue et le versant interne ou muqueux des lèvres (Fig. 23).
Leurs acini sont en prédominance à sécrétion muqueuse ;
• les glandes muqueuses siègent sur les bords de la langue, le
voile et la voûte du palais, la racine de la langue, en arrière
du V lingual (Fig. 24).
Structure
De constitution superposable à celle des glandes principales,
elles comportent des lobules sécréteurs avec des acini formés de
cellules tantôt muqueuses, claires, vacuolisées, à PAS positif,
tantôt séreuses, sombres, finement granuleuses. Dans les glandes
à double sécrétion, acini muqueux et séreux peuvent être
juxtaposés ou plus souvent dans un même acinus, les cellules
séreuses, périphériques entourent les cellules muqueuses (image
en « croissant » de Gianuzzi). Dans toutes ces cellules, la
microscopie électronique objective une intense activité sécrétoire. Le noyau est situé à la base. Dans le cytoplasme, à son
contact, l’ergastoplasme granulaire et l’appareil de Golgi sont
très développés. Au pôle apical s’accumulent de nombreux
grains de sécrétion. Chaque acinus est entouré de cellules
myoépithéliales douées d’une activité musculaire contractile.
Médecine buccale
La salive sécrétée en permanence par ces glandes prévient les
infections de la muqueuse buccale. Dans cette fonction interviennent lysozyme, lactoferrine et Ig : le lysozyme et la lactoferrine sont des facteurs bactériostatiques, sécrétés par la salive.
En ce qui concerne les Ig, outre les IgA, IgG et IgM sécrétées par
les plasmocytes, l’IgA sécrétoire (molécule plus grosse que celle
de l’IgA sérique) est synthétisée localement par les glandes
salivaires. Libérée dans la salive, elle inhibe l’adhérence bactérienne à la muqueuse.
■ Muqueuse oropharyngée
La cavité buccale s’ouvre par l’isthme pharyngobuccal dans
l’oropharynx (ou mésopharynx). Cette région, carrefour aérodigestif, est en continuité vers le haut avec le nasopharynx,
prolongeant en arrière les fosses nasales, vers le bas avec
l’épiglotte et le larynx d’une part, avec l’hypopharynx et
l’origine de l’œsophage d’autre part.
Au niveau de l’isthme pharyngobuccal, la muqueuse est
identique à celle de la bouche : elle comporte un épithélium
malpighien non kératinisé, un chorion et une sous-muqueuse
lâches avec glandes annexes de type mucosécrétant. La particularité réside ici dans l’abondance des formations lymphoïdes
dont les plus volumineuses sont les amygdales palatines.
L’épithélium s’y invagine en récessus profonds et bifurqués, les
cryptes, engainés de gros manchons lymphoïdes pourvus de
centres germinatifs clairs. Des formations de plus petite taille, à
distance de ces amygdales principales, sont observées sur le
voile et la face postérieure de la langue. Tous ces îlots ont les
mêmes fonctions que les ganglions lymphatiques. Ils produisent
en effet des plasmocytes sécréteurs d’Ig.
Le nasopharynx est revêtu d’un épithélium cylindrique
pseudostratifié de type respiratoire, d’un chorion, d’une musculaire muqueuse en partie élastique et d’une sous-muqueuse.
Toutefois, notamment lors du vieillissement, sur la voûte
pharyngée, de nombreux secteurs de métaplasie malpighienne
apparaissent. Des glandes muqueuses sont partout annexées à
l’épithélium. Par ailleurs, les formations lymphoïdes sont
nombreuses. Elles constituent sur la paroi postérieure du
pharynx, notamment chez l’enfant, de vastes plages parfois
végétantes (végétations adénoïdes).
■ Maxillaires
Rappel anatomique
Les maxillaires constituent la majeure partie du squelette de
la face :
• le maxillaire inférieur, ou mandibule, est pourvu d’une
branche horizontale médiane et de deux branches montantes
droite et gauche. Celles-ci présentent à leur extrémité supérieure deux apophyses : le coroné et le condyle. Le condyle
s’articule avec l’os temporal (articulation temporomandibulaire) ;
7
28-120-M-10 ¶ Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires
Figure 25. Mandibule. Section perpendiculaire au rebord alvéolaire. Os compact constituant les deux corticales : os spongieux au
centre. Hématéine-éosine × 60.
Figure 27. Os compact : tissu osseux non décalcifié traité par usure :
lamelles concentriques avec ostéocytes en périphérie d’un canal de Havers. Grossissement × 160.
Figure 26. Os compact : canaux de Havers avec ostéocytes.
Hématéine-éosine × 160.
Figure 28. Os spongieux : travée osseuse creusée de logettes ostéocytaires et lacunes de moelle osseuse. Hématéine-éosine × 240.
• le maxillaire supérieur (ou massif facial), de structure beaucoup plus complexe, apparaît creusé sur la ligne médiane des
fosses nasales. Il forme le plancher de l’orbite en haut. Il
présente deux cavités sinusiennes latérales, les sinus
maxillaires.
Ces deux pièces osseuses ont en commun, en regard des
gencives, un os particulier, l’os alvéolaire où sont enchâssées les
dents.
Structure histologique
Le corps de ces deux pièces squelettiques comporte, comme
dans tout os de membrane, une corticale où prédominent les
processus d’ostéoformation et de modelage de l’os, une spongieuse où la résorption osseuse prépondérante crée une structure
trabéculaire autour d’espaces médullaires larges (Fig. 25).
Physiologiquement, le périoste, gaine collagène riche en
fibroblastes, sépare la corticale des tissus mous. Il produit, sur sa
face interne, une matrice protéique qui se minéralise secondairement par cristaux d’hydroxyapatite (ossification périostée).
Cette ossification primaire subit un remodelage par l’intermédiaire des canaux de Havers qui, disposés autour de vaisseaux,
édifient des lamelles osseuses concentriques (ossification
endostale). Parallèlement, la résorption osseuse, également
permanente, s’effectue selon deux mécanismes :
• les cellules multinucléées (myéloplaxes), qui creusent des
logettes de résorption (lacunes de Howship) à la périphérie de
la substance osseuse ;
• les ostéocytes qui lysent la paroi de leurs logettes (ostéolyse
périostéocytaire).
Le cortex, formé d’os compact, est recouvert d’un mince tissu
fibreux, le périoste. On y trouve les canaux de Havers, espaces
circulaires, entourés de six à 12 lamelles osseuses concentriques
séparées par des lignes d’apposition et peuplées de couronnes
d’ostéocytes (Fig. 26, 27). La spongieuse est constituée de
trabécules bordées d’ostéoblastes et creusées de logettes contenant des ostéocytes (Fig. 28). Ces travées, dont la trame
fibrillaire est régulière avec des fibres parallèles bien visibles en
lumière polarisée, délimitent les lacunes de moelle osseuse
adipeuse et hématopoïétique.
8
Figure 29. Os alvéolaire : section perpendiculaire avec dent enchâssée
dans la loge alvéolaire ; lamina dura à gauche ; os spongieux à droite.
Hématéine-éosine × 40.
Au niveau de l’articulation
temporomandibulaire [19]
Le cartilage articulaire fait suite à l’étui périostique. Dans cette
articulation de type diarthrosique, chaque extrémité osseuse
possède un capuchon de cartilage hyalin. La capsule qui les
entoure comporte une tunique fibreuse, matelassée par les
tendons et aponévroses avec, à son contact, des corpuscules
proprioceptifs et une tunique interne, la synoviale, lubrifiant
par sa sécrétion mucoprotéique les surfaces articulaires.
Os alvéolaire
Situé sous la gencive des deux maxillaires, l’os alvéolaire est
creusé d’alvéoles dans lesquelles s’implantent les racines
dentaires (Fig. 29). Il appartient au parodonte, constitué en
dedans par le cément de la racine dentaire et en haut par la
gencive. Entre cément et os alvéolaire sont tendus les faisceaux
collagènes du ligament périodontal qui s’implantent à l’intérieur de l’os alvéolaire comme dans le cément par leurs fibres de
Sharpey.
Cet os est constitué d’une mince lame d’os compact (lamina
dura) (Fig. 30). Ce tissu haversien est formé de lamelles enroulées concentriquement autour de petites cavités. Il s’y produit
Médecine buccale
Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires ¶ 28-120-M-10
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Figure 30. Os alvéolaire : lamina dura à droite ; à gauche, cément
radiculaire ; entre les deux, quelques faisceaux collagènes et vaisseaux du
ligament périodontal. Hématéine-éosine × 240.
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en permanence des phénomènes d’ostéoformation et d’ostéodestruction intenses lui conférant souvent un aspect « pagétoïde ». Ce remodelage explique l’adaptation aux phénomènes
mécaniques que subissent les dents :
• sous l’effet d’une pression, il se produit une résorption
osseuse ;
• sous l’effet d’une traction, il apparaît une ostéogenèse.
Il conditionne également la pratique de traitements orthodontiques. L’os spongieux de soutien est constitué de lamelles
osseuses grêles et de lacunes conjonctives larges contenant la
moelle osseuse.
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L’article original a été publié en première parution dans le traité EMC
Stomatologie, 22-007-M-10, 1998.
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■ Références
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M.-M. Auriol, Maître de conférences universitaire, assistant des Hôpitaux.
Y. Le Charpentier, Professeur, chef de service.
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Auriol M.-M., Le Charpentier Y. Histologie de la muqueuse buccale et des maxillaires. EMC (Elsevier
Masson SAS, Paris), Stomatologie, 22-007-M-10, 1998, Médecine buccale, 28-120-M-10, 2008.
Disponibles sur www.em-consulte.com
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